AG/J/195

LA SIXIEME COMMISSION DEBAT DE LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE POUR LES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES D'ACTIVITES INTERNATIONALEMENT LICITES

12 novembre 1996


Communiqué de Presse
AG/J/195


LA SIXIEME COMMISSION DEBAT DE LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE POUR LES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES D'ACTIVITES INTERNATIONALEMENT LICITES

19961112 MATIN AG/J/195 La Sixième Commission (Commission juridique) a poursuivi ce matin l'examen du rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa quarante-huitième session. Les représentants des pays suivants sont intervenus: Italie, Slovénie, Viet Nam, Royaume-Uni, Indonésie et Cameroun.

Concernant la succession d'Etats et nationalité des personnes physiques et morales, les délégations ont soutenu l'idée d'une séparation entre les conséquences sur les personnes physiques et celles sur les personnes morales. Toutefois, le représentant de la Slovénie a rappelé que la nationalité des personnes morales peut, en cas de succession d'Etats, avoir des conséquences sur la propriété des biens des individus et ainsi affecter des droits de l'homme. De ce fait, les conséquences économiques pour les individus ne seront donc complètement étudiées que lorsque les conséquences sur la nationalité des personnes morales auront été examinées.

Le représentant du Royaume-Uni a affirmé que la question de la responsabilité internationale pour les conséquences dommageables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international est un sujet "creux". La prochaine CDI ne devrait pas avoir à s'occuper de ce point. Le délégué de l'Italie s'est félicité de l'absence de liste des activités non interdites par le droit international, car toute énumération risquerait de ne pas être exhaustive et devrait être remise à jour périodiquement. Par ailleurs, il a souhaité une formulation plus nette et plus précise du principe de réparation. Certaines délégations sont également revenues sur les questions de la responsabilité des Etats et le projet de Code des crimes.

La Sixième Commission poursuivra l'examen du rapport de la Commission du droit international demain, mercredi 13 novembre, à 15 heures.

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Déclarations

M. UMBERTO LEANZA (Italie) a estimé que le projet d'articles sur la question de responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international est formulé de façon logique et complète. Il a toutefois souhaité étendre le champ d'application du projet d'articles aux "activités non interdites par le droit international qui ne comportent pas le risque de causer un dommage transfrontière significatif", mais causent néanmoins un tel dommage. Le représentant a approuvé l'absence de liste énumérative des activités non interdites par le droit international auxquelles le projet fait référence. Toute forme d'énumération risquerait de ne pas être exhaustive et de devoir être remise à jour périodiquement.

Le délégué a souligné l'importance de l'article 2 du projet qui indique que la liberté de l'Etat d'exercer des activités dans son territoire n'est pas absolue, et qu'elle est soumise à l'obligation générale d'éviter ou de réduire au minimum le risque de causer un dommage transfrontière. Il a également approuvé l'article 4 qui établit le principe de la prévention obligatoire. Sa délégation aurait toutefois préféré une formulation plus nette et plus précise du principe de réparation. Rappelant que le principe de coopération est essentiel, le représentant s'est félicité de l'introduction de la possibilité de demander l'assistance des organisations internationales.

M. Leanza a estimé que la procédure de négociations pour essayer d'obtenir réparation devrait être fondée sur la règle selon laquelle l'Etat d'origine a une responsabilité subsidiaire pour la partie du dommage qui n'est pas couverte par la responsabilité de celui qui effectue l'activité en question. Il a jugé que des approfondissements supplémentaires étaient nécessaires sur la question du dommage transfrontière, en particulier pour ce qui est de la référence au dommage produit à l'environnement.

M. BORUT MAHNIC (Slovénie) a déclaré qu'il comprenait l'intérêt de distinguer les conséquences de la succession d'Etat sur la nationalité des personnes physiques et celles qui affectent la nationalité des personnes morales, ainsi que la priorité accordée aux premières, en raison des aspects liés aux droits de l'homme. Mais, a-t-il rappelé, la nationalité des personnes morales peut, en cas de succession d'Etats, avoir des conséquences sur la propriété des biens des individus et ainsi affecter des droits de l'homme. Les conséquences économiques pour les individus de la succession d'Etats ne seront complètement étudiées que lorsque la nationalité des personnes morales aura été examinée. Quant à la forme future que prendront les travaux, la Slovénie estime qu'une déclaration devrait se limiter à l'énumération de principes généraux. Mais si l'intention est de définir des obligations ou des règles concernant des situations spécifiques, alors les travaux devraient prendre la forme d'un instrument contraignant, de préférence une convention.

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Le représentant a rappelé que les règles actuelles concernant la nationalité n'accordent pas aux individus le droit d'avoir plusieurs nationalités. Aussi est-il troublant que la CDI suggère aux Etats de prendre en compte le désir que peuvent avoir des individus d'acquérir la nationalité de plusieurs Etats concernés. la Slovénie émet des doutes sur l'idée d'une "obligation" des Etats en ce domaine et souhaite une approche plus prudente. En outre, la formulation actuelle du principe du droit d'option n'est pas très claire. Pour la Slovénie, il s'agit du droit pour un individu de choisir entre deux nationalités dans des circonstances particulières s'il existe un accord international entre deux Etats. Il n'existe donc pas d'obligation pour les Etats d'accorder un tel droit d'option, qui ne doit pouvoir s'exercer que dans un certain délai après une succession d'Etats.

Les travaux relatifs aux réserves aux traités sont très importants pour les Etats, a déclaré le représentant. La Slovénie est l'un des pays qui a répondu au questionnaire de la CDI, a-t-il rappelé. M. Mahnic a enfin estimé que, pour ses travaux futurs, la CDI pourrait se consacrer aux questions de la protection diplomatique et des actes unilatéraux des Etats.

M.NGUYEN DUY CHIEN (Viet Nam) a indiqué que la discussion à la Sixième Commission sur le rapport de la CDI est la preuve de la satisfaction générale des délégations sur les travaux de la CDI, et notamment sur le projet de Code de crimes. Il a souhaité que ce dernier texte soit achevé dès que possible. Soulignant la limitation de la portée du projet de code, le délégué a fait observer que la valeur du code et son efficacité ne dépendent pas du nombre de crimes qu'il contient. L'agression, le génocide, les crimes de guerre et les crimes de l'humanité figurent effectivement parmi les crimes les plus graves. La menace d'agression doit également trouver une place légitime dans le projet de Code. La responsabilité des Etats est un des sujets les plus difficiles de la CDI, a par ailleurs fait valoir le représentant.

M. FRANKLIN BERMAN (Royaume-Uni) a déclaré que le rapport de la CDI confirme ce que le Royaume-Uni pense depuis des années de la question de la responsabilité internationale pour les conséquences dommageables découlant d'activités qui ne sont pas interdites par le droit international, à savoir que ce sujet est "creux". Si les dispositions sur la prévention sont utiles, elles ne donnent pas lieu à un code. Quant aux dispositions sur la responsabilité, elles posent tant de questions qu'il est impossible de les soutenir. La prochaine CDI ne devrait pas avoir à s'occuper de cette question.

Tel n'est pas le cas pour les conséquences sur la nationalité de la succession d'Etats, sujet sur lequel le travail de la CDI est remarquable. Le Royaume-Uni estime toutefois qu'il ne faut pas préjuger de la forme finale sous laquelle le résultat des travaux devra être adopté. Le travail sur les

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réserves aux traités est également très prometteur, a déclaré le représentant et la CDI doit poursuivre ses efforts. Un guide sur la pratique en la matière serait sans doute très utile.

Le représentant s'est réjoui que les travaux sur le projet de Code des crimes soient achevés. Le Royaume-Uni ne voit pas d'objection à ce qu'il soit transmis au Comité préparatoire pour l'établissement d'une cour criminelle internationale. Mais on ne devrait plus revenir sur le projet de Code à la CDI et il ne faudrait pas non plus l'adopter, sous quelque forme que ce soit, avant que le Comité préparatoire n'ait achevé ses travaux.

Le représentant a estimé que l'ensemble du rapport de la CDI de cette année était de très haute qualité. Les efforts de la CDI en ce sens méritent d'être encouragés. Avec son exercice d'auto-examen, la CDI a également lancé un défi à l'Assemblée générale et aussi à la Sixième Commission. La CDI a le droit de critiquer la Sixième Commission et la nouvelle CDI issue des élections ne sera pas en mesure de continuer ses travaux sans un effort de notre part. Il faut donc se demander si les débats généraux tels que celui mené actuellement peuvent servir aux travaux de la CDI. Si la réponse est non, nous devrons en tirer les conséquences, a-t-il affirmé.

M. MAKARIM WIBISONO (Indonésie), revenant sur la question du projet de code des crimes, a indiqué qu'il existe un lien étroit entre ce dernier et la création d'une cour criminelle internationale. Le projet de Code et la Cour criminelle devraient donc être examinés ensemble afin d'assurer un système de justice pénale qui soit efficace et internationalement acceptable. Le projet de Code devrait prendre la forme d'une convention internationale. Il en est de même pour le Statut de la Cour. Cela assurerait à ces deux textes valeur contraignante. Le représentant a estimé que si une législation nationale impose une peine pour un crime, le projet de Code ne doit pas s'appliquer et les autorités nationales se doivent d'exercer leur compétence en la matière. A son avis, les crimes retenus dans le projet de Code posent des problèmes de définition et méritent d'être examinés attentivement avant d'être inclus dans le projet de Code. Il a cependant soutenu l'introduction des crimes contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé. Une multitude de problèmes doivent être encore résolus en ce qui concerne le projet de Code, a-t-il ajouté.

L'Indonésie a souligné que les contre-mesures ne sont pas une méthode satisfaisante pour répondre à un Etat fautif. La portée de ce régime doit être limitée et étroitement définie pour éviter les abus dont pourraient faire l'objet les Etats les plus faibles. Le but des contre-mesures n'est pas de punir mais plutôt d'obtenir réparation ou restitution, a précisé le délégué. Déclarant qu'il est indéniable que le droit international a pris une importance primordiale dans le monde actuel, M. Wibisono a jugé impératif que la codification du droit international et son développement progressif tiennent compte des points de vue des pays en développement. L'Assemblée

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générale doit être encouragée à soumettre de nouvelles questions de droit international à la CDI. Les liens devraient être renforcés entre la CDI et d'autres instances pertinentes en matière de droit international.

M. THOMAS FOZEIN (Cameroun) a déclaré que les récentes successions d'Etats se sont souvent produites dans des conditions qui ont porté gravement atteinte aux droits acquis et notamment à ceux de la nationalité des personnes physiques et morales, d'où la nécessité d'un encadrement juridique urgent de la pratique des Etats, compte dûment tenu de l'exclusivité de leur compétence en matière d'attribution de la nationalité. Il s'est réjoui que la Commission du droit international ait décidé de séparer l'examen de la question de la nationalité des personnes physiques de celle de la nationalité des personnes morales et ait décidé de s'intéresser d'abord à la première. En effet, il existe un lien évident entre la question de la nationalité en cas de succession d'Etats et la protection des droits de l'homme, ce qui souligne l'urgence d'une solution durable aux problèmes, a-t-il déclaré .

Le représentant a estimé que la notion d'"Etats intéressés à la succession d'Etats" retenue dans le rapport est fort imprécise et pourrait donner lieu à toutes sortes d'interférences de la part d'Etats tiers. Elle devrait être remplacée par la notion d'"Etats parties à la succession d'Etats", qui a le mérite de la précision du point de vue juridique. M. Fozein a par ailleurs apprécié le principe selon lequel l'Etat successeur doit promulguer sans retard la législation nationale visant la nationalité et autres questions connexes découlant de la succession d'Etats. Il a cependant souhaité que soit davantage développée la notion de droit d'option, et que soit notamment fixé un délai précis pour l'exercice de celui-ci, afin que les personnes intéressées ne soient pas prises de cours. Il a proposé un délai de cinq ans minimum à compter de la date de la promulgation de la législation nationale. Il s'est également réjoui de voir l'intérêt attaché à la notion de regroupement familial, tout en estimant que, tel qu'énoncé par la CDI, ce principe pourrait être source de difficultés.

M. Fozein s'est interrogé sur l'objectif visé par cette entreprise de codification si elle doit se limiter à une série d'articles adoptés sous la forme d'une déclaration de l'Assemblée générale accompagnée de commentaires. Etant donné l'extrême sensibilité de la question et son lien avec l'exigence de protection des droits de l'homme, qui est une obligation erga omnes le Cameroun souhaiterait l'adoption sous la forme d'un instrument juridique contraignant.

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