En cours au Siège de l'ONU

CPSD/220

AUDITION DU MINISTRE PRINCIPAL DE GIBRALTAR ET DE PETITIONNAIRES SUR LES QUESTIONS DE GIBRALTAR ET DU SAHARA OCCIDENTAL

10/10/2001
Communiqué de presse
CPSD/220


Quatrième Commission

5e séance – matin


AUDITION DU MINISTRE PRINCIPAL DE GIBRALTAR ET DE PETITIONNAIRES

SUR LES QUESTIONS DE GIBRALTAR ET DU SAHARA OCCIDENTAL


La Quatrième Commission a poursuivi ses travaux ce matin, avec l’audition de représentants de Gibraltar et de pétitionnaires s’exprimant sur les questions du Sahara occidental et de Gibraltar.  Ces interventions ont été l’occasion de réaffirmer le droit à l’autodétermination des peuples de ces territoires non autonomes.


Ainsi, le Ministre principal de Gibraltar, M. Peter Caruana a réaffirmé qu’il n’existe pas dans le processus de décolonisation d’autre alternative à l’autodétermination.  A ce titre, il a précisé que contrairement à ce que dit l’Espagne, il n’existe pas dans le droit international ou dans la doctrine des Nations Unies la moindre théorie appliquant le principe de l’intégrité territoriale à une situation de décolonisation.  M. Caruana a rappelé la position du peuple de Gibraltar, à savoir qu’il n’acceptera jamais de compromis et n’abandonnera jamais son droit à l’autodétermination. Ce faisant, il a demandé à la Commission d’amender la résolution annuelle adoptée par consensus afin qu’elle reconnaisse le droit du peuple de Gibraltar à la décolonisation en accord avec le principe de l’autodétermination, et son droit à une voix distincte dans tout dialogue sur Gibraltar.  S’il y a un doute quelconque dans l’esprit de la Commission sur notre droit à l’autodétermination, a-t-il ajouté, cette question doit être portée devant la Cour internationale de Justice pour qu’elle rende un avis éclairé.  Enfin, il a invité le Comité spécial de la décolonisation à se rendre à Gibraltar pour vérifier les faits et appréhender la réalité de Gibraltar et de son peuple.  Faisant écho à ces propos, le chef de l’opposition de Gibraltar, M. Bossano, a précisé que le peuple de Gibraltar souhaitait élaborer avec le Royaume-Uni une nouvelle constitution qui décolonisera Gibraltar et permettra ainsi de le retirer de la liste du Comité.


Sur la question du Sahara occidental, les intervenants ont condamné les tentatives visant à abandonner la mise en œuvre du Plan de règlement au profit du projet d’accord-cadre accordant une certaine autonomie au peuple sahraoui dans le respect de l’intégrité territoriale marocaine.  Ils ont réaffirmé que la solution à la question du Sahara occidental passait par l’organisation d’un référendum libre et impartial d’autodétermination du peuple sahraoui.  A cet égard, le représentant du Front a réaffirmé que ce dernier rejetait ladite “troisième voie” prévoyant qu’à la suite d’une période de cinq ans pendant laquelle la puissance occupante bénéficierait de l’entière souveraineté sur le territoire, se tiendrait un référendum sur le statut final auquel pourrait participer un citoyen marocain ayant résidé dans le territoire un an avant le référendum.  Cette proposition


marocaine, a-t-il dit, n’aboutirait qu’à un “référendum de confirmation” de l’occupation marocaine qui est l’idée poursuivie par le Maroc depuis le début du Plan de règlement.  Rappelant que le Front a présenté des propositions visant à surmonter les obstacles qui se posent à la mise en œuvre du Plan de règlement, il a appelé le Secrétaire général et son Envoyé personnel à chercher des solutions au conflit dans le cadre du Plan de règlement et non pas contre celui-ci.  Le Maroc, a-t-il affirmé, veut que le Sahara occidental soit l’exception à la règle générale de la décolonisation.  Le peuple du Sahara occidental n’abandonnera sa lutte, ni aujourd’hui, ni demain, et continuera de défendre son droit à l’indépendance.


Sur la question de Gibraltar, M. Peter Caruana, Ministre principal de Gibraltar, a pris la parole en tant que représentant du territoire.  M. Joe Bossano, chef de l’opposition de Gibraltar et M. Bryan Zammit, président de l’Association pour les Nations Unies à Gibraltar se sont exprimés en tant que pétitionnaires. 


Sur la question du Sahara occidental, la Commission a entendu les pétitionnaires suivants : M. Antonio Lopez Ortiz, Secrétaire de Federacion Estatal de Instituciones Solidarias con el Pueblo Saharaui ; M. Felipe Briones Vives, de l’Association internationale de juristes pour le Sahara occidental; Mme Anna Maria Badia Marti, professeur de droit international ; M. Jose Miguel Barragan Cabrera, député du Parlement des Canaries (Espagne) ; M. Francisco Jose Alonzo Rodriguez, Président de la Ligue espagnole des droits de l’homme ; M. Miguel Mayol I Raynal, membre du Parlement européen; et M. Ahmed Boukhari, du Frente popular para la Liberacion de Saquia el-Hamra y de Rio de Oro (Front). 


La Quatrième Commission se réunira à nouveau vendredi 12 octobre, à partir de 15 heures.



Audition d’un représentant des territoires non autonomes


M. PETER CARUANA, Ministre principal de Gibraltar, a déclaré que depuis 1992, lui-même et son prédécesseur avaient présenté à la Commission bien des requêtes et des plaidoiries.  Aucune n’a reçu de réponse ou de commentaires et bien plus, aucune décision n’a été prise par cette Commission ou par le Comité spécial de la décolonisation dans ce domaine.


La Commission, a poursuivi M. Caruana, s’est limitée à adopter comme chaque année la même résolution qui représente un consensus de toute évidence inefficace, et qui semble ignorer tout ce qui est dit au nom du peuple de Gibraltar.  Nous avons démontré que Gibraltar figure sur la liste des Nations Unies des territoires non autonomes, et que par conséquent, selon les Nations Unies et la Cour internationale de justice, il n’existe pas dans le processus de décolonisation d’autre alternative à l’autodétermination.  Nous avons également démontré, que selon la Cour internationale de justice, ces principes s’appliquent à tous les territoires non autonomes, sans exception.  Malgré cela, ces points n’apparaissent pas dans votre résolution annuelle, pas plus qu’ils ne sont réfutés par les Nations Unies.


Nous avons démontré, a dit M. Caruana, que contrairement à ce que dit l’Espagne, il n’existe pas dans le droit international ou dans la doctrine des Nations Unies la moindre doctrine ou le moindre principe appliquant le principe de l’intégrité territoriale à une situation de décolonisation.  Nous avons démontré que l’exercice du droit à l’autodétermination par le peuple de la colonie de Gibraltar ne provoquerait pas la désintégration de l’Etat de l’Espagne puisque cela s’est déjà produit il y a 297 ans en 1704.  Dans ce contexte, l’Espagne passe outre aux droits du peuple de Gibraltar selon la Charte des Nations Unies et particulièrement à notre droit inaliénable à l’autodétermination.


Il existe de toute évidence un conflit territorial, au vu de la position de l’Espagne revendiquant la souveraineté de Gibraltar bien qu’elle l’ait perdue militairement puis l’ait cédée à perpétuité dans le même Traité dont elle se sert  pour nous dénier le droit à l’autodétermination.


Dans sa tentative désespérée de vous persuader que nous ne sommes pas un peuple digne, l’Espagne avance une série de faits erronés.  Que par exemple, notre système financier et nos réseaux d’entreprises sont opaques : c’est faux, nous observons la juridiction européenne; que nous procédons au blanchiment de l’argent sale, c’est encore faux.  Un Traité vieux de 300 ans peut-il empêcher le droit à l’autodétermination du peuple de Gibraltar ?  Ni les faits ni le droit international n’appuient la position de l’Espagne face à Gibraltar.  Il est clair que l’Espagne est prête à voir se perpétuer le colonialisme à Gibraltar plutôt que d’accepter un compromis sur sa souveraineté.


En juillet dernier, a poursuivi M. Caruana, l’Espagne et le Royaume-Uni ont déclaré qu’ils étaient prêts à donner une nouvelle impulsion aux négociations, Dans cette perspective, nous devons être présents à tout dialogue, en tant que voix à part, a insisté le délégué de Gibraltar.  M. Caruana a ensuite rappelé l’essentiel de la position de Gibraltar : le peuple de Gibraltar n’acceptera jamais de compromis et n’abandonnera jamais son droit à l’autodétermination; Gibraltar souhaite entretenir de bonnes relations avec l’Espagne basées sur un dialogue raisonnable, le respect mutuel et le respect de nos droits au sein de la Communauté européenne et ailleurs; Gibraltar appartient au peuple de Gibraltar, l’Espagne n’a pas à le revendiquer ni le Royaume-Uni à s’en débarrasser.

Je demande, a conclu le délégué de Gibraltar, que vous amendiez la résolution annuelle prise par consensus afin qu’elle reconnaisse le droit du peuple de Gibraltar à la décolonisation en accord avec le principe de l’autodétermination et notre droit à une voix distincte dans tout dialogue sur Gibraltar.  S’il y a un doute quelconque dans l’esprit de la Commission sur notre droit à l’autodétermination, cette question doit être portée devant la Cour internationale de justice pour qu’elle rende un avis éclairé.  Enfin, j’invite le Comité spécial de la décolonisation à se rendre à Gibraltar pour vérifier les faits et appréhender la réalité de Gibraltar et de son peuple.


Audition de pétitionnaires sur la question de Gibraltar


M. JOE BOSSANO, Chef de l’opposition de Gibraltar, a déclaré que le peuple de Gibraltar est à l’évidence un peuple colonial et ce quoi qu’en dise l’Espagne.  Il a dénoncé le processus de Bruxelles entre le Royaume-Uni et l’Espagne et remet en question le processus de négociations et leurs positions sur la question.  Il a mis au défi le représentant du Royaume-Uni de déclarer que relancer le processus de Bruxelles n’est pas relancer le processus visant à décoloniser Gibraltar en accord avec l’Espagne.  La question qui est devant nous est celle de notre décolonisation, de notre souveraineté et de notre autodétermination, a -t-il déclaré.  On nous dit qu’il n’y pas d’alternative au processus de Bruxelles et que le statut constitutionnel de notre territoire n’est pas viable.  Mais c’est notre avenir constitutionnel qui est en jeu dans ces négociations, a-t-il déclaré.  Exercer des pressions sur un peuple colonial pour l’influencer dans son vote sur la question de son statut futur est interdit par les Nations Unies et je condamne le Royaume-Uni de tenter de le faire, a-t-il dit.  L’Espagne a déclaré qu’elle étudiait une coopération qui permettrait un partage des compétences pour établir un régime de cosouveraineté sur le rocher.  La coopération ne signifie pas faire des concessions pour voir l’Espagne lever les restrictions qui ont été imposées.  La réponse à ces déclarations a été donnée la semaine dernière par le peuple de Gibraltar au cours d’une manifestation.  Nous disons non à l’Espagne et nous disons non à la relance du processus de Bruxelles.  Le Royaume-Uni espère que l’Espagne réussira ces 15 prochains mois à faire ce qu’elle a échoué à faire ces 16 dernières années.  Cela n’arrivera pas ces 15 prochains mois, et cela n’arrivera pas du tout, a déclaré M. Bossano.  Nous ne voulons pas maintenir le statu quo.  Ce que nous souhaitons c’est nous mettre d’accord avec le Royaume-Uni sur une nouvelle constitution qui décolonisera Gibraltar et permettra ainsi de le retirer de la liste du Comité.  Nous voulons que l’ONU s’engage dans ce processus.  Voilà, pour nous, l’alternative au processus de Bruxelles, a-t-il affirmé.


M. Bossano a comparé la situation sur le territoire à une situation d’apartheid.  S’adressant aux membres de la Commission, il a déclaré : “Ce que vous devriez demander à la puissance coloniale, c’est de traiter les “gibraltariens” de la même manière que bon nombre d’entre vous avez été traités lorsque vous luttiez pour vous libérer du joug colonial.  Tant que vous n’accepterez pas cette réalité, le problème de la décolonisation de Gibraltar subsistera, a-t-il conclu. 


M. BRYAN ZAMMIT, Président de L’Association pour les Nations Unies à Gibraltar, a d’abord indiqué que son association suivait les mêmes principes et objectifs que les Nations Unies et était la principale ONG à défendre la Charte des Nations Unies.  Il a déclaré qu’il avait informé le Comité des 24 que le


peuple de Gibraltar dépendait du soutien des Nations Unies et que pourtant, rien n’avait été fait; Qu’il avait expliqué au Comité des 24 que les principes fondamentaux des Nations Unies n’étaient pas respectés puisque la demande constante de Gibraltar à ce que justice lui soit fait était ignorée.


M. Zammit a affirmé que le peuple de Gibraltar était devenu un pion dans une partie d’échecs qui oppose deux joueurs de haut niveau.  Le problème, a-t-il dit, est qu’il ne peut y avoir que deux joueurs dans une partie d’échecs.  Le peuple de Gibraltar a un droit humain, civil et moral à déterminer son avenir.  Notre force et notre futur sont dans les mains des Nations Unies.  Le peuple de Gibraltar subit constamment des pressions, des humiliations, des rejets.  M. Zammit en a cité quelques exemples : Gibraltar ne peut pas posséder d’aéroport international sans en partager le contrôle avec l’Espagne.  L’octroi de lignes de téléphone à Gibraltar est délibérément limité.  « Il y a plusieurs façons d’exterminer un peuple, la façon la plus efficace politiquement est de toute évidence celle qui est pratiquée à l’encontre des habitants de Gibraltar » a déclaré M. Zammit.  Nous formons une nation démocratique qui croit au dialogue et à une solution pacifique mais le peuple de Gibraltar ne discutera jamais de la perte de son identité.  Si les Nations Unies continuent d’ignorer nos revendications, a dit M. Zammit, comme cela a été le cas depuis 37 ans, alors vous brisez le principe fondamental que cette institution défend.  Le Royaume-Uni et l’Espagne ont l’obligation, en tant que membres à part entière des Nations Unies et de l’Union européenne, de respecter le souhait du peuple de Gibraltar.


Audition de pétitionnaires sur la question du Sahara occidental


M. ANTONIO LÓPEZ ORTIZ, Secrétaire de la Fédération espagnole d’institutions solidaires du peuple sahraoui, a rappelé qu’il était important de garder à l’esprit que toutes les résolutions de l’Assemblée générale depuis 1960 ont réaffirmé la nécessité de décoloniser le Sahara occidental sur la base du respect du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance.  Dans ce contexte, il a regretté que depuis la décision prise par les Nations Unies d’organiser un référendum sur l’autodétermination en 1992, 9 ans aient passé et que le problème, non seulement persiste, mais menace aussi de se transformer en une confrontation armée et mène à une situation réellement explosive.  Il a poursuivi qu’en dépit de la signature des accords d’Houston entre le Front Polisario et le Royaume du Maroc, M. James Baker, Envoyé personnel pour le Sahara occidental de M. Kofi Annan, n’a pas réussi à éliminer les obstacles pour faire échouer l’organisation du référendum sur l’autodétermination et du Plan de règlement.


M. López Ortiz a regretté que le Royaume du Maroc ne soit toujours politiquement pas prêt à respecter les accords des Nations Unies et le droit international.  Il a posé la question de savoir pourquoi les Nations Unies ne prenaient pas les mesures nécessaires pour corriger la situation et sa politique au Sahara occidental.  Il a fait remarquer que l’ONU devait prendre les mesures politiques et économiques nécessaires afin de contraindre le Maroc à respecter le plan de paix ou alors elle se verrait contrainte de reconnaître son échec et perdrait sa crédibilité.  Le représentant a affirmé que, selon son organisation, il n’y avait pas d’autre alternative au renforcement de la paix dans la région que le respect du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.  Enfin, il a souligné que la communauté internationale, et l’ONU en particulier, ainsi que l’Union européenne, étaient très tolérants à l’égard du Maroc.


M. FELIPE BRIONES VIVES, Association internationale des juristes pour le Sahara occidental, a rappelé que le Secrétaire général a, dans ses derniers rapports au Conseil de sécurité, parlé pour la première fois du Maroc en tant que puissance administrante, statut qui devrait revenir à l’Espagne puisque le processus de décolonisation du territoire est en cours.  Le Maroc est une Puissance occupante.  En aucun cas l’occupation n’implique transfert de souveraineté, a-t-il déclaré.  Le Sahara occidental est un territoire non autonome qui relève de l’Article 73 de la Charte et a un statut distinct de la Puissance administrante jusqu’à ce que sa population ait pu exercer son droit à l’autodétermination.  Le Secrétaire général a indiqué dans son dernier rapport que le Maroc se proposait de donner une certaine dévolution de l’autorité gouvernementale, ce qui va à l’encontre du principe de l’autodétermination.  Ni le Secrétaire général ni le Conseil de sécurité ne peuvent changer la nature du Plan de règlement dont le but est l’organisation d’un référendum libre et impartial d’autodétermination du peuple sahraoui, a-t-il affirmé.  On cherche à transformer l’autodétermination en prédétermination et l’indépendance en une autonomie, a-t-il déclaré en mettant en garde sur le fait que si on retirait le Plan de règlement il y aurait un conflit de décolonisation.  Selon le plan de paix, seuls les électeurs identifiés par l’ONU pourront participer au référendum, or le projet d’accord-cadre ne prend pas en compte les électeurs identifiés par la MINURSO, a-t-il poursuivi.  Si l’on veut prendre une nouvelle direction, il faut l’assentiment des deux parties.  S’adressant aux membres de la Commission il a déclaré “Vous ne pouvez pas accepter que l’on tronque quarante ans de doctrine d’autodétermination”.  Le peuple sahraoui doit pouvoir conserver son droit à l’autodétermination, a-t-il déclaré.  Il faut trouver rapidement une solution juste pour le Maghreb.  


Mme ANNA BADIA MARTI, Professeur de droit international public, Université de Barcelone, rappelant que la question du Sahara occidental restait en suspens depuis 45 ans, a estimé que les tentatives de la résoudre avaient été marquées par une approche ambivalente, fondée à la fois sur le principe de l'autodétermination en vertu duquel les Nations Unies ont une série de responsabilités, en particulier la préparation d'un référendum, et sur le fait que, s'agissant d'un territoire occupé, la Quatrième Convention de Genève (1949) impose à la Puissante occupante un certain nombre d'obligations envers les peuples de ce territoire.  La réalité a montré que l'ONU a été obligée, en raison de l'occupation du Maroc, de requérir la participation de la puissante occupante.  Elle a été obligée de rechercher l'appui des parties en présence pour faire appliquer son Plan de règlement.


Cependant l'Organisation a agi en traitant la question du Sahara Occidental comme un processus d'autodétermination, dans lequel la participation des deux parties est requise, celle de la puissance occupante et celle des peuples coloniaux.  Néanmoins, il n'y avait aucune obligation légale contraignante comme c'est habituellement le cas dans les processus de paix.  La situation est devenue plus étrange dans la mesure où les tierces parties n'ont pas été sollicitées pour garantir l'application du Plan de règlement.  C'est pourquoi, a poursuivi Mme Badia Marti, nous plaidons en faveur d'un cadre légal international, fondé sur le principe de l'autodétermination des peuples; sur l'application de la Quatrième Convention de Genève de 1949, notamment les chapitres relatifs à la protection des populations civiles dans des territoires occupés; et sur la mise en oeuvre d'un règlement pacifique de la question en accord avec les dispositions de la Charte des Nations Unies.


M. JOSE MIGUEL BARRAGAN CABRERA, député du Parlement des Canaries, a déclaré, concernant la question du Sahara occidental, que le projet d’accord-cadre semblait favoriser la volonté d’intégration d’une des parties, en l’occurrence le Maroc. Il faut écarter cette idée de projet d’accord-cadre et privilégier le Plan de règlement, a souligné M. Cabrera, d’autant que des progrès significatifs ont été faits.


Malgré la controverse entre les parties concernant l’identification des électeurs, des avancées ont été réalisées.  Pourquoi le Maroc met-il en doute ce processus d’identification s’est interrogé le député du Parlement des Canaries.  Le Plan de règlement a été clairement accepté par le Polisario.  Nous attendons une position semblable du Maroc.  Nous croyons fermement que la seule solution possible qui soit pacifique, est le respect du Plan de règlement.  Le peuple sahraoui ne fera jamais partie du grand Maghreb dont rêvent les autorités marocaines parce que tout simplement ce peuple n’est pas marocain, a dit M. Cabrera.  Le spectre de la guerre est à redouter, nous lançons un appel pour que les efforts diplomatiques soient redoublés sinon nous allons nous trouver devant un échec des objectifs de l’ONU.


M. FRANCISCO JOSE ALONSO RODRIGUEZ, Président de la Ligue espagnole des droits de l’homme, a déclaré que plus le temps passe plus le désespoir augmente, de même que les craintes quant à une solution équilibrée et juste au différend.  Le processus de paix au Sahara occidental est complètement bloqué.  La raison de ce blocage est peut être le nombre des recours déposés par le Maroc, a-t-il dit.  L’attitude des Nations Unies, par le biais du Secrétaire général, a permis de transformer la phase des recours en une seconde phase d’identification favorisant ainsi le Maroc.  Ce processus s’assimile à la fraude.  Nous sommes témoins d’un glissement politique contraire au droit international, a-t-il dit.  Les Nations Unies ont renoncé au processus de paix en appuyant le processus d’intégration voulu par le Maroc.  Cela présuppose que l’on vise à nier le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.  La Ligue réaffirme que le Maroc est une puissance occupante et que le Sahara occidental est un territoire non autonome.  Elle recommande que le Secrétaire général suive la ligne du Plan de paix et exige un examen de la majorité des recours.  A cet égard, a-t-il précisé, il conviendra de rejeter la recevabilité de ce qui n’est pas acceptable.  L’abandon du processus de paix jetterait le doute sur les fondements des Nations Unies et avoisinerait l’illégalité.  La Ligue rejette la troisième voie qui vise à donner au peuple sahraoui une certaine autonomie.  La seule voie est l’exercice de l’autodétermination.  Le référendum est la solution intermédiaire entre les aspirations du Maroc et du peuple sahraoui.  Nous rejetons toute solution qui nierait le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.  A ce titre, la Ligue considère que les droits du peuple sahraoui ne seront pas respectés tant qu’il n’aura pas pu exercer son droit à l’autodétermination par le biais d’un référendum libre et impartial.  La ligue condamne également l’exploitation illégale des ressources naturelles du territoire, a-t-il souligné.  A cet égard, la Ligue attend encore la réponse à la lettre qu’elle a adressée au Secrétaire général.  La paix doit être imposée par les Nations Unies par les mécanismes juridiques établis, a-t-il conclu. 


M. MIGUEL MAYOL I RAYNAL, Membre du Parlement européen, représentant l’intergroupe Pays pour le peuple sahraoui, a déclaré défendre le droit légitime du peuple sahraoui à l’autodétermination et a dénoncé la façon dont les Nations Unies elles-mêmes œuvrent à l’encontre de leur mission et de l’opinion internationale que représentent toutes les résolutions de l’ONU votées au sujet du Sahara occidental depuis près de 40 ans.  Le Secrétaire général, aidé de son Représentant personnel, tente activement d’imposer une solution qui élude toute légalité internationale, a-t-il déclaré.  Je veux parler ici de la fameuse “troisième voie”, connue aussi sous le nom de plan d’autonomie et d’accord-cadre, a-t-il dit en ajoutant qu’il s’agit d’un projet illégal et honteux revenant à l’intégration forcée du Sahara occidental à la Puissance occupante, le Maroc.  Le Secrétaire général a tenté, dans son rapport de juin au Conseil de sécurité, de se débarrasser du plan de paix de 1991 en piétinant les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies.  A la suite des pressions émanant de la communauté internationale, le Conseil de sécurité a choisi d’adopter une résolution ambiguë prenant note des propositions soumises par le Front Polisario pour dépasser les obstacles actuels à l’application du plan de paix de l’ONU de 1991 et autorisant la poursuite de consultations sur ce projet d’accord-cadre.  Il n’est pas surprenant que les discussions de Pinedale aient été un échec puisque l’une des parties en conflit, le Front Polisario, ne considère même pas que le projet d’accord-cadre puisse fournir une base de négociations.  Cet échec vient après bien d’autres, a-t-il poursuivi en déclarant que le Secrétaire général et M. James Baker n’ont pas été capables de remettre le référendum sur les rails.  Ils n’ont pas non plus été capables d’identifier la partie réellement responsable des retards de la tenue du référendum, a-t-il dit.  Au lieu de cela, a-t-il poursuivi, M. James Baker a fait siennes les propositions du Maroc et a proposé une forme d’autonomie pour une période de 5 ans au bout de laquelle il y aurait un référendum.  Placer le moindre espoir dans ce plan est tout simplement impossible, a-t-il déclaré.  Il est grand temps que le Secrétaire général et son Représentant personnel commencent à travailler sérieusement et concrètement à l’application du plan de paix de l’ONU de 1991.  Cette mise en œuvre est possible, a-t-il déclaré en ajoutant que contrairement à ce que le Maroc et ses alliés prétendent, la Minurso a réalisé un objectif crucial en établissant une liste des électeurs, ce qui est la pierre angulaire du plan de règlement de paix de l’ONU.  Le référendum peut avoir lieu demain car la seule chose qui en empêche la tenue jusqu’à présent est le manque de volonté politique, a-t-il affirmé. 


Concluant, le pétitionnaire a déclaré qu’il est grand temps que les Nations Unies se rendent compte qu’il n’y a pas de “troisième voie” ni aucune autre option pour créer une paix juste et durable au Sahara occidental.  Toute tentative pour imposer une “troisième voie” ne pourra que mener à une reprise des hostilités militaires, a-t-il dit.  Le seul espoir de paix et de stabilité au Sahara occidental est l’application stricte et complète du plan de paix de l’ONU de 1991 et la tenue d’un référendum d’autodétermination libre et transparent pour le peuple sahraoui.  Puisque le droit à l’autodétermination est un des droits universels reconnus par les Nations Unies, a-t-il dit, le devoir le plus urgent de cette organisation est de le défendre et de le promouvoir. 


M. AHMED BOUKHARI, Frente popular para la Liberacion de Saqui el-Hamra y de Rio de Oro (Front), a rappelé que la MINURSO a publié le résultat du processus d’identification des votants en février 2000 et que ce processus a coûté à l’ONU 6 années d’efforts et 600 millions de dollars.  A partir de là, il restait à mettre en oeuvre les autres phases du Plan de règlement conformément aux Accords de Houston, a-t-il dit en ajoutant que cela n’a pas été possible en raison des manœuvres d’obstructions du Maroc qui a déposé quelque 130 000 recours.  Le Maroc, a-t-il poursuivi, à partir du moment où il a pris conscience que le processus d’autodétermination mènerait à l’indépendance du Sahara occidental, a décidé de cesser de mettre en œuvre le Plan de règlement et les Accords de Houston.  Le Maroc a donc tenté d’influencer les Nations Unies en vue de rechercher d’autres solutions, contrevenant ainsi au droit international et à l’esprit et à la lettre du Plan de règlement.  De plus, depuis cette date, le Secrétaire général a fait preuve, dans ses rapports au Conseil de sécurité, de pessimisme et a minimisé les progrès accomplis.  La question des recours est présentée dans les rapports du Secrétaire général comme une question insurmontable.  Cet exercice d’autoflagellation et d’exagération des problèmes vise en fait à dissimuler l’attitude non coopérative du Maroc qui est présentée comme quelque chose contre quoi l’ONU est impuissante.  Le but de ladite “troisième voie” est de légitimer un processus contrevenant au principe du droit à l’autodétermination et au Plan de règlement.


En mai dernier, le Front a rencontré l’Envoyé personnel du Secrétaire général dont il a reçu les propositions au contenu et aux objectifs inacceptables.  Selon ces propositions, connues sous le nom de “projet d’accord-cadre”, à la suite d’une période de cinq ans pendant laquelle la puissance occupante bénéficierait de l’entière souveraineté sur le territoire, se tiendrait un référendum sur le statut final auquel pourrait participer un citoyen marocain ayant résidé dans le territoire un an avant le référendum.  Cette proposition présente le “référendum de confirmation” de l’occupation marocaine qui est l’idée que poursuit le Maroc depuis le début du Plan de règlement.  Le Front considère que cette proposition est inacceptable.  Il a présenté en juin dernier au Secrétaire général de nouvelles propositions pour surmonter les problèmes, réels ou artificiels, suscités par le Maroc pour retarder la tenue du référendum.  Ces propositions ont pour objectif de permettre au Secrétaire général et au Conseil de sécurité de poursuivre la mise en œuvre du Plan de règlement.  Le Front considère qu’il faut désormais se concentrer sur la recherche de mécanismes imaginatifs pour surmonter les obstacles qui se posent à la mise en œuvre du Plan de règlement, mais que ces efforts doivent se faire dans le cadre de ce plan et non pas contre lui.  S’éloigner de la mise en œuvre du Plan de règlement revient à retourner en arrière au point de départ du conflit armé.


Le processus de décolonisation du Sahara occidental fait face à un test historique.  Il est clair, a-t-il dit, que le Maroc veut que le Sahara occidental soit l’exception à la règle générale de la décolonisation.  Le peuple du Sahara occidental n’abandonnera pas, ni aujourd’hui, ni demain, et continuera de défendre son droit à l’indépendance.  Dans ce contexte, toute illusion du contraire est une perte de temps et d’énergie, a-t-il déclaré.  Nous exhortons le Maroc, qui constitue le principal obstacle sur la voie de la paix, à respecter ses obligations en vertu du Plan de règlement.  Nous exhortons les Nations Unies à poursuivre les efforts déployés en vue d’une solution pacifique à un conflit de décolonisation afin que le peuple sahraoui puisse effectivement exercer son droit à l’autodétermination.  La recherche d’autres solutions, comme les accords de Madrid et le projet d’accord-cadre, a montré ses limites.  Elles sont simplement injustes et inacceptables et ne sont pas des solutions.  Les Nations Unies ne doivent pas, au nom d’intérêts cachés de type colonialiste, être amenées à jouer le rôle de Ponce Pilate par rapport à leurs propres résolutions.  Il est temps de revenir au Plan de règlement et de le mettre en œuvre strictement, a- t-il conclu.


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