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AG/J/362

LA REGLE DE L’EPUISEMENT DES RECOURS INTERNES EN MATIERE DE PROTECTION DIPLOMATIQUE EST GENERALEMENT APPRECIEE PAR LES DELEGATIONS

07/11/2001
Communiqué de presse
AG/J/362


Sixième Commission

22e séance – après-midi


LA REGLE DE L’EPUISEMENT DES RECOURS INTERNES EN MATIERE DE PROTECTION DIPLOMATIQUE EST GENERALEMENT APPRECIEE PAR LES DELEGATIONS


La Commission juridique (Sixième Commission), réunie sous la présidence de M. Pierre Lelong (Haïti), a poursuivi cet après-midi l'examen du rapport de la Commission de droit international (CDI) sur les travaux de sa cinquante-troisième session.  Elle a entendu la présentation par M. Peter Kabatsi, président de la CDI, du quatrième volet du rapport de la CDI consacré aux chapitres VII (protection diplomatique), VIII (actes unilatéraux des Etats) et IX (autres décisions et conclusions de la Commission).


Sur le thème de la protection diplomatique, les délégations ont rappelé la règle classique de la continuité de la nationalité selon laquelle la réclamation d’un Etat doit démontrer que la personne lésée était un ressortissant au moment du dommage, à l’époque de la présentation de la réclamation et tout au long de la période entre ces deux événements.  La majorité des délégations s’est accordée pour considérer cette règle comme relevant du droit international coutumier et comme étant suffisamment reflétée dans le projet de la CDI.  Pour le représentant de l’Afrique du Sud, qui s’exprimait au nom de la Communauté pour le développement des Etats d’Afrique australe (SADC), il faut être vigilant car cette règle peut causer d’importantes injustices lorsqu’une personne a subi un changement involontaire de nationalité après le dommage invoqué et devrait, par conséquent, être assortie d’exceptions.


L’épuisement des recours internes par la personne lésée, condition à l’exercice de la protection diplomatique, est une des questions clefs de ce chapitre.  C’est une règle consacrée par le droit international coutumier, a rappelé le représentant de Bahreïn, celle du “déni de justice”.  Pour lui comme pour d’autres délégations, l’expression “recours interne” devrait être davantage précisée, par exemple en ajoutant le qualificatif “efficace”.  En revanche, pour le représentant de la Fédération de Russie, ce critère semble suffisant, mais il a précisé que les recours internes doivent bien sûr être disponibles dans la pratique et pas seulement exister en théorie.


Le représentant des Pays-Bas a, pour sa part, abordé le cas de l’exercice par un Etat de la protection diplomatique à l’égard d’une personne apatride ou réfugiée, n’ayant donc pas la nationalité de l’Etat en question.  Pour lui, un Etat dans lequel une personne apatride a sa résidence habituelle est en droit de protéger cette personne à l’encontre d’un autre Etat, sur le modèle de la protection diplomatique, même si ce droit relève des droits de l’homme.  Il est en effet favorable à un système de protection analogue à la protection diplomatique qui serait applicable à un réfugié ou un apatride.


Sur le chapitre des actes unilatéraux, beaucoup de représentants se sont félicités de l’effort du rapporteur spécial en vue de classer les actes unilatéraux.  Le délégué du Guatemala a suggéré que, pour les travaux à venir sur cette question, on s’abstienne d’élaborer d’autres articles avant d’avoir achevé ce qui est en cours, en particulier l’établissement d’une terminologie et décider s’il convient d’y ajouter une classe résiduelle qui comprendrait tous les actes non désignés expressément.


Les représentants des pays suivants ont pris la parole : Guatemala, Afrique du Sud (au nom de la SADC), Norvège (au nom des pays nordiques), Bahreïn, Chine, Pays-Bas, Japon, Venezuela, Grèce, Fédération de Russie et Kenya.


La sixième commission poursuivra ses travaux demain jeudi 8 novembre, à 15 heures.

Rapport de la commission du droit international sur les travaux de sa cinquante-troisième session (A/56/10 et Corr.1)


M. PETER KABATSI, Président de la Commission du droit international (CDI), a présenté le quatrième volet de son rapport, consacré aux chapitre VII (protection diplomatique), VIII (actes unilatéraux des Etats) et IX (autres décisions et conclusions de la Commission) du rapport de la CDI.


Sur le premier thème, M. Kabatsi a expliqué que l'approche traditionnelle de la règle posée par l'article 9 relatif à la continuité de la nationalité a été remplacée par une approche plus souple.  Cet article autorise un Etat à exercer la protection diplomatique à l'égard d'une personne qui a changé de nationalité de bonne foi après avoir subi un dommage, à condition que l'Etat de la nationalité d'origine n'ait pas exercé ou ne soit pas en train d'exercer la protection diplomatique à l'égard de cette personne à la date du changement de nationalité.  Il a relevé que cette disposition est destinée à prévenir des abus, grâce aussi à d'autres conditions qui figurent aux alinéas suivants de l'article.  Cette approche était délicate, a fait observer M. Kabatsi, dans la mesure où elle défiait une règle bien établie en droit international coutumier, mais on est en droit de modifier une règle établie lorsqu’elle n'est plus conforme aux développements du droit international.


La question de la relation entre la protection diplomatique et la protection des personnes en droit international a constitué un aspect fondamental du débat, a poursuivi M. Kabatsi, expliquant qu'au sein de la Commission la préférence s'est dégagée en faveur d'un maintien de la règle traditionnelle de la continuité de la nationalité, tout en l'assortissant de certaines exceptions pour les cas où la personne ne disposerait par ailleurs d'aucune possibilité pour obtenir la protection d'un Etat.  Il a été finalement proposé que la Commission examine quelques questions supplémentaires concernant la nationalité de la réclamation, notamment le cas d'un Etat ou d'une organisation internationale qui administre ou contrôle un territoire.


Les projets d'articles 10 et 11 établissent la règle de l'épuisement des recours internes.  Le président de la CDI a fait remarquer que l'expression "recours internes" comprend tous les recours judiciaires ouverts en droit interne ainsi que les recours administratifs, à l’exception de ceux qui ont un caractère discrétionnaire ou gracieux.  L'idée du rapporteur spécial de traiter le sujet non pas dans un long article, mais dans plusieurs articles, a été également appuyée au cours des débats, a indiqué M. Kabatsi.  Par ailleurs, des membres ont exprimé leur appui au point de vue du rapporteur spécial selon lequel la distinction entre les règles primaires et les règles secondaires n'était pas nécessaire dans tous les cas, car une adhésion stricte à cette distinction pouvait aboutir à l'exclusion du concept de déni de justice.


En ce qui concerne l'article 11, qui établit la distinction entre réclamations "directes" et réclamations "indirectes" aux fins de la règle de l'épuisement des recours, le rapporteur spécial avait souligné sa nécessité afin de déterminer les cas relevant du champ d'application du projet d’articles, a rappelé M. Kabatsi.  Deux critères étaient proposés afin de préciser le type de préjudice en cause : la prépondérance et la condition sine qua non.  Il a noté que d'autres critères avaient également été proposés dans la doctrine, notamment l'"objet" du litige, la "nature de la réclamation" et celle de la réparation demandée.


Selon M. Kabatsi, la CDI a généralement soutenu le projet d’article 11 en considérant qu’il reflétait la pratique en cours dans le monde, estimant qu’il fallait néanmoins poursuivre sa réflexion sur ce sujet, notamment sur la notion de “facteur prépondérant” dans le cas de réclamations jugées incertaines.  Le projet d’article 11, tout comme les projets d’articles 9 et 10, a été soumis au comité de rédaction pour être étudié plus à fond.  Le comité n’a pas eu le temps de se pencher sur ces textes au cours des deux dernières sessions de la CDI, mais entend le faire en 2002.  Il a souligné l’importance des observations qui seront donc exprimées par la Sixième Commission sur cette question.


Le président est ensuite passé au chapitre VIII du rapport de la CDI portant sur les actes unilatéraux des Etats.  La Commission s’est penchée sur deux questions principales, à savoir l’élaboration des critères sur lesquels fonder la classification des actes unilatéraux et l’interprétation des actes unilatéraux, dans le contexte des règles applicables à tous les actes unilatéraux, indépendamment de leur contenu matériel.  En ce qui concerne la question du silence et de ses rapports avec les actes unilatéraux, le rapporteur spécial a fait observer que, dans son quatrième rapport, le silence ne peut être défini en tant qu’acte juridique au sens qui intéresse la CDI.  Pour ce qui est des déclarations interprétatives, M. Kabatsi a rappelé que le rapporteur spécial a indiqué qu’en général, celles-ci étaient liées à un texte antérieur mais qu’à son avis, dans les cas où elles allaient plus loin que les obligations imposées par le traité, ces déclarations deviendraient des actes indépendants par lesquels un Etat pouvait assumer des engagements internationaux.  Il a ajouté que ces déclarations interprétatives s’inscriraient alors parmi les actes unilatéraux entrant dans le cadre du sujet.  En revanche, sur la question des contre-mesures, le rapporteur spécial était d’avis que celles-ci ne pouvaient être envisagées dans le même contexte parce qu’il s’agit de réaction d’un Etat, ce qui leur enlève le caractère autonome nécessaire, dans la mesure où elles n’ont pas été expressément formulées avec l’intention de produire des effets juridiques.


M. Kabatsi a reconnu que la CDI a eu des difficultés pour conceptualiser les actes unilatéraux.  Alors que certains membres considéraient qu’il s’agit d’un sujet important qui se prête à la codification, d’autres ont soutenu que ce n’était pas le cas, notamment compte tenu des difficultés rencontrées dans les tentatives de définir et classifier les actes unilatéraux.  Les membres se sont néanmoins entendus pour approcher la question en termes plus pratiques, en maintenant une définition restrictive des actes unilatéraux, comprenant les actes qui créent des droits et des obligations en tant que source de droit international. Il a rappelé que l’on s’est penché sur le fait que, dans certains cas, telle l’occupation effective, toute une série d’actes unilatéraux se révèle nécessaire pour que les effets juridiques se produisent, estimant que leur étude devrait se limiter aux actes unilatéraux uniques.  Des doutes ont également été émis pour ce qui est de la classification proposée pour ces actes. 


Lors du débat, on a fait observer qu’il ne fallait pas omettre de faire mention de l’objet et du but de l’acte unilatéral aux fins de son interprétation.  Il a été noté à ce propos que l’intention de l’Etat au moment de s’engager dans un acte unilatéral était pertinente dans deux cas: pour établir l’existence d’un acte unilatéral, question qui avait été au centre de l’affaire des essais nucléaires, et pour déterminer comment l’acte devait être interprété, bien que l’on ne puisse pas toujours établir une distinction claire entre les deux questions.


Reconnaissant les grandes difficultés inhérentes à ce type de recherche, la CDI a prié le Secrétariat d’adresser aux gouvernements un questionnaire les invitant à fournir des informations supplémentaires sur leur pratique en matière de formulation d’actes unilatéraux et d’interprétation de tels actes.  Au nom de la CDI, M. Kabatsi a exhorté les gouvernements à répondre dans les meilleurs délais à ce questionnaire qui a été envoyé à tous les Etats le 31 août dernier.


Passant au chapitre IX du rapport, sur les autres décisions et conclusions de la CDI, M. Kabatsi a mentionné que, par mesure d’économie, la Commission a organisé son programme de travail de manière à allouer la première semaine de la deuxième partie de sa session à son Groupe de travail chargé des commentaires des projets d’articles sur la responsabilité des Etats.  Il a rappelé que la Commission a poursuivi une étroite coopération avec d’autres organes juridiques internationaux importants, recevant notamment la visite du Président de la Cour internationale de Justice.  Il a enfin mentionné la tenue d’un séminaire de droit international, qui a accueilli 831 participants de 150 pays, en juillet dernier, durant la dernière session de la CDI, et remercié les gouvernements dont les généreuses contributions ont permis à des étudiants en droit des pays en développement d’y prendre part.


Déclarations


M. ROBERTO LAVALLE-VALDES (Guatemala), abordant le chapitre VIII sur les actes unilatéraux, a souhaité qu’on interprète les articles en se demandant si l’Etat auteur d’un acte a eu l’intention de réaliser cet acte, afin de déterminer si l’acte produit des effets juridiques.  De l’avis de sa délégation, les règles d’interprétation peuvent varier en fonction du type d’acte.  En ce qui concerne la méthodologie qui pourrait être abordée pour la suite des travaux sur cette question, il a suggéré qu’on s’abstienne d’élaborer d’autres articles avant d’avoir finalisé ceux en suspens.  Il faudrait d’abord, de l’avis de M. Hoffmann, établir une terminologie et décider s’il convient d’y ajouter une catégorie résiduelle, c’est-à-dire “ouverte”, qui comprendrait tous les actes qui ne sont pas désignés expressément.  En troisième lieu, il a souhaité qu’on détermine si toutes les catégories doivent figurer sur la liste ou s’il faut exclure une catégorie d’actes.  Ensuite, il faudrait déterminer, pour chaque type d’acte, si les normes générales s’appliquent.  Si elles ne s’appliquent pas à une catégorie d’actes, le représentant a proposé qu’on élabore des règles spécifiques pour ces actes exclus.  Il a souhaité aussi que l’on parvienne à un accord sur les catégories auxquelles s’appliqueront les règles générales.


M. ALBERT HOFFMANN (Afrique du Sud), s’exprimant au nom de la Communauté de développement des Etats d’Afrique australe (SADC) a fait remarquer que le sujet de la protection diplomatique est riche en jurisprudence, doctrine, pratique des Etats et tentatives de codification.  Il a rappelé que la règle classique de la continuité de la nationalité requiert une réclamation d’un Etat pour prouver que la personne lésée était un ressortissant au moment du dommage, à l’époque de la présentation de la réclamation et tout au long de la période entre ces deux événements.  Pour lui, la forme actuelle de la règle est source de préoccupations à différents égards.  Tout d’abord, il a estimé qu’elle peut entraîner de grandes injustices quand une personne a subi un changement involontaire de nationalité après le dommage invoqué.  De plus, le représentant a considéré que le contenu de la règle n’est pas clair quant à la signification de la date du dommage ou de la présentation de la réclamation.  En outre, la règle n’a pas été vraiment approuvée dans des décisions judiciaires ou dans des tentatives de codification.  En dépit de ces critiques, M. Hoffmann a déclaré que, pour la SADC, la règle de la continuité de la nationalité fournit encore le meilleur moyen d’éviter que plusieurs Etats interviennent en même temps pour assurer la protection diplomatique.  Il faudrait donc assortir cette règle en l’assortissant d’exceptions, notamment en cas de changement involontaire de nationalité.


Le représentant a par ailleurs jugé que la règle de l’épuisement des recours internes est essentielle pour la protection diplomatique.  Il a noté que le rapporteur spécial a choisi de la répartir sur plusieurs articles.  Tout en faisant sienne la description des recours internes, la SADC estime que le projet d’article 10 devrait clarifier le fait que le recours doit non seulement être ouvert mais aussi efficace.  M. Hoffmann a relevé qu’il est difficile d’élaborer une règle satisfaisante pour couvrir à la fois les réclamations d’une personne et celle d’un Etat dans une même affaire.  Enfin, M. Hoffmann a fait observer qu’il reste des questions délicates à résoudre au sujet des recours internes, comme celle de déterminer si la règle est une règle de forme ou de procédure.


M. OLE PETER KOLBY (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a souscrit aux vues de la CDI visant à ce que la question de la “protection diplomatique” revête une grande signification pratique.   Il a souligné la nécessité de mettre l’accent sur la dimension pratique plutôt que sur les débats d’ordre théorique, de façon à produire un guide pour les praticiens.  Les pays nordiques estiment qu’il faut établir une distinction claire entre les droits de l’homme et la protection diplomatique, afin qu’une confusion entre les deux ne risque de soulever davantage de problèmes.. 


Concernant le projet d’article 9, M. Kolby a indiqué que les pays nordiques partagent l’opinion déjà exprimée par plusieurs délégués selon laquelle la règle de la nationalité continue de bénéficier du statut du droit international coutumier.  Il a ajouté que la tendance générale en droit international consistant à protéger des individus, quoique positive, ne justifie pas la modification de la règle de la continuité.  Par conséquent, sa délégation souhaite que la règle traditionnelle soit maintenue dans le projet d’article 9.  M. Kolby a précisé toutefois que le droit traditionnel doit être assoupli  pour accepter des exceptions dans les cas où un individu pourrait autrement ne recevoir la protection d’aucun Etat, la principale exception de base devant être liée au changement involontaire de nationalité.  Au projet d’article 10, il propose d’ajouter le qualificatif “effectif”, pour éviter qu’une charge trop lourde soit imposée à la personne lésée, estimant que l’épuisement des recours internes constitue la règle bien établie en droit coutumier.  Sur le projet d’article 6, il a indiqué que les pays nordiques sont convaincus que c’est l’Etat ayant un lien dominant et effectif avec l’individu qui devrait être autorisé à intervenir au nom de son ressortissant. 


S’agissant du chapitre VIII du rapport de la CDI, relatif aux actes unilatéraux des Etats, le représentant a souscrit aux projets d’articles (a) et (b) et suggère de regrouper en un seul paragraphe les paragraphes 1 et 2 de l’article (a).  Il a cependant exprimé des préoccupations sur la direction générale que prend le travail de la Commission du droit international sur cette question.  Il a réitéré que, de l'avis des pays nordiques, il n’est pas nécessaire de créer un ensemble de règles sur les actes unilatéraux, précisant que sa délégation souhaite plutôt que la CDI adopte une approche plus ciblée qui se limiterait à quelques règles générales et à l’étude de certaines situations particulières.


M. HUSAIN AL BAHARNA (Bahreïn) a noté que la protection diplomatique est une des questions non seulement les plus anciennes mais aussi les plus controversées en droit international, à cause de sa complexité théorique et de l’influence des droits de l’homme.  De l’avis de sa délégation, cette question ne devrait pas être traitée comme une question des droits de l’homme.  Il a fait remarquer que le sujet entraîne des conflits entre les droits de l’Etat et ceux de l’individu et qu’il faut établir un équilibre entre leurs intérêts.  Bien qu’il y ait eu beaucoup de pratique, de jurisprudence et de doctrine en la matière, la CDI semble aller dans une direction différente, a-t-il observé.  Pour lui, les sources étant contradictoires, on ne peut que se féliciter que la Commission ait un peu innové en la matière.  Pour ce qui est du projet d’article 9, qui s’écarte de la conception traditionnelle de la protection diplomatique, il a noté que la tendance semble avoir changé pour tenir compte d’exceptions à la règle, notamment quand il y a eu changement involontaire de la nationalité de la personne.  La question de la continuité de la nationalité se réfère à une nouvelle méthode, à l’issue des travaux de la Commission, a-t-il relevé.  Si la discussion sur ce projet de texte au sein de la Commission a donné lieu au maintien de la règle de la continuité de la nationalité, elle l’a abordé de façon plus souple, a-t-il expliqué. 


En ce qui concerne les projets d’articles 10 et 11, sur la règle d’épuisement des recours internes, le représentant a rappelé qu’il s’agit d’une règle coutumière de droit international. Il faudrait, a-t-il suggéré, combiner les définitions sur l’objectif de l’épuisement des recours, pour qu’elles comprennent toutes les institutions juridiques auxquelles la personne pourrait avoir recours.  De l’avis de sa délégation, la CDI devrait être prudente en définissant les “recours internes”. S’agissant de la notion de la prépondérance, il a considéré que la règle s’appliquait uniquement en cas de dommage à un ressortissant de l’Etat, mais pas au dommage subi par un Etat.  Cependant, il a estimé qu’il sera difficile de décider si la réclamation est directe ou indirecte en fonction de cette mixité.  Selon le représentant, il appartiendra à la Cour de déterminer si le dommage est prépondérant.  Il a ajouté que le projet ne reflète pas assez le cas de prépondérance, surtout dans les cas de réclamation mixte.  Enfin, sur l’article 11, il a jugé que la disposition reflète bien le test de sine qua non et celui de la prépondérance, et que l’emploi des deux tests ne devrait pas soulever de critiques.


M. GUAN JIAN (Chine) a d’abord commenté le projet d’article 9 portant sur la continuité de la nationalité dans le cadre de la protection diplomatique, et soulevant la possibilité d’un déni de protection pour des personnes qui ont perdu involontairement leur nationalité.  Il a noté que la protection diplomatique relevait du droit de l’Etat, plutôt que de l’individu, soulignant l’importance d’un lien juridique fondé sur la nationalité dont la règle devrait demeurer la continuité de la nationalité, sauf exceptions.  Faisant référence au projet d’article 10 sur l’épuisement des recours internes, il a signalé que ce principe était accepté en droit coutumier international et a dit espérer néanmoins que le libellé sera encore amélioré. Le représentant a mentionné ensuite que la protection diplomatique des entreprises devrait être exercée par l’Etat où celle-ci est immatriculée, précisant que cela est prévu dans la législation chinoise.  De l’avis de sa délégation, un préjudice subi par une compagnie n’accorde toutefois pas nécessairement des droits à ses actionnaires.  Rappelant que la CDI a achevé son travail sur la responsabilité des Etats, il a souhaité que cela permette à la CDI de se consacrer en priorité à l’étude de la protection diplomatique.


Quant à la question des actes unilatéraux des Etats, qui sont souvent commis dans les relations internationales, M. Jian a estimé très important de les codifier dans le droit international.  Il a fait remarquer cependant qu’il est difficile d’établir un système clair à cet égard.  Il a souligné les limites de la classification suggérée par la CDI visant à établir deux catégories d’actes unilatéraux en deux catégories, à savoir ceux pour lesquels l’Etat entraîne des obligations et ceux par lesquels il affirme un droit.  De l’avis de sa délégation, les cas de reconnaissance ou de protestation pourraient difficilement entrer dans le cadre de l’une de  ces deux catégories.  La Chine accueillerait favorablement l’introduction d’une troisième catégorie consistant à accepter ou à refuser un lien juridique donné, considérant toutefois que la Convention de Vienne devrait demeurer le principal point de référence à cet égard.


M. CARL PEERSMAN (Pays-Bas) a abordé le cas de l’exercice par un Etat de la protection diplomatique d’une personne apatride ou réfugiée, donc qui n’a pas la nationalité de l’Etat en question.  Pour les Pays-Bas, un Etat où une personne apatride a sa résidence habituelle est en droit de protéger cette personne à l’encontre d’un autre Etat, sur le modèle de la protection diplomatique.  Dans la perspective des droits de l’homme, il s’est dit favorable à un système de protection analogue à la protection diplomatique qui serait applicable à un réfugié ou un apatride.  S’agissant de la possibilité pour un Etat d’exercer la protection diplomatique pour une personne lésée à l’encontre d’un Etat dont la personne est également un ressortissant, dans le cas où la nationalité est dominante vis-à-vis de l’Etat qui exerce la protection, le représentant a fait sienne la position de la Commission du droit international.


M. Peersman a ensuite soulevé la question de l’assistance à un détenu qui possède une double nationalité et dont la nationalité dominante est celle de l’Etat qui fournit l’assistance.  C’est un cas que son pays a connu, estimant que la nationalité dominante devrait être opposée à la nationalité plus faible dans un tel cas.  Enfin, sur la question de l’épuisement des recours internes, il a noté que la notion de “recours internes” doit être précisée.  La condition d’épuisement des recours internes doit être davantage précisée, a-t-il ajouté, afin d’éviter que l’Etat assurant la protection diplomatique l’invoque dans des cas où ce n’est pas justifié.


M. HIDEHISA HORINOUCHI (Japon) a considéré que le projet d’articles sur les réserves aux traités est trop complexe et détaillé pour être utilisé par les Etats.  Le Japon craint, comme d’autres pays qui se sont exprimés, que la création d’un système de formulation tardive des réserves encourage celles-ci et menace l’intégrité des traités et le système établi par la Convention de Vienne sur le droit des traités.  A cet égard, le représentant a soutenu que les réserves tardives ne sont pas couvertes par la définition de réserves contenues dans l’article 19 de la Convention de Vienne.  Il a jugé légitime le fait d’étudier la pratique des Etats à cet égard, afin de développer des règles générales en matière de droit progressif, ajoutant toutefois que sa délégation n’apprécie pas l’expression de réserves tardives et considère que celles-ci devraient être évitées autant que possible.  S’agissant de la protection diplomatique, le représentant a insisté pour que la CDI ne s’écarte pas trop du droit coutumier international.  Il a considéré comme inapproprié le fait d’inclure des notions de droits de l’homme dans le projet de texte sur la protection diplomatique.  Sur les actes unilatéraux des Etats, le délégué a déclaré qu’il faut principalement tenir compte de la pratique des Etats et examiner les types d’actes qui sont susceptibles d’être éventuellement soumis à un instrument juridique contraignant.


MME A. CAVALIERE (Venezuela) a estimé que le projet d’articles sur la prévention des dommages transfrontières constitue un document équilibré.  Sa délégation fait sienne la recommandation de la CDI visant l’élaboration par l’Assemblée générale d’une convention.  Mme Cavaliere a noté que le projet d’articles ne peut comporter une liste des conséquences d’activités non interdites par le droit international.  Les mesures que doit prendre l’Etat, a-t-elle estimé, sont envisagées de façon suffisamment large par le projet de texte.  Pour ce qui est de l’obligation de “due diligence”, elle a fait valoir qu’elle est acceptée dans divers instruments internationaux.  Le projet d’article 4, relatif à l’obligation de coopérer est également très important, dans la mesure où l’Etat évalue les dommages que pourrait causer l’activité transfrontière, comme prévu dans le projet.  Pour la représentante, il est tout autant important que l’Etat d’origine notifie à l’Etat qui risque d’être lésé le dommage qui peut être occasionné.  Elle a réaffirmé la position de sa délégation sur le projet d’article 19 qui, selon elle, consacre à juste titre le principe du consentement mutuel et le recours à une commission d’enquête si le différend ne peut être réglé à l’amiable.  Cette disposition est acceptable, pour sa délégation, bien qu’elle soit très particulière.


Evoquant la question de la protection diplomatique, la représentante s’est dite satisfaite de ce que certains articles aient été renvoyés au comité de rédaction.  Sur la règle de la continuité de la nationalité, elle considère qu’il s’agit d’une règle de droit international coutumier.  Par ailleurs, elle s’est ralliée à la majorité des membres de la Commission pour que la règle reste valable quand, au moment de la réclamation, il n’y a pas de continuité entre la date du dommage et de celle de la réclamation.  Les exceptions à cette règle méritent d’être examinées plus avant, a-t-elle estimé.  La délégation vénézuélienne suggère que la Commission étudie l’année prochaine la responsabilité internationale des organisations internationales.


MME MARIA TELALIAN (Grèce) a présenté des observations sur la “Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international”, se félicitant de l’approche adoptée pour le préambule du projet d’articles.  Cette approche réconcilie la liberté des Etats à entreprendre sur leur territoire des activités encourant un risque avec le devoir de ne pas causer de danger à l’égard du territoire d’autres Etats.  Sur les projets d’articles 7 et 8, portant sur les études d’impact, la représentante a estimé que le texte devrait clarifier que ces études ont pour objectif de déterminer si le dommage transfrontière serait significatif.  Quant au projet d’article 10, elle a recommandé de combiner les paragraphes a) et c) et d’inclure de façon explicite dans le nouveau paragraphe le principe de précaution, qui figure déjà dans plusieurs instruments internationaux portant sur la protection de l’environnement.  Sur le projet d’article 19, elle a indiqué que le libellé ne satisfaisait pas sa délégation.  La Grèce a réitéré la suggestion qu’elle a faite l’an dernier, en vue d’inclure des projets d’articles prévoyant un mécanisme de règlement des différends similaire à celui contenu dans l’article 33 de la Convention de 1997 sur le droit relatif à l’utilisation  des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation.  Mme Telalian a aussi invité la CDI à examiner l’aspect de la responsabilité internationale qui devrait, de l’avis de sa délégation, envisager la mise en place d’un régime d’indemnisation approprié, avec le même soin qu’elle a accordé aux aspects de la prévention. 


Abordant la question des réserves aux traités, la représentante a soutenu que le recours aux réserves devrait être réduit, en particulier celles liés aux traités des droits de l’homme, estimant que la pratique des réserves risque de saper ces traités.  Une réserve fait en sorte que les Etats parties n’ont plus les mêmes obligations, ce qui affecte à son avis l’égalité des Etats à l’égard de ces traités.  Les réserves tardives ne devraient généralement pas être exprimées plus tard que lorsque l’Etat a accepté d’être lié à ce traité, a estimé Mme Telalian, précisant qu’elles ne devraient être formulées que dans des cas exceptionnels.  De telles réserves se révéleraient particulièrement incompatibles dans le cas des traités sur droits de l’homme, interrompant leur unité et leur cohésion et sapant leur objectif de règles universelles.  A l’égard des déclarations interprétatives, elle a soutenu qu’il faudrait les traiter comme étant de vraies réserves et non comme une catégorie à part.


M. DIMITRI LOBACH (Fédération de Russie) a rappelé que le projet de guide sur les réserves aux traités devrait être pratique et ne pas enfreindre les dispositions de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.  En ce qui concerne les déclarations interprétatives conditionnelles, il a estimé qu’elles devraient être régies par les mêmes règles que les déclarations interprétatives simples.  La décision finale devra être prise, a-t-il précisé, quand la Commission aura comparé les effets de ces diverses déclarations.  Il a par ailleurs estimé qu’il ne serait pas souhaitable d’inclure dans le projet des dispositions sur les réserves tardives.  Cela pourrait encourager cette pratique.  Les Etats parties peuvent toujours prévoir la possibilité de réserves, comme cela découle de la Convention de Vienne, a-t-il rappelé.  Le représentant a aussi estimé que tous ces aspects n’ont pas été suffisamment analysés dans les commentaires.  Il a proposé d’autres méthodes alternatives aux réserves, notamment des amendements au texte du traité.


Au sujet de la protection diplomatique, le représentant a noté que la question clef est de savoir si la CDI doit codifier le droit coutumier ou s’il suffit de se référer au développement progressif du droit.  Il a déclaré préférer la codification pour adopter une démarche prudente.  Le projet d’article 9 relance le thème de la continuité de la nationalité de la personne lésée.  Il a apprécié la tendance récente qui a pour effet de protéger davantage les individus, et a rappelé qu’elle ne doit pas aboutir à des situations injustes, comme pour la personne qui change involontairement de nationalité et qui ne doit pas se voir refuser la protection diplomatique.  Les critères adoptés par le rapporteur spécial, à savoir l’épuisement des recours internes, nous semble suffisant, a-t-il ajouté.  Ces recours doivent bien sûr être disponibles dans la pratique et pas seulement en théorie.


En ce qui concerne les actes unilatéraux des Etats, le représentant s’est félicité de l’effort du rapporteur spécial visant à classer les actes unilatéraux.  Il a aussi noté que certaines suscitent des doutes, notamment les déclarations interprétatives.  Il s’agit d’une question qu’il faudrait examiner dans le cadre des réserves, a-t-il considéré.  Leur interprétation, a-t-il observé, est certes subjective, mais elle tient compte des effets que peut avoir l’acte unilatéral.  Pour conclure, il a évoqué les nouveaux thèmes, exprimant son accord pour examiner la question de la responsabilité internationale des organisations internationales.


MME KAREN ODABA (Kenya), abordant divers aspects du rapport de la CDI, a indiqué que sa délégation appuie la recommandation de la CDI visant à ce que l’Assemblée générale prenne acte du projet de texte sur la responsabilité des Etats et envisage à un stade ultérieur la tenue d’une conférence diplomatique pour en faire une convention.  Sur les réserves aux traités, elle a indiqué que les projets de directives doivent combler les lacunes du régime actuel et non pas modifier ce qui est contenu à cet égard dans la Convention de Vienne sur les réserves.  Concernant les déclarations interprétatives conditionnelles, la représentante a dit craindre que la formule proposée encourage un accroissement des réserves tardives.  Elle a ensuite estimé que le pouvoir du dépositaire d’un traité doit être limité.  De l’avis de sa délégation, il revient aux Etats parties de décider si une réserve est compatible ou non avec un traité.  Pour ce qui est de la protection diplomatique, elle a dit hésiter à appuyer une règle qui remettrait en cause la continuité de la nationalité, sauf dans des cas exceptionnels.  A cet égard, elle a souligné que la distinction entre changement volontaire et involontaire de nationalité se révélait un élément clef.  Elle a soutenu que la pratique actuelle des Etats n’était pas très claire en ce qui concerne la protection diplomatique des personnes morales.


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