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AG/J/252

LES DELEGATIONS AFFIRMENT QUE L'ADOPTION DU STATUT DE ROME EST UNE ETAPE MAJEURE DANS LA CREATION D'UNE COUR PENALE DE PORTEE UNIVERSELLE

22 octobre 1998


Communiqué de Presse
AG/J/252


LES DELEGATIONS AFFIRMENT QUE L'ADOPTION DU STATUT DE ROME EST UNE ETAPE MAJEURE DANS LA CREATION D'UNE COUR PENALE DE PORTEE UNIVERSELLE

19981022 L'efficacité de la Cour repose maintenant sur le succès des travaux de la Commission préparatoire qu'il convient de convoquer très rapidement

Réunie sous la présidence de M. Jargalsaikhany Enkhsaikhan (Mongolie), la Sixième Commission (Commission juridique) a achevé, cet après- midi, son débat sur la question de la création d'une cour pénale internationale.

Dans ce cadre, elle a entendu les représentants des pays suivants : Cameroun, Pays-Bas, Pologne, Guinée, Uruguay, Ouganda, Brésil, Burkina Faso, Ghana, Royaume-Uni, Ukraine, Honduras (au nom des pays d'Amérique centrale et de la République dominicaine), Liban, Jordanie, Géorgie, Nigéria, Soudan, Djibouti, Indonésie, Turquie, Zimbabwe, Egypte, Allemagne, Malte, Cuba, Equateur, Sierra Leone et Haïti.

Les représentants de la République démocratique du Congo, de Chypre, de l'Ouganda et de la Turquie ont exercé leur droit de réponse.

Plus de 80 délégations se sont exprimées sur ce point dont l'examen a commencé hier. L'immense majorité des délégations qui ont pris la parole se sont félicitées de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale qu'elles ont qualifiée de moment historique. Les délégations ont fait valoir que ce Statut, en dépit de son caractère de compromis, constituait une base solide pour l'édification d'une Cour de portée universelle. Tout en se félicitant d'avoir donné naissance à un dispositif qui contribuera de façon majeure à la promotion des principes de justice et de paix à l'échelle internationale, les délégations ont insisté sur la nécessité de poursuivre l'oeuvre entamée. Aussi, les représentants ont demandé la réunion de la Commission préparatoire dans les plus brefs délais. Ils ont insisté sur l'importance des travaux restant à accomplir et ont appelé de leurs voeux la mobilisation des ressources nécessaires pour permettre à la Commission de s'acquitter de son mandat dans les meilleures conditions. Elle aura notamment pour fonction d'élaborer le règlement de procédure et de preuve, la détermination des éléments constitutifs des crimes relevant de la compétence de la Cour, et de formuler des propositions pour une définition de l'agression en vue de l'inclure dans le Statut.

La Sixième Commission reprendra ses travaux, lundi 26 octobre à partir de 10 heures.

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CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

Déclarations

M. VICTOR TCHATCHOUWO (Cameroun) a rendu hommage à tous ceux qui ont oeuvré à la création de la Cour pénale internationale et s'est félicité de l'existence d'un instrument qui garantira le respect universel du droit à la vie. Le représentant a regretté que des crimes très graves tels que le trafic de drogues ou le terrorisme ne soient pas inclus dans la compétence de la Cour; il a émis l'espoir que la Conférence de révision permettra de dégager une définition acceptable de ces crimes. Le représentant de la délégation camerounaise a souhaité que l'Assemblée générale convoque le plus rapidement possible la Commission préparatoire afin de rendre effectives les dispositions pertinentes relatives au crime d'agression. Il a précisé que la résolution 3314(XXIX) du 14 décembre 1974, adoptée à l'unanimité donnait une définition satisfaisante du crime d'agression. Il a souligné que des questions subsistaient quant à la détermination de l'organe compétent - Cour pénale internationale ou Conseil de sécurité - pour décider de la qualification de crime d'agression. A cet égard, il a rappelé la proposition de la délégation camerounaise, qui, a-t-il précisé, permet à la Cour d'exercer pleinement ses pouvoirs en la matière sans pour autant concurrencer les pouvoirs du Conseil. En effet, tandis que le Conseil juge des actes d'agression commis par des Etats, la Cour jugera quant à elle des personnes. C'est une distinction fondamentale qui permet aux deux organes d'agir dans leur propre sphère. Le représentant a ajouté que les rapports entre la Cour et le Conseil devaient être fondés sur la coopération et la complémentarité.

M. JAN BERTELING (Pays-bas) : ma délégation appuie pleinement la déclaration faite par le représentant de l'Autriche au nom de l'Union européenne. Nous sommes sur la bonne voie comme en atteste la qualité des débats qui ont lieu actuellement devant la Commission juridique. La création de la Cour est une avancée monumentale qui permettra de mettre fin à la culture d'impunité et de châtier les auteurs de ces crimes. Le représentant a affirmé que quand bien même le Statut ne reflétait pas toutes les attentes de sa délégation, en arrivant à Rome, il n'en demeure pas moins que ses dispositions sont acceptables. Il a assuré de son respect les Etats qui ont voté contre le Statut. Nous voulons communiquer avec eux, et nous espérons que les Etats qui n'ont pas encore signé, contribueront quand même aux discussions, a déclaré le représentant. Nous soutenons les dispositions relatives à la complémentarité qui prévoient la primauté des cours nationales a déclaré le représentant. Il s'est en outre déclaré satisfait des pouvoirs donnés au procureur. Il a assuré que sa délégation veillerait à ce que la Cour pénale internationale soit efficace. Nous espérons que la Commission préparatoire disposera des moyens nécessaires pour rendre la Cour effective, ce qui commande la définition des crimes ainsi que celle des règles de preuve et de procédure. Annonçant que son pays ratifierait le Statut cette année, le représentant a invité tous les Etats à faire de même.

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M. PIOTR OGONOWSKI (Pologne) a déclaré que la création d'une Cour pénale internationale contribuera de manière considérable au maintien de la paix et de la sécurité internationales, ainsi qu'au respect des droits de l'homme. Il incombe en premier lieu aux Etats de garantir le respect de la justice. La Cour n'interviendra que lorsque les juridictions nationales sont inexistantes ou défaillantes. Sa délégation se félicite que le Statut tienne compte des différents systèmes juridiques. Pour permettre à la Commission préparatoire de s'acquitter de manière efficace de son mandat avant le 30 juin 1999, il faudrait la doter des services et ressources nécessaires.

M. ABDOULAYE BAH (Guinée) a déclaré que la création de la Cour pénale internationale est un jalon historique, d'autant qu'elle permettra de mettre fin à la culture d'impunité. L'existence de cet instrument permet de combler un vide dans le droit pénal international. Mon pays, a déclaré le représentant, ratifiera le Statut. Le représentant a souhaité que la Commission préparatoire se réunisse le plus rapidement possible pour permettre à la Cour d'entrer en vigueur au plus vite. Il a assuré que sa délégation participera activement aux travaux de la Commission.

M. JORGE PEREZ-OTERMIN (Uruguay) a réaffirmé l'appui de son pays à la création d'une cour pénale internationale. Pour garantir son efficacité, la Cour devrait bénéficier de l'appui de l'ensemble de la communauté internationale, non seulement par le nombre de signatures et ratifications, mais également par une véritable coopération des gouvernements. Faisant référence au principe de la complémentarité, le représentant a fait observer que ce principe aurait dû faire l'objet de précisions supplémentaires. La complémentarité signifie qu'il y a un complément à une autre partie. La Cour ne peut se situer ni en-dessous ni en-decà des juridictions nationales. L'interprétation du Statut par le parlement uruguayen aura la primauté.

Mme JULIET D. SEMAMBO KALEMA (Ouganda) a déclaré qu'en dépit de quelques imperfections, elle se félicitait des résultats de la Conférence de Rome. Elle a salué la naissance de cet instrument comme une étape majeure dans la voie du développement du droit international. La représentante a déclaré que son pays se préparait à ratifier cet instrument dans les plus brefs délais. Elle a ajouté que le Statut était un signal clair de la volonté de la communauté internationale de punir les crimes les plus haineux et de mettre fin à la culture d'impunité. Il semblerait que certaines dispositions du Statut nous laissent à désirer, comme par exemple le principe de complémentarité ou les pouvoirs du procureur. La représentante a souhaité que la conférence de révision examine des crimes tels que le trafic de drogues ou les crimes liés au terrorisme pour les inclure dans la juridiction de la Cour. Elle s'est montrée impatiente de voir démarrer les travaux de la Commission préparatoire qui permettront de rendre la Cour opérationnelle, pourvu qu'on lui alloue les moyens d'accomplir sa mission.

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M. MARCOS PRADO TROYJO (Brésil) a rappelé que lorsque sa délégation avait appuyé l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale, elle avait exprimé les préoccupations au sujet de l'incompatibilité de certaines dispositions avec la Constitution brésilienne qui interdit l'extradition de ses ressortissants. Le Brésil qui effectue actuellement les formalités nécessaires en vue de signer le Statut, considère cependant que la question exige un examen détaillé du Statut dans son ensemble, en tenant compte de sa compatibilité avec la législation nationale. Le Brésil souligne l'importance de la convocation de la Commission préparatoire chargée de finaliser certains instruments nécessaires à l'entrée en fonctions de la Cour. La participation active des Etats à ses travaux devra lui permettre de s'acquitter de manière efficace et démocratique de son mandat au plus tard le 30 juin 2000.

M. BACYE (Burkina Faso) a déclaré que son pays, convaincu que les efforts de démocratisation nationale n'ont de chance de réussite que dans un environnement régional et mondial favorable, participera à la mesure de ses moyens au règlement des conflits et à la recherche de mécanismes de prévention et de dissuasion des crimes. Avec l'adoption du Statut de la Cour, l'humanité a mis fin à l'impunité des violations les plus graves du droit international. Le Burkina Faso, qui a participé activement aux travaux de la Conférence diplomatique, signera incessamment le Statut.

M. H. HANSON-HALL (Ghana) a émis l'espoir que l'esprit de compromis qui a permis l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale inspirera les travaux de la Commission préparatoire en vue de garantir l'entrée en fonctions de la Cour. L'adoption de la Cour, a-t-il souligné, constitue une victoire et un événement sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Il faudrait doter la Commission préparatoire des ressources et services nécessaires pour lui permettre de s'acquitter de manière efficace de son mandat. Sa délégation propose que les organisations non gouvernementales participent activement aux délibérations de la Commission préparatoire sur les mêmes bases qu'à la Conférence diplomatique. En outre, elle suggère qu'il soit créé un fonds d'affectation spéciale pour permettre aux représentants des pays les moins avancés de participer à ses travaux. Le Ghana encourage tous les Etats à signer le Statut et à engager le processus de ratification afin de mettre fin à l'impunité des crimes les plus odieux.

Sir. FRANKLIN BERMAN (Royaume-Uni) a rappelé que le but de son Gouvernement était de créer une cour pénale qui soit efficace et dont la compétence soit largement reconnue par la communauté internationale. Ces deux exigences sont liées, a souligné le représentant. Il a indiqué que son pays procèderait rapidement à la signature du Statut. Le représentant a exprimé sa satisfaction au sujet de la définition des crimes de guerre et du crime contre l'humanité, ce qui, a-t-il précisé, permettra à la Cour de poursuivre les auteurs de telles infractions de façon efficace. L'inclusion dans la notion de crime de guerre, des conflits armés internes est très importante, a souligné le représentant. Il s'est félicité de la compétence de la Cour en matière d'indemnisation des victimes. De la même façon, le représentant s'est

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réjoui des règles adoptées en ce qui concerne la nomination et l'élection des juges de la cour. Il a regretté la procédure visant à l'adoption du Statut à Rome, qui a pu conduire certaines délégations à voter contre. Tout en affirmant qu'il respectait la décision de ces Etats, il a souhaité qu'ils rejoignent les signataires du Statut afin de conférer à la Cour une portée universelle. Le représentant a ensuite rappelé que beaucoup de travail restait à accomplir sur des questions tout à fait essentielles, parmi lesquelles celle du soutien politique nécessaire à la Cour, du soutien financier, de l'élection des juges et du procureur. Il a conclu en faisant part de la volonté de sa délégation de participer pleinement aux tâches restant à accomplir.

M. VASYL KORZACHENKO (Ukraine) a souligné que l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale n'aurait pas été possible sans la volonté des délégations de parvenir à un compromis pour mettre en place une cour pénale à caractère universel. Dès la clôture de la Conférence diplomatique, l'Ukraine, a-t-il dit, a engagé les procédures nécessaires à la signature du Statut. La création de la Cour ne pourra pas régler tous les problèmes du monde contemporain. Toutefois, il est indéniable qu'elle contribuera de manière décisive à la mise en place d'un système judiciaire indépendant, impartial et efficace. La délégation ukrainienne se déclare convaincue que la Cour contribuera à promouvoir le strict respect par les Etats - sans égard à leur participation - des normes internationales dans le domaine des droits de l'homme telles qu'énoncées dans les instruments internationaux en vigueur. L'Ukraine souligne l'importance des travaux futurs qui seront accomplis dans le cadre du suivi de la Conférence diplomatique. De l'avis de M. Korzachenko, les travaux sur le Statut ne seront pas achevés sans l'inclusion d'une disposition sur le crime d'agression. Soulignant le rôle primordial des organisations non gouvernementales dans les travaux préparatoires et à la Conférence diplomatique, il a insisté sur leur participation aux travaux de la Commission préparatoire.

M. JOSE ANTONIO GUTIERREZ NAVAS (Honduras, au nom du Costa Rica, d'El Salvador, du Guatemala, du Nicaragua et de la République Dominicaine) a déclaré que les actes de violence qui caractérisent les conflits survenus en différents endroits du monde rendent nécessaire l'établissement d'une Cour permanente et universelle se distinguant des tribunaux spéciaux. Nous appuyons le Statut adopté à Rome qui permettra de lutter contre la culture d'impunité, a-t-il ajouté. Le représentant a souhaité qu'une Cour pénale transparente, crédible, indépendante et universelle voit le jour, ce que devrait permettre le Statut adopté a-t-il souligné, tout en rappelant les inquiétudes nées de l'hétérogénéité des points de vue exprimés lors du processus long et difficile des négociations. Il s'est dit convaincu que la Cour sera un organe important dans les relations internationales et comblera un vide. La Cour, a ajouté le représentant, pourra développer un nouveau concept de justice internationale en plaçant l'individu au centre des activités individuelles et collectives des Etats. Il a assuré enfin que les délégations au nom desquelles il s'est exprimé, apporteront une contribution active aux travaux qui restent à accomplir pour rendre la Cour opérationnelle.

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M. HICHAM HAMDAN (Liban) a exprimé sa préoccupation sur les dispositions du Statut de la Cour pénale internationale, notamment en ce qui concerne le Bureau du procureur. A cet égard, son pays souhaite une représentation équitable de tous les systèmes juridiques. Toutefois, l'adoption du Statut marque un pas extraordinaire dans l'histoire de l'humanité. Le représentant a souligné la nécessité de poursuivre les travaux au sein de la Commission préparatoire pour garantir l'entrée en fonctions de la Cour. Soulignant le rôle crucial des organisations non gouvernementales dans le processus de négociation, M. Hamdan a appuyé leur participation aux travaux de la Commission préparatoire. De même, il s'est rallié à l'appel en faveur de la création d'un fonds d'affectation spécial permettant aux représentants des pays les moins avancés d'y participer activement.

M. SUHEIMAT (Jordanie) a déclaré que sa délégation avait toujours pris une part active au processus ayant abouti à l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale, à Rome. Le représentant a rappelé la résolution F prise lors de la Conférence diplomatique invitant sans délai à la convocation d'une commission préparatoire pour parachever la création de la Cour. M. Suheimat a assuré que son pays avait pris les dispositions nécessaires à la ratification de ce nouvel instrument dont le monde actuel a besoin pour punir les coupables de crimes haineux et a invité tous les Etats à faire de même.

M. ALEXANDER CHKHEIDZE (Géorgie) a rappelé que son pays, lui-même victime de nombreuses violations du droit international, a constamment appuyé l'idée de créer une Cour pénale internationale. L'adoption du Statut par la Conférence diplomatique à Rome est indéniablement un succès. Il reste toutefois certaines questions à régler, notamment la définition du crime d'agression en vue de l'inclure dans la liste des crimes relevant de la compétence de la Cour. A cette fin, la Commission préparatoire devrait entamer ses travaux sans tarder.

M. BELLO (Nigéria) a expliqué que son pays appuie la création d'une cour pénale internationale chargée de juger les crimes internationaux les plus graves. Sa délégation souhaite oeuvrer étroitement avec la communauté internationale pour établir un ordre mondial juste. M. Bello s'est déclaré convaincu que la création d'un système judiciaire international efficace, complémentaire aux juridictions nationales, contribuera au maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il faudrait dès à présent prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer l'entrée en fonctions de la Cour. La délégation nigériane regrette toutefois que la Conférence diplomatique n'ait pu parvenir à un consensus sur le crime d'agression et l'inclure dans le Statut. La Commission préparatoire devrait entamer ses travaux au cours du premier trimestre de 1999. Pour lui permettre de s'acquitter de manière efficace de son mandat, elle devrait être dotée des ressources et services nécessaires. Le Nigéria appuie la proposition visant à convoquer une

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conférence de révision pour examiner les crimes de terrorisme et de trafic des stupéfiants en vue de parvenir à une définition acceptable et l'inclure dans la liste des crimes relevant de la compétence de la Cour. M. Bello a appelé à la création d'un fonds d'affectation spéciale pour permettre la participation des pays les moins avancés aux travaux de la Commission préparatoire.

M. ELFATIH ERWA (Soudan) a appuyé, en principe, toutes les formes de règlement pacifique des différends et des autres violations qui touchent aux droits de l'homme et constituent une menace à la paix et à la sécurité internationales. Le Soudan figure parmi les quelques pays qui ont accepté la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice. Toutefois, la délégation fait observer que la Charte des Nations Unies a été interprétée de manière erronée par certains pays et à des fins propres. Au sein du Conseil de sécurité, la sélectivité a été employée et la protection étendue à certains pays qui ont commis des actes terroristes et qui pratiquent l'occupation forcée sous sa forme la plus odieuse depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale. Alors que ces pays ont bénéficié de l'impunité, le Conseil de sécurité a par ailleurs imposé des sanctions et des embargos sur la base du simple soupçon ou de ruses politiques. Peu de temps après la clôture de la Conférence diplomatique de Rome, la puissance militaire la plus sophistiquée du monde a attaqué le Soudan, un des pays les moins avancés du monde. Cet acte d'agression a été perpétré contre une usine pharmaceutique située au centre de Khartoum. L'agresseur a invoqué l'Article 51 de la Charte des Nations Unies sur la légitime défense pour justifier son acte. Serait-il possible pour la Cour pénale internationale d'incriminer les agresseurs et de les juger ou est-ce que le principe de non-impunité serait appliqué de manière sélective pour juger les faibles et absoudre les puissants,a demandé M. Erwa. Avons-nous cherché l'impossible lorsque nous avons demandé que la Cour soit indépendante comme c'est le cas avec la Cour internationale de justice. Avons-nous également visé l'impossible lorsque nous avons demandé à inclure l'agression dans la liste des crimes relevant de la compétence de la Cour. Avons-nous imposé des restrictions au rêve de l'humanité d'instaurer la justice et la paix. Le Soudan n'a pas perdu l'espoir pour la mise en place de la Cour et réaffirme fermement son engagement dans cette voie.

M. BADRI ALI BOGOREH (Djibouti) a déclaré que l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale à Rome constituait l'aboutissement de 50 années d'efforts pour créer une juridiction chargée de poursuivre et de juger les auteurs des crimes les plus abominables. Il a souligné les multiples difficultés qui ont étayé le processus de négociations tout en notant qu'elles n'avaient pas empêché de parvenir à un résultat historique. Un pas spectaculaire a été accompli dans la voie de la création d'une cour internationale réelle, effective et indépendante. Cette Cour aura pour fonction de compléter les juridictions nationales, a indiqué le représentant. Les pouvoirs conférés au procureur permettront d'entreprendre des investigations et des poursuites indépendamment du Conseil de sécurité. Le représentant a toutefois rappelé qu'un chemin important restait à parcourir pour que les dispositions du Statut se traduisent de façon concrète.

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Il a émis l'espoir que la Commission préparatoire se consacrera pleinement aux tâches restant à effectuer au sujet des règles de procédure et de preuves, de la définition des éléments constitutifs des crimes entrant dans la juridiction de la Cour ainsi que du financement de l'institution. M. Bogoreh a aussi insisté sur la nécessité de corriger les imperfections du Statut et a affirmé qu'il ne comprenait pas pourquoi le crime d'agression ne soit pas entré dans la compétence de la Cour. De même, il a regretté que le recours à l'arme nucléaire ne soit pas constitutif de crime de guerre. Le représentant a déploré la disposition du Statut permettant à un Etat partie d'exclure la compétence de la Cour en matière de crime de guerre pour les actes commis sur son territoire durant les sept années suivant l'entrée en vigueur du Statut.

M. ARIZAL EFFENDI (Indonésie) a souligné que la fin de la guerre froide ouvrait la porte à un monde plus juste, tout en reconnaissant que la scène internationale était encore loin de la stabilité et de la sécurité. Il a rappelé l'attachement de son pays à la création d'une Cour pénale internationale et la participation active de sa délégation en vue d'atteindre cet objectif. Le représentant a indiqué qu'il était important de fonder la compétence de la Cour sur un principe de complémentarité et de consentement des Etats. Il a souligné l'importance qu'il accordait à l'impartialité de la Cour. Le représentant a rappelé en outre les actions de sa délégation visant à favoriser l'obtention d'un consensus sur les différents points des délibérations, de façon à conférer à la Cour une portée universelle. Il a exprimé le voeu qu'un esprit de coopération et de transparence prévale lors des travaux de la Commission préparatoire. Le représentant a souligné l'importance des travaux que la Commission aura à accomplir, notamment en ce qui concerne les règles de preuve, de procédure, et la définition des éléments constitutifs des crimes.

Mme YESIM BAYKAL (Turquie) a rappelé que sa délégation avait proposé à la Conférence diplomatique de Rome l'inclusion, dans le Statut, du terrorisme en tant que crime contre l'humanité. Elle a regretté que ce crime ne figure pas dans la liste des crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale. Mme Baykal a émis l'espoir qu'il sera possible de parvenir à un consensus sur l'inclusion des crimes de terrorisme et de trafic illicite des stupéfiants dans le Statut. Ces crimes - les plus fréquents de nos jours - ont des liens étroits et constituent une menace grave pour la communauté internationale. Pour garantir l'efficacité de la Cour, les Etats devraient régler la question du refus de la compétence de la Cour dans le cadre du mandat et des restrictions établies par le règlement intérieur de la Commission préparatoire, ainsi que de la conférence de révision.

Mme ESTHER CHIBANDA-MUNYATI (Zimbabwe), a déclaré que le Zimbabwe, pays qui a été l'un des premiers signataires du Statut de la cour pénale internationale, estime toutefois que toutes les dispositions ne répondent pas aux attentes de son pays. Le Zimbabwe aurait souhaité notamment une cour indépendante et impartiale qui ait une compétence inhérente pour tous les crimes du noyau dur, y compris le crime d'agression.

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La Commission préparatoire devrait entamer ses travaux le plus rapidement possible pour élaborer les instruments nécessaires à l'entrée en fonction de la Cour d'ici le 30 juin 2000. Il faudrait maintenir l'élan qui a présidé aux travaux de la Conférence diplomatique. La délégation zimbabwéenne appuie la convocation d'une conférence de révision qui permettra aux Etats parties de réfléchir sur les accomplissements de la Cour.

Mme MEKHEMAR (Egypte) a déclaré que l'adoption du Statut de Rome est un événement historique, auquel son pays attache la plus grande importance. L'Egypte se prépare à adhérer au Statut, résultant d'un compromis qui ne saurait toutefois satisfaire pleinement toutes les délégations. La représentante a exprimé ses regrets quant à la disposition qui permet au Conseil de sécurité de faire usage d'un droit de veto sur certains aspects de la compétence de la Cour. De même, la représentante a exprimé des regrets sur la nature subjective des critères définissant le principe de complémentarité. La représentante s'est déclarée déçue que le recours aux armes nucléaires ne soit pas qualifié comme un crime de guerre. Il est paradoxal d'avoir inclus dans la compétence de la Cour, le crime d'agression, alors que cette compétence dépend en réalité d'une définition acceptable de ce crime qui reste à accomplir. La représentante a ensuite souligné les points positifs du Statut qui prévoit la protection des enfants lors de conflits armés, prend en compte les crimes de génocide et les crimes contre l'humanité. Elle a fait part de son espoir de voir la Commission préparatoire aboutir à une définition acceptable du crime d'agression.

M. GERHARD WESTDICKENBERG (Allemagne) s'est félicité de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale qui constitue un pas historique dans l'application du droit pénal international. Après les Tribunaux de Nuremberg et de Tokyo, la communauté internationale a été incapable de faire face à l'échec des systèmes nationaux de droit pénal pour punir les responsables d'atrocités. Trop souvent les auteurs de crimes de génocide, d'exécutions massives des opposants politiques, de nettoyages ethniques et de viols systématiques restent impunis. Les Tribunaux spéciaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda constituent une étape dans la bonne direction, mais ils n'offrent de solution que pour des cas particuliers commis dans des circonstances particulières, leur champ d'application restant limité. En déclarant des individus responsables des crimes commis, l'efficacité du droit international sera renforcée. La Cour, par sa simple existence, contribuera à dissuader et à empêcher des individus de commettre des crimes odieux. Le succès de la Conférence de Rome fait la promesse que l'impunité pour les crimes les plus odieux ne sera plus possible dans le monde. La Cour aura compétence sur les crimes du noyau dur, y compris le crime d'agression et le procureur pourra engager des enquêtes ou poursuites de sa propre initiative. L'Allemagne envisage de signer le Statut d'ici la fin de l'année. M. Westdickenberg a émis l'espoir que l'on parviendra bientôt aux 60 ratifications requises pour l'entrée en vigueur du Statut. Il est essentiel que la Commission préparatoire axe ses efforts sur le règlement de procédure et de preuve, les éléments constitutifs des crimes.

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M. ANTON TABONE (Malte) a déclaré que sa délégation était fière de faire partie des 58 Etats signataires du Statut de la Cour pénale internationale, et a invité tous les Etats a agir dans la même direction. Le représentant a rappelé que son pays considérait comme un devoir de léguer aux générations futures un instrument judiciaire capable d'établir, de façon juste et équitable, la culpabilité des auteurs de crimes à l'échelle internationale et de les condamner. L'histoire ayant montré les limites de l'efficacité des tribunaux ad hoc, la délégation maltaise a toujours soutenu activement l'idée de la création d'une cour permanente. Le représentant a noté que le Statut adopté à Rome n'était pas le Statut idéal attendu par chacun des participants. Ceci étant, a-t-il fait remarquer, il réalise un compromis qui permettra l'établissement d'une cour opérationnelle. Le représentant maltais a insisté sur la nécessité d'allouer à la Commission préparatoire le temps et les fonds nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

Mme YASMIRA CUETO MILIAN (Cuba) a rappelé que son pays avait voté en faveur de l'adoption du Statut de la Conférence diplomatique de Rome portant création d'une cour pénale internationale. Le Statut donne l'espoir qu'il sera mis fin à l'impunité des crimes les plus odieux. La représentante a regretté que l'agression, le terrorisme et le trafic illicite des stupéfiants ne figurent pas dans la liste des crimes relevant de la compétence de la Cour. Il faut se tourner vers l'avenir pour voir ce que l'on peut accomplir depuis la Conférence de Rome. Il faut également se rappeler la distinction artificielle entre le droit international codifié et le droit international coutumier pour définir les conflits armés internes. La délégation cubaine regrette qu'en dépit du principe de l'égalité devant la justice, certains en profitent plus que d'autres. Mme Milian a émis l'espoir que la résolution F, contenue dans l'Acte final de la Conférence diplomatique, sera mise en oeuvre dans son ensemble.

M. MARCELO VASQUEZ (Equateur) a indiqué que grâce à la Cour pénale internationale, le monde disposera d'un mécanisme juridique novateur qui favorisera la primauté du droit à l'échelle internationale. Tout en rappelant que le Statut adopté était un compromis, il a affirmé qu'il permettrait quand même de créer une véritable cour capable de remplir sa mission. Il a salué le rôle joué par les organisations non gouvernementales lors du processus de négociations. Le représentant s'est félicité que l'Equateur ait signé le Statut; il s'est engagé au nom de sa délégation, à participer activement aux travaux de la Commission préparatoire. Il a demandé que les travaux restant à accomplir puissent commencer le plus rapidement possible.

M. FODE DABOR (Sierra Leone) a déclaré que pour son pays, qui a subi pendant sept ans une guerre de rébellion, causant la mort de nombreux innocents, notamment des femmes et des enfants, la création de la Cour pénale internationale est indispensable. L'adoption du Statut de la Cour constitue un pas historique. Il adresse un message clair aux responsables de crimes odieux qui ne resteront pas impunis et ne pourront plus se cacher. La Sierra Leone a signé l'Acte final à Rome et signera tout prochainement le Statut à New York.

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Il est nécessaire maintenant de procéder à la mise en place de la Commission préparatoire dès que possible, car il reste encore beaucoup à faire. Il ne faudrait pas perdre l'élan de Rome. Pour garantir le caractère universel de la Cour, il est indispensable que tous les pays, et en particulier les plus puissants, lui apportent leur soutien.

Mme BEATRICE EUGENE (Haïti) a soutenu la déclaration faite par le représentant de Trinité-et-Tobago. La représentante s'est félicitée de la création de la Cour pénale internationale, mais le Statut comporte des lacunes, a-t-elle précisé. C'est pourquoi Haïti invite la Commission à commencer ses travaux dans les plus brefs délais. A cet égard, la déléguée a souhaité que les crimes liés au terrorisme soient ajoutés à la compétence de la Cour et que la notion de crime d'agression soit précisée.

Droits de réponse

Le représentant de la République démocratique du Congo a dénoncé les propos du représentant de l'Ouganda selon lesquels les troupes ougandaises occupent une partie du territoire congolais en vertu d'un accord passé entre les deux Etats. Aucun accord ne permet aux troupes ougandaises de se trouver là où elles sont actuellement, a-t-il affirmé.

Le représentant de Chypre a rappelé que son pays est la seule entité juridique reconnue par la communauté internationale pour exercer son autorité sur la communauté chypriote.

La représentante de l'Ouganda a estimé que la Commission juridique n'est pas l'instance appropriée pour discuter du point soulevé par la délégation de la République démocratique du Congo.

La représentante de la Turquie a fait remarquer que Chypre a présenté de fausses allégations en ce qui concerne la situation à Chypre.

Reprenant la parole, le représentant de Chypre a rappelé que les résolutions 541 et 550 du Conseil de sécurité exigent le retrait des troupes turques de Chypre. Il a lancé un appel à tous les membres des Nations Unies de ne pas coopérer avec la communauté sécessionniste car cela est en contradiction avec l'Accord de partition de 1960.

Informations de base

La Conférence diplomatique de Rome sur la création d'une cour pénale internationale a adopté au terme de plusieurs semaines de délibérations - du 15 juin au 17 juillet - le Statut de la cour, qui entrera en vigueur 60 jours après la 60ème ratification. Le Statut stipule en son préambule que les Etats parties ont fondé leur action sur le fait qu'au cours de ce siècle, des

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millions d'enfants, de femmes et d'hommes ont été victimes d'atrocités qui dépassent l'imagination et qui heurtent profondément la conscience humaine. Et qui plus est, toujours selon le préambule de la future Cour, de tels crimes menacent la paix, la sécurité et le bien-être du monde. Ce faisant, les Etats parties ont jugé que leur action s'inscrit dans leur détermination à mettre un terme à l'impunité des auteurs de ces crimes et à contribuer ainsi à la préventions de nouveaux crimes. Deux Membres permanents du Conseil de sécurité - les Etats-Unis et la Chine - ont voté contre l'adoption du Statut à l'issue d'un vote demandé par les Etats-Unis dont le résultat est 120 voix pour, 7 voix contre - Outre les Etats-Unis et la Chine, Israël, l'Iraq, La Libye, le Qatar et l'Inde se sont opposés au Statut - et 20 abstentions.

La Cour aura son siège à La Haye et exercera sa compétence pour le crime de génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le crime d'agression. Un Etat partie accepte la compétence de la Cour pour tous ces crimes et un Etat non partie peut en faire de même en déposant une déclaration auprès du greffier. Le Statut accorde le droit au Procureur d'ouvrir une enquête de sa propre initiative sur la base de renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour.

La Conférence, à la suite de longues négociations, a abouti à la formule suivante concernant la relation entre la Cour, son Président et le Conseil de sécurité : le Statut de Rome prévoit que le Conseil de sécurité pourra empêcher ou suspendre pendant douze mois une enquête ou une poursuite. Il stipule que les Etats parties sont tenus de coopérer pleinement avec la Cour dans les enquêtes et poursuites qu'elles mènent pour les crimes relevant de sa compétence et en vertu d'un arrangement ad hoc ou d'un accord, la Cour peut demander à un Etat non partie de coopérer avec elle. La Cour sera composée de la présidence, de la Section des appels, de la Section de première instance et de la Section préliminaire, du Bureau du Procureur et du Greffe. Les 18 juges de la Cour sont élus par l'Assemblée des Etats parties conformément à la nécessité d'assurer la représentation des principaux systèmes juridiques du monde, une répartition géographique équitable et l'équilibre entre hommes et femmes. Le financement de la Cour est assuré par des contributions des Etats parties, des ressources financières fournies par l'ONU et des contributions volontaires.

La Conférence, aux termes de son Acte final, a stipulé que le Statut de la Cour sera soumis à ratification, acceptation ou approbation, et ouvert à la signature le 17 juillet 1998 et le restera jusqu'au 17 octobre 1998 au Ministère italien des affaires étrangères, puis jusqu'au 31 décembre 2000 au Siège de l'Organisation des Nations Unies à New York. Après le 17 octobre, le Statut sera déposé auprès du Secrétaire général de l'ONU. A ce jour - 22 octobre 1998 -, 58 pays ont signé le Statut et de nombreux autres ont annoncé leur intention de leur faire prochainement.

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