Conseil de sécurité: gros plan sur le Nouvel Agenda pour la paix, un programme « fondé sur le rétablissement de la confiance entre pays et au sein des pays »
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Le Conseil de sécurité a tenu aujourd’hui un débat public sur la prévention des conflits dans le monde, une séance présidée par le Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République de Sierra Leone, M. Musa Timothy Kabba. Les orateurs ont tablé sur le thème « Consolidation et pérennisation de la paix: le Nouvel Agenda pour la paix – traiter les aspects mondiaux, régionaux et nationaux de la prévention des conflits ».
C’est en juillet 2023 que le Secrétaire général de l’ONU a défini une vision visant à renforcer l’action multilatérale en faveur de la paix dans un monde en transition et devant servir de contribution aux travaux du Sommet de l’avenir qui se tiendra en septembre. Dans ce « Nouvel Agenda pour la paix », il passe en revue les menaces qui pèsent sur la paix et la sécurité dans le monde et étudie les moyens devant permettre aux États Membres de dépasser la logique actuelle de concurrence et de trouver des voies de coopération et d’action collective pour poursuivre des intérêts communs. Il souligne aussi que la prévention des conflits est une priorité politique qui permet de sauver des vies et de préserver les acquis du développement. Or, celle-ci ne reçoit pas le traitement prioritaire qu’elle mérite.
C’est là la raison d’être du nouvel agenda qui fournit aux États Membres une feuille de route pour parvenir à la paix. Cette feuille de route, a expliqué la Sous-Secrétaire générale chargée du Bureau d’appui à la consolidation de la paix, est fondée sur le rétablissement de la confiance entre les pays, mais aussi au sein de chacun d’eux, et enracinée dans les principes d’universalité et de solidarité. Mme Elizabeth Spehar a dit que ce programme propose un changement de paradigme en matière de prévention, fondé sur deux principes fondamentaux: premièrement, l’idée que la prévention doit être universelle –aucun pays n’est à l’abri des facteurs de conflit et de violence–, et deuxièmement, la reconnaissance du fait que nous devons nous concentrer sur l’action et les priorités nationales.
Le Nouvel Agenda pour la paix met également l’accent sur l’appropriation nationale comme principe directeur pour des efforts efficaces de prévention et de consolidation de la paix. Il souligne en outre la nécessité d’inclure des voix diverses, les besoins et la participation de tous les segments de la société, ce qui peut aider à rendre la paix plus durable, a précisé la Sous-Secrétaire générale qui s’est dite inquiète de constater que les investissements dans la paix et la prévention des conflits diminuent sans cesse alors que les dépenses militaires augmentent dans le monde entier.
Le Nouvel Agenda pour la paix offre à l’ONU la possibilité de moderniser sa boîte à outils de prévention, a déclaré à son tour le Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Sierra Leone, qui a aussi proposé de tabler sur l’amélioration des économies des pays les moins développés en offrant des opportunités de croissance adéquates et nouvelles, des systèmes de prêt équitables ainsi que des opportunités commerciales internationales plus durables et mieux adaptées au marché mondial d’aujourd’hui.
Le Commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, M. Bankole Adeoye, a pour sa part invité le Conseil de sécurité à intégrer les voix de toutes les régions, en particulier celles du Sud, pour garantir que le cadre international de paix et de sécurité soit reconfiguré pour être inclusif et efficace. Les donateurs devraient investir davantage dans la recherche, la communication et le dialogue en tant que stratégies cruciales de prévention des conflits, a conseillé la Secrétaire exécutive de la Independent Commission for Peace and National Cohesion de la Sierra Leone, Mme Hawa Samai. L’intégration de la dimension de genre, l’implication des jeunes et des personnes handicapées et l’accent mis sur l’appropriation et la participation locales sont d’autres éléments cruciaux qui ont contribué au succès de la Sierra Leone, a-t-elle témoigné, rappelant le chemin de son pays du conflit vers une paix inclusive et le développement. Le Mozambique a également partagé son expérience en matière de consolidation de la paix. Son délégué a indiqué que le processus de paix de Maputo qui a abouti à l’Accord de paix et de réconciliation de 2019 témoigne de l’importance de l’appropriation locale, du dialogue et du soutien international dans la résolution des conflits.
La représentante des États-Unis a, comme plusieurs intervenants, rappelé que les questions de paix, de développement et les efforts humanitaires se renforcent mutuellement. Il est donc crucial de coordonner ces efforts. De même, la Commission de consolidation de la paix est tout indiquée pour un partage d’expériences sur la prévention nationale, ont souligné maints orateurs notant que son expertise peut accompagner les pays qui le souhaitent dans leurs processus de consolidation de la paix.
La Commission de consolidation de la paix est bien placée pour servir de passerelle pour le Conseil de sécurité lorsqu’il examine les situations de conflit ou lorsque les pays sortent d’un conflit, a appuyé le Guyana, notant que cet organe subsidiaire dispose d’un riche corpus d’expertises sur lequel on peut s’appuyer pour transformer les conditions qui génèrent des conflits violents et qui peut fournir des orientations stratégiques sur des situations nationales spécifiques.
En outre, a indiqué Malte, la prévention efficace nécessite une compréhension de la dynamique sexospécifique des causes et des conséquences des conflits. Les mesures de désarmement et de contrôle des armes tenant compte de l’approche sexospécifique sont essentielles pour prévenir les violences sexuelles liées aux conflits, a constaté la délégation.
Le Japon a conseillé d’adopter des approches spécifiques à chaque contexte et dirigées par le pays lui-même, un point de vue partagé par la Fédération de Russie qui a souligné que les stratégies de prévention des conflits et de la violence ne doivent pas être adaptées aux intérêts des donateurs étrangers, reprochant aux anciennes métropoles et leurs alliés d’avoir recours à tous les moyens possibles pour empêcher la formation d’un ordre mondial plus juste et multipolaire.
CONSOLIDATION ET PÉRENNISATION DE LA PAIX
Le Nouvel Agenda pour la paix – traiter les aspects mondiaux, régionaux et nationaux de la prévention des conflits (S/2024/581)
Exposés
Mme ELIZABETH SPEHAR, Sous-Secrétaire générale chargée du Bureau d’appui à la consolidation de la paix, a déclaré qu’en donnant la priorité à la prévention des conflits et à la consolidation de la paix, il est possible de contribuer à inverser les tendances à la multiplication des conflits, à offrir des opportunités aux personnes touchées par la violence et à réduire les coûts humain et économique des guerres. Raison pour laquelle un Nouvel Agenda pour la paix fournit aux États Membres une feuille de route pour y parvenir, fondée sur le rétablissement de la confiance entre pays, mais aussi au sein de chacun d’eux, enracinée dans les principes d’universalité et de solidarité, a assuré la haute fonctionnaire.
Nous pourrions investir dans trois domaines clefs, a-t-elle suggéré: tout d’abord, la promotion et le soutien des efforts de prévention et de consolidation de la paix volontaires, inclusifs, pris en charge et dirigés par les pays eux-mêmes et le renforcement des infrastructures nationales pour la paix. Ensuite, la Sous-Secrétaire générale a fait valoir la garantie de la cohérence et d’une approche globale de la prévention et du maintien de la paix, et l’importance des partenariats. Le Nouvel Agenda pour la paix, a-t-elle poursuivi, propose un changement de paradigme en matière de prévention, fondé sur deux principes fondamentaux: premièrement, l’idée que la prévention doit être universelle –aucun pays n’est à l’abri des facteurs de conflit et de violence–, et deuxièmement, la reconnaissance du fait que nous devons nous concentrer sur l’action et les priorités nationales.
Le Nouvel Agenda pour la paix met l’accent sur l’appropriation nationale comme principe directeur pour des efforts efficaces de prévention et de consolidation de la paix. Il souligne également la nécessité d’inclure des voix diverses, les besoins et la participation de tous les segments de la société, ce qui peut aider à rendre la paix plus durable, a précisé la Sous-Secrétaire générale. En République centrafricaine, par exemple, le Fonds pour la consolidation de la paix a soutenu des programmes visant à renforcer les médiatrices communautaires, contribuant ainsi à prévenir les conflits et à maintenir la paix au niveau communautaire, à l’appui des objectifs plus larges du pays en matière de paix.
Pour la haute fonctionnaire, la meilleure façon d’empêcher les pays de sombrer dans les crises est de veiller à leur résilience en investissant dans un développement inclusif et durable et une gouvernance qui le soit tout autant. C’est pourquoi, a-t-elle dit, un Nouvel Agenda pour la paix appelle à accélérer la mise en œuvre du Programme 2030 et à lutter contre les inégalités, la marginalisation et l’exclusion. Elle a souligné la pertinence des partenariats avec les acteurs régionaux et sous-régionaux, notant que les échanges réguliers entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, par exemple, et un partenariat similaire entre la Commission de consolidation de la paix et le Conseil de paix et de sécurité sont prometteurs.
À l’intersection des partenariats et du financement, nous devons également explorer plus avant la relation entre l’ONU et les institutions financières internationales dans le contexte de la prévention et de la consolidation de la paix, a préconisé la Sous-Secrétaire générale. De tels partenariats sont nécessaires pour garantir que les investissements dans le développement contribuent à une paix durable, a-t-elle expliqué. L’expansion des banques multilatérales de développement régionales offre également de nouvelles possibilités de collaboration, avec des ressources concessionnelles dans des contextes pertinents qui peuvent être ciblées pour soutenir les efforts de paix durables.
Par ailleurs, nous devons trouver davantage de moyens pour que les capitaux privés investissent dans des environnements fragiles et touchés par des conflits d’une manière positive pour la paix. Enfin, la Commission de consolidation de la paix a un potentiel inexploité pour aborder les efforts structurels à long terme visant à prévenir les conflits et à consolider la paix. Il est donc essentiel que cet organe développe une relation plus stratégique et systématique avec les institutions financières internationales et les banques régionales de développement, afin d’aligner les instruments de financement sur les priorités nationales en matière de consolidation de la paix.
M. BANKOLE ADEOYE, Commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de l’Union africaine (UA), a appelé le Conseil de sécurité à intégrer les voix de toutes les régions, en particulier celles du Sud, pour garantir que le cadre international de paix et de sécurité soit reconfiguré pour être inclusif et efficace. Il a relevé que les États d’Afrique mettent en œuvre la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance. Ainsi, de plus en plus d’États africains organisent des élections relativement pacifiques et justes. Il a expliqué que l’UA, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a donné la priorité au renforcement des capacités institutionnelles et de la résilience des États traversant des transitions politiques critiques, afin d’assurer un retour rapide à l’ordre constitutionnel. Pour ceux qui sont aux prises avec des crimes transfrontaliers, en particulier le terrorisme et l’extrémisme violent, l’UA accompagne les régions du continent pour faire face à ces menaces à la paix, à la stabilité et au développement.
En outre, pour assurer une approche coordonnée et fondée sur les connaissances, l’UA a créé la plateforme interrégionale de connaissances « I-RECKE » pour l’alerte précoce et la réponse rapide. D’autres plateformes la complètent, a-t-il relevé. Le Commissaire a également appelé au renforcement des capacités institutionnelles et de la résilience des États membres, en particulier au niveau des communautés locales et frontalières, tout en donnant la priorité aux institutions nationales et traditionnelles essentielles. De même, des investissements dans une éducation de qualité et accessible aux communautés défavorisées sont cruciaux, en particulier pour les communautés rurales et celles installées aux frontières.
Mme HAWA SAMAI, Secrétaire exécutive de la Independent Commission for Peace and National Cohesion de la Sierra Leone, a fait part du chemin de son pays du conflit vers une paix inclusive et le développement. Il s’agit d’un exemple remarquable d’une situation de transition postconflit réussie. Cette transformation mue par une volonté politique forte, un engagement sociétal et des stratégies de consolidation de la paix innovantes prouve que même les nations les plus dévastées peuvent se relever grâce à des efforts concertés et au soutien de la communauté internationale, a souligné l’intervenante.
Elle a insisté sur l’attachement de toutes les parties au dialogue et au règlement pacifique des désaccords, ce qui a permis de jeter des bases solides pour la consolidation de la paix et le redressement. De même, elle a mis en exergue le rôle crucial de la Commission Vérité et réconciliation qui, sous l’impulsion de la société civile et grâce au leadership des femmes, a joué un rôle essentiel dans l’identification des causes profondes de la guerre et dans la recommandation de réformes systémiques globales.
L’intervenante a ensuite passé en revue les différentes commissions nationales mises en place par la suite pour, entre autres, consolider la paix, moderniser les institutions, défendre les droits humains et lutter contre la corruption. Le point culminant de ces efforts furent les excuses présidentielles présentées aux femmes pour les atrocités commises en temps de guerre, a-t-elle expliqué. En outre, une approche centrée sur la population, en collaboration avec les leaders traditionnels et religieux, les femmes, les jeunes et la société civile et autres a permis à la Commission de consolidation de la paix de marquer une évolution dans l’architecture de consolidation de la paix de la Sierra Leone, a affirmé Mme Samai. Des mécanismes d’alerte rapide ont été mis en place dans les 16 districts du pays, avec une salle de crise, un centre d’alerte et des médiateurs.
Elle a insisté sur l’importance d’une prévention des conflits prise en charge et dirigée par la communauté, notant que le renforcement des capacités est essentiel au fonctionnement permanent des structures de paix. Demeurer apolitique est crucial pour renforcer la confiance entre tous les acteurs clefs, et la mise en réseau avec des partenaires nationaux et internationaux est un autre atout important. L’intervenante a également souligné qu’une communication efficace est essentielle à l’ère de l’intelligence artificielle et de la désinformation. Selon elle, les donateurs devraient investir davantage dans la recherche, la communication et le dialogue en tant que stratégies cruciales de prévention des conflits. L’intégration de la dimension de genre, l’implication des jeunes et des personnes handicapées et l’accent mis sur l’appropriation et la participation locales sont d’autres éléments cruciaux qui ont contribué au succès de la Sierra Leone.
M. ARNOUX DESCARDES, Directeur exécutif du Volontariat pour le développement d’Haïti, a estimé qu’un premier seuil d’action en faveur de la paix concerne le niveau mondial, l’ONU demeurant essentielle pour concevoir, proposer, mettre en œuvre, suivre et évaluer un agenda mondial de paix. Les différentes organisations régionales et sous-régionales sont, elles aussi, vivement encouragées à développer des programmes et des outils susceptibles de prévenir tout conflit éventuel, a encore dit l’intervenant. Il convient enfin de souligner l’importance des actions à entreprendre au niveau local, dans des pays ravagés par la violence et qui peinent à retrouver la paix, a ajouté M. Descardes.
C’est le cas du sien, Haïti, où la dégradation de la situation sécuritaire au cours des dernières années empêche la circulation des personnes, des biens et des services et, conséquemment, contribue à faire chuter la disponibilité des denrées, aggravant ainsi l’insécurité alimentaire qui touche actuellement 50% de la population. Au milieu de toutes ces difficultés, Haïti semble vouloir inverser la courbe de la violence, rétablir l’ordre institutionnel au travers d’élections irréprochables et construire une paix durable, a-t-il témoigné. Des acteurs sociaux, économiques et politiques ont souscrit un nouvel accord politique le 3 avril, donnant naissance à un exécutif bicéphale et à la mise en place, avec la participation de diverses tendances politiques, d’un gouvernement appelé à mettre en œuvre les différents chantiers de la transition. De plus, la société civile haïtienne, y compris de la diaspora, propose un cadre stratégique d’action sensible aux jeunes et aux femmes pour la réussite de la transition et a mis en place le Groupe d’assistance à la transition pour accompagner de manière non partisane les deux ailes de l’exécutif et faciliter la participation des différentes parties prenantes dans une quête commune de stabilisation du pays. Enfin, des efforts sont consentis de la part du Gouvernement pour renforcer les forces de l’ordre, alors que, parallèlement, les premiers contingents de la Mission multinationale d’appui à la sécurité sont arrivés en Haïti.
Au regard des réalités sur le terrain, a analysé le Directeur exécutif, il est recommandé que l’agenda de la paix en Haïti s’appuie également sur un programme de réduction de la violence communautaire par le dialogue national; un programme efficace de démobilisation, démantèlement et réinsertion qui cible les responsables de la violence actuelle; un programme qui promeut la vérité et la justice; un programme de prévention et de réhabilitation des groupes vulnérables aux propositions des gangs armés; et enfin un programme de gestion de la crise humanitaire aiguë que connaît le pays.
Déclarations
M. MUSA TIMOTHY KABBA, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Sierra Leone, a estimé que l’ONU a la possibilité de moderniser sa boîte à outils de prévention grâce à des initiatives telles que le Nouvel Agenda pour la paix, le prochain Pacte pour l’avenir, ainsi que la prochaine révision de la structure de consolidation de la paix. Le Nouvel Agenda pour la paix, a-t-il expliqué, fournit des plans directeurs à notre génération pour laisser un héritage positif. La tolérance doit être le baume avec lequel nous guérissons tous les différends, la prévention étant le maître mot, a-t-il affirmé. Nous devons promouvoir, a-t-il préconisé, l’appropriation nationale de toutes les stratégies et actions qui doivent être centrées sur les personnes, en donnant la priorité aux voix des jeunes et des femmes. De même, a poursuivi le Ministre, il est primordial que nous nous concentrions sur l’amélioration des économies des pays les moins développés en offrant des opportunités de croissance adéquates et nouvelles, des systèmes de prêt équitables ainsi que des opportunités commerciales internationales plus durables et mieux adaptées au marché mondial d’aujourd’hui.
Évoquant le cas de son pays, il a estimé que son redressement remarquable et la paix durable des deux dernières décennies démontrent l’importance de l’appropriation nationale et d’une gouvernance inclusive dans la prévention des conflits. L’accent mis par le Gouvernement sur la reconstruction des institutions, la promotion de la bonne gouvernance et la promotion de la paix et de la cohésion nationale a contribué à empêcher la récurrence des conflits, a-t-il dit. Au niveau mondial, la Sierra Leone contribue au maintien de la paix et de la sécurité internationales, notamment par son adhésion au Conseil de sécurité, en mettant l’accent sur la consolidation de la paix et en partageant les leçons apprises au cours de son parcours de consolidation de la paix. La paix et la stabilité dans les régions de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel revêtent une importance particulière pour la Sierra Leone, et nous avons également continué à nous engager activement sur cette question au sein du Conseil, a expliqué M. Kabba.
Le représentant du Japon a appelé à miser sur la prévention des conflits, « une approche très rentable », compte tenu des coûts politiques, socioéconomiques et financiers des conflits. Pour cela, il a conseillé d’adopter des approches spécifiques à chaque contexte et dirigées par le pays lui-même. Les transitions stratégiquement planifiées qui s’adaptent le mieux au contexte national auront plus de chances de prévenir une rechute dans le conflit, en particulier dans les cas où les opérations de paix de l’ONU sont en cours de reconfiguration ou de retrait, a fait valoir le représentant.
Tout en mettant en place des approches préventives, les pays devraient identifier les causes profondes des conflits et les sources de résilience, a-t-il poursuivi en insistant sur l’appropriation nationale à tous les niveaux. Le renforcement des institutions est également essentiel pour que les personnes se sentent protégées et aient les moyens de relever efficacement les défis propres à leur contexte. La communauté internationale doit soutenir les efforts de prévention menés au niveau national en promouvant une approche globale de l’ONU, y compris au sein du Conseil de sécurité. Dans cette optique, la Commission de consolidation de la paix (CCP) est bien placée pour conseiller le Conseil, a estimé le représentant tout en relevant que le Conseil lui-même peut également conseiller la CCP sur l’établissement de son ordre du jour.
La représentante du Guyana a déclaré que le Conseil de sécurité ne doit pas se limiter à être le « service des urgences » des pays en guerre, mais faire de la prévention un élément central de son travail. Elle a appelé à investir dans des systèmes d’alerte précoce et des stratégies localisées et adaptées au contexte, afin de mieux reconnaître les points chauds potentiels et répondre aux griefs naissants ou existants avant qu’ils ne s’aggravent et ne dégénèrent en violence.
De même, elle a souligné la nécessité d’une approche stratégique, fondée sur des partenariats à tous les niveaux, réunissant les gouvernements, les organismes internationaux, le secteur privé et la société civile pour remédier aux déficits de développement qui sont à l’origine de la grande majorité des conflits. Ensuite, la représentante a estimé que « nous devons nous assurer que nos approches sont globales et s’attaquent aux facteurs de conflit traditionnels et contemporains ». Ceux-ci sont souvent interdépendants et découlent des inégalités socioéconomiques, de l’exclusion politique et des impacts des changements climatiques, entre autres. Selon elle, la Commission de consolidation de la paix est bien placée pour servir de passerelle pour le Conseil de sécurité lorsqu’il examine les situations de conflit ou lorsque les pays sortent d’un conflit. Cet organe subsidiaire dispose d’un riche corpus d’expertises sur lequel on peut s’appuyer pour transformer les conditions qui génèrent des conflits violents et peut fournir des orientations stratégiques sur des situations nationales spécifiques, a ajouté la déléguée.
Le représentant de l’Algérie a insisté sur l’importance du renforcement de la gouvernance et de l’état de droit pour toute société stable et prospère. Les réformes constitutionnelles, l’indépendance de la justice et la lutte contre les flux financiers illicites ont contribué à renforcer la responsabilité et la transparence, a-t-il concédé, mais, pour réaliser le potentiel de la bonne gouvernance, il faut s’atteler à renforcer la capacité institutionnelle, en veillant à ce que les institutions de l’État soient équipées pour fournir des services essentiels de manière efficace et équitable. Une réforme efficace du secteur de la sécurité est également essentielle pour jeter les bases d’une paix et d’une stabilité durables.
Il a mis en avant l’importance des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), déplorant que ceux-ci soient trop souvent confrontés à des défis importants en termes de ressources et de financement. Le délégué a également insisté sur l’importance de forger des partenariats pour les approches globales en termes de consolidation de la paix. Cela doit se faire en coordination avec les mécanismes régionaux, les institutions nationales et les acteurs concernés, a-t-il estimé, notant en outre que les relations avec les autorités hôtes sont une composante essentielle de toute stratégie de consolidation de la paix. Cela permet de s’assurer que cette stratégie reflète les priorités nationales et renforce le principe d’appropriation nationale, a expliqué le représentant avant d’appeler au renforcement de la Commission de consolidation de la paix.
Le représentant de la Suisse a estimé que la prévention, tel que l’explique le Nouvel Agenda pour la paix, doit être abordée aux niveaux local et national, tout en s’appuyant sur l’échange d’expériences entre différents pays. Selon lui, la prévention dépend de la confiance dans la sécurité, la justice et la garantie de liberté. Une telle confiance est un puissant antidote contre la violence, a-t-il argué.
Il a appelé à désamorcer les appréhensions politiques par rapport à la notion de prévention, notant que des études récentes identifient des éléments clefs pour les stratégies nationales de prévention. Ces éléments vont des mesures garantissant la sécurité et l’indépendance du système judiciaire aux initiatives visant à renforcer la tolérance, la solidarité et l’inclusion, en passant par la confiance dans les institutions, ainsi que l’atténuation des effets des changements climatiques et à l’adaptation à ceux-ci. La prévention est efficace si elle émane du niveau local, a-t-il ajouté.
La Commission de consolidation de la paix est tout indiquée pour un partage d’expériences sur la prévention nationale, a aussi indiqué le représentant, notant que son expertise collective peut accompagner les pays qui le souhaitent dans leurs processus de consolidation de la paix. Il a ensuite appelé le Conseil à pleinement assumer son rôle dans la prévention. D’une part, il doit mieux utiliser les instruments du Chapitre VI, qui lui permettent de formuler des recommandations pour le règlement pacifique des différends. D’autre part, les missions régionales qu’il mandate doivent être capables de soutenir –à leur requête– les gouvernements afin d’identifier les risques accrus de conflit et à les réduire durablement.
La représentante de la France a souligné la nécessité d’investir dans tous les secteurs, notamment l’état de droit, l’éducation, la santé et la protection du climat et de la biodiversité. Il est également crucial d’inclure des dispositifs spécifiques visant à réduire la pauvreté, créer des emplois et soutenir les communautés vulnérables au sein des stratégies de développement. Les opérations de paix demeurent à ce titre des outils précieux, dont les modèles sont multiples, et s’inscrivent dans un dialogue étroit avec les pays hôtes. La réponse à apporter passe également par la complémentarité des initiatives, à l’image de l’adoption de la résolution 2719 (2023) relative aux opérations africaines de paix, qui offre désormais un cadre clair pour agir de concert avec l’Union africaine, a encore préconisé la déléguée. Enfin, a-t-elle estimé, les situations postconflit doivent continuer de bénéficier du soutien international. C’est le sens de l’action de la Commission de consolidation de la paix et de son Fonds, qui ont mené des activités dans plus de 40 pays au cours des 15 dernières années. La France, qui figure parmi les premiers contributeurs au Fonds, se réjouit qu’il puisse désormais bénéficier d’un financement pérenne pour accompagner au mieux les contextes de transition, a conclu sa représentante.
Le représentant du Royaume-Uni a estimé que la prévention des conflits doit être au premier plan, afin de préserver les vies humaines et les acquis du développement. Il a prôné des approches nationales de prévention, en jugeant que l’intégration de mécanismes d’alerte précoce permet d’identifier les risques et réagir rapidement, y compris sur des questions mondiales comme les changements climatiques. Il est clair, a-t-il dit, que le sous-développement entraîne des conflits, et les conflits, le sous-développement. Il faut rompre ce cycle pour accélérer les progrès sur les objectifs de développement durable, en faisant en sorte que les efforts humanitaires, de développement et de paix se renforcent. Le Sommet de l’avenir, a estimé le représentant, offre l’occasion de redynamiser les efforts, en maximisant la coopération entre les multiples acteurs, à savoir les États, les organisations régionales et l’ONU. De même, la participation pleine, égale, sûre et significative des femmes aux processus de paix inclusifs est indispensable.
La représentante des États-Unis a noté que le Conseil de sécurité se réunit rarement pour débattre de la prévention des conflits étant plus en prise directe avec ceux qui font rage. Pourtant, nous savons comment créer des conditions propices à la paix et quelles sont les méthodes qui fonctionnent, a-t-elle constaté en appelant à les mettre en pratique et à joindre le geste à la parole. Concrètement, a-t-elle détaillé, il faut élaborer des stratégies nationales de prévention, s’appuyer sur des partenariats et sur une volonté politique ferme ainsi qu’une approche inclusive pour promouvoir et protéger l’état de droit et renforcer la cohésion sociale. La paix, le développement et les efforts humanitaires se renforcent mutuellement, a-t-elle ajouté. Elle a ensuite salué l’exemple de la Sierra Leone en termes de consolidation de la paix, ainsi que le rôle efficace de la Commission de consolidation de la paix et son Fonds pour la consolidation de la paix.
Les efforts de prévention des conflits et de consolidation de la paix doivent être inclusifs, a poursuivi la représentante en mettant en avant le potentiel des femmes et des jeunes dans ces domaines. De même, elle a encouragé la coopération entre la Commission de consolidation de la paix et les principaux organes de l’ONU, ainsi qu’un dialogue avec les organisations régionales.
Pour s’attaquer aux symptômes et aux causes sous-jacentes des conflits, a dit le représentant de la Chine, le développement doit être placé au rang des priorité. Mobiliser des ressources dans les pays postconflit pour un développement durable et instaurer une bonne gouvernance est indispensable pour la stabilité à long terme, pour autant que chaque pays puisse, de manière indépendante, déterminer la voie de son développement. La cohésion sociale doit être promue, dont l’accès de tous aux services publics, pour que tous les segments de la société puissent participer sur un pied d’égalité au développement national et en percevoir les dividendes. Dans ce contexte, il faudra tenir compte des besoins particuliers de certains groupes, comme les jeunes et les femmes, a conclu le représentant.
Le représentant de Malte a indiqué que la prévention efficace nécessite une compréhension de la dynamique sexospécifique des causes et des conséquences des conflits. Les mesures sexospécifiques de désarmement et de contrôle des armes sont essentielles pour prévenir les violences sexuelles liées aux conflits, a-t-il dit. Le financement d’organisations de femmes pour la consolidation de la paix et la priorité accordée à la prévention des violences sexuelles et sexistes favorisent également une paix durable, a-t-il relevé. Il a appelé à un financement plus durable et plus prévisible des efforts de consolidation de la paix, notamment par le biais du Fonds pour la consolidation de la paix. La Commission de consolidation de la paix est bien placée pour repérer les menaces émergentes et les signes avant-coureurs qu’elle peut transmettre au Conseil, a estimé le délégué. Il a par ailleurs souligné l’importance de renforcer l’analyse des risques liés au climat et à la sécurité dans le cadre des efforts de consolidation de la paix.
Le représentant de la Fédération de Russie a relevé que le Nouvel Agenda pour la paix part du principe qu’une prévention efficace des conflits doit prendre en compte les priorités nationales et le caractère unique de chaque cas. Il a souligné que les stratégies de prévention des conflits et de la violence ne doivent pas être adaptées aux intérêts des donateurs étrangers, notant que même si l’ère du colonialisme est révolue, il existe toujours une myriade de moyens de maintenir et d’approfondir la dépendance des États.
Il a notamment reproché aux anciennes métropoles et leurs alliés d’avoir recours à tous les moyens possibles pour dominer le monde et tenter d’empêcher la formation d’un ordre mondial plus juste et multipolaire, provoquant l’enracinement du sous-développement économique, de la pauvreté et de l’instabilité politique dans les pays en développement, et créant ainsi un terreau idéal pour les conflits. Ce sont ensuite des sanctions et des mesures restrictives illégales qui attendent ceux qui s’opposent à cette injustice, a-t-il dénoncé, reprochant à certains membres du Conseil de faire preuve de surdité et d’aveuglement sélectifs.
Il a ensuite fustigé les États qui, selon lui, s’opposent à la formation d’un système paneuropéen équitable de sécurité indivisible pour tous, en y opposant leurs propres intérêts égoïstes et leurs aspirations hégémoniques, et enflamment artificiellement la situation au Moyen-Orient et en Asie de l’Est, en y promouvant des approches basées sur des blocs et en refusant de chercher des solutions qui respectent les intérêts de tous les acteurs clefs. Pour le représentant, il ne sera possible de parler de véritable prévention que lorsqu’un ordre mondial plus juste prendra forme et que tous les pays du monde bénéficieront de conditions égales pour le développement et l’édification de leur nation.
La représentante de la Slovénie a affirmé qu’aucune crise ou aucun conflit ne peut être résolu avec succès sans inclusivité. Selon elle, l’élimination de tous les obstacles à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes nous permet d’avoir des institutions plus efficaces. C’est un investissement qui renforce leur participation dans toutes les sphères de la société. Les femmes ont beaucoup à perdre dans les conflits et peuvent donc être l’un des principaux moteurs de la prévention, a-t-elle rappelé. Par ailleurs, l’amélioration de la capacité de gouvernance pour gérer et contrôler de manière durable et efficace les ressources naturelles doit être considérée comme un investissement dans la prévention des conflits et un élément essentiel de la consolidation de la paix. « C’est pourquoi la Slovénie soutient fermement la recommandation du Nouvel Agenda pour la paix visant à renforcer les capacités du système des Nations Unies par le biais de pôles régionaux communs sur le climat, la paix et la sécurité, contribuant à accélérer les progrès et le soutien technique dans ce domaine », a précisé la déléguée. Elle a ensuite appelé le Conseil à agir en vertu du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies et faire un meilleur usage des outils à sa disposition pour le règlement pacifique des différends. Il doit également, selon elle, tirer pleinement parti de la Commission de consolidation de la paix pour discuter de la prévention menée au niveau national et la promouvoir.
Le représentant du Mozambique a relevé que le Nouvel Agenda pour la paix est un élément de réflexion extrêmement important qui approfondit et expose la compréhension de la prévention comme pilier de la sécurité collective. Cet agenda, a-t-il noté, appelle à des systèmes d’alerte précoce plus solides, des outils de prospective stratégique, de meilleures données et analyses, ainsi que des capacités de médiation plus fortes. Il souligne également l’importance d’une participation significative des femmes et des jeunes aux processus de paix, reconnaissant que l’instauration d’une paix inclusive est essentielle pour parvenir à une paix durable, a-t-il ajouté.
Prenant exemple sur son pays, le délégué a rappelé que le processus de paix de Maputo qui a abouti à l’Accord de paix et de réconciliation nationale de 2019, témoigne de l’importance de l’appropriation locale, du dialogue et du soutien international dans la résolution des conflits. Il a également démontré que la prévention des conflits, le traitement de leurs causes profondes et la prévention de leur récurrence restent une responsabilité principale des États. Selon le représentant, l’expérience du Mozambique justifie les prémisses d’un Nouvel Agenda pour la paix en soulignant la nécessité de stratégies de prévention des conflits profondément ancrées dans les réalités locales, tout en étant soutenues par les institutions régionales et mondiales. De même, l’approche continentale, soutenue par le principe des « solutions africaines aux problèmes africains », souligne à juste titre la nécessité d’agir tôt et de manière décisive sur les problèmes émergents.
Le fait que la prévention des conflits soit chroniquement sous-financée et que seuls 17% des objectifs de développement durable sont atteints montre à suffisance que le postulat selon lequel la paix et le développement se renforcent mutuellement n’est pas vraiment intégré, a diagnostiqué le représentant de l’Équateur. Une prévention efficace nécessite des approches globales, de la volonté politique et pourquoi pas un pacte social au niveau national. Elle nécessite aussi des partenariats durables et des ressources pérennes et le plein respect du principe d’appropriation nationale. Comme il ne saurait y avoir de paix sans justice, des institutions judiciaires fortes sont indispensables. Une population qui a accès à la justice, aux services de base, à l’éducation et à un emploi décent est moins susceptible de plonger dans la violence et la criminalité. Dans ce contexte, la lutte contre la pauvreté, les inégalités et l’exclusion sociale doit être la priorité des sociétés démocratiques qui doivent pouvoir compter sur le soutien des institutions financières internationales. Quant aux États Membres, ils doivent miser sur la diplomatie préventive et la médiation, en renforçant, entre autres, la Commission de consolidation de la paix, a conclu le représentant.
Le représentant de la République de Corée a rappelé qu’avec le concept de pérennisation de la paix, l’accent mis sur la reconstruction postconflit s’est déplacé vers une approche qui englobe la prévention des conflits. Pour lui, l’appropriation nationale doit figurer au cœur de la prévention et du maintien de la paix. Des stratégies de prévention inclusives et menées par les pays eux-mêmes ont plus de chances de réussir si elles bénéficient d’un soutien solide des circonscriptions locales, ainsi que de la communauté internationale, a assuré le délégué. En outre, l’ONU doit travailler plus étroitement avec de multiples parties prenantes extérieures qui ont une compréhension approfondie des complexités régionales et des dynamiques locales. La coopération avec les organisations régionales et sous-régionales est essentielle pour garantir l’efficacité et la continuité de la consolidation de la paix, a insisté le représentant. Il a aussi insisté sur l’importance de renforcer la coordination entre les différentes parties prenantes sur la base du lien entre l’aide humanitaire, le développement et la paix. C’est un lien dans lequel l’ONU devrait jouer un rôle de premier plan.
Interventions des États non membres du Conseil de sécurité
Un pays a mis en avant son expérience récente en matière de consolidation de la paix: les Philippines, dont la Région autonome bangsamoro en Mindanao musulman est devenue, en 2019, la seule du pays à disposer de son propre gouvernement, après « des décennies d’injustices historiques subies par le peuple moro ». Un accord-cadre a été conclu en 2014, un budget régional a été élaboré et des milliers de combattants ont été démobilisés. Autant d’« exploits majeurs » constituant aux yeux de la délégation la pièce maîtresse de l’expérience philippine dans le domaine de la construction de la paix.
Dans le domaine des conflits, « quelques grammes de prévention valent des kilos de traitement », a formulé le Mexique. Parmi les nombreuses priorités, la majorité des États non membres ont préconisé de régler l’instabilité sociale et de favoriser un développement économique harmonieux. Pour les Maldives, il ne fait aucun doute que les conflits naissent de « la fragilité des structures politiques et sociales » et que les politiques et l’aide doivent être orientées vers le renforcement des capacités productives des États. Plaidant la cause des petits États insulaires en développement (PEID) et leurs spécificités, les Maldives ont mis en garde contre les effets délétères d’une aide publique au développement « plaquée » sans réflexion d’un pays à l’autre. Le Groupe des pays nordiques, par la voix du Danemark, a aussi appuyé cette approche d’adaptation de l’aide au contexte économique de chaque pays afin d’en garantir la légitimité et l’efficacité.
Dans tous les cas, l’absence de développement inclusif et durable est un déclencheur évident de conflits, comme en témoignent « les cas d’extrémisme violent, où des groupes armés recrutent dans des zones de grande pauvreté et de chômage élevé », a rappelé le Burundi. Lui emboîtant le pas, la Türkiye a appelé à un contrôle efficace de la circulation des armes de petit calibre pour juguler les activités de ces groupes. Les pays du Sahel ont besoin d’un soutien économique massif mais comme la récente épidémie de COVID-19 l’a illustré, l’aide internationale est bien en deçà des besoins malgré les promesses, a déploré le Pakistan, avant de critiquer un système de sanctions « mal conçu » frappant les pays en conflit les plus pauvres et ne faisant qu’aggraver leurs problèmes de surendettement. Le Bangladesh, au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), a souligné le rôle de la Banque islamique de développement pour soutenir ses membres, ainsi que le rôle des microfinancements, des formations professionnelles et de la tolérance interreligieuse.
Concernant la coopération internationale et régionale, les appels de la Croatie à soutenir la création et le renforcement d’organisations régionales et de cadres de coopération liés à la prévention des conflits -y compris les mécanismes d’alerte précoce et la coopération transfrontalière- ont été entendus. Complimentant la CCP pour son expérience en matière de coopération avec le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, la Croatie a cité en exemple le Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité. La Grèce a, elle, loué le fait que la Commission se soit engagée à garantir davantage la participation des femmes aux processus de prise de décisions, à y inclure les jeunes générations, ainsi qu’à protéger les enfants dans les conflits armés.
Le Guatemala a ajouté qu’il était essentiel d’inviter les peuples autochtones à la table des négociations pour mieux comprendre les racines de certains conflits et construire une paix durable. C’est aussi l’avis du Brésil, pour lequel l’implication de la société civile, des organisations locales, des groupes autochtones, des dirigeants et des communautés locales dans la prévention des conflits est primordiale. Ces défis liés à l’inclusivité touchent « tous les États et toutes les régions, indépendamment de leur taille, de leur richesse ou de leur niveau de développement », a noté l’Australie, qui a reconnu ne pas faire exception et témoigné de ses efforts continus pour promouvoir le respect des droits et des traditions de ses populations autochtones.
Le rôle primordial des autorités nationales dans la prévention des conflits a été souligné par de nombreuses délégations, dont la Lettonie, de même que l’Autriche qui a précisé que cette mission d’ériger une stratégie nationale de prévention n’était pas seulement réservée aux États dits « faibles », mais à tous les États Membres de manière universelle. La Pologne a mis en avant sa propre stratégie nationale de prévention qui consiste à « améliorer le niveau de vie et la création d’emplois » - notamment en renforçant le secteur des services publics dédiés au retour à l’emploi des chômeurs. Des aspects fondamentaux pour « favoriser la stabilité économique, l’harmonie sociale et les efforts de consolidation de la paix à long terme ». Le Maroc a déclaré de son côté miser sur le développement humain, l’éducation ainsi que sur un système d’alerte rapide et de médiation en matière de prévention de l’extrémisme. Dans un tout autre registre, les Émirats arabes unis ont mis en avant une stratégie nationale de développement de technologies de pointe en matière de police et de maintien de l’ordre.
La Lettonie a espéré que le Pacte pour l’avenir et, en particulier, la prochaine révision du dispositif de consolidation de la paix fourniront des orientations supplémentaires à la CCP pour aider les États à élaborer leurs stratégies. Concernant l’élaboration dudit pacte, l’Afrique du Sud a recommandé au Secrétaire général de produire un rapport prenant en compte les différentes facettes de la prévention des conflits en fonction des pays, afin d’établir une vision d’ensemble. Elle a aussi appelé à mieux étudier les effets des flux financiers illicites en provenance d’Afrique. « Le Pacte ne peut pas faire l’économie de l’étude de ces dynamiques en matière de prévention des conflits », a-t-elle appuyé.
Étant donné son expérience de plus important pays contributeur de troupes et de police de l’ONU, le Népal a mis l’accent sur la nécessité d’un retrait sans heurts des forces des zones de conflits ou d’après conflit.
Le Pakistan et l’Égypte ont appelé au respect du droit des peuples à l’autodétermination, notamment ceux sous occupation étrangère. À ce propos, le Liechtenstein a estimé qu’une meilleure compréhension de la relation entre l’autodétermination et le conflit peut aider à construire une paix durable. En effet, selon la délégation liechtensteinoise, une proportion importante de conflits font irruption lorsque des communautés, y compris des groupes minoritaires, demandent aux États d’être plus réceptifs à leurs demandes pour un plus grand degré d’autodétermination.