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AG/J/251

LE ROLE PREVENTIF ET REPRESSIF DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE CONTRIBUERA A METTRE FIN A L'IMPUNITE DES AUTEURS DE CRIMES LES PLUS GRAVES

22 octobre 1998


Communiqué de Presse
AG/J/251


LE ROLE PREVENTIF ET REPRESSIF DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE CONTRIBUERA A METTRE FIN A L'IMPUNITE DES AUTEURS DE CRIMES LES PLUS GRAVES

19981022 La Sixième Commission (Commission juridique) a poursuivi, ce matin, l'examen de la question de la création d'une Cour pénale internationale. Elle a entendu, dans ce cadre, le Ministre des affaires étrangères du Pakistan, ainsi que les représentants des pays suivants : Slovénie, Fédération de Russie, Saint-Marin, Hongrie, Inde, ex-République yougoslave de Macédoine, Arménie, Lesotho, Suède, Canada, Venezuela, République tchèque, Lituanie, Pakistan, Israël, Australie, Chypre, Portugal, Iran, Liechtenstein, République démocratique du Congo et Irlande. L'Observateur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a pris la parole.

Les délégations se sont félicitées de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale, soulignant qu'elle constituerait un instrument essentiel pour la promotion de la paix et de la sécurité internationales. Elles se sont également félicitées du rôle à la fois préventif et répressif qu'elle pourrait jouer, et de sa capacité à mettre fin à la culture d'impunité qui entourait jusque-là la Commission des crimes les plus graves. S'agissant du contenu du Statut, de nombreuses délégations ont regretté qu'un accord concernant la définition du crime d'agression, et dans une moindre mesure du crime de trafic de drogue n'ait pu intervenir. Elles ont exprimé le voeu que la Commission préparatoire puisse aboutir sur ces points. La délégation indienne a, quant à elle, réitéré son refus d'adhérer au Statut de la Cour en arguant principalement du fait que celui-ci était contraire au principe de souveraineté des Etats en matière judiciaire.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux, cet après-midi à partir de 15 heures.

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CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

Déclarations

M. DANILO TURK (Slovénie) a rappelé que son pays a appuyé le processus tout entier qui a permis l'adoption du Statut de la cour pénale internationale à Rome. Toutefois, la Slovénie attendait davantage, notamment en ce qui concerne deux questions. En effet, selon M. Türk, l'Article 12 du Statut restreint la capacité de la Cour d'exercer sa compétence étant donné que l'on ne peut s'attendre de manière réaliste à ce que ni l'Etat du territoire ni l'Etat de la nationalité de l'accusé ne figurent dans le Statut. D'autre part, la Slovénie regrette également qu'il n'ait pas été possible d'inclure dans la liste établie par l'Article 8 du Statut, les attaques perpétrées dans les zones protégées des Nations Unies. Dans un esprit de compromis, la Slovénie a retiré sa proposition étant entendu que ces attaques sont largement couvertes par le crime relatif aux attaques intentionnelles dirigées contre la population civile. L'adoption du Statut a été possible grâce à la souplesse de nombreux Etats participant à la Conférence diplomatique d'accepter la proposition du Président du Comité plénier. La délégation slovène se félicite que désormais la Cour soit compétente sur les crimes commis à la fois sur le plan international et dans les conflits internes. Elle espère qu'il sera possible d'inclure à l'avenir le crime d'agression dans le Statut. M. Türk a estimé que la Commission préparatoire devra entamer ses travaux dès le début de l'année 1999.

M. L. SKOTNIKOV (Fédération de Russie) a déclaré que la Cour pénale internationale a été clairement instituée comme partie intégrante du système existant pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, avec le Conseil de sécurité qui joue un rôle vital. Le Conseil de sécurité peut à la fois initier les activités de la Cour et les suspendre, si cela est dicté par la nécessité de mettre en oeuvre les décisions du Conseil de sécurité. Les relations entre le Conseil de sécurité et la Cour ne sont pas fondées sur la subordination, mais plutôt sur la coopération dans les meilleurs intérêts de la communauté internationale. L'indépendance de la Cour ne sera pas affectée, alors que son efficacité, avec l'appui du Conseil de sécurité, s'améliorera. En outre, la Cour n'est pas créée pour se substituer aux juridictions nationales, mais plutôt pour les compléter dans les cas où elles deviennent inefficaces ou cessent d'exister. Le principe de complémentarité est fondamental. Le Statut établit des garanties contre toute tentative visant à manipuler la Cour à des fins politiques. La Cour sera financée soit par les Etats Parties, soit par le budget ordinaire des Nations Unies, mais seulement lorsque le Conseil de sécurité soumet une affaire à la Cour. Ce mode de financement constitue une garantie de l'indépendance de la Cour. La Fédération de Russie a souligné la nécessité d'assurer l'universalité de la future cour.

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M. TADDEI (Saint-Marin) s'est félicité de la création d'une Cour pénale internationale. Jusqu'à présent, a-t-il fait remarquer, les tribunaux internationaux n'ont été institués qu'une fois les crimes commis, et par conséquent, ils n'ont pu jouer aucun rôle préventif. Le Statut adopté à Rome constitue la première étape dans la création d'une Cour capable de lutter de façon continue et efficace contre l'impunité qui a trop longtemps entouré les crimes les plus horribles, a ajouté le représentant.

Il a salué la mise en place d'une Commission préparatoire qui devrait permettre de définir toutes les mesures nécessaires à l'entrée en vigueur de la Cour. Le représentant a émis l'espoir que la Commission parviendra à préciser la notion de crime d'agression et à adopter les règles de procédure nécessaires.

Il a assuré que les juristes de Saint-Marin préparaient à l'heure actuelle les conditions nécessaires à la ratification du Statut, et a appelé tous les Etats à signer et ratifier le nouvel instrument. Le représentant a finalement souhaité que la Commission préparatoire permette aux Etats de s'accorder sur la définition juridique de crimes graves tels que les actes terroristes et le trafic illicite de drogues.

M. JANOS GOROG (Hongrie) a rappelé que son pays coopère constamment avec les Tribunaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, et qu'il est persuadé que la Cour pénale internationale jouera un rôle plus important encore. En effet, la Cour pourra garantir un traitement égal pour toutes les violations, quels que soient le lieu et la date de leur perpétration; elle pourra aussi agir rapidement et bénéficier de l'expertise d'un personnel hautement qualifié. La Cour aura une compétence inhérente sur les crimes du noyau dur, à savoir le génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre - qu'ils soient commis en temps de paix ou en temps de guerre. Le Gouvernement hongrois souhaite que les 60 ratifications requises pour l'entrée en vigueur du Statut de la Cour soient obtenues dès que possible. Pour sa part, il procèdera prochainement à la signature puis à la ratification de cet instrument. La Hongrie souhaite que la Commission préparatoire s'acquitte rapidement de son mandat.

M. PREM SINGH CHANDUMAJRA (Inde) a déclaré que sa délégation avait participé de façon active aux travaux visant à la création d'une Cour pénale internationale capable de lutter contre les crimes les plus graves. Il a fait part de sa déception relative au contenu du Statut adopté à Rome. Ce Statut, a-t-il regretté, n'a pas pris en compte les attentes de la délégation indienne sur de nombreux points. Le crime de terrorisme n'est pas entré dans le champ de compétence de la Cour, et celle-ci n'est pas fondée sur un Statut suffisamment flexible, a précisé le représentant. Il a ajouté que le Statut élaboré lors de la Conférence diplomatique avait fait fi à différents niveaux du sacro-saint principe du consentement des Etats, et notamment du principe de la primauté des cours nationales sur les cours criminelles internationales. Le représentant a surtout déploré que la future Cour soit placée sous la dépendance des cinq membres permanents du Conseil de sécurité.

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Abordant la question de la Commission préparatoire, le représentant a exhorté les participants à définir le crime de terrorisme international et à l'inclure dans le Statut de la Cour.

M. NASTE CALOVSKI (Ex-République yougoslave de Macédoine) a rappelé que son pays a constamment appuyé l'idée de créer une cour pénale internationale permanente. Il a souligné le rôle fondamental des organisations non gouvernementales dans le processus des négociations qui a permis l'adoption du Statut de la Cour à Rome, en juillet dernier. Sa délégation, tout en faisant observer que le Statut ne peut être parfait, se félicite qu'il étend la compétence de la Cour aux situations de personnes déplacées. La Cour fonctionnera en tant qu'instance indépendante mais avec la pleine coopération des Nations Unies, ce qui est essentiel. Il a émis l'espoir que l'acceptation de la compétence de la Cour sera universelle.

Mme CHRISTINE SIMONE (Arménie) s'est félicitée de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale lors de la Conférence diplomatique de Rome. Le contenu du Statut reflète un certain nombre de compromis a déclaré la représentante. Nous pensons qu'il est problématique d'avoir inclus dans la compétence de la Cour le crime d'agression sans que celui-ci ait été défini de façon précise. A l'inverse, et bien que soutenant la compétence de la Cour pour juger des crimes terroristes, nous nous félicitons que la définition de ce crime fasse l'objet d'un examen par une conférence de révision avant d'entrer dans la juridiction de la Cour, a déclaré la représentante. Elle a fait part de sa satisfaction en ce qui concerne les pouvoirs attribués au procureur de la Cour en matière de déclenchement des poursuites. De façon générale, la représentante s'est félicitée du caractère viable du Statut en dépit de ses compromis. Elle s'est réjouie que l'entrée en vigueur de la Cour permette au monde entier de bénéficier d'un instrument permettant de poursuivre et de punir les coupables de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. Elle a insisté sur le chemin restant à effectuer avant que cela ne devienne réalité. Elle a ainsi mis l'accent sur la nécessité de préciser les règles de procédure et de compétence de la Cour, les règles de preuve, la définition de certains crimes et la fixation de la nature des liens unissant la Cour aux Nations Unies.

M. PHAKISO MOCHOCHOKO (Lesotho) a souligné que le succès sans précédent de la Conférence diplomatique de Rome ne doit pas être sous-estimé et qu'il faudrait d'ailleurs s'engager à prendre les mesures nécessaires pour permettre à la Cour de fonctionner rapidement. Il ne faudrait épargner aucun effort pour parvenir rapidement aux 60 ratifications nécessaires à son entrée en fonctions. Le représentant a souligné la nécessité pour la Commission préparatoire, créée par la Conférence diplomatique de Rome, d'entamer ses travaux le plus rapidement possible pour régler les questions en suspens. De plus, il est indispensable que la Commission soit dotée des ressources et des services nécessaires pour lui permettre de s'acquitter de manière efficace de son mandat. Si l'on souhaite garantir l'universalité de la Cour, il est essentiel que toutes les voix continuent d'être entendues.

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Le Fonds d'affectation spéciale, créé au cours du processus de négociation, a permis la participation des pays les moins avancés aux travaux préparatoires et à la Conférence diplomatique. Le Lesotho souhaite la participation des organisations non gouvernementales aux travaux de la Commission préparatoire.

M. PER NORSTROM (Suède) a déclaré que son pays se félicite de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale et considère que les résultats de la Conférence diplomatique de Rome représentent une étape majeure dans l'oeuvre de codification et de développement du droit international. Le Statut est un compromis, et la définition même du compromis est de ne jamais satisfaire totalement les différentes parties, a noté le représentant. Bien qu'elle ait indiqué à la fois sa satisfaction et sa déception, tout en soulignant qu'il n'était pas question à ce stade de rouvrir des négociations, la Suède a finalement appuyé le Statut dans son intégralité. Elle se rend compte qu'en dépit des circonstances dans lesquelles il a été élaboré, il était impossible de parvenir à un meilleur compromis. Ce Statut, a-t-il ajouté, permettra de fonder une institution viable, efficace et capable de jouer un rôle de prévention. Le représentant a invité tous les Etats à prendre conscience du chemin parcouru tout en les invitant à agir dès à présent sur deux fronts. D'abord, assurer l'entrée en vigueur du Statut le plus rapidement possible et ensuite élaborer des règles de procédure et établir le régime de la preuve devant la Cour.

M. PHILIPPE KIRSCH (Canada) a déclaré que la Cour pénale internationale aura un effet dissuasif et un impact profond sur la vie de personnes ordinaires. Un message clair a été lancé aux responsables des atrocités indescriptibles soulignant que le monde ne restera pas muet et passif devant les violations flagrantes du droit international, telles que le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité. La Cour mettra à la disposition de la communauté internationale un moyen efficace pour faire face aux atrocités commises dans les conflits internationaux ou les conflits armés internes. En tant qu'institution permanente, la Cour ne se heurtera pas aux obstacles auxquels sont confrontés les Tribunaux spéciaux pour l'ex- Yougoslavie et pour le Rwanda. Le Canada appuie fermement le cadre juridique adopté à Rome qui permettra à la Cour de s'acquitter de son mandat indispensable. Le défi lancé à Rome visait à créer un Statut équilibré et crédible, largement accepté par la communauté internationale. Le Statut est un excellent exemple de ce que la communauté internationale peut accomplir lorsque la volonté politique existe et que les délégations oeuvrent en étroite coopération pour trouver des solutions à de nombreuses questions difficiles inhérentes à ce type d'exercice. Il était nécessaire d'adopter une approche fondée sur l'Etat du territoire ou sur l'Etat de la nationalité de l'accusé pour déterminer la compétence de la Cour. La codification du principe de la complémentarité constitue une des forces fondamentales du Statut. A cet égard, M. Kirsch a émis l'espoir que la Cour pénale internationale n'exercera jamais sa compétence. Il serait souhaitable que les Etats s'acquittent eux- mêmes des obligations existantes et punissent les responsables de crimes odieux. La Cour ne devrait intervenir qu'en cas de défaillance ou d'inexistence de juridictions nationales compétentes.

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Le Canada engage actuellement les procédures nécessaires à la signature du Statut et rappelle que l'objectif ultime de la communauté internationale est l'entrée en vigueur du Statut et, en fait, son adhésion universelle. La Commission préparatoire jouera un rôle crucial pour réaliser cet objectif.

Mme BETANCOURT (Venezuela) a affirmé que le Statut adopté à Rome permettra de se doter d'une Cour autonome, efficace et complémentaire. Il faut maintenant adopter toutes les mesures nécessaires pour que la Cour puisse commencer à fonctionner dans les délais les plus brefs. Cela suppose que soient définis les éléments de preuves et de procédures, les aspects relatifs au financement de la Cour, ainsi que la gravité des crimes, a-t-elle ajouté. Le soutien de la communauté internationale étant essentiel il faudrait parvenir à une ratification universelle du Statut. Mme Bétancourt a assuré que la délégation du Venezuela prendra une part active aux travaux de la commission préparatoire.

M. VLADIMIR GALUSKA (République tchèque) a estimé qu'en principe, le Statut de la Cour pénale internationale, adopté à Rome, constitue un instrument équilibré et une base solide pour le fonctionnement d'une cour forte, indépendante et efficace. Le Statut ne définissant pas le crime d'agression, la Cour ne serait donc pas habilitée à exercer sa compétence en la matière. Le représentant tchèque pense que le Statut aurait dû prévoir cette définition. En droit international, la participation à la préparation d'un crime d'agression constitue le crime le plus grave qu'un individu puisse commettre. Ce crime est souvent à l'origine de bains de sang et son exclusion du Statut jetterait des doutes sur les principes du droit international coutumier. La République tchèque estime qu'il est nécessaire d'analyser l'impact potentiel du Statut sur la législation nationale avant de le signer.

M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a apporté son soutien à la déclaration faite par le représentant de l'Autriche au nom de l'Union européenne. La création d'une Cour pénale internationale, a-t-il souligné, est une étape importante qui devrait mettre fin à la culture d'impunité dont bénéficiaient jusque-là les auteurs des crimes parmi les plus graves; en effet, la Cour donne les moyens à la communauté internationale de poursuivre et de châtier les coupables. Nous disposons à présent d'un instrument judiciaire qui faisait jusque-là défaut dans les relations internationales. Le représentant a exprimé sa satisfaction de voir le crime d'agression entrer dans le champ de compétence de la Cour, mais il a regretté les imprécisions relatives à sa définition. Il s'est dit convaincu que les différences entre les Etats pourraient être surmontées lors des travaux de la Commission préparatoire. Le représentant a finalement indiqué que son pays signerait le Statut avant la fin de l'année, tout en exhortant les Etats n'ayant pas encore adhéré au Statut à le signer le plus rapidement possible.

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M. MOHAMMAD SIDDIQUE KHAN KANJU, Ministre des affaires étrangères du Pakistan, a estimé que la Cour pénale internationale devrait jouer un rôle capital pour mettre fin aux atrocités au profit des générations futures. Elle devrait garantir que les responsables de crimes odieux ne soient pas impunis. Le Pakistan a appuyé pleinement la création d'une cour efficace et forte pour juger ces crimes. Toutefois, il incombe en premier lieu à chaque Etat de s'assurer que les responsables de crimes odieux commis sur son territoire soient traduits en justice. Dans les cas où les juridictions nationales ne peuvent le faire ou n'existent pas, il appartient alors à la Cour d'exercer sa compétence sur ces crimes. Le Pakistan s'oppose à un rôle quelconque qui serait attribué au Conseil de sécurité en relation avec la Cour. M. Khan Kanju a émis des doutes sur le bien-fondé d'une influence que le Conseil de sécurité pourrait exercer sur la Cour, le Conseil étant fondamentalement un organe politique dont les décisions sont prises sur la base de considérations politiques et non pas juridiques. Une telle éventualité ne serait pas propice à l'élaboration d'un système juridique uniforme non discriminatoire et non sélectif. En outre, elle constituerait une négation du principe de souveraineté et du principe de l'intégrité des Etats à partir du moment où le système juridique d'un Etat est remis en question sous prétexte qu'un procès en cours devant sa juridiction nationale vise à protéger un criminel. En conséquence, les dispositions du Statut qui tendent à défier le processus juridique national, sont incompatibles avec le principe de complémentarité. Le Ministre a souligné la nécessité d'établir des règles claires et sans ambiguïté sur le fonctionnement de la Cour pour rassurer les Etats sur certaines questions importantes et les encourager ainsi à devenir parties au Statut.

M. ALAN BAKER (Israël) a rappelé que son pays avait activement participé, dès les années 50, aux délibérations des Nations Unies sur la création d'une cour pénale internationale. Israël appuie l'idée de créer une institution judiciaire internationale permanente qui reflètera équitablement et véritablement les principes et procédures établies de droit pénal, en vue de garantir que les responsables de crimes odieux et des crimes les plus graves qui préoccupent la communauté internationale soient traduits en justice. Tout au long du processus de négociation, Israël a constamment exprimé son inquiétude sur de nombreuses dispositions du projet de Statut qu'il a considérées comme portant fortement atteinte à la nature impartiale de la future cour. De l'avis de la délégation israélienne, certains crimes de guerre énumérés dans le Statut, comme les violations graves des lois et les coutumes applicables dans les conflits armés internationaux, ont été formulés de manière sélective. Dans certains cas, ils ne comportent pas les éléments substantiels qui figurent dans les instruments de droit humanitaire international auxquels ils font référence et, dans d'autres cas, de nouveaux éléments ont été ajoutés. Le Statut doit strictement servir à l'objectif pour lequel la Cour est créée. Aussi longtemps qu'Israël continuera d'être exclu des organes régionaux des Nations Unies, la manière dont se fait la sélection des juges de la Cour ne laisse qu'un faible espoir aux candidats israéliens d'être élus, en dépit de leurs compétences professionnelles.

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M. PENNY WENSLEY (Australie) a apporté son soutien aux déclarations faites hier par différents Etats du Pacifique Sud. La création d'une Cour pénale internationale, qui semblait irréalisable il y a de ça une dizaine d'années, peut devenir aujourd'hui une réalité avec l'adoption du Statut de Rome. Un tel instrument permettra aussi de poursuivre ceux qui se sont rendus coupables des crimes les plus horribles. La Cour devrait contribuer à empêcher que de tels crimes soient commis à l'avenir, a déclaré le représentant. Il a ajouté qu'il était temps de définir un programme de travail pour la Commission préparatoire afin de favoriser le fonctionnement de la Cour dans les plus brefs délais. Le représentant a fait valoir que le Statut était un document mesuré et qu'il traçait les lignes directrices pour l'établissement d'une cour indépendante, juste et équilibrée.

M. SOTIRIOS ZACKHEOS (Chypre) s'est associé à la déclaration faite par le représentant de l'Autriche au nom de l'Union européenne. Il s'est félicité de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale à Rome, événement qu'il a qualifié d'historique. Il s'est dit convaincu qu'un tel instrument permettrait de lutter efficacement contre les auteurs de crimes atroces qui ont trop longtemps bénéficié de l'impunité. Le représentant a affirmé qu'il soutenait la création d'une Cour indépendante, efficace et capable de mener à bien sa mission. En dépit des efforts pour inclure juste après l'entrée en vigueur du Statut le crime d'agression dans la compétence de la Cour, le représentant a regretté qu'une telle réalisation n'ait pas pu avoir lieu alors que de nombreux Etats le souhaitaient, et dans la mesure où le crime d'agression est une source importante de violations des droits de l'homme. Toutefois, il a émis l'espoir que la Commission préparatoire parviendra à établir une définition convenable de ce crime.

M. TIAGO P. CUNHA (Portugal) a estimé que s'il manquait un maillon dans les instruments juridiques des relations internationales, la Cour permettra désormais de pallier cette lacune. Aujourd'hui, tous les éléments indispensables au maintien de la paix sont réunis a souligné le représentant. Cette réalisation constitue un legs aux générations futures, qui disposeront ainsi des moyens de punir les crimes les plus odieux. Le Statut adopté invite à se tourner aujourd'hui vers l'avenir et nous devons prendre les dispositions voulues pour lui permettre d'entrer en vigueur. Cela suppose la rédaction d'un règlement intérieur, de règles de preuve. La Commission préparatoire devrait donc être convoquée le plus rapidement possible et disposer des moyens nécessaires à son bon fonctionnement. Nous souhaiterions, a affirmé le représentant de la délégation portugaise, que les organisations non gouvernementales puissent participer aux travaux de la Commission. Le Portugal continuera à oeuvrer en faveur de l'entrée en fonction de la Cour. Nous appelons tous les Etats à ratifier le nouvel instrument afin que la cour ait réellement une portée universelle.

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M. SAEID MIRZAEI YENGEJEH (Iran) a fait remarquer que le Statut de la Cour pénale internationale est loin d'être parfait. Bien que des efforts considérables aient été déployés, dans le cadre de la Conférence, pour refléter les vues exprimées par les gouvernements, certaines dispositions ne satisfont pas l'ensemble des Etats. Le délégué a réaffirmé que le Statut est un document complexe incluant de nombreuses questions qui relèvent de la compétence des Etats souverains. La Commission préparatoire, qui a un mandat multidisciplinaire, est chargée d'élaborer un certain nombre d'instruments indispensables pour l'entrée en fonctions de la Cour. Elle devrait également élaborer le règlement de procédure et de preuve et définir les éléments constitutifs des crimes avant le 30 juin 2000. En outre, elle devrait formuler des propositions sur la définition du crime d'agression en vue de l'inclure dans le Statut. Il est important que la Commission préparatoire entame ses travaux le plus rapidement possible avec la participation des Etats qui ont signé l'Acte final et ceux qui ont été invités à participer à la Conférence diplomatique.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a noté avec satisfaction que le Statut prévoit un mécanisme uniforme pour tous les Etats et que le procureur peut engager des enquêtes ou des poursuites de sa propre initiative. Le Statut n'est pas parfait, mais il constitue toutefois une base solide pour la future cour. Sa délégation estime qu'il reste encore beaucoup à faire pour permettre à la Cour de fonctionner de manière efficace. La Commission préparatoire devrait être dotée des ressources et du temps nécessaires pour qu'elle puisse s'acquitter de son mandat. Il faudra beaucoup d'efforts concertés pour assurer l'entrée en vigueur du Statut et, peut-être, son universalité.

M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a évoqué les événements passés et récents survenus dans son pays et s'est félicité que la Conférence diplomatique ait décidé, dans sa résolution F, la création d'une Commission préparatoire chargée de définir le crime d'agression et ses éléments constitutifs. Le représentant a regretté le silence assourdissant de la communauté internationale face aux graves violations des droits de l'homme qui ont lieu actuellement dans son pays, pour indiquer à quel point il était attaché à la création de cette Cour, qui, si elle existait, pourrait jouer pleinement son rôle à la fois de dissuasion et de répression. Le représentant a rappelé l'attachement de sa délégation à la création d'une Cour effective, indépendante, impartiale, universelle et permanente, et s'est déclaré satisfait des résultats obtenus à Rome sur ces différents points. Toutefois, il a regretté l'absence d'un accord sur les définitions des crimes de terrorisme et de trafic de drogue et à appelé de ses voeux la tenue d'une conférence de révision pour remédier à ces lacunes.

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M. JAMES FARRELL (Irlande) a souligné que l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale constitue une pierre angulaire sur la voie de la création de la cour. Il faut maintenant poursuivre les efforts en vue de la mettre en place le plus rapidement possible. L'Irlande, a ajouté M. Farrell, s'est engagée à participer activement aux travaux de la Commission préparatoire créée par la Conférence diplomatique pour élaborer les instruments nécessaires au fonctionnement de la Cour. Il faut agir sans hésitation pour maintenir cet élan, a-t-il souligné.

M. RENE KOSIRNIK, Observateur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), considère que la création de la Cour pénale internationale donne, enfin, au droit international humanitaire, un instrument pour compléter le système actuel de répression. Le CICR se déclare dans l'ensemble satisfait du Statut adopté à Rome. Même si toutes les violations graves du droit international humanitaire n'ont pas été incluses dans la définition des crimes de guerre, un grand nombre y figurent. Il faut se féliciter tout particulièrement de ce que la Cour puisse juger des crimes commis lors des conflits armés non internationaux, facteur clé dans la lutte contre l'impunité. Le Statut de la Cour a permis également de mieux identifier certains actes qui constituent des crimes de guerre et qui, reconnus pour leur gravité, relèvent de la compétence. Il s'agit notamment du viol, de l'esclavage sexuel et de la grossesse et stérilisation forcées. M. Kosirnik a émis l'espoir que lors d'une conférence de révision, il sera possible d'ajouter à la liste des crimes de guerre des actes tels que l'utilisation des armes de destruction massive, les mines antipersonnel et les armes aveuglantes. Le CICR s'engage à contribuer largement aux travaux de la Commission préparatoire.

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