LA CINQUIÈME CONFÉRENCE D'EXAMEN DES ÉTATS PARTIES À LA CONVENTION SUR LES ARMES BIOLOGIQUES OUVRE SES TRAVAUX
Communiqué de presse CD/G/513 |
LA CINQUIÈME CONFÉRENCE D'EXAMEN DES ÉTATS PARTIES À LACONVENTION
SUR LES ARMES BIOLOGIQUES OUVRE SES TRAVAUX
Genève, 23 novembre -- La cinquième Conférence d'examen des États parties à la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction a entamé, ce matin, la première journée de sa session de trois semaines qui se déroule au Palais des Nations, à Genève, jusqu'au 7 décembre 2001.
La Conférence d'examen examinera les progrès enregistrés pour la réalisation des objectifs de la Convention et la mise en œuvre de ses dispositions, ainsi que des propositions visant à renforcer la Convention. La Convention est le premier instrument de désarmement multilatéral interdisant toute une catégorie d'armes de destruction massive.
M. Jayantha Dhanapala, Sous-Secrétaire général des Nations Unies pour les affaires de désarmement, a ouvert la Conférence en donnant lecture d'un message transmis aux États parties par le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan.
L'Ambassadeur Tibor Tóth de Hongrie a été élu Président de la Conférence par acclamation, sur recommandation du Comité préparatoire de la Conférence. M. Enrique Roman-Morey, Directeur de la section genevoise du Département des affaires de désarmement, a été confirmé au poste de Secrétaire général de la Conférence. La Conférence a en outre décidé d'admettre deux pays qui ne sont pas parties à la Convention - le Saint-Siège et Israël - à participer aux travaux de la Conférence en qualité d'observateurs.
Ont été élus vice-présidents de la Conférence les pays suivants: Brésil, Chine, Cuba, Inde, Indonésie, Libye, Malaisie, Mexique, Pérou et Afrique du Sud (pour le Groupe des pays non alignés); Belgique, Canada, France, Allemagne, République de Corée, Suède (pour le Groupe des pays occidentaux); Bulgarie, République tchèque, Pologne et Fédération de Russie (pour le Groupe des pays d'Europe orientale).
L'Ambassadeur Markku Reimaa de Finlande a été élu à la présidence du Comité plénier, les deux vice-présidents étant MM. Alfredo Labbe (Chili) et Krzysztof Jakobowski (Pologne). M. Munir Akram (Pakistan) a été élu Président du Comité de rédaction. MM. Gennady Lutay (Fédération de Russie) et Christian Faessler (Suisse) ont été élus vice-présidents du Comité de rédaction.
M. Ali-Ashgar Soltanieh (République islamique d'Iran) a été élu Président du Comité de vérification des pouvoirs et M. Chris Sanders (Pays-Bas) Vice-Président. Les membres du Comité de vérification des pouvoirs sont l'Australie, la Colombie, la Roumanie, l'Ukraine et le Venezuela.
Ce matin, les représentants des pays suivants ont fait des déclarations: Belgique (au nom de l'Union européenne), États-Unis, Afrique du Sud, Japon, Pakistan et Chine.
Message du Secrétaire général des Nations Unies
M. JAYANTHA DHANAPALA, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires désarmement, a donné lecture d'un message du Secrétaire général des Nations Unies, M. KOFI ANNAN, dans lequel il souligne que la prévention de l'utilisation ou de la menace d'utilisation des agents et toxines biologiques en tant qu'armes est plus importante que jamais. Pour la communauté internationale, le défi est clair, poursuit le Secrétaire général: il s'agit de mettre en œuvre, dans toute la mesure du possible, le régime d'interdiction prévu dans la Convention. Pour atteindre cet objectif, relève M. Annan, il convient de surmonter un certain nombre d'obstacles importants. En dépit d'efforts considérables, les États parties se sont avérés incapables de mener à terme les travaux concernant l'élaboration d'un projet de protocole qui traiterait de questions aussi essentielles que le manque d'un mécanisme de surveillance, la nécessité d'accroître la transparence; et la coopération aux fins de l'utilisation des biotechnologies à des fins pacifiques. En outre, la Convention n'a pas encore été universellement ratifiée et seul un petit nombre d'États parties fournissent les informations requises au titre des mesures d'établissement de la confiance. Plus récemment, le monde a été témoin de l'utilisation d'agents biologiques afin de répandre le chaos et la terreur, en violation flagrante des normes internationales, rappelle le Secrétaire général.
Aussi, M. Annan demande-t-il que le rang de priorité le plus élevé soit accordé à la pleine et entière mise en œuvre de la Convention sur les armes biologiques. Dans cette optique, il a mis l'accent sur la nécessité de renforcer les législations nationales dans ce domaine et de pénaliser l'acquisition ou l'utilisation de ces armes. Le Secrétaire général a par ailleurs souligné que la concentration de l'attention mondiale sur les questions de terrorisme a porté au premier plan un certain nombre de préoccupations s'agissant des armes biologiques et à toxines. M. Annan a averti que manquer l'occasion offerte par cette Conférence - dans le contexte des difficultés rencontrées dans les négociations concernant d'autres armes de destruction massive - aurait pour conséquence d'aggraver la crise que traverse actuellement la diplomatie multilatérale.
Déclaration du Président de la Conférence
M. TIBOR T'ÓTH, Président de la Conférence, a déclaré qu'en raison de la nature des questions à l'ordre du jour, la cinquième Conférence d'examen devra aller plus au fond des questions que jamais auparavant. Il a souligné que cette Conférence devra non seulement passer en revue les travaux accomplis au cours de la décennie écoulée mais aussi tracer la voie de l'action à venir, déterminant ainsi le cadre global de ce que sera le régime d'interdiction des armes biologiques pour une période beaucoup plus longue que les seules cinq prochaines années.
M. Tóth a relevé qu'un autre défi, l'usage récent d'armes biologiques, qu'illustrent les incidents d'utilisation de l'anthrax comme arme de terreur - est en train de devenir, de facto, partie intégrante de notre vie quotidienne. La Convention est peut-être ici confrontée à l'un des plus grands défis qu'elle ait eu à relever au cours de ses 26 années d'existence, a déclaré le Président de la Conférence. M. Tóth a mis l'accent sur la nécessité de mener à bien la tâche énoncée à l'article XII, à savoir passer en revue les progrès enregistrés en matière de mise en œuvre de toutes les dispositions de la Convention. En outre, a-t-il rappelé, la quatrième Conférence d'examen (1996) avait demandé aux États parties d'examiner un certain nombre de questions spécifiques, parmi lesquelles: l'impact des progrès scientifiques et technologiques; les conséquences de l'entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques; l'efficacité des mesures d'établissement de la confiance décidées lors des deuxième et troisième conférences d'examen; ainsi que le rôle des Nations Unies s'agissant des ressources destinées à contribuer à la mise en œuvre effective des décisions de la Conférence d'examen.
Au cours de cette cinquième Conférence d'examen, a souligné M. Tóth, les États parties devront se pencher sur les défis auxquels est confrontée la Convention et tenter d'identifier la marche à suivre pour soutenir et faire avancer le régime d'interdiction des armes biologiques. M. Tóth a fait observer que l'action comme le manque d'action ne manqueront pas d'influer sur l'avenir du régime d'interdiction des armes biologiques, et ce bien au-delà de cette cinquième Conférence d'examen. Étant donné les attentes tant au niveau politique qu'au niveau du public, il n'y a pas d'autre choix viable que de relever ces défis.
Débat général
M. JEAN LINT (Belgique, au nom de l'Union européenne) a condamné le terrorisme sous toutes ses formes et a souligné que le désarmement et la non-prolifération sur une base multilatérale sont plus que jamais indispensables afin d'empêcher les organisations terroristes et les terroristes d'accéder à des moyens de destruction plus puissants. La Belgique a mis l'accent sur la nécessité, dans le cadre de cette Conférence d'examen, de renforcer la Convention en ce qui concerne le respect de la norme énoncée à l'article I; le contrôle de la non-prolifération et des exportations; les mesures à prendre en cas d'incertitude concernant le respect de la Convention; l'assistance technique et la coopération internationale. M. Lint a par ailleurs souligné l'importance de mettre en place des mesures de confiance dans le cadre de la Convention.
M. JOHN BOLTON, Sous-Secrétaire d'État au contrôle des armements et à la sécurité internationale des États-Unis, a déclaré que, même si l'origine des récentes attaques au bacille du charbon (anthrax) perpétrées aux États-Unis Unis reste à ce jour inconnue, il était de l'intention avouée d'Oussama ben Laden et de son organisation terroriste al-Qaida d'utiliser des armes biologiques. M. Bolton a dressé une liste de pays qui représentent une menace sur le plan des armes biologiques, tout en soulignant que cette liste ne saurait être exhaustive mais permet de mettre en exergue les défis que doit encore relever la Convention. Selon M. Bolton, l'Iraq constitue une grave menace à la sécurité internationale et a tiré profit de trois années d'absence des inspecteurs des Nations Unies pour améliorer son programme d'armes biologiques. M. Bolton a également déclaré que la République populaire démocratique de Corée a mené des efforts pour se doter d'une capacité en matière d'armes biologiques et pourrait aussi avoir transformé des agents biologiques aux fins de l'armement. Le Sous-Secrétaire d'État a d'autre
part souligné qu'il est fort probable que l'Iran ait aussi fabriqué des agents biologiques et en ait transformé en armes. La Libye, quant à elle, est en train de se doter d'un programme offensif d'armes biologiques et pourrait donc, selon M. Bolton, être en mesure de produire de petites quantités d'agents biologiques. La Syrie, qui n'a pas ratifié la Convention sur les armes biologiques, en est au stade de développement d'un programme d'armes biologiques, a poursuivi le Sous-Secrétaire d'État avant d'ajouter que le Soudan, qui n'est pas partie à la Convention, montre un intérêt croissant pour le développement d'un programme d'armes biologiques.
M. Bolton a fait observer que la Convention n'est pas parvenue à dissuader ces États de poursuivre des programmes d'armement biologique. Selon lui, le protocole en projet n'y serait pas non plus parvenu. Afin de répondre à ces sujets de préoccupation, M. Bolton a proposé aux États parties l'adoption d'un certain nombre de mesures visant à renforcer la Convention. Tout d'abord, en ce qui concerne le renforcement de la mise en œuvre au niveau national, les États parties devraient adopter des lois pénales nationales visant à améliorer leurs accords bilatéraux d'extradition s'agissant des délits relatifs aux armes biologiques. Ils devraient en outre faire en sorte que soit considéré comme un délit pénal l'engagement de toute personne dans des activités interdites en vertu de la Convention sur les armes biologiques. Deuxièmement, les États parties devraient se doter de normes strictes en matière de sécurité des micro-organismes pathogènes et, à cette fin, appliquer des règles strictes concernant l'accès à des micro-organismes dangereux tout en s'efforçant d'indiquer internationalement les fuites, disparitions ou événements susceptibles d'affecter des pays tiers. Troisièmement, M. Bolton a proposé l'instauration d'un mécanisme d'enquêtes internationales sur les accès de maladie suspects et/ou les allégations d'incidents impliquant des armes biologiques. Pour ce faire, il faudrait que les États parties acceptent l'idée d'inspecteurs internationaux qui seraient envoyés dans un pays donné sur décision du Secrétaire général des Nations Unies. Quatrièmement, les États-Unis sont aussi favorables à l'établissement d'un mécanisme de coopération volontaire chargé de clarifier et de résoudre par consentement mutuel les questions relatives au respect de la Convention, sur la base d'échanges d'informations, de visites volontaires ou de toute autre procédure visant à clarifier et lever les doutes en matière de respect de la Convention. Enfin, M. Bolton a plaidé en faveur de la mise en œuvre de procédures en matière de sécurité biologique sur la base des directives de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ou de toutes autres directives nationales équivalentes. M. Bolton a également prôné un soutien accru aux capacités de l'OMS en matière de surveillance des maladies et de réponse aux maladies.
M. Bolton a mis l'accent sur la nécessité d'adopter une nouvelle approche afin de répondre à la menace des armes biologiques. Faisant allusion au rejet du mécanisme du projet de protocole précédemment à l'examen, il a rappelé que l'époque des protocoles «par défaut» ou «mieux que rien» était bel et bien révolue.
M. PETER GOOSEN (Afrique du Sud) a déclaré que son pays était déçu par les résultats de la vingt-quatrième session du Groupe spécial chargé des négociations sur un projet de protocole visant à renforcer la Convention. Il a déclaré que le projet de protocole et les dispositions de l'article 14 du CRP.8 (c'est-à-dire le texte de protocole présenté par le Président du Groupe spécial) prévoyaient des mesures de lutte contre les maladies et que sa délégation aimerait que les résultats de cette Conférence d'examen intègrent de telles mesures.
M. TOSHIO SANO (Japon) a déclaré qu'en vertu de l'article IV de la Convention, le Japon a pris des dispositions en vue de renforcer sa législation nationale en prévoyant un certain nombre de mesures punitives supplémentaires à l'encontre des personnes qui utilisent des armes biologiques. M. Sano a par ailleurs indiqué que le Japon a fourni une assistance à des pays en développement, conformément aux objectifs de l'article X de la Convention. Les autorités japonaises ont par exemple organisé des programmes de formation à l'intention des chercheurs dans le but d'améliorer les capacités de recherche institutionnelles. M. Sano a réaffirmé que le Japon continuera à déployer tous les efforts possibles en vue d'atteindre l'objectif de renforcement de la Convention.
M. ABDUL BASIT (Pakistan) a déclaré que le Pakistan ne pouvait souscrire à une interprétation de l'article III qui soit contradictoire avec les dispositions de l'article X. Il a mis l'accent sur l'importance de la coopération scientifique et technique en faveur du progrès socioéconomique des pays en développement et en faveur de la lutte contre les maladies infectieuses et les menaces de bioterrorisme. Tout en soulignant l'importance que revêt à ses yeux la pleine et entière mise en œuvre des dispositions de l'article X, M. Basit a souligné que la proposition chinoise, telle qu'elle figure dans le document BWC/Ad Hoc Group/WP.453 (daté du 8 mai 2001), constitue une base solide de discussion. Il a par ailleurs demandé la reprise des travaux du Groupe spécial et a attiré l'attention de la Conférence sur le manque de ressources financières dont souffrent les petits pays pour participer à la Conférence.
M. SHA ZUKANG (Chine) a mis l'accent sur trois aspects de la mise en œuvre de la Convention sur lesquels il convient de se pencher. Il a tout d'abord fait observer que certains États parties entretiennent sans cesse des suspicions quant aux activités normales de recherche scientifique et de production menées par d'autres pays dans le domaine de la biologie, alors que ces mêmes États restent silencieux en ce qui concerne leurs propres activités dans ce domaine. M. Sha a par ailleurs souligné que la prévention de la prolifération des armes biologiques et la promotion de l'usage des technologies biologiques à des fins pacifiques devraient être complémentaires et se renforcer mutuellement. Pourtant, certains pays ont choisi de séparer ces deux questions en se concentrant sur la prévention de la prolifération au détriment de la coopération internationale. Enfin, M. Sha a souligné qu'il était impossible d'assurer la sécurité absolue d'un État, ce qui n'empêche pas un certain pays, en s'appuyant sur sa force économique et militaire, d'adopter souvent une approche unilatérale lorsqu'il s'agit d'améliorer l'efficacité de la Convention. L'unilatéralisme ne réussira jamais et ne fera qu'aggraver les problèmes, a déclaré le représentant de la Chine. En conclusion, M. Sha a exhorté les États parties à travailler ensemble dans un cadre multilatéral et à conclure par la négociation un protocole raisonnable, réalisable et effectif sur la base du mandat existant (tel qu'énoncé par la Conférence spéciale de 1994) afin de renforcer la Convention.
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