En cours au Siège de l'ONU

AG/J/331

RESERVES TARDIVES ET DECLARATIONS INTERPRETATIVES CONDITIONNELLES MOBILISENT L'ATTENTION DES DELEGUES A LA SIXIEME COMMISSION

1 novembre 2000


Communiqué de Presse
AG/J/331


RESERVES TARDIVES ET DECLARATIONS INTERPRETATIVES CONDITIONNELLES MOBILISENT L’ATTENTION DES DELEGUES A LA SIXIEME COMMISSION

20001101

Poursuivant l’examen du rapport de la Commission du droit international, la Commission juridique (Sixième Commission) a abordé ce matin les chapitres VII («Réserves aux traités»), VIII («Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international (prévention des dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses») et IX (autres points, notamment le programme de travail à long terme de la CDI).

Le président de la CDI, M. Chusei Yamada, a présenté le troisième volet de son rapport, concernant ces chapitres, et a insisté notamment sur le rôle pédagogique des projets de lignes directrices relatives aux réserves aux traités adoptés par la CDI.

Sur le thème des réserves aux traités, les représentants se sont surtout attachés au problème des réserves tardives et des déclarations conditionnelles. Les réserves tardives, c’est-à-dire celles faites après qu’un Etat eut exprimé sa volonté d’être lié par un instrument juridique, menacent la sécurité juridique des traités, ont-ils fait remarquer. Elles doivent donc être strictement encadrées et il n’est pas possible d’opposer aux Etats qui y présentent des objections les mêmes règles que pour les autres réserves. Les orateurs ont exprimé leur accord pour qu’une réserve tardive ne puisse être recevable que si aucune des autres parties n’émet d’objection dans un délai de 12 mois. Une seule objection annulerait donc la réserve tardive. La même mesure s’appliquerait aux modifications aux réserves, sauf dans le cas, d’ailleurs fréquent, où ces modifications constituent en fait un retrait partiel de la réserve, donc un engagement plus fort de l’Etat à être lié à la convention en cause. Les représentants se sont en outre montré favorables à l’extension de trois à 12 mois du délai pour présenter une objection à une réserve tardive. Le représentant de l’Espagne a par ailleurs souhaité que la CDI décide d’interdire les déclarations interprétatives conditionnelles, assimilées aux réserves, dans le cas de conventions interdisant les réserves.

Concernant le thème de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le projet de convention-cadre sur la prévention des dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses a été jugé équilibré.

Toutefois, le représentant de l’Italie a fait remarquer qu’on préparait là un instrument conventionnel entre Etats alors que l’essentiel des activités en cause est le fait d’opérateurs privés. Pour le représentant de l’Espagne, la codification de la teneur et de la portée du devoir de prévention pose des problèmes très complexes, notamment en ce qui concerne les liens avec la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables d’actes non illicites. Il faut donc garder ce lien entre le thème de la prévention et le traitement de la responsabilité, a déclaré le représentant de l’Espagne qui a, par ailleurs, estimé que le projet de convention était trop restrictif sur la notion de dommage transfrontière en ce qu’il ne traite pas des dommages causés aux espaces relevant du patrimoine commun de l’humanité, contrairement à de nombreux instruments internationaux et même à la jurisprudence internationale.

Sur cette partie du rapport, les représentants des Etats suivants ont pris la parole ce matin: Allemagne, Italie, Espagne, Guatemala, République de Corée et Suède, au nom des pays nordiques (sur les réserves aux traités).

La Commission juridique avait auparavant achevé l’examen des chapitres V et VI du rapport de la CDI, relatifs à la «protection diplomatique» et aux «actes unilatéraux des Etats»). Sur ces chapitres, se sont exprimés ce matin les représentants de Chypre, de la Jordanie, de la Fédération de Russie, de Bahreïn, et du Brésil, ainsi que l’Observateur de la Suisse.

Lors de l’ensemble du débat sur la protection diplomatique, les représentants ont réaffirmé que celle-ci est un droit discrétionnaire de l’Etat dont la mise en oeuvre est toutefois subordonnée à certaines conditions établies par la pratique des Etats et le droit coutumier: violation préalable par un Etat d’une de ses obligations internationales entraînant un préjudice pour un national, et déni de justice pour ce dernier, qui doit donc avoir d’abord tenté d’obtenir réparation de son préjudice par les voies légales qui lui sont offertes par l’Etat fautif. Il faut enfin un lien effectif entre la personne protégée et l’Etat qui exerce la protection. L’importance de ce lien effectif a été largement débattue. A été également discutée la question complexe de l’exercice de la protection diplomatique au profit d’une personne à nationalité multiple, en particulier lorsqu’elle possède aussi la nationalité de l’Etat contre lequel elle invoque la protection diplomatique. Les représentants ont généralement été d’accord pour dire que, dans ce cas, la protection ne peut pas jouer, en tout cas si le lien entre la personne et l’Etat fautif est effectif.

La plupart des orateurs ont également affirmé que la protection diplomatique ne peut être mise en oeuvre que par les moyens autorisés par le droit international, et que le recours à la force, autorisé par la Charte des Nations Unies dans le seul cas de légitime défense après une attaque armée, doit donc être exclu. L’admettre comme moyen de protection diplomatique reviendrait à amender la Charte et ouvrira la voie à des abus des grandes puissances, ont estimé les partisans de l’interdiction. Lors du débat, seul le représentant de l’Argentine s’est ouvertement prononcé en faveur de la possibilité du recours à la force, ce qui a permis au représentant du Brésil d’estimer qu’un consensus était en cours de formation sur la question. En se montrant très largement opposé au recours à la force dans le cadre de la protection diplomatique et ce, sans exception, les représentants à la Sixième Commission se sont donc opposés à l’approche adoptée par le Rapporteur spécial de la CDI, qui n’avait déjà pas été suivi par la Commission elle-même.

Cette opposition des représentants des Etats envers les propositions du Rapporteur spécial a été tout aussi marquée face à l’approche générale adoptée par celui-ci en ce qui concerne la protection diplomatique et qui tendait, selon ses propres dires, à faire de cette pratique ancienne un instrument supplémentaire de protection des droits de l’homme. Beaucoup de représentants ont certes admis que la protection diplomatique pourrait être étendue à deux catégories de personnes qui en sont de fait privées dans la conception classique, à savoir les réfugiés et les apatrides, mais seulement dans certains cas, notamment lorsqu’il existe un lien de résidence entre le réfugié ou apatride et l’Etat qui entend exercer sa protection. Mais ils ont généralement estimé qu’il ne fallait pas confondre protection diplomatique et protection des droits de l’homme. La première est exercée discrétionnairement par un Etat au profit de l’un de ses ressortissants et couvre un champ d’application beaucoup plus large que la seule protection des droits de l’homme. Cette dernière doit être exercée en tant que devoir de la communauté internationale, ont fait valoir certains des orateurs.

Sur le thème des «Actes unilatéraux des Etats», la plupart des représentants se sont dit d'accord pour que la CDI limite son étude aux actes unilatéraux autonomes et accomplis dans l’intention de produire des effets juridiques. Ils ont également été d’accord dans l’ensemble pour que la CDI structure son travail sur la base d’une différence entre des règles générales applicables à l’ensemble des actes unilatéraux d’une part, et des règles spécifiques applicables à certaines catégories particulières d’autres part. Beaucoup ont souhaité que l’étude porte au plus vite sur l’examen des catégories d’actes qui créent des effets juridiques pour les Etats auteurs. Parmi les questions abordées par les représentants figuraient les moyens de porter un acte unilatéral à la connaissance d’un Etat destinataire, afin qu’il puisse produire des effets juridiques, ainsi que les sources légales d’actes unilatéraux (article 3 du projet d’articles), et les conditions de validité de ces actes, qui doivent, avant tout, être conformes au droit international, et en particulier aux normes péremptoires de celui-ci.

La Commission juridique poursuivra cet après-midi, à 15 heures, l'examen des chapitres VII (Réserves aux traités), VIII (Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international; prévention des dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses) et IX (autres points, notamment le programme de travail à long terme de la CDI) du rapport de la CDI.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE- DEUXIEME SESSION

Suite du débat sur la protection diplomatique et les actes unilatéraux des Etats

M. ANDREAS JACOVIDES (Chypre) a rappelé que le droit relatif à la responsabilité des Etats n’a pas beaucoup changé depuis quarante ans. Il est d’accord sur le fait que la protection diplomatique est un domaine très important pour les individus et qu’elle puisse être considérée comme moyen de défense des droits de l’homme. Mais la protection diplomatique reste un droit discrétionnaire des Etats qui peuvent y recourir parfois lorsqu’il s’agit de la plainte d’un ressortissant. Il a reconnu que le recours à la force dans ce domaine ne doit pas être considéré isolément mais par rapport aux dispositions en vigueur et, notamment, par rapport aux dispositions de la Charte qui prévoient son usage. Il a rappelé que la protection diplomatique est un droit des Etats qui peuvent suspendre son exercice si la personne intéressée dispose d’un recours qu’elle n’a pas exercé. Il a ensuite rappelé le contenu des articles 3 et 4 de ce même chapitre. S’agissant de l’article 5, l’avis traditionnel, à savoir celui de la CIJ, représente l’instance de recours après épuisement des recours nationaux. Concernant les réfugiés et les apatrides, il a déclaré qu’il garde un esprit ouvert en ce qui concerne les travaux futurs de la CDI.

Dans le domaine des actes unilatéraux, il a relevé que la codification est difficile, et il a fait sienne la reformulation de l’article Premier. Il convient de tenir compte de la pratique des Etats en cette matière, a-t-il souhaité. En ce qui concerne les réserves aux traités, l’évolution du droit rend utile l’élaboration d’un Guide pratique. Enfin, concernant le chapitre 8, il s’est félicité de ce que l’accent soit mis sur la prévention et que les travaux soient bientôt achevés.

M. MAHMOUD D HMOUD (Jordanie) a déclaré que la définition de la protection diplomatique doit préciser si la personne lésée qui doit être protégée est une personne physique ou peut aussi être une personne morale. En outre, la protection diplomatique peut être étendue à des non nationaux dans des circonstances exceptionnelles, a affirmé le représentant. C’est le cas des réfugiés et des apatrides. S’il ne pouvait en être ainsi, il y aurait une discrimination juridique, qui, dans les faits, existe malheureusement toujours, même 50 ans après la Déclaration universelle des droits de l’homme. Un Etat doit donc pouvoir garantir sa protection diplomatique à un réfugié ou à un apatride résidant régulièrement sur son territoire.

M. D Hmoud s’est également opposé à tout recours à la force en matière de protection diplomatique, car une autorisation, même très encadrée, ouvrirait la voie à des abus. Elle serait en outre contraire à la Charte qui, a-t-il rappelé, n’autorise le recours à la force qu’en cas de légitime défense après une attaque armée, et même pas dans le cas de violations graves du jus cogens.

Concernant la nationalité, il faut faire la différence entre le droit absolu d’un Etat d’accorder ou non la nationalité à une personne, et la nationalité comme élément de la protection diplomatique. Dans ce dernier cadre, la notion d’effectivité n’a pas à être recherchée si la nationalité a été obtenue par la naissance. La situation est différente si la nationalité de la personne a été acquise par naturalisation. En revanche, le projet d’articles 6 relève d’une tentative de développement progressif du droit international, a déclaré

M. D Hmoud. Pour différentes raisons, les règles de procédure appliquées par la CIJ dans l’affaire Iran contre Etats-Unis et par la Commission de compensation des Nations Unies ne fournissent pas la preuve que le droit international coutumier accepte de voir un Etat exercer sa protection diplomatique au profit d’un ressortissant qui possède également la nationalité de l’Etat mis en cause. Donner la possibilité à un ressortissant qui n’a pas la possibilité de faire valoir ses droits selon les procédures du droit national d’aller rechercher la protection diplomatique d’un autre Etat en en acquérant la nationalité, encouragerait le «forum shopping» en matière de nationalité, a estimé le représentant, qui s’est donc prononcé en faveur de la suppression du projet d’articles 6.

M. ROGACHEV (Fédération de Russie) a constaté que les catégories des actes unilatéraux sont nombreuses et a regretté que le Rapporteur Spécial se soit trop hâté de rédiger des projets d’articles. Il faudrait, à son avis, examiner d’abord la pratique des Etats en la matière. Il souhaite l’élimination de certains critères et une meilleure définition des actes unilatéraux. En ce qui concerne l’estoppel, il considère qu’il ne peut être exclu de la sphère des actes unilatéraux en fonction de ses liens étroits avec ces actes. Enfin, s’agissant de l’article 5 sur la nullité des actes unilatéraux, il a estimé qu’il constituait un pas dans la bonne direction.

M. HUSAIN AL BAHARNA (Bahreïn) a estimé que la protection diplomatique devrait être considérée comme un droit discrétionnaire de l’Etat. Il a jugé trop général l’article Premier du projet d’articles sur la définition de la protection diplomatique. La définition doit souligner le caractère pacifique des mesures que prend l’Etat, a-t-il ajouté. La protection diplomatique ne doit impliquer aucun recours ou aucune menace de recours à la force.

La protection peut bénéficier à un ressortissant qui a acquis la nationalité par naissance, par origine ou par naturalisation de bonne foi, a déclaré le représentant. C’est à l’Etat de décider qui doit être son ressortissant. Au plan international, il existe toutefois des limites qui sont liées parfois à la coutume internationale et aux principes généraux du droit. La question d’un lien véritable et effectif peut être posée, comme dans l’affaire Nottebohm, dans le cas où la nationalité a été acquise par naturalisation. Mais l’affaire Nottebohm ne peut être généralisée aux cas où le ressortissant ne possède qu’une seule nationalité, a estimé le représentant. Dans l’affaire Nottebohm, a-t-il rappelé, la personne intéressée avait la nationalité guatémaltèque par la naissance et depuis plus de 30 ans alors que la nationalité du Lichtenstein n’avait été acquise que récemment et par naturalisation. Le lien était donc beaucoup plus faible et ténu. Donc, le principe du lien effectif ne peut être appliqué qu’en cas de nationalité multiple. Pour le représentant, l’une des sources principales de difficultés vient de la grande différence de politique des Etats en matière de naturalisation. En particulier, outre l’acquisition frauduleuse de la naturalisation, le droit international pourrait refuser de reconnaître certaines naturalisations fondées sur des discriminations, notamment, raciales. Dans le cas de nationalité multiple mais de protection diplomatique face à un Etat tiers, ce dernier pourrait donner la préférence à celui des Etats qui entend exercer sa protection, avec lequel le lien de nationalité de l’individu en cause est le plus fort, a estimé le représentant. M. Al Baharna a estimé en outre que, vu les principes de protection des droits de l’homme et l’évolution de la protection des apatrides, il devrait être possible à l’Etat de résidence habituelle de l’apatride d’exercer sa protection diplomatique. Pour les réfugiés, la même procédure devrait être applicable, à condition toutefois que l’Etat dont le réfugié est le ressortissant refuse d’exercer sa protection.

M. THOMAS BURRI (Observateur de la Suisse) a parlé du droit des Etats d’exercer la protection diplomatique, et a indiqué à ce sujet qu’il partageait le point de vue selon lequel les Etats disposent d’un droit discrétionnaire en ce domaine. Il a noté qu’il y avait néanmoins des réserves à cette protection qui ne saurait intervenir que lorsque la personne intéressée a épuisé les recours devant les Tribunaux compétents. Concernant le recours à la force, il a estimé qu’il ne pouvait être autorisé, car ce n’est pas un instrument de protection diplomatique, définie elle-même comme un moyen de règlement pacifique des différends. S’agissant des liens effectifs de nationalité, il a fait remarquer que c’est à chaque Etat de fixer ses propres critères et, à cet égard, il s’est interrogé sur le bien-fondé du critère de la bonne foi qu’il considère trop vague. Il a estimé que cela peut entraîner pour un individu la privation de la protection diplomatique. Il a donc préconisé une plus grande précision de cette notion afin qu’on puisse se faire une opinion. Dans le cas de nationalité multiple, il a déclaré que la protection doit être possible par un des Etats de la nationalité et il ne peut donc pas soutenir l’article 7 tel qu’il est formulé. Il importe à son avis que la nationalité soit opposable et donc effective (cf affaire Nottebohm), principe qui a fait ses preuves et qui ne doit pas être abandonné. Il a déclaré qu’il ne peut pas appuyer le projet qui permet à deux Etats d’exercer conjointement la protection diplomatique. S’agissant des dispositions de l’article 8, il a indiqué que cette règle ne se justifie que lorsque les réfugiés et apatrides ne sont plus protégés par leur Etat, mais il a estimé qu’elle devrait se limiter seulement à la protection consulaire. La Suisse s’est enfin réjouie des prochains travaux annoncés par la Commission.

M. JAO BAENA SOARES (Brésil) a insisté sur la nécessité d’interdire le recours à la force ou la menace de recours dans le cadre de la protection diplomatique. Aucune exception ne doit être acceptée, a-t-il ajouté, en se félicitant qu’un consensus semble en cours de formation sur ce point. Le représentant a estimé que l’étude ne devrait porter que sur la protection diplomatique en faveur des personnes physiques. Il a également estimé que la protection diplomatique était beaucoup plus vaste que la protection des droits de l’homme et ne devait pas être confondue avec elle. Enfin, la protection diplomatique est un droit discrétionnaire des Etats, a-t-il rappelé.

Concernant les actes unilatéraux des Etats, le représentant a jugé nécessaire que les règles proposées par la CDI soient aussi précises que possible, afin qu’elles puissent contribuer à la transparence dans les relations entre Etats. Il a estimé qu’il était particulièrement important de définir les autorités qui ont la faculté d’engager l’Etat par un acte unilatéral. Aux chefs d’Etat et de gouvernement et aux ministres des Affaires étrangères, sources autorisées déjà prévues à l’article 3 du projet d’articles, il a proposé d’ajouter des personnes autorisées à agir dans un cadre donné. En même temps, il a estimé qu’il faut limiter le nombre de sources possibles, sans quoi on pourrait voir des actes unilatéraux contradictoires émis à des niveaux différents dans la hiérarchie interne des Etats, ce qui poserait des problèmes en droit international.

DEBAT SUR LES RESERVES AUX TRAITES, LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE POUR LES CONSEQUENCES PREJUDICIABLES DECOULANT D'ACTIVITES QUI NE SONT PAS INTERDITES PAR LE DROIT INTERNATIONAL ET LES AUTRES DECISIONS ET CONCLUSIONS DE LA CDI

Présentation du troisième volet du rapport de la CDI

(Note: le résumé du rapport de la CDI a été publié dans le communiqué AG/J/325 du 24 octobre)

M. CHUSEI YAMADA, Président de la Commission du droit international, a présenté le troisième volet du rapport de la CDI, consacré aux chapitres VII ("réserves aux traités"), VIII ("responsabilité pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international") et IX ( "Autres décisions et conclusions de la Commission").

M. Yamada a rappelé que la CDI avait examiné le cinquième rapport du Rapporteur Spécial sur les "Réserves aux traités", qui concerne les alternatives aux réserves et aux déclarations interprétatives, ainsi que la formulation, la modification et le retrait des réserves et des déclarations interprétatives. Il a rappelé que la CDI avait adopté cinq projets de directives qu'il a présentés.

Un premier projet de directives concerne les réserves formulées en vertu de clauses d'exclusion. Ce sont des déclarations unilatérales faites par les Etats en application des clauses dites "d'opting out" figurant dans de nombreux traités. Leur caractère de réserve a été fortement contesté, a déclaré M. Yamada, notamment du fait de l'opposition constante et ferme à une telle assimilation de la part de l'Organisation internationale du travail (OIT), opposition fondée sur une conception restrictive des réserves par l'OIT, qui ne se reflète pas dans les Conventions de Vienne sur le droit des traités. Proches des réserves, ces déclarations d'exclusion n'en sont cependant pas dans la mesure où elles ne fixent pas de condition à l'accession de l'Etat ou de l'organisation internationale qui les formule. Elles sont donc plus proches des dénonciations partielles, a expliqué le Président.

Un autre projet concerne les déclarations unilatérales formulées en vertu d'une clause facultative (opting in). Ces déclarations, qui ont pour effet d'accroître les obligations du déclarant, ne sont pas des réserves, a expliqué M. Yamada, mais la CDI les a incluses dans son projet car elles constituent le pendant des déclarations faites en vertu de clauses d'exclusion. Elles sont, en outre, souvent accompagnées de déclarations unilatérales apportant des restrictions ou des conditions à l'acceptation, mais ces dernières ne peuvent être considérées comme des réserves à un traité multilatéral. Certes, elles ont pour objectif de limiter les obligations contractées, mais ne peuvent être séparées de la déclaration principale et ne constituent donc en elles-mêmes une déclaration unilatérale.

Le troisième projet concerne les déclarations unilatérales opérant un choix entre les dispositions d'un traité. Là encore, la CDI a conclu que de telles déclarations ne sont pas des réserves et n'entrent pas dans le cadre du Guide de la pratique des réserves. Ces lignes directrices reflètent donc le caractère pédagogique du Guide de la pratique. Bien que ressemblant à des réserves, ces engagements alternatifs doivent être distingués des réserves en ce que la participation de leur auteur au traité et l'exclusion qu'elles visent sont définies par le traité lui-même.

Les réserves ne sont pas les seules procédures permettant aux parties d'exclure ou de modifier les effets juridiques de certaines dispositions conventionnelles ou certains aspects d'un traité dans son ensemble, a rappelé M. Yamada. Il fallait donc lier l'étude des réserves et déclarations interprétatives à celles des autres procédures ayant le même but. Le quatrième projet de lignes directrices traite justement de la question des alternatives aux réserves, qui peuvent prévoir l'insertion dans un traité de clauses restrictives, de clauses dérogatoires ou de procédures de "bilatérisation". D'autres techniques incluent la suspension du traité ou d'amendements aux traités qui ne lient pas automatiquement l'ensemble des parties. Une caractéristique notable de ces procédures, a expliqué M. Yamada, est qu'elles peuvent avoir lieu même après l'entrée en vigueur du traité. Le cinquième et dernier projet de lignes directrices concerne, lui, les alternatives aux déclarations interprétatives.

M. Yamada a ensuite présenté la seconde partie du rapport du Rapporteur Spécial sur les réserves aux traités. Cette partie qui, a-t-il rappelé, n'a pas été examinée par la CDI faute de temps, traite de la formulation des réserves et déclarations interprétatives, et notamment du moment et des modalités de leur formulation. Le Rapporteur Spécial s'est notamment intéressé à l'épineux problème des réserves tardives, faites après l'expression par l'Etat de son consentement à être lié par un traité. Selon le Rapporteur Spécial, de telles réserves pourraient être acceptées unanimement si aucune objection n'y a été faite dans un délai de 12 mois suivant la date de la formulation. Dans le cas contraire, le traité devrait entrer en vigueur envers l'Etat ou l'organisation qui avait fait la réserve tardive, comme si celle-ci n'existait pas.

M. Yamada a ensuite présenté le chapitre VIII intitulé "Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international (prévention des dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses)". Il a rappelé que la CDI avait examiné le troisième rapport du Rapporteur Spécial, élaboré à partir des commentaires et observations présentés par les États sur le projet d'articles adopté en première lecture en 1998. La plupart des membres de la CDI ont estimé qu'à quelques modifications près, le projet d'articles était prêt pour adoption, et qu'il contenait un ensemble complet de règles primaires concernant la gestion des risques et la prévention, lesquelles ne préjugent pas de normes plus élevées ou d'obligations plus spécifiques contractées dans le cadre de traités environnementaux. En outre, il a été dit à la CDI que la notion du devoir de "due diligence" pouvait impliquer que les articles ne seraient pas applicables en cas de conduite intentionnelle ou imprudente et créer la confusion avec la question de la responsabilité des Etats. La CDI, a ajouté M. Yamada, estime que le projet d'articles devrait être adopté sous la forme d'une convention-cadre.

Concernant le programme de travail à long terme de la CDI, M. Yamada a rappelé que son Groupe de planification avait énuméré cinq sujets: la responsabilité des organisations internationales; les effets des conflits armés sur les traités; les ressources naturelles partagées des États; l'expulsion des étrangers; les risques que pose la fragmentation du droit international. Le rapport présente en annexe un plan d'étude de chacun de ses sujets. La CDI est bien consciente que ce dernier thème est différent de ceux qu'elle a étudié jusqu'alors, a fait remarquer M. Yamada, mais elle estime que la CDI pourrait contribuer à une meilleure compréhension des enjeux. M. Yamada a estimé que, lors de son prochain quinquenium, la CDI devrait continuer de diviser son travail en deux demi-sessions annuelles de six semaines, mais a estimé qu'une ou deux de ces dernières pourraient être tenus à New York plutôt qu’à Genève, afin de renforcer les relations entre la CDI et la Sixième Commission. A plus long terme, il pourrait en revanche être souhaitable d'en revenir à une seule session de dix semaines.

Enfin, M. Yamada a rappelé que la CDI avait poursuivi ses échanges traditionnels d'informations avec la Cour internationale de Justice, le Comité consultatif juridique afro-asiatique, le Comité juridique interaméricain et le Comité des conseillers juridiques sur le droit international public du Conseil de l'Europe.

Déclarations

M. REINHARD HILGER (Allemagne), a déclaré qu’il acceptait les cinq nouvelles lignes directrices adoptées par le Comité de rédaction cette année, comme il avait accepté les 25 projets adoptés en première lecture par la CDI. Mais il a souhaité que la CDI se concentre désormais sur la recherche de solutions pratiques à des problèmes réels. La définition des réserves et des déclarations interprétatives constitue sans doute un défi intellectuel stimulant, mais le Rapporteur Spécial et la CDI ne doivent pas perdre de vue que la majorité des problèmes concrets provoqués par les réserves et leurs conséquences, y compris les possibles objections, comme les problèmes des déclarations interprétatives, ne mettent pas en jeu leur définition.

L’Allemagne se réjouit qu’un des projets de directives concerne les alternatives aux réserves, qui permettent à un nombre plus grand d’Etats de devenir parties aux traités, alors même qu’ils ne sont pas en état d’en assumer toutes les obligations. Toutes ces mesures alternatives peuvent avoir le même objectif que les réserves, tout en en évitant les inconvénients, a-t-il déclaré. Le représentant a souhaité que le projet de lignes directrices permette aux Etats de recourir plus souvent aux alternatives et aux réserves. La meilleure méthode est de faire preuve d’imagination en matière d’alternative pendant le processus de négociation, a-t-il ajouté car, quand les délégations s’y prennent au moment des dernières négociations, elles n’ont souvent plus le temps.

Concernant la question des réserves tardives, le représentant a déclaré son accord avec le Rapporteur Spécial pour dire que, si les objections aux réserves tardives avaient un effet aussi limité que les objections aux autres réserves, c’est le principe même Pacta sunt servanda qui serait mis en cause. L’Allemagne partage donc l’opinion selon laquelle les réserves tardives ne peuvent être acceptées que si toutes les autres parties au traité donnent leur consentement à une telle réserve, de manière au moins tacite. Une seule objection doit donc avoir pour effet d'annuler la réserve tardive. Traditionnellement, la période pour faire une objection à une réserve tardive était limitée à 90 jours. L’Allemagne se réjouit que la période ait été portée récemment à 12 mois, car ce délai permet aux gouvernements d’évaluer les réserves tardives et facilite un dialogue entre l’Etat qui a formulé la réserve tardive et les autres parties contractantes. Mais la date limite pour la formulation des objections ne peut pas être calculée seulement à partir de la date fixée par le dépositaire, a déclaré M. Hilger, qui a mentionné un problème concernant une objection à une réserve tardive présentée par son pays, problème consécutif à la lenteur avec laquelle certains services du Secrétariat avaient transmis les documents pertinents. Le dépositaire doit aussi tenir compte des délais de transmission, qui ont souvent été très longs, a déclaré le représentant. Avec les systèmes de transmission électronique, la situation est plus claire.

Les modifications de réserves constituent dans les faits une forme de retrait partiel des réserves, a déclaré le représentant. Il serait donc regrettable d’autoriser des objections à ces modifications, qui réduisent la portée de la réserve. Une seule objection malvenue viendrait en effet annuler le retrait partiel de la réserve. En revanche, un problème se pose toutefois lorsque la modification de la réserve modifie de fait le contenu de la réserve. Dans ce cas, la modification constitue en fait une nouvelle réserve tardive et doit être soumise au même régime que celles concernant les objections.

Le représentant a par ailleurs demandé que la CDI se concentre à l’avenir sur la question des réserves irrecevables. C’est là le sujet sur lequel nous avons le plus besoin de la CDI, a-t-il déclaré, et non en matière de définitions.

Concernant le thème de la responsabilité pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international, M. Hilger a déclaré que le projet d’articles constitue une bonne base de discussion. Quant aux dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses, le projet de convention cadre est bien équilibré. La prévention devrait être la base fondamentale du projet d’articles, a précisé le représentant. L’Allemagne approuve la suppression de la mention «qui ne sont pas interdites par le droit international» dans le projet car, en cas de dommages résultants d’une activité illicite, c’est la responsabilité des Etats qui entrerait en jeu.

M. ATTILA TANZI (Italie) abordant le sujet de la responsabilité internationale du fait des conséquences résultant d’actes non interdits par le droit international, a noté que le projet d’articles devrait couvrir, en plus des dommages transfrontières significatifs, les dommages causés dans des régions situées en dehors de la juridiction nationale. Cela a pour effet que le principe général de prévention des préjudices affectant l’environnement s’applique spécifiquement aux régions sur lesquelles aucun Etat n’exerce sa souveraineté. Il estime que cette préoccupation relative à la protection de l’écosystème devrait être reflétée dans le projet d’articles, dans l’article 1 ou l’article 2. Il a estimé que seuls les Etats seraient liés par les dispositions du projet, mais que les activités auxquelles il est fait référence sont pour la plupart menées par des acteurs privés. Dès lors, il pense que les articles devraient faire référence expressément aux secteurs d’activités publics et privés dans les deux articles précités. Il a aussi fait siennes les préoccupations d’autres délégations quant à l’exclusion de la pollution rampante du champ d’application du projet d’articles. Il a relevé que les dommages transfrontières significatifs se produisant sur une période donnée et se combinant avec d’autres sources devraient faire l’objet d’une obligation de prévention.

S’agissant de la relation entre le sujet examiné et la responsabilité des Etats, il a fait observer que le présent sujet concerne une obligation substantielle primaire et que la violation de cette obligation entraînerait la responsabilité internationale du fait d’un acte internationalement illicite. A son avis, dire que le non-respect d’une obligation de prévention de diligence due n’implique pas l’illicéité, revient à annuler tout l’exercice sur le thème actuel. Cette formule est le résultat d’un compromis difficile atteint au fil des ans. Il considère que le régime de la responsabilité des Etats devrait comprendre une autre série d’obligations primaires, ayant pour la plupart le caractère de diligences dues. Il a déclaré qu’il fallait faire une différence dans l’application de l’obligation de diligence due, proportionnellement au développement économique et technologique des Etats concernés. A son avis, les articles 4 et 5 doivent prévoir des règles plus strictes. Il s’est félicité ensuite des dispositions de l’article 6, mais a estimé que l’article 7 mérite d’être précisé. Comment peut-on évaluer les risques de causer un dommage transfrontière significatif, s’est-il interrogé. Il a invité la Commission à donner des exemples de pratique conventionnelle.

Sur la question de la procédure, M. Tanzi s’est félicité des articles 9, 10 et 12. Il a souligné le fait que le non-respect de l’obligation de coopération par l’Etat d’origine reviendrait à augmenter la violation de l’obligation de diligence due et d’obligation de prévention. Il s’est félicité aussi de la formule concernant la coopération qui doit être équilibrée par rapport aux intérêts concernés. Cependant, cette formulation ne doit pas impliquer que le dommage est négociable. A son avis, la CDI ne doit pas considérer que son travail s’achèvera sans traiter de la responsabilité, le projet représentant un acquis important en la matière.

M. AURELIO PEREZ GIRALDA (Espagne) s’est intéressé au projet de directives 1.7.1 concernant les alternatives aux réserves et a demandé que le commentaire qui y sera joint fasse référence à certaines pratiques du droit communautaire européen, connues sous les noms de «Opting in» et «Opting out». Il a estimé que l’analyse faite par le Rapporteur Spécial avait une grande portée à la fois théorique et pratique.

Le représentant a regretté que la CDI n’ait pas eu le temps d’examiner la deuxième partie du rapport concernant la formulation, la modification et le retrait des réserves et déclarations interprétatives. La formulation de réserves tardives est extrêmement délicate, a-t-il ajouté, car elle affecte la sécurité juridique des traités. Il faudrait donc insister davantage sur le caractère exceptionnel des réserves tardives, qui deviennent en fait de véritables amendements aux traités. De telles réserves tardives ne peuvent être confirmées que si l’ensemble des autres Etats parties au traité l’accepte, a affirmé M. Perez Giralda. L’Espagne approuve également l’extension de 90 jours à 12 mois du délai laissé aux Etats pour faire une objection aux réserves tardives.

La modification d’une réserve peut supposer aussi bien un retrait partiel de la réserve qu’une extension de celle-ci, a rappelé M. Perez Giralda. Dans le second cas, il faut appliquer les dispositions des réserves tardives. Au contraire, si la modification de réserve vient à réduire la réserve initiale, les objections à la modification ne devraient être valables qu’entre l’Etat qui formule l’objection et l’Etat qui a présenté la modification à la réserve. Les autres Etats pourraient ainsi poursuivre leur relation conventionnelle avec l’Etat qui a présenté la modification, d’une manière plus large et plus favorable à l’objectif du traité en question.

Concernant la «Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international et la prévention des dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses», le représentant a estimé que la codification de la teneur et de la portée du devoir de prévention pose des problèmes très complexes, notamment en ce qui concerne les liens avec la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables d’actes non illicites. Il faut garder ce lien entre le thème de la prévention et le traitement de la responsabilité, a déclaré le représentant. Le projet de convention est digne d’éloges puisqu’il étend la notion de dommages à l’environnement. En revanche, il est restrictif sur la notion de dommages transfrontières car il ne touche pas aux espaces relevant du patrimoine commun de l’humanité. Or, de nombreux textes internationaux, notamment la Convention sur le droit de la mer, la Convention de Bâle sur la circulation transfrontière des déchets dangereux, et même la jurisprudence internationale, refusent de distinguer entre les espaces relevant du patrimoine commun et les espaces placés sous la juridiction d’un autre Etat. L’Espagne estime que le projet de convention doit envisager les dommages causés à des espaces communs situés sous toute juridiction nationale.

M. ROBERTO LAVALLE-VALDES (Guatemala) a évoqué la directive 1.4.7, relative à la déclaration unilatérale au cas où un Etat doit choisir entre diverses dispositions d’un traité. C’est le cas de la Convention sur le droit de la mer, a-t-il fait remarquer. A propos des modalités de règlement des différends, cette convention comporte des dispositions prévoyant un choix de modalités avec la procédure d’arbitrage comme choix supplémentaire. Il a donc proposé d’insérer dans cette directive la possibilité de faire ce choix. Sur la question de la prévention des dommages transfrontières significatifs, il a expliqué que la définition du projet d’articles lui rappelle une loi physique sur le gaz, dite loi de Boyle, sur le principe de la valeur couplée pression-volume dont le produit ne varie pas. De même, selon lui, le projet comporte des valeurs couplées dont le produit est constant. Si le produit dépasse un seuil, l’activité est illicite. Cependant, si le produit passe au dessous du seuil de licéité, l’activité pourrait avoir peu de chance d’être nuisible. Il est donc important de conserver les termes “activités non prohibées par le droit international”.

Il a ensuite proposé des modifications de certaines dispositions comme celles de l’article Premier, dans lequel il préfère parler de “toute activité”, conformément à la suggestion du Royaume-Uni. A l’article 2, il a formulé diverses précisions qui pourraient être apportées, reprennant notamment des propositions du Royaume-Uni ou des Pays-bas. Il a indiqué son désaccord avec le libellé du paragraphe 3 de l’article 10 et propose de modifier la fin du paragraphe en disposant “ceux qui peuvent faire valoir leurs droits”. Il a examiné avec soin les articles suivants et a suggéré des modifications de formulation. Par exemple, en ce qui concerne l’article 18, il a demandé qu’il soit précisé s’il s’agissait aussi du droit coutumier postérieur, ce qui ne lui paraît pas nécessairement justifié. Il a aussi proposé d’ajouter des dispositions sur la composition de la Commission à l’article 19. Enfin, il a joint sa voix à celle des délégations qui ont exprimé leur préférence pour l’adoption d’une Convention qui traite non seulement des aspects de la prévention mais aussi de la responsabilité objective.

M. CHOUNG IL CHEE (République de Corée) a déclaré qu’en matière de réserves aux traités, une déclaration unilatérale faite avec l’intention de modifier toute ou partie d’un traité constitue en fait une réserve ou une déclaration interprétative conditionnelle, qui a le même effet juridique. Le problème se pose quand un traité interdit les réserves mais autorise les déclarations interprétatives, y compris conditionnelles. La CDI devrait peut-être adopter une directive interdisant les déclarations interprétatives conditionnelles dans le cas où un traité interdit les réserves. La CIJ pourrait ensuite avoir à dire en dernier recours si une déclaration interprétative est ou non conditionnelle.

Sur le thème de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international et de la prévention des dommages transfrontières résultant d'activités dangereuses, le représentant a salué le travail de la CDI et le projet de convention sur la prévention des dommages transfrontières considérables. Le principe de précaution fait partie du corps du droit international contemporain en matière d’environnement et la Corée appuie cette base juridique, a-t-il rappelé. Il s’est toutefois demandé si les dommages significatifs et les dommages catastrophiques mentionnés dans le projet de convention constituent réellement des catégories à part ou relèvent, à un degré différent, de la même catégorie. L’évaluation des effets sur l’environnement est l’un des éléments les plus difficiles pour la prévention des dommages transfrontières. Il faut parfois prendre des mesures immédiates pour prévenir le dommage dès l’origine, a remarqué M. Choung. La République de Corée souhaite donc qu’un cadre temporel soit prévu dans la convention pour la prise de mesures de prévention. Le principe selon lequel un Etat a l’obligation de ne pas causer de dommages à l’environnement d’autres Etats a été réaffirmé par la CIJ dans l’avis sur la licéité du recours ou de la menace de recours à l’arme nucléaire, a rappelé M. Choung. Donc, l’expression «Activités qui ne sont pas interdites par le droit international» est malencontreux. Si une activité est dangereuse, elle ne devrait pas être entreprise par l’Etat, conformément à l’avis de la CIJ dans l’affaire des armes nucléaires. Cela est vrai dans le cas de la pollution atmosphérique transfrontière, particulièrement dangereuse. Comme il est très difficile de contrôler les mouvements de l’air pollué, l’Etat d’origine de la pollution a le devoir de prendre des mesures pour prévenir les risques de dommages dans d’autres Etats, a conclu le représentant.

M . BERTIL ROTH (Suède, au nom des pays nordiques) a indiqué que les pays nordiques sont favorables à l'idée de mentionner les alternatives aux réserves dans un Guide pratique, sans craindre que cela ne soit utilisé comme une méthode pour éviter au maximum les engagements. Les réserves et leurs alternatives sont très utiles, a-t-il noté, et le principal souci des pays nordiques est relatif aux réserves des Etats qui sont manifestement incompatibles avec l'objet et la finalité du traité et qui laissent les autres Etats dans le doute en ce qui concerne le champ des réserves. S'agissant des questions sur la formulation, la modification et le retrait des réserves ou des déclarations interprétatives, il s'est félicité des dispositions contenues dans le rapport. Les réserves tardives sont régies par un principe strict selon lequel un Etat ne peut plus faire de réserve après la date limite stipulée pour la faire, mais il peut être dérogé à ce principe par un accord unanime des parties au traité. Il a aussi noté que le délai pour modifier les réserves était passé de 90 jours à 12 mois.

En ce qui concerne les conséquences et effets d'une procédure incorrecte, il a relevé que le sujet n'avait pas encore été abordé par la Commission qui n'a pas achevé ses travaux sur le sujet. Les pays nordiques espèrent que la CDI pourra rapidement aborder cette question qui n'est pas des plus faciles. Il a fait part de son intérêt particulier pour l'analyse des réserves et objections inadmissibles à l'égard de telles réserves. Enfin, il s'est interrogé sur l'efficacité du régime des Conventions de Vienne concernant les traités normatifs. En conclusion, il a indiqué que les pays nordiques attachent une importance particulière à la question des réserves et qu'ils attendent avec impatience que le Rapporteur Spécial aborde les travaux futurs.

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