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AG/J/288

LA SIXIEME COMMISSION ACHEVE L'EXAMEN DU POINT RELATIF A LA CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

22 octobre 1999


Communiqué de Presse
AG/J/288


LA SIXIEME COMMISSION ACHEVE L'EXAMEN DU POINT RELATIF A LA CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

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Lors des quatre séances consacrées par la Sixième Commission (Commission juridique) à l'examen du point relatif à la création d'une Cour pénale internationale, les intervenants se sont unanimement félicités de l'adoption, le 17 juillet 1998, du Statut de Rome. S'ils ont tous souligné la nature historique d'un tel événement, les représentants ont également insisté sur le chemin qu'il reste à parcourir en vue d'assurer l'entrée en fonction d'une Cour permanente, universelle et efficace dans son action. Ainsi, ont-ils rappelé que seuls 4 Etats ont jusqu'à présent procédé à sa ratification, alors que 60 sont nécessaires à son entrée en vigueur. Soulignant la complexité des processus de ratification, qui nécessitent la révision des législations nationales en vue d'assurer leur conformité avec le Statut, nombre d'intervenants ont toutefois indiqué l'adoption par leurs autorités respectives, de mesures allant dans ce sens. Outre les questions liées à la ratification du Statut, de nombreuses délégations se sont prononcées sur les travaux de la Commission préparatoire de la Cour pénale internationale, chargée en vertu de la résolution F de l'Acte final de la Conférence diplomatique de Rome, de finaliser avant le 30 juin 2000 les instruments nécessaires à l'entrée en fonction de la Cour. Des délégations, se félicitant de l'esprit de coopération qui a régné lors des premières sessions de la Commission, ont souligné les avancées encourageantes réalisées sur les questions du règlement de procédure et de preuve et des éléments constitutifs des crimes. L'organisation des travaux de la Commission préparatoire a particulièrement retenu l'attention des délégations. Ainsi, de nombreuses voix se sont élevées pour que la Commission préparatoire soit autorisée à tenir des sessions au-delà de la date-butoir fixée dans son mandat, en vue, notamment, de finaliser de nouveaux instruments nécessaires au fonctionnement de la Cour.

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M. Philippe Kirsch, Président de la Commission préparatoire, s'était prononcé dans ce sens lors la première séance en déclarant que "65% du temps imparti a été utilisé et seulement 45% du travail effectué". Pour ce qui est du contenu des travaux, les représentants se sont félicités de la création d'un groupe de travail sur le crime d'agression, soulignant leur attachement à la définition d'un tel crime. La majorité des délégations ont insisté sur la nécessité de maintenir un esprit d'ouverture et de respecter de façon stricte tant la lettre que l'esprit du Statut adopté à Rome. De nombreux intervenants ont fait remarquer que la qualité de la future Cour, dépendra étroitement de celle des travaux de la Commission préparatoire. Dans ce contexte, ils ont souligné la nécessité de tenir compte des vues du plus grand nombre de participants possible, estimant qu'il en ira de l'acceptation universelle de la future Cour.

Prenant la parole, l'Observateur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a réitéré le souhait de son organisation de voir les Etats renoncer, comme l'article 124 du Statut les y autorise, pour une période de sept ans, à la compétence de la Cour, en ce qui concerne les crimes de guerre qui auraient été commis par leurs ressortissants ou sur leur territoire. Il a précisé que le CICR a préparé une vaste étude de la jurisprudence, internationale et interne, en matière de crime de guerre qui sera achevée pour la prochaine session de la Commission préparatoire. Pour sa part, le représentant de la Slovénie a souligné que du fait de la complémentarité de la Cour par rapport aux juridictions nationales, elle encouragera les Etats à véritablement respecter le droit international, notamment le droit international humanitaire.

Les représentants des pays suivants ont fait une déclaration: Liechtenstein, Ouganda, Indonésie, Slovénie, Kenya, Pologne, Madagascar, Trinité-et-Tobago, Burkina Faso, Sierra Leone, Bangladesh, Bulgarie, Israël, Haïti et Syrie. L'Observateur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) est également intervenu.

Les représentants d'Israël, de la Syrie et du Liban ont exercé leur droit de réponse.

La Sixième Commission se réunira de nouveau lundi 25 octobre à 10 heures. Elle entamera l'examen du rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa cinquante-et-unième session.

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EXAMEN DE LA QUESTION RELATIVE A LA CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

Déclarations

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a déclaré que les sessions de la Commission préparatoire ont donné lieu à de bons résultats. Il est nécessaire de redoubler d'efforts pour finaliser les projets de textes sur le règlement de procédure et de preuve et sur les éléments constitutifs des crimes avant la date-butoir du 30 juin 2000. Il faudrait accorder une haute priorité au processus de la Cour pénale internationale, et à cet égard, la délégation du Liechtenstein appuie pleinement la poursuite des travaux de la Commission préparatoire tels qu'ils sont soulignés par le projet de résolution élaboré par la délégation des Pays-Bas. Le nouveau pragmatisme qui préside aux travaux de la Commission préparatoire est certainement aussi profitable à la Cour qu'il le fut à la Conférence de Rome où il a permis d'adopter un Statut de qualité. M. Wenaweser a émis l'espoir qu'il en sera de même en faveur de l'universalité de la Cour pénale internationale. Le maintien de l'intégrité du Statut est essentiel. Le règlement de procédure et de preuve et les éléments constitutifs des crimes ne doivent pas restreindre l'habilité de la Cour à interpréter le droit international applicable, conformément à la lettre et à l'esprit du Statut. A ce stade, l'expression la plus importante de l'appui politique est de toute évidence la signature et la ratification du Statut de la Cour. Outre la finalisation des travaux de la Commission préparatoire d'ici le 30 juin 2000, l'entrée en vigueur rapide du Statut constitue un autre objectif majeur. Le Liechtenstein a signé le Statut à Rome lorsqu'il a été ouvert à la signature et il espère être en mesure de le ratifier d'ici la fin de l'année prochaine. M. Wenaweser s'est déclaré convaincu qu'une Cour pénale internationale efficace pourrait contribuer considérablement à mettre fin à l'impunité.

Mme JULIET D. SEMAMBO KALEMA (Ouganda) a affirmé que la Cour pénale internationale devra être une institution indépendante, crédible et efficace dans son action. La représentante a souligné que sa compétence devra s'exercer dans les cas où les systèmes judiciaires nationaux sont inexistants ou inefficaces. Elle s'est félicitée des progrès accomplis par la Commission préparatoire, chargée de finaliser les instruments indispensables à l'entrée en fonction de la Cour. Elle a demandé que le temps et les ressources nécessaires soient alloués à la Commission préparatoire afin qu'elle puisse mener à bien ses travaux. Elle a souhaité que les délégations se souviennent de leurs obligations à l'égard du Statut de Rome, et notamment celle de le ratifier. Dans ce contexte, elle a indiqué que son pays a signé le Statut et met en oeuvre actuellement les mesures nécessaires à sa ratification. La représentante a remercié les pays qui ont apporté leur contribution au Fonds d'affectation spéciale établi par la résolution 53/105 de l'Assemblée générale et qui a permis aux pays les moins développés de participer aux travaux de la Commission préparatoire.

M. FERRY ADAMHAR (Indonésie) a déclaré qu'à la veille du nouveau millénaire, nos espoirs et aspirations pour un monde plus pacifique, plus juste et plus stable doivent être réalisés. On ne peut ignorer que l'après-guerre froide a contribué à créer des tensions et a fait naître des revendications nationales ethniques dans les nations fragilisées par leurs diversités ethniques. De violents conflits, le nettoyage ethnique, la discrimination raciale, l'intolérance religieuse et d'autres crimes atroces continuent de marquer la scène mondiale. Les systèmes judiciaires nationaux et la coopération internationale, sur lesquels ont été fondés tant d'espoirs, ont montré qu'ils ne peuvent traiter la commission de ces crimes graves. C'est pourquoi, l'Indonésie attache une grande importance à la création d'une Cour pénale internationale en tant que mécanisme judiciaire permanent. Rappelant que son pays a participé activement à tous les travaux de négociation du Statut et aux sessions de la Commission préparatoire, M. Adamhar a indiqué que le Gouvernement indonésien continue d'examiner de manière approfondie le texte, en particulier pour trouver un mécanisme approprié visant à le diffuser auprès de presque 200 millions d'Indonésiens sur l'ensemble de ses 13 000 îles. La délégation indonésienne estime que la participation universelle devrait constituer la pierre angulaire de la Cour pénale internationale. La Cour devrait être le produit d'une coopération mutuelle entre tous les pays sans distinction et être fondée sur les différences politiques, économiques, sociales et culturelles. Il est indéniable que dans le monde contemporain, le droit international soit fondé sur la volonté des Etats souverains d'élaborer des normes juridiques contraignantes régissant les relations entre Etats. Ces normes ne peuvent être contraignantes et valides que lorsque les Etats donnent leur consentement.

En vue d'assurer une justice acceptable pour l'ensemble de la communauté internationale, la Cour pénale internationale doit être impartiale et juste. Elle ne doit subir aucune pression politique. Il faudrait veiller à ce qu'elle s'acquitte de son objectif principal, notamment faciliter la coopération et prévenir la commission de nouveaux crimes haineux. La délégation indonésienne appuie pleinement la création de groupes de travail chargés de la définition des différents crimes, notamment le crime d'agression.

Mme ANITA PIPAN (Slovénie) s'est dite convaincue que la future Cour pénale internationale sera un pilier essentiel du système naissant de justice internationale. Ce sera un outil puissant pour dissuader la commission de crimes les plus haineux et châtier les coupables. La représentante a souligné que la Cour contribuera à mettre en place une culture de responsabilité en assurant la primauté du droit et la protection des droits de l'homme. Du fait de sa complémentarité, elle encouragera les Etats à véritablement respecter le droit international.

La représentante a affirmé que les délégations doivent s'efforcer, en faisant preuve d'une détermination absolue, de remplir le mandat fixé par la résolution F de l'Acte final de la conférence diplomatique de Rome. Dans ce contexte, elle a estimé qu'une session supplémentaire sera nécessaire à la Commission préparatoire pour discuter, au delà des éléments des crimes et du règlement de procédure et de preuve, des autres instruments nécessaires à l'entrée en vigueur de la Cour. Elle a émis l'espoir que les Etats continueront de travailler efficacement et dans un esprit de compromis. La représentante a souligné l'importance d'inclure dans les meilleurs délais le crime d'agression dans la compétence de la Cour. Ce serait un élément dissuasif puissant du recours à la force par les Etats, a-t-elle souligné. La représentante a enfin insisté sur la nécessité pour les Etats de ratifier le Statut, non seulement pour permettre l'entrée en fonction de la Cour, mais aussi pour assurer son universalité. Elle a indiqué que son pays prépare une révision de sa réglementation nationale en vue d'en assurer la conformité avec le Statut. La représentante a affirmé qu'avec une volonté résolue, le concours du CICR et des organisations non gouvernementales, il est possible de créer une Cour acceptable par tous. Certains événements récents nous rappellent l'urgence de sa création a-t-elle conclu.

M. FARES KUINDWA (Kenya) a rappelé que la coopération de son pays avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda, siégeant en Tanzanie, a montré qu'il est possible de coopérer avec la Cour pénale internationale même sans élaborer la législation nationale nécessaire. A cet égard, le Kenya reconnaît l'absolue nécessité et l'utilité d'établir une instance chargée de poursuivre et de juger non seulement les auteurs de crimes qui affectent les factions belligérantes mais également les pays voisins. Le Kenya souhaite que la Cour soit mise en place aussi rapidement que possible et, pour ce faire, il est essentiel de finaliser les projets de textes sur le règlement de procédure et de preuve ainsi que sur les éléments constitutifs des crimes. A cet égard, le représentant a estimé qu'il faudrait accorder la priorité à la définition du crime d'agression. Tout en comprenant le caractère sensible de cette définition, la délégation kenyane se dit convaincue qu'on parviendra à un compromis sans altérer l'essence même du crime. Le crime d'agression doit être clairement défini.

M. PIOTR OGONOWSKI (Pologne) a souligné qu'alors que nous approchons de la fin d'un siècle qui a été marqué par des souffrances sans précédent, il est devenu indispensable de développer une culture dans laquelle le respect du droit aura une place prépondérante. Dans ce contexte, le représentant s'est dit encouragé par le fait que 88 Etats, y compris le sien, ont signé le Statut. Il a toutefois souligné que le processus de ratification est plus complexe dans la mesure où il pose de multiples questions. Il a précisé que le Statut est à l'étude dans son pays, afin que soient identifiées les nécessités de révision de certaines dispositions internes. Le représentant a ensuite abordé les questions relatives aux travaux de la Commission préparatoire de la Cour pénale internationale. A cet égard, et soulignant les progrès considérables accomplis, le représentant a demandé que la Commission puisse tenir une session supplémentaire au-delà de la date-butoir du 30 juin 2000 prévue dans la résolution F.

Le représentant a enfin insisté sur la nécessité de définir le crime d'agression. A l'appui de cette affirmation, il a fait remarquer que souvent, ce crime constitue un préalable à la commission de nombreux autres. Il importe de signifier sans équivoque, que le crime d'agression est non seulement interdit par le droit international mais encore, que ses auteurs sont passibles de peines. En conclusion de son intervention, le représentant a insisté sur la nécessité de redoubler d'efforts afin d'assurer l'universalité de la Cour, dont l'efficacité future dépend.

M. JEAN DELACROIX BAKONIARIVO (Madagascar) a déclaré que la Cour pénale internationale constitue un gage d'espoir pour les générations à venir et une grande étape sur la voie du respect universel de l'homme et de l'état de droit. Tout en reconnaissant la difficulté d'harmoniser les impératifs des principaux systèmes de droit, la délégation malgache encourage toutefois les autres délégations à faire preuve de bonne volonté pour prendre en considération les préoccupations des autres afin de concilier les préférences et les intérêts nationaux divers. En ce qui concerne la date-butoir fixée par la résolution F de la Conférence de Rome, M. Delacroix Bakoniarivo s'est déclaré d'avis que la finalisation des règles de procédure et de preuve et celle des éléments constitutifs des crimes représentent les défis à relever par la Commission préparatoire. Par ailleurs, les initiatives inter-sessions ont été très utiles dans la mesure où elles ont permis à la Commission de mieux approfondir l'examen de certains chapitres du Statut de la Cour, notamment les Colloques de Paris et de Syracuse.

S'agissant du crime d'agression, il faudrait faire preuve d'agressivité pour définir ce crime car c'est la mère de tous les crimes, a souligné M. Delacroix Bakoniarivo. De plus, à la lumière des débats extrêmement animés lors de la deuxième session de la Commission préparatoire, la ratification du Statut par certains Etats dépend de l'adoption ou non de la définition du crime d'agression tel qu'il est prévu par l'Article 5-2. Il est donc souhaitable que cette question soit réglée d'ici le 30 juin 2000 pour que la Cour puisse fonctionner le plus rapidement possible. La délégation malgache se prononce en faveur de la création d'un groupe de travail chargé de la question et fait sienne la proposition visant à prendre en considération comme base de travail la résolution 3314 du 14 décembre 1974. Ayant signé le Statut de Rome, Madagascar s'attelle sérieusement à la possibilité de s'engager dans la procédure constitutionnelle lui permettant de le ratifier.

Mme GAILE A. RAMOUTAR (Trinité-et-Tobago) s'est félicitée de la participation de nombre d'Etats aux travaux de la Commission préparatoire, chargée de finaliser les instruments qui permettront l'entrée en fonction de la future Cour pénale internationale. Elle s'est prononcée en faveur de la création d'un Groupe de travail sur le crime d'agression. La représentante a souligné la nécessité pour les délibérations de la Commission préparatoire de préserver l'intégrité du Statut adopté à Rome. La représentante a enfin indiqué que les pays du CARICOM mettent en oeuvre, à l'heure actuelle, des processus de ratification du Statut, que son pays, pour sa part, a d'ores et déjà ratifié. Elle a souligné la lenteur et la complexité d'une telle tâche. En conclusion de son intervention elle a appelé tous les Etats qui ne l'ont pas encore fait, à prendre toutes les mesures pour ratifier le Statut de Rome.

M. ALAIN EDOUARD TRAORE (Burkina Faso) a déclaré que pour son pays, la création d'une juridiction supranationale, en l'occurrence une cour pénale internationale, ne doit pas viser les criminels de certains Etats plutôt que d'autres. L'application du droit international devrait être beaucoup plus impersonnelle. Par conséquent, les décisions de la Cour devraient concerner les criminels de tous les pays, tels qu'ils seront identifiés selon les instruments mis en place. C'est par rapport au processus d'identification des criminels, se basant sur la définition des éléments des crimes, que la délégation burkinabée refuse des qualifications et des définitions qui ne correspondent pas aux règles fondamentales du droit international. Le refus et les actes dilatoires pour ne pas définir plutôt le crime d'agression est une preuve de l'esprit partial que certains nourrissent autour de la mise en place de la Cour. Comme l'ont souligné maintes délégations, l'agression est le plus grave de tous les crimes et trouve déjà dans la coutume et les principes généraux du droit international, des éléments sérieux de définition. M. ALLIEU IBRAHIM KANU (Sierra Leone) a affirmé que son pays a été l'un des premiers à signer le Statut visant la création de la future Cour pénale internationale. Le représentant a indiqué qu'hier, un nouveau gouvernement, représentatif des partis et de la société civile, a accédé au pouvoir dans son pays. C'est la raison pour laquelle il a tenu à intervenir, pour réaffirmer, a-t-il déclaré, les positions, bien connues, de la Sierra Leone sur la question. Il est salutaire, a-t-il affirmé, de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour faire de la Cour pénale une réalité. S'agissant du crime d'agression, le représentant s'est félicité de la création d'un groupe de travail sur ce point. Il a émis l'espoir que les travaux se dérouleront dans un esprit de coopération. Le représentant a affirmé que la volonté politique de créer la Cour doit se manifester pour que les auteurs des crimes les plus haineux, dont certains ont été commis dans son propre pays, soient poursuivis et punis. Il a indiqué que son pays, même s'il ne bénéficie que d'une paix précaire, se prépare à la ratification du Statut.

M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a réaffirmé que son pays attache une grande importance à la Cour dans la mesure où le Bangladesh a été lui-même victime de génocide au cours de sa lutte de libération en 1971. Le représentant a rappelé que le Premier Ministre du Bangladesh, Sheikh Hasina a exprimé l'engagement de son pays de devenir partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, lors du débat général de l'Assemblée générale le 16 septembre dernier. Le Bangladesh exprime également sa gratitude à tous les contributeurs au Fonds d'affectation spéciale créé pour appuyer la participation des pays les moins avancés. Le représentant a estimé que le projet de règlement de procédure et de preuve et celui des éléments constitutifs des crimes devraient respecter pleinement la lettre et l'esprit du Statut de Rome en vue de garantir l'équité et le fonctionnement efficace de la Cour. En outre, les éléments constitutifs des crimes devraient décrire clairement les crimes relevant de la compétence de la Cour et prendre en compte le droit humanitaire international. Le Bangladesh se félicite par ailleurs de la création d'un groupe de travail chargé de la définition de l'agression. A cet égard, M. Chowdhury a estimé que l'agression constitue une violation grave des principes énoncés par la Charte des Nations Unies et la Cour doit en connaître.

Mme KATIA TODOROVA (Bulgarie) s'est alignée sur la déclaration faite par l'Union européenne concernant la création d'une Cour pénale internationale. En faisant en sorte que la Cour puisse entrer en fonction, la communauté internationale confirme sa volonté de renforcer la paix, la sécurité, le bien-être des populations et d'assurer la justice au plan international. La représentante a rappelé que son pays a toujours soutenu l'idée de la création d'une telle Cour, sur la base d'un Statut acceptable par tous. Elle a indiqué que son pays a récemment signé le Statut et a souligné que sa ratification rendra nécessaire la révision de certaines lois internes. Tout en soulignant que le Code pénal en vigueur dans son pays incrimine les actes les plus graves tels que le génocide, la violation du droit humanitaire ou l'agression, elle a souligné que des mesures devront tout de même être adoptées pour assurer la totale conformité de la législation bulgare avec le Statut. La représentante a assuré que la définition de telles mesures est actuellement à l'étude par son gouvernement et devrait être finalisée d'ici à la fin de l'an 2000.

M. BOCCHI EDMOND (Haïti) a affirmé que la signature, le 17 juillet 1998, du Statut de Rome a constitué une victoire pour l'humanité. Il a affirmé que, sans aucun doute, l'ère des tribunaux spéciaux est en passe d'être achevée. Toutefois, il a fait remarquer que 15 mois après l'adoption de ce Statut, seulement 88 Etats l'ont signé et 4 ratifié. Aussi, le but ultime qui est d'arriver à 60 signatures est loin d'être atteint, un long chemin reste encore à parcourir. Le représentant a fait remarquer que la ratification du Statut dépend grandement de sa compatibilité avec les lois nationales. Dans ce contexte, il a offert les services d'expertise de son pays à tous les pays en développement qui en feraient la demande. Abordant la question des travaux de

la Commission préparatoire, il a affirmé que le document de synthèse produit lors de la réunion de Syracuse contribuera grandement à faire avancer les débats. S'agissant du règlement de procédure et de preuve, le représentant a souligné qu'il ne devait nullement affecter le Statut. En ce qui concerne les éléments constitutifs des crimes, il s'est dit favorable à un noyau d'éléments succincts. Comme c'est le cas en droit romano-germanique, a-t-il précisé. S'agissant enfin du crime d'agression, le représentant a souligné qu'aucun consensus n'existe encore, et a rappelé les propos tenus par le Secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan, lors de la première session de la Commission préparatoire, soulignant les enjeux d'une telle définition.

Mme ESTHER EFRAT-SMILG (Israël) s'est déclarée fermement convaincue que les crimes haineux énumérés par le Statut de Rome constituent une menace à la communauté internationale tout entière, et devraient donc être traités par la communauté internationale dans son ensemble. Ce n'est que parce qu'Israël attache la plus haute importance à la création d'une Cour pénale internationale qu'il a exprimé certaines inquiétudes et figure parmi les pays qui n'ont pas été en mesure de le signer à ce jour. La délégation israélienne est tout d'abord préoccupée par les dispositions de l'Article 8 (2)(b)(viii) concernant le crime de transfert qui est l'un des crimes les plus haineux et de crime de guerre grave. Le Statut ne doit pas donner lieu à des abus à des fins politiques. Il doit strictement servir les buts pour lesquels la Cour a été créée. Cette Cour est trop précieuse. La communauté internationale ne devrait pas permettre qu'il soit affaibli par des agendas politiques. Plusieurs délégations ont fait référence au crime de guerre de transfert visé par cet Article. A cet égard, la délégation israélienne souhaite réaffirmer sa position selon laquelle certains des éléments clés de ce crime devraient être fondés sur le droit international en vigueur. Le cadre établi du droit international, sur lequel repose le crime de transfert et qui reflète le droit international coutumier sur la question, est l'Article 49 de la Quatrième Convention de Genève. La délégation israélienne estime que la référence dans l'Article 8 des termes "directement ou indirectement" ne peuvent s'expliquer que par des motivations politiques. La notion de transfert volontaire dans un tel contexte est en contradiction avec le libellé. Ayant signé l'Acte final de la Conférence de Rome, Israël s'est joint aux autres signataires de l'Acte final dans le cadre d'importantes délibérations au sein de la Commission préparatoire. Mme Efrat-Smilg a indiqué que sa délégation continuera à y participer activement et à oeuvrer de manière constructive avec les autres délégations pour parvenir à des résultats concrets reflétant l'accord de tous. M. GHASSAN OBEID (Syrie) s'est félicité des travaux accomplis par la Commission préparatoire au cours de ses deux sessions. La délégation syrienne réaffirme son attachement aux principes généraux du droit international et énoncés par la Charte des Nations Unies. C'est pourquoi, elle appuie fermement la création d'une cour pénale internationale juste, efficace et impartiale et qui ne sera soumise à aucune influence ou pression politique. Les travaux sur la Cour n'ont pas pris fin à Rome. La Commission préparatoire est mandatée pour finaliser les instruments nécessaires à l'entrée en fonction de la Cour. Tant que les Etats ne sont pas convaincus du Statut qu'ils

doivent signer, il ne sera pas possible de permettre l'entrée en vigueur rapide du Statut de la Cour. Le représentant a souhaité qu'il soit possible de parvenir à un compromis sur la définition de l'agression afin de permettre à un très grand nombre d'Etats de ratifier le Statut de la Cour. Quelle est l'importance d'une juridiction pénale internationale qui peut connaître des crimes moindres quand on exclut du Statut un des crimes les plus odieux, à savoir l'agression. A cet égard, M. Ghassan Obeid a rappelé l'occupation israélienne d'une partie de son pays et des violations flagrantes du droit international commises par Israël.

De l'avis de la délégation syrienne, la Cour est un organe des Nations Unies et les relations entre l'Organisation et la Cour doivent être étroites. Elle réaffirme son attachement à une définition de l'agression qui tienne compte de toutes les formes que peut revêtir ce crime. La Cour ne doit pas constituer un mécanisme dont le fonctionnement serait constamment paralysé par le Conseil de sécurité. La Cour doit être en mesure de déterminer elle- même l'agression. Le représentant a estimé qu'il est de la plus haute importance que l'on examine le crime de transfert prévu par l'Article 8 (2)(b)(viii) à la prochaine session de la Commission préparatoire. Il a indiqué que les juges ont pour rôle d'interpréter les dispositions du Statut. Le crime de transfert des populations des territoires occupés n'est pas seulement un problème d'Israël. C'est un crime contre l'humanité avant même que les territoires arabes soient occupés et il peut être occupé dans d'autres régions du monde.

M. JEANNET Observateur du Comité international de la Croix-Rouge a affirmé que le système actuel de répression des crimes de guerre est encore bien trop souvent ignoré. C'est la raison pour laquelle, a-t-il souligné, le CICR soutient activement la mise en place d'un système permanent et universel et se félicite de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale. Il s'est dit convaincu que la future Cour contribuera à accroître l'efficacité du système de répression actuel. Le représentant a réitéré le souhait du CICR de voir les Etats renoncer à déclarer, comme l'article 124 du Statut les y autorise, à renoncer pour une période de sept ans à accepter la compétence de la Cour en ce qui concerne les crimes de guerre qui auraient été commis par leurs ressortissants ou sur leur territoire. Il a affirmé que compte tenu du fait que la cour est complémentaire des juridictions pénales nationales, le CICR continuera et développera ses efforts visant à aider les Etats à adopter et à mettre en oeuvre la législation nationale visant à la poursuite des criminels de guerre en général, et le Statut de Rome en particulier. Le représentant a ensuite affirmé que les travaux actuels de la commission préparatoire font l'objet de la plus grande attention des Etats. A cet égard, il a affirmé qu'il est capital que le droit international humanitaire existant soit correctement reflété dans les instruments élaborés par la Commission. Il a précisé que le CICR a préparé une vaste étude de la jurisprudence, internationale et interne, en matière de crime de guerre qui sera achevée pour la prochaine session de la Commission préparatoire. Le représentant a enfin affirmé que le CICR continuera de contribuer à la réussite de la commission préparatoire.

Droits de réponse

La représentante d'Israël a estimé que la déclaration de la délégation syrienne illustre bien le risque de manipulation auquel la Cour pourrait être confrontée.

Pour sa part, le représentant de la Syrie a indiqué que sa déclaration ne comportait rien d'autre qu'un constat de fait. Il a seulement rappelé les objectifs de la Cour. S'il a dit quelque chose qui dévie de ces objectifs, cela tient à ce qui a été affirmé par d'autres délégations dont les gouvernements ont commis des violations graves du droit humanitaire international. Le représentant a fait observer que le crime de transfert était déjà prévu par l'Article 49 de la Quatrième Convention de Genève et à un moment où Israël n'avait pas encore commis de crime analogue. La délégation syrienne est consciente que la Sixième Commission n'est pas l'instance appropriée pour débattre de questions politiques.

Le représentant du Liban a fait remarquer que le Statut de la Cour pénale internationale a été adopté pour mettre fin à l'impunité des auteurs de crimes odieux, commis en violation flagrante du droit international. Le crime d'occupation commis par Israël au Liban ne doit pas rester impuni. L'occupation israélienne a fait de nombreuses victimes et a eu un impact négatif considérable sur la situation économique et sociale du pays. La délégation libanaise insiste sur la nécessité de parvenir à un compromis sur la définition du crime d'agression. Outre la violation de la Quatrième Convention de Genève qu'il constitue, ce crime est un crime de guerre odieux.

Reprenant la parole, la représentante d'Israël a estimé qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser cette instance pour exprimer ce qui a été déclaré dans d'autres enceintes.

Le représentant de la Syrie a fait observer qu'Israël souhaite que les Nations Unies n'aient aucun rôle à jouer. La Cour ne va pas devenir une nouvelle organisation des Nations Unies. C'est en invoquant cet argument qu'Israël s'oppose à la signature du Statut de la Cour et souhaite garder les mains libres.

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