LA QUESTION DES SANCTIONS ET LES MESURES DESTINEES A LIMITER LEURS CONSEQUENCES SUR DES ETATS TIERS EXAMINEE EN SIXIEME COMMISSION
Communiqué de Presse
AG/J/316
LA QUESTION DES SANCTIONS ET LES MESURES DESTINEES A LIMITER LEURS CONSEQUENCES SUR DES ETATS TIERS EXAMINEE EN SIXIEME COMMISSION
20001012La Commission juridique (Sixième Commission) a poursuivi ce matin l'examen du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l'Organisation.
Les délégations se sont largement concentrées sur la question des sanctions. Plusieurs ont insisté sur le fait que les sanctions doivent être considérées comme un ultime recours, après que toutes les autres voies pacifiques pour régler un différend aient été épuisées. Mieux cibler les sanctions et les limiter dans le temps, avec un mécanisme de suivi et dexamen de leur efficacité ont été des questions évoquées car, ont expliqué leurs partisans, cest seulement ainsi que lon en arrivera à un régime de sanctions intelligent. Le représentant du Brésil a également souhaité que les organisations financières internationales et les organisations humanitaires soient consultées avant limposition de sanctions, afin de concourir à lévaluation de leur impact sur les populations civiles et de leurs implications financières.
Les délégations ont en général estimé que les mécanismes mis en place pour assurer le suivi des sanctions constituent un progrès qui doit être encouragé. Au nom du Groupe de Rio, le représentant de la Colombie sest félicité des efforts entrepris pour assurer une plus grande transparence aux travaux des Comités des sanctions grâce à la présentation de rapports détaillés de leurs présidents.
La plupart des orateurs ont rappelé que le Conseil de sécurité devrait davantage se préoccuper, conformément à lArticle 50 de la Charte, des conséquences pour des Etats tiers de limposition de sanctions. Certains ont rappelé plusieurs propositions avancées au Comité spécial. Cest ainsi que la Turquie, par exemple, a apporté son soutien à la proposition présentée en 1999 au Comité spécial par la Fédération de Russie et tendant à interdire la prise de sanctions lorsque celles-ci auraient des effets négatifs trop importants pour des Etats tiers. Plusieurs autres délégations ont estimé que ce document représentait une bonne base de travail.
Sagissant des méthodes de travail du Comité spécial, certains ont souhaité quelles soient plus efficaces, tout en sopposant à lidée de réduire encore la durée de ses sessions.
Le projet de création dun mécanisme de prévention et de règlement précoce des différends a été évoqué en général, pour demander que cette idée soit approfondie. Le représentant de la Colombie a marqué sa préférence pour une stratégie globale dans laquelle la culture de prévention remplacerait la culture de règlement des différends.
Lors de la séance de ce matin, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Cuba, Inde, Iraq, République de Corée, Colombie (au nom du Groupe de Rio), Ghana, Brésil, Indonésie, Jamahiriya arabe libyenne, Bulgarie, Turquie et Bélarus.
La Sixième Commission poursuivra l'examen du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l'Organisation, demain, vendredi 13 octobre, à 10 heures.
DEBAT
Déclarations
Mme ALVAREZ NUNEZ (Cuba) a rappelé limportance des travaux du Comité spécial de la Charte en ce qui concerne le raffermissement du rôle des Nations Unies. Conformément à son mandat, le Comité spécial doit accomplir sa mission en procédant à lexamen approfondi des propositions des Etats. Cependant, certaines délégations ne cessent de se lamenter à propos des résultats concrets de ces travaux et souhaitent remettre en question ses méthodes de travail. Certes, certains aspects formels du Comité pourraient être améliorés et, à cet égard, on peut se féliciter des propositions soumisses par la délégation du Japon. La représentante a mis en garde contre la tactique bien connue de certains qui essayent dimposer des concepts étrangers à ceux de la Charte et au droit international en fonction de leurs intérêts particuliers. Elle a regretté que cette position soit adoptée par un nombre important de délégations. Ce qui importe, à son avis, cest de faire en sorte que le travail du Comité puisse saccomplir dans les meilleures conditions au lieu de laffaiblir en essayant de raccourcir la durée de ses sessions et de recourir aux services dexperts, compromettant ainsi le dialogue direct entre les délégations. Elle sest prononcée pour la défense des Nations Unies et de sa réforme. Nous avons présenté dans ce sens au Comité des documents de travail sans attendre nécessairement quil débouche sur des décisions, a-t-elle fait remarquer. La délégation cubaine souhaite le renforcement de la coordination entre les différents organes des Nations Unies. De plus, elle espère que les Etats prendront des décisions concrètes en ce sens. Elle est convaincue que le Comité spécial peut apporter une contribution importante aux travaux des Nations Unies.
M. A. GOPINATHAN (Inde) a déclaré que sa délégation attache la plus grande importance à la question des Etats tiers touchés par lapplication de sanctions conformément à la Charte, et estime quil faut trouver durgence une solution permanente à ce problème. Les embargos économiques et sanctions ont causé de grandes difficultés à des Etats tiers et à leurs peuples, particulièrement dans les pays en développement, a rappelé le représentant. Certes, le Conseil de sécurité a le pouvoir de décider et dimposer des sanctions en application du Chapitre VII, mais la Charte nignore pas les conséquences néfastes de ces sanctions sur les Etats tiers. Le Conseil de sécurité a donc la responsabilité de compenser les dommages subis par des Etats tiers en créant des mécanismes destinés à fournir cette compensation, a déclaré M. Gopinathan.
LInde souscrit entièrement aux principales conclusions du Groupe de travail ad hoc contenues dans le Rapport du Secrétaire général (A/55/312), et qui recommande au Conseil de sécurité dexaminer avec soin les effets potentiels des sanctions, tant sur lEtat visé que sur des Etats tiers, avant que soient imposées de telles sanctions, a affirmé le représentant. La Sixième Commission devrait se concentrer sur le contenu des recommandations du Groupe dexperts, qui doivent être évaluées à la lumière de la résolution 51/208, qui demande la création de mécanismes ou procédures appropriées en vue datteindre les objectifs de lArticle 50 de la Charte. Ceci ne peut se faire quavec la création dun mécanisme permanent au sein du Système des Nations Unies, doté de ressources adéquates fournies sur une base prévisible et par des contributions obligatoires, afin quil puisse être activé automatiquement, chaque fois que des sanctions ont un effet négatif sur des Etats tiers, a estimé M. Gopinathan. Il faut prendre durgence des mesures pour traduire dans la pratique la volonté des chefs dEtat et de gouvernement inscrite dans la Déclaration du millénaire concernant la réduction des effets néfastes des sanctions sur les populations innocentes.
Le représentant a déclaré quil considérait la proposition de la Fédération de Russie concernant les conditions de base pour limposition de sanctions, en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, comme une base de discussion utile. Les propositions sont conformes au rapport du Groupe dexperts, a-t-il estimé. LInde fait sienne la position du Mouvement des non alignés, pour qui les sanctions doivent être considérées comme une solution de dernier recours et doivent être appliquées dans le strict esprit de la Charte. Il est également inéquitable davoir un régime de sanctions qui se poursuive indéfiniment sans quil soit possible de le réexaminer de manière impartiale.
Le représentant a affirmé que lInde attache une grande importance à la réforme des Nations Unies, y compris à la démocratisation du Conseil de sécurité et à une plus grande transparence dans ses méthodes de travail.
Le représentant sest félicité des précisions apportées par la Sierra Leone concernant son projet de règlement pacifique des différends, ainsi que de la proposition révisée des coauteurs (Sierra Leone et Royaume-Uni). Cette nouvelle orientation encourage le recours aux mécanismes existants, a ajouté M. Gopinathan. LInde, a-t-il ajouté, souhaite que les Etats parties restent libres du moyen par lequel ils règleront pacifiquement leurs différends.
Le représentant a regretté les retards dans la publication des Répertoires; il a souhaité quils soient rattrapés et que soient fournies à cette fin au secrétariat des ressources suffisantes. Il a dit quil approuvait les propositions faites par le Japon concernant lamélioration des méthodes de travail du Comité spécial. Toutefois, il a estimé que lon ne pourrait pas, contrairement à la proposition japonaise aligner les méthodes de travail du Comité sur celles du Groupe de travail sur lélimination du terrorisme. Il sest également opposé à une réduction de la durée des sessions du Comité.
M. ABDUL MUNIM AL KADHE (Iraq) a constaté laugmentation du nombre de pays qui se plaignent de la présence dun seul pôle qui sévit dans les réunions internationales, au détriment des petits Etats. Le recours aux embargos et à la politique qui consiste à affamer les populations et à détruire les sociétés revient à mettre le droit international au service des politiques unilatérales des forces dhégémonie comme les Etats-Unis, a-t-il déploré. Il peut sagir au contraire de faire fi des règles du droit, et de mettre au rebut les principes de souveraineté des Etats et recourir à la force en dehors des mécanismes internationaux. Il a rappelé que le nouveau millénaire est une occasion nouvelle pour mettre de nouveau laccent sur les principes fondamentaux des Nations Unies dont la Charte reste la base stable du droit international. Le Comité spécial doit donc prendre une place particulière au sein des différentes commissions spéciales des Nations Unies, a-t-il déclaré. Il a invité les Etats Membres à renforcer le rôle des Nations Unies et à mettre fin au déséquilibre du Conseil de sécurité. Il a rappelé les critères de base pour imposer des sanctions aux Etats et les dispositions pour aider les pays touchés par ces sanctions. Il sest félicité du document révisé par la délégation russe qui vise à déterminer les critères essentiels selon lesquels limposition de sanctions peut intervenir. Il a regretté que les sanctions imposées à lIraq aient atteint, par la gravité de leurs conséquences, le niveau dun génocide contre le genre humain, une sorte de vengeance contre tout un peuple, violation flagrante de la Charte des Nations Unies. Il a évoqué le document de travail de la Commission des droits de lhomme qui sest réunie du 31 juillet au 18 août 2000 et qui a confirmé que ces sanctions sont illégales au regard des droits de lhomme.
Il a regretté quil ny ait pas de gradation dans les termes des résolutions adoptées par les institutions des Nations Unies et cest pour cette raison que sa délégation estime quil faut décider des critères clairs et précis sur la base desquels les sanctions seront décrétées, allégées ou arrêtées. La démocratie au sein des Nations Unies est confrontée à un défi très grave et le Conseil de sécurité sest arrogé des droits qui dépassent ceux qui sont inscrits dans la Charte, afin que certaines puissances puissent réaliser des objectifs politiques étroits. Evoquant la crise au Moyen-Orient, il a parlé des crimes qui sont en train dêtre commis actuellement contre les Palestiniens sans que pour autant le Conseil de sécurité puisse agir convenablement, confronté quil est par la menace de veto des Etats-Unis, au cas où seraient décidées des mesures coercitives contre Israël. Seule une résolution générale a pu être prise et il a regretté que, malgré cela, les Etats Unis se soient abstenus. Le droit des peuples dans la coexistence et la stabilité est essentiel pour le maintien de la paix internationale et lOrganisation des Nations Unies doit être en mesure de réaliser ces nobles objectifs. La réforme des Nations Unies doit permettre au Conseil de sécurité dassumer son rôle. Le Comité spécial est le forum adéquat pour mener à bien cette tâche et mettre en place un système de sécurité générale pour le bien commun.
M. SHIN HYUN-SOO(République de Corée) a déclaré quil partageait lespoir que la communauté internationale continuera à déployer des efforts collectifs pour parvenir à des sanctions ciblées et efficaces. Cela nest pas facile. Il faut donc épuiser tous les recours possibles avant den venir à lapplication de sanctions. La République de Corée approuve la tendance actuelle tendant à appliquer des sanctions très ciblées à un nombre limité de personnes, et de manière souple. A cet égard, il sest félicité des efforts déployés par le Comité des sanctions pour améliorer lefficacité de son travail.
Le représentant sest prononcé en faveur de la suppression du Conseil de tutelle. Toutefois, la République de Corée prend note avec intérêt de la proposition du Secrétaire général tendant à transformer le Conseil de tutelle en gardien du patrimoine commun de lhumanité et en organe de liaison avec la société civile.
Il a noté avec intérêt la discussion relative au document de travail présenté par le Japon pour améliorer les méthodes de travail du Comité spécial de la Charte. A son avis, le Comité devrait concentrer ses travaux sur un nombre de thèmes restreints, et être capable de décider larrêt de la discussion sur certains sujets après un échange de vues.
M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie, au nom du Groupe de Rio) a estimé que la Déclaration du millénaire, dans laquelle les chefs dEtat et de gouvernement se sont engagés à faire des Nations Unies un instrument plus efficace pour atteindre ses objectifs, est conforme au mandat du Comité spécial de la Charte. Celui-ci, a-t-il ajouté, peut apporter une importante contribution au renforcement du rôle de lOrganisation, dans la mesure où il est le seul organe juridique ouvert à la participation de tous les Etats qui soit compétent pour réexaminer des questions qui préoccupent profondément la communauté internationale. Toutefois, a poursuivi le représentant, il devient nécessaire de revoir les méthodes de travail du Comité spécial qui doit entamer ses sessions avec des objectifs bien définis. La présentation de texte sous une forme tournée vers laction pourrait aider les délégations à voir dès le départ la direction à prendre et le résultat possible de leurs travaux.
M. Valdivieso a pris note des mesures adoptées par le Comité des sanctions en application des propositions faites par le Conseil de sécurité dans sa note du 29 janvier 1999 relative à la mise en uvre des dispositions de la Charte concernant lassistance aux Etats tiers touchés par lapplication de sanctions. Il sest félicité des efforts entrepris pour assurer une plus grande transparence aux travaux des Comités des sanctions, grâce à la présentation de rapports détaillés par leur Président. Il a invité le secrétariat à poursuivre ses efforts pour rendre disponibles rapidement les résumés des réunions de ces Comités. De même, le Groupe de Rio suit avec intérêt le Groupe de travail officieux mis en place par le Conseil de sécurité pour étudier la façon daméliorer lefficacité des sanctions, notamment laide aux Etats tiers touchés. Le représentant a souhaité que les recommandations, qui doivent être présentées avant le 30 novembre, comprennent des dispositions pratiques. Le Groupe de Rio souhaite attirer lattention sur le rapport A/55/1 du Secrétaire général sur lactivité de lOrganisation, dont les propositions en matière de sanctions obtiennent un large soutien, a déclaré M. Valdivieso.
Le Groupe de Rio estime que les organisations financières internationales ont un rôle important à jouer concernant lévaluation des sanctions. Il a fait sien certains des éléments du document de travail révisé, présenté par la Fédération de Russie, concernant les bases nécessaires à limposition de sanctions. Pour le Groupe de Rio, les sanctions doivent constituer un dernier recours, ne doivent pas être illimitées dans le temps et doivent faire lobjet dun examen régulier. Le Groupe de Rio est particulièrement préoccupé par les aspects humanitaires des sanctions et estime quil faudrait, au moment de la formulation et de lapplication des régimes de sanction, tenir compte des avis des organisations humanitaires internationales.
Les dispositions de la Charte doivent constituer la base fondamentale de toute action collective, notamment en cas de recours à la force, a déclaré le représentant. Toute modification du cadre daction fixé par la Charte devrait être le résultat dune analyse collective et universelle à laquelle participerait lensemble des Etats Membres.
Le représentant a estimé que le projet de mécanisme de prévention et de règlement précoce des différends présenté par le Royaume-Uni et la Sierra Leone, doit être précisé dans sa portée et sa finalité. Alors que le document réaffirme lobligation pour les Etats de régler leurs différends de manière pacifique, le Groupe de Rio considère que l'état des conflits dans le monde requiert une réponse appropriée de la part des Nations Unies, qui inclut une stratégie globale, et dans laquelle la culture de la prévention remplacerait la culture de règlement des différends.
Le représentant a souhaité que les Répertoires sur la pratique des organes des Nations Unies et la pratique du Conseil de sécurité soient publiés rapidement et dans toutes les langues prévues.
M. HAROLD AGYEMAN (Ghana) sest déclaré satisfait des progrès louables de laction du Secrétaire général pour réduire le retard des Répertoires de la pratique des Nations Unies et de la pratique du Conseil de sécurité et a félicité la Grande-Bretagne pour sa contribution au fonds daffectation spécial créé à cet effet. La Charte prévoit que les effets des sanctions sur des Etats tiers doivent trouver des solutions, a-t-il constaté. Une étude de la Banque mondiale, et cela est encourageant, a montré quil était urgent de mettre au point une méthode dévaluation de limpact des sanctions sur les Etats tiers et il faut faire grand cas des préoccupations de ces Etats tiers pour lapplication de sanctions mieux ciblées, et mieux étudiées quant à leurs effets pendant leurs phases de préparation. Il est également souhaitable que la durée des sanctions soit limitée dans le temps et que leurs conséquences soient périodiquement évaluées. Le représentant du Ghana sest dit encouragé par le régime des sanctions appliqué en Afrique et par la création dun Groupe dexperts chargé daméliorer lefficacité de ces sanctions. Il a demandé instamment à la Sixième Commission et au Comité spécial denvisager les moyens nécessaires pour protéger les Etats tiers et les populations innocentes.
M. JAO BAENA SOARES (Brésil) a déclaré sassocier à la déclaration faite par la Colombie au nom du Groupe de Rio. Il a estimé que le Comité spécial a un rôle important à jouer dans les questions relatives au renouvellement de lOrganisation, dont il a été question lors du Sommet du millénaire. Le Brésil est convaincu que le Comité spécial peut participer à ces efforts.
Le Brésil estime depuis toujours que les sanctions doivent être utilisées seulement en dernier recours, a rappelé le représentant, qui sest félicité des mesures destinées à améliorer ladoption de sanctions et le suivi de leur application, afin de parvenir à des sanctions intelligentes. Nombre de ces propositions, a-t-il rappelé, ont été examinées à lorigine au sein du Comité spécial.
Les sanctions doivent toutefois rester lexception. Le Brésil sest toujours intéressé aux moyens daméliorer les effets bénéfiques des missions de paix et autres outils destinés à maintenir la paix, et dont certaines se retrouvent dans le rapport Brahimi, dont la publication a été justement saluée. Il faut tenter de régler les différends de manière pacifique, a estimé le représentant. Le Brésil accueille favorablement les suggestions visant à permettre à la Cour internationale de Justice de mieux sacquitter de son travail à un moment où ce travail présente un intérêt de plus en plus capital pour la communauté internationale.
Quant aux méthodes de travail du Comité spécial, le représentant a estimé quil fallait aller plus loin et sest félicité des propositions faites, à cet égard, par la délégation japonaise. Nous devons être plus pragmatiques dans notre approche, a-t-il estimé.
Mme MUSMA MUSA ABBAS (Indonésie) a rappelé que son attachement au Comité spécial vient du fait quil permet la participation de tous les Etats Membres, petits et grands, et favorise la concentration de leurs efforts sur le développement des principes de droit acceptables par tous. Sagissant de la question de lapplication des dispositions de la Charte relatives à lassistance aux Etats tiers touchés par les sanctions, elle a noté que le Comité spécial étudie la question depuis de nombreuses années sans trouver de solution; or, a-t- elle remarqué, les sanctions ont des conséquences très graves sur les populations civiles. Le Conseil de sécurité doit donc veiller à ce que les Etats tiers non ciblés naient pas à subir les conséquences des sanctions quil décrète. Elle sest néanmoins félicitée de ce que le travail se poursuive sur les méthodes qui permettraient darriver à ce résultat. En ce qui concerne le document de travail relatif aux critères essentiels des sanctions et des mesures coercitives, présenté par la Fédération de Russie, elle a estimé que cétait une base utile pour poursuivre les efforts de réflexion à lavenir. Elle a également noté le travail de la Fédération de Russie sur les opérations de maintien de la paix, qui constitue une base intéressante pour les discussions sur un cadre juridique densemble des opérations de maintien de la paix. Enfin, en ce qui concerne les méthodes de travail du Comité spécial, elle a estimé quil ne serait pas prudent de réduire la durée de ses sessions.
M. SEDDIGH SHEBANI (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que sa délégation fondait de grands espoirs sur le rôle reconnu à ce Comité. Il a souhaité que lOrganisation des Nations Unies soit plus efficace pour lutter partout contre la maladie, lignorance, linjustice sous toutes ses formes, combattre le terrorisme, la violence et la criminalité, conformément au contenu de la Déclaration du millénaire. La validité des buts et principes de la Charte ne fait aucun doute. Que seraient toutefois les principes de la Charte sans une application juste et concrète, a-t-il demandé. La Charte contient un système bien articulé de mécanismes de mise en uvre de ses objectifs. Mais tout déséquilibre dans le fonctionnement dun de ces organes aura des répercussions sur le fonctionnement de lensemble de lOrganisation et nous ne voulons pas de cela dans notre maison commune, a déclaré le représentant.
Rappelant le contenu du rapport du Comité spécial et les propositions faites concernant la nécessité de sentendre au préalable sur les fondements juridiques sur lesquels doivent reposer les actions de maintien de la paix des Nations Unies et les critères de base qui permettent de décréter des sanctions et autres mesures coercitives, le représentant a observé que le document évite de traiter de manière concrète de certains Etats affectés par les sanctions. La Charte a confié au Conseil de sécurité la charge du maintien de la paix et de la sécurité internationales, a rappelé le représentant. Le Conseil sest doté de larges prérogatives qui en font lorgane central dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Mais, cet organe vital et efficace est devenu presque un jouet dans les mains de certains de ses membres, du fait de lutilisation du droit de veto et de linterprétation sélective donnée à certaines dispositions de la Charte, a affirmé le représentant. La Jamahiriya arabe libyenne soutient donc tout projet de réforme concernant le Conseil de sécurité. Il faut que le règlement intérieur du Conseil soit adopté par lAssemblée générale, que les consultations du Conseil deviennent publiques, et il faut abolir le droit de veto, ou bien le généraliser.
Le représentant a soutenu le document de travail présenté par Cuba, car il contient de nombreuses idées précieuses sur la réactivation de l'Assemblée générale et le rééquilibrage de ses prérogatives dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales face au Conseil de sécurité. Le représentant a également soutenu les propositions présentées par la Fédération de Russie au Comité spécial en 1999 et tendant à interdire lutilisation de la force militaire contre un Etat Membre, sauf si le Conseil de sécurité adopte une résolution en application du Chapitre VII de la Charte. La Jamahiriya arabe libyenne a fait dans ce sens des propositions, a rappelé le représentant, qui en a énuméré le contenu, notamment le fait que le Conseil de sécurité devrait devenir lorgane dexécution des résolutions de lAssemblée générale dont le rôle serait renforcé. Le représentant a souhaité que le Comité spécial étudie, lors de sa prochaine session, la proposition de son pays, paragraphe par paragraphe. Dautres Etats ont des propositions à faire sur la base de ce document, a-t-il affirmé.
Le représentant a déclaré quil appuyait les propositions tendant à renforcer la Cour internationale de Justice et à lui donner les moyens de sacquitter de sa tâche, de plus en plus lourde.
M. VLADIMIR C. SOTIROV (Bulgarie) a ajouté des observations à la déclaration faite hier par le représentant de la France au nom de lUnion européenne et des pays associés. Il a dabord rappelé limportance quil attache à la mise en uvre de lArticle 50 de la Charte des Nations Unies du fait des pertes économiques énormes ($10 millions) dont a souffert la Bulgarie à cause de lapplication stricte des sanctions imposées par le Conseil de sécurité des Nations Unies à lIraq, lex-Yougoslavie et la Jamahiriya arabe libyenne. Il a reconnu aussi limportance des sanctions en tant quéléments de sécurité collective prévus par la Charte et cest pourquoi sa délégation na pas dobjection à soutenir la mise en uvre des mesures prévues par le Chapitre VII de la Charte. Cependant, évoquant le paragraphe 9 de la Déclaration du millénaire, qui exprime la volonté des Etats Membres déliminer les effets négatifs des sanctions sur les Etats tiers, il sest félicité des mécanismes de surveillance créés à cet effet. Cest avec satisfaction quil a aussi noté que lors de la dernière session de lAssemblée générale, la question de la mise en uvre des dispositions de la Charte relatives à l'assistance aux Etats tiers a été largement débattue, tant par le Comité spécial de la Charte que par la Sixième Commission. Les Nations Unies ont un rôle important à jouer dans le processus didentification de solutions pratiques à apporter aux problèmes économiques spécifiques de ces Etats.
Sur lapplication de la résolution 54/107, paragraphe 5, il a remarqué que le Secrétaire général doit présenter ses vues sur les délibérations du Groupe spécial dexperts, en tenant compte des avis des Etats, des organisations des Nations Unies et des autres institutions internationales. Il a souhaité quil présente donc rapidement ses vues. Il a aussi abordé le paragraphe 7 de cette résolution qui prévoit que lAssemblée générale doit transmettre le rapport au Secrétaire général et a noté avec satisfaction la discussion qui a eu lieu au Conseil. Il a enfin exprimé lespoir que des décisions pratiques seront prises durant la présente session et que le projet de résolution, présenté notamment par la Bulgarie et soumis au Comité, recevra lappui des Etats Membres.
M. TEOMAN UYKUR (Turquie) a déclaré quil était particulièrement intéressé par les questions relatives à la mise en uvre des dispositions de la Charte relative à lassistance aux Etats tiers touchés par limposition de sanctions, car son pays est dans ce cas et en est particulièrement affecté. Les deux rapports présentés (rapport du Groupe dexperts ad hoc sur la méthodologie à utiliser pour évaluer les effets adverses pour les Etats tiers et rapport du Secrétaire général A/55/383 présentant les vues des Etats et des organisations internationales compétentes) fournissent une base pour une action concrète, a-t- il estimé.
Des idées pratiques ont déjà été présentées ici pour atténuer les conséquences pour les Etats tiers, que ce soit des exemptions commerciales, des priorités accordées aux entreprises des Etats tiers pour les investissements humanitaires ou la création dun fonds de compensation, a noté M.Uykur. Il a souligné la responsabilité du Conseil de sécurité, qui doit agir sans délai pour faire face aux problèmes des Etats tiers, conformément à lArticle 50 de la Charte. Le représentant sest réjoui du document de travail présenté par la Fédération de Russie, qui juge inacceptable limposition de sanctions si des Etats tiers devaient sen trouver trop affectés.
Le représentant a estimé qu'il faut affiner le projet de la Sierra Leone concernant le règlement pacifique des différends à un stade précoce. Il sest félicité des mesures proposées pour rattraper le retard dans la publication des Répertoires de la pratique des organes des Nations Unies et de la pratique du Conseil de sécurité. Le représentant a estimé que le Comité pourrait être organisé de manière plus efficace, par exemple en commençant les réunions à lheure. Il faut améliorer son efficacité plutôt que de réduire encore ses réunions.
M. VALERY ZHDANOVICH (Bélarus) a estimé que la question des Etats tiers touchés par lapplication des sanctions devrait se voir assigner un rang de priorité élevé. Les sanctions constituant un moyen extrême de coercition ne doivent être décrétées quaprès lépuisement des moyens de règlement pacifique. En effet, il est important que ces sanctions ne soient pas prises pour une durée indéterminée et il faut surtout que leurs effets fassent lobjet dune évaluation régulière, et pour ce faire, une méthode doit être préalablement mise au point. LONU étant appelée à jouer un rôle de protecteur en ce qui concerne les économies des Etats tiers, il a déploré la pratique de certains Etats qui mettent unilatéralement un terme à leurs relations économiques avec certains Etats. Il a souhaité la poursuite des travaux sur la base du document de travail présenté par la Fédération de Russie, qui détermine les critères fondamentaux de mise en uvre des opérations de maintien de la paix. Il a appuyé ce document dont les aspects juridiques sont à ses yeux particulièrement importants. Enfin, il a parlé du projet de résolution présenté pour avis à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le droit des Etats à recourir à la force sans intervention de lONU. Il a rappelé que la CIJ est un organe reconnu en matière dinterprétation du droit international et quil conviendrait que le Comité spécial examine cette question.
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