En cours au Siège de l'ONU

AG/J/319

LA SIXIEME COMMISSION SE FELICITE DES RESULTATS DES TRAVAUX DE LA COMMISSION PREPARATOIRE DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE

18 octobre 2000


Communiqué de Presse
AG/J/319


LA SIXIEME COMMISSION SE FELICITE DES RESULTATS DES TRAVAUX DE LA COMMISSION PREPARATOIRE DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE

20001018

La Commission juridique (Sixième Commission) a commencé ce matin l’examen du point de son ordre du jour intitulé: "Création d'une Cour pénale internationale". Elle était à cette fin saisie du rapport de la Commission préparatoire de la Cour pénale internationale sur sa cinquième session, tenue du 12 au 30 juin dernier. En présentant le rapport, le Président de la Commission préparatoire, M. Philippe Kirsch, s'est félicité de l'avancement des travaux de la Commission et de l'état d'esprit qui y a présidé. En effet, la Commission préparatoire a adopté au cours de cette session la version finale du projet de règlements de procédure et de preuve et celle du projet d'éléments des crimes. Le Conseiller juridique du Secrétariat, M. Hans Corell, a présenté un rapport oral sur l'aide matérielle fournie par le Secrétariat à la Commission préparatoire, et a rappelé qu'au 17 octobre, 114 Etats avaient signé le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, et que 21 l'avaient ratifié.

Tout en se félicitant de l'état d'avancement des travaux au sein de la Commission préparatoire et en insistant sur l'esprit positif des travaux, qui a permis l'adoption de ces documents par consensus et dans les délais impartis, certaines délégations ont néanmoins rappelé qu'en cas de conflit entre ces règlements, autres documents ultérieurs et le Statut de Rome, c'est ce dernier qui devrait prévaloir.

Concernant les travaux futurs de la Commission préparatoire, les délégations ont estimé que l'une des tâches prioritaires serait l’examen des propositions relatives à la définition de l'agression (crime entrant dans le cadre de la compétence de la Cour pénale, sous réserve de sa définition ultérieure). Sur ce point, le représentant de la République islamique d'Iran a estimé qu'il faudra envisager le cas où le Conseil de sécurité, pour des raisons politiques, ne conclurait pas à l’existence d’un acte d’agression. Dans ce cas, a-t-il suggéré, la Cour pénale pourrait, après un certain délai, se prononcer sur un acte comme constituant un acte d'agression.

A l'instar de la France, plusieurs délégations ont aussi insisté sur leur attachement à l'intégrité du Statut. Le représentant de l'Afrique du Sud s'est déclaré préoccupé par les tentatives de certaines délégations visant à introduire des exemptions à la compétence de la Cour pour les ressortissants de certains Etats, et a affirmé que son pays n'appuiera aucune tentative tendant à limiter la compétence de la Cour telle que définie dans le Statut de Rome.

Au contraire, le représentant des Etats-Unis a demandé que soit créé rapidement un mécanisme permettant d’éviter la remise automatique à la Cour d’un représentant officiel d’un Etat non partie au Statut, mais agissant de manière responsable au sein de la communauté internationale et manifestant la volonté et la capacité d’exercer sa juridiction à l’égard de son représentant. Le délégué des Etats-Unis a affirmé qu'une telle solution ne porte pas atteinte au Statut de Rome et permettrait à son pays de coopérer avec la Cour dans différents domaines, voire même envisager, dans l’avenir, de devenir partie au Statut. En revanche, si de tels arrangements ne peuvent être acquis lors de la prochaine session de la Commission préparatoire, les Etats-Unis prévoient des relations beaucoup plus difficiles avec la Cour. Ils ont averti qu'un résultat négatif aurait des conséquences sur la capacité d’Etats non parties au Statut de participer à certaines opérations militaires, y compris à celles qui ont un aspect humanitaire important.

Au cours de la séance de ce matin, les représentants des pays suivants ont pris la parole: France (au nom de l'Union européenne et de pays associé), Colombie (au nom du groupe de Rio), Lesotho (au nom de la Communauté de développement de l'Afrique australe), Chine, Etats-Unis, Sierra Leone, République islamique d'Iran, Canada, Afrique du Sud et Norvège.

La Sixième Commission poursuivra ces travaux sur le projet de création d'une Cour pénale internationale demain, jeudi 19 octobre, à 10 heures. Auparavant, elle compte aborder, cet après-midi à 15 heures, l'examen d'un autre point de son ordre du jour, intitulé "Examen de mesures efficaces visant à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires.

CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

DOCUMENTATION

Rapport de la Commission préparatoire de la Cour pénale internationale sur sa cinquième session (12-30 juin 2000) (PCNICC/2000/L.3/REV.1 ET Add.1)

Le rapport présente un résumé des travaux de la session de la Commission préparatoire, tenue au Siège de l’Organisation des Nations Unies du 13 au 31 mars 2000, conformément à la résolution 54/105 de l’Assemblée générale du 9 décembre 1999, sous la présidence de M.Philippe Kirsch (Canada). La Commission préparatoire a notamment pour mandat de rechercher des moyens propres à assurer le fonctionnement efficace de la Cour et faire en sorte que celle-ci soit largement acceptée.

La Commission préparatoire a adopté la version finale du projet de règlement de procédure et de preuve et du projet d’éléments des crimes, deux instruments indispensables au fonctionnement de la Cour et sur lesquelles elle avait concentré les travaux de sa cinquième session.

La Commission préparatoire a également tenu de nombreuses réunions et consultations à propos du crime d’agression et a pris note d’un rapport que lui a présenté oralement le Coordonnateur pour le crime d’agression.

La Commission préparatoire a décidé d’examiner, à sa sixième session, qui se tiendra du 27 novembre au 8 décembre 2000, outre le crime d’agression, les trois sujets suivants: Accord régissant les relations entre la Cour et l’Organisation des Nations Unies; Règlement financier et règles de gestion financière de la Cour; et Accord sur les privilèges et immunités de la Cour. La Commission préparatoire a aussi établi un groupe de travail pour chacun des trois nouveaux sujets.

Le rapport présente, en annexe, une liste des documents relatifs au crime d’agression et à d’autres questions, publiés lors des première, deuxième, troisième, quatrième et cinquième sessions de la Commission préparatoire, tenues en 1999 et 2000.

Le rapport présente également une compilation des documents de synthèse relatifs au crime d’agression proposés par le Coordonnateur. Le premier est un «texte de synthèse établi à partir des propositions concernant le crime d’agression», qui propose des options pour une définition du crime d’agression et pour les conditions d’exercice de la compétence de la Cour pénale internationale à l’égard de ce crime. Le second est une «liste préliminaire de questions liées au crime d’agression» dont il faudrait tenir compte lors de l’élaboration de propositions au sujet de ce crime (questions relatives au Statut de Rome; aux éléments des crimes; au règlement de procédure et de preuves; et autres questions).

DEBAT

Rapport verbal du Conseiller juridique sur la mise en œuvre de la résolution 54/105 de l’Assemblée générale

M. Hans CORELL, Conseiller juridique, a rappelé que le Secrétariat avait, malgré la faiblesse de ses ressources financières, fourni les services requis en application de la résolution 54/105 de l’Assemblée générale pour les deux sessions de la Commission préparatoire de la Cour pénale internationale déjà tenues cette année (du 13 au 31 mars et du 12 au 30 juin 2000). Il est également prêt à faire de même pour la prochaine session, prévue du 27 novembre au 8 décembre.

Le Conseiller juridique a également annoncé que le Saint-Siège, la Norvège et le Royaume-Uni avaient versé des contributions au Fonds d’affectation spéciale destiné à permettre la participation des pays les moins avancés aux travaux de la Commission préparatoire, ce qui a permis à 21 délégués de PMA d’assister aux quatrième et cinquième sessions de la Commission préparatoire. En outre, le Secrétariat examine actuellement les demandes de délégués de pays les moins avancés qui souhaitent assister à la prochaine session. En revanche, a ajouté le Conseiller juridique, aucune contribution n’a été versée à l’autre Fonds d’affectation spéciale, destiné à aider les autres pays en développement à participer aux travaux de la Commission préparatoire.

Le Conseiller juridique a également informé la Commission que la Division de la codification préparait actuellement la version reliée des documents des Nations Unies sur la Conférence de Rome, qui sera publiée en deux volumes. Malgré les contraintes financières et le fait que la Division de la codification ne dispose pas de ressources humaines suffisantes, elle fera néanmoins tout pour publier ces documents au plus vite.

Le Conseiller juridique a annoncé qu’à la date du 17 octobre 2000, 114 Etats avaient signé le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, et 21 l’ont ratifié.

Présentation du rapport de la Commission préparatoire

M. PHILIPPE KIRSCH, Président de la Commission préparatoire, a remercié le Conseiller juridique et ses services de toute l’aide fournie à la Commission préparatoire depuis sa création. Il a estimé que cette année avait été importante dans la mesure où la réalité de la Cour pénale internationale est plus manifeste. En effet, outre les travaux de la Commission préparatoire, les chefs d’Etat et de gouvernement ont eu l’occasion de souligner l’importance de la Cour dans leur déclaration du millénaire approuvée à l’unanimité. En outre, le rang de priorité élevé accordé à la Cour par le Secrétaire général, le Président de l’Assemblée générale, le Conseiller juridique et de nombreux gouvernements, a contribué à une augmentation sensible du nombre de signatures et de ratifications du Statut de Rome.

M. Kirsch a rappelé, pour s’en féliciter, que la Commission préparatoire avait achevé le 30 juin 2000 la première partie de son mandat, à savoir l’élaboration du projet des règlements de procédure et de preuve et du projet d’éléments des crimes. Ce texte a été obtenu par consensus, fruit de compromis difficiles de l’ensemble des délégations. Ce consensus et les efforts qui ont

permis d’y parvenir, montrent que pour tous les Etats, la Cour doit être pleinement efficace et bénéficier d’un soutien aussi large que possible. Le consensus témoigne également de l’acceptation internationale générale des procédures de la Cour et des crimes qui relèvent de sa compétence. Cela doit permettre à la Cour de bénéficier d’un statut international encore plus fort et devrait faciliter une large ratification.

La Commission a travaillé jusqu’à présent de manière efficace, malgré le caractère technique et parfois politiquement controversé des débats, a déclaré M. Kirsch, pour qui, de manière générale, une atmosphère très constructive a prévalu. En outre, des consultations nombreuses ont eu lieu en dehors des sessions de la Commission préparatoire.

La Commission préparatoire entre dans une nouvelle phase de son travail, a expliqué son Président, qui a rappelé le travail restant à accomplir. Parmi celle-ci, il a mentionné la préparation de propositions concernant l'agression, ainsi que les moyens de garantir l’efficacité et l’acceptation de la compétence de la Cour. Le Président a estimé que la Commission préparatoire devrait tenir deux sessions de deux semaines en 2001.

Déclarations

M. FRANÇOIS ALABRUNE (France), au nom de l’Union européenne et des pays associés, a rappelé que l’actualité démontre que l’établissement rapide d’une Cour pénale internationale est nécessaire pour garantir le respect effectif du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Le Statut de Rome, a-t-il relevé, reflète les objectifs que sont la prévention des crimes les plus graves et la contribution à la paix dans le monde. C’est pour cette raison que la Cour est dotée de compétences qui lui permettront de réprimer notamment, les auteurs de crimes contre les femmes, les enfants et les personnes âgées dans le cadre des conflits armés, les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité et les gouvernements massacrant leurs propres citoyens, les violences sexuelles et l’utilisation des enfants comme soldats. Le Statut confie en premier lieu aux Etats la responsabilité d’assurer le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme. A cet égard, une culture de responsabilité se développe déjà dans de nombreux Etats. Il respecte aussi l’équilibre entre les différentes traditions juridiques et garantit les droits des prévenus à un procès équitable comme les droits des victimes. Il a rappelé les documents que la Commission préparatoire a adoptés pour préciser le Statut, après que les différences d’approches aient été surmontées. Il a rappelé qu’il reste de nombreux sujets à régler, tels que le règlement financier, l’accord administratif entre les Nations Unies et la Cour, le budget de la première année de fonctionnement et les dispositions concernant le crime d’agression.

Ces documents doivent être élaborés dans l’esprit du Statut, l’Union européenne étant très attachée à l’intégrité du Statut. L’étape décisive est toutefois la ratification: déjà vingt et un Etats l’ont ratifié, dont plusieurs Etats membres de l’Union européenne, et M. Alabrune a lancé un appel à tous les Etats pour qu’ils signent et ratifient le Statut. Il a reconnu que l’adoption de celui-ci représente une lourde tâche pour les Etats, des modifications de dispositions législatives étant souvent nécessaires ainsi que des amendements à leur Constitution. Nous proposons de partager notre expérience acquise en ce domaine pour aider tout Etat intéressé, a-t-il déclaré. Il a remercié les organisations non gouvernementales pour leur contribution aux travaux relatifs à la CPI et s’est félicité de la collaboration des délégations de tous les pays.

Il s’est dit encouragé à continuer à travailler en ce sens et à tenir les promesses du Statut de Rome. Il a rappelé que la Cour n’aura compétence que pour les crimes commis après son entrée en vigueur et que chaque jour qui passe sans qu’elle existe est un jour de plus laissé à l’impunité pour de graves crimes concernant l’humanité entière.

M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie, au nom du Groupe de Rio) a rappelé l’engagement pris par les chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres du Groupe de Rio dans la Déclaration de Carthagène du 14 juin, de contribuer au développement progressif du droit international relatif à la responsabilité pénale des individus qui auraient commis certains crimes internationaux, prévus dans le Statut de Rome.

L’approbation des règlements de procédure et de preuve et du projet d’éléments des crimes dans les délais prescrits, ainsi que le nombre de ratifications et de signatures du Statut de Rome, qui dépasse les espérances, constituent une preuve palpable de l’engagement de la communauté internationale en faveur d’une Cour pénale internationale, a estimé le représentant. Il a remercié le Secrétaire général d’avoir placé le Statut de Rome parmi les 25 documents internationaux de base dont la ratification doit être considérée comme prioritaire par les Etats. Le Groupe de Rio s’engage à déployer les meilleurs efforts pour parvenir à l’élaboration de tous les instruments nécessaires à la création de la Cour. Le Groupe de Rio a participé activement aux cinq premières sessions; il a fait des propositions et se félicite de constater que nombre d’entre elles ont été approuvées. Il continuera de collaborer activement.

Dans la deuxième étape, la Commission doit continuer ses travaux concernant notamment le crime d’agression, le financement de la Cour, les privilèges et immunités de ses membres. Les travaux, selon M. Valdivieso, devront être guidés par les engagements pris par la communauté internationale dans le Statut de Rome, dont l’intégrité devra être préservée.

M. PERCY METSING MANGOAELA (Lesotho), au nom de la Communauté par le développement de l’Afrique australe (SADC), a déclaré qu’il était persuadé que le Statut de la Cour pénale internationale (CPI) permettra la création d’une cour efficace et indépendante, sans qu’il soit besoin d’y apporter des amendements. Il est donc important que, de même que pour les éléments constitutifs des crimes et les règlements de procédure et de preuve adoptés par consensus lors de la dernière session de la Commission préparatoire, tout document qui en découle ne doit pas dévier du Statut, a-t-il indiqué. Il considère que l’entrée en vigueur rapide du Statut et la création de la CPI reflètent les engagements pris par les Etats et la communauté internationale de mettre fin à l’impunité relative au génocide, aux crimes contre l’humanité et crimes de guerre que nous avons connus au vingtième siècle. Il a remercié tous ceux qui ont participé à ces travaux et s’est félicité du consensus atteint lors de l’adoption de ces instruments et qui a encouragé un nombre élevé d’Etats à signer et ratifier le Statut depuis juillet. Toutefois, il a fait remarquer qu’il ne s’agissait que d’une victoire partielle et qu’il fallait à présent franchir les étapes suivantes, la plus importante étant l’entrée en vigueur du Statut et l’entrée en fonction de la Cour, qui nécessite au préalable le dépôt de soixante instruments de ratification. En ce qui concerne la SADC, beaucoup de ses membres ont axé leurs efforts sur l’entrée en vigueur de lois permettant à la CPI de s’intégrer efficacement dans les systèmes judiciaires nationaux. Il a rappelé à ses membres l’importance de mener ces efforts à bien, sachant que des efforts de soutien et de coopération techniques sont nécessaires

et doivent être mis en place. D’autres questions restent à régler et il a exprimé l’espoir qu’elles seront examinées avec intérêt. Il a souhaité qu’il soit tenu compte des petites délégations pour établir l’agenda des réunions à venir.

M. QU WENSHENG (Chine) a déclaré que l’approbation dans les délais des projets de règlements de procédure et de preuve et de projet d’éléments des crimes est la preuve que tous les Etats souhaitent voir la Cour pénale internationale fonctionner dès que possible. Les débats ont été animés et plusieurs consultations intersessions ont eu lieu, auxquelles la Chine a participé. La Chine a fait preuve de beaucoup de souplesse et d’un esprit constructif, a affirmé le représentant, qui a rappelé que son pays s’était associé au consensus, malgré les réserves qu’il pouvait avoir, en raison de l’importance du travail accompli. Les règlements de procédure et de preuve sont très détaillées et le résultat est relativement bien équilibré, a déclaré le représentant. Il a ajouté que sa délégation était néanmoins préoccupée par l’ambiguïté de certaines dispositions. Pour prévenir les abus, il faut affirmer qu’il doit y avoir une harmonie entre le Statut et la règle de procédure et de preuve mais qu’en cas de conflit, le Statut doit prévaloir. Dans tout le processus d’élaboration du Statut, presque tous les Etats ont souligné l’importance qu’ils attachent à la lettre et à l’esprit du Statut et ce comportement devait se poursuivre, a ajouté M. Qu Wensheng.

Le crime d’agression sera une question importante inscrite à l’ordre du jour de la sixième session de la Commission préparatoire, a déclaré le représentant. La Chine a toujours maintenu que ce crime est un crime international très grave qui doit être inclus dans le Statut. La Chine adopte une approche prudente et pragmatique concernant la question qui mérite le plus d’attention concernant l’agression, à savoir le rôle du Conseil de sécurité. Consciente de la nature sensible du crime d’agression et de la difficulté à résoudre ces difficultés, la Chine est disposée à travailler de manière pragmatique pour trouver une solution satisfaisante, a ajouté le représentant.

M. DAVID SCHEFFER (Etats-Unis) a applaudi aux résultats des travaux de la Commission préparatoire, qui sont à jour. Les Etats-Unis ont participé activement aux négociations qui ont permis l’adoption par consensus des projets de règlement de procédure et de preuve et de projet d’éléments des crimes, a-t-il déclaré. Ces textes résisteront à l’épreuve du temps. Le représentant s'est félicité de ce qu’un grand nombre de gouvernements aient signé le Statut de Rome et que 21 l’aient déjà ratifié. Les Etats-Unis observent toutefois avec préoccupation que des atrocités continuent d’être commises, que le comportement de certaines nations n’est pas à la hauteur des principes énoncés dans le Statut, et que des violations graves du droit international humanitaires ont été commises ces derniers mois, pour lesquelles la Cour pénale internationale n'aura aucune compétence. Les Etats-Unis soutiennent les Etats qui reconnaissent leur obligation de juger devant leurs tribunaux les individus qui ont commis des crimes contre le droit international humanitaire.

Les Etats-Unis ont depuis longtemps travaillé en faveur d’une cour pénale internationale efficace et veulent entretenir des relations de bon voisinage avec cette cour, afin de pouvoir coopérer avec elle. A cette fin, une question fondamentale doit être résolue à la session de novembre de la Commission préparatoire. Sauf dans les cas où la saisine est faite en application de l’Article 13 B du Statut (saisine de la Cour par le Conseil de sécurité en application du Chapitre VII de la Charte), il devrait exister un mécanisme permettant d’éviter la remise automatique à

la Cour d’un représentant officiel d’un Etat non partie au Statut qui agit de manière responsable au sein de la communauté internationale et qui manifeste la volonté et sa capacité d’exercer sa juridiction à l’égard de son représentant. C’est en fait ce que le Statut prévoit, a affirmé M. Scheffer. Une telle solution permettrait aux Etats-Unis de devenir de bons voisins de la Cour et cela peut se faire sans nuire au bon fonctionnement de la Cour et sans porter atteinte au Statut de Rome, a-t- il estimé, ajoutant que les Etats-Unis étaient disposés à discuter de manière ouverte de ce problème fondamental. Nous avons besoin d’une telle articulation pour que la Cour puisse agréer les mesures prises de bonne foi par des Etats non parties au Statut, et aussi pour que de tels Etats se sentent encouragés à contribuer de manière responsable à la paix et à la sécurité internationales. Au fil du temps, de telles mesures encourageront de nouveaux gouvernements à se joindre au Statut de Rome, a- t-il ajouté.

Des arrangements de travail durant les travaux de la Commission au mois de novembre permettraient aux Etats-Unis de coopérer avec la Cour dans différents domaines, a poursuivi le représentant. Ils pourraient même dans l’avenir envisager de devenir parties au Statut. En revanche, si de tels arrangements ne peuvent être acquis lors de la prochaine session de la Commission préparatoire, nous prévoyons des relations beaucoup plus difficiles avec la Cour, a-t-il averti. Un résultat négatif aurait ainsi des conséquences négatives sur la capacité d’Etats non parties au Statut de participer à certaines opérations militaires, y compris à des opérations militaires ayant un aspect humanitaire important.

M. ALLIEU I. KANU (Sierra Leone) a invité tous les Etats qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome dès que possible. Il a rappelé que, le 13 juin dernier, son président avait demandé au Secrétaire général des Nations Unies de commencer le processus de création d’une cour spéciale pour la Sierra Leone, pour juger ceux qui sont responsables des violations du droit international dans son pays. Il en est résulté la résolution 1315 du Conseil de sécurité et si la cour avait existé cela n’aurait pas été nécessaire, a-t-il fait remarquer. Il a ensuite engagé les autres Etats à ne pas retarder, par des amendements, l’entrée en fonction de la cour. Il a parlé des “activités néfastes” de ses voisins, qui pourraient tomber sous la définition du crime d’agression. Il a souhaité que la CPI fonctionne au plus tôt car nous en avons besoin, a-t-il dit. Il a rappelé que de nombreux pays traduisent des enfants combattants devant les tribunaux et, en ce qui concerne la cour spéciale de la Sierra Leone, il est proposé de les juger s’ils avaient plus de quinze ans au moment de la commission du crime. Il a souhaité cependant qu’ils soient traités avec dignité, dans l’espoir de les réintégrer dans la société.

M. SAIED MIRZAEE YENGEJEH (République islamique d’Iran) a déclaré que les règlements sur les éléments des crimes et sur la procédure et les éléments de preuve, lorsqu’ils seront approuvés par la majorité requise des Etats parties au Statut de Rome, constitueront une contribution importante au travail de la Cour. Le Statut de la Cour pénale internationale constitue le document de base, qui stipule les pouvoirs et fonctions de la Cour, a-t-il ajouté. Tous les documents ultérieurs doivent donc être établis en conformité avec ce Statut. Les efforts n’ont pas été ménagés pour que les projets de règlements adoptés en juin soient conformes au Statut. Toutefois, il est clair qu’en cas de conflit entre ces règlements et le Statut, c’est ce dernier qui devra prévaloir.

Concernant la suite des travaux, le représentant a estimé qu’il ne devrait pas y avoir de difficultés insurmontables dans la rédaction des documents, comme les relations entre la Cour et les Nations Unies, les privilèges et immunités des membres de la Cour ou les aspects financiers. La Commission devrait donc se concentrer sur son autre tâche: la définition du crime d’agression. Le mandat qui lui a été confié dans ce cadre ne souffre d’aucune condition et devrait être réalisé au cours de son mandat, a estimé M. Mirzaee-Yengejeh, pour qui une définition du crime d’agression permettrait sans doute à un certain nombre d’Etats de ratifier le Statut de Rome.

Deux documents de travail complémentaires sur la définition du crime d’agression ont été produits, a rappelé M. Mirzaee-Yengejeh, qui a souhaité un examen conjoint. Le représentant a estimé toutefois que certaines des dispositions de ces documents dépassent la compétence de la Commission préparatoire qui, a-t-il affirmé, n’a pas le droit d’élaborer un régime distinct de jurisprudence pour le crime d’agression. Ainsi, les principes généraux du droit international inclus dans le Statut, comme les dispositions concernant la coopération et l’entraide internationales, sont applicables pour tous les crimes relevant de la compétence de la Cour, y compris l’agression.

Concernant le fond de la définition de l’agression, M. Mirzaee-Yengejeh s’est prononcé en faveur d’une définition générale suivie d’une liste non exhaustive d’actes, la résolution 3314 de l’Assemblée générale pouvant, selon lui, fournir une bonne base de départ sur ces deux points. Concernant les relations entre la Cour et le Conseil de sécurité, le représentant a rappelé qu’il faudra tenir compte de l’Article 39 de la Charte qui confère à ce dernier la responsabilité principale en ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité internationales, mais qu’il faudra aussi veiller au respect et à la sauvegarde de l’indépendance de la Cour. Une disposition équilibrée devra ainsi envisager le cas où le Conseil, pour des raisons politiques, ne déterminerait pas l’existence d’un acte d’agression. Trois solutions sont envisageables, a ajouté M. Mirzaee-Yengejeh: l’Assemblée générale pourrait jouer un rôle quand le Conseil ne détermine pas qui est l’agresseur; on pourrait aussi recourir à la Cour internationale de Justice; enfin, la Cour pénale, elle-même, pourrait prendre une décision en l’absence de détermination de l’acte d'agression par le Conseil. Bien que disposée à la souplesse sur ce point, la République islamique d’Iran donne sa préférence à un recours à la Cour pénale elle-même pour qu’elle se prononce, après un certain délai.

M. ANDRAS VAMOS-GOLDMAN (Canada) a noté que les questions de la justice et de l’impunité sont de plus en plus présentes dans la réflexion internationale, comme le montre l’exemple de la Sierra Leone actuellement. Il a indiqué que le Canada a adopté de nouvelles dispositions législatives pour permettre la ratification du Statut de la Cour pénale internationale. Il espère pouvoir discuter avec d’autres gouvernements de cette question et apporter son aide technique à d’autres Etats, comme cela est déjà prévu dans le Sud Pacifique, les Caraïbes et l’Amérique centrale où des séminaires ont été organisés à cet effet. Il a aussi indiqué qu’un site web avait été créé pour donner des informations au public sur la CPI. Il a invité tous les Etats à ratifier le Statut de Rome, rappelant que cela leur permet d’être partie au Traité et non simplement d’y adhérer s’ils ne signent qu’après la date limite. Il s’est félicité qu’un consensus ait été obtenu pour l’adoption des projets de règlements de procédure et de preuve et les éléments des crimes. C’est là la preuve que le principe de la Cour et les définitions sont acceptés et reconnus par la communauté internationale. Il a rappelé que certains Etats sont préoccupés par des

questions, telles que les immunités souhaitées par certains, mais que de telles réserves ne seraient pas conformes au Statut ni aux principes de justice internationale. Enfin, il a rappelé qu’il reste encore beaucoup à faire pour préparer les documents techniques nécessaires au fonctionnement de la Cour, le Canada étant impatient de poursuivre ce travail avec les autres délégations. Il a soutenu la proposition de prévoir deux sessions de deux semaines chacune pour la Commission préparatoire.

M. ALBERTUS JACOBUS HOFFMANN (Afrique du Sud) a apporté son soutien à la déclaration faite par le Lesotho au nom de la SADC. Le 30 juin, la Cour a franchi une nouvelle étape dans son fonctionnement avec l’adoption des projets de règlements de procédure et de preuve d’une part, d’éléments des crimes d’autre part, a déclaré le représentant. Toutefois, la Commission a encore devant elle beaucoup de travail à accomplir.

M. Hoffmann a rappelé que son pays a signé, dès le 18 juillet 1998, le Statut de Rome. Depuis, l’Afrique du Sud prépare la ratification. Le 23 août, l’exécutif national du pays a pris la décision d’approuver la ratification du Statut et de l’intégrer dans le droit interne. Le Parlement devrait autoriser la ratification cette année, a-t-il affirmé, encourageant en outre les Etats qui ne l’ont pas encore fait à signer le Statut avant le 31 décembre, et à le ratifier ensuite.

Le représentant s’est déclaré inquiet des tentatives de certaines délégations pour introduire des exemptions à la compétence de la Cour pour les ressortissants de certains Etats. Nous n’appuierons aucune tentative tendant à limiter la compétence de la Cour, telle que définie dans le Statut de Rome, a-t-il averti.

M. HANS BRATTKAR (Norvège) a indiqué que le Statut de Rome donne un appui et une crédibilité à la Cour et fournit pour la première fois de façon satisfaisante des règles écrites de droit international, ce qui renforce aussi la prévisibilité du droit. La Cour sera un filet de sécurité à l’égard des poursuites arbitraires et incitera les Etats à faire le travail eux-mêmes. Il a rappelé les défis qu’il faut encore relever et les travaux restant à accomplir ainsi que les compromis qui ont été nécessaires pour aboutir aux textes adoptés. Les résultats déjà obtenus par la Commission confirment notre conviction que la Cour sera légitime et crédible et bénéficiera d’un soutien des plus larges. Il a appuyé l’appel du Secrétaire général, M. Kofi Annan, aux Etats qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut dans le délai requis, c’est-à-dire avant la fin de l’année 2000. La Norvège renouvelle son offre de partager des informations concernant le processus de ratification avec tout Etat qui serait intéressé. Il a indiqué que Sa Majesté le roi Harald, le Premier Ministre et le Ministre des affaires étrangères se sont prononcés sur la question au Sommet du millénaire et au débat général de l’Assemblée générale, lorsqu’ils ont demandé que tout soit fait pour que les crimes de guerre ne soient pas laissés impunis.

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