En cours au Siège de l'ONU

SC/15928

Déclaration publique de la Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés

Après l’examen du huitième rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé au Soudan (S/2024/443) et l’adoption de conclusions sur ce rapport, le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de sa présidente, les messages suivants: 

À toutes les parties au conflit armé au Soudan: 

  • Condamne fermement toutes les violations et toutes les atteintes qui continuent d’être commises sur la personne d’enfants par toutes les parties au conflit au Soudan, notant avec une profonde inquiétude l’augmentation alarmante du nombre de violations confirmées entre 2022 et 2023, depuis le déclenchement des hostilités; exhorte toutes les parties au conflit à prévenir et à faire cesser immédiatement toutes les violations et atteintes que pourraient subir des enfants, telles que leur enrôlement et leur utilisation, les meurtres et atteintes à l’intégrité physique, les enlèvements, les viols et autres formes de violence sexuelle, les attaques contre des écoles et des hôpitaux, et le refus d’accès humanitaire, et exhorte les parties à s’acquitter des obligations que leur impose le droit international applicable, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits humains;  
  • Exprime sa préoccupation quant aux conséquences dramatiques pour les enfants de l’escalade rapide des hostilités au Soudan depuis avril 2023; note avec inquiétude que bon nombre des institutions créées pour protéger les enfants et assurer le suivi de la mise en œuvre des lois sur la protection de l’enfance ont cessé leurs activités ou opèrent avec des moyens extrêmement limités dans une petite partie du pays, ce qui empêche encore plus les enfants de signaler des atteintes et des violations de leurs droits; se déclare préoccupé par le fait que 14 millions d’enfants privés d’accès à la nourriture, à un abri, à l’électricité, à l’éducation et aux soins de santé ainsi qu’à l’eau potable ont besoin d’une aide humanitaire et d’une assistance en matière de protection; demande à toutes les parties de respecter les obligations que leur fait le droit international, conformément à la résolution 2736 (2024) du Conseil de sécurité, et de prendre toutes les précautions possibles pour épargner les biens de caractère civil, en particulier les biens cruciaux à la prestation de services essentiels à la population civile;  
  • Demande à toutes les parties de poursuivre l’application de ses conclusions précédentes concernant le Soudan (S/AC.51/2022/6);  
  • Se déclare gravement préoccupé par les énormes difficultés d’accès que rencontre l’équipe spéciale de pays (surveillance et information) pour le Soudan, et notamment les difficultés d’accès aux zones touchées par le conflit et l’insécurité dans ces zones, les restrictions d’accès imposées par les parties au conflit et les coupures prolongées des communications dans certaines zones, qui ont rendu difficile la confirmation des cas de violations et d’atteintes commises sur la personne d’enfants, et par le fait que les informations qui figurent dans le rapport du Secrétaire général, comme cela y est indiqué, ne reflètent pas toute l’étendue des violations et des atteintes commises sur la personne d’enfants au Soudan, et, à cet égard, exhorte les parties au conflit et les pays voisins à garantir au personnel des Nations Unies un accès sûr et sans entrave aux territoires sous leur contrôle, y compris à des fins de suivi et d’information;  
  • Souligne qu’il importe de réprimer toutes les violations et atteintes commises contre des enfants en temps de conflit armé, que tous leurs auteurs doivent être traduits en justice sans retard indu pour qu’ils répondent de leurs actes, notamment par la conduite systématique et diligente d’enquêtes sur toutes les allégations de violations et d’atteintes commises sur la personne d’enfants et, s’il y a lieu, l’ouverture de poursuites judiciaires et l’établissement de la culpabilité des auteurs, et que toutes les victimes doivent avoir accès à des services de protection de l’enfance complets et non discriminatoires qui tiennent compte des questions de genre, soient adaptés à l’âge des bénéficiaires et incluent les enfants en situation de handicap, y compris des services psychosociaux et de santé, notamment de santé sexuelle et reproductive, un accès à l’éducation et à la formation professionnelle, une aide aux moyens de subsistance et à la réinsertion sociale et un accès à la justice et à des services spécialisés pour les enfants victimes ou rescapés de violences sexuelles ou fondées sur le genre; il s’agit notamment de renforcer les capacités judiciaires et policières en reprenant les activités menées à l’échelle nationale pour appliquer et renforcer la loi sur l’enfance existante;  
  • Insiste sur le fait que, lors de la planification et de l’exécution des mesures en faveur des enfants dans les situations de conflit armé, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale et les vulnérabilités et les besoins particuliers des garçons et des filles, ainsi que ceux des enfants en situation de handicap ou déplacés, doivent être dûment pris en compte;  
  • Condamne fermement l’augmentation des cas d’enrôlement et d’utilisation d’enfants, parfois âgés de seulement 7 ans, pour différentes missions, y compris comme combattants, notamment pour garder des points de contrôle, ou dans des rôles de soutien; exhorte toutes les parties à adopter des procédures de sélection et d’évaluation de l’âge des recrues et à veiller à ce qu’elles soient dûment appliquées, et à libérer immédiatement et sans condition préalable tous les enfants se trouvant dans leurs rangs et à les remettre aux acteurs civils de la protection de l’enfance, en veillant à ce que ces enfants soient avant tout traités comme des victimes, et demande aux autorités soudanaises de continuer d’appliquer les instructions permanentes de 2018 relatives à la libération et au transfert d’enfants associés à des groupes armés, et à toutes les parties au conflit de prévenir et de faire cesser l’enrôlement et l’utilisation d’enfants, y compris le réenrôlement d’enfants, conformément au droit international humanitaire et au droit international des droits humains, en particulier la Convention relative aux droits de l’enfant et le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés qui lui est associé, auxquels le Soudan est un État partie;  
  • Constate avec préoccupation que des enfants sont privés de liberté au motif de leur association réelle ou supposée avec des groupes armés et pour des raisons de sécurité nationale, se félicite à cet égard de la libération des enfants en détention par le Conseil de l’État de Kassala pour la protection de l’enfance et la libération des 47 enfants qui étaient aux mains des Forces d’appui rapide au Darfour occidental grâce à une intervention de l’équipe spéciale de pays, et souligne qu’il importe de traiter les enfants associés à des groupes armés, y compris ceux qui auraient commis des crimes, avant tout comme des victimes qui ont été recrutées et utilisées, de garantir leur pleine réintégration par des programmes de réintégration familiale et locale tenant compte des questions de genre ainsi que leur accès à des soins de santé, y compris la santé mentale et psychosociale, et à des programmes éducatifs, guidés par les Principes directeurs relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés (Principes de Paris), auxquels le Soudan a souscrit, et le Plan stratégique national de désarmement, de démobilisation et de réintégration pour les enfants associés par le passé à des mouvements armés, de sensibiliser les populations et de travailler avec elles en vue de prévenir la stigmatisation de ces enfants et de faciliter leur retour et leur réintégration, et de faire en sorte qu’en cas de poursuites engagées contre des enfants qui auraient commis des crimes, les droits et l’intérêt supérieur de ces derniers soient respectés;  
  • Se déclare profondément préoccupé par le nombre élevé d’enfants tués ou mutilés, notamment du fait de tirs croisés, de l’utilisation d’armes explosives dans des zones habitées, de bombardements aériens, de tirs d’obus et d’engins explosifs, en particulier dans le contexte des violences intercommunautaires et des combats entre les parties au conflit au niveau local entre une multiplicité d’acteurs; demande à toutes les parties de respecter les obligations que leur impose le droit international, de faire cesser les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique des enfants et de mettre fin immédiatement et définitivement à l’emploi sans discernement d’engins explosifs, y compris dans les zones habitées, et demande instamment à l’ensemble des parties de prendre immédiatement toutes les mesures de prévention et d’atténuation nécessaires pour prévenir et réduire au minimum les atteintes et mieux protéger les enfants pendant les opérations militaires, notamment en s’abstenant d’utiliser des engins explosifs qui tuent ou blessent des enfants et en s’abstenant d’utiliser des armes explosives dans les zones habitées; demande au Gouvernement de s’acquitter pleinement des obligations que lui impose la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction;  
  • Se déclare vivement préoccupé par le nombre élevé de viols et d’autres formes de violence sexuelle commis contre des enfants, notant que la majorité des cas confirmés ont été attribués aux Forces d’appui rapide, et prend acte du fait que les violences sexuelles ne sont pas toujours signalées, par crainte des représailles, de la stigmatisation, de l’impunité, du blâme et de la mise à l’écart et à cause d’obstacles à l’accès aux services; exhorte toutes les parties à prendre immédiatement des mesures concrètes pour faire cesser les viols et les autres formes de violence sexuelle ou fondée sur le genre perpétrés par des membres de leurs groupes respectifs sur la personne d’enfants, et souligne que les auteurs de tels actes doivent en répondre et qu’il importe de fournir aux personnes victimes ou rescapées de violences sexuelles liées au conflit des services spécialisés complets et non discriminatoires, notamment dans le domaine de la santé, y compris la santé mentale et psychosociale et la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’une assistance juridictionnelle et des aides à des moyens de subsistance;  
  • Se déclare profondément préoccupé par l’augmentation du nombre d’attaques confirmées contre des écoles et des hôpitaux, notamment par l’utilisation d’armes explosives dans des zones habitées, condamne fermement ces attaques commises en violation du droit international, demande à toutes les parties de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter comme tel le caractère civil des écoles et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de prévenir et faire cesser les attaques ou menaces d’attaque contre ces institutions et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’écoles à des fins militaires, et rappelle à cet égard la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, à laquelle le Soudan a souscrit en décembre 2015; note avec une vive inquiétude que, selon les estimations, 70% à 80% des installations médicales situées dans les zones touchées par le conflit n’étaient pas fonctionnelles au cours de la période considérée et que, du fait des dommages causés aux hôpitaux, de leur destruction, de leur utilisation à des fins militaires ou de leur fermeture, plus de 3 millions d’enfants n’avaient pas accès  à des soins médicaux essentiels à la fin de la période considérée; note par ailleurs les conséquences que les attaques contre les écoles et l’utilisation de celles-ci ont sur l’exercice du droit à l’éducation, et note également que, pour environ 19 millions d’enfants, l’accès à l’éducation pendant la période considérée a pâti des attaques perpétrées contre des écoles et du pillage du matériel scolaire;  
  • Condamne fermement l’enlèvement d’enfants, notamment contre rançon ou aux fins d’extorsion ou de représailles, comme objets de violence sexuelle ou pour la traite, y compris le travail forcé; exhorte toutes les parties à mettre un terme aux enlèvements d’enfants et à l’ensemble des violations et atteintes commises contre des enfants qui ont été enlevés et à remettre immédiatement et sans condition aux instances civiles compétentes chargées de la protection de l’enfance tous les enfants qui ont été enlevés;  
  • Se déclare gravement préoccupé par la dégradation de la situation humanitaire, ainsi que par l’augmentation marquée des signalements de refus d’accès humanitaire, et condamne vigoureusement les refus d’accès humanitaire, y compris les attaques contre le personnel humanitaire et médical, le pillage ou la destruction de matériel humanitaire, les détournements de véhicules et les attaques contre les points d’eau et les infrastructures connexes; prend acte de la décision des autorités soudanaises d’autoriser les livraisons d’aide humanitaire à certains points de passage de la frontière et sur d’autres voies d’accès humanitaire, constate avec une vive inquiétude que l’accès de l’ONU et des autres partenaires humanitaires aux civils, y compris aux enfants, a été restreint au cours de la période considérée, et que les enfants ont été privés d’une aide humanitaire essentielle, demande à toutes les parties et aux pays voisins d’autoriser et de faciliter un accès humanitaire sûr, durable, rapide et sans entrave, conformément au droit international et à la résolution 2736 (2024) du Conseil de sécurité, rappelle les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance régissant l’action humanitaire, ainsi que les principes directeurs de l’ONU adoptés dans la résolution 46/482 de l’Assemblée générale, de sorte que la nature exclusivement humanitaire et l’impartialité de l’aide humanitaire soient respectées, de même que les travaux de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires, sans aucune distinction défavorable, et souligne la nécessité d’autoriser les opérations de déminage et de veiller à ce qu’elles se fassent en tout sécurité;  
  • Demande instamment à toutes les parties au conflit, y compris les parties nouvellement inscrites sur la liste, les Forces de l’Alliance soudanaise, les Forces d’appui rapide et le Troisième Front-Tamazouj, d’entamer un dialogue avec l’ONU afin d’élaborer et d’appliquer un plan d’action visant à faire cesser et à prévenir les violations et les atteintes sur la personne d’enfants; demande à toutes les parties citées dans les annexes au rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés (S/2022/493) de désigner des interlocuteurs pour l’élaboration, la signature et l’exécution de plans d’action de ce type de concert avec l’Organisation, et demande aux acteurs qui ont établi avec l’ONU des plans d’action et des feuilles de route sur la protection des enfants, à savoir le Mouvement pour la justice et l’égalité, l’Armée de libération du Soudan-faction Minni Minawi et les factions Abdelaziz Hélou et Malek Agar du Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord de coopérer avec l’équipe spéciale de pays en vue de leur application rapide et intégrale, et exhorte l’Armée de libération du Soudan-Abdul Wahid, toutes factions comprises, à dialoguer avec l’ONU en vue de l’élaboration d’un plan d’action;  

Aux notables locaux et aux chefs religieux: 

  • Souligne le rôle majeur que jouent les notables locaux et les chefs religieux dans le renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé;  
  • Exhorte les notables locaux et les chefs religieux à renforcer cette protection au niveau local et à condamner publiquement les violations et les atteintes commises sur la personne d’enfants, en particulier l’enrôlement et l’utilisation d’enfants, les meurtres d’enfants et les atteintes à leur intégrité physique, les viols et les autres formes de violence sexuelle, les enlèvements, les attaques et les menaces d’attaques dirigées contre des établissements scolaires et hospitaliers, tout en continuant de militer pour les faire cesser et les prévenir, et à se concerter avec l’ONU et les autres parties intéressées pour appuyer la réintégration, dans leurs communautés respectives, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par une campagne de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants. 
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