Somalie: la réforme du secteur de la sécurité pour une bonne transition post-ATMIS au cœur de la séance du Conseil de sécurité
Les responsables de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) et de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) ont fait le point, ce matin au Conseil de sécurité, de la situation dans laquelle se trouve le pays quelques mois avant le retrait de la Mission de l’Union africaine. La réforme du secteur de la sécurité a été au cœur des interventions, à l’heure où le Gouvernement se prépare à la reprise des opérations à grande échelle de la lutte contre les Chabab. Le récent différend avec l’Éthiopie sur le « Somaliland » a également inquiété les délégations, la Somalie le qualifiant de « déclaration de guerre ».
En présentant le dernier rapport en date du Secrétaire général sur la Somalie, la Cheffe de la MANUSOM et Représentante spéciale en Somalie, Mme Catriona Laing, a tout d’abord salué de récents progrès, à commencer par l’admission du pays au sein de la Communauté de l’Afrique de l’Est. Elle l’a aussi félicité d’avoir atteint le point d’achèvement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et d’avoir obtenu la levée de l’embargo sur les armes et l’aval du Conseil exécutif de l’Union africaine (UA) pour sa candidature au Conseil de sécurité pour la période 2025-2026.
Abordant la question de la sécurité nationale, la Représentante spéciale Laing a assuré que le Gouvernement fédéral se prépare à la reprise des opérations contre les Chabab après la fin de la saison des pluies. Cela requiert un soutien important de la part des partenaires internationaux devant aider le pays à stabiliser les zones nouvellement reprises. Le retrait de l’ATMIS, prévu le 31 décembre 2024, ne doit pas diminuer la protection des communautés locales, a-t-elle insisté.
La protection des forces et de la population est au nombre des défis lors de cette prochaine étape, a reconnu à son tour le Chef de l’ATMIS en annonçant des discussions « ouvertes et constructives » concernant la troisième phase du retrait de la Mission. M. Mohamed El-Amine Souef s’est déjà félicité du succès de la deuxième phase de retrait des troupes de l’ATMIS, qui s’est faite en collaboration avec le Gouvernement fédéral et le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS). Il a aussi salué la présentation, en décembre 2023 à New York, du plan de développement du secteur de la sécurité de la Somalie, avant d’informer qu’après les consultations du 18 janvier entre la Somalie, l’ONU et l’UA, celle-ci avait déployé une équipe technique pour préparer les modalités de sécurité post-ATMIS.
Les délégations ont pris acte de la récente présentation du cadre stratégique de développement du secteur de la sécurité de la Somalie, à l’instar de Malte qui a estimé que le départ prochain de l’ATMIS nécessitera un appui international important, sur la base de structures de gouvernance locale solides. « Favorable à la transition en temps voulu de l’ATMIS, en conformité avec la demande du Gouvernement somalien », la Chine a demandé que la MANUSOM respecte la transition politique de la Somalie. La France a jugé primordial que l’ensemble des partenaires de la Somalie définissent dès à présent l’appui qui sera apporté au départ de l’ATMIS à la fin de l’année, de même que le Mozambique qui a prôné une coordination des efforts entre la Somalie, l’UA et l’ONU.
Sur le plan régional, la Cheffe de la MANUSOM a rappelé la signature le 1er janvier par l’Éthiopie et le « Somaliland » d’un bail de 50 ans, sur 20 kilomètres de côte, en échange de certains avantages politiques et économiques pour le « Somaliland ». Cet accord a suscité des réactions hostiles de l’opinion publique en Somalie, a fait savoir Mme Laing qui a encouragé le Président somalien à rester mesuré dans sa réponse. Elle a appelé le Conseil de sécurité à souligner l’importance du respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’unité de la Somalie. Regrettant lui aussi ces tensions, le Représentant spécial El-Amine Souef a signalé que le Conseil de paix et de sécurité de l’UA a demandé aux partenaires internationaux de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Somalie.
À ce sujet, la Somalie a dénoncé « l’annexion » par l’Éthiopie d’une partie de son territoire afin d’y établir une base militaire ainsi que la décision d’Addis-Abeba de reconnaître l’indépendance d’un « groupe séparatiste dans la région nord-ouest de la Somalie ». Il s’agit d’une violation flagrante de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de mon pays, a accusé le représentant somalien. Selon lui, l’établissement par l’Éthiopie d’une base militaire en Somalie équivaut à une « déclaration de guerre » contre la Somalie et son peuple.
Le Royaume-Uni et les États-Unis ont appelé à la désescalade de ces tensions. La Suisse a souhaité que les acteurs exerçant une influence l’utilisent pour trouver une solution pacifique. La Slovénie a prié les deux pays concernés de faire preuve de retenue et d’engager un dialogue constructif pour trouver une solution pacifique à ce différend. Pour garantir l’intégrité territoriale et l’unité de la Somalie, il faut l’aider à améliorer l’efficacité des agences fédérales de sécurité et assurer un retrait ordonné de l’ATMIS, a conseillé la Fédération de Russie.
La séance a également apporté un éclairage sur la situation politique. Mme Laing a insisté sur l’importance du soutien public en faveur du principe « une personne, une voix » pour les élections et a misé sur le processus constitutionnel devant être finalisé. Par ailleurs, elle a regretté que la mise en œuvre du quota de 30% de femmes au Parlement reste un défi majeur. Concernant les droits humains, elle a demandé le respect des normes internationales dans la définition du viol dans un nouveau projet de loi. Enfin, le débat a abordé la situation humanitaire, notamment son lien avec les changements climatiques. En 2023, la sécheresse a touché plus de 2,4 millions de personnes, a-t-il été noté. Le Plan de réponse aux besoins humanitaires pour 2024 nécessitera 1,6 milliard de dollars pour bénéficier à 5,2 millions de personnes.
LA SITUATION EN SOMALIE (S/2024/129)
Déclarations
Mme CATRIONA LAING, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la Somalie, qui est aussi Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), a salué les récents progrès accomplis en Somalie sur les fronts politique, économique et en matière de sécurité, notamment l’admission du pays au sein de la Communauté de l’Afrique de l’Est. La Somalie a également atteint le point d’achèvement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et a obtenu la levée de l’embargo sur les armes. Récemment, le pays a obtenu l’aval du Conseil exécutif de l’Union africaine (UA) pour sa candidature au Conseil de sécurité pour la période 2025-2026. Concernant l’incident de Galmudug du 10 janvier, qui a impliqué l’un des hélicoptères de la Mission, Mme Laing a assuré travailler avec le Gouvernement fédéral pour assurer le retour en toute sécurité des passagers et de l’équipage.
Mme Laing a fait le point sur huit domaines à commencer par la situation politique, notamment le soutien public en faveur du principe « une personne, une voix » pour les élections. Toutefois, elle a estimé le calendrier électoral « trop ambitieux » et jugé urgent de parvenir à un consensus inclusif sur le cadre électoral. Rappelant qu’il faut aussi finaliser le processus constitutionnel, elle en a souligné l’importance pour que le pays fixe les règles du jeu permettant de résoudre les crises. Mme Laing a déploré l’absence de cessez-le-feu à Laascaanood et dans la région de Sool et exhorté les parties à œuvrer en faveur d’un échange immédiat de prisonniers, à s’engager à ne plus commettre de violences et à entamer un dialogue pour s’attaquer aux causes du conflit.
Sur le plan régional, la Cheffe de la MANUSOM a rappelé la signature le 1er janvier par l’Éthiopie et le « Somaliland » d’un bail de 50 ans, sur 20 kilomètres de côte, en échange de certains avantages politiques et économiques pour le « Somaliland », un accord qui a suscité des réactions hostiles de la part de l’opinion publique en Somalie. Les Chabab pourraient exploiter cette situation comme outil de recrutement, a-t-elle craint, signalant que le public fait pression sur le Gouvernement somalien pour qu’il réagisse. Mme Laing a toutefois encouragé le Président à rester mesuré dans sa réponse. Elle a appelé le Conseil de sécurité à affirmer l’importance de respecter la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’unité de la Somalie. Les parties doivent mener un dialogue pacifique et constructif et s’abstenir de propos susceptibles d’aggraver encore les tensions, a-t-elle insisté, regrettant que le dernier sommet de l’UA n’ait permis aucun progrès sur cette question.
Concernant la sécurité, le Gouvernement se prépare à la reprise des opérations à grande échelle contre les Chabab, a noté la haute responsable qui a exhorté les partenaires internationaux à fournir les ressources nécessaires pour répondre aux besoins vitaux de stabilisation dans les zones nouvellement reprises. Alors que la planification d’une nouvelle mission dirigée par l’UA à partir de janvier 2024 est en cours, elle a dit que les plans de retrait devraient peut-être être révisés pour permettre une transition en douceur vers une nouvelle force et pour éviter un vide sécuritaire pendant la transition. « Le retrait de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) doit se faire de manière à assurer la protection des communautés locales et à maintenir la présence de la communauté internationale en Somalie. » Mme Laing a en outre salué l’engagement du Gouvernement fédéral, le 11 février, à retirer toutes les munitions explosives de l’arsenal de Halane d’ici au 25 février.
Par ailleurs, Mme Laing a regretté le fait que la mise en œuvre du quota de 30% de femmes au Parlement reste un défi majeur, comme au Puntland où il n’y a qu’une femme sur 66 des nouveaux députés. Le modèle électoral, les questions de sécurité, les structures patriarcales et le manque de financement des campagnes politiques féminines ont tous contribué à cette sous-représentation, a-t-elle expliqué. Concernant les droits humains, la Cheffe de la MANUSOM a pointé certains articles du projet de loi sur les délits de viol et d’indécence, estimant que certaines dispositions devraient être modifiées pour être conformes aux normes internationales en matière de droits humains, notamment la définition du viol. Elle a aussi dit être préoccupée par le nombre élevé d’enfants tués par des restes explosifs de guerre et par des tirs des Chabab, ainsi que par les enlèvements d’enfants par ce groupe à des fins de recrutement et d’utilisation.
S’agissant de la situation humanitaire en lien avec les changements climatiques, la crise humanitaire en Somalie reste grave, a prévenu Mme Laing: en 2023, la sécheresse a touché plus de 2,4 millions de personnes, inondé des terres agricoles et endommagé des infrastructures essentielles. Le Plan de réponse et de besoins humanitaires pour 2024 nécessitera 1,6 milliard de dollars pour répondre aux besoins des 5,2 millions de personnes, soit une réduction de 37% par rapport à 2023.
Poursuivant, la Représentante spéciale a salué le Gouvernement qui a su mener à bien le processus d’allégement de la dette, ce qui fait que la Somalie devra bénéficier d’un financement de la Banque mondiale pendant encore un an. L’ONU appuie les priorités du Gouvernement en matière de mobilisation des recettes intérieures, de responsabilisation et d’engagement à fournir des services sociaux à ses citoyens. Elle a toutefois mis en garde que l’ONU, qui manque de financement pour ses programmes stratégiques, ne sera pas en mesure de respecter le programme de coopération pour le développement durable. Elle a exhorté les partenaires internationaux à mettre des ressources suffisantes à la disposition de la Somalie.
Enfin, Mme Laing a pris note du plan de transition du Gouvernement qui s’engage à prendre sa responsabilité en matière de sécurité, prenant également note de l’intention des partenaires internationaux d’aider le Gouvernement fédéral à lutter contre l’insurrection et à bâtir un avenir stable et prospère. Au fur et à mesure que le retrait de l’ATMIS se poursuit, la Somalie a demandé une nouvelle mission de l’UA réduite et axée sur la protection, a indiqué la Cheffe de la MANUSOM en observant que cette protection sera essentielle pour la mise en œuvre du mandat de l’ONU. Le Gouvernement fédéral demandant également le soutien logistique de l’ONU pour renforcer les capacités nationales, la Mission travaille avec lui et avec l’UA pour explorer toutes les modalités de financement potentielles, y compris par l’application de la résolution 2719 (2023) sur le financement des opérations de soutien de la paix dirigées par l’UA.
M. MOHAMMED EL-AMINE SOUEF, Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine en Somalie et Chef de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), a indiqué avoir informé les partenaires diplomatiques du processus de consolidation en Somalie lors d’une réunion qui s’est tenue le 9 février à Nairobi, s’agissant notamment de la transition en cours. Ces derniers mois, la Somalie a réalisé des avancées considérables, a-t-il noté, en évoquant son adhésion à la Communauté de l’Afrique de l’Est, la levée de l’embargo sur les armes et la tenue de la conférence sur la sécurité en Somalie. Surtout, ce pays a entamé son processus d’amendement constitutionnel, étape essentielle pour promouvoir l’inclusion et poser les jalons de la bonne gouvernance. Les discussions menées par le Président somalien avec les dirigeants du pays montrent à ses yeux son engagement en faveur de l’unité nationale, sur la base des progrès réalisés en 2023.
M. El-Amine Souef a toutefois regretté les récentes tensions politiques qui se sont fait jour entre la Somalie et l’Éthiopie à la suite de la signature du protocole d’accord entre ce pays et le « Somaliland ». Il s’est fait l’écho du Conseil de sécurité et de l’Union africaine (UA) en demandant aux partenaires de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Somalie pour maintenir la stabilité et la coopération dans la région.
Au cours des 18 derniers mois, les forces de sécurité somaliennes, appuyées par l’ATMIS, ont intensifié leurs efforts contre les Chabab, mais ont également essuyé des revers importants, a reconnu le Représentant spécial. Il a condamné les attaques récentes menées par les Chabab contre les camps de l’ATMIS, ajoutant que ce groupe continue de représenter une menace considérable. Autre motif de préoccupation croissante: l’infiltration des houthistes dans la région, pendant que l’ATMIS prépare son retrait avec le départ prévu de 4 000 troupes supplémentaires d’ici à la fin juin, ce qui signifie qu’il restera sur place moins de 10 000 membres du personnel.
Le haut fonctionnaire s’est félicité des progrès de la transition, notamment la présentation, en décembre 2023 à New York, du plan de développement du secteur de la sécurité de la Somalie. Selon lui, la deuxième phase de retrait des troupes de l’ATMIS a été un succès, en collaboration avec le Gouvernement fédéral et le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS). Des discussions ouvertes et constructives sont en cours concernant la troisième phase du retrait, en tenant compte des leçons des phases précédentes et des questions en suspens. La protection des forces et de la population est au nombre des défis qu’envisage M. El-Amine Souef lors de cette prochaine étape.
Le nouveau déploiement d’actifs aériens a par ailleurs permis d’améliorer les opérations de l’ATMIS et son soutien aux forces somaliennes. L’appui du Conseil à ces efforts, s’agissant notamment des capacités militaires, permettra de veiller à ce que le retrait ne mette pas en péril les acquis de haute lutte en matière de sécurité et de stabilité. Après les consultations du 18 janvier entre la Somalie, l’ONU et l’UA, celle-ci a déployé une équipe technique pour préparer les modalités de sécurité post-ATMIS. Lors d’une réunion tenue à Addis-Abeba, les partenaires se sont entendus sur les paramètres essentiels de ces modalités, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA insistant notamment sur la taille, la composition, le financement et le type de mission qui sera déployée.
Le Représentant spécial a exprimé sa reconnaissance de l’adoption de la résolution 2719 (2023) sur le financement des opérations de paix appuyées par l’UA, y voyant le témoignage du partenariat croissant entre cette dernière et l’ONU sur la base de stratégies communes. Enfin, le haut fonctionnaire a appelé toutes les parties à garantir un financement flexible et prévisible en faveur de la stabilité post-ATMIS et du renforcement institutionnel de la Somalie.
Le représentant du Royaume-Uni a indiqué que son pays est un partenaire de longue date de l’Éthiopie et de la Somalie. Il a appelé au dialogue aux fins de désescalade, avant d’apporter son soutien aux efforts de médiation, notamment ceux de l’Union africaine (UA). Le représentant a rappelé l’importance de cette année sur le plan sécuritaire pour la Somalie, puisque les missions de l’ONU et de l’UA doivent quitter le pays, après 15 années de « valeureux services. » Il a souligné les difficultés de financement rencontrées par l’AMISOM et l’ATMIS, en faisant valoir la contribution de son pays afin de les résoudre. Rappelant la nécessité de préserver les progrès accomplis, le délégué a exhorté les partenaires de la Somalie à continuer d’appuyer la transition sécuritaire dans ce pays et à imaginer « des moyens innovants » de poursuivre leur soutien après le départ de l’ATMIS.
S’exprimant au nom des A3+1 (Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone), le représentant du Mozambique s’est félicité des réformes entreprises par le Gouvernement fédéral somalien sur les fronts politique, économique et sécuritaire. Il a également salué l’admission de la Somalie au sein de la Communauté de l’Afrique de l’Est et l’annulation d’une partie de sa dette dans le cadre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, supervisée par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale. Le représentant s’est ensuite réjoui des progrès réalisés par le Gouvernement fédéral somalien dans le domaine de la sécurité, avant d’applaudir l’achèvement de la deuxième phase du plan de retrait de l’ATMIS, qui prévoit le transfert de 13 bases opérationnelles avancées aux forces de sécurité somaliennes. Dans l’optique de la troisième phase de ce retrait, il a exhorté la communauté internationale à continuer de fournir une assistance au secteur de la sécurité somalien. La phase post-ATMIS nécessitera la contribution de tous les partenaires pour capitaliser sur les acquis issus de la création de l’AMISOM (Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie) puis de l’ATMIS, a-t-il souligné, appelant à une coordination des efforts entre la Somalie, l’Union africaine, l’ONU et les partenaires internationaux.
Dans ce contexte, le représentant s’est déclaré préoccupé par la menace persistante que représentent les Chabab pour la paix, la sécurité et la stabilité du pays. Condamnant l’attaque au mortier contre la zone de l’aéroport international d’Aden Adde, le 11 janvier dernier, qui a tué un membre de l’unité de garde de l’ONU, il a attiré l’attention sur le caractère transnational du groupe terroriste et appelé à des efforts multinationaux pour freiner son expansion. Rappelant d’autre part que la Somalie fait face à un cycle dévastateur de sécheresse et d’inondations, il a réitéré son appel à la communauté internationale pour qu’elle augmente son soutien financier au Gouvernement fédéral afin d’accroître l’aide humanitaire et de favoriser la mise en œuvre de programmes de développement. Il a enfin exprimé la gratitude des A3+1 à l’UA, à la MANUSOM, au Bureau d’appui des Nations Unies (BANUS) en Somalie et aux agences, fonds et programmes des Nations Unies en Somalie pour leur travail acharné et leur dévouement envers le peuple somalien.
Le représentant a dit être préoccupé par l’impasse politique sur le modèle électoral et appelé le Gouvernement fédéral à assurer un processus constitutionnel inclusif et consultatif. Le Puntland, les femmes et les jeunes doivent participer aux discussions sur l’édification de l’État fédéral, a-t-il demandé. Saluant les progrès accomplis par la Somalie sur le plan économique, le délégué a déploré une situation humanitaire catastrophique avec 7 millions de personnes dans le besoin. Il a rappelé que la République de Corée a contribué à hauteur de 5,5 millions de dollars depuis 2019 pour aider la Somalie à relever les défis humanitaires, ainsi que 2,3 millions de dollars supplémentaires en 2023 pour la région de la Corne de l’Afrique. Enfin, le délégué a encouragé la MANUSOM à mettre en œuvre des stratégies d’évaluation et de gestion des risques liées au climat.
Le représentant de la Slovénie s’est félicité des étapes importantes franchies récemment par la Somalie, notamment l’achèvement de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés et son adhésion à la Communauté de l’Afrique de l’Est, tout en l’exhortant à poursuivre ses réformes politiques, économiques et du secteur de la sécurité. Il a salué les efforts déployés par le Gouvernement fédéral dans le cadre du dialogue national somalien avec les États fédéraux et les autres parties concernées. Néanmoins, a-t-il noté, la situation humanitaire du pays demeure désastreuse, avec cinq saisons de pluies consécutives ratées suivies d’inondations catastrophiques. Le représentant a donc encouragé les autorités somaliennes à poursuivre leurs efforts d’adaptation au climat. Il a salué « l’ambitieux » plan de développement du secteur de la sécurité présenté par la Somalie lors de la conférence sur la sécurité de décembre dernier, qui comprend la nécessité d’une nouvelle mission multilatérale de soutien et d’assistance pour remplacer l’ATMIS. Le représentant a encouragé la Somalie à travailler en étroite collaboration avec l’Union africaine, l’Union européenne, les organisations régionales, les partenaires bilatéraux et le Conseil de sécurité pour élaborer une proposition viable en vue d’une telle mission, dotée d’un mandat et d’une durée clairement définis.
Considérant que les tensions entre la Somalie et l’Éthiopie pourraient toutefois saper ces progrès et renforcer les efforts de recrutement des Chabab, le délégué a appelé les deux pays à faire preuve de retenue et à engager un dialogue constructif pour trouver une solution pacifique à ce différend.
La représentante de la France a salué les progrès réalisés en Somalie au cours de l’année écoulée, en notant l’intégration du pays au sein de la Communauté des États de l’Afrique de l’Est. Néanmoins, la situation demeure fragile, a-t-elle reconnu. Elle a rappelé que les Chabab continuent de mener des attaques fréquentes, y compris contre les populations civiles et les partenaires internationaux. Elle a jugé primordial que l’ensemble des partenaires de la Somalie définisse dès à présent l’appui qui pourra être apporté au départ de l’ATMIS le 31 décembre prochain. À ce titre, la France salue la stratégie présentée par la Somalie en décembre dernier, qui est très claire et qui nécessite la mobilisation de l’ensemble de la communauté internationale. Seule une réponse coordonnée des partenaires permettra de soutenir efficacement les efforts de la Somalie pour endiguer la menace des Chabab, a conclu la déléguée.
La représentante de la Fédération de Russie a salué le renforcement de la stabilité politique en Somalie et le traitement par les autorités fédérales des questions de réconciliation nationale et d’édification de l’État. Ces processus ont selon elle été favorisés par le succès des offensives menées par l’Armée nationale somalienne avec le soutien de l’ATMIS contre les Chabab, qui continuent de constituer la principale menace pour l’architecture de sécurité du pays et de toute la région de la Corne de l’Afrique. Elle a cependant observé que les islamistes profitent du « vide » dans les zones abandonnées par les Casques bleus africains. Les attaques des Chabab contre l’Éthiopie, le Kenya et l’Ouganda voisins confirment la nature régionale des menaces terroristes, lesquelles nécessitent des mesures collectives, a-t-elle affirmé.
Sur le plan politique, la représentante s’est félicitée des accords passés par le Gouvernement fédéral somalien et les dirigeants des régions sur un calendrier électoral unifié. Pour garantir l’intégrité territoriale et l’unité de la Somalie, il faut, a-t-elle dit, l’aider à améliorer l’efficacité des agences fédérales de sécurité et assurer un retrait ordonné de l’ATMIS, conformément au plan convenu. Elle a dit compter sur le travail coordonné des équipes des Nations Unies dans le pays. La représentante a par ailleurs rappelé l’aide fournie par son pays à la Somalie pour qu’elle se relève des catastrophes naturelles de l’an dernier. Elle a conclu en appelant les autorités éthiopiennes et somaliennes à résoudre le différend né de la signature d’un mémorandum d’accord entre l’Éthiopie et le « Somaliland » sur l’utilisation de la côte de la zone portuaire de Berbera.
Le représentant de l’Équateur a souligné que l’édification de l’État est le seul moyen de parvenir au développement et de mettre fin à la violence armée. Pour y parvenir, a-t-il suggéré, il faut un processus politique démocratique, inclusif et transparent. Il a également voulu que l’on cesse d’exclure les femmes de la prise des décisions politiques, soulignant la nécessité de promouvoir activement leur participation par la mise en œuvre du quota de 30%. Après s’être dit préoccupé par les graves violations des droits de l’enfant perpétrées par les Chabab, le représentant a appelé à une coopération étroite entre le Gouvernement et l’ONU afin de garantir une transition progressive et responsable sans vide sécuritaire et dans le plein respect des droits de l’homme et du droit international. Au moment où l’ATMIS poursuit son retrait, il faut, a souligné le représentant, que les institutions de sécurité somaliennes assument progressivement leurs responsabilités en matière de sécurité, garantissent la protection des civils et enquêtent sur toutes les violations qui pourraient se produire, sans oublier d’en traduire les responsables en justice. Un soutien financier adéquat à l’ATMIS aidera la Somalie à mieux combattre les Chabab, a conclu le représentant.
Le représentant des États-Unis a salué l’intégration de la Somalie au sein de la Communauté de l’Afrique de l’Est, ainsi que son atteinte du point d’achèvement des pays pauvres très endettés. Il a salué la bonne tenue des récentes élections dans le Puntland, avant de déplorer les tensions avec l’Éthiopie. Le délégué a appelé au respect de la souveraineté somalienne, soulignant la nécessité du dialogue aux fins de la désescalade des tensions. Cette situation ne doit pas détourner l’attention de l’importance de consolider les institutions de l’État fédéral en Somalie, a dit le délégué. Enfin, le représentant a salué le consensus international autour d’une mission de suivi après le retrait de l’ATMIS, se félicitant des discussions actuelles avec l’Union africaine à cette fin.
La représentante de Malte s’est d’abord félicitée également de la tenue d’élections pacifiques au Puntland. Elle a encouragé les autorités somaliennes à poursuivre les consultations sur tout amendement constitutionnel et à promouvoir la représentation politique des femmes. Jugeant alarmante la récente hausse des féminicides dans le pays, la représentante a appelé à une action immédiate pour enquêter sur ces crimes, renforcer la protection juridique et mettre fin à l’impunité. Après avoir pris acte de la récente présentation du cadre stratégique de développement du secteur de la sécurité de la Somalie, elle a estimé que le départ prochain de l’ATMIS nécessitera une planification stratégique comprenant un appui international important afin d’assurer la stabilité nécessaire à tout progrès sécuritaire, sur la base de structures de gouvernance locale solides.
La représentante s’est dite impatiente d’examiner la proposition somalienne globale d’ici à la fin du mois prochain, assortie d’une stratégie de sortie claire et d’objectifs mesurables. Face aux cycles de sécheresses et d’inondations qui ravagent le pays, exacerbent les crises humanitaires, entravent le développement et créent un terrain fertile pour les conflits ethniques, elle a exprimé son appui au travail du Conseiller en sécurité climatique de la MANUSOM. Enfin, la représentante a fait siens les appels à la désescalade des tensions entre l’Éthiopie et la Somalie, tout en réitérant son plein soutien à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de celle-ci.
Le représentant de la Chine a estimé que, dans le contexte actuel, le soutien des Nations Unies et de la communauté internationale à la Somalie ne doit pas faillir. Il faut au contraire aider le pays à préserver sa stabilité politique, a-t-il argué, saluant le dialogue mené par le Gouvernement fédéral somalien et les États fédérés sur des questions telles que les structures politiques, l’élaboration d’une constitution et l’organisation d’élections générales. La Chine appuie toutes les parties pour qu’elles règlent leurs différends par le dialogue et la consultation, a affirmé le représentant, avant de souligner que le processus politique en cours relève des affaires internes de la Somalie et qu’il convient d’éviter toute ingérence extérieure. En s’acquittant de son mandat, la MANUSOM doit donc respecter la transition politique de la Somalie, pilotée par le pays et lui seul, a-t-il insisté. De même, la Chine est favorable à la transition en temps voulu de l’ATMIS, conformément à la demande du Gouvernement somalien.
Pour le représentant, les attaques des Chabab rappellent que le terrorisme reste la principale menace en Somalie. Pour y répondre, le secteur de la sécurité doit être renforcé, a-t-il préconisé, se disant également favorable à un retrait progressif, responsable et souple de l’ATMIS d’ici à la fin de cette année, sur la base d’une évaluation exhaustive de la situation. Après ce retrait, toutes les modalités futures devront satisfaire aux besoins sécuritaires de la Somalie, a-t-il plaidé, avant d’exhorter les bailleurs de fonds à ne pas réduire leur soutien et à ne pas se laver les mains de ce qui se passera par la suite. À cet égard, le représentant a salué le récent lancement de la Vision 2060 du Gouvernement fédéral somalien, qui fixe les priorités nationales de développement. Notant par ailleurs que la Somalie a atteint le point d’achèvement de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés, il a invité les institutions financières internationales à saisir cette occasion pour renforcer leur assistance, sans attacher de conditions politiques au financement.
Le représentant de la Suisse s’est inquiété de la montée des tensions résultant des dernières controverses concernant le « Somaliland ». Il a recommandé que les parties poursuivent sur la voie d’un dialogue pacifique et que les acteurs exerçant une influence l’utilisent pour trouver une solution pacifique. L’offensive contre les Chabab doit rester au premier plan des préoccupations sécuritaires, a-t-il souhaité, pendant que le processus de sortie de l’ATMIS se poursuit. Il a estimé qu’en levant l’embargo sur les armes, le Conseil a démontré sa volonté de se tourner vers l’avenir, un avenir dont il faut discuter maintenant. Le délégué a suggéré que les mesures visant à réduire la présence internationale reflètent la situation sur le terrain, soulignant le caractère essentiel de la fourniture de services de base et de la sécurité dans les territoires nouvellement récupérés.
Par ailleurs, le délégué a encouragé à adopter un modèle électoral basé sur le principe « une personne, une voix », soulignant l’importance d’atteindre le quota de 30% de femmes parlementaires. Le représentant a aussi appelé à mener la révision constitutionnelle dans un espace civique sûr et inclusif, arguant que la coopération entre citoyens, États fédéraux et le Gouvernement central est le fondement de la cohésion nationale. En Somalie, il faut aussi prendre en compte les menaces liées aux changements climatiques, à l’insécurité alimentaire et aux conflits. Pour éviter que la situation ne se dégrade avec la saison des pluies, il a jugé crucial de déployer des actions d’anticipation. La Suisse soutient à cet effet le Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF). À plus long terme, le délégué a suggéré une coordination renforcée aux niveaux local, fédéral et régional, afin de mieux anticiper et gérer ces crises complexes.
La représentante du Japon a rappelé que, le mois dernier, l’ATMIS avait achevé la deuxième phase de son retrait dans le cadre du plan de transition sécuritaire. Face à la menace des Chabab, il est selon elle de la plus haute importance d’accélérer la réforme du secteur de la sécurité afin d’assurer une présence suffisante des forces de sécurité somaliennes en vue d’une transition en douceur. À cette fin, a-t-elle indiqué, le Japon a décidé en novembre dernier de débourser environ 1,8 million de dollars pour soutenir la Police somalienne dans ses opérations dans les zones fragiles et nouvellement récupérées, en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).
Saluant les efforts déployés par les autorités somaliennes pour placer ce processus dans un cadre juridique clair, la représentante a estimé que le soutien aux forces somaliennes qu’apportent les pays contributeurs de troupes à l’ATMIS continue d’être essentiel pour le succès de la transition sécuritaire. Elle a d’autre part plaidé en faveur d’un renforcement de la résilience de la société somalienne pour empêcher toute intrusion des Chabab dans ses zones de faiblesse. Cela implique de rendre les services de base accessibles à tous et de mener des réformes économiques avec l’appui des institutions financières internationales, a-t-elle affirmé, avant de souligner la vulnérabilité de la Somalie aux chocs climatiques et son besoin d’une aide humanitaire continue. Enfin, après avoir pris note des discussions au sein de l’Union africaine sur la configuration de sécurité post-ATMIS, elle a assuré que le Japon est impatient de participer aux futures délibérations sur un éventuel engagement de l’ONU.
Le représentant de la Somalie a demandé l’élaboration d’une feuille de route en vue de la transition des activités de la MANUSOM vers l’équipe de pays de l’ONU. Il a dénoncé l’annonce par l’Éthiopie de « l’annexion » d’une partie de la Somalie afin d’y établir une base militaire ainsi que la décision de reconnaître l’indépendance du « groupe séparatiste dans la région nord-ouest de la Somalie », y voyant une violation flagrante de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de son pays. Le Gouvernement somalien condamne les « actions illégales et les efforts trompeurs » de l’Éthiopie pour déguiser sa « tentative ratée » d’annexion d’un territoire somalien, en avertissant qu’ils compromettent la stabilité de la région. Selon lui, l’établissement par l’Éthiopie d’une base militaire en Somalie équivaut à une « déclaration de guerre » contre la Somalie et son peuple, en plus de raviver les Chabab et les tensions régionales.
Dans ce contexte, Mogadiscio a porté ces violations à l’attention du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, a dit le représentant en regrettant que le Gouvernement éthiopien n’ait pas assisté à la réunion convoquée par le Conseil pour en discuter. Il est donc clair, selon le représentant, que l’Éthiopie entrave délibérément la coopération bilatérale. Compte tenu des graves répercussions régionales et internationales de ce comportement, il incombe selon lui à l’ONU et à l’UA de veiller à prévenir les conflits et à assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Bien que le Gouvernement somalien soit prêt à faire preuve de la plus grande retenue, il se réserve le droit de répondre aux menaces découlant des violations de son intégrité territoriale et de son unité, conformément au droit international, a déclaré le délégué.