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AG/J/189

SIXIEME COMMISSION : LES DELEGATIONS SE FELICITENT DES AMELIORATIONS APPORTEES AU PROJET DE CODE DES CRIMES

5 novembre 1996


Communiqué de Presse
AG/J/189


SIXIEME COMMISSION : LES DELEGATIONS SE FELICITENT DES AMELIORATIONS APPORTEES AU PROJET DE CODE DES CRIMES

19961105 MATIN AG/J/189 Elles restent divisées sur l'inclusion de certains crimes et sur la forme à donner au projet de Code

La Sixième Commission (Commission juridique) a poursuivi ce matin l'examen du rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa quarante-huitième session, en se consacrant essentiellement au projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité. Les représentants des pays suivants ont pris la parole : Pays-Bas, République tchèque, Etats-Unis, Chine, Sri Lanka, République-Unie de Tanzanie, Argentine, Allemagne, Singapour et Grèce.

La plupart des délégations se sont félicitées de la nouvelle version du texte du projet de Code des crimes, soulignant les améliorations considérables qui y ont été apportées. Plusieurs d'entre elles ont approuvées sa limitation aux crimes les plus graves, tout en demandant toutefois une définition plus précise pour certains d'entre eux. Certaines se sont félicitées de l'inclusion des crimes commis à l'encontre du personnel des Nations Unies et du personnel associé. D'autres ont en revanche contesté ce dernier point, en affirmant que ces crimes, certes de plus en plus nombreux et qui attirent à juste titre l'attention de la communauté internationale, ne peuvent être comparés en gravité aux "crimes des crimes" définis dans le projet de Code. Le représentant de la Chine a même fait remarquer que ce crime manquait de base légale, la convention des Nations Unies de 1994 qui s'y rapporte n'étant pas encore entrée en vigueur.

Les délégations ont également manifesté des désaccords sur l'inclusion, dans le projet de Code, de l'agression. Certaines ont rappelé qu'il n'en existait pas de définition légale largement acceptable, comme cela avait encore été constaté au sein du Comité préparatoire sur l'établissement d'une cour criminelle internationale. D'autres, à partir du même constat, ont demandé à la CDI d'établir une telle définition, en tenant compte des responsabilités accordées par la Charte au Conseil de sécurité en ce qui concerne le reconnaissance d'une agression par un Etat. L'inclusion, parmi les crimes de guerres, des dommages étendus et durables intentionnellement portés à l'environnement, a également divisé les représentants.

Les délégués se sont également interrogés sur la forme à donner au projet de Code. Certains ont souhaité qu'il soit adopté sous forme de déclaration de l'Assemblée générale alors que d'autres affirmaient qu'il serait décevant d'adopter un texte aussi important sous cette forme non contraignante. Pour ces derniers, il faudrait l'adopter par traité, soit sous la forme d'une convention séparée, soit dans le cadre d'une convention établissant le Statut de la Cour criminelle internationale, dans lequel le Code serait intégré.

Le représentant de la Grèce a, en outre, abordé le point relatif à la succession d'Etats et nationalité des personnes physiques et morales. Il a présenté et expliqué la déclaration adoptée sur ce point en septembre par la Commission de Venise, organe intergouvernemental indépendant relevant du Conseil de l'Europe.

La Sixième Commission poursuivra demain, mercredi 6 novembre à 15 heures, l'examen du rapport de la Commission du droit international, et plus précisément du projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité.

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Déclarations

M. ADRIAAN BOS (Pays-Bas) a déclaré que la réduction du champ d'application du Code est une amélioration considérable par rapport au premier projet présenté en 1991. Le projet de Code est désormais limité aux crimes essentiels. Il est intéressant de constater que la CDI a ajouté une limitation supplémentaire en définissant mieux les crimes énoncés. Le représentant a fait part de sa préférence pour des discussions qui n'entreraient pas dans les détails. Il faut laisser à la Cour ou aux Etats intéressés le soin d'étudier ces détails. Les Pays-Bas soutiennent l'option d'utiliser le projet de Code pour élaborer le Statut de la Cour criminelle internationale. Deux des principales questions qui se posent sont la sélection et la définition des crimes.

Le délégué a indiqué que toutes les questions touchées par le projet de Code font l'objet de débats intenses au Comité préparatoire pour la création d'une cour criminelle internationale. Puisque, le projet de Code et le projet de Statut de la Cour, ne sont plus des sujets traités séparément, a dit le délégué, il faudrait que le Comité préparatoire pour la création d'une cour criminelle internationale soit l'organe compétent non seulement pour la Cour, mais aussi pour le projet de Code des crimes. Cette manière d'opérer permettrait d'enregistrer des progrès importants dans ce domaine. Les crimes contre l'humanité sont les crimes les plus graves que l'on puisse imaginer. Le projet de Code est une amélioration considérable qui montre que la communauté internationale est prête à avancer sur le chemin de la responsabilité pénale individuelle.

M. VACLAV MIKULKA (République tchèque) s'est réjoui que la sagesse, le pragmatisme et le réalisme aient prévalu lors de la dernière session de la CDI en optant pour une approche restrictive du nombre des crimes. Cette restriction renforce les chances d'adoption du Code, a estimé le représentant. Il a rappelé que le Code ne vise pas à codifier tous les crimes des individus au regard du droit international, mais seulement ceux qui sont susceptibles de menacer la paix et la sécurité de l'humanité.

M. Mikulka s'est dit satisfait de la manière dont le lien entre la responsabilité des individus et la responsabilité des Etats est traité dans le projet de Code.

Le représentant a rappelé que la deuxième partie du Code , qui définit divers crimes, représente le vrai droit de fond qui devrait être appliqué, le cas échéant, aussi bien par les juridictions nationales qu'internationales. Au sujet de l'agression, la République tchèque approuve la solution selon laquelle il faudrait reconnaître la compétence exclusive d'une juridiction internationale. L'article 16 offre en effet une solution ingénieuse, a-t-il estimé. Mais est-il réaliste de croire qu'il sera possible d'assurer l'harmonie entre les décisions du Conseil de sécurité concernant les actes d'Etat, et l'organe judiciaire appelé à appliquer les dispositions du Code

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concernant le crime d'agression? Le tribunal international sera-t-il libre de poursuivre le procès malgré l'absence de toute constatation de la part du Conseil de sécurité? Il est vrai qu'il ne s'agit pas là de problèmes de droit matériel, dont la codification a été le but principal du Code, ce qui a permis à la CDI de ne pas répondre à la question. Mais, sur le plan de la procédure, les problèmes subsistent et exigent une solution.

M. Mikulka s'est réjoui des solutions prônées par la CDI concernant le crime de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre. En revanche, le crime contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé ne fait pas encore partie du droit positif. Quand bien même il est fort louable de vouloir considérer les attaques contre ce personnel comme faisant partie des crimes internationaux les plus graves, il est douteux que cela puisse se faire dans le cadre du Code. Sur ce point, la position de la délégation tchèque est souple mais, à son avis, la répression de cette catégorie de crimes, contrairement aux autres qui sont inclus dans le projet, exige l'acceptation par les Etats concernés d'une obligation conventionnelle.

Ceci ne sera pas sans conséquences sur le choix de la forme que le Code devrait revêtir, a estimé le représentant. Sur ce point, la Commission n'a indiqué aucune préférence, sa préoccupation principale semblant être l'acceptation du Code par le plus grand nombre possible d'Etats. Pourtant, certaines dispositions du Code semblent avoir été rédigées dans la perspective d'une option sous forme conventionnelle. Une solution consisterait à incorporer le Code dans le projet de Statut de la future Cour criminelle. Dans un tel cas, la forme du Statut comprenant le Code serait une convention. Toutefois, vu le temps requis par la procédure d'adoption d'une convention, la République tchèque n'est pas opposée à l'idée d'une adoption rapide, dans un premier temps, du Code sous la forme d'une déclaration de l'Assemblée générale, en attendant l'adoption d'un instrument conventionnel.

M. JOHN R. CROOK (Etats-Unis) a d'abord rappelé les réserves importantes de son gouvernement sur les versions précédentes du texte de projet de Code. Parlant de la nouvelle version largement améliorée, il a estimé qu'elle mérite une attention particulière. Certaines dispositions sont innovatrices et vont au-delà du droit en vigueur à l'heure actuelle. Il s'est félicité de la limitation du champ d'application du projet de Code aux crimes les plus graves, affirmant pourtant que certains crimes méritaient une définition plus précise. Le représentant a déclaré que la résolution 3314 de l'Assemblée générale ou l'Article 2 alinéa 4 de la Charte des Nations Unies ne suffisent pas pour définir de l'agression au regard du droit pénal, ni ne reflètent les origines historiques du crime de guerre d'agression. Il a indiqué que la CDI a correctement reconnu que le projet de Code doit se concentrer sur les actes individuels répréhensibles.

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Le représentant a rappelé que la notion d'agression est difficile à définir et que les précédents historiques n'offrent pas d'orientations très claires à cet égard. C'est pourquoi sa délégation a demandé qu'à ce stade, l'agression ne figure pas dans le projet de Code. Certains domaines méritent un examen plus approfondi. M. Crook s'est demandé si les disparitions forcées pourraient constituer un sujet pour une juridiction criminelle internationale et universelle. En tant que signataire de la Convention sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé, les Etats-Unis appuient en principe les dispositions sur les crimes contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé qui figurent dans le projet de Code.

Le délégué a souhaité examiner davantage la distinction faite par le Code entre les crimes de guerres, à laisser à une juridiction nationale, et ceux qui représentent un crime contre la paix et la sécurité de l'humanité. A son avis, les gouvernements doivent avoir la possibilité d'étudier de manière approfondie le projet de Code des crimes. Il faudrait évaluer les incidences du projet de Code sur les négociations en cours concernant la création d'une cour criminelle internationale. Certains commentaires sur le projet de Code pourraient aider les travaux sur la Cour criminelle internationale. La voie la plus appropriée à suivre serait de transmettre le projet de Code aux gouvernements pour commentaires. Une fois les commentaires faits, il sera possible d'envisager les futures étapes à suivre pour le projet de Code.

M. CHEN SHIQIU (Chine) a déclaré que l'approche générale du projet de Code des crimes reflète les principes fondamentaux de la législation pénale de la communauté internationale. Cependant, certaines difficultés graves ne peuvent être ignorées, car elles sont liées à des aspects fondamentaux de la théorie du droit international et au contenu spécifique de certaines dispositions. Si on les laisse sans solution acceptable, ces problèmes risquent d'empêcher que le Code des crimes ne soit universellement accepté comme instrument juridique.

Ainsi, le principe non bis in idem , largement reconnu par la communauté internationale, est repris à juste titre dans l'article 12 du projet de Code, mais ce même article prévoit des exceptions qui sont contraires à une bonne application de ce principe, a affirmé M. Chen. Le paragraphe 2 a) confère à la Cour criminelle une fonction de révision des jugements nationaux et ce point est l'un des plus contestés du Statut, presque tous les Etats préférant ne pas accorder de pouvoir à la Cour, a-t-il affirmé. Pour la Chine, la Cour doit exclusivement être complémentaire des juridictions nationales et n'a pas le droit de juger les jugements des tribunaux nationaux ou de rejuger un acte criminel déjà jugé par un tribunal national.

Le représentant a également contesté le bien fondé de l'inclusion dans le projet de Code des crimes contre la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé. Bien que ces crimes soient sans cesse plus nombreux et attirent à juste titre l'attention de la communauté internationale, ils ne peuvent, en termes de gravité, être comparés aux autres crimes inclus dans le

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projet de Code, limité aux crimes les plus graves. Leur inclusion modifierait l'équilibre du Code et rendrait incompréhensible le refus d'y inclure des crimes aussi graves que le terrorisme international ou le trafic international de stupéfiants. En outre, ce crime est prévu par la Convention de 1994 sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé, laquelle n'est pas encore entrée en vigueur. De ce fait, ce crime manque de base légale. En outre, il manque de précision: qu'entend-on exactement par "personnel des Nations unies" ou " personnel associé"? a-t-il demandé. Ce crime devrait donc être retiré du projet de Code.

M. Chen a déclaré que certaines dispositions du projet de Code des crimes sont liées à des dispositions du projet de Statut d'une cour criminelle internationale. La Chine n'entend pas considérer les deux textes comme interdépendants. Toutefois, on a pu remarquer des incohérences entre les deux textes. Ainsi, alors que le projet de Code des crimes prévoit qu'un individu ayant commis un acte d'agression sera pénalement responsable de cette agression, la plupart des Etats représentés au Comité préparatoire du Statut de la Cour n'acceptent pas l'inclusion de l'agression dans la champ de compétence de la future Cour, où l'on ne trouve pas de définition précise de l'agression qui soit largement acceptable. Il faudrait parvenir à une certaine cohérence entre les deux instruments.

M. JOHN DE SARAM (Sri Lanka) a déclaré que sa délégation accepte les recommandations de la Commission du droit international sur le projet de Code. La question du projet de Code des crimes, comme celle relative à la Cour criminelle internationale, est délicate, complexe et épineuse. Si un Code clair et consensuel est notre objectif, il est important que cela soit dit clairement quand le projet de Code des crimes sera adopté. Il faudrait qu'il soit clairement établi dans le texte de l'instrument qui établira le Code, dans son préambule peut-être, que son champ d'application puisse être élargi au fil des ans par le biais éventuellement de protocoles facultatifs. Le projet de Code devrait être fondé sur les exigences du droit existant. Il s'est déclaré d'accord avec l'avis formulé par le représentant du Brésil selon lequel les dispositions relatives à l'agression devront être préparées avec un grand soin. Les attaques contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé constituent bien un crime contre l'humanité. Toutefois ces dispositions réclament une définition plus précise, a-t-il dit.

M. JAMES L. KATEKA (République-Unie de Tanzanie) a soutenu l'idée de l'inclusion du Code des crimes dans le Statut d'une cour criminelle internationale. Il a estimé nécessaire d'harmoniser les deux instruments, très liés, et de les adopter en un seul texte. La République-Unie de Tanzanie n'est cependant pas opposée à l'adoption d'une convention distincte mais liée. En revanche, l'adoption du Code sous forme de déclaration de l'Assemblée générale, non contraignante, serait très décevante.

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Le représentant a regretté qu'un certain nombre de crimes aient été supprimés du projet de Code comme, par exemple, le trafic international de stupéfiants. Pourquoi, d'autre part, a-t-on inclus à la liste des crimes de guerre les dommages irréparables infligés à l'environnement, a-t-il demandé. Rien ne dit que la limitation du nombre des crimes assurera une large acceptation du Code. En outre, en dépit du fait que l'agression n'ait pas été définie, la République-Unie de Tanzanie soutient le projet de Code des crimes.

M. ENRIQUE CANDIOTI (Argentine) s'est félicité de l'approbation du texte définitif du projet de Code des crimes. La décision de restreindre la portée du projet de Code des crimes était indispensable pour assurer la viabilité du projet et son caractère universel. Les crimes retenus permettent d'avancer dans la reconnaissance des atrocités commises et à les faire considérer comme telles au niveau international. Les crimes de guerre doivent aussi comprendre ceux commis dans les conflits armés qui n'ont pas un caractère international. Le représentant a appuyé la décision visant à inclure les crimes en temps de paix. Des crimes systématiques contre la population civile peuvent mettre en péril la paix et la stabilité, a-t-il précisé. L'inclusion de crimes contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé est appropriée. L'inclusion du crime d'agression est justifiée mais continue de poser de graves problèmes juridiques. Il serait sans doute prématuré de se prononcer dès maintenant en faveur de la forme juridique future du projet de Code. Le délégué considère qu'un lien existe entre le projet de Code des crimes et le Statut de la Cour criminelle internationale. Il serait peu raisonnable que le Statut de la Cour et le projet de Code aient des définitions différentes pour des crimes identiques.

M. HARTMUT HILLGENBERG (Allemagne) a déclaré que le Code des crimes devrait être adopté sous la forme d'une déclaration de l'Assemblée générale et pourrait alors servir d'inspiration au Comité préparatoire chargé de mettre au point le Statut de la future Cour criminelle internationale. Il s'est réjoui de la limitation du Code à la définition des crimes les plus graves contre la paix et la sécurité de l'humanité. Le représentant a estimé que les articles 11 à 15 du projet de Code accordent des garanties suffisantes pour un procès équitable. Il a souhaité que l'article 8 soit rédigé de manière à ne prévoir, pour une juridiction pénale internationale, qu'un caractère complémentaire. Ce principe de complémentarité, a-t-il rappelé, fait l'objet d'un large consensus au sein du Comité préparatoire sur l'établissement d'une cour criminelle.

M. Hillgenberg a déclaré que le projet de Code devra fixer de manière très précise les règles concernant la responsabilité pénale individuelle. Or, l'article 2 du projet n'est pas assez précis pour être conforme au principe cardinal nullum crimen sine lege. Le principal objectif du Code, a-t-il rappelé, est de poursuive en justice les principaux auteurs des crimes les plus graves. De même, l'article 3 du projet de Code ne prévoit pas de châtiment précis pour les crimes commis, mais renvoie la question du châtiment aux juridictions nationales. Cela va à l'encontre d'un autre grand principe

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du droit pénal, nulla poena sine lege. En outre, ce système risque de rendre très difficile l'application de l'extradition prévue à l'article 9 du projet, notamment pour les Etats qui ont aboli la peine de mort et refusent d'extrader des individus vers des pays où ils pourraient encourir cette peine. Les statuts des Tribunaux pénaux spéciaux sur l'ex-Yougoslavie et le Rwanda apportent une solution en prévoyant que seules des peines d'emprisonnement sont applicables, a déclaré le représentant.

L'agression doit être incluse dans le Code des crimes, a déclaré le représentant, qui s'est réjoui des restrictions apportées par la CDI au nombre des criminels potentiels, désormais limité aux seuls individus qui ont l'autorité ou le pouvoir nécessaire pour commettre le crime d'agression. Mais la CDI s'est totalement abstenue de définir le crime. Si on peut comprendre les difficultés d'une telle définition, le principe nullum crimen sine lege exige qu'on en donne une. Comme le comportement criminel d'un individu indique l'existence d'une agression et que la commission de ce crime est constatée par le Conseil de sécurité, il faudrait que la définition de l'agression tienne compte de la responsabilité du Conseil à cet égard. Il faudrait que la question soit examinée plus avant.

Le représentant a estimé que la définition des crimes contre l'humanité doit comprendre la discrimination raciale, religieuse ou ethnique intitutionnalisée, car ces délits pourraient constituer le premier pas vers le génocide. Il s'est réjoui que les crimes commis contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé soient inclus dans le projet de Code. Le délégué s'est interrogé sur sa possible extension au personnel d'oganisations régionales comme l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l'Organisation des Etats américains (OEA) ou l'Organisation de l'unité africaine (OUA), et sur la nécessité d'inclure toutes les agressions contre ces personnels dans le Code. Il s'est réjoui de l'inclusion par la CDI dans les crimes de guerre, des dommages volontaires et durables infligés à l'environnement.

M. MATHEW JOSEPH (Singapour) a déclaré que la finalisation du projet de Code des crimes est une contribution pertinente et importante à la responsabilité pénale des individus. De la forme qui sera donnée au projet de code dépendra son caractère contraignant et, partant, son efficacité. Il existe un degré de chevauchement important entre les questions soulevées par le projet de code et celles étudiées par le Comité préparatoire pour la création d'une cour criminelle internationale. L'adoption du projet de Code des crimes comme base d'un instrument juridique contraignant doit se faire dans le cadre d'un exercice unique plutôt qu'à l'issue de travaux menés séparément sur la création d'une cour criminelle. Une cohérence est nécessaire dans la définition des crimes en question et dans les principes gouvernant l'établissement de la responsabilité pénale individuelle. Singapour soutient le renvoi du Code au Comité préparatoire avec pour recommandation qu'il serve de base au projet de Statut de la Cour.

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Le représentant a estimé que la définition des crimes, dans la Partie II du Code, constitue une contribution significative au développement et à la codification du droit pénal international. A son avis, les crimes de guerre sont définis clairement. Il s'est félicité de l'inclusion de crimes contre le personnel des Nations Unies. Une définition précise pour savoir comment et quand la responsabilité pénale est applicable à un individu est importante si l'on veut appliquer le principe nullum crimen sine lege. M. Joseph a émis de graves réserves sur l'article en vertu duquel un individu qui a été reconnu coupable ou acquitté par une cour nationale peut être rejugé par un Etat dont ressortait la principale victime. Cela est une dérogation au principe non bis in idem, qui ne peut être acceptable si l'Etat qui a jugé l'individu en question a agi de bonne foi. Toutefois, on peut avoir une position différente si l'Etat qui détient l'accusé n'a pas agi de bonne foi ou l'a délibérément protégé. Le délégué a indiqué que certains aspects du Code requièrent davantage de réflexion. Il a demandé aux délégations d'étudier attentivement lesdits aspects et a souhaité que certaines parties du Code soient adoptées dans le Statut de la Cour criminelle internationale.

M. CONSTANTIN ECONOMIDES (Grèce) a jugé préoccupant que le Code des crimes ne soit pas complet. Certains crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité n'y ont pas été incorporés et la Grèce regrette le caractère restreint du Code. Elle regrette notamment l'absence de la menace d'agression, alors que l'interdiction de cette menace a désormais, selon l'opinion dominante, valeur de jus cogens. Il y a là une lacune importante qu'on devrait essayer de combler dans toute la mesure du possible, a déclaré M. Economides, et ce d'autant plus que, pour d'autres crimes relativement moins graves, le Code va relativement loin, en liant au crime lui-même la complicité, voire la tentative. On devrait inclure à l'article 1 du projet de Code une disposition précisant que ces crimes, bien que ne figurant pas dans le texte du Code, n'en conservent pas moins le caractère de crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité et sont, selon les cas, régis par des conventions internationales particulières et par des normes coutumières ayant même parfois un caractère de jus cogens.

Le représentant a estimé qu'il ne serait ni prudent ni sage de se prononcer formellement sur la suite à donner au projet de Code des crimes avant la fin des travaux du Comité préparatoire sur l'étabissement d'une cour criminelle internationale. Toutefois, le Code constitue une source extrêmement précieuse pour les travaux du Comité préparatoire. Il faudrait donc recommander, de façon urgente, au Comité préparatoire de s'inspirer du Code des crimes et d'incorporer les définitions des crimes dans le texte du projet de Statut de la Cour. Ces définitions constituent en effet l'apport le plus important du Code des crimes, et ce travail a été fort bien fait. La meilleure solution serait de marier dans toute la mesure du possible le texte de Code des crimes et celui de la Cour criminelle internationale.

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M. Economides a ensuite commenté le point du rapport de la CDI relatif à la succession d'Etats et nationalités des personnes physiques et morales, expliquant que la Commission de Venise pour la démocratie et le droit, organe intergouvernemental indépendant relevant du Conseil de l'Europe, a adopté au mois de septembre une déclaration sur le sujet, limitée à la nationalité des personnes physiques. Cette déclaration, a-t-il expliqué, contient trois principes fondamentaux. Le premier affirme de façon catégorique le droit de toute personne d'avoir une nationalité. Le second prévoit, pour les Etats impliqués dans une succession, l'obligation d'éviter les cas d'apatridie. Le troisième, libellé de façon plus souple, oblige les Etats à respecter autant que possible la volonté des personnes concernées par une succession en leur offrant, lorsque certains critères sont réunis, le droit d'opter pour une nationalité autre que celle de l'Etat successeur sur le territoire duquel elles habitent.

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