AG/J/227

LES DELEGATIONS SONT DIVISEES SUR LA NECESSITE D'ETABLIR UN REGIME SEPARE DES RESERVES AUX TRAITES MULTILATERAUX SUR LES DROITS DE L'HOMME

4 novembre 1997


Communiqué de Presse
AG/J/227


LES DELEGATIONS SONT DIVISEES SUR LA NECESSITE D'ETABLIR UN REGIME SEPARE DES RESERVES AUX TRAITES MULTILATERAUX SUR LES DROITS DE L'HOMME

19971104 De nombreux orateurs réaffirment qu'il appartient en principe aux Etats d'apprécier la licéité des réserves

Réunie sous la présidence de M. Peter Tomka (Tomka), la Commission juridique (Sixième Commission) a poursuivi, cet après-midi, l'examen du rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa quarante-neuvième session. Elle a entendu, dans ce cadre, les représentants des pays suivants : Autriche, Suède, Pays-Bas, Etats-Unis, Chine, Jamaïque, République-unie de Tanzanie, Venezuela, Canada, Allemagne, Iran, Bahreïn, Australie, Afrique du Sud, Maroc et Guatemala.

Les délégations ont mis l'accent sur la question des réserves aux traités multilatéraux. Certains intervenants ont relevé que, même si les clauses relatives aux réserves de la Convention de Vienne de 1969 sont le résultat d'un compromis de dernière minute, cela n'a pas empêché le système de fonctionner de manière satisfaisante. Selon certains orateurs, la procédure suivie pour la formulation des réserves et des objections ainsi que la méthode servant à déterminer la licéité des réserves soulève des difficultés considérables. D'autres ont relevé que l'examen de la licéité des réserves, en particulier celles présumées contraires à l'objet et au but du traité, aboutissait à une grande confusion. Nombreux ont été ceux qui ont évoqué le rôle des organes de contrôle en matière de réserves aux traités sur les droits de l'homme. Soulignant pour la plupart que ces organes n'ont pas de pouvoir de décision, les intervenants ont réaffirmé qu'il appartient aux seuls Etats de procéder à l'appréciation de la licéité des réserves, leur consentement étant le pivot du droit des traités.

La Sixième Commission reprendra ses travaux, demain mercredi 5 novembre à partir de 15 heures.

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M. FRANZ CEDE (Autriche) a fait remarquer que la question de la définition de la notion d'"objet et de but" d'un traité, qui est essentielle pour la détermination de la licéité d'une réserve, n'a pas encore été examinée. De même, la question des effets juridiques d'une réserve illicite n'a pas été abordée. Il s'agit là de deux questions essentielles. Tant qu'elles n'ont pas été examinées, la délégation autrichienne estime que les conclusions préliminaires n'auraient dû porter que sur la question de l'unité ou de la diversité du régime juridique pour les réserves aux traités. Concernant la question de l'unité ou de la diversité, M. Cede est d'avis que la souplesse du régime de Vienne répond aux exigences de tous les traités. En conséquence, il a réaffirmé que le régime juridique régissant les réserves devrait rester uniforme.

La délégation autrichienne fait sienne l'idée selon laquelle la force juridique des conclusions formulées par l'organe de contrôle conventionnel ne peut excéder les pouvoirs conférés à cet organe pour lui permettre de s'acquitter de son mandat. Le représentant a attiré l'attention sur une éventuelle contradiction entre la conclusion 5 et la conclusion 7. La conclusion 5 déclare que le pouvoir implicite des organes de contrôle, créés par les traités, est de faire des observations et de formuler des recommandations en ce qui concerne la licéité des réserves émises par les Etats. La conclusion 7 stipule que la Commission suggère que des clauses expresses soient prévues dans les traités multilatéraux normatifs et en particulier dans les traités relatifs aux droits de l'homme. Cette conclusion stipule aussi que des protocoles aux traités existants soient élaborés, si les Etats souhaitent conférer à l'organe de contrôle compétence pour apprécier ou établir la licéité d'une réserve.

M. PER SALAND (Suède) a pris la parole au nom des pays nordiques, pour exprimer son accord avec la Commission du droit international (CDI) qui ne reconnaît qu'un seul régime des réserves aux traités, le régime de Vienne. Ce régime est applicable à toutes les situations, y compris aux traités sur les droits de l'homme. Néanmoins, les pays nordiques sont conscients que ce régime présente des lacunes. La règle devrait être l'application du régime de Vienne, qui admet certaines exceptions par le truchement d'accords particuliers. Un problème épineux est celui du rôle des organes de contrôle établis en vertu de certains traités des Nations Unies sur les droits de l'homme. Le délégué a affirmé que des conclusions préliminaires de la CDI, il ressort que ces organes, en cas de silence du traité, sont compétents pour faire des commentaires et exprimer des recommandations sur la licéité des réserves. Les pays nordiques sont d'accord avec la CDI qui considère par ailleurs que cette dernière compétence n'exclut pas les pouvoirs traditionnels de contrôle des parties contractantes. L'extension de compétence à l'avenir de certains organes de contrôle devrait faire l'objet de travaux supplémentaires. Le délégué a souhaité que la CDI étudie plus avant le cas où une réserve est déclarée illicite, et que l'Etat réservataire ne réagisse en aucune manière.

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M. JAN VERWEIJ (Pays-Bas) a estimé que, sans préjuger du régime des réserves établi par les Conventions de Vienne, il est nécessaire de souligner que la question des réserves est avant tout une question de substance. La préoccupation concernant les réserves aux traités sur les droits de l'homme ne porte pas sur un système qui a des déficiences techniques, cette préoccupation est fondée sur l'incapacité du système à faire face aux traités normatifs de protection. En conséquence, les travaux de la Commission du droit international (CDI) devraient être axés sur les incidences des réserves en tant que motif pour réviser et éventuellement améliorer le droit.

Concernant les conclusions préliminaires aux traités multilatéraux normatifs, M. Verweij a estimé qu'elles n'apportent pas de nouveaux éléments qui renforceraient le régime des réserves. Il a souhaité que la CDI examine de façon approfondie l'"objet et le but" d'un traité en particulier. La Convention de Vienne ne prévoit pas de principes directeurs sur la manière de faire une telle détermination, et les conventions ne tendent pas à être très explicites sur la question. En outre, le cas du génocide qui est la pierre angulaire en matière d'objet et de but, est régi par une convention qui définit avec précision l'objet et le but. La majorité des traités ne donne pas une définition aussi claire de l'objectif visé.

Le représentant a jugé essentiel que le débat sur les réserves soit élargi de manière à accorder une attention particulière à la dimension substantielle des réserves. Il serait plus fructueux de se pencher davantage sur le rôle que les organes de contrôle créés par les traités peuvent jouer à l'égard des réserves.

M. ROBERT E. DALTON (Etats-Unis) a déclaré que le régime actuel des traités, grâce à sa souplesse, a permis à de nombreux pays d'adhérer à des traités et de respecter leur esprit, tout en faisant des réserves, qui souvent sont dictées par un législateur élu démocratiquement. Dans ces cas précis, les réserves, loin de jouer le rôle négatif que leur prêtent certains, jouent un rôle important et positif dans le développement du droit international. Les Etats-Unis se rallient à cette conclusion de la CDI, selon laquelle le régime de Vienne ne devrait pas être amendé. Le délégué a aussi appuyé la CDI à propos du caractère unique du régime des réserves. En 1966, la CDI déclarait dans le paragraphe 14 de ses commentaires sur le projet de loi des traités qu' "il n'y a pas de raisons suffisantes pour opérer une distinction entre différentes sortes de traités multilatéraux". Les règles internationales sur les réserves s'appliquent à tous les traités, à moins que toutes les parties contractantes n'en décident autrement. Et quand bien même des régimes spéciaux seraient applicables, le régime de Vienne y répond par son article 20. Le délégué a ensuite fait référence à la question des organes de contrôle des traités relatifs aux droits de l'homme. Il est parfois approprié de présenter des commentaires sur des réserves, mais ces organes de contrôle n'ont pas le pouvoir de prendre des décisions ayant des conséquences légales au regard de la licéité d'une réserve. Cela doit rester une affaire entre les pays signataires et l'Etat réservataire.

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Mme GAO YANPING (Chine) a estimé que le régime des réserves aux traités, établi par la Convention de Vienne de 1969, rétablit un équilibre entre deux objectifs conflictuels de traité. Un traité a deux caractéristiques. D'une part, il doit rechercher l'universalité afin que davantage d'Etats puissent devenir parties contractantes, et ceci nécessite un régime certain de réserves aux traités. D'autre part, son intégrité et son unité doivent être maintenues. La représentante a rappelé que dans la pratique internationale actuelle, les Etats peuvent au cours des négociations d'un traité envisager des dispositions spécifiques pour garantir que certains droits et obligations fondamentaux soient préservés.

En droit international contemporain, toutes les dispositions ont la même force, bien que la Charte des Nations Unies stipule que le respect des obligations en vertu de la Charte constitue une priorité. Il est donc nécessaire d'établir un régime particulier de réserves pour une catégorie particulière de traités. La Convention de Vienne sur le droit des traités devrait s'appliquer à toutes les catégories de traités. Il est nécessaire de faire une distinction claire entre les traités sur les droits de l'homme et les autres traités, et prévoir un régime propre aux traités sur les droits de l'homme. Les organes de contrôle créés par les traités ne peuvent être compétents qu'à l'égard des traités qui les ont mandatés. Il appartient à l'Etat qui a émis la réserve de déterminer si la réserve est compatible avec le but et objet du traité.

M. PATRICK ROBINSON (Jamaïque) a cité le paragraphe 5 des conclusions de la Commission du droit international (CDI) et estimé que son interprétation n'est pas claire. En substance, ce paragraphe prévoit qu'en cas de silence du traité, les organes de contrôle mis en place par ce traité sont compétents pour faire des commentaires ou exprimer des recommandations au sujet, entre autres, de la licéité des réserves faites par les Etats. Le délégué a précisé qu'en l'absence de toute disposition dans un traité sur cette question, il est malaisé de déterminer la compétence réelle des organes de contrôle. Une interprétation du traité serait nécessaire, de même qu'un examen de la pratique dans des cas similaires. Dans sa rédaction actuelle, le rapport de la CDI n'apporte pas de réponse assez précise a-t-il dit.

Le risque de conflit entre les organes de contrôle et les Etats parties au traité représente une autre difficulté. Un organe de contrôle pourrait décider qu'une réserve est illicite, mais son acceptation pourrait résulter du manque de réaction des Etats parties, en application de l'article 20 de la Convention de Vienne. Le délégué a déclaré que l'article 20 s'applique à une réserve qui est illicite en application de l'article 19. Mais, en pratique, et en l'absence d'un organe objectif qui déterminerait la licéité d'une réserve, une situation conflictuelle pourrait apparaître. Le délégué a donc déclaré que les organes de contrôle n'ont aucun pouvoir légal contraignant de décision et donc aucune autorité pour déterminer si une réserve est ou non licite. Seuls les Etats ont ce pouvoir, à moins seulement qu'ils n'en aient disposé autrement.

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M. TUVAKO MANONGI (République-Unie de Tanzanie) a appuyé l'idée selon laquelle le but et l'objet des traités multilatéraux visent à protéger les droits fondamentaux des personnes physiques, indépendamment de leur nationalité, à la fois à l'égard de l'Etat dont elles sont ressortissantes et à l'égard de tous les autres Etats. Le régime des réserves établi par les Conventions de Vienne n'affaiblit pas cet objectif. La délégation tanzanienne estime que le régime de Vienne répond de manière appropriée aux exigences de tous les traités. Concernant les organes conventionnels de contrôle de la licéité des réserves, M. Manongi a estimé que ces organes n'ont compétence que pour faire des recommandations et doivent, au préalable, obtenir l'accord de l'Etat concerné. Les organes de contrôle ne sont compétents que dans la limite du mandat défini par les traités qui les ont créés. Toutes les recommandations qui pourraient contribuer à réduire le degré de relativité des relations entre les parties et, en conséquence, renforcer la certitude sans circonvenir à la liberté des Etats de conclure des accords, seraient extrêmement souhaitées par la plupart des Etats, a estimé M. Manongi.

M. NORMAN MONAGAS LESSEUR (Vénézuela) a fait observer que les travaux de la CDI sont extrêmement importants pour la Sixième Commission. Parlant de la question de la nationalité en relation avec la succession d'Etats, il a exprimé son accord sur la structure d'ensemble du rapport de la CDI, dont la première partie est plus contraignante que la seconde a-t-il dit. Ce projet, qui a pour but de réduire les cas d'apatridie, établit un équilibre entre les intérêts des personnes physiques et ceux des pays. Le délégué a estimé que de par la nature et l'importance de cette question, une convention serait certainement plus appropriée qu'une déclaration, mais, quelle que soit sa forme future, le point le plus important reste celui de sa teneur. Il a ensuite estimé que le futur régime ne devrait s'appliquer qu'aux cas de successions d'Etats en conformité avec le droit international.

A propos des réserves aux traités normatifs, surtout ceux relatifs aux droits de l'homme, le délégué a déclaré qu'elles ne méritent pas un régime particulier. De plus, les organes de contrôle ne peuvent pas donner d'avis contraignant, mais simplement consultatif; en effet, seuls les Etats peuvent décider de l'intervention de ces organes dans le processus des réserves. Il lui a paru souhaitable d'inclure un protocole additionnel aux traités pour décider du rôle de ces organes au sein des traités.

M. JOHN T. HOLMES (CANADA) a estimé que les paragraphes 5 et 6 des conclusions préliminaires, relatifs respectivement aux recommandations sur la liceité pouvant être formulées par les organes de contrôle, créés par les traités, et à l'incompatibilité avec les modalités traditionnelles de contrôle, établissent un équilibre entre les dispositions. La démarche de la Commission du droit international (CDI) contribue à donner une plus grande certitude à la question des réserves aux traités normatifs. Il est essentiel d'établir une distinction claire entre les réserves et les déclarations interprétatives. Sa délégation estime qu'il faudrait envisager à une date ultérieure la question de l'élaboration de clauses expresses dans les textes multilatéraux normatifs, et en particulier dans les traités relatifs aux droits de l'homme.

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M. REINHARD HILGER (Allemagne) a exprimé son accord général avec les conclusions préliminaires de la Commission du droit international (CDI). Il a estimé qu'elles reflètent un consensus au sein de la CDI pour que le régime de Vienne demeure inchangé. Ce régime, a-t-il dit, s'applique à toutes les catégories de traités et, si une exception était faite pour les traités relatifs aux droits de l'homme, il n'y aurait pas de raison de ne pas en faire autant pour d'autres catégories de traités. Le régime de Vienne et son critère de l'objet et de la raison d'être du traité permettent une grande souplesse. Ce régime peut en principe s'appliquer à tous les traités multilatéraux, avec toutefois certaines exceptions concernant les organisations internationales. De même, le régime ne s'applique pas aux traités bilatéraux.

La question des réserves illicites constitue un important problème. Le régime prévu par les articles 20 et 21 de la Convention de Vienne, laisse le traitement des conséquences des réserves illicites aux organes compétents. Considérer la réserve comme nulle et non avenue, et donc faire que le pays réservataire ne soit plus tenu par des dispositions qu'il a expressément exclues de son consentement, serait contraire à l'essence même du droit des traités. L'Allemagne s'accorde donc à dire avec le Rapporteur spécial, que l'Etat a la responsabilité d'apprécier l'illicéité de sa réserve. Il a alors le choix de retirer sa réserve, l'amender selon l'objet et l'esprit du traité ou renoncer au traité. Néanmoins, cette clarification doit être faite objectivement.

M. DJAMCHID MOMTAZ (République islamique d'Iran) a estimé qu'aucun des arguments présentés en faveur de l'élaboration d'un régime de réserves contraignant applicable aux traités de droits de l'homme n'est convaincant. Le régime de Vienne présente l'avantage de tenir compte de l'absence d'homogénéité de la société internationale, en ce sens qu'il facilite incontestablement la conclusion des traités multilatéraux dans le respect des positions des Etats sur le plan idéologique et politique. L'extrême diversité des clauses de réserves incluses dans les traités normatifs, y compris les traités relatifs aux droits de l'homme, atteste de l'importance que la communauté internationale accorde à la sauvegarde des intérêts essentiels des Etats, qu'ils soient minoritaires ou non.

De l'avis de la délégation iranienne, il est parfois difficile d'identifier la norme impérative et la règle coutumière, ce qui amène les Etats à exprimer des vues divergentes sur la nature juridique de certaines dispositions des traités. Il semble que, dans le cas où la question de la licéité de la réserve peut se poser, l'objection à une réserve de la part d'un nombre suffisamment élevé d'Etats parties au traité pourrait aller dans le sens de l'illicéité de la réserve. M. Momtaz a fait remarquer que la compétence des organes de contrôle d'application des traités relatifs aux droits de l'homme - en particulier ceux des instruments régionaux - ne peut s'apprécier qu'au regard de leurs instruments constitutifs. La liberté d'appréciation que le régime de Vienne laisse aux Etats pour juger de la compatibilité de leurs réserves avec l'objet et le but du traité ne va pas

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sans soulever certaines difficultés pratiques. On ne peut qu'admettre que ce critère d'apparence objective peut être interprété subjectivement. La Commission du droit international devrait se pencher davantage sur la détermination d'un critère clair et précis pour apprécier la licéité des réserves.

M. AL-BAHARNA (Bahraïn) a indiqué que sa délégation n'a aucune objection à l'égard des dispositions relatives à la nationalité en relation avec la succession d'Etats. Abordant la question des réserves aux traités, M. Al- Baharna a estimé que le régime établi par les Conventions de Vienne de 1969 et de 1986 pourrait s'appliquer à tous les traités. Le nombre de réserves et leur teneur risquent d'affaiblir le but et l'objet des traités. Le régime de Vienne doit être examiné sous l'angle de la pratique des Etats. La collaboration entre les Etats parties et les organes de contrôle créés par les traités pourrait renforcer le régime de Vienne.

Sa délégation a souscrit à l'idée selon laquelle les organes de contrôle devraient se soumettre à la volonté des Etats. Il appartient aux Etats d'agir et de prendre toute décision pertinente soit en reformulant leur réserve de manière à la rendre licite soit, si celle-ci constituait une condition sine qua non de leur consentement à être liés, en se retirant du traité. La délégation de Bahreïn fait sienne l'idée que les conclusions préliminaires contribueront à clarifier le régime des réserves applicable aux traités multilatéraux normatifs, en particulier dans le domaine des droits de l'homme.

M. MARK GRAY (Australie) a fait sienne les principes énoncés par les paragraphes 1 à 3 des conclusions préliminaires, aux termes desquels la Commission du droit international (CDI) réitère que les articles 19 à 23 des Conventions de Vienne de 1969 et de 1986 sur le droit des traités déterminent le régime des réserves aux traités. Ces mêmes articles déterminent en particulier, que le critère de l'objet et du but du traité est celui qui revêt le plus d'importance aux fins de l'établissement de la licéité des réserves. De l'avis de sa délégation, le régime de Vienne s'applique de manière égale à tous les traités, y compris les traités relatifs aux droits de l'homme. La licéité de certaines réserves à ces instruments réside plutôt dans l'incompatibilité du but et de l'objet du traité.

Le représentant a proposé d'examiner de façon plus approfondie la définition des traités normatifs auxquels les principes s'appliquent. Il a fait remarquer qu'il existe une différence entre un organe de contrôle et un dépositaire des traités. Le paragraphe 5 des conclusions préliminaires reconnaît la compétence des organes de contrôle de formuler des recommandations sur la licéité des réserves. Il n'est pas clair, toutefois, si cela fait uniquement référence à des situations où les traités sont muets à ce sujet.

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M. Gray a fait remarquer que l'article 19 de la Convention de Vienne ne permettrait pas une réserve incompatible avec le but et l'objet du traité. Il apparaît cependant que l'évolution de la pratique des organes de contrôle des traités de droits de l'homme prévoit la possibilité de faire des observations et de formuler des recommandations sur la licéité des réserves. Rappelant que le rôle général d'un organe de contrôle est de contrôler l'application des traités, M. Gray a estimé qu'en l'autorisant à juger de la licéité des réserves, on étendrait de façon inacceptable sa compétence.

M. ELHASSANE ZAHID (Maroc) s'est prononcé en faveur du maintien du régime de réserves existant. La pratique des réserves en matière de conventions multilatérales a toujours existé, d'abord sous forme de coutume internationale, puis, depuis 1969, sous forme de règles juridiques codifiées. Le recours aux réserves, tel que régi par les Conventions de Vienne de 1969, 1978 et 1986, fonctionne de manière satisfaisante.

Le Maroc soutient qu'il n'est pas nécessaire de réviser et, encore moins d'abandonner le cadre juridique des réserves fixé par les trois Conventions de Vienne. En outre, la délégation marocaine ne comprend pas les propositions avancées par certains visant à créer un régime séparé et restrictif des réserves au profit des instruments multilatéraux relatifs aux droits de l'homme car, le droit international étant indivisible, il ne saurait y avoir de discrimination à l'encontre d'une catégorie de traités.

M. ROBERTO LAVALLE VALDES (Guatemala) a déclaré que sa délégation n'est pas en mesure d'appuyer le paragraphe 10 des conclusions préliminaires selon lequel en cas d'illicéité d'une réserve, il appartient à l'Etat réservataire d'en tirer les conséquences. L'Etat peut modifier sa réserve de manière à faire disparaître l'illicéité ou la retirer, ou encore renoncer à devenir partie au traité. Sa délégation s'interroge sur l'opportunité d'une coopération des Etats avec les organes de contrôle. Il y aurait lieu d'améliorer le paragraphe 12 des conclusions préliminaires.

M. ALBERT HOFFMANN (Afrique du Sud) s'est déclaré favorable à l'approche de la Commission du droit international (CDI) sur le sujet des réserves aux traités. Le régime de Vienne crée un système pratique et raisonnable a-t-il dit, mais récemment, ces règles et principes ont été remis en question. De l'avis de M. Hoffman, il existe un réel besoin de clarifier la distinction entre les réserves et les déclarations interprétatives. Le délégué a indiqué que certains Etats ont émis des réserves parfois contraires à l'objet et à l'esprit des traités, surtout quand il s'agit des droits de l'homme. Ceci a entraîné l'intervention d'organes de contrôle des droits de l'homme sur le point de savoir si telle ou telle réserve était licite. M. Hoffman a estimé que le conflit entre la jurisprudence des organes de contrôle des droits de l'homme et le régime de la Convention de Vienne, qui laisse aux pays la responsabilité de décider de la validité d'une réserve, est un sujet délicat demandant une étude précise et sérieuse. Il est peut être souhaitable de reconsidérer les raisons pour lesquelles les organes de contrôle des droits de l'homme interviennent, notamment quand il y a impossibilité de la part des Etats à faire des objections à des réserves. L'Afrique du Sud accueille donc avec intérêt les suggestions de la CDI contenues dans les paragraphes 147 et 157 du rapport.

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