Entre visées sécessionnistes de la Republika Srpska et intégration dans la « famille européenne », l’avenir de la Bosnie-Herzégovine en débat au Conseil de sécurité
Les visées sécessionnistes de la Republika Srpska et la récente ouverture de négociations d’accession à l’Union européenne (UE) ont été au cœur du débat du Conseil de sécurité sur la Bosnie-Herzégovine. L’ouverture de ces négociations est une « bonne nouvelle », a déclaré le Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, en appelant à l’intégration de ce pays dans la « famille européenne ». Ce dernier a par ailleurs essuyé de vives critiques de la part de la Fédération de Russie et de la Chine.
La décision du Conseil européen du 21 mars dernier d’ouvrir des négociations d’accession avec la Bosnie-Herzégovine se justifie sur le plan géopolitique car les populations craignent la guerre et veulent la stabilité, a d’emblée estimé M. Christian Schmidt. Saluant « un bon point de départ », il a souhaité une accélération des réformes dans le pays, avant d’appeler à la préservation de l’Accord de paix de Dayton.
Soulignant que « la voie de Dayton » et la voie de l’UE se complètent, le Haut-Représentant s’est par ailleurs dit convaincu que les autorités de la Republika Srpska contribuent à de graves violations de l’accord précité. « Personne ne doit détruire les fondations d’une maison en train d’être construite », a-t-il déclaré, ajoutant que la situation en Bosnie-Herzégovine n’est pas instable mais fragile.
Cette position a été largement partagée par la France, les États-Unis, la Slovénie ou bien encore le Royaume-Uni. À l’instar de l’Union européenne, le Secrétaire d’État aux affaires étrangères et aux affaires européennes de la Slovénie, M. Marko Štucin, a estimé que l’avenir de la Bosnie-Herzégovine réside dans l’UE, « parce que la majorité des citoyens bosniens, tous groupes ethniques confondus, le souhaitent », tout en s’alarmant lui aussi de la résurgence de la rhétorique sécessionniste et des discours de haine, qui compromettent les progrès durement acquis vers la réconciliation.
Le délégué britannique a souligné la grave menace posée par les efforts de la Republika Srpska visant à « subvertir » l’État bosnien en se retirant du cadre constitutionnel bosnien, la France condamnant plus particulièrement l’adoption par l’Assemblée nationale de la Republika Srpska, le 19 avril dernier, des projets de loi sur les élections, les référendums et sur l’immunité, y voyant une atteinte à l’ordre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine.
Même son de cloche du côté du Président de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine, M. Denis Bećirović, qui a rappelé qu’une entité au sein d’un État souverain n’est pas dotée de souveraineté, en évoquant la « tromperie » des autorités de la Republika Srpska. Il les a notamment accusées d’interpréter de manière partiale l’Accord de paix de Dayton, menaçant ainsi la paix. « La Serbie n’en est pas le garant mais bien l’une des trois parties signataires de l’Accord », a-t-il aussi souligné.
La Chine a estimé au contraire que ce sont les changements apportés à la loi électorale bosnienne par le Haut-Représentant qui auraient alimenté les tensions dans le pays, la Fédération de Russie jugeant en outre que les « actions illégales » de ce dernier, qui n’a pas de mandat du Conseil, nuisent aux relations interethniques dans le pays et représentent un danger pour toute la région.
Par ses « soi-disant rapports », qui représentent « une opinion subjective très éloignée de la réalité », il induit en erreur l’ensemble de la communauté internationale, a encore dénoncé le délégué russe, avant d’appeler à la fermeture du Bureau du Haut-Représentant, « mécanisme d’ingérence dans les affaires intérieures d’un État souverain ».
Dénonçant la non-prise en compte des intérêts des Serbes vivant dans le pays, le représentant russe a également vivement critiqué un projet de résolution sur une journée internationale de réflexion et de commémoration du génocide de Srebrenica de 1995, soumis à l’Assemblée générale, a-t-il dit, sans le consentement de toutes les entités de la Bosnie-Herzégovine. Ce texte « provocateur » a déjà engendré une détérioration de la situation dans le pays, s’est-il inquiété.
Son homologue de la Serbie n’a pas dit autre chose en qualifiant le projet de contraire à la Constitution, aux lois et à l’Accord de paix de Dayton lui-même. « S’il était adopté, il ne pourrait que creuser le fossé entre les peuples et menacer le processus de réconciliation en Bosnie-Herzégovine », a-t-il averti, notant que « les actions unilatérales et la politique du fait accompli ne peuvent déboucher sur rien de bon ».
« Si le projet de résolution ne peut apporter la stabilité en Bosnie-Herzégovine, qu’en est-il des menaces contre les partisans de la vérité et la glorification des criminels de guerre sans respect aucun pour les victimes? » a rétorqué la délégation bosnienne qui a souligné que ce texte vise à promouvoir une culture de la mémoire et prévenir ainsi un autre génocide.
LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE
Déclarations
M. CHRISTIAN SCHMIDT, Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, a demandé un soutien accru pour le pays afin de prévenir toute instabilité. Il a tout d’abord fait part des « bonnes nouvelles » en se félicitant de la récente décision du Conseil européen d’ouvrir des négociations d’accession avec le pays. Cette décision se justifie sur le plan géopolitique car les populations craignent la guerre et veulent la stabilité, a-t-il dit. « C’est un bon point de départ. » Il a néanmoins relevé que le processus n’en est qu’à ses balbutiements. C’est un signal envoyé aux habitants les invitant à rester dans leur pays plutôt que de fuir, a-t-il dit, en insistant sur les perspectives démographiques préoccupantes de la Bosnie-Herzégovine. Il a souhaité une accélération des réformes dont le point de départ est l’Accord de paix de Dayton. « Je continue de respecter les éléments de mon mandat. »
Les défis qui se posent à la Cour constitutionnelle sont graves et risquent d’entraîner un dysfonctionnement de la Cour, a averti M. Schmidt. Il s’est dit convaincu que les autorités de la Republika Srpska contribuent à de graves violations de l’Accord de paix de Dayton, qualifiant la situation de fragile. Il a salué les responsables bosniens qui n’ont pas voulu répondre aux diverses provocations. La voie de Dayton et celle de l’UE se complètent, a souligné M. Schmidt, appelant à « ne pas détruire les fondations d’une maison en train d’être construite. » Avec l’accession à l’UE, mon rôle est d’épauler le pays en vue de surmonter les expériences négatives du passé, a-t-il dit. Il a également appuyé le mandat de l’EUFOR ALTHEA, avant de souligner la nécessité de préserver l’intégrité des processus électoraux. À ce titre, il a indiqué avoir signé plusieurs amendements en vue des élections municipales d’octobre prochain. Les auteurs de crimes graves sont interdits de se présenter comme candidats, a-t-il fait savoir, ajoutant que cette interdiction est de nature à renforcer la confiance des populations.
M. Schmidt a ensuite signalé que des forces de la Republika Srpska ont récemment fait scandale après avoir rendu hommage en uniforme au monument de Ratko Mladić, condamné pourtant par la justice pénale internationale. Si ces images d’hommes en uniforme sont vérifiées, cela constituerait une violation grave du droit pénal bosnien, a-t-il tranché. « Il est inacceptable de glorifier des criminels de guerre. » Il a déploré que le génocide de Srebrenica soit devenu politisé, au défi de la vérité. La justice internationale a en effet établi qu’un génocide a bel et bien été commis à Srebrenica, a-t-il tranché, avant de souligner qu’il n’existe pas de culpabilité collective au titre du droit pénal. Il faut miser plus que jamais sur la réconciliation, mais il reste encore beaucoup à faire sur ce plan, a-t-il regretté. Enfin, il a lancé un vibrant appel contre tout retour de la guerre et vivement encouragé l’intégration de ce pays dans la « famille européenne ».
M. MARKO ŠTUCIN, Secrétaire d'État des affaires étrangères et des affaires européennes de la Slovénie, a estimé que l’avenir de la Bosnie-Herzégovine réside dans l’Union européenne (UE), « non seulement parce que l’UE le souhaite, mais surtout parce que la majorité des citoyens de Bosnie-Herzégovine, tous groupes ethniques confondus, le souhaitent ». À ses yeux, l’ouverture des négociations d’adhésion à l’UE constitue une forte incitation aux réformes nécessaires qui permettraient à tous, en particulier aux jeunes, d’envisager un avenir prospère dans leur pays. Le projet d’adhésion à l’UE offre également l’opportunité de combler les divisions et de favoriser la stabilité, la paix et le développement à long terme, dans le pays et dans toute la région des Balkans occidentaux, a-t-il souligné, avant de saluer les récentes réformes en matière de migration, de gestion des frontières et de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Tout en appelant à la poursuite de cet « élan positif », il a prévenu que le pays doit encore élever les normes pour la conduite des élections locales cet automne et soutenir ses institutions publiques pour garantir leur fonctionnement sans compromis.
Le Secrétaire d'État s’est ensuite alarmé des menaces que font peser sur la justice transitionnelle la politisation du débat et la résurgence de la rhétorique sécessionniste et des discours de haine, qui, selon lui, compromettent les progrès durement acquis vers la réconciliation et une paix durable dans la région. Il s’est notamment dit inquiet des tentatives visant à nier les atrocités commises pendant la guerre, en particulier le « génocide de Srebrenica », jugeant impératif de reconnaître les faits confirmés par les décisions du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et de la Cour internationale de Justice (CIJ). Dans ce contexte, il a souligné l’importance de la coopération régionale pour favoriser la réconciliation en Bosnie-Herzégovine. Après avoir exhorté les pays voisins et les acteurs régionaux à s’abstenir de toute action susceptible d’aggraver les tensions ou de porter atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, il a demandé aux responsables politiques bosniens de contribuer au maintien d’un environnement sécuritaire stable, saluant au passage l’action de l’EUFOR ALTHEA dans ce domaine. Enfin, le Secrétaire d'État a exprimé le soutien de son pays aux travaux du Haut-Représentant et a plaidé pour une appropriation locale des décisions politiques prises en Bosnie-Herzégovine.
Le représentant de la Suisse a regretté que les derniers mois n’aient pas permis de progresser de manière plus tangible dans la mise en œuvre du Programme « 5 plus 2 », soulignant que cela reste la condition convenue pour la fermeture du Bureau du Haut-Représentant. Il a jugé essentiel que les dirigeants influents de toutes les entités de la Bosnie et Herzégovine formulent des intérêts communs pour leur pays. Le peuple, en particulier les jeunes, ont besoin de perspectives pour eux-mêmes et leurs familles, a fait valoir le délégué. Selon lui, la récente décision du Conseil européen d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine offre une occasion importante dans ce sens, en permettant d’accélérer les progrès sur la voie des réformes.
Il a invité tous les acteurs politiques à s’engager de manière constructive dans un véritable dialogue afin de préserver l’unité et la stabilité politiques du pays, notant que cela contribuera également à lutter contre la fuite des cerveaux et de la main-d’œuvre. Soulignant que la confiance dans le fonctionnement des institutions, le respect de son ordre constitutionnel et juridique et la protection des libertés fondamentales constituent le fondement d’une société démocratique, pacifique et stable, le représentant a interprété les récentes actions de la Republika Srpska visant à transférer des compétences de l’État au niveau des entités et à créer un système électoral parallèle comme contraires à ces principes. Alors que la Bosnie-Herzégovine se prépare pour les élections municipales, il a souligné l’importance de mettre en œuvre les réformes nécessaires pour assurer l’intégrité, la transparence et l’équité du processus électoral, ainsi que celle d’une représentation accrue des femmes dans l’arène politique. En dernier lieu, le délégué a encouragé toutes les parties à redoubler d’efforts pour promouvoir la coexistence pacifique et la réconciliation, en faisant part de sa préoccupation face à la prédominance de la rhétorique de division, des discours de haine et des menaces de sécession.
Préoccupé par les discours, actions et efforts visant à « faire dérailler, saper et anéantir » les progrès réalisés jusqu’à présent en Bosnie-Herzégovine, le représentant de la Sierra Leone a exhorté toutes les parties en présence à s’abstenir de rhétorique clivante. Il s’est dit tout autant préoccupé par les actions portant atteinte aux décisions et à l’héritage du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY). Tirant parti de la propre expérience de son pays après un conflit civil prolongé, le délégué a cité en exemple les mécanismes efficaces de justice transitionnelle, dont le Tribunal spécial pour la Sierra Leone. Il a ensuite appelé les principales parties prenantes à s’abstenir de prendre des mesures qui créeraient des structures de gouvernance parallèles. Il leur a aussi recommandé de soutenir des actions en faveur du retour en sécurité et de la réconciliation de tous les peuples de Bosnie-Herzégovine, ainsi que de la réalisation d’une réforme commune donnant la priorité au développement du capital humain.
Le représentant a aussi attiré l’attention sur la nécessité de faire des progrès supplémentaires sur l’administration du district de Brčko et sur la création des institutions nécessaires à son fonctionnement. Enfin, il a plaidé pour l’adoption de réformes institutionnelles et juridiques, non seulement pour répondre aux exigences législatives liées à l’Union européenne, mais aussi pour renforcer ses mécanismes de gouvernance et de prestation de services.
Le représentant de l’Équateur a dénoncé la rhétorique sécessionniste, la promotion des discours de haine ainsi que la négation du génocide, des éléments qui aggravent les divisions existantes et entravent la nécessaire réconciliation nationale. Il a appelé les autorités de Bosnie-Herzégovine à abandonner les discours et les actions qui divisent et qui érodent la confiance entre communautés. Il a souhaité que les élections locales prévues d’ici à octobre 2024 se déroulent dans la transparence totale. Le délégué a appelé les autorités à prendre des mesures concrètes afin de progresser vers une participation significative des femmes, à la fois sur le plan politique et dans le cadre du processus de paix en général. Il a réaffirmé le soutien de l’Équateur au mandat du Haut-Représentant dans la supervision des aspects civils de l’Accord-cadre général de paix.
Le représentant de l’Algérie a dit que l’Accord de Dayton reste le seul cadre pour la paix et la sécurité ainsi que la réconciliation et la coexistence pacifique en Bosnie-Herzégovine. La recherche de solutions politiques doit être dictée par les besoins de la population et rédigée par leurs représentants élus démocratiquement, a-t-il recommandé. Le délégué a encouragé les responsables du pays à faire des choix qui répondent aux besoins de la population. Il a appelé les acteurs politiques à respecter l’Accord de Dayton et à accélérer les réformes politiques et économiques nécessaires, et ce, sans discrimination politiques et religieuses. La division prolonge les problèmes et retarde la réconciliation, a déploré le représentant pour qui les divergences devraient enrichir le débat et non mener à l’impasse politique. Il faut dialoguer pour réduire les écarts entre les positions, a-t-il encore suggéré.
Le représentant de la Chine a noté de graves difficultés qui n’invitent pas à l’optimisme, s’agissant, en particulier, du processus de réconciliation. Il a estimé que l’UE et les pays des Balkans doivent aider la Bosnie-Herzégovine à surmonter ces problèmes, en s’efforçant de rester neutres et en se gardant de s’ingérer dans les affaires intérieures. La position de la Chine sur le mandat du Haut-Représentant est inchangée, a dit le délégué. M. Schmidt vient de modifier la loi électorale bosnienne et d’alimenter les tensions. Il est important que les affaires intérieures soient gérées par les Bosniens eux-mêmes, conformément au respect de la souveraineté nationale et du choix de la population bosnienne.
La représentante du Guyana s’est félicitée de l’évolution positive de la situation politique de la Bosnie-Herzégovine, notamment de la décision du Conseil européen d’entamer avec ce pays des négociations d’adhésion à l’Union européenne. Après avoir encouragé les différentes composantes du pays à poursuivre la coopération pour réaliser cet objectif commun, elle s’est déclarée préoccupée par la rhétorique de division, qui exacerbe les tensions ethniques et met à mal les acquis du processus de consolidation de la paix. Exhortant les différentes parties prenantes à respecter les dispositions de l’Accord de paix de Dayton, elle a indiqué qu’en tant pays multiethnique, le Guyana comprend combien le potentiel de division peut menacer la cohésion sociale d’un pays. Elle a recommandé de donner aux jeunes les moyens de bâtir une société culturellement et éthiquement unie, ce qui passe par un dialogue constructif entre toutes les communautés.
La déléguée a également pris note du décret pris par le Haut-Représentant pour amender la loi électorale du pays et ainsi renforcer l’intégrité des élections. Elle s’est toutefois alarmée du faible taux de représentation des femmes, appelant à ce qu’elles puissent participer au processus politique à tous les niveaux. Elle a enfin formé l’espoir que les élections locales prévues en octobre seront couronnées de succès et que l’année à venir sera l’occasion pour le Conseil de sécurité d’intensifier ses efforts pour mettre le pays sur la voie de la paix et du développement durables.
La représentante de Malte a salué les progrès accomplis par la Bosnie-Herzégovine qui ont conduit à l’ouverture des négociations d’adhésion à l’UE le 22 mars 2024. Elle s’est félicitée des réformes positives déjà entreprises, et a encouragé la Bosnie-Herzégovine à maintenir son engagement à renforcer les cadres constitutionnel, électoral et judiciaire du pays. Elle a également insisté sur l’importance des réformes qui donnent la priorité à l’inclusivité et au respect de l’état de droit, y compris la représentation des femmes dans toutes les institutions gouvernementales. En outre, la déléguée a demandé aux autorités de mettre en œuvre des mesures crédibles pour défendre les droits humains et la liberté d’expression dans le pays.
Poursuivant, la représentante a estimé que la présence de l’EUFOR ALTHEA est cruciale pour préserver la situation stable actuelle. Dénonçant la rhétorique incendiaire et les actions qui sapent l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine et l’Accord de paix de Dayton, elle a martelé que la réconciliation est la pierre angulaire d’une paix durable. Elle a encouragé toutes les parties en Bosnie-Herzégovine à faire pleinement usage de la présence de l’OSCE sur son terrain et de sa boîte à outils pour désamorcer les tensions et promouvoir le dialogue à tous les niveaux de la société. Le dialogue reste la clef, tout comme l’engagement à s’engager de bonne foi en faveur de la préservation de la paix et de la stabilité au bénéfice de tous les citoyens du pays, a-t-elle souligné.
La représentante du Japon a salué la décision du Conseil européen d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine, y voyant une évolution positive majeure vers l’objectif que poursuit ce pays. Dans le même temps, elle s’est déclarée préoccupée par l’intensification des tensions politiques en Bosnie-Herzégovine, notamment l’escalade des déclarations et des actions de la Republika Srpska, qui, en remettant en cause la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays, risque de saper les fondements de l’Accord de paix de Dayton. Elle a exhorté tous les partis politiques à engager un dialogue constructif et à entreprendre les réformes nécessaires pour consolider l’Accord de paix de Dayton et préparer le processus d’adhésion à l’Union européenne.
La déléguée a par ailleurs réitéré le ferme soutien de son pays aux activités du Fonds pour la consolidation de la paix en Bosnie-Herzégovine. Ces projets, qui visent à promouvoir la compréhension mutuelle et la confiance entre les populations, favorisent la lutte contre le révisionnisme historique et approfondissent la compréhension des gens sur ce qui s’est passé pendant la guerre, a-t-elle applaudi, avant de rappeler que le Japon, en tant que contributeur majeur au Fonds et membre du Conseil de mise en œuvre de la paix, a pris part aux efforts d’édification de la nation et de réconciliation nationale depuis la fin de la guerre de Bosnie en 1995.
Le représentant de la République de Corée s’est dit opposé à toute action ou rhétorique susceptible de porter atteinte aux acquis de l’Accord de paix de Dayton. Les discours politiques dangereux, notamment la montée de la rhétorique séparatiste, et le déni des atrocités passées menacent les efforts liés à la justice transitionnelle et au processus de vérité et de réconciliation. Le représentant a salué le fait que l’Union européenne ait lancé, au mois de mars, des négociations sur l’adhésion de la Bosnie-Herzégovine. Il a enfin réaffirmé son ferme soutien à l’EUFOR ALTHEA qui contribue à un environnement sûr et sécurisé.
Le représentant de la Fédération de Russie a tout d’abord contesté la légitimité de M. Denis Bećirović, membre bosniaque de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine et Président en exercice de la présidence, estimant qu’il ne reflète pas l’opinion de tous les peuples formant l’État bosnien. D’après lui, un système « parallèle, extraconstitutionnel, illégal et antidémocratique » a été mis en place avec l’assentiment des pays occidentaux, permettant aux représentants d’une seule des entités de prendre et de mettre en œuvre des décisions au nom du pays. Après avoir rappelé que le système d’équilibre des intérêts des trois peuples formant l’État bosnien et la répartition des pouvoirs entre les différents niveaux de gouvernement sont au cœur de l’Accord de paix de Dayton, il a dénoncé la non-prise en compte des intérêts des Serbes vivant dans le pays, « dont l’indépendance interfère avec la réalisation des intérêts occidentaux ». Le délégué a constaté que les représentants dûment élus des Serbes de Bosnie-Herzégovine font l’objet de sanctions illégales, de menaces et de chantage, ainsi que de poursuites pénales politiquement motivées. De fait, a-t-il dit, la Republika Srpska et la population serbe de Bosnie-Herzégovine sont présentées comme des « parias dans leur propre pays » et même accusées d’être « génocidaires ». En réponse à ces « inventions serbophobes », il a rappelé que la Republika Srpska a confirmé à plusieurs reprises sa position de principe en faveur de l’Accord de paix de Dayton, de la répartition constitutionnelle des pouvoirs et de l’égalité des trois peuples et deux entités.
Accusant « certains pays occidentaux » de vouloir détruire les acquis des années post-conflit et de créer une atmosphère de méfiance mutuelle entre les peuples de Bosnie-Herzégovine, le représentant s’est dit convaincu que le Haut-Représentant est « un instrument important de cette politique coloniale ». Selon lui, « ce citoyen allemand n’a pas le droit de s’exprimer au Conseil » car il ne bénéficie pas du soutien de tous les peuples composant l’État de Bosnie-Herzégovine et n’a pas passé la procédure d’approbation consensuelle au sein du Comité directeur du Conseil de mise en œuvre de l’Accord de paix de Dayton. Surtout, il n’a pas de mandat du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté, jugeant que les « actions illégales » du Haut-Représentant nuisent aux relations interethniques dans le pays et représentent un danger pour toute la région. Par ses « soi-disant rapports », qui représentent « une opinion subjective très éloignée de la réalité », il induit en erreur l’ensemble de la communauté internationale, a encore dénoncé le délégué, avant d’appeler à la fermeture du Bureau du Haut-Représentant, « mécanisme d’ingérence dans les affaires intérieures d’un État souverain ».
Après avoir qualifié de « contre-productive » l’action menée sur le terrain par la force de stabilisation européenne EURO ALTHEA, le représentant s’en est pris à l’Allemagne et à son projet de résolution sur une journée internationale du souvenir des événements tragiques de Srebrenica en juillet 1995, soumis à l’Assemblée générale « sans l’accord de la Présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine ». L’introduction de ce document sans le consentement de toutes les entités va à l’encontre de la Constitution du pays et constitue donc une violation de l’Accord de paix de Dayton et de sept résolutions du Conseil, a-t-il fait valoir, observant que ce projet de texte « provocateur » a déjà provoqué une détérioration de la situation en Bosnie-Herzégovine. L’Allemagne, qui se veut « la championne des droits des victimes du soi-disant génocide de Srebrenica », est un pays qui, au XXe siècle, a déclenché deux guerres mondiales, organisé un génocide qui a coûté la vie à des dizaines de millions de personnes et participé aux bombardements sur l’ex-Yougoslavie, a-t-il asséné, avant de dénoncer le fait que les pays occidentaux refusent obstinément de discuter au Conseil de leurs crimes commis il y a 25 ans. Estimant en conclusion que l’imposition par les Occidentaux de leur « agenda égoïste » au peuple bosnien est « inacceptable et contraire à la Charte des Nations Unies », il a affirmé que le « point de départ et d’arrivée » ne peut être que l’Accord de paix de Dayton, ses principes de souveraineté de la Bosnie-Herzégovine et l’égalité des trois peuples et des deux entités formant cet État.
Le représentant des États-Unis a souligné le rôle essentiel du Haut-Représentant dans la mise en œuvre des aspects civils de l’Accord de paix de Dayton et le fonctionnement des institutions, malgré les obstacles érigés par certains politiciens. Il a pleinement appuyé le droit du Haut-Représentant d’actionner tous ses pouvoirs, y compris les pouvoirs de Bonn, jusqu’à ce que le Programme « 5 plus 2 » soit pleinement mis en œuvre. Les pouvoirs de Bonn, a-t-il précisé, complètent le processus d’accession à l’Union européenne et leur exercice facilite les efforts de réforme de la Bosnie-Herzégovine. Le risque de rater cette chance ne peut être sous-estimé et parmi les nombreux problèmes auxquels est confronté le pays, les moindres ne sont pas les discours et les actes sécessionistes. Le Président de la Republika Srpska, a accusé le représentant, a compromis les institutions publiques. Ses actes dangereux menacent la paix et la stabilité de toute la région.
Le déni du génocide empêche la réconciliation et nous voulons être clairs: le génocide commis à Srebrenica est un fait historique qui a été tranché par la justice et confirmé par les Tribunaux pénaux internationaux et la Cour internationale de Justice. Commémorer des vérités historiques et accepter les faits est essentiel pour faire avancer la région sur la voie de la réconciliation. Honorer les victimes du génocide renforce les valeurs de la Charte des Nations Unies, a martelé le représentant, non sans oublier d’ajouter que les États-Unis auront recours à tous les instruments disponibles, y compris les sanctions, pour établir la responsabilité de ceux qui encouragent la corruption et agissent pour déstabiliser la Bosnie-Herzégovine.
Le représentant du Royaume-Uni a appuyé l’aspiration de la Bosnie-Herzégovine à une intégration euro-atlantique accrue. L’ouverture de négociations d’accession à l’UE est un pas important accompli dans cette direction, s’est-il félicité. Il a estimé que la plus grave menace est posée par les efforts de la Republika Srpska visant à « subvertir » l’État bosnien et ses institutions. Ces efforts incluent les menaces de se retirer du cadre constitutionnel bosnien et de créer un cadre parallèle en Republika Srpska, a-t-il précisé. Il a insisté sur l’importance du rôle joué par le Haut-Représentant pour remédier aux défis du pays. Le représentant s’est ensuite inquiété de la fragilité de la situation sécuritaire et politique du pays, pointant l’augmentation du déni de génocide, de la glorification des criminels de guerre et des attaques à l’encontre des rapatriés. Il a invité tous les acteurs politiques à « transcender » les considérations ethniques et à œuvrer à la prospérité du pays.
La représentante de la France a condamné, une nouvelle fois, l’adoption par l’Assemblée nationale de la Republika Srpska, le 19 avril dernier, des projets de loi sur les élections, les référendums et l’immunité, qui constituent une atteinte à l’ordre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine, à la fonctionnalité de ses institutions centrales ainsi qu’à son unité. La déléguée s’est également dite préoccupée par le projet de loi sur les « agents de l’étranger », qui nuit à la préservation d’un environnement favorable à la société civile, aux médias et à la liberté d’expression. L’avenir de la Bosnie-Herzégovine, comme de l’ensemble des Balkans occidentaux, est dans l’Union européenne. Mais, dans la mesure où le projet européen est fondé sur les valeurs de paix, de justice, de réconciliation entre les peuples, de liberté et de démocratie, il n’y a pas de place pour le négationnisme, le révisionnisme historique ou la glorification de criminels de guerre condamnés par la justice, dans un pays et dans une région qui ont exprimé leur souhait d’adhérer à l’Union européenne, a martelé la représentante.
Le représentant du Mozambique a estimé que, dans le contexte de tensions politiques et de flambées de violence en Bosnie-Herzégovine, le leadership politique revêt une importance capitale. Il a prôné un leadership qui favorise l’unité et la coopération de l’ensemble du peuple pour faire face aux tensions irrésolues et promouvoir le progrès de la société multiethnique qui caractérise le pays. Selon lui, la situation dans la fédération exige une coopération continue aux niveaux local, national et international pour surmonter les défis posés par son histoire complexe, sa composition fragmentée et son paysage politique actuel. Le délégué a noté avec préoccupation que les droits à la liberté de réunion pacifique et d’association ne sont pas suffisamment garantis et protégés par le droit applicable. Il a jugé crucial à cet égard l’introduction de mesures globales de justice transitionnelle et de réformes de l’état de droit.
En Afrique, a observé le représentant, l’expérience a montré que l’engagement en faveur de l’édification de la nation requiert non seulement un développement économique, mais également une réconciliation véritable, l’instauration de la confiance et un engagement politique inébranlable en faveur de l’unité et de la bonne entente. Aussi a-t-il appelé les parties concernées à continuer d’œuvrer en faveur d’une société pacifique et durable, de la stabilité et d’un développement inclusif en Bosnie-Herzégovine.
Le Président de la Présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine, M. DENIS BEĆIROVIĆ, a affirmé que le Haut-Représentant est le seul responsable habilité à présenter des rapports au Conseil de sécurité, en niant ce droit à la Republika Srpska. En mars dernier, a-t-il indiqué, un pas important a été franchi vers l’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’Union européenne quand le Conseil européen a ouvert le dossier d’adhésion. Il a rappelé qu’au mois de juillet prochain, le génocide de Srebrenica sera commémoré, comme un événement historique qui ne souffre d’aucune contestation et qui a été confirmé par l’ONU, contrairement à ce que proclame la Republika Srpska. Il a accusé cette dernière d’interpréter de manière partiale l’Accord de paix de Dayton et dénoncé sa tentative de s’attaquer à la légitimité du Bureau du Haut-Représentant et à la Cour constitutionnelle bosnienne. L’entité d’un État souverain ne peut se déclarer souveraine, a-t—il poursuivi, ajoutant qu’aux termes de l’Accord de paix de Dayton, la Serbie n’en est pas le garant mais bien l’une des trois parties signataires. Il a conclu, en soulignant la détermination de la Bosnie-Herzégovine à modifier ses structures de gouvernance pour les rendre encore plus démocratiques.
Le représentant de l’Union européenne (UE), a déclaré que l’avenir de la Bosnie-Herzégovine et de ses citoyens se trouve au sein de l’Union européenne. Le 22 mars 2024, a-t-il rappelé, le Conseil européen a décidé d’ouvrir les négociations d’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’UE. Après cette décision, les acteurs politiques doivent se focaliser sur les réformes nécessaires à l’adhésion à l’UE. Le représentant a dit être gravement préoccupé par les législations et les initiatives de la Republika Srpska qui vont à l’encontre de la voie de l’UE, pointant la rhétorique sécessionniste et la remise en cause de l’ordre constitutionnel du pays, notamment les lois sur les élections, les référendums et l’immunité. Il s’est également inquiété du projet de loi qualifiant les groupes de la société civile d’« agents étrangers ».
Il a exhorté les acteurs politiques de Bosnie-Herzégovine à s’abstenir de remettre en question la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale du pays, et à mettre fin à la glorification des criminels de guerre condamnés ainsi qu’à la négation du génocide. La réconciliation devrait être promue.
Le représentant de la Serbie a dit reconnaître la Bosnie-Herzégovine en tant qu’« État doté de deux entités » avec l’accord des trois peuples constitutifs. Il a précisé que son pays s’efforce de nouer des relations avec la Republika Srpska, dans la transparence et la conformité avec l’Accord de paix de Dayton. Mon pays, a-t-il tout de même prévenu, s’oppose à toute mesure non consensuelle en Bosnie-Herzégovine. Les actions unilatérales et la politique du fait accompli ne peuvent déboucher sur rien de bon. Le représentant a ainsi estimé que le projet de résolution sur la Journée internationale de réflexion et de commémoration du génocide de Srebrenica de 1995 qui sera soumis à l’Assemblée générale sans dialogue préalable ni accord de la Présidence bosnienne, est contraire à la constitution, aux lois et à l’Accord de paix de Dayton lui-même.
Cette initiative, « lancée de manière illégale par un seul individu », le représentant de la Bosnie-Herzégovine auprès des Nations Unies, ne favorise en aucun cas le processus de réconciliation. Bien au contraire puisqu’aujourd’hui le Ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine déclare que la position de la Serbie ne mérite que le mépris et fait valoir un prétendu droit de réclamer une indemnisation pour les dégâts causés par la guerre et de réexaminer le jugement prononcé contre la Serbie. De telles déclarations, a constaté le représentant, témoignent des vraies intentions du projet de résolution.
Le dialogue, a-t-il insisté, est la seule voie pour la recherche de solutions. Comment peut-on imaginer une réconciliation durable en Bosnie-Herzégovine sans tenir compte de la communauté serbe? La Serbie a, quant à elle, condamné sans équivoque les crimes les plus graves commis contre la population bosniaque à Srebrenica il y a 29 ans. Tous nos efforts, a-t-il affirmé, tendent vers un seul résultat: ne jamais oublier les victimes et bâtir un avenir commun. La Serbie a demandé en vain le retrait d’un projet de résolution dont les visées sont politiques. S’il était adopté, il ne pourrait que creuser le fossé entre les peuples et menacer le processus de réconciliation en Bosnie-Herzégovine, a-t-il conclu.
Le représentant de la Croatie a félicité « de tout cœur » la Bosnie-Herzégovine pour l’ouverture en mars des négociations d’adhésion à l’Union européenne. Celle-ci n’aurait pas été possible sans le niveau « sans précédent » d’accomplissements législatifs et de réformes entreprises dans la fédération. Prenant note de la décision récente du Haut-Représentant de modifier la loi électorale, il a soutenu pleinement l’intention de ce dernier de renforcer l’intégrité du processus électoral, même si « une solution locale à ce problème aurait été plus souhaitable, car elle aurait démontré une forte capacité à traiter des questions politiques complexes ». Il a également appelé à réformer le système électoral actuel, celui-ci ne permettant pas aux Croates de Bosnie-Herzégovine d’élire leur propre représentant légitime à la présidence du pays. Cela induit une discrimination et constitue un obstacle à l’établissement d’une confiance et d’une coopération durables entre les peuples constitutifs du pays, a-t-il expliqué. Le représentant a par ailleurs rejeté les « initiatives séparatistes » mentionnées par le Haut-Représentant, estimant que les solutions politiques en Bosnie-Herzégovine doivent être fondées sur l’ordre constitutionnel existant, tel qu’établi par l’Accord de paix de Dayton.
Reprenant la parole pour répondre à son homologue de la Serbie, le représentant de la Bosnie-Herzégovine a insisté sur le fait qu’un véritable processus de réconciliation doit reconnaître les crimes commis, dont le génocide, les victimes et l’importance qu’il y a à punir les responsables. Il a vu dans le déni du génocide, une absence totale d’humanité servie par des arguments fallacieux. Si le projet de résolution ne peut apporter la stabilité en Bosnie-Herzégovine, qu’en est-il des menaces contre les partisans de la vérité et la glorification des criminels de guerre sans respect aucun pour les victimes? Le projet de résolution, s’est expliqué le représentant, n’appelle pas à la violence mais à la reconnaissance des victimes de Srebrenica pour promouvoir une culture de la mémoire et prévenir ainsi un autre génocide. Joignez-vous à nous, a-t-il dit, à « ses amis de la Serbie ». Aidez-nous à mettre en œuvre la Charte des Nations Unies. Votre proximité avec la Bosnie-Herzégovine ne vous donne pas le droit de créer sans cesse de l’instabilité pour servir vos intérêts. Comme vous, nous avons été parties au conflit, respectons la souveraineté des uns et des autres, a conclu le représentant.