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AG/J/357

PROJET D’ARTICLES SUR LA RESPONSABILITE DES ETATS: L’ATTENTION DES DELEGATIONS CONTINUE D’ETRE FOCALISEE SUR LE DILEMME CONVENTION OU RESOLUTION, OU LES DEUX

31/10/2001
Communiqué de presse
AG/J/357


Sixième Commission

12e et 13e séances– matin et après midi


PROJET D’ARTICLES SUR LA RESPONSABILITE DES ETATS: L’ATTENTION DES DELEGATIONS CONTINUE D’ETRE FOCALISEE SUR LE DILEMME CONVENTION OU RESOLUTION, OU LES DEUX


Nouvelles craintes exprimées par le Président de la CIJ

face à la multiplication des instances judiciaires internationales


La Commission juridique (Sixième Commission), présidée par M. Pierre Lelong (Haïti), a poursuivi aujourd’hui l'examen du rapport de la Commission du droit international (CDI), en se consacrant principalement au chapitre IV portant sur la responsabilité des Etats.


Les interventions d’aujourd’hui ont continué à se focaliser sur la forme que prendra le projet d’articles.  Certaines délégations, notamment celles des Pays-Bas (s’exprimant au nom des pays nordiques), de l’Australie et du Japon, ont plaidé en faveur de son adoption cette année sous la forme d’une résolution de l’Assemblée générale, plutôt que par une convention adoptée à l’issue d’une conférence diplomatique, invoquant l’importance de garantir son universalité, ce que, de leur avis, n’assurerait pas une éventuelle convention.  Des délégations ont mis également l’accent sur la nécessité de maintenir l’intégralité du texte déjà négocié durant tant d’années.  Les représentants du Bahreïn et du Bélarus ont, pour leur part, insisté pour que le projet de texte devienne une convention internationale, afin qu’il acquière une force contraignante et obligatoire, assurant ainsi une plus grande stabilité en matière de codification des règles internationales sur la responsabilité des Etats. 


D’autres intervenants ont soutenu ouvertement la proposition en deux temps de la CDI, qui a recommandé à l'Assemblée générale de prendre acte de ce document et de l'annexer à une résolution, et d'envisager la possibilité de convoquer une conférence internationale de plénipotentiaires pour l'examiner en vue de l'adoption d'une convention sur ce sujet.  Le représentant du Mali a déclaré que cette démarche a l’avantage pratique de laisser le temps aux Etats, notamment les petits Etats, de mieux évaluer les tenants et aboutissants de ce projet fondamental.  Il a cependant mis en garde que cela ne devrait pas servir de prétexte pour laisser mourir le projet.  Certaines délégations, plutôt favorables à une convention ont dit se rallier à la démarche en deux temps proposée par la CDI par souci de réalisme.


Après quatre décennies, la Commission du droit international a achevé cette année le chapitre de son projet d'articles consacré à la "responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite".  Plusieurs représentants ont souligné la dimension historique de cet aboutissement, le qualifiant de “très grand événement juridique et législatif dans l’histoire de la Commission” - Bahreïn - ou de “réalisation monumentale” ayant pris si longtemps parce que le projet initial était très ambitieux - Australie -.  Le représentant de Chypre a, pour sa part, fait observer que le processus avait nécessité bien trop de temps. 


Certaines délégations se sont exprimées sur le programme de travail futur de la Commission.  Pour le représentant du Népal, après la finalisation des deux projets d’articles, dont celui sur la responsabilité des Etats, le moment est venu d’évaluer le travail de la CDI et de la préparer pour les défis futurs.  Il a souhaité que la vocation du droit international soit plus systématique et qu’un rôle plus étendu soit dévolu à la CDI, étant donné que l’ONU constitue l’organisation internationale principale chargée de promouvoir la paix et la justice.  De l’avis de la délégation népalaise, une évolution s’avère notamment nécessaire dans des domaines tels que les ressources naturelles partagées et les technologies de l’information.


Le Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Gilbert Guillaume (France) a pris la parole ce matin, afin de, selon les termes utilisés par le président de la Sixième Commission, faire part de ses réflexions et de poursuivre un dialogue approfondi et enrichissant, dans la longue tradition d’échanges fructueux et de coopération étroite entre les deux institutions.M. Guillaume a évoqué la question de la prolifération des instances judiciaires internationales qui soulève de nombreuses interrogations.  La situation ne s’est pas améliorée depuis l’année dernière, a-t-il fait remarquer, prévenant que la multiplication des juridictions internationales peut mettre en danger l’unité du droit international.  L’essentiel de son intervention a ensuite été axé sur la contribution essentielle de la jurisprudence de la CIJ dans le domaine du droit de la mer, notamment par l’arrêt du 16 mars 2001, dans une affaire opposant le Qatar et le Bahreïn, concernant la souveraineté sur la délimitation des espaces maritimes.


Les représentants des pays suivants ont pris la parole aujourd’hui: Japon, Bélarus, Afrique du Sud (au nom de la SADC), Pays-Bas (au nom des pays nordiques), Bahreïn, Espagne, Australie, Singapour, Allemagne, Autriche, Italie, Israël, Mali, Pologne, Népal et Chypre.


La Sixième Commission reprendra ses travaux, demain jeudi 1er novembre à   10 heures.

Allocution du Président de la Cour internationale de Justice


M. GILBERT GUILLAUME, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a évoqué la question de la prolifération des instances judiciaires internationales qui soulève des interrogations nombreuses.  La situation ne s’est pas améliorée depuis l’année dernière, a-t-il fait remarquer, les risques de recourir aux tribunaux s’étant même aggravés, comme dans l’affaire du thon à nageoire bleue.  La multiplication des instances internationales peut mettre en danger l’unité du droit international, a prévenu M. Guillaume.  Les législateurs devront faire preuve d’une extrême prudence et des mécanismes devront sans doute être mis en place pour statuer sur les questions préjudicielles qui pourraient être posées.   A ce jour, la Cour compte 22 affaires à son rôle, a-t-il indiqué, sans toutefois donner davantage de précision sur son activité générale, afin d’éviter de reprendre sa présentation faite hier à l’Assemblée générale.


Un différend territorial entre le Qatar et Bahreïn (décision du 16 mars 2001), relatif à la souveraineté sur certaines îles et la délimitation des espaces maritimes, a introduit une autre question que le Président de la Cour a développée.  Cette affaire a permis de préciser la jurisprudence de la Cour sur le droit de la mer.  La contribution de cet arrêt est essentielle en droit de la mer, a expliqué M. Guillaume, rappelant que la délimitation des espaces secondaires longtemps considérée comme une question secondaire, s’est davantage affirmée à la suite de nombreux accords conclus dans le monde au cours de ces 30 dernières années.  Il a évoqué les différentes méthodes utilisées pour cette délimitation, comme celle de l’équidistance.  La délimitation des mers territoriales est traditionnellement fixée à trois milles des côtes, souvent maintenant à douze milles des côtes.  La ligne de base normale qui permet de la mesurer est la méthode traditionnelle.  Mais, a poursuivi le Juge Guillaume, la Cour internationale de Justice a préféré une autre méthode, celle des lignes de base droites, dans son arrêt du 18 décembre 1951 sur l’affaire des pêcheries anglo-norvégiennes.  Cette méthode a ensuite été reprise par la Convention de Montego Bay, dans son article 7.  Dans l’arrêt du 16 mars 2001 précité, M. Guillaume a expliqué que la Cour a mis en application ces dispositions pour la première fois.


Sur la question des eaux territoriales des Etats voisins, M. Guillaume a rappelé que l’article 15 de la Convention de Montego Bay a posé un principe de détermination selon la méthode de l’équidistance, tout en prévoyant des exceptions pour circonstances spéciales, notamment historiques.  La Cour a été appelée à se prononcer pour la première fois dans ce même arrêt sur la délimitation des eaux territoriales entre Qatar et Bahreïn.  Cela a été l’occasion de s’attacher à la notion de hauts fonds - car cette affaire soulevait un problème particulier -  se situant dans la zone de chevauchement des eaux territoriales.  Le Juge Guillaume a indiqué que la Cour a estimé qu’un Etat ne peut pas acquérir la souveraineté sur un haut fond situé dans la limite de sa mer territoriale quand il se situe aussi dans les eaux territoriales d’un autre Etat.  La Cour a estimé qu’il ne convenait pas d’attribuer un effet disproportionné à certaines formations maritimes insignifiantes, comme elle l’avait déjà fait dans l’affaire de l’îlot désert de Filfla (Libye et Malte).


Abordant la question de la délimitation du plateau continental et de la zone économique exclusive, M. Guillaume a indiqué que la Cour a également établi de manière progressive une jurisprudence qui fait aujourd’hui autorité et qu’elle a définitivement mise au point dans l’affaire opposant le Qatar et le Bahreïn.  La Cour s’était déjà penchée sur cette question dans l’affaire du plateau continental de la mer du Nord, puis dans celle opposant la Tunisie et la Libye et l’affaire du Golfe du Maine.  Après l’adoption de la Convention de Montego Bay qui a été largement influencée par ces arrêts sur ce point, la Cour a fait encore évoluer la jurisprudence, prenant la ligne d’équidistance comme point de départ provisoire de la délimitation et la déplacer en fonction des principes équitables à appliquer, comme la configuration générale des côtes.  Une nouvelle étape a été franchie avec l’affaire opposant le Danemark et la Norvège en 1993.  C’est sur les mêmes principes que la Cour s’est prononcée dans l’affaire opposant le Qatar et le Bahreïn, a-t-il expliqué.  Le droit international est en perpétuel devenir et le droit de la mer n’échappe pas à cette règle.  Toutefois, il est parvenu à un degré d’unité et de certitude, tout en conservant une souplesse nécessaire, a conclu le Président de la CIJ.


Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa cinquante-troisième session.


Déclarations:


M. CHUSEI YAMADA (Japon) a mis l’accent sur la complexité de la question de la responsabilité des Etats dont la codification n’a pas été facile.  Il a donc félicité les membres de la CDI pour l’achèvement du projet d’articles sur ce thème.  S’agissant de la forme que pourrait prendre ce projet, il a soutenu la recommandation de la Commission, consistant en l’adoption d’une résolution par l’Assemblée générale avec le projet en annexe.  Cela peut se faire facilement au cours de cette session, a-t-il estimé.  De l’avis de M. Yamada, il serait prématuré d’envisager une convention car le temps qui sera consacré à son élaboration pourrait compromettre l’équilibre fragile atteint par la CDI.  Tout en comprenant l’intérêt d’une convention, il a convenu que son élaboration pourra se faire au cours d’une deuxième étape, par une conférence diplomatique, comme l’a suggéré la Commission.  Il a toutefois apprécié le contenu du texte dans son ensemble.  En ce qui concerne les “violations graves”, M. Yamada s’est réjoui que la notion de “crime international” ait été complètement éliminée du texte final.  Il a estimé par ailleurs que les Etats doivent coopérer pour réprimer ces graves violations.  Des conséquences juridiques découlent-elles de violations qui sont différentes de violations ordinaires?  C’est la question à se poser, selon lui, pour faire la distinction entre les types de violations.  Il a aussi noté que les conséquences les plus problématiques des violations graves ont été supprimées du texte.  Le nouveau texte contient seulement les conséquences spéciales.


Faisant référence aux violations d’obligations dues à la communauté internationale dans son ensemble, M. Yamada a fait valoir que la norme impérative est un concept développé dans le droit des traités, mais qui ne doit pas avoir nécessairement de répercussion sur la responsabilité des Etats.  Sans s’opposer à l’emploi de ce terme, il a estimé qu’il faut faire preuve de prudence pour développer le contenu de ces normes impératives.  S’agissant des contre-mesures prises par des Etats autres que les Etats lésés, il s’est dit heureux de constater que la clause y afférente a été supprimée.  Par ailleurs, il s’est félicité que le texte précise la distinction entre dommages et préjudice, le dernier incluant les dommages.  Les dispositions du texte actuel répondent aux préoccupations du Japon, a indiqué M. Yamada, soulignant que son Gouvernement attache une grande importance à ce texte final, fruit d’efforts inlassables accomplis par la CDI au cours de longues années de travail.


M. ANDREI N. POPKOV (Bélarus) a souhaité que le projet de texte prenne la forme d’une convention.  Il a soutenu que la CDI joue davantage pleinement son rôle sur le plan international en faisant de ce projet de document un instrument contraignant.  Le Bélarus souscrit à la tenue d’une conférence de plénipotentiaires dont le rôle porterait essentiellement sur l’élaboration d’un traité sur la question.  Le représentant a indiqué que les contre-mesures auraient dû être incluses dans la partie 2 du chapitre 3, et a regretté qu’elles aient été omises dans le projet de texte actuel.  Il s’est dit favorable à l’inclusion dans le projet de texte d’une section consacrée aux mécanismes de règlement des différends.  A ses yeux, l’application de contre-mesures doit se faire de façon équilibrée et en évitant tous les abus.  Or, a-t-il déclaré, l’arbitrage dans les cas de contre-mesures tend à faire l’objet d’un processus davantage politique que juridique, ajoutant qu’il se révèle difficile pour les Etats puissants de résister à la tentation d’utiliser des moyens plus forts.  M. Popkov a estimé par conséquent qu’il y va de l’intérêt des Etats plus faibles de maintenir dans le projet de texte un recours à un mécanisme obligatoire de règlement des différends.  Il a aussi tenu à rappeler que l’adhésion à une convention relève du libre choix des Etats à s’y conformer.  Concernant l’article 48, qui donnerait aux Etats tiers le droit de traduire en justice un Etat coupable de violations, il a estimé qu’il devrait être discuté plus avant par une conférence de plénipotentiaires, étant donné qu’il s’agit d’une notion nouvelle et révolutionnaire en droit international.  Il a enfin soulevé le besoin de préciser la question de la responsabilité des Etats membres d’organisations internationales dans les cas où celles-ci violeraient le droit international, soutenant qu’il s’agit là d’une lacune du projet de texte.


M. ALBERTUS JACOBUS HOFFMAN (Afrique du Sud), s’exprimant au nom de la Communauté de développement des Etats d’Afrique australe (SADC) a salué le travail de codification et de développement progressif du droit international que représente l’achèvement du projet d’articles sur la responsabilité des Etats.  Il a observé que la plupart des dispositions sont soutenues par les autorités judiciaires et la pratique des Etats, et en particulier la Cour internationale de Justice.  Concernant la forme que devrait revêtir ce texte, il a opté pour celle d’une convention, adoptée dans le cadre d’une conférence diplomatique.  Toutefois, en raison de la complexité de la question que pose la responsabilité des Etats, il ne faut pas prendre de décision hâtive pour convoquer une telle conférence.  De plus, la plupart des articles reflètent le droit coutumier international qui n’ont pas à être ratifiés dans un traité.  Un tel traité prendrait des années pour entrer en vigueur, a-t-il également fait valoir.  C’est pourquoi, la SADC a appuyé la recommandation de la CDI à ce sujet, suggérant que la Sixième Commission ne se limite pas à prendre note du projet d’articles, mais en recommande l’examen par les Etats.


Le représentant a déclaré apprécier la suppression dans le texte final des dispositions de l’article 19 relatives au crime d’Etat.  Il a rappelé que la responsabilité pénale individuelle pour violation du droit international est aujourd’hui une notion acceptée par le Statut de Rome établissant la Cour pénale internationale, et a considéré que la responsabilité pénale des Etats constitue un autre sujet.  En ce qui concerne les violations d’obligations dues à la communauté internationale dans son ensemble, tout Etat a un intérêt à obliger un Etat à remplir ses obligations en vertu de normes impératives, a-t-il poursuivi.  La SADC se félicite de l’article 48 à ce sujet qui autorise un Etat non lésé à demander à l’Etat qui viole une obligation de mettre un terme aux actes illicites dans l’intérêt de l’Etat lésé.  Le représentant a aussi abordé la question des contre-mesures qu’il considère controversée car elle n’a pas sa place dans un système juridique centralisé.  Il s’est réjoui que le projet d’articles, qui reconnaît cette réalité, assortisse l’exercice des contre-mesures à des conditions strictes pour éviter les abus.  Enfin, l’article 8 est d’une importance toute particulière, selon lui, car il s’attache au cas de la responsabilité de l’Etat lorsqu’une personne se comporte sous la direction ou le contrôle de l’Etat.


M. JOHAN G. LAMMERS (Pays-Bas) a souscrit pleinement à la proposition de la CDI visant l’adoption par l’Assemblée générale d’une résolution comportant en annexe le projet de texte sur la responsabilité des Etats.  Il a toutefois exprimé des réserves sur l’utilité d’en faire une convention.  Parmi les problèmes liés à cette seconde éventualité, il a mentionné le risque que soit remis en cause une partie des acquis du présent projet de texte, le manque de ratifications pour son entrée en vigueur ainsi que les aléas entourant l’inclusion de clauses sur les mécanismes de règlement des différends.  En somme, compte tenu du fait que la plupart des articles reflètent le droit coutumier international, les Pays-Bas ne croient pas que l’incorporation du projet de texte sous la forme d’une convention ajouterait quoique ce soit au développement du droit international.  Il a précisé cependant que son pays n’exclut pas que le projet d’articles soit éventuellement élaboré sous la forme d’une convention.  Concernant le contenu même du projet de texte, en vue de son adoption par une résolution de l’Assemblée générale, le représentant a indiqué qu’il ne voyait plus aucun besoin de l’amender à ce stade.  Néanmoins, il a tenu à exprimer le regret de sa délégation face au changement de libellé, par lequel la notion de “crime international” a été remplacée par “violations graves d'obligations dues à la communauté internationale dans son ensemble”, reconnaissant toutefois que la CDI avait dû le faire pour maintenir un consensus sur le projet de texte.  Il a regretté également l’abandon de la liste d’exemples de crimes internationaux qui se trouvait dans des projets de textes antérieurs, réitérant que ces absences laisseront beaucoup de lacunes dans l’élaboration d’une jurisprudence internationale et du droit international en général.  Le représentant s’est félicité de l’introduction de la possibilité pour les Etats non lésés de poursuivre un Etat qui commet une violation  au nom d’un Etat lésé, du moins telle est son interprétation des amendements apportés à l’article 48.  En général, en dépit de quelques réserves sur le texte final du projet d’articles relatif à la responsabilité des Etats, le représentant y voit une étape marquante en matière de codification et de développement du droit international, qui se révèlera un mécanisme international utile pour les relations internationales entre Etats, une fois que ses articles auront été adoptés par l’Assemblée générale.


M. HUSAIN M. AL BAHARNA (Bahreïn) a estimé que le rapport de la CDI, contenant un projet de texte final sur la question de la responsabilité des Etats, marque un très grand événement juridique et législatif dans l’histoire de la Commission, puisque ce point figurait à son ordre du jour depuis 1949.  Sur les aspects demeurant en suspens, il a dit que son pays a toujours été favorable à l’inclusion d’une procédure de règlement des différends pour éviter tout abus de contre-mesures par les Etats lésés.  De l’avis de sa délégation, le projet de texte actuel serait incomplet sans un tel mécanisme.  Sur la forme du projet d’articles, il a souhaité que le texte revête la forme d’une convention internationale contraignante, assurant ainsi une plus grande la stabilité en matière de codification des règles sur la responsabilité des Etats. 


En général, le chapitre 3 de la deuxième partie du projet d’articles crée problème, aux yeux de sa délégation, a indiqué M.Al Baharna, faisant observer que, sur la notion de “violations graves d’obligations dues à la communauté internationale dans son ensemble”,  les projets d’articles 40 et 41 actuels sont plus faibles et dilués que les anciens articles, et ne traitent plus des obligations de la communauté internationale.  Il a aussi regretté l’absence d’indication claire sur le paiement par l’Etat responsable de dommages et intérêts reflétant la gravité des violations commises.  Le représentant a exprimé sa préférence pour le texte de l’ancien article 42 à ce sujet.  Concernant le nouveau projet d’article 42, il a noté qu’il contient trop de dispositions susceptibles de créer des ambiguïtés.  Le nouveau projet d’article 48, qu’il juge très utile et important, ne mentionne pas l’intérêt juridique de la communauté internationale dans son ensemble, a déploré M. Al Baharna, suggérant que l’on ajoute explicitement qu’une intervention viserait à défendre l’intérêt collectif.  Il a indiqué que les projets d’articles 49, 50 et 51 sur les contre-mesures sont dans l’ensemble acceptables.  Toutefois, sur le paragraphe 2 du projet d’article 52, permettant à l’Etat lésé d’appliquer de façon urgente des contre-mesures, il a estimé que le texte actuel ouvrirait la voie à l’arbitraire et à la possibilité d’abus de la part de l’Etat lésé.  De l’avis de sa délégation, l’article devrait utiliser l’expression “mesures licites urgentes” et non pas contre-mesures.


M. AURELIO PEREZ GIRALDA (Espagne) s’est prononcé en faveur de la forme contraignante pour l’adoption du projet d’articles sur la responsabilité des Etats.  De l’avis de sa délégation, la proposition de la Commission du droit international - visant l’adoption par l’Assemblée générale d’une résolution qui comporterait en annexe le projet d’articles et la convocation à une date ultérieure d’une conférence de plénipotentiaires pour conclure une convention sur ce sujet - est toutefois une solution réaliste, car les Etats pourront négocier sur la base du projet d’articles pour en faire ultérieurement un instrument contraignant.  Il a déclaré soutenir le projet d’articles, bien que des commentaires qui avaient été exprimés par sa délégation sur le développement progressif du droit international ne soient pas reflétés, de même que ses observations sur un système de règlement des différends, notamment sur les contre-mesures qui, selon lui, pourra seulement être adopté dans le cadre d’une convention.  Concernant la question de la protection diplomatique, un des autres thèmes du rapport de la CDI, il a dit apprécier le régime de recours internes.  Toutefois, cette approche équilibrée ne correspond pas à la solution adoptée dans l’article 44 du projet d’articles sur la responsabilité des Etats.  Pour ce qui est du débat sur la continuité de la nationalité, M. Perez Giralda a considéré que le maintien de la norme traditionnelle est indiqué, avec les exceptions convenues.  Faisant référence aux actes unilatéraux, il a souligné la nécessité de qualifier l’acte unilatéral et de rechercher l’intention de l’Etat qui a commis cet acte.  Sur la question des réserves aux traités, il a estimé qu’il n’y a pas de raison pour que les règles directrices que la Commission est en train d’élaborer soient séparées de la Convention de Vienne sur le droit des traités.


M. MICHAEL BLISS (Australie) a qualifié de réalisation monumentale l’achèvement du projet d’articles sur la responsabilité des Etats par la CDI, expliquant que si ce projet a pris si longtemps, c’est parce qu’il était très ambitieux.  La CDI a réussi, a-t-il dit, à fournir la base sur laquelle le droit international pourra s’établir plus solidement.  M. Bliss s’est félicité de l’utilisation dans le projet d’article 42 de l’expression “communauté internationale dans son ensemble”.  En général, l’Australie souscrit à l’inclusion de contre-mesures dans le projet et considère que les dispositions sur les contre-mesures ne doivent pas être trop restrictives.  Concernant le projet d’article 10, il a estimé qu’il aurait été utile de considérer qu’un acte d’un gouvernement résultant d’un soulèvement populaire y soit considéré comme une décision de cet Etat, ajoutant toutefois que les observations apportées par son pays ne doivent pas être interprétées comme une critique du projet d’articles.  L’Australie souscrit entièrement à l’adoption cette année du projet d’articles par l’Assemblée générale sous la forme d’une résolution, comportant en annexe le texte du projet.  En revanche, l’Australie n’est pas convaincue de l’utilité de tenir une conférence de plénipotentiaires pour élaborer une convention sur la responsabilité des Etats.  Selon le représentant, le projet de texte devrait demeurer une résolution de l’Assemblée générale, garantissant l’intégrité du texte négocié.  L’adoption du projet d’articles sous cette forme assurerait davantage l’universalité de son application qu’une convention, puisque rien n’interdirait aux tribunaux de s’y référer.  En outre, l’Australie préfèrerait que la résolution de l’Assemblée générale recommande de ne revenir sur cette question que dans quatre ou cinq ans.


M. WARREN CHIK (Singapour), notant l’effort de simplification du texte du rapport de la CDI, a apprécié les nombreuses références juridiques anciennes et nouvelles qui y sont faites, ainsi que les références aux décisions de la Cour internationale de Justice.  Ceci devrait permettre une adhésion plus grande au droit international, a-t-il considéré.  Concernant le sujet de la responsabilité pour faits internationalement illicites de l’Etat, il a félicité la Commission pour avoir finalisé le texte qui pourrait, dans un avenir proche, constituer la base d’une convention sur la responsabilité des Etats.  Le représentant a noté le choix qui a été fait d’adopter une approche inclusive de la définition du “dommage” et a fait sienne la méthode dont sont traitées les contre-mesures dans le chapitre II, troisième partie du texte.  Il s’est dit certain que les articles et les commentaires contenus dans ce document contribueront de manière significative tant à la codification qu’au développement progressif des règles de droit international en matière de responsabilité.


S’agissant du thème des réserves aux traités, le représentant a relevé que les réserves tardives correspondent à une pratique relativement nouvelle qui est admise aux termes de la Convention de Vienne et du droit coutumier, mais qui soulève une controverse à propos de la procédure.  Si ces réserves tardives sont émises dans un cadre bien déterminé, a estimé M. Chik , elles ne sont pas contraires au droit des traités et leur pratique ne devrait donc pas conduire à des abus.  Pour lui, ces réserves tardives sont préférables au renoncement par un Etat à ratifier un traité.  Il a aussi relevé le délai de douze mois prévu pour formuler des objections aux réserves et a proposé, pour éviter une confusion avec l’“objection” au sens de la Convention de Vienne, l’utilisation des termes “rejet” ou “refus”.  Par ailleurs, sur le sujet de la protection diplomatique, le représentant a indiqué qu’il présentera des commentaires lorsqu’il sera en mesure de confronter les dispositions avec les pratiques des Etats.  De même, il se prononcera plus tard sur la question des actes unilatéraux des Etats.  Enfin, pour ce qui est du projet d’articles sur la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international, M. Chick a apprécié son caractère pratique quant à la gestion des risques pour la prévention des dommages transfrontières et l’accent qui a été mis sur la coopération de bonne foi entre les Etats.


M. GERD WESTDICKENBERG (Allemagne) a félicité la CDI pour ses travaux et son rapport, qui contribue au développement progressif du droit public international.  En ce qui concerne le thème de la responsabilité des Etats, il a souligné l’importance de cette question qui peut avoir des incidences dans tous les domaines du droit international.  Notant que la CDI n’a adopté le texte final du projet d’articles que le 9 août 2001, il a considéré le fait que certains Etats sont en train d’analyser le document et qu’un délai supplémentaire leur est nécessaire pour cela.  C’est pourquoi, il a suggéré que ce sujet soit mis à l’ordre du jour de l’Assemblée générale l’année prochaine, afin que chaque Etat qui le souhaite puisse faire part de ses commentaires.  L’Allemagne se félicite de l’élimination de la notion de “crime international” qui aurait pu créer une certaine confusion.  Cette notion a été remplacée par les “violations graves d’obligations découlant de normes impératives du droit international général”, a observé M. Westingberg, ce qui semble plus approprié.  En outre, il a noté avec satisfaction que le texte final ne prévoit plus que la gravité de la violation doit être reflétée dans la réparation.  Quant à la forme que prendra le projet, il a indiqué préférer l’adoption d’une résolution par l’Assemblée générale, afin de recueillir un consensus et éviter de détériorer le texte.


Le représentant a ensuite évoqué le sujet de la responsabilité internationale pour des faits internationalement illicites qui revêt, selon lui, une importance croissante en matière d’environnement.  Il a considéré que l’équilibre des intérêts a été respecté, même s’il est encore nécessaire de poursuivre la discussion.  En matière de protection diplomatique, il a noté que de nouveaux éléments ont été apportés pour alimenter la discussion et que celle-ci s’est axée sur deux questions: la règle de la continuité de la nationalité et l’épuisement des recours internes.  La question de l’épuisement des recours internes exige toutefois certaines précisions, a déclaré M. Westdickenberg, saluant à cet égard les efforts louables de la CDI.  Le critère de détermination du type de préjudice doit être efficace et mis à la disposition de tous, a-t-il observé, en évitant des recours purement discrétionnaires.  Abordant la question des actes unilatéraux des Etats, le représentant a insisté notamment sur les difficultés relatives à l’inclusion dans les projets d’articles des déclarations interprétatives, des promesses, des actes de reconnaissance et même des contre-mesures.  Enfin, en ce qui concerne les réserves aux traités, un ensemble de directives fondées sur le consensus a été étudié par la CDI, ce qui, de l’avis de M. Westdickenberg, représente un travail remarquable.  La question de l’exclusion des réserves par un traité multilatéral est un des sujets qui demeure dans la discussion, a-t-il rappelé.  L’engagement d’universalité et d’indivisibilité de la communauté internationale ne devrait pas être amoindri dans le cas des droits de l’homme et des droits associés, a-t-il estimé, convaincu que la communauté internationale et la CDI doivent trouver un terrain d’entente pour réconcilier les systèmes juridiques nationaux et les obligations résultant du droit international.


M. HANS WINKLER (Autriche) a abordé la question de la responsabilité des Etats, en remerciant les cinq rapporteurs spéciaux qui ont contribué à cet effort.  La recommandation de la CDI à l’Assemblée générale concernant la forme du projet d’articles sur la responsabilité des Etats est une approche sage.  Les deux options qui étaient proposées présentent des avantages et des inconvénients; toutefois, l’Autriche se prononce en faveur d’une résolution de l’Assemblée générale avec le projet en annexe.  Au cas où une conférence internationale serait organisée ultérieurement, les négociations pourraient bénéficier des travaux de la CDI, a-t-il estimé.  En ce qui concerne les règles qui codifient la coutume, M. Winkler a considéré que c’est un instrument utile pour le développement progressif du droit international.  En matière de fait internationalement illicite, il a estimé que la communauté internationale doit déployer des efforts visant à reconnaître le besoin d’établir des règles en la matière.  Notant que certaines délégations critiquent le projet d’articles parce qu’il ne contient pas de dispositions sur le règlement pacifique des différents, la délégation autrichienne juge préférable qu’il en soit ainsi.


Sur la question de la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses, le représentant a remercié la CDI d’avoir finalisé le projet d’articles.  Etant donné sa situation géographique en Europe, l’Autriche rappelle que cette codification a toujours été pour elle une priorité.  De l’avis de M. Winkler, la prévention se situe parmi les aspects les plus importants qui permettent de réaliser un développement durable.  Ce projet a été mûrement réfléchi et l’Autriche appuie la recommandation de la CDI, à savoir l’adoption rapide d’une convention.  M. Winkler a fait quelques suggestions sur certains articles et demandé notamment que soit précisés les liens entre l’article 3 et l’article 10 qui dressent la liste des facteurs déterminant le caractère licite ou non des activités.  Pour l’article 18, qui porte sur la relation avec les autres règles de droit international, il a estimé qu’une telle déclaration doit être soigneusement réfléchie et souhaité qu’il y ait une discussion sur ce point.  Dans l’ensemble, le projet d’articles est satisfaisant, a-t-il estimé.


En ce qui concerne la question des réserves aux traités, M. Winkler a commenté le projet de directives, relevant notamment que la directive 2.2.3 – réserves à la signature expressément prévues par le traité - risque de constituer une exception à la directive 2.2.1, relative à la confirmation formelle des réserves formulées lors de la signature d’un traité.  Il s’est interrogé sur la suffisance des pratiques des Etats, alors qu’il considère celle-ci incertaine et insuffisante.  Par ailleurs, M. Winkler a rappelé qu’il est prévu qu’on peut émettre des réserves après avoir exprimé son consentement, à condition qu’il n’y ait pas d’objection dans les douze mois.  La définition de ces réserves tardives par la CDI a pour but de ne pas s’écarter de la Convention de Vienne.  Cependant, pour lui, même si on les appelle réserves tardives, il s’agit d’une autre forme de déclaration qui devrait être traitée différemment.  Pour ce qui est des grandes lignes des déclarations interprétatives, il s’est interrogé sur leur conformité avec la Convention de Vienne.  Quant aux déclarations interprétatives conditionnelles, M. Winkler a noté l’existence d’autres dispositions, et a fait remarquer que le principe est assez vague.  En outre, il a émis des doutes sur l’utilité de les traiter séparément et c’est pourquoi, il n’a pas encouragé cette formulation de déclarations.  Enfin, sur le programme de travail de la CDI pour ses prochaines sessions, il a appuyé l’idée de nommer un rapporteur spécial sur le sujet de la responsabilité des organisations internationales et celui des ressources naturelles partagées.


M. UMBERTO LEANZA (Italie), évoquant un des aspects qu’il qualifie des plus délicats de la responsabilité des Etats, a rappelé que son pays a toujours soutenu qu’il existait, outre les faits illicites ordinaires ou “délits internationaux”, certains faits internationalement illicites particulièrement graves.  Il a soutenu que le droit international coutumier prévoit déjà que la violation de certaines obligations garantissant la protection des intérêts fondamentaux de la communauté internationale lèse directement les droits subjectifs de tous les Etats et les autorise à faire valoir la responsabilité de l’Etat qui a violé ces obligations.  De l’avis de sa délégation, le projet d’article 40 fournit une définition plus acceptable des faits illicites plus graves, en les qualifiant d’hypothèses de violation de normes impératives du droit international général, signalant toutefois que, par l’adoption de cette formule, la CDI semble élargir la catégorie des actes illicites plus graves par rapport à ce qu’était jadis la catégorie des crimes internationaux constituant un cercle concentrique plus étroit par rapport à celui des violations des normes impératives.  De l’avis de M. Leanza, le libellé proposé par la CDI ne semble pas dépourvu d’incertitudes, notamment celles relatives à la notion de norme impérative de droit international général et celles liées à la condition de gravité de la violation, estimant que l’on peut envisager que l’application pratique de l’article 40 pourra donner lieu à des divergences entre les parties concernées lorsqu’il s’agira de déterminer la condition de la gravité.  Le Gouvernement italien estime en outre que le libellé actuel du projet d’article 52 sur les conditions du recours à des contre-mesures est préférable à celui proposé l’an dernier.  Le représentant a fait sienne la suppression de la distinction entre contre-mesures et contre-mesures provisoires, une distinction qui était jugée assez confuse étant donné que, dans tous les cas, les contre-mesures ont un portée provisoire.  Sur la forme que devrait revêtir le texte, il a indiqué qu’il ne semble pas opportun, aux yeux de son pays, que le projet d’articles devienne une convention internationale, ce qui ouvrirait ultérieurement la voie à des négociations dans le cadre d’une conférence ou, préalablement, d’un groupe ad hoc de l’Assemblée générale et compromettrait éventuellement d’aboutir à un résultat positif.  Le Gouvernement italien opte, par conséquent, pour un instrument non contraignant et estime que l’Assemblée générale pourrait adopter une résolution qui recommande le projet d’articles à l’attention des Etats.


M. YORAM DINSTEIN (Israël) a félicité la CDI et son Rapporteur spécial, M. James Crawford, pour les résultats impressionnants et positifs des travaux accomplis.  Il a estimé que l’Assemblée générale devrait prendre note du projet d’articles sur la responsabilité des Etats.  Après de nombreuses versions au cours de longues négociations, il est bon que le projet d’articles passe par le creuset de la pratique internationale.  Dans un deuxième temps, on pourrait envisager l’élaboration d’une convention qui présente l’avantage de l’acceptation des dispositions par les juridictions internationales.  De l’avis de sa délégation, il y a toutefois certaines dispositions qui se limitent au minimum acceptable, comme les questions de nationalité.  Les détails peuvent cependant venir de la pratique en cours, a-t-il noté.  Le représentant s’est en outre inquiété du manque de directives détaillées et a souligné que le principe controversé de jus cogens n’est toujours pas éclairci.  Le moment est peut-être venu de voir dans quelle mesure, pour le définir, une énumération des règles de droit international est justifiée.  De l’avis de M. Dinstein, la référence aux conséquences des violations graves, qui sont naturelles dans le cas d’un génocide, peut être tout à fait inappropriée.  Il a aussi averti qu’il n’est pas heureux d’avoir des conséquences doubles dans les cas de violations graves, car cela peut mener à des abus.  Le représentant a noté, à cet égard, que le texte souffre encore des blessures qui ont résulté des discussions sur les crimes et délits.  Par ailleurs, il s’est félicité que les dispositions sur le règlement des différends ne figurent pas dans le texte.  Dans un avenir prévisible, il a estimé qu’il vaut mieux laisser cette question de côté pour qu’elle soit traitée séparément dans chaque instrument qui établit des règles primaires sur un point particulier du droit international.


M. SALIFOU FOMBA (Mali) a souligné que le sujet de la responsabilité des Etats constitue la question centrale du droit international et que l’importance politique et l’enjeu de ce projet d’articles, dont l’élaboration a duré plus de 40 ans, expliquent et justifient que tout n’y soit pas parfait et harmonieux.  Sur le projet d’article 42, dont la rédaction n’est pas globalement mauvaise, a-t-il dit, le représentant a précisé que son pays n’est pas contre l’éventualité de mieux préciser certains aspects comme, par exemple, l’obligation de non-aide ou assistance, ou la portée de l’expression “conséquence supplémentaire”.  Sur les contre-mesures, le Mali estime que leur exercice doit être assorti de garanties nécessaires et suffisantes pour en limiter les abus.  M. Fomba a dit apprécier le fait que la fonction des contre-mesures soit cernée dans le projet de texte en termes d’incitation au respect de l’obligation primaire et non sous l’angle punitif.


Le Mali favorise l’adoption du projet d’articles sous la forme d’une convention, mais souscrit cependant à la démarche en deux temps proposée par la CDI, consistant à d’abord faire adopter le projet de texte comme annexe d’une résolution de l’Assemblée générale, et à tenir ensuite une conférence internationale de plénipotentiaires en vue de la conclusion d’une convention.  Cette démarche a l’avantage pratique de laisser le temps aux Etats, notamment les petits Etats, pour mieux évaluer les tenants et aboutissants de ce projet vital, a-t-il indiqué, prévenant toutefois que cela ne devrait pas servir de prétexte pour laisser mourir le projet.  Il a conclu en disant que sa délégation demeure ouverte à la création d’un comité spécial ou d’un groupe de travail pour parachever le processus en recourant aux ultimes arbitrages politiques sur ce projet.


M. WLADYSLAW CZAPLINSKI (Pologne) a félicité la CDI pour l’achèvement du projet d’articles sur la responsabilité des Etats.  Il a estimé que quelle que soit sa forme future, il y sera fait référence par la pratique internationale et la doctrine.  Il a considéré en particulier que le texte est un compromis bien équilibré entre les intérêts des Etats.  De l’avis de sa délégation, il serait difficile d’y apporter des amendements qui pourraient être acceptés par tous les Etats.  Le représentant a souligné que les commentaires exhaustifs du projet d’articles peuvent servir de modèle pour une future codification, car ils montrent que le projet est bien ancré dans la pratique du droit international.  Abordant quelques points spécifiques, M. Czaplinski a indiqué que le fait d’attribuer à un Etat des actes qui émanent d’institutions non étatiques n’est pas clair.  Il a suggéré une introduction claire de la question de la responsabilité d’Etat pour les activités d’organisations parapubliques.  Concernant l’article 24 qui invoque la “détresse”, il n’est pas convaincu que la distinction avec “l’état de nécessité” formulée à l’article 25 soit réellement justifiée, car il considère que ces notions sont similaires.  Dans une grande majorité des cas, M. Czaplinski a relevé que les Etats agissent dans des situations de détresse de l’article 24 paragraphe 2.  Il s’est déclaré surpris par les commentaires de l’article 24 en ce qu’ils se réfèrent à des actes individuels tels que ceux des commandants de navires ou d’aéronefs.


Par ailleurs, même s’il est favorable à l’introduction de la notion de violation grave des normes impératives du droit international dans le projet d’articles, le représentant s’est déclaré insatisfait par la règle proposée.  Il a expliqué notamment que la distinction entre les violations ordinaires et les violations graves des normes impératives n’est pas justifiée.  Cette distinction ne relève pas de la pratique actuelle en droit international.  Enfin, sa délégation ne voit pas de relation claire entre l’article 41, d’une part, et les articles 48 (faisant référence aux obligations erga omnes, c’est-à-dire à l’égard de tous ) et 54, d’autre part.  Il a aussi émis des réserves sur l’article 50 du projet, se demandant si les exemples que cet article donne sont des exemples de normes impératives.  Dans ce cas, la nature des obligations internationales indiquées à l’alinéa c) est différente de celles prévues aux alinéas a) et b).  En conclusion, le représentant a exprimé l’espoir de voir les difficultés d’interprétation résolues par leur application dans la pratique.


M. SURYA SUBEDI (Népal) a félicité la Commission du droit international pour s’être acquittée de la tâche ardue que représente l’élaboration du projet d’articles sur la responsabilité des Etats.  La CDI a aussi terminé son travail sur le sujet de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, a-t-il noté, estimant que le moment est venu d’évaluer le travail de la Commission et de la préparer pour les défis futurs.  La création du droit international reste un processus mu par les crises et il est temps de s’écarter de cette approche ponctuelle, pour que sa vocation soit plus systématique.  Le représentant a souhaité qu’un rôle plus étendu soit dévolu à la CDI, étant donné que l’ONU est l’organisation internationale principale chargée de promouvoir la paix et la justice.  De l’avis du représentant, l’objectif du droit international devrait être de promouvoir la justice non seulement entre les Etats, mais aussi entre les générations.  Il a considéré qu’une évolution est donc nécessaire dans des domaines tels que les ressources naturelles partagées et les technologies de l’information.  Le droit n’est pas encore aussi développé qu’il devrait l’être pour les ressources naturelles.


En ce qui concerne le rapport de la CDI, M. Subedi s’est félicité de l’approche pragmatique adoptée par la Commission.  Pour ce qui est de la forme que devrait prendre le projet d’articles sur la responsabilité des Etats, il s’est déclaré en faveur d’une résolution de l’Assemblée générale qui faciliterait la tenue ultérieure d’une conférence diplomatique en vue d’élaborer une convention.  Sur le contenu du projet, il a souhaité disposer d’un délai supplémentaire pour l’examiner, notamment les articles 40 et 41 qui portent sur les violations graves d’obligations “erga omnes”.  Il serait souhaitable, a-t-il dit, d’étudier plus avant ce qui distingue ces violations dans le contexte du projet d’articles.  De même, s’agissant des dispositions sur les contre-mesures, M. Subedi a exprimé le souhait de les examiner à la lumière de l’article 33 de la Charte des Nations Unies et de la doctrine sur le règlement des conflits entre les Etats.  Il a par ailleurs apprécié le projet d’articles relatif à la prévention des dommages transfrontières, mais a estimé que ce texte n’a pas encore atteint le stade permettant de le soumettre à l’Assemblée générale.  La délégation népalaise serait favorable à l’idée de demander à la CDI d’élaborer un projet de convention sur cette question, sur la base du projet d’articles.  Pour les autres sujets à l’ordre du jour de la CDI, M. Subedi a souhaité que la Commission poursuive ses travaux car ils sont particulièrement importants.


M. ANDREAS J. JACOVIDES (Chypre) a commenté le rapport de la CDI dans son ensemble.  Sur les réserves aux traités, il a souhaité que le projet de guide législatif devienne réalité.  Concernant les réserves aux traités, le représentant a indiqué qu’il faut adopter des mesures pour ne pas encourager les réserves tardives. Il s’est également dit heureux des progrès accomplis dans le domaine de la protection diplomatique.  Sa délégation se félicite du fait que la CDI ait achevé son travail sur la responsabilité des Etats, un sujet très important en droit international, observant toutefois que cela avait pris bien trop longtemps.  Le représentant a passé en revue le projet d’articles sur cette question.  Reconnaissant que la perfection est l’ennemi du bien, il a déploré l’absence de procédure de règlement des différends dans le projet de texte final et a souhaité que cette lacune soit comblée lorsqu’une une convention sera négociée.  Sur la forme que devrait revêtir ce document, Chypre se prononce en faveur d´une convention contraignante, estimant le projet trop important pour n’en faire qu’une déclaration.  Il a cependant dit appuyer, par réalisme, la proposition de la CDI de la faire adopter d’abord comme annexe à une résolution de l´Assemblée générale mais en laissant la porte ouverte à une éventuelle convention.  S´agissant de la notion de violation grave de normes impératives, M. Jacovides a réaffirmé qu’il est toujours grave de violer le droit international.  Faisant référence à la question des contre-mesures armées, il a dit que celles-ci étaient contraires au droit coutumier et a insisté sur l’importance d’éviter des abus en ce domaine.  A cet égard, il s´est félicité que le projet d’article 59 clarifie le fait que l’ensemble du texte doit être interprété en vertu de la Charte des Nations Unies.


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