9861e séance – matin & après-midi
CS/15998

Conseil de sécurité: la pratique du multilatéralisme et la réforme de la gouvernance mondiale, au menu d’un débat public au niveau ministériel

Le Conseil de sécurité a tenu, aujourd’hui, un débat public au niveau ministériel sur le thème « Maintien de la paix et de la sécurité internationales: pratiquer le multilatéralisme, réformer et améliorer la gouvernance mondiale ».  La Chine en avait fait l’événement phare de sa présidence en février et c’est en toute logique que son chef de la diplomatie, M. Wang Yi, a présidé aux échanges, plaidant pour une représentation plus juste et équitable des pays en développement dans les structures de gouvernance, à commencer par le Conseil de sécurité.  Une position appuyée par l’ensemble des pays du Sud et par le Secrétaire général de l’ONU lui-même, pour qui le Pacte pour l’avenir donne l’élan nécessaire à ces réformes. 

Établissant d’emblée un lien entre la création de l’ONU, voilà 80 ans, et « la prévention d’une troisième guerre mondiale », M. António Guterres a reconnu que « huit décennies, c’est long », l’Organisation ayant aujourd’hui besoin d’une « refonte » de son « logiciel » en matière de coopération internationale, mais aussi de représentation, d’aide apportée aux pays en développement et d’opérations de maintien de la paix. 

Alors que le monde est en butte à la multiplication des conflits, au creusement des inégalités, à la montée de la pauvreté, à la persistance du terrorisme et de l’extrémisme violent, à une impunité croissante et à l’essor périlleux de technologies émergentes, le Pacte pour l’avenir permet, selon lui, d’envisager un rétablissement de la confiance dans le multilatéralisme, notamment au travers des solutions concrètes qu’il propose pour renforcer les mécanismes de paix. 

Refléter la réalité du monde d’aujourd’hui 

Outre son appel à s’attaquer aux causes profondes des conflits, à relancer les objectifs de développement durable (ODD) et à réformer l’architecture financière mondiale afin de représenter de manière plus équitable les besoins des pays en développement, le Pacte reconnaît également que le Conseil de sécurité doit « refléter le monde d’aujourd’hui, et non celui d’il y a 80 ans », a souligné le Chef de l’ONU, exprimant le souhait d’un Conseil élargi et plus représentatif des réalités géopolitiques de notre temps.

« Les structures de gouvernance mondiale sont inadéquates », a abondé le Ministre des affaires étrangères de la Chine, aux yeux duquel il est inacceptable qu’une poignée de pays s’en arrogent le monopole alors que les pays du Sud occupent une place croissante sur la scène internationale.  « Il faut accroître la représentation des pays en développement dans ces structures et rectifier l’injustice de l’histoire », a martelé M. Wang en insistant sur le droit qu’ont tous les États de participer aux prises de décisions sur un pied d’égalité.  Cela suppose de respecter leur souveraineté et le principe de non-ingérence, de se conformer au droit international et de rejeter le « deux poids, deux mesures », a-t-il souligné, avant d’appeler à transformer le Pacte pour l’avenir en « actions concrètes », singulièrement au Moyen-Orient, où la solution des deux États doit être « préservée ». 

Sur la même ligne, le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Pakistan a fait valoir qu’aucun pays ne doit se considérer comme supérieur aux autres.  Prônant une politique de « tolérance zéro » contre ceux qui « abusent de la Charte des Nations Unies », il a appelé de ses vœux un Conseil de sécurité plus démocratique et équitable, au sein duquel les pays en développement seraient dûment représentés.  Il a cependant averti qu’accroître le nombre des sièges permanents ne règlerait en rien la paralysie actuelle de cet organe. 

Une représentation équitable des pays du Sud

Sans une réforme prévoyant une représentation équitable des pays du Sud, et notamment africains, la performance et la légitimité du Conseil s’en trouveront remises en cause, a soutenu à son tour la Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Sierra Leone.  Mais il importe aussi de remédier à l’exclusion de l’Afrique par les banques de développement multilatérales, « conséquence et héritage du colonialisme », a-t-elle ajouté, avant de réclamer, à l’instar de l’Union africaine, des réparations pour les peuples d’ascendance africaine. 

Même son de cloche de la part de la Secrétaire d’État en charge des affaires africaines auprès du Ministre des affaires étrangères de l’Algérie, qui a estimé que la réforme des institutions multilatérales « ne peut plus attendre ».  Cela passera par une réparation de « l’injustice historique faite à l’Afrique » au sein du Conseil de sécurité, mais aussi par un raffermissement du rôle et des prérogatives de l’Assemblée générale, a-t-elle appuyé, jugeant crucial de restaurer l’équilibre entre les organes de l’ONU.  Cela vaut aussi pour la Cour internationale de Justice (CIJ), a poursuivi la responsable gouvernementale en exhortant l’organe judiciaire onusien à rendre justice au peuple palestinien, et notamment aux Gazaouites menacés de déplacements forcés.

Observant pour sa part un « déplacement des centres de pouvoir vers le Sud », la Fédération de Russie s’est elle aussi prononcée pour une adaptation des institutions de gouvernance mondiale aux « réalités modernes ».  Favorable à une augmentation de la représentation des États africains, asiatiques et latino-américains au sein du Conseil, dans le cadre d’une réforme de l’organe, elle a estimé que la domination qu’y exercent les pays occidentaux, « en tant que gardiens des métropoles coloniales », devrait être « reléguée aux oubliettes ».

La délégation russe a d’autre part constaté que la méfiance croissante à l’égard du système financier international favorise l’intensification des liens régionaux et la formation de mécanismes économiques multilatéraux « alternatifs à ceux contrôlés et utilisés par l’Occident pour ses propres intérêts égoïstes ».  Selon elle, les organisations interrégionales et leurs partenaires ont le potentiel de devenir les principales institutions de régulation d’un ordre mondial multipolaire, conformément au « concept de grand partenariat eurasien proposé par le Président Vladimir Putin ».

Défense du système multilatéral avec l’ONU en son cœur 

Face à cette vision d’un nouvel ordre multilatéral, la plupart des pays occidentaux ont opposé la volonté de réformer et d’améliorer le système actuel, avec l’ONU en son cœur.  La Grèce a insisté sur la nécessité de « revenir aux fondamentaux » de la Charte des Nations Unies, tout en appelant à préserver les droits et libertés fondamentaux, la démocratie et l’état de droit « dans un monde de plus en plus autoritaire, dangereux et contesté, où la dignité humaine est progressivement mise à mal et où la guerre se répand à grande échelle ».  Le Danemark a dit soutenir fermement ce système et tout ce que les États Membres ont accompli depuis 1945, « aussi imparfait soit-il ».

Pour le Royaume-Uni, l’ONU doit défendre la Charte des Nations Unies dans le dossier ukrainien, « meilleur gage d’un maintien efficace de la paix et de la sécurité internationales » et redoubler d’efforts pour trouver de nouvelles solutions aux défis émergents.  Le premier pas dans cette direction est de réussir les prochaines réunions internationales de ce quatre-vingtième anniversaire, notamment le sommet Beijing+30 en mars, la Conférence sur les océans en juin, le Forum sur le suivi du financement du développement en juillet, le Sommet mondial pour le développement social et la COP30 en novembre.  « Leur réussite sera un progrès essentiel et assurera la réputation de l’ONU comme notre maison multilatérale », a argué la délégation. 

Dans le même ordre d’idées, la France a appelé à poursuivre l’agenda international en matière de climat et de biodiversité, avant d’inviter les États Membres à se « remettre en ordre de bataille pour traduire en actes l’Accord de Paris ».  Tout en réaffirmant sa foi dans la « méthode ONU » et dans le Pacte pour l’avenir destiné à revitaliser le multilatéralisme, elle a défendu le principe d’une réforme du Conseil de sécurité prévoyant l’octroi à l’Afrique de deux sièges permanents dotés du droit de veto.  Elle a cependant rappelé qu’elle porte depuis 2015, avec le Mexique, une initiative d’encadrement du veto en cas d’atrocités de masse à laquelle 106 États ont déjà apporté leur soutien.

De son côté, la République de Corée a reconnu qu’il est souvent difficile d’éviter l’impasse sur des questions mettant en opposition des membres permanents.  Il existe néanmoins d’autres domaines que le Conseil peut explorer pour remplir son mandat et renforcer sa position institutionnelle, a-t-elle assuré, considérant par exemple que l’évolution rapide de l’intelligence artificielle doit faire l’objet d’une attention accrue de l’organe, cette technologie pouvant être exploitée par des acteurs irresponsables comme la République populaire démocratique de Corée (RPDC). 

Position discordante des États-Unis 

L’unanimité occidentale quant au rôle de l’ONU dans le cadre d’un multilatéralisme revitalisé a été rompue par les États-Unis, qui ont regretté que l’Organisation se soit éloignée de ses missions principales depuis sa création au sortir de la Seconde Guerre mondiale.  À l’appui de ce réquisitoire, ils ont cité un « biais profondément anti-israélien qui ne fait que croître depuis l’attaque brutale lancée par le Hamas le 7 octobre 2023 », un Conseil des droits de l’homme qui « protège des auteurs de violations graves » et un Conseil de sécurité paralysé par la Chine et la Fédération de Russie, « deux fauteurs de troubles qui disposent du droit de veto ». 

Dénonçant par ailleurs l’instrumentalisation des juridictions internationales à des fins politiques, dont la CIJ, « manipulée par l’Afrique du Sud pour accuser abusivement Israël de génocide », la délégation américaine a confirmé que son pays est en train de réexaminer la nature de l’appui qu’il apporte à l’ONU: « Nous essaierons de voir si les mesures prises au sein de cette organisation sont dans l’intérêt des États-Unis et si des réformes sont possibles ».  Dans cet esprit, les États-Unis comptent passer en revue les activités d’entités onusiennes telles que l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), qui, selon eux, « cultive de longue date l’antisémitisme ». 

Interventions des États et organisations non membres

L’inquiétude devant les menaces pesant sur le multilatéralisme et certains développements géopolitiques récents ont marqué les interventions des nombreuses délégations à avoir pris la parole après les membres du Conseil.  Afin de remédier aux défis, elles ont appelé de leurs vœux une réforme de l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, ainsi qu’une opérationnalisation du Pacte pour l’avenir récemment adopté.

À l’approche du quatre-vingtième anniversaire de la création de l’ONU, la Pologne a dit craindre que certains États cherchent en effet à renverser l’ordre international, à rétablir des sphères d’influence et à ressusciter d’anciens empires.  Face à une conjoncture mondiale qu’il a qualifiée de « dangereuse », le Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Arabie saoudite a aussi jugé impératif de promouvoir la capacité de l’ordre international à préserver la paix et la sécurité internationales. 

De son côté, le Ministre des affaires étrangères de l’Ouganda a cité Kofi Annan, qui dénonçait « la tendance de certains Américains à traiter l’ONU comme un multilatéralisme à la carte où on prend ce qui nous arrange et rejette ce qui nous déplaît ».  « Quand vous vous retirez de l’Accord de Paris ou de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), vous condamnez le multilatéralisme », a déclaré le Ministre ougandais.

Les États-Unis ont également été pris pour cible par le Venezuela et la Ministre des affaires étrangères de la Bolivie, qui a dénoncé l’utilisation du veto par ce pays garantissant l’impunité d’Israël face au génocide en Palestine.  Même son de cloche du côté du Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba, qui a indiqué que les États-Unis, en se retirant de certains organismes internationaux, méprisent leurs activités importantes.  « Devant cette situation difficile, il faut réaffirmer le rôle de l’ONU en tant que principal rempart contre les menaces et les tentatives de saper la coopération et le dialogue internationaux. »

L’Union européenne a de son côté fermement condamné la guerre d’agression russe.  « Notre monde est entré dans une nouvelle période de turbulences et de changements », a reconnu l’Ukraine, en regrettant que l’ONU n’ait pas réussi à stopper la guerre d’agression de la Russie.  Au-delà de cette situation, nous sommes confrontés aux tentatives de saper la crédibilité et l’efficacité des principales institutions multilatérales « de l’intérieur », a continué ce pays.

« Nulle part elles ne sont plus évidentes que dans cette salle, où un État qui mène des guerres d’agression bénéficie du privilège d’un siège permanent et d’un droit de veto ».  Le dépeçage du multilatéralisme fait planer la menace de nouvelles rivalités, de barrières aux idées et aux produits, d’érosion des acquis fondamentaux, l’histoire le démontre, a déclaré de son côté la Suisse.  Elle a rappelé qu’aucun pays, aussi grand soit-il, n’est en mesure d’affronter seul les défis d’un monde de plus en plus interconnecté.  La Suède a estimé que les attaques actuelles contre l’égalité de genre sont très préoccupantes.

L’intervention de la Hongrie a, en revanche, nettement tranché avec la tonalité inquiète des autres délégations.  Son Ministre des affaires étrangères s’est en effet félicité du changement radical opéré depuis l’élection de M. Donald Trump à la tête des États-Unis.  « L’Occident a un nouveau leader, animé de bon sens, « antiwoke » et qui défend la liberté ».  Il a rappelé que son pays défend la chrétienté, lutte contre l’immigration et pourfend ces idéologies « woke » et libérales qui ont empoisonné les relations internationales.

Il a indiqué que le « camp de la paix » a été élu aux États-Unis et s’est félicité de l’ouverture de pourparlers entre ce pays et la Russie.  De bonnes relations russo-américaines ne peuvent être que positives en vue de l’instauration de la paix en Ukraine, a dit le Ministre hongrois, en rappelant la position constante de son pays en faveur d’un tel rapprochement.  Il a par ailleurs invité l’ONU à s’adapter à cette nouvelle réalité.

Demandes insistantes pour une réforme du Conseil

Les délégations ont unanimement réclamé une réforme du Conseil de sécurité, afin de le rendre responsable, transparent, représentatif et inclusif.  Un usage restrictif et responsable du veto doit empêcher que des atrocités ne soient commises sous couvert de blocages au Conseil, a déclaré la Suisse, appuyée par Singapour ou encore l’Indonésie.  « La règle selon laquelle une partie à un différend s’abstient de voter doit être réaffirmée et suivie dès aujourd’hui », a continué la Suisse, tandis que la Bolivie a demandé que les États qui violent les droits humains et le droit international soient suspendus du Conseil.

« L’élargissement de l’organe et l’utilisation arbitraire du droit de veto par ses membres permanents sont les questions les plus urgentes à traiter », a déclaré l’Arabie saoudite, en jugeant que la crise de confiance que connaît l’ONU nécessite une réévaluation de l’action multilatérale pour en accroître l’efficacité. Le Japon a estimé que cette réforme, plus urgente que jamais, doit être réalisée maintenant.  Ce pays a dit attendre la présentation par le Groupe des États africains d’un modèle consolidé de réforme et espéré que les négociations commenceront rapidement. 

L’Ouganda a par ailleurs rappelé la demande de l’Afrique de deux membres permanents et de deux nouveaux membres non permanents.  Les négociations doivent commencer dès que possible, afin que les régions sous-représentées et les principaux contributeurs à la paix et à la sécurité internationales aient enfin un siège permanent à la table du Conseil, a déclaré l’Allemagne, appuyée par l’Afrique du Sud.

Singapour ou encore la Thaïlande ont souhaité une coopération plus étroite du Conseil avec l’Assemblée générale et le Conseil économique et social, tandis que l’Éthiopie a demandé une réforme de l’architecture financière internationale.  « La réforme de la gouvernance mondiale ne sera jamais possible sans une réforme réelle et urgente de l’architecture financière internationale, qui est devenue un obstacle au développement économique global et à la réduction du fossé entre Nord et Sud », a déclaré l’Égypte, au nom du Groupe des États africains.

Ce pays, également favorable à une réforme du Conseil, a espéré que la prochaine Conférence internationale sur le financement du développement en Espagne permettra de concrétiser certaines des réformes attendues.  De son côté, la Suède a appelé à préserver l’intégrité de la Cour internationale de Justice et de la Cour pénale internationale, tandis que le Brésil et la Thaïlande ont souligné l’importance des organisations régionales.  « Les groupes comme le G20 et les BRICS peuvent aussi aider dans des domaines thématiques clefs », a déclaré le délégué brésilien.

Concrétisation du Pacte pour l’avenir

Les délégations, à l’instar de la Suède et de l’Allemagne, ont été nombreuses à demander que le Pacte pour l’avenir, adopté par l’Assemblée générale en septembre dernier, soit traduit dans les faits.  S’agissant de la réforme tant attendue du Conseil de sécurité, ce Pacte prévoit des engagements, a déclaré l’AllemagneSingapour ou encore le Kazakhstan ont appelé à une opérationnalisation des éléments clefs du Pacte pour l’avenir, y compris un engagement renouvelé en faveur du désarmement et de la lutte contre la criminalité organisée.  « Il est capital d’appliquer ce Pacte », a déclaré la Slovaquie, tandis que l’Union européenne a indiqué qu’une telle application permettra une revitalisation de l’ONU.

Enfin, des pays ont fait preuve d’un certain optimisme, à l’instar de la Roumanie qui a estimé que l’ONU n’est en rien « démodée ».  Ce pays a souligné deux récentes réalisations clefs du multilatéralisme, à savoir l’Accord « BBNJ » (sur la protection de la haute mer et de la biodiversité marine) et le lancement des négociations en vue d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  La Roumanie, comme l’Ukraine, a par ailleurs mentionné la présentation à l’Assemblée générale le 24 février prochain d’un projet de résolution sur la promotion d’une paix juste et durable en Ukraine sur la base du respect du droit international.

 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES (S/2025/78)

Déclaration luminaire

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a commencé par rappeler que cette année marque le quatre-vingtième anniversaire de l’Organisation, fruit de l’engagement pris à l’échelle mondiale de préserver les générations futures du fléau de la guerre.  « Huit décennies plus tard, on peut établir un lien direct entre la création de l’Organisation des Nations Unies et la prévention d’une troisième guerre mondiale », a-t-il affirmé, observant que l’ONU reste un lieu de rencontre unique en son genre et indispensable à la promotion de la paix, du développement durable et des droits humains.  « Mais huit décennies, c’est long », a concédé M. Guterres, avant de plaider pour une refonte du « logiciel » de la coopération internationale, mais aussi de la représentation, de l’aide apportée aux pays en développement et des opérations de paix de l’ONU. 

Pour le Chef de l’Organisation, la solidarité mondiale et des solutions globales sont d’autant plus nécessaires que la crise climatique fait rage, les inégalités se creusent, la pauvreté augmente et la paix est de plus en plus hors de portée.  De surcroît, le terrorisme et l’extrémisme violent persistent, une culture de l’impunité se répand, la menace d’une guerre nucléaire demeure présente et l’essor des technologies émergentes telles que l’intelligence artificielle s’accompagne d’un risque d’affaiblissement, voire de remplacement de la pensée humaine. 

Face à ces problèmes mondiaux, le Secrétaire général a mis en avant le Pacte pour l’avenir, adopté en septembre dernier par les États Membres pour renforcer la gouvernance mondiale et rétablir la confiance dans le multilatéralisme. Le Pacte, a-t-il rappelé, propose des solutions concrètes pour renforcer les mécanismes de paix.  Il vise à renforcer la coordination avec les organisations régionales et à garantir la pleine participation des femmes, des jeunes et des groupes marginalisés aux processus de paix.  Il appelle au renforcement de la Commission de consolidation de la paix afin de mobiliser le soutien politique et financier nécessaire à la mise en œuvre des stratégies de prévention et de consolidation de la paix pilotées par les pays. 

Le Pacte contient également le premier accord multilatéral sur le désarmement nucléaire conclu depuis plus de 10 ans, a fait observer M. Guterres.  Il présente en outre de nouvelles stratégies visant à mettre fin à l’emploi d’armes chimiques et biologiques, ainsi que des mesures revitalisées pour prévenir une course aux armements dans l’espace et faire avancer les débats sur les armes létales autonomes.  Il exhorte les États Membres à respecter les engagements qu’ils ont pris en vertu des principes consacrés par la Charte des Nations Unies.  Il réaffirme leur volonté inébranlable à respecter le droit international et à privilégier le règlement pacifique des différends par le dialogue, tout en reconnaissant le rôle de l’ONU dans la diplomatie préventive. 

« Mais le Pacte va encore plus loin pour la paix », notamment en appelant à s’attaquer aux causes profondes des conflits, à relancer les objectifs de développement durable (ODD) et à réformer l’architecture financière mondiale afin de représenter de manière plus équitable les besoins des pays en développement, a poursuivi M. Guterres.  « Le Pacte reconnaît également que le Conseil de sécurité doit refléter le monde d’aujourd’hui, et non celui d’il y a 80 ans », a-t-il souligné, exprimant le souhait d’un Conseil élargi et plus représentatif des réalités géopolitiques d’aujourd’hui.  « Nous devons aussi continuer à améliorer ses méthodes de travail afin de le rendre plus inclusif, plus transparent, plus efficace, plus démocratique et plus responsable », a ajouté le Chef de l’ONU, pour qui le moment est venu de tirer parti de l’élan donné par le Pacte pour l’avenir pour faire avancer les négociations intergouvernementales. 

Exhortant les membres du Conseil à surmonter « les divisions qui bloquent une action efficace en faveur de la paix », il a noté que ces mêmes membres ont montré qu’il était possible de trouver un terrain d’entente sur le déploiement d’opérations de maintien de la paix, l’adoption de résolutions vitales sur l’aide humanitaire, la reconnaissance des problèmes de sécurité rencontrés par les femmes et les jeunes ou encore le financement des opérations de soutien à la paix menées par l’Union africaine (UA) à travers des contributions obligatoires.  « Même aux heures les plus sombres de la guerre froide, la prise de décisions collégiales et le dialogue vif entretenu au Conseil de sécurité ont permis de préserver un système de sécurité collective, certes imparfait, mais fonctionnel », a-t-il insisté, invitant les membres de l’organe à « retrouver cet esprit » et à « bâtir les consensus nécessaires pour instaurer la paix dont tous les peuples ont tant besoin ». 

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