9707e séance – matin
CS/15792

Yémen: appels insistants au Conseil de sécurité pour prévenir un embrasement régional et libérer le personnel onusien détenu par les houthistes

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Le Conseil de sécurité a entendu ce matin des appels insistants afin de libérer le personnel onusien et humanitaire détenu par les houthistes et de prévenir un embrasement régional.  « Le Moyen-Orient retient son souffle », a indiqué l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Hans Grundberg, qui s’est exprimé, à l’instar d’une représentante du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA). 

D’emblée, M. Grundberg a dénoncé la campagne des houthistes contre les employés yéménites de l’ONU, la société civile, les membres des organisations non gouvernementales et des missions diplomatiques, ainsi que le secteur privé.  « Des dizaines d’hommes et de femmes, parmi lesquels 13 employés de l’ONU, y compris de mon propre personnel, sont toujours détenus dans des endroits inconnus. »  

L’Envoyé spécial a, en particulier, dénoncé l’assaut donné le 3 août par les houthistes, en violation des privilèges et immunités onusiens, contre les locaux du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme à Sanaa.  « Il s’agit d’une attaque grave contre l’ONU et sa capacité à s’acquitter de son mandat », a-t-il dit, en rappelant l’importance de protéger les droits fondamentaux.  L’Envoyé spécial a exhorté les houthistes à se comporter de manière responsable et à les libérer. 

« La situation est inacceptable », a appuyé Mme Lisa Doughten, Directrice du financement et des partenariats de l’OCHA, en dénonçant, elle aussi, ces détentions arbitraires.  Elle a ensuite fait part de sa préoccupation devant la détérioration inquiétante de l’environnement opérationnel dans les zones contrôlées par les houthistes.  « La fermeture récente par les houthistes des locaux du Haut-Commissariat, ainsi que leur assaut, sont tout aussi inacceptables. » 

Une position partagée par de nombreuses délégations, dont la Suisse qui s’est dite très préoccupée par les limitations de l’espace civil et humanitaire par les houthistes, créant « un climat de peur ».  Les détentions arbitraires de personnels des Nations Unies et des ONG locales et internationales sont contraires au droit international humanitaire, ont appuyé la France; la Sierra Leone, au nom des A 3+ (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana); ou encore la Chine. 

Le Yémen a estimé que la prise d’assaut des locaux à Sanaa s’inscrit dans l’approche des houthistes visant à exercer une pression sur les agences onusiennes.  Le délégué de ce pays a appelé à fournir de toute urgence une aide au Yémen pour répondre aux besoins humanitaires urgents et lutter contre les effets des changements climatiques, en soutenant le Plan de réponse humanitaire qui manque de ressources.  Le Plan pour 2024 n’est financé qu’à hauteur de 27%, a reconnu Mme Doughten. 

M. Grundberg a espéré que la trajectoire d’escalade que le Moyen-Orient connaît ces derniers mois sera inversée.  Malgré de sérieux efforts pour protéger le Yémen d’une escalade régionale, les houthistes continuent d’attaquer des navires en mer Rouge, tandis que les États-Unis et le Royaume-Uni continuent de frapper des cibles dans le territoire contrôlé par Ansar Allah, a dit l’Envoyé spécial.  « Cette situation, qui dure depuis huit mois maintenant, n’est pas tenable. » 

De son côté, le Royaume-Uni a dénoncé les attaques irresponsables des houthistes menées en coordination avec des groupes affiliés à l’Iran.  Soulignant de même leurs liens avec les Chabab, cette délégation a estimé que les actions des houthistes s’inscrivent dans un schéma plus large de déstabilisation. « Les membres du Conseil doivent cesser de trouver des prétextes aux houthistes qui poursuivent leurs attaques dans la mer Rouge et le golfe d’Aden », ont appuyé les États-Unis.   

Ce pays a accusé l’Iran de soutenir les houthistes en leur fournissant des armes dans le but de semer le chaos dans tout le Moyen-Orient.  « La seule réponse appropriée est de condamner ces attaques et d’exiger qu’elles cessent, tout en empêchant l’accès des houthistes aux armes iraniennes. » Tout en dénonçant les activités déstabilisatrices des houthistes, la France a exhorté le Conseil à tout faire pour éviter un embrasement régional, tandis que les A3+ ont demandé aux pays influents de veiller à ne pas attiser les flammes. 

Une note dissonante est venue de la Fédération de Russie selon qui ceux qui critiquent les agissements des houthistes devraient également critiquer ceux d’Israël contre le personnel de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).  Tout en appelant les houthistes à cesser d’entraver la navigation en mer Rouge, ce pays a exhorté les acteurs internationaux à respecter la souveraineté du Yémen, soulignant que tous les actes agressifs menés par la soi-disant coalition à l’encontre d’installations au Yémen sont contraires au droit international. 

Toute normalisation de la situation au Moyen-Orient et en mer Rouge sera impossible sans une désescalade à Gaza, a souligné la délégation russe qui a accusé les États-Unis de promouvoir une politique pro-israélienne qui entrave la réalisation d’un cessez-le-feu. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Exposés

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a dénoncé la campagne menée par Ansar Allah contre les employés yéménites de l’ONU, de la société civile, des membres des organisations non gouvernementales et des missions diplomatiques, ainsi que du secteur privé. « Des dizaines d’hommes et de femmes, parmi lesquels 13 employés de l’ONU, y compris de mon propre personnel, sont toujours détenus dans des endroits inconnus. » Il a dénoncé l’assaut, le 3 août, des forces d’Ansar Allah, en violation des privilèges et immunités onusiens, contre les locaux du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.  « Il s’agit d’une attaque grave contre l’ONU et sa capacité à s’acquitter de son mandat », a-t-il dit, en rappelant l’importance de protéger les droits fondamentaux.  L’Envoyé spécial a exhorté Ansar Allah à se comporter de manière responsable et à les libérer. 

Le Moyen-Orient est en train de retenir son souffle, a poursuivi M. Grundberg.  Il a espéré que la trajectoire d’escalade des derniers mois pourra être inversée, notant que le conflit à Gaza a entraîné de nombreux pays, dont le Yémen.  Malgré de sérieux efforts pour protéger le Yémen d’une escalade régionale, Ansar Allah continue d’attaquer des navires en mer Rouge, tandis que les États-Unis et le Royaume-Uni continuent de frapper des cibles dans les territoires qu’il contrôle.  « Cette situation, qui dure depuis huit mois maintenant, n’est pas tenable », a-t-il prévenu. 

L’Envoyé spécial a rappelé l’urgence de remédier au conflit et exhorté les parties yéménites, en particulier Ansar Allah, à donner la priorité aux Yéménites. « Nous avons besoin de nous concentrer à nouveau sur le Yémen et de trouver des réponses à ses défis. » Il s’est dit préocntrccupé par la trajectoire du pays et sa tendance régressive, comme l’illustrent les activités militaires et la rhétorique incendiaire.  Il a pointé des menaces de retour à la guerre, même si le niveau de violence est contenu par rapport à celui qui prévalait avant la trêve de 2022.  Il a également signalé que la situation aux frontières du pays reste volatile. 

M Grunberg a néanmoins fait état de progrès entre les parties s’agissant du fonctionnement de la compagnie aérienne Yemenia et de l’accès des banques yéménites aux circuits bancaires internationaux.  Il a appelé les parties à exécuter les engagements pris, soulignant la nécessité d’une banque centrale et d’une monnaie unique et d’un secteur bancaire soustrait aux interférences politiques.  Il a dit sa détermination de garder ouverts les canaux de communication entre les parties sur les différents sujets tels que l’économie, un cessez-le-feu à l’échelle nationale, un processus politique et la libération des détenus. 

En conclusion, l’Envoyé spécial a rappelé la priorité de long terme qu’est une solution juste et durable pour tous les Yéménites.  « Je reste déterminé à accomplir la tâche que ce Conseil m’a confiée: appuyer la reprise d’une transition politique inclusive dirigée par les Yéménites. » 

Mme LISA DOUGHTEN, Directrice du financement et des partenariats du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a, elle aussi, dénoncé la détention arbitraire depuis plus de deux mois par les autorités houthistes de facto de membres yéménites du personnel de l’ONU, et de dizaines de membres du personnel d’ONG internationales et nationales et de représentants de la société civile, une situation « inacceptable ». Elle a ensuite fait part de sa préoccupation devant la détérioration inquiétante de l’environnement opérationnel dans les zones contrôlées par les houthistes.  La fermeture récente par les autorités houthistes de facto des locaux du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme à Sanaa, ainsi que la descente dans son enceinte et la prise de contrôle des biens de l’ONU qui a suivi, sont tout aussi inacceptables, a tranché la haute fonctionnaire. 

Elle a ensuite fait savoir qu’au cours des 10 derniers jours, de fortes précipitations ont touché plusieurs provinces du Yémen, endommageant des habitations, des fermes et des infrastructures publiques.  Environ 69 500 familles ont été directement touchées, et beaucoup ont perdu leur maison et leurs moyens de subsistance. Quelque 98 personnes ont été tuées et plus de 600 autres blessées, a encore précisé Mme Doughten. La communauté humanitaire s’est mobilisée pour fournir une aide vitale immédiate, mais le Plan annuel de réponse humanitaire pour 2024 n’est financé qu’à hauteur de 27%, conduisant à des choix difficiles, a-t-elle reconnu. 

Outre la santé, notamment les problèmes posés par l’épidémie de choléra, la sécurité alimentaire au Yémen se détériore, a poursuivi la Directrice.  La consommation alimentaire inadéquate n’a cessé d’augmenter, touchant désormais 60% des ménages interrogés à l’échelle nationale.  Les impacts de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition croissantes vont bien au-delà de la faim, exposant les enfants, en particulier les filles, à des taux accrus de maltraitance et de négligence.  « Aujourd’hui, 30% des filles au Yémen sont contraintes de se marier avant l’âge de 18 ans, alors que leurs familles ont du mal à subvenir à leurs besoins », a relevé Mme Doughten. Et le nombre d’enfants non scolarisés –qui atteint actuellement le chiffre « stupéfiant » de 4,5 millions– risque d’augmenter, car davantage sont contraints de quitter l’école pour aider leurs familles. 

Le financement intégral et urgent du Plan de réponse humanitaire pour le Yémen est donc une exigence minimale pour subvenir aux besoins humanitaires critiques, a plaidé la haute responsable.  « Le peuple yéménite ne peut pas se permettre de payer le prix dévastateur d’un nouveau conflit.  Je fais donc écho à l’appel du Secrétaire général en faveur de la retenue et de la désescalade.  Et j’exhorte le Conseil à soutenir la paix au Yémen et dans la région », a-t-elle conclu. 

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