LA CONFÉRENCE D'EXAMEN DES ÉTATS PARTIES À LA CONVENTION SUR LES ARMES BIOLOGIQUES POURSUIT SON DÉBAT GÉNÉRAL
Communiqué de presse CD/G/514 |
LA CONFÉRENCE D'EXAMEN DES ÉTATS PARTIES À LA CONVENTION SUR LES ARMES BIOLOGIQUES POURSUIT SON DÉBAT GÉNÉRAL
Genève, le 27 novembre -- La cinquième Conférence d'examen des États parties à la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction - plus connue sous le nom de Convention sur les armes biologiques - a poursuivi, cet après-midi, son débat général.
Les intervenants ont mis l'accent sur l'importance d'adopter une approche multilatérale en matière de désarmement international, notamment s'agissant des questions liées au renforcement de la Convention sur les armes biologiques. Plusieurs orateurs ont souhaité que soient relancés les efforts visant l'élaboration d'un projet de protocole destiné à renforcer le régime de vérification de la mise en œuvre de la Convention.
Ont pris la parole les représentants de Cuba, de la Nouvelle-Zélande, du Brésil, de la Croatie, du Canada, de la République islamique d'Iran, de la Fédération de Russie et de la Jamahiriya arabe libyenne.
L'Iraq, l'Iran et la Libye ont exercé leur droit de réponse suite à la déclaration faite ce matin par les États-Unis.
La Conférence poursuivra son débat général demain matin, à 10 heures.
Aperçu des déclarations
M. CARLOS AMAT FORES (Cuba) a déclaré que la Convention sur les armes biologiques ne pourra être renforcée que dans un cadre multilatéral universel et que toute tentative unilatérale de la part d'un État ou d'un petit groupe d'États ne pourrait que porter atteinte au cadre juridique international sur lequel doit reposer le renforcement de la Convention. De la même manière, a poursuivi M. Amat Fores, la lutte contre le bioterrorisme ne pourra réussir qu'en adoptant une approche multilatérale afin d'assurer la transparence et d'instaurer la confiance qui sont indispensables. L'Ambassadeur cubain a par ailleurs indiqué que, selon lui, le mandat du Groupe de travail ad hoc reste pertinent. Cuba tient à souligner que son attitude de fermeté sur ces questions procède d'une expérience de première main car le pays a déjà été victimes, à plusieurs occasions, d'attaques biologiques contre ses cultures et son cheptel, a déclaré M. Amat Fores, qui a mentionné des cas suspects de fièvre porcine en 1979 et 1980; de l'anéantissement suspect des récoltes de canne à sucre en 1978; ainsi que d'apparitions suspectes de fièvre dengue et de moisissure des récoltes de tabac.
M. CLIVE PEARSON (Nouvelle-Zélande) s'est dit ouvert à toutes nouvelles idées et a estimé qu'il convenait de mener une réflexion sans entrave. La Nouvelle-Zélande suggère que le projet de protocole qui a été discuté au sein du Groupe de travail ad hoc soit présenté et reconnu comme document officiel de la Conférence d'examen. M. Pearson a apporté son soutien au processus multilatéral engagé grâce aux travaux du Groupe de travail ad hoc. Il a exposé ce qui, selon son pays, constitue le minimum de ce que l'on doit attendre de cette Conférence, à savoir qu'elle doit envoyer un message clair et sans ambiguïté concernant l'engagement des États parties en faveur des buts et objectifs énoncés à ce jour; réaffirmer l'engagement en faveur du renforcement de la Convention sur les armes biologiques; et faire avancer ces discussions.
MME CELINA M. ASSUMPÇÃO DO VALLE PEREIRA (Brésil) a mis l'accent sur les préoccupations de son pays face au manque d'engagement des principaux acteurs en faveur de l'approche multilatérale des questions de contrôle international des armements. Elle a rappelé l'impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement et a fait part de ses préoccupations face aux menaces qui pèsent sur l'intégrité du Traité ABM - préoccupations que semble justifier l'incertitude qui entoure l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Le Brésil réitère sa condamnation des actes terroristes et a souligné que la cinquième Conférence d'examen a devant elle une tâche stimulante à accomplir, un véritable défi à relever. Mme Assumpção do Valle Pereira a lancé un appel afin que tous les efforts possibles soient déployés pour sortir le Groupe de travail ad hoc de l'impasse dans laquelle il se trouve. Elle a mis l'accent sur l'engagement constant et historique du Brésil en faveur d'un régime de contrôle des armes biologiques tant aux niveaux international que national. La Convention sur les armes biologiques repose sur deux piliers fondamentaux: d'un côté la non-prolifération; de l'autre la coopération technique à des fins pacifiques. Le Brésil se dit préoccupé de constater que l'engagement en faveur de la coopération technique à des fins pacifiques n'est pas suivi d'effet comme il devrait l'être. Mme Assumpção do Valle Pereira a donc exhorté les États parties à revoir l'article XIV du projet de protocole s'agissant des outils qui permettraient d'atteindre cet objectif.
MME SPOMENKA CEK (Croatie) a rappelé que la Croatie n'a jamais eu d'armes biologiques et n'a jamais essayé d'en obtenir. Elle a brièvement exposé la recherche que la Croatie a entreprise dans le domaine défensif. Ainsi, a-t-elle expliqué, cette recherche s'est concentrée sur trois aspects: l'aspect personnel (défense d'un individu); l'aspect technique (examen des moyens permettant de s'immuniser contre des agents biologiques et de répondre à une éventuelle attaque biologique); l'aspect plus particulier (comme par exemple identifier de possibles utilisateurs de telles armes). Mme Cek a en outre précisé qu'au nombre des sujets qui préoccupent son pays, figure la possibilité de voir une attaque biologique prendre la forme d'une grève traditionnelle dans une installation contenant un grand nombre d'organismes pathogènes, provoquant une fuite accidentelle de tels agents. La Croatie tient à saluer le travail effectué par le Groupe de travail ad hoc et souhaite qu'il soit relancé, même si des modifications dans sa structure semblent inévitable. Mme Cek a estimé que le projet de protocole est convenablement holistique et approprié pour contribuer au renforcement de la Convention.
M. CHRISTOPHER WESTDAL (Canada) a déclaré que la longue histoire du régime de réglementation des armes biologiques depuis 1925 témoigne que cette catégorie d'armes diaboliques de destruction massive répugne à la conscience de l'humanité. L'idée de renforcer la Convention sur les armes biologiques s'est trouvée renforcée par les événements du 11 septembre dernier. S'agissant du bioterrorisme, M. Westdal a expliqué que même si les terroristes ne signent pas les traités, dans un régime multilatéral pleinement mis en œuvre, personne n'est au-dessus des lois. Parmi les événements positifs intervenus depuis la précédente Conférence d'examen, on peut citer l'entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques et les nombreuses mesures qui ont été prises dans le domaine de la coopération internationale afin de tirer parti des sciences biologiques. Le Canada tient une fois de plus à témoigner de son engagement en faveur de la fourniture d'une coopération technique aux fins des applications pacifiques de la technologie biologique.
M. Westdal a exposé les quatre objectifs que sa délégation s'est fixé pour la présente Conférence d'examen. Il s'agit pour le Canada de mener à bien une action crédible, conformément à ce qui a été décidé au cours des conférences précédentes, dans le domaine de la promotion de la coopération avec les organisations internationales dans les domaines tels que le contrôle et la surveillance des maladies; d'inciter à la création d'un organe intersession à composition non limitée chargé de surveiller les efforts de mise en œuvre; de promouvoir l'universalité de la Convention en accroissant la pression exercée sur la cinquantaine de pays qui n'ont pas encore adhéré à la Convention sur les armes biologiques; et de déployer des efforts pour s'assurer que le public ait confiance dans les actions multilatérales menées au niveau international.
M. ALI-ASHGAR SOLTANIEH (République islamique d'Iran) a réitéré la condamnation par son pays des attaques terroristes du 11 septembre dernier et a exprimé ses condoléances aux victimes de cet acte inhumain. Il a déclaré que la récente utilisation du bacille du charbon par des terroristes illustre l'urgente nécessité de disposer d'un instrument international juridiquement contraignant permettant de renforcer la Convention sur les armes biologiques. Une fois cet instrument adopté, il faudra mettre en place une organisation qui sera chargée de mettre en œuvre les dispositions de cet instrument. L'Iran, pour sa part, attache une grande importance au contrôle des armements et au désarmement sur le plan multilatéral et estime que la Convention sur les armes biologiques est indispensable pour garantir la paix et la sécurité internationales. En témoigne le rôle actif que l'Iran a joué tout au long des discussions qui se sont déroulées au sein du Groupe de travail ad hoc. Pour l'Iran, il ne saurait être question de poursuivre cette Conférence d'examen de manière routinière sans connaître le sort qui va être réservé aux négociations multilatérales concernant le renforcement de la Convention.
M. Soltanieh a estimé que les approches sélectives et unilatérales et les solutions ne prévoyant pas l'adoption d'un protocole n'ont aucune chance de renforcer la Convention. L'Iran invite les États qui ne sont pas parties à la Convention à y adhérer aussitôt que possible, en particulier les États qui disposent d'une industrie avancée dans le domaine de la biotechnologie. L'Iran exprime en outre sa préoccupation que les restrictions commerciales ont creusé le fossé technologique entre les pays en développement et les pays industrialisés et que des régimes. Le représentant a également exprimé son inquiétude devant les régimes parallèles adoptés de façon arbitraire allant à l'encontre des décisions prises lors de la quatrième Conférence d'examen soulignant que les restrictions prévues à l'article III concernant la production d'armes biologiques ne devaient pas s'opposer aux dispositions de l'article X sur l'obligation de faciliter le transfert pacifique de technologie. L'Iran exprime en outre sa préoccupation que le texte de la Convention ne contienne pas une clause spécifique sur le recours aux armes biologiques.
M. LEONID SKOTNIKOV (Fédération de Russie) a souligné l'importance que son pays continue d'accorder à la terminologie et aux critères objectifs du protocole. M. Skotnikov a constaté que plusieurs idées présentées par la Fédération de Russie figurent dans le «texte composite» du projet de protocole élaboré par le Groupe de travail ad hoc. La délégation russe estime que l'adoption du protocole serait le moyen le plus important et efficace de renforcer la Convention et que le protocole pourrait encore être amélioré et finalement adopté. Il faut donc poursuivre les négociations multilatérales sur l'élaboration du Protocole au sein du Groupe de travail ad hoc, en particulier avec les États qui ont les industries biotechnologiques les plus développées.
M. TAJOURI SHRADI TAJOURI (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que son pays a toujours respecté l'esprit de la Convention sur les armes biologiques. La Libye est préoccupée de l'absence de volonté internationale de parvenir à l'objectif défini dans l'article X concernant le transfert de technologie à des fins pacifiques. La Libye souhaite que le Groupe de travail ad hoc puisse s'acquitter pleinement de son mandat et réitère sa détermination à y contribuer. Pour conclure, la Libye a lancé un appel à Israël et aux autres États qui ne sont pas parties à la Convention afin qu'ils ratifient la Convention sur les armes biologiques.
Droit de réponse
En réponse à la déclaration faite par les États-Unis ce matin, les représentants de l'Iraq, de la République islamique d'Iran et la Jamahiriya arabe libyenne ont exercé leur droit de réponse conformément à l'article 19 du règlement intérieur.
M. SAMIR K. K. AL-NIMA (Iraq) a accusé les États-Unis de recourir à deux poids, deux mesures dans la liste des pays qui auraient prétendument violé les dispositions de la Convention. Les États-Unis n'ont mentionné que des pays arabes musulmans et ont fait silence sur les violations commises par d'autres pays, notamment Israël. M. Al-Nima a précisé que l'Iraq avait rempli ses obligations, aux termes de la section C de la résolution 987, de ne pas acquérir d'armes de destruction massive. Il a aussi déclaré que l'Irak avait détruit toutes ses armes de destruction massive. L'Iraq a fourni des renseignements détaillés sur la façon dont il met en œuvre les mesures demandées par la Commission spéciale des Nations Unies (UNSCOM). Il a rappelé que l'UNSCOM s'était retirée sur les conseils des États-Unis avant le bombardement de l'Iraq en 1998. L'Iraq nie les allégations faites ce matin par les États-Unis.
M. ALI-ASHGAR SOLTANIEH (République islamique d'Iran) a catégoriquement rejeté les allégations des États-Unis selon lesquelles l'Iran aurait violé la Convention, assurant qu'elles étaient sans fondement. L'Iran est partie à tous les instruments internationaux en matière d'armes de destruction massive. Les États-Unis ne sont pas favorable à une approche multilatérale et sont responsables de l'échec de la vingt-quatrième session du Groupe de travail ad hoc, ainsi que du sort réservé au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, du Traité sur les missiles antimissiles (ABM) et du Protocole Kyoto. Le représentant iranien a aussi accusé les États-Unis de violer les dispositions de la Convention en transférant des agents biologiques mortels à Israël et à d'autres alliés, et en menant des recherches dans le domaine des armes biologiques. L'Iran déplore que les accusations lancées par les États-Unis risquent de compromettre le succès de la Conférence. L'Iran a par ailleurs vivement recommandé aux États-Unis de faire pression sur États qui ne sont pas parties à la Convention de la ratifier.
M. TAJOURI SHRADI TAJOURI (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que la Libye n'avait aucun programme d'arme biologique de quelque sorte que ce soit. La Libye a l'habitude de l'approche adoptée par les États-Unis et qui est fondée sur la sélectivité et le recours à deux poids, deux mesures. La Libye a toutefois mis en garde contre l'utilisation de la Conférence comme d'une tribune pour lancer des accusations.
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