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AG/J/250

LA PLUPART DES DELEGATIONS SOUHAITENT QUE LA COUR PENALE INTERNATIONALE AIT UN CARACTERE UNIVERSEL

21 octobre 1998


Communiqué de Presse
AG/J/250


LA PLUPART DES DELEGATIONS SOUHAITENT QUE LA COUR PENALE INTERNATIONALE AIT UN CARACTERE UNIVERSEL

19981021 Réunie sous la présidence de M. Jargalsaikhany Enkhsaikhan (Mongolie), la Sixième Commission (Commission juridique) a poursuivi, cet après-midi, l'examen de la question de la création d'une Cour pénale internationale. Dans ce cadre, elle a entendu les représentants des pays suivants : Sénégal, Kenya, Japon, Nouvelle-Zélande, Grèce, Norvège, Croatie et République de Corée.

Les délégations ont noté qu'en dépit des concessions demandées par divers Etats, il a été possible de définir un Statut qui favorisera l'institution d'une Cour pénale internationale capable de participer à l'édification d'un nouvel ordre mondial, ce dont elle se sont toutes félicitées. Toutefois, certaines délégations ont regretté qu'un certain nombre de crimes tels que le crime d'agression, le recours aux armes nucléaires et aux mines terrestres antipersonnel, ne figurent pas dans la liste des infractions entrant dans la juridiction de la Cour. Ces mêmes délégations ont émis l'espoir que les négociations futures permettront des avancées sur ces différents sujets. Afin d'assurer le caractère universel de la Cour, les délégations ont appelé les Etats à signer le Statut, tout en invitant ceux qui s'y sont opposés à participer activement aux travaux de la Commission préparatoire.

La Sixième Commission était par ailleurs saisie, au titre de l'examen du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l'Organisation, d'un projet de résolution intitulé "Application des dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à l'assistance aux Etats tiers touchés par l'application des sanctions", présenté par l'Ukraine, au nom de la Bulgarie et de la Fédération de Russie. Elle était également saisie d'un projet de décision relatif au Rapport du Comité spécial.

La prochaine réunion de la Sixième Commission aura lieu, demain jeudi 22 octobre à partir de 10 heures.

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RAPPORT DU COMITE SPECIAL DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES ET DU RAFFERMISSEMENT DU ROLE DE L'ORGANISATION (POINT 154)

Projet de résolution sur l'Application des dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à l'assistance aux Etats tiers touchés par l'application de sanctions (A/C.6/53/L.3)

L'Assemblée générale inviterait à nouveau le Conseil de sécurité à envisager de mettre en place de nouveaux mécanismes ou procédures pour la tenue le plus tôt possible de consultations, conformément à l'Article 50 de la Charte des Nations Unies, avec les Etats tiers qui se trouvent ou risquent de se trouver en présence de difficultés économiques particulières dues à l'exécution de mesures préventives ou coercitives prises par le Conseil en vertu du Chapitre VII de la Charte.

D'autre part, l'Assemblée réaffirmerait l'importance du rôle que jouent l'Assemblée générale, le Conseil économique et social et le Comité du programme et de la coordination en mobilisant et en supervisant, le cas échéant, les efforts de la communauté internationale et des organismes des Nations Unies en vue d'apporter une aide économique aux Etats qui rencontrent les difficultés économiques particulières dues à l'exécution de mesures préventives ou coercitives prises par le Conseil de sécurité. De plus, par cette résolution l'Assemblée inviterait les organismes des Nations Unies, les institutions financières internationales, les autres organisations internationales, les organisations régionales et les Etats Membres à s'attaquer de façon plus spécifique et plus directe, selon qu'il conviendra, aux difficultés économiques particulières que rencontrent les Etats tiers qui subissent le contrecoup de l'application de sanctions imposées en vertu du Chapitre VII de la Charte.

Enfin l'Assemblée déciderait de créer un groupe de travail au sein de la Sixième Commission lors de sa cinquante-quatrième session pour examiner les nouveaux progrès enregistrés dans l'élaboration de mesures efficaces visant à appliquer les dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à l'assistance aux Etats tiers qui subissent le contrecoup de l'application de sanctions imposées en vertu du Chapitre VII de la Charte.

Projet de décision (A/C.6/53/L.2)

Par cette décision la Sixième Commission prie le Président de la Sixième Commission de transmettre sans retard ce document au Président de la Cinquième Commission en vue de son examen éventuel par cette dernière au titre du point susmentionné.

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CREATION D'UNE COUR PENALE INTERNATIONALE

Déclarations

M. SEM IBRA DEGUENE KA (Sénégal) a déclaré que l'adoption à Rome du Statut de la Cour pénale internationale constitue un événement hautement significatif pour l'édification d'un monde de paix et de justice. Le représentant a fait part de son plus profond soutien vis-à-vis du processus de création de la Cour. Il a assuré que son pays prendrait part de façon active aux travaux de la Commission préparatoire et indiqué que le Sénégal était prêt à procéder à la ratification du traité instituant la Cour pénale internationale. Beaucoup reste encore à faire pour parachever cette oeuvre gigantesque, a-t-il ajouté. Le Statut traduit un consensus, dont certains estiment qu'il va trop loin quand d'autres pensent le contraire. Il ne saurait en être autrement, l'oeuvre de codification et le développement du droit international n'échappent jamais à ce phénomène.

Le représentant du Sénégal a appelé tous les Etats à avancer pour finaliser les acquis de Rome. S'agissant du contenu du Statut, le représentant a affirmé qu'il n'était pas dans le but de sa délégation de rouvrir des négociations relativement à certaines clauses, mais que des corrections étaient nécessaires pour assurer la cohésion du texte.

M. THUITA MWANGI (Kenya) a estimé que la Commission préparatoire créée par la Conférence diplomatique de Rome devrait commencer ses travaux aussi rapidement que possible. Il serait souhaitable qu'elle tienne une session d'organisation en février-mars 1999. Le plus important est l'élaboration d'un calendrier définitif de ses réunions pour 1999. L'élaboration du règlement de procédure et de preuve, ainsi que la détermination des éléments constitutifs des crimes seront indéniablement des tâches très importantes. Il est crucial pour l'avenir de la Cour que le règlement de procédure et de preuve et les éléments constitutifs des crimes soient élaborés par la Commission préparatoire de manière à tenir compte des dimensions politiques et de la nature complexe des crimes relevant de la compétence de la cour. Pour garantir le succès des travaux de la Commission préparatoire, il est important que tous ses membres participent pleinement à ses délibérations. En outre, soulignant l'importance du rôle des organisations non gouvernementales au sein du Comité préparatoire et à la Conférence diplomatique, M. Mwangi a estimé que leur participation sera la bienvenue.

M. MATSUDA (Japon) a déclaré qu'il faut garder présent à l'esprit que les réalisations de la Conférence diplomatique de Rome, si importantes soient- elles, ne constituent pour autant qu'un premier pas. Le représentant a rappelé que l'ambition finale de la communauté internationale était d'établir une cour à la fois crédible et efficace dans ses missions, une cour qui soit à même de jouer un rôle substantiel dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.

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La majeure partie de ce travail sera effectuée par la Commission préparatoire, a fait remarquer le représentant. La Commission devra définir des éléments de procédure et préciser les qualifications de certains crimes. Il a souligné que ces instruments restant à préciser, sont d'une importance égale à celle du Statut. Le représentant de la délégation japonaise a exhorté l'ensemble des délégations qui seront présentes à la commission à faire preuve d'un engagement politique réel. Pour assurer le caractère universel de la Cour, le représentant a indiqué qu'il était important de garantir l'accès à la Commission des Etats n'ayant pas adopté le Statut de Rome.

M. MICHAEL POWLES (Nouvelle-Zélande) s'est félicité que la Cour pénale internationale puisse être compétente pour connaître du génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre, et qu'il existe une volonté pour délibérer davantage de la question de l'agression. Sa délégation se déclare redevable à l'égard du Comité international de la Croix-Rouge pour l'expertise qu'il a apportée aux négociations, en particulier en matière de crimes de guerre. La Nouvelle-Zélande aurait souhaité que le recours aux armes nucléaires figurât dans le Statut parmi les crimes de guerre. M. Fowles a émis l'espoir qu'à l'avenir, le recours aux armes nucléaires et aux mines terrestres anti-personnel relèveront de la compétence de la Cour. Sa délégation reconnaît que certains compromis avaient été faits et à cet égard, espère qu'ils permettront à l'avenir la reconnaissance universelle de la compétence de la Cour. Pour garantir l'efficacité de la Cour, le procureur doit être doté de pouvoirs appropriés. A cet égard, M. Powles s'est déclaré convaincu que les garanties prévues par le Statut empêcheront tout excès de pouvoir. Il est essentiel que la Commission préparatoire dispose des ressources nécessaires pour s'acquitter de son mandat. M. Powles a indiqué que son pays a signé le Statut à Rome, le 7 octobre dernier.

M. PHANI DASCALOPOULOU-LIVADA (Grèce) a déclaré que son pays avait été parmi les premiers à signer le Statut de la Cour pénale internationale à Rome. Il a souligné la double fonction que devra remplir la Cour une fois sa mise en place effectuée. Premièrement, assurer la poursuite et la punition des auteurs des crimes les plus haineux qui soient. Deuxièmement, empêcher que de tels crimes continuent d'être perpétrés. Le représentant a affirmé qu'il partageait la position exprimée par l'Autriche au nom de l'Union européenne sur le développement du droit international et sur la situation politique internationale. Abordant la question du contenu du Statut, le représentant a affirmé qu'il présentait de nombreux avantages. Son caractère exhaustif ne laissera que peu de place au doute, a-t-il fait remarquer, tout en soulignant qu'il s'agissait là d'un progrès de taille par rapport aux statuts des tribunaux institués en Yougoslavie et au Rwanda. Il a salué le caractère clair et détaillé de la définition des crimes entrant dans la juridiction de la Cour. De façon plus générale, le représentant s'est félicité de l'applicabilité du Statut et de sa capacité à apporter des réponses concrètes.

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Toutefois, il a fait remarquer qu'on ne pouvait pas passer sous silence le fait que certains crimes, tels que le crime d'agression par exemple, n'étaient pas envisagé par le Statut. Le représentant a vivement regretté cette omission due selon lui à un manque de concertation et d'efforts suffisants de la part des Etats. Rappelant que la définition du crime d était à présent à l'ordre du jour de la Commission préparatoire, il a émis l'espoir que des résultats positifs sur la question pourront intervenir.

M. OLE PETER KOLBY (Norvège) a estimé que les contributions importantes des systèmes juridiques et des patrimoines culturels de toutes les régions du monde au processus de négociations ont permis de jeter des bases solides pour cette institution véritablement universelle qu'est la Cour pénale internationale. La Norvège a constamment appuyé les mesures visant à empêcher la Cour de servir d'instrument à des fins politiques. De l'avis de sa délégation, le Statut de la cour pénale internationale assure une protection crédible contre toute poursuite biaisée ou arbitraire. Il prévoit également des garanties procédurales importantes, notamment la protection d'informations militaires sensibles. La Norvège émet l'espoir que les Etats qui n'ont pas pu appuyer l'adoption du Statut seront en mesure de réviser leur position. Il est important de reconnaître que, par le biais du principe de complémentarité avec les juridictions nationales, la Cour sera compétente dès lorsque les autorités nationales n'auront pas été en mesure d'entamer des enquêtes ou des poursuites. L'existence de la Cour devrait donc encourager les Etats à s'acquitter eux-mêmes de cette tâche. La Norvège a signé le Statut le 28 août 1998 et a engagé les procédures nécessaires à la ratification par son parlement.

M. IVAN SIMONOVIC (Croatie) a déclaré que l'adoption à Rome du Statut de la Cour pénale internationale constituait un pas important d'un point de vue à la fois juridique, politique et moral. Le représentant s'est félicité de la dimension universelle de la Cour pénale internationale qui permettra selon lui d'éviter le caractère sélectif de la justice rendue par les tribunaux ad hoc. Il a ensuite fait part de son assurance que la Cour contribuerait au maintien de la paix et de la sécurité internationales, et aiderait à la construction d'un nouvel ordre mondial. Il s'est dit convaincu que la Cour, une fois instituée, aurait une influence sur la façon dont les gouvernants construiront leur politique nationale et internationale. Le représentant a ensuite souligné que la Cour permettrait de mettre fin à la culture d'impunité dont bénéficiaient jusque-là les auteurs de crimes odieux, en les plaçant face à leurs responsabilités. Le représentant a rappelé que la Croatie avait pleinement participé à l'élaboration du Statut et que son pays était très attaché à une large compétence du procureur auprès de la Cour, en matière de déclenchement des poursuites. Il a en outre rappelé que son pays souhaitait que les responsables traduits devant la Cour puissent être autorisés à rechercher une indemnisation en cas de détention et d'arrestation arbitraires.

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M. CHANG-BEOM CHO (République de Corée) s'est déclaré fermement convaincu que l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale marquera un pas important dans la mise en place d'un système juridique international. Comme l'avait souligné le Secrétaire général à la cérémonie de signature à Rome en juillet dernier, la création de la Cour constitue un message d'espoir pour les générations futures et un pas de géant dans la voie du respect des droits de l'homme et du droit international. La Cour devrait contribuer à éliminer l'impunité dont peuvent jouir certains responsables de crimes internationaux odieux et, par là, à mieux protéger la personne humaine. Le succès de la Conférence diplomatique est remarquable pour ceux qui ont oeuvré de manière inlassable en faveur de l'adoption du Statut. La volonté concertée de la communauté internationale a permis à la Conférence diplomatique de surmonter de nombreux obstacles dans un délai relativement bref. Nous sommes tous conscients que le Statut ne constitue pas un instrument juridique parfait, a reconnu M. Chang-Beom, en faisant observer qu'il était inévitable de parvenir à un compromis pour éliminer les divergences de vues.

Toutefois, en dépit de ce compromis, la délégation coréenne estime que le Statut est un traité bien équilibré et tient compte des différents intérêts sans porter atteinte à l'équité, l'indépendance et l'efficacité. Tout en préservant les prérogatives que la Charte des Nations Unies confère au Conseil de sécurité, le procureur est habilité à engager des enquêtes et des poursuites de sa propre initiative, avec l'approbation de la chambre d'accusation. Le représentant a estimé nécessaire que la Commission préparatoire entame ses travaux au début de 1999 en vue de finaliser le règlement de procédure et de preuve et de définir les éléments constitutifs des crimes. Il a souhaité que le projet de résolution qui sera soumis à l'Assemblée générale pour adoption à la fin de cette année, indiquera clairement le mandat et le calendrier des travaux de la Commission préparatoire.

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