9548e SÉANCE - MATIN
CS/15590

Conseil de sécurité: l’escalade des tensions en mer Rouge n’empêche pas l’Envoyé spécial au Yémen de présenter une feuille de route « convaincante »

M. Hans Grundberg, Envoyé spécial pour le Yémen, a présenté ce matin au Conseil de sécurité, par visioconférence, sa feuille de route en trois points pour sortir le Yémen du conflit, axée sur la désescalade, la cessation des provocations militaires et la sauvegarde des progrès accomplis vers la conclusion d’un accord.  Un bilan humanitaire a en même temps été présenté par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA): plus de 18 millions de personnes pourraient avoir besoin d’aide et de protection au Yémen en 2024.  Les délégations ont appelé à aider le pays dont le représentant a accusé les rebelles houthistes d’être responsables de l’escalade actuelle en mer Rouge. 

Avant de présenter sa feuille route, M. Grundberg a souligné que depuis près de deux ans, un calme relatif régnait le long des lignes de front et que les principaux acteurs poursuivaient les négociations en vue de mettre fin au conflit.  Fin décembre 2023, a-t-il rappelé, les parties se sont engagées à instaurer un cessez-le-feu, à améliorer les conditions de vie de la population et à relancer un processus politique intra-yéménite.  Et elles se sont engagées à travailler avec lui pour mettre en œuvre ces engagements. 

L’Envoyé spécial a toutefois reconnu que la montée des tensions régionales liées à la guerre à Gaza, et en particulier l’escalade militaire en mer Rouge, avait ralenti le rythme de ses efforts de paix.  Il a demandé de préserver l’espace politique en souhaitant que les canaux de communication restent ouverts et que tous les acteurs s’impliquent dans les efforts de médiation.  Lors de ses déplacements à l’intérieur du pays, il a lui-même appelé à maintenir le calme sur les lignes de front et à préserver les progrès accomplis.

De même, à l’occasion de ses voyages en Iran, à Oman, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, il a sensibilisé ses interlocuteurs à la nécessité d’établir un environnement propice au règlement du conflit au Yémen. Sa médiation est « suffisamment souple pour s’adapter à différents scénarios et défis », a-t-il assuré.  Pour créer une sortie au dangereux cycle d’escalade, M. Gunsberg a suggéré trois issues de secours: des efforts de tous en vue de la désescalade régionale; la fin des provocations militaires par les parties yéménites; et la sauvegarde des progrès accomplis jusqu’à présent vers la conclusion d’un accord. 

Pour M. Grundberg, la feuille de route de l’ONU en cours de discussion offre une « alternative convaincante » au conflit et à la ruine économique.  Une feuille de route effectivement appréciée par les A3+ (Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone) qui ont soutenu les discussions actuelles autour de ce plan, sous les auspices de l’ONU, en vue de l’opérationnalisation d’un cessez-le-feu national et de la reprise d’un processus politique inclusif.  Ces pays ont aussi insisté sur le plein respect de la souveraineté du Yémen. 

Le représentant du Yémen a dit soutenir ces efforts de l’Envoyé spécial après avoir plaidé pour la paix dans son pays.  Le Yémen est ouvert aux initiatives de paix, en particulier l’Accord de Riyad, a encore déclaré le délégué avant de dénoncer les houthistes qui refusent les efforts de médiation de M. Grundberg.  Ces rebelles sont d’ailleurs responsables de l’escalade actuelle en mer Rouge, a pointé le délégué du Yémen pour qui cette escalade n’a rien à voir avec la guerre à Gaza.  Il a d’ailleurs salué la décision des États-Unis d’inscrire ces rebelles sur leur liste des organisations terroristes.  Une décision dont la délégation américaine a indiqué avoir reporté la mise en œuvre, à la demande des acteurs humanitaires. 

Les membres du Conseil se sont tous inquiétés de l’impact des attaques des houthistes, qui alourdissent les frais de transport, y compris ceux des livraisons humanitaires, comme l’a souligné le Royaume-Uni.  C’est pourquoi ce pays, a-t-il expliqué, a pris des mesures « nécessaires et proportionnées » de légitime défense -de concert avec l’Australie, Bahreïn, le Canada, le Danemark, les Pays-Bas et la Nouvelle-Zélande- à l’encontre de cibles liées aux attaques des houthistes.  La délégation des États-Unis a elle aussi indiqué avoir pris de telles mesures pour exercer son droit à la légitime défense et pour empêcher les houthistes de s’attaquer aux navires commerciaux en mer Rouge, dans le détroit de Bab-el-Mandab et dans le golfe d’Aden.  Elle a rappelé que le rapport du Secrétaire général publié la semaine dernière sur la sécurité maritime en mer Rouge demande aux houthistes de mettre fin à leurs attaques contre des navires commerciaux, en vertu de la résolution 2722 (2024) du Conseil de sécurité. 

La Chine a vu d’un autre œil ces réactions, faisant observer que le Conseil de sécurité n’avait jamais autorisé un pays à recourir à la force contre le Yémen. Aucun pays ne devrait abuser du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité pour créer de nouvelles tensions en mer Rouge, a martelé le délégué chinois.  C’est la remarque qu’a faite également la Fédération de Russie en jugeant dangereuse l’approche des pays occidentaux au motif qu’elle sape toute l’architecture sécuritaire internationale.  Le délégué russe a déploré que l’Union européenne ait décidé d’emboîter le pas aux États-Unis en lançant sa propre mission en mer Rouge.  En effet, comme l’a mentionné la France, l’opération européenne ASPIDES en mer Rouge sera prochainement lancée au nom du droit des États de défendre leurs navires contre les attaques des houthistes. 

La Directrice des opérations et du plaidoyer de l’OCHA, Mme Edem Wosornu, a quant à elle alerté sur la hausse inquiétante des coûts des transports vers les ports d’Aden et de Hodeïda, qui doublent selon le Programme alimentaire mondial (PAM), ou triplent même selon certaines organisations humanitaires.  S’inquiétant des effets de cette inflation sur l’économie du Yémen, elle a prévenu que l’aide humanitaire ne pouvait combler le manque de biens commerciaux essentiels.  Elle a appelé à donner la priorité au financement du cadre de développement des Nations Unies, pour un montant de 1,3 milliard de dollars, pour les 18 millions de personnes (soit plus de la moitié de la population) qui ont besoin d’aide et de protection au Yémen.  À l’instar du Secrétaire général et de plusieurs délégations, Mme Wosornu a appelé à respecter la résolution 2722 (2024) du Conseil de sécurité pour éviter d’aggraver encore la situation au Yémen.

 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a dit que le Yémen et la région se trouvent à un moment très difficile bien que depuis près de deux ans, un calme relatif règne le long des lignes de front, et que les principaux acteurs poursuivent les négociations en vue de mettre fin au conflit.  Fin décembre 2023, les parties se sont engagées à un cessez-le-feu, à améliorer les conditions de vie de la population et à relancer un processus politique intra-yéménite.  L’Envoyé spécial a annoncé que les parties se sont engagées à travailler avec lui pour mettre en œuvre ces engagements. 

Aujourd’hui, a enchaîné M. Grundberg, la médiation est beaucoup plus complexe à cause des priorités et des intérêts divergents.  La montée des tensions régionales liées à la guerre à Gaza, et en particulier l’escalade militaire en mer Rouge, ralentit le rythme des efforts de paix au Yémen.  Ce qui se passe au niveau régional a un impact sur le Yémen, et ce qui se passe au Yémen peut avoir un impact sur la région, a résumé l’Envoyé spécial.  Il a rappelé qu’en réponse aux attaques répétées d’Ansar Allah contre des navires en mer Rouge, les États-Unis et le Royaume-Uni avaient frappé des installations de stockage d’armes, des systèmes de missiles et d’autres cibles dans les zones contrôlées par Ansar Allah au Yémen.  Dans les prochains jours, les États-Unis devraient désigner Ansar Allah comme un groupe terroriste, a-t-il ajouté.  Préoccupé par ces évolutions, l’Envoyé spécial a demandé de préserver l’espace politique: les canaux de communication doivent rester ouverts et tous les acteurs s’impliquer dans les efforts de médiation. 

Au Yémen, un sentiment d’appréhension prévaut le long de plusieurs lignes de front, a poursuivi M. Grundberg se disant préoccupé par les menaces de reprendre les combats dans un pays où les défis économiques sont énormes.  Les fonctionnaires, en particulier dans les zones contrôlées par Ansar Allah, n’ont pas reçu l’intégralité de leurs salaires. Les habitants des zones contrôlées par le Gouvernement sont confrontés à des coupures de courant prolongées et à une hausse des prix en raison de la dépréciation de la monnaie.  Lorsqu’il s’est rendu à Aden, Moka et Taëz, l’Envoyé spécial a appelé à maintenir le calme sur les lignes de front et à préserver les progrès accomplis, a-t-il relaté. 

M. Grundberg a assuré que sa médiation est suffisamment souple pour s’adapter à différents scénarios et défis, informant que ses voyages en Iran, à Oman, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis avaient porté sur la nécessité d’établir un environnement propice au règlement du conflit au Yémen.  Pour créer une sortie à ce dangereux cycle d’escalade, l’Envoyé spécial a suggéré trois issues de secours, d’abord la nécessité d’une désescalade régionale.  À cet égard, l’ONU mise sur la diplomatie, a-t-il indiqué avant de réitérer l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu humanitaire immédiat à Gaza. Il a appelé les parties yéménites et les acteurs régionaux à soutenir la désescalade en mer Rouge afin de protéger la médiation au Yémen. 

Deuxièmement, a poursuivi le haut fonctionnaire, les parties yéménites doivent cesser les provocations et s’abstenir d’action militaire à l’intérieur du pays en cette période délicate.  Il a indiqué avoir reçu l’assurance que toutes les parties préfèrent la voie de la paix.  Troisièmement, les parties doivent sauvegarder les progrès qui ont été accomplis jusqu’à présent vers la conclusion d’un accord.  L’escalade régionale ne doit pas occulter le besoin urgent d’un cessez-le-feu au Yémen, du paiement des salaires des fonctionnaires, de la reprise des exportations de pétrole, de l’ouverture des routes, des ports et des aéroports, de la reconstruction et d’autres éléments qui ont fait l’objet de négociations. 

M. Grundberg a rappelé que les parties doivent encore s’engager dans des structures de dialogue durables sous les auspices de l’ONU pour mettre en œuvre ces mesures et répondre à d’autres priorités.  Il s’est entretenu avec les parties sur les détails d’un mécanisme de cessez-le-feu en s’appuyant sur le Comité de coordination militaire mis en place pendant la trêve.  Il a dit préparer la création d’un comité économique mixte facilité par l’ONU pour soutenir la mise en œuvre des mesures économiques convenues et négocier d’autres priorités à court et à long terme.  La paix est un projet politique dont l’épine dorsale est un processus politique intra-yéménite crédible et soutenu par la communauté internationale, a-t-il décrit en soulignant l’importance pour les Yéménites de décider eux-mêmes de la manière de mettre fin durablement à la guerre et de construire un nouvel avenir politique. 

Pour M. Grundberg, la feuille de route de l’ONU en cours de discussion offre une alternative convaincante au conflit et à la ruine économique.  Il a dit travailler à la conclusion d’un accord qui permette aux parties de se réunir, de négocier les priorités (politiques, économiques, militaires et sécuritaires) et de faire une différence dans la vie du peuple yéménite.  Bien que les points de vue varient au Conseil, ses membres ont la responsabilité collective de protéger l’espace de médiation et de veiller à ce que les Yéménites aient une réelle chance de paix, a-t-il conclu.

Mme EDEM WOSORNU, Directrice des opérations et du plaidoyer du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), s’est dite gravement préoccupée par la crise qui se propage dans la région et risque d’entraîner une recrudescence de la violence.  Brossant le sombre tableau de la situation humanitaire dans le pays, elle a rappelé qu’en 2024, plus de 18 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population, auraient besoin d’aide et de protection, et que 17,6 millions de personnes souffriraient d’une grave insécurité alimentaire.  Face à cette situation, elle a rappelé que le plan de réponse humanitaire n’avait été financé qu’à hauteur de 40% en 2023.  Affirmant que le plan de réponse 2024 était plus ciblé, et calibré pour 11,2 millions de personnes, elle s’est toutefois inquiétée d’un manque de ressources qui pourrait entraîner une détérioration rapide de la sécurité alimentaire dans plusieurs régions du pays, affectant notamment 2,4 millions d’enfants et 900 000 femmes.  Elle a également estimé qu’il fallait considérer comme une priorité le financement du cadre de développement des Nations Unies, pour un montant de 1,3 milliard de dollars. 

Dans le contexte de la crise sécuritaire qui affecte la région depuis novembre dernier, la Directrice des opérations et du plaidoyer s’est inquiétée de l’augmentation des coûts de transport vers les ports d’Aden et de Hodeïda, qui peuvent aller jusqu’à doubler selon le PAM, voire même jusqu’à tripler selon d’autres organisations humanitaires.  S’inquiétant des effets de cette inflation sur l’économie du Yémen, elle a affirmé que l’aide humanitaire ne pouvait combler le manque de biens commerciaux essentiels.  Elle a indiqué que la valeur du rial yéménite s’était encore affaissée dans les zones tenues par le Gouvernement, atteignant son niveau le plus bas ces deux dernières années et érodant le pouvoir d’achat des habitants.  À l’instar du Secrétaire général, elle a appelé à respecter la résolution 2722 (2024) du Conseil de sécurité pour éviter d’aggraver encore la situation au Yémen.  Le pays est le troisième plus vulnérable au monde face aux changements climatiques et l’un des moins préparés à les affronter, a-t-elle rappelé, ajoutant que près des trois quarts des personnes récemment déplacées au Yémen le sont en raison d’événements climatiques extrêmes.

La représentante du Royaume-Uni a encouragé le Conseil à continuer d’apporter un soutien inébranlable à l’Envoyé spécial.  Les parties yéménites doivent continuer d’engager l’ONU de manière constructive, a-t-elle dit, en rappelant qu’il ne peut y avoir de solution militaire au conflit.  Malgré les appels répétés à la désescalade, les houthistes ont continué leurs attaques illicites et déstabilisatrices en mer Rouge, s’est désolée la représentante. Elle a fait remarquer que ces attaques alourdissent les frais de transport, y compris ceux des livraisons humanitaires.  « C’est pourquoi nous avons pris des mesures nécessaires, proportionnées, de légitime défense, de concert avec l’Australie, Bahreïn, le Canada, le Danemark, les Pays-Bas et la Nouvelle-Zélande contre des cibles liées aux attaques des houthistes », a-t-elle justifié. 

Le représentant de la République de Corée a souhaité exprimer une position claire sur la nécessité d’assurer la navigation.  Il a partagé ses préoccupations à propos des récentes attaques houthistes contre des navires commerciaux, en dépit des messages répétés de la communauté internationale, et dénoncé leur caractère inacceptable.  À ce titre, il a rappelé que la résolution 2722 (2024) du Conseil de sécurité confirme le droit des États Membres à défendre leurs navires, dans le cadre du droit international. 

Déplorant un conflit qui dure depuis presque 10 ans, sans fin prochaine en vue, il a rappelé que près de la moitié de la population a besoin d’aide humanitaire.  Une situation aggravée par l’insécurité alimentaire et les changements climatiques, a-t-il poursuivi, exhortant les houthistes à concentrer plutôt leurs efforts sur les difficultés du peuple yéménite, en collaboration avec les organisations internationales.  Il les a aussi invités à entendre les appels de la communauté internationale pour améliorer la situation des droits humains dans le nord du pays.  Enfin, il a conclu son intervention par un appel au cessez-le-feu permanent, préconisant un processus de transition politique qui s’appuie également sur les groupes marginalisés comme les femmes et les jeunes, et réitérant son soutien au travail de l’Arabie saoudite et d’Oman pour parvenir à un accord final.

La représentante de la France a appelé les houthistes à cesser leurs actions armées en mer Rouge, les accusant de porter l’entière responsabilité de l’escalade actuelle.  Elle leur a aussi demandé de libérer immédiatement le Galaxy Leader et son équipage. La résolution 2722 (2024) rappelle que l’exercice des droits et libertés de navigation doit être respecté et que les États ont le droit de défendre leurs navires contre les attaques, a souligné la déléguée en disant que la France continuera à contribuer à la sûreté maritime dans cette zone, en lien avec ses partenaires de la région.  Elle a salué, à cet égard, le lancement prochain de l’opération européenne ASPIDES en mer Rouge.  Elle a souhaité toutefois que les graves violations du droit international commises par les houthistes en mer Rouge ne détournent pas l’attention de la situation à l’intérieur du Yémen où il faut transformer la trêve partielle en cessation des hostilités complète et durable. 

Alors que près de la moitié de la population souffre d’insécurité alimentaire, la réponse humanitaire ne doit pas pâtir des conséquences concrètes des tensions en mer Rouge, a insisté la représentante.  Elle a accusé les houthistes d’entraver l’accès humanitaire des partenaires sur le terrain, affirmant leur « claire » responsabilité dans la dégradation de la situation humanitaire au Yémen.  Elle a assuré du soutien de la France au mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies qui lutte avec efficacité contre les trafics d’armes en mer Rouge, demandant qu’il soit mieux financé.  La représentante a conclu en invitant à poursuivre le processus de paix, selon la feuille de route de l’Envoyé spécial, le Conseil devant rester mobilisé pour parvenir à un plan de paix.  La participation pleine, égale, substantielle et effective des femmes yéménites aux négociations politiques doit être garantie, a-t-elle aussi réclamé.

Le représentant de la Chine s’est dit préoccupé par l’escalade en cours en mer Rouge -en particulier des opérations militaires d’un certain nombre de pays contre le Yémen- qui aggrave la situation sécuritaire dans la région et porte un coup au processus politique en cours au Yémen.  Il a appelé les houthistes à mettre fin aux attaques contre les navires commerciaux, avant de rappeler que le Conseil de sécurité n’avait jamais autorisé un pays à recourir à la force contre le Yémen.  « Aucun pays ne devrait abuser du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité pour créer de nouvelles tensions en mer Rouge », a-t-il averti. 

Soulignant la fragilité de la situation humanitaire dans le pays, il a appelé la communauté internationale à accroître son soutien au Yémen.  Il s’est également inquiété du fait que le conflit à Gaza était sur le point d’entraîner une « déflagration régionale » et représentait un « danger extrême ».  Il a demandé aux membres du Conseil de redoubler d’efforts pour obtenir un cessez-le-feu immédiat à Gaza, exhortant les pays concernés à entendre les appels forts de la communauté internationale.  « Il faut cesser de faire obstruction au travail du Conseil de sécurité pour aboutir à un cessez-le-feu aussi vite que possible », a-t-il martelé en conclusion.

Le représentant de la Fédération de Russie a indiqué qu’il aurait pu se concentrer dans son intervention sur les pourparlers intra-yéménites.  Mais la situation s’est compliquée en raison de l’agression et des frappes d’une coalition de pays, en violation de la souveraineté du Yémen, a-t-il dénoncé.  Il a affirmé que les frappes de ces pays ne sont pas conformes à la Charte des Nations Unies, la légitime défense ne pouvant être invoquée pour des navires commerciaux.  Il a rappelé que le Conseil n’a pas autorisé de telles frappes, avant de dénoncer l’interprétation erronée faite de la résolution 2722 (2024).  L’approche des pays occidentaux est dangereuse, car elle sape toute l’architecture sécuritaire internationale.  De même, il a déploré que l’Union européenne ait décidé d’emboîter le pas des États-Unis en lançant sa propre mission en mer Rouge.  Il a condamné les attaques contre les navires commerciaux, avant de souligner les risques que font peser les actions occidentales pour le processus yéménite.  L’approche destructrice de l’Occident ne fait qu’alimenter le chaos dans la région, s’est-il alarmé.  Enfin, il a rappelé la cause profonde de la situation actuelle, à savoir la « cruelle opération militaire israélienne » à Gaza, et réclamé un cessez-le-feu.

Le représentant de Malte a souligné l’importance d’une feuille de route de l’ONU pour garantir le respect des engagements pris par les parties en décembre, notamment en ce qui concerne un cessez-le-feu à l’échelle nationale et la reprise d’un processus politique dirigé par les Yéménites sous les auspices des Nations Unies.  Neuf ans après le début du conflit, 18 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire et de protection, la sécurité alimentaire est compromise et le manque d’accès à l’eau potable entraîne une augmentation des maladies infectieuses, s’est-il alarmé.  Dans ce contexte, il a considéré que le plan de réponse humanitaire de l’ONU pour 2024 représente une bouée de sauvetage. 

Déplorant les restrictions de mouvement infligées aux femmes travaillant dans l’humanitaire, il a exhorté les houthistes à lever les exigences du mahram. Rappelant que le pays figure parmi les nations les plus vulnérables aux changements climatiques, il a appelé au renforcement des systèmes d’alerte précoce et au déploiement de stratégies agricoles et alimentaires résilientes.  Enfin, partageant son inquiétude à propos des récentes escalades de violence dans la région, il a appelé les houthistes à cesser leurs attaques contre la navigation commerciale, et exhorté les États Membres qui défendent leur flotte à agir dans le cadre du droit international.

Le représentant des États-Unis a rappelé que le rapport du Secrétaire général publié la semaine dernière sur la sécurité maritime en mer Rouge demandait aux houthistes de mettre fin à leurs attaques contre des navires commerciaux, en vertu de la résolution 2722 (2024) du Conseil de sécurité.  Il a appelé le Conseil à continuer d’exiger d’eux qu’ils y mettent un terme.  Il a indiqué que son pays, en réponse aux attaques contre ses navires, avait pris des mesures nécessaires et proportionnées pour exercer son droit à la légitime défense et pour empêcher les houthistes de s’attaquer aux navires commerciaux en mer Rouge, dans le détroit de Bab-el-Mandab et dans le golfe d’Aden.  Répétant que les États-Unis ne souhaitaient pas un conflit supplémentaire dans la région, il a appelé les houthistes à libérer les 25 membres d’équipage du Galaxy Leader, qui sont détenus depuis près de trois mois. 

L’Iran ne peut nier son rôle de « facilitateur » des attaques lancées par les houthistes, a estimé le représentant en voyant dans ce soutien une violation des résolutions 2140 (2014) et 2216 (2015).  Il a rappelé que depuis 2015, les États-Unis et leurs partenaires avaient intercepté au moins 18 navires contenant des armes destinées aux houthistes et que le 11 janvier dernier, la marine américaine avait intercepté un navire en provenance d’Iran contenant des composants pour fabriquer des missiles antinavires.  Il a appelé tous les États Membres, notamment ceux disposant de canaux directs avec l’Iran, à exercer des pressions sur ce pays et sur les houthistes pour faire cesser les attaques en mer Rouge.  Il a accusé les houthistes de tenter « d’asphyxier le commerce en mer Rouge », expliquant que le fait de contourner l’Afrique coûtait en moyenne 10 jours et 1 million de dollars supplémentaires à chaque navire reliant l’Asie à l’Europe. 

Le mois dernier, les États-Unis ont décidé d’inscrire Ansar Allah, c’est-à-dire le mouvement houthiste, sur leur liste des organisations terroristes internationales, avec effet le 16 février, a enfin informé le représentant.  Il a précisé que la mise en œuvre de la mesure avait été reportée à la demande des acteurs humanitaires dont le travail pourrait être affecté, et que des mesures d’atténuation étaient à l’étude.

La représentante de la Suisse a souligné l’importance de préserver les acquis des discussions en cours, exhortant les parties à s’engager en faveur d’un processus inclusif sous l’égide des Nations Unies.  Sans un engagement soutenu de tous les acteurs, y compris la participation significative des femmes, les propositions de paix manqueront de perspective et ne seront pas à même d’assurer une sécurité durable dans le pays, a-t-elle indiqué.  La déléguée a appelé les parties à la prudence, à la retenue et au respect du droit international, avertissant qu’une nouvelle dégradation de la situation aura des conséquences humaines et économiques dévastatrices.  Elle s’est en outre inquiétée du fait que des « millions d’enfants » portent des fusils à la place de leur cartable, et a appelé les parties à mettre en œuvre leurs plans d’action pour mettre fin et prévenir les violations graves à l’encontre des enfants. 

Notant par ailleurs que l’augmentation des catastrophes naturelles exacerbe la crise humanitaire en cours, la représentante a jugé nécessaire d’intensifier l’aide humanitaire et de renforcer les systèmes d’alerte précoce. Elle a également appelé à contrer le manque structurel des ressources en eau par des mesures politiques sensibles aux défis liés à l’eau afin de prévenir de futurs conflits relatifs à cette problématique.

Le représentant de la Slovénie a appelé à ne pas oublier les souffrances des Yéménites après neuf ans de guerre.  Il a pleinement appuyé les efforts de l’ONU en vue de transformer la trêve en un cessez-le-feu national, respecté par toutes les parties.  Il a insisté sur la nécessité d’un dialogue intra-yéménite inclusif, la voix des jeunes et des femmes devant être prise en compte.  Il a demandé la fin des attaques des houthistes en mer Rouge et appelé à la plus grande retenue en ce qui concerne toute action qui pourrait aggraver la situation dans la région.  Enfin, il a réclamé un cessez-le-feu à Gaza.

Le représentant de l’Équateur a averti que les attaques des houthistes en mer Rouge risquent d’entraver l’élaboration d’une feuille de route.  Une paix durable ne peut se concrétiser qu’à travers le dialogue entre les parties yéménites, a-t-il souligné.  Il a appelé au respect de la résolution 2722 (2024), exhortant les houthistes à cesser leurs hostilités contre les navires commerciaux et à libérer tous les membres d’équipage détenus. 

Il a partagé ses craintes qu’une escalade du conflit ne finisse par réduire à néant la légère amélioration de la situation humanitaire qu’a connue le Yémen en 2023.  Il a notamment souligné des retards dans les expéditions de carburant et de nourriture, les imputant aux attaques houthistes en mer Rouge.  Face à cette situation, a-t-il poursuivi, de nouvelles projections montrent que la part de la population confrontée à l’insécurité alimentaire dans les zones contrôlées par le Gouvernement du Yémen risque d’augmenter de 41% à 45%, soit l’équivalent de 4,56 millions de personnes.  En outre, les hostilités pourraient contraindre les organisations humanitaires à suspendre leur travail, s’est-il alarmé, avant d’exhorter les parties à s’abstenir de toute action susceptible d’entraîner un nouveau conflit armé.

Le représentant du Japon, se référant aux récentes remarques du Secrétaire général devant l’Assemblée générale, a rappelé que les menaces permanentes des houthistes contre la sécurité maritime en mer Rouge avaient entraîné une forte diminution des échanges commerciaux via le canal de Suez, contraignant les navires commerciaux reliant l’Asie à l’Europe à contourner l’Afrique.  Regrettant que des entreprises du monde entier en subissent les conséquences en termes de coût et de dépenses énergétiques, il a réitéré sa condamnation des attaques des houthistes en exigeant qu’elles cessent immédiatement. Il a également condamné la « saisie » du Galaxy Leader, navire japonais, et exigé sa libération immédiate avec ses 25 membres d’équipage, que les houthistes détiennent illégalement depuis près de trois mois. 

Déplorant la « situation humanitaire dévastatrice » dont souffre le peuple du Yémen depuis neuf ans, le délégué a dit craindre sérieusement que l’augmentation des coûts d’importation et les retards dus aux risques sécuritaires croissants en mer Rouge ne fassent qu’aggraver la situation.  Son pays est très préoccupé par la grave malnutrition et les pénuries alimentaires observées dans tout le Yémen, a-t-il dit, espérant sincèrement que le Programme alimentaire mondial (PAM) puisse reprendre ses opérations vitales dès que possible.  Face à l’importante pénurie de fonds humanitaires, il a rappelé que le Japon avait récemment décidé d’apporter une contribution supplémentaire de plus de 18 millions de dollars au Yémen, dont 2 millions de dollars au PAM.

La représentante du Guyana, parlant également au nom de l’Algérie, de la Sierra Leone et du Mozambique, les A3+, a appelé au plein respect de la souveraineté du Yémen.  Elle a souligné l’importance de préserver les récents engagements annoncés par les parties en décembre 2023, ainsi que les discussions actuelles autour d’une feuille de route sous les auspices de l’ONU en vue d’une opérationnalisation d’un cessez-le-feu national et d’une reprise d’un processus politique inclusif.  Elle a exhorté les houthistes à adhérer au processus de paix et à préserver l’objectif d’un cessez-le-feu.  Dans ce droit fil, la déléguée a demandé que les houthistes mettent un terme à leurs menaces contre les navires commerciaux. 

Elle s’est dite extrêmement préoccupée par la détérioration de la situation humanitaire, en notant que 18,2 millions de Yéménites auront besoin d’une aide en 2024. Les parties ont l’obligation de laisser le personnel humanitaire faire son travail, a prié la déléguée, en demandant la libération de tous les travailleurs humanitaires.  Enfin, elle a déploré l’escalade dans la région.  Les attaques qui frappent le Yémen aggravent la situation sécuritaire et compromettent les pourparlers de paix, a-t-elle conclu.  « Nous appelons à la prudence pour toute action qui pourrait saper les efforts de l’Envoyé spécial. » 

Le représentant du Yémen a plaidé pour la paix dans son pays, faisant remarquer que la paix au Yémen est dans l’intérêt non seulement des Yéménites mais aussi de toute la région.  Il faut tourner la page des guerres et des conflits, a encouragé le délégué en assurant que le Yémen était ouvert aux initiatives de paix, en particulier l’Accord de Riyad.  Il a dit soutenir les efforts de médiation de l’Envoyé spécial en rappelant qu’ils se sont heurtés au refus des houthistes.  Les rebelles houthistes sont responsables de l’escalade actuelle dans la région et en mer Rouge, a pointé le représentant dénonçant la poursuite du siège de la ville de Taëz où habitent plus de 4 millions de personnes.  L’escalade en mer Rouge par les houthistes n’est pas nouvelle, a indiqué le délégué rappelant les nombreuses mises en garde des autorités du Yémen sur les agissements des houthistes qui sont soutenus par l’Iran. Ces mises en garde n’ont pas été entendues par la communauté internationale, a-t-il regretté.  Il a fait valoir que le Yémen a besoin de renforcement de capacités de défense pour pouvoir protéger ses eaux territoriales. 

Pour le délégué, l’escalade en mer Rouge provoquée par les houthistes n’a rien à voir avec la guerre à Gaza.  Il a, dans la foulée, salué la décision des États-Unis d’inscrire ces rebelles sur leur liste des organisations terroristes.  Le représentant a souligné que l’escalade actuelle nuit aux intérêts des populations du Yémen qui dépendent des importations de marchandises.  Le Conseil présidentiel du Yémen a pris des mesures pour améliorer la situation économique, a-t-il informé avant de dénoncer la prise pour cible des champs pétroliers du Yémen par les houthistes privant le peuple de sources importantes de devises.  Ce siège constitue un affamement du peuple, a encore accusé le délégué refusant de rester silencieux devant cet acte odieux des houthistes. 

Le représentant a appelé à aider le Yémen pour qu’il puisse exporter à nouveau du pétrole dont le revenu est nécessaire pour appuyer l’économie, renforcer le stock alimentaire et stabiliser le riyal.  Il a également désigné les houthistes comme auteurs de la prise en otages des humanitaires américains.  Le délégué a aussi rappelé que l’escalade en mer Rouge avait causé la suspension des opérations du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du sauvetage du pétrolier Safer créant de nouveaux défis financiers et sécuritaires.  Il a terminé son intervention en appelant à un cessez-le-feu immédiat à Gaza et en condamnant le déplacement des populations de Rafah.  Si le Conseil ne prend pas des mesures maintenant, quand le fera-t-il?  « Sans la solution des deux États, il n’y aura pas de paix dans la région. »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.