Conseil de sécurité: en février, la présidence chinoise mettra l’accent sur le multilatéralisme et la gouvernance mondiale, sur fond de tensions accrues
Présidente du Conseil de sécurité en février, la Chine prévoit de tenir un débat public de haut niveau sur le thème « pratiquer le multilatéralisme, réformer et améliorer la gouvernance mondiale », dans le cadre du point de l’ordre du jour « Maintien de la paix et de la sécurité internationales », a annoncé son Représentant permanent, M. Fu Cong, lors d’une conférence de presse organisée cet après-midi au Siège de l’ONU.
Cet événement phare de la présidence chinoise aura lieu le 18 février en présence du Ministre chinois des affaires étrangères, M. Wang Yi, qui présidera la réunion, a indiqué l’Ambassadeur, précisant que tous les pays, membres ou non du Conseil, sont conviés à y participer au plus haut niveau.
« Alors que nous marquons cette année le quatre-vingtième anniversaire de la création de l’ONU et que le monde entre dans une période de fortes turbulences, ce débat public vise à encourager les pays à revisiter les aspirations originelles de l’Organisation, à réaffirmer l’engagement en faveur du multilatéralisme et du rôle important que joue l’ONU, y compris le Conseil de sécurité, et à explorer les moyens de réformer et d’améliorer la gouvernance mondiale », a précisé M. Fu.
Cette approche reflète les aspirations du monde du Sud, a-t-il expliqué, appelant à la solidarité et à la coopération plutôt qu’à la division et à la confrontation. « Nous attendons que les pays confirment leur engagement en ce sens afin que le monde progresse dans la bonne direction », a-t-il insisté.
Au-delà de cette problématique, la situation au Moyen-Orient restera la priorité du Conseil ce mois-ci. Des séances d’information sur la Syrie, le Yémen et la question palestinienne se tiendront respectivement les 12, 13 et 25 février.
Le Conseil demeurera particulièrement vigilant en ce qui concerne la situation dans la bande de Gaza, a souligné le Représentant permanent de la Chine. Il devra s’assurer que l’accord de cessez-le-feu est mis en œuvre entièrement et effectivement, et que l’accès humanitaire reste ouvert et sans entrave. « La phase 1 de l’accord arrivant à son terme à la fin du mois de février, il incombe à la communauté internationale de promouvoir un cessez-le-feu complet et permanent, et de s’assurer qu’il sera ininterrompu et irréversible », a-t-il dit.
M. Fu a d’autre part estimé que la situation en Cisjordanie « mérite toute l’attention du Conseil », singulièrement après les récentes attaques menées par l’armée israélienne contre des quartiers résidentiels et un camp de réfugiés à Jénine. Indiquant que l’Observateur permanent de la Palestine, M. Riyad H. Mansour, a écrit au Conseil pour lui demander d’agir rapidement à ce sujet, il a fait état de consultations entre les membres de l’organe en vue d’une réunion consacrée à cette situation.
Il a ajouté que le Conseil continuera de prêter attention aux questions en lien avec l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et, plus largement, avec la situation humanitaire dans le Territoire palestinien occupé.
S’agissant de la Syrie, où la situation reste « critique et fragile », il a affirmé que la priorité du Conseil est d’aider le pays à maintenir son unité, rétablir sa stabilité et entamer une transition politique inclusive et crédible, conformément à la résolution 2254 (2015). Il s’agit également de tout faire pour empêcher une résurgence du terrorisme et de l’extrémisme en Syrie et dans la région, a ajouté l’Ambassadeur.
L’Afrique aura, elle aussi, une large place dans le programme de ce mois. Outre les séances d’information sur la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), le 5 février, la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), le 19, et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), le 20, le Conseil continuera de suivre étroitement la situation en République démocratique du Congo (RDC) en vue de faire cesser les hostilités et d’apaiser les tensions, a expliqué M. Fu.
Assurant que l’opinion commune des membres du Conseil est qu’il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, il a fait état d’un projet de résolution circulant entre les délégations qui devrait être examiné en séance de consultations. Selon lui, il est essentiel de réaffirmer que l’intégrité territoriale de la RDC doit être respectée, ce qui implique le retrait du M23 et de la Force de défense rwandaise des territoires qu’ils occupent. Il a en outre plaidé pour que les parties répondent positivement aux efforts de médiation et s’impliquent davantage dans la feuille de route de Luanda et le processus de Nairobi.
Le Conseil se prononcera par ailleurs, le 12 février, sur le renouvellement du mandat du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan (Comité 1591), avant de se réunir le 26 pour entendre un exposé sur la situation dans ce pays, conformément à la résolution 2715 (2023). Le 10 février, il se prononcera également sur le renouvellement du régime de sanctions contre les Chabab en Somalie et du mandat du Groupe d’experts assistant le Comité du Conseil de sécurité faisant suite à la résolution 2713 (2023) concernant les Chabab (Comité 2713).
Parmi les autres séances programmées en février figurent une présentation du rapport du Secrétaire général sur la menace que représente l’EIIL (Daech) pour la paix et la sécurité internationales, le 10, et l’exposé annuel sur les commissaires de police de l’ONU dans le cadre des opérations de maintien de la paix, le 27.
Enfin, le 24 février marquant le troisième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le Conseil pourrait se réunir ce jour à la demande de plusieurs membres, a noté l’Ambassadeur. « En tant que Présidente, la Chine est tenue de prévoir des arrangements en fonction des règles de procédure », a-t-il expliqué, prévoyant d’ores et déjà que la délégation russe proposera « une contre-réunion ». Dans le contexte actuel, il s’est dit heureux de voir qu’il existe « une volonté de négocier des deux côtés » et a formé le vœu que « cela pourra se matérialiser bientôt ».
Interrogé par la presse sur des sujets d’actualité, M. Fu s’est élevé contre les tarifs douaniers imposés par le Gouvernement Trump à son pays, promettant une réplique et une plainte contre les États-Unis auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). « Les guerres commerciales ne font pas de gagnants », a-t-il déclaré, qualifiant cette mesure d’« injustifiée ». Il a également démenti tout contrôle par la Chine du canal de Panama, avant de dénoncer la « campagne de dénigrement » orchestrée sur ce dossier par Washington.
De l’avis de l’Ambassadeur, la Chine et les États-Unis ont « beaucoup d’intérêts en commun » et peuvent coopérer, notamment sur des questions telles que la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale, l’action climatique ou encore l’intelligence artificielle. « S’il y a fragmentation, cela augmentera les risques et réduira les bénéfices », a-t-il averti, se disant prêt à travailler sur ces sujets avec sa nouvelle homologue américaine. « Malgré nos différences politiques, nous devons être professionnels car notre mission est de construire des ponts », a conclu M. Fu, pour qui « cibler la Chine n’est pas la bonne voie pour avancer ».