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AG/J/301

PLUSIEURS INTERVENANTS SUGGERENT A LA CDI D'EXAMINER DE MANIERE APPROFONDIE LES DROITS ET OBLIGATIONS CREES PAR LES ACTES UNILATERAUX DES ETATS

4 novembre 1999


Communiqué de Presse
AG/J/301


PLUSIEURS INTERVENANTS SUGGERENT A LA CDI D'EXAMINER DE MANIERE APPROFONDIE LES DROITS ET OBLIGATIONS CREES PAR LES ACTES UNILATERAUX DES ETATS

19991104

La Sixième Commission (Commission juridique) a poursuivi, cet après- midi, l'examen du rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa cinquante et unième session, en insistant notamment sur les actes unilatéraux et la responsabilité pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international.

Les délégations ont de nouveau mis l'accent sur la question des actes unilatéraux des Etats, réaffirmant qu'ils sont courants dans les relations internationales et qu'ils interviennent dans tous les domaines. Il est donc nécessaire de codifier le droit des actes unilatéraux des Etats et de promouvoir leur développement progressif. Soulignant la nécessité de faire preuve de prudence en délimitant le champ d'application du projet d'articles sur les actes unilatéraux des Etats, plusieurs délégations ont suggéré à la Commission du droit international d'examiner de manière plus approfondie les effets juridiques des droits et des obligations établis par les actes unilatéraux des Etats. Un intervenant a estimé que les différents types d'actes unilatéraux tels que la protestation, la promesse, la levée, la reconnaissance ou la notification devraient être examinés en tenant compte de leurs particularités. Cette approche pourrait servir de base solide, en particulier pour le cas de la révocation.

Dans ce cadre, les représentants des pays suivants ont fait une déclaration : Japon, Costa Rica, Venezuela, Autriche, Egypte, Fédération de Russie, Chine, Côte d'Ivoire et Turquie.

La Sixième Commission se réunira de nouveau, demain 5 novembre à 10 heures. Elle devra achever l'examen du rapport de la CDI.

-2 - AG/J/301 4 novembre 1999

EXAMEN DU RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL (CDI) SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE ET UNIEME SESSION

Déclarations

Mme RUMI ARIYOSHI (Japon) a déclaré que sa délégation émet quelques doutes à l'égard de l'approche adoptée par la Commission du droit international (CDI) concernant les projets d'articles sur les actes unilatéraux des Etats présentés cette année qui font souvent référence à la Convention de Vienne sur le droit des traités. Le Japon estime que les travaux de la CDI sur la question sont importants car la nature et les effets juridiques des actes unilatéraux des Etats sont différents de ceux des traités. S'agissant de la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international, Mme Ariyoshi a indiqué que son pays appuie la décision de la CDI de reporter l'examen de la question de la responsabilité internationale afin de donner la priorité à la finalisation de la deuxième lecture du projet d'articles sur la prévention des dommages transfrontières découlant d'activités dangereuses.

Le Japon estime qu'il est nécessaire de réexaminer comment la question de la responsabilité internationale devra être traitée lorsque la deuxième lecture du projet d'articles sur la prévention sera terminée. Il faudrait que les gouvernements présentent, d'ici le 1er janvier 2000, leurs observations et commentaires sur le projet d'articles relatif à la prévention. La CDI devrait également être en mesure de se prononcer sur la forme du futur instrument. Le Gouvernement japonais est fermement convaincu que la Commission devrait pouvoir répondre à la question importante de l'environnement. A cet égard, le Japon présentera des commentaires écrits visant à l'aider à déterminer des thèmes appropriés liés à l'environnement.

M. CARLOS TERNADO DIAZ (Costa Rica) a abordé la question des actes unilatéraux des Etats pour affirmer que la distinction entre un acte juridique et un politique n'a pas de sens. Tous les actes unilatéraux des Etats revêtent un caractère politique, a affirmé le représentant. En conséquence, il a invité la CDI à se poser la seule véritable question qui importe en matière d'actes unilatéraux, à savoir si ces actes ont ou non des effets juridiques? Le Costa Rica préférerait que la CDI consacre une étude à l'ensemble des actes susceptibles d'avoir des effets juridiques. En fondant son étude sur un concept plus large d'acte unilatéral, la CDI serait plus proche de la pratique des Etats dans ce domaine et ses travaux seraient plus productifs, a estimé le représentant.

Abordant la question de la responsabilité des Etats, il a insisté sur la nécessité, dans le cadre de la définition de l'Etat lésé, de distinguer entre les diverses situations dans lesquelles un Etat peut être affecté par un fait internationalement illicite. Partant, il a affirmé qu'il serait nécessaire de définir des dispositions spécifiques visant la réparation. Il a appuyé les concepts du projet qui limitent l'obligation de réparation en se fondant sur les droits fondamentaux de la population de l'Etat qui commet l'acte illicite. Tout en précisant que sa délégation n'a pas d'objection concernant l'obligation pour l'Etat responsable de payer des intérêts, le représentant a affirmé que la pratique et la jurisprudence internationales ne sont pas unanimes sur ce point. Le représentant a appuyé les dispositions du projet d'articles relatives aux contre-mesures. Il a également appuyé l'idée qu'elles doivent être suspendues dès lors que les parties se soumettent à une procédure de règlement pacifique des différends. Par ailleurs, le Costa Rica considère que les travaux relatifs au concept de crime international d'Etat entrent dans le cadre du mandat confié à la CDI en vue de favoriser le développement du droit international. Le représentant a enfin estimé que la CDI n'est pas l'organe privilégié pour discuter de questions relatives aux interventions humanitaires. De telles discussions ont davantage leur place au sein des organes politiques des Nations Unies.

M. NELSON GONZALEZ (Venezuela) s'est félicité de l'excellent rapport sur les réserves aux traités présenté par le Rapporteur spécial chargé de la question, M. Alain Pellet. Le projet d'articles devrait revêtir la forme d'une convention. Toutefois, sa délégation fait preuve de souplesse à l'égard de l'adoption d'un guide de la pratique. Le Venezuela fait sien le projet de directives 1.4 sur les déclarations unilatérales autres que les réserves et les déclarations interprétatives. M. Gonzales a estimé que le rapport comporte des commentaires très importants. Concernant la définition de l'acte unilatéral de l'Etat, M. Gonzales a considéré qu'il faudrait la finaliser l'année prochaine. La Convention de Vienne sur le droit des traités doit inspirer l'élaboration de règles applicables aux actes unilatéraux des Etats. La question des actes unilatéraux des Etats est étroitement liée à celle des réserves.

M. HANS WINKLER (Autriche) a abordé la question de la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d'Etats et a souligné l'utilité du projet finalisé par la CDI du point de vue de la sécurité des personnes et des Etats. Il a appelé de ses voeux son adoption par l'Assemblée générale sous forme de déclaration. Evoquant à la question des réserves aux traités, il a réaffirmé les vues exprimées par sa délégation l'année passée, selon lesquelles certaines définitions contenues dans le projet sont par trop détaillées, tandis que d'autres sont redondantes. Pour ce qui est des actes unilatéraux des Etats, l'Autriche, consciente que les travaux en la matière n'en sont qu'à leurs débuts, espère qu'un rapport plus détaillé sera publié l'an prochain sur le sujet. Par ailleurs, l'Autriche n'est pas certaine du bien fondé de l'approche visant à faire des conventions de Vienne le point de référence des travaux. Le représentant, venant à la question des immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens, a émis l'espoir que le Groupe de travail favorisera en la matière, une acceptation de règles uniformes par les juridictions nationales des Etats.

Le représentant, se référant à la grande variété de sujets à l'ordre du jour de la CDI, a fait remarquer combien à l'heure actuelle, le droit interne tend à s'internationaliser. Il a par ailleurs attiré l'attention des membres de la Sixième Commission sur la multiplication des branches du droit international, évoquant un phénomène de fragmentation du droit international, qui est selon lui plus un fait que le résultat d'un concept. Partant, il a souligné les risques de conflits juridiques entre normes internationales qui en découlent. Il a reconnu qu'il n'est pas aisé de trouver des solutions à ce phénomène. Suggérant d'examiner sous cet angle et de façon attentive toute élaboration de règles nouvelles, le représentant a prié la CDI de réfléchir à cette question cruciale pour l'avenir du droit international lors du prochain millénaire. Le représentant a enfin suggéré à la CDI de concentrer son examen des questions environnementales à des sujets spécifiques, tels que le principe de précaution ou celui du pollueur-payeur.

M. GOMA (Egypte) a réaffirmé que le régime établi par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 devrait être préservé. Si le régime des réserves vise à exclure la participation de certains pays d'un traité donné, la notion même de l'universalité est vouée à l'échec. Le droit des traités, en particulier le régime de Vienne, ne distingue pas entre les traités sur les droits de l'homme et les autres traités multilatéraux. En outre, le représentant a considéré qu'il n'y a pas de raison de rechercher à établir un régime des réserves distinct pour les traités sur les droits de l'homme, alors que tous les autres domaines restent soumis au régime général des réserves. Le représentant a émis l'espoir que le Rapporteur spécial examinera les déclarations interprétatives, à la lumière des particularités des différentes cultures qui influencent les régimes juridiques des Etats.

Faisant référence à la responsabilité des Etats, M. Goma a fait sienne les conclusions du Rapporteur spécial selon lesquelles les obligations "erga omnes" n'ont pas à être davantage élaborées. Il a souligné que le "jus cogens" - l'innovation la plus importante de la Convention de Vienne sur le droit des traités - continue de soulever des questions et ne semble pas faire l'objet de l'acceptation et de l'interprétation universelles dans certains domaines. Il a fait remarquer par ailleurs que la distinction entre les règles primaires et les règles secondaires applicables en la matière est imparfaite et difficile à établir. La délégation égyptienne estime qu'il est important de respecter le parallélisme entre le droit des traités et le droit de la responsabilité internationale. Une constante référence soulignant la complémentarité de la Convention de Vienne sur le droit des traités et le projet d'articles doit être maintenue. Concernant les dispositions relatives à la "nécessité" en tant que circonstance excluant l'illicéité, la délégation égyptienne fait sienne la recommandation de la CDI selon laquelle l'intervention humanitaire impliquant le recours à la force viole la norme la plus péremptoire, notamment le non recours à la force dans les relations internationales.

M. ROGACHEV (Fédération de Russie) a souligné la nature complexe du sujet des actes unilatéraux des Etats, en raison de leur grande variété et parce qu'ils sont le moyen le plus courant de l'expression de la volonté des Etats dans le cadre des relations internationales. L'existence d'actes unilatéraux en tant que source de droit international ne fait pas de doute, a- t-il affirmé. Mais il y a une incertitude sur leur régime juridique qui est source de conflits. D'où l'importance de définir des règles en la matière. Le représentant a appuyé l'idée d'exclure de l'examen de la question, les actes ayant un caractère subalterne ou ceux qui n'ont d'effet qu'au plan interne. La Fédération de Russie appuie également l'idée de ne pas traiter des actes unilatéraux émanant des organisations internationales. Le représentant a souligné qu'il n'est pas toujours possible d'établir une délimitation précise entre actes politiques et juridiques. Il a fait remarquer que l'obligation juridique liée à un acte unilatéral trouve son origine, moins dans l'expression unilatérale de la volonté d'un Etat, que dans la concordance de cette expression avec celle d'autres Etats. S'agissant de la forme de l'instrument élaboré par la CDI sur le sujet, la Fédération de Russie est favorable à la rédaction d'un projet d'articles, assorti de commentaires.

M. SUN GUOSHUN (Chine) a réaffirmé que les actes unilatéraux des Etats sont courants dans les relations internationales et ils interviennent dans tous les domaines de ces relations. Il est donc nécessaire de codifier le droit des actes unilatéraux des Etats et de promouvoir leur développement progressif. Néanmoins, le fait que ces actes sont fréquents ne signifie pas que les travaux de codification constitueront une tâche aisée. Dans la mesure où les actes unilatéraux des Etats sont présents dans de nombreux aspects et que différents actes unilatéraux peuvent produire des effets juridiques différents, il ne sera pas facile d'élaborer des règles précises pour régir ces actes afin qu'ils ne constituent pas une source de conflit international. De l'avis de la délégation chinoise, il n'existe pas de distinction claire entre les actes unilatéraux juridiques et les actes unilatéraux politiques. Quelquefois, un acte peut être à la fois politique et juridique. Il s'agit notamment de la déclaration unilatérale faite par les Etats dotés de l'arme nucléaire à l'égard de ceux qui n'en sont pas dotés. Le Groupe de travail créé par la Commission du droit international (CDI), à sa cinquante et unième session, a défini les actes unilatéraux des Etats en tant qu'actes visant à produire des effets juridiques sur le plan international. Cette définition est encourageante. Tout d'abord, il existe une différence entre l'intention et le résultat et ensuite, les actes sans intention de produire des effets juridiques ne produisent pas nécessairement des résultats qui n'ont pas d'effets juridiques, et enfin, l'intention ou l'absence d'intention de la part de l'auteur des actes visant à produire des effets juridiques est difficile à déterminer. Cette dernière risque d'être controversée. En conséquence, la délégation chinoise suggère que la CDI explique dans ses commentaires le terme "intention". En outre, elle souhaite le maintien du terme "autonome" dans la définition de l'acte unilatéral.

Le représentant a souligné la nécessité de faire preuve de prudence en délimitant le champ d'application du projet d'articles sur les actes unilatéraux des Etats. Il faudrait examiner de manière plus approfondie les effets juridiques des droits et des obligations établis par les actes unilatéraux des Etats. Certaines dispositions de procédure, ayant trait notamment à l'interprétation, à l'amendement, à la suspension et à l'expiration d'un acte unilatéral peuvent également s'inspirer des dispositions pertinentes de la Convention sur le droit des traités afin de mieux compléter les dispositions du projet d'articles relatifs aux actes unilatéraux concernés.

M. BONIFACE OURAGA OBOU (Côte d'Ivoire) a affirmé que la notion de déclaration interprétative doit être définie plus avant, afin de la placer à l'abri de toute ambiguïté. Le représentant a affirmé que la déclaration interprétative ne constitue pas à proprement parler un acte juridique, sauf lorsqu'elle est formulée dans le cadre de traités bilatéraux. Partant de cette différence de nature, il faudrait arriver à une définition moins équivoque de la déclaration interprétative. Ainsi, le représentant souhaiterait que la CDI accepte d'intégrer dans la définition de la déclaration interprétative, la distinction entre traité multilatéral ou bilatéral afin de mieux distinguer la déclaration à valeur juridique et celle qui ne l'est pas.

M. TEOMAN UYKUR (Turquie), abordant la question des actes unilatéraux des Etats, a estimé que, tout en admettant que les dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités peuvent inspirer l'élaboration du projet d'articles sur les actes unilatéraux des Etats, il ne faut pas perdre de vue le caractère particulier des actes unilatéraux découlant des traités. Les Etats agissant unilatéralement ne sont pas habilités à modifier, à leur avantage, l'équilibre établi par les dispositions pertinentes du traité acceptées par les parties. Concernant la capacité d'agir au nom de l'Etat pour que les actes unilatéraux produisent des effets juridiques sur le plan international, M. Uykur a fait observer que le chef de gouvernement et le ministre des affaires étrangères sont largement considérés comme étant habilités en la matière. Toutefois, une approche restrictive devrait être adoptée pour désigner d'autres représentants de l'Etat habilités à agir en cette qualité. Le représentant a estimé que les différents types d'actes unilatéraux tels que la protestation, la promesse, la levée, la reconnaissance ou la notification devraient être examinés en tenant compte de leurs particularités. Cette approche pourrait servir de base solide, en particulier pour le cas de la révocation.

S'agissant de la question des réserves aux traités, le représentant a indiqué que sa délégation exprimait certaines préoccupations à l'égard des amendements apportés au projet de directives sur les déclarations relatives à la mise en oeuvre d'un traité au plan interne. De l'avis de sa délégation, les droits des Etats tiers ne devraient pas être affectés de manière négative par une déclaration de cette nature.

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