Colombie: le Conseil de sécurité informé d’un bilan encourageant sur l’application de l’accord de paix final même si l’insécurité persiste
À moins d’un mois de la mission qu’effectuera le Conseil de sécurité sur le terrain, le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie a fait le point cet après-midi sur les évolutions des trois derniers mois dans la mise en œuvre de l’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable de 2016, dans un contexte marqué par la « politique de paix totale » que promeut le Président colombien Gustavo Petro Urrego depuis son entrée en fonction en août 2022.
M. Carlos Ruiz Massieu a relevé la forte volonté politique nationale en faveur de l’accord de paix politique négocié qui fournit une feuille de route détaillée pour traiter les causes et les conséquences du conflit, comme en témoignent les engagements exprimés par le Gouvernement, les diverses institutions de l’État et la société civile. Il a salué l’unité dont ont fait preuve la région et la communauté internationale, y compris ce Conseil, dans leur soutien à ce processus.
Les efforts du Gouvernement pour dialoguer avec les groupes armés opérant dans le pays ont été au centre de la réunion. Appelant à poursuivre la mise en œuvre de l’accord de paix en même temps que ces dialogues, M. Ruiz Massieu a argué que ces deux volets se renforcent mutuellement. Il a mis l’accent sur les pourparlers en cours avec l’Armée de libération nationale (ELN) et l’État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP), en saluant leur évolution positive. Il a notamment signalé la conclusion d’accords avec l’ELN lors du dernier cycle de négociations au Mexique en décembre et les progrès réalisés dans la mise en œuvre des accords précédents, y compris un cessez-le-feu bilatéral.
Le prochain cycle de négociations doit se tenir bientôt à Cuba, a annoncé le Chef de la Mission: il portera notamment sur l’extension et le renforcement du cessez-le-feu et l’interdiction explicite des enlèvements contre rançon, formalisant ainsi des engagements importants convenus au Mexique. M. Ruiz Massieu a également salué et appelé à poursuivre les progrès réalisés dans les négociations entre le Gouvernement et l’EMC FARC-EP, notamment à l’occasion du troisième cycle de négociations qui vient de débuter cette semaine à Bogota.
La plupart des membres du Conseil ont salué les progrès réalisés dans les deux processus et appelé les parties à parvenir à un accord sur la prolongation de leurs cessez-le-feu respectifs.
« L’année 2024 doit être l’année de la mise en œuvre des engagements pris », a souhaité le Représentant spécial, notamment sur le chapitre ethnique de l’Accord final. Il a également appelé à miser sur une exécution « énergique » de la politique publique de démantèlement des groupes armés illégaux et des organisations criminelles, mais également sur la consolidation des progrès réalisés et l’établissement de priorités dans les domaines de l’Accord final qui ont pris du retard. À l’instar de plusieurs membres du Conseil, il a souligné l’importance des questions de développement, de réforme rurale et d’accès à la terre, de réintégration des anciens combattants ou encore de justice transitionnelle. À ce titre, la France et la Suisse ont insisté sur le rôle central des femmes dans le processus de paix, le mécanisme de justice transitionnelle, le chapitre ethnique, les efforts de réintégration ainsi que dans la politique de paix du Gouvernement colombien.
Sur le plan sécuritaire, M. Ruiz Massieu a constaté la poursuite d’assassinats ciblés visant des anciens combattants des FARC-EP, des leaders sociaux des communautés autochtones et afrocolombiennes ainsi que des femmes. Pour y répondre et contenir cette violence, il a demandé aux autorités colombiennes de renforcer la présence de l’État dans les zones où sévissent des groupes armés. Sur ce point, la Fédération de Russie a insisté sur l’importance des garanties de sécurité adéquates pour tous les participants aux efforts de consolidation de la paix en Colombie car, comme l’a dit le Secrétaire général, la situation alarmante en matière de sécurité reste probablement le principal obstacle à la pleine mise en œuvre de l’Accord final, et cela malgré les efforts sincères du Gouvernement.
Une représentante de la société civile colombienne, l’une des 38 145 victimes recensées de violences sexuelles dans le contexte du conflit armé en Colombie, s’est adressée au Conseil par visioconférence pour rappeler la signature de l’accord visant à accélérer la mise en œuvre du chapitre de l’Accord final consacré aux questions ethniques. Un accord entre le Ministère de l’intérieur et l’unité chargée de l’application de l’Accord final, qui a été signé aujourd’hui même avec le soutien de la Vice-Présidente de la Colombie, Mme Francia Márquez.
« En tant que victime directe des FARC, qui n’a pas vu la guerre à la télévision, mais l’a vécue personnellement », elle a dit préférer un accord imparfait plutôt qu’une guerre permanente. Raison pour laquelle Mme Yolanda Perea Mosquera a appelé le Conseil de sécurité à soutenir les efforts du Gouvernement colombien pour parvenir à une paix totale avec les acteurs armés qui opèrent sur ses territoires, comme l’ELN. Elle n’a pas manqué de souligner la nécessité de mettre en exécution le programme de garantie globale pour les femmes leaders et défenseuses des droits humains, ainsi que le programme intégral de sécurité et de protection des communautés et des organisations des territoires, qui inclut les besoins particuliers des communautés ethniques, des femmes et des filles.
Intervenant en fin de séance, le Ministre des affaires étrangères de la Colombie, M. Leyva Durán, s’est tout d’abord félicité de la prorogation d’un an de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie par le Conseil de sécurité, « sans laquelle la paix serait restée lettre morte ». Il a rappelé que l’Accord final est enregistré en tant que document du Conseil de sécurité, un « précédent historique » qui constitue une condition préalable à la paix nationale. S’adressant aux membres du Conseil, il a souligné qu’en tant que compagnons sur le chemin de la paix, il leur incombe « d’illuminer la partie de l’humanité qui recherche la paix de façon inlassable », conformément à la politique de paix totale du Président colombien. Le Ministre a réaffirmé l’engagement de celui-ci en faveur de la construction d’un pays fort, résilient et juste, donnant voix au chapitre à la population pour faire de la Colombie une « puissance mondiale de l’espoir ».
LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53)
Déclarations
Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, M. CARLOS RUIZ MASSIEU, a rappelé la célébration, en novembre dernier, du septième anniversaire de l’Accord de paix final, en notant les obstacles encore à surmonter mais aussi les facteurs de réussite. Il a souligné la forte volonté politique nationale, comme en témoignent les engagements exprimés par le Gouvernement, les diverses institutions de l’État et la société civile, sans oublier une région et une communauté internationale, y compris ce Conseil, qui sont restées unies dans leur soutien au processus de paix.
Comme le décrit le dernier rapport du Secrétaire général, que M. Ruiz Massieu présentait aujourd’hui, l’année écoulée a montré qu’il existe des liens clairs entre la mise en œuvre de l’Accord final et les initiatives de dialogue du Gouvernement colombien avec d’autres acteurs armés. L’année 2024 doit être l’année de la mise en œuvre des engagements pris, notamment pour le chapitre ethnique, a-t-il lancé en signalant l’augmentation notable de l’acquisition et de la formalisation des terres grâce à la priorité accordée à la réforme agraire. M. Ruiz Massieu a notamment misé sur une exécution « énergique » de la politique publique de démantèlement des groupes armés illégaux et des organisations criminelles. Il a aussi espéré la consolidation des progrès réalisés et l’établissement de priorités dans les domaines qui ont pris du retard.
Sur le plan de la sécurité, le Représentant spécial a fait état de développements préoccupants dans plusieurs régions du pays, parlant notamment de l’assassinat de quatre ex-combattants des Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP) depuis la date de clôture du rapport du Secrétaire général, et de crimes contre des leaders sociaux. Il a condamné ces attaques « injustifiables » avant de parler de la situation difficile dans des départements tels que le Cauca où sont présentes des populations autochtones et afrocolombiennes et où sévissent des acteurs armés. Il a plaidé pour un déploiement global de l’État dans ces zones pour freiner et contenir la violence. Sur une note positive, il a remarqué que dans certaines régions, malgré les difficultés, il a été possible d’inverser la violence, ce dont témoigne la baisse de 16% des homicides par rapport à 2022 dans les municipalités où des programmes de développement et d’autres approches territoriales sont mis en œuvre et des municipalités historiquement touchées par le conflit comme Arauca et Meta.
Bien qu’ils soient confrontés à des défis, les progrès constants du système de justice transitionnelle colombien sont une autre raison d’être optimiste en 2024, a poursuivi le Représentant spécial en saluant sa structure innovante et complète, qui combine des mécanismes extrajudiciaires et judiciaires. Il a noté que la juridiction spéciale pour la paix continue d’enquêter et de poursuivre les crimes graves commis pendant le conflit par d’anciens membres des FARC-EP, des membres des forces de sécurité publique, d’autres agents de l’État et des tiers civils, tout en se préparant à prononcer ses premières sentences réparatrices. Il a insisté sur l’importance des conditions nécessaires à leur mise en œuvre, ce qui nécessitera des efforts coordonnés entre la juridiction spéciale et les autorités gouvernementales nationales et locales.
M. Riuz Massieu s’est dit encouragé par l’engagement continu en faveur de la paix de la grande majorité des anciens membres des FARC-EP. Il a également salué l’approche multiforme du Gouvernement, avec des instruments tels que le programme de réintégration global. Il a en outre mis en exergue l’évolution positive des pourparlers entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN), en saluant les accords conclus lors du dernier cycle de négociations au Mexique en décembre et les progrès réalisés dans la mise en œuvre des accords précédents, y compris le cessez-le-feu bilatéral et les travaux du comité national de participation. M. Riuz Massieu a encouragé les parties à régler leurs différends par le dialogue. Il s’est dit persuadé que la volonté manifestée jusqu’à présent aboutira à de nouveaux résultats lors du prochain cycle de négociations, qui doit se tenir bientôt à Cuba, notamment par l’extension et le renforcement du cessez-le-feu entre les parties et l’interdiction explicite des enlèvements contre rançon, formalisant ainsi des engagements importants convenus au Mexique.
Il a également salué les progrès réalisés dans les négociations entre le Gouvernement et le groupe de l’État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP) et encouragé les parties à poursuivre sur cette voie, y compris au cours du troisième cycle de négociations qui vient de débuter cette semaine à Bogota. Leurs discussions porteront notamment sur une analyse du cessez-le-feu en vue de son éventuelle prolongation au-delà du 14 janvier, a-t-il précisé.
Rappelant que les attentes légitimes en matière de sécurité et de jouissance des droits par les communautés dans les zones touchées par le conflit restent insatisfaites dans plusieurs régions, il a expliqué cela par les niveaux de violence élevés liés aux conflits entre groupes armés et la présence d’organisations criminelles, dans un contexte de présence limitée des institutions de l’État. Il a soutenu l’appel lancé par le Secrétaire général à tous les acteurs armés pour qu’ils donnent des signes concrets de leur volonté réelle de paix en mettant fin aux affrontements entre eux et en respectant la population civile.
M. Ruiz Massieu est ensuite revenu sur les élections municipales et départementales d’octobre dernier qui ont permis la prise de fonction de centaines de nouvelles autorités régionales et locales élues. Il est essentiel de renforcer le travail coordonné de l’État entre les niveaux national, départemental et municipal, a-t-il souhaité avant de condamner la récente tentative d’assassinat du maire de Tumaco, qui illustre les risques encourus par les autorités locales et la nécessité de leur garantir une protection. Il a conclu en demandant de poursuivre la mise en œuvre de l’accord de paix et de continuer à progresser dans les initiatives de dialogue avec d’autres acteurs armés, ces deux volets se renforçant mutuellement.
Mme YOLANDA PEREA PESQUERA, membre de la société civile colombienne, qui s’est présentée comme une victime et survivante de violences sexuelles dans le contexte du conflit armé en Colombie, s’est toutefois adressée au Conseil de sécurité « non pas en tant que victime, mais en tant que sujet ayant des droits », pour exposer la situation vécue par plus de 38 145 victimes de violences sexuelles dans son pays. Elle a rappelé qu’est célébrée aujourd’hui la signature de l’accord visant à accélérer la mise en œuvre du chapitre de l’Accord final consacré aux questions ethniques entre le Ministère de l’intérieur et l’unité chargée de l’application de l’Accord final, avec le soutien de la Vice-Présidente Francia Márquez. « En tant que victime directe des FARC, qui n’a pas vu la guerre à la télévision, mais l’a vécue personnellement, je préfère un accord imparfait plutôt qu’une guerre permanente », a expliqué l’intervenante, en faisant part de ses recommandations.
Il faut, a-t-elle déclaré, soutenir le Gouvernement pour parvenir à une paix totale avec les acteurs armés qui opèrent sur nos territoires, comme l’ELN; convenir d’un accord humanitaire permettant de promouvoir des mesures préservant la vie, le respect des droits humains et du droit international humanitaire; et instaurer un cessez-le-feu pour toutes les formes de violence, en particulier celles commises contre les communautés ethniques, les femmes et les filles. Mme Pesquera a ensuite encouragé à promouvoir et soutenir la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) et de son plan d’action national en Colombie, afin qu’y soient consolidées la participation, la protection et le leadership des femmes et des jeunes dans la construction et le développement durable de la paix.
La représentante a ensuite souligné la nécessité de pleinement mettre en œuvre le programme de garantie globale pour les femmes leaders et défenseuses des droits humains, ainsi que le programme intégral de sécurité et de protection des communautés et des organisations des territoires, qui inclut les besoins particuliers des peuples ethniques et des femmes et filles. Il faut également, a-t-elle exhorté, appuyer le combat que les femmes et les personnes LGBTIQ ont mené pour l’ouverture, devant la Juridiction spéciale pour la paix, de l’affaire 11 pour enquêter sur la violence sexuelle et fondée sur le genre et les violences obstétricales, ainsi que sur d’autres crimes motivés par des préjugés à l’encontre de personnes ayant une orientation sexuelle différente. Il faut aussi demander des garanties pour que victimes et survivants obtiennent réellement justice, vérité et réparation. Mme Pesquera a par ailleurs exigé du Gouvernement qu’il se conforme à l’arrêt de la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans l’affaire Jineth Bedoya Lima, victime de violences sexuelles dans le contexte du conflit.
En conclusion, elle a demandé aux membres du Conseil de regarder une pièce de tissu présentée derrière elle, confectionnée par des victimes et des survivants de violences sexuelles. « Notre objectif est de confectionner la plus grande courtepointe du monde, à la fois pour rendre visible la violence du conflit armé et tisser l’espoir », a-t-elle déclaré.
M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué l’engagement du Gouvernement colombien à accélérer la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’Accord final, y compris les initiatives relatives à l’accès à la terre et à la réintégration. Il a appelé à l’adoption de nouvelles mesures pour veiller à ce que 60% de ce chapitre soit mis en œuvre d’ici à 2026, comme convenu dans le récent pacte gouvernemental. La pleine mise en œuvre des dispositions relatives au genre et à l’origine ethnique de l’Accord final est essentielle pour lutter contre les facteurs d’inégalité et protéger les groupes vulnérables, notamment les communautés autochtones et afrocolombiennes les plus touchées par le conflit.
Néanmoins, le représentant a exprimé sa grave préoccupation face aux violences perpétrées contre les signataires des accords de paix, les défenseurs des droits humains, les communautés, les femmes et les dirigeants sociaux, y compris les trois meurtres déjà commis en 2024. Les garanties de sécurité constituent un élément essentiel de l’Accord final qui sous-tend les progrès dans tous les autres chapitres, y compris la réintégration, a-t-il souligné. À cet égard, le programme global de réintégration récemment approuvé constitue une étape bienvenue. Le représentant a ensuite réitéré son appel à la nomination d’un bureau dédié à la coordination de la mise en œuvre de l’accord au sein de la présidence. Il a noté l’engagement de Bogota à renforcer la paix par le biais du dialogue, notamment son intention de prolonger le cessez-le-feu avec l’ELN.
M. JOSÉ JAVIER DE LA GASCA (Équateur) a salué les efforts de la Colombie pour consolider la paix et la réconciliation nationale. Le processus de paix dans ce pays est un exemple de règlement des conflits par le dialogue. Face aux défis persistants, il faut renforcer les institutions et garantir la sécurité et les droits de tous les Colombiens. Le succès de la réforme rurale est crucial, y compris pour toute la région. Une paix durable en Colombie dépend de l’inclusion et du respect de la diversité culturelle et des droits des peuples autochtones et afrocolombiens, a commenté le représentant pour lequel le pacte pour la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’Accord final, constitue un pas important pour répondre aux attentes de ces communautés. Le rôle des femmes et des jeunes dans le processus de paix est vital et doit rester une priorité.
Poursuivant, le délégué a déclaré que les progrès réalisés dans le dialogue et la mise en œuvre du cessez-le-feu montrent qu’il est possible de mettre fin à la violence. Au demeurant, il faut suivre de près le dialogue avec le groupe dissident des ex-FARC-EP, appelé « État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire » (EMC FARC-EP), a-t-il ajouté, encourageant les parties à respecter l’accord de cessez-le-feu, et à protéger la population civile. Les groupes armés doivent contribuer à une nouvelle désescalade, en réduisant les affrontements. La fin des enlèvements est également une étape vers la paix et la stabilité en Colombie. Pour sa part, la communauté internationale, y compris le Conseil de sécurité, doit continuer à soutenir la Colombie qui emprunte la voie d’une paix stable et durable, a exhorté le représentant, impatient de participer à la visite du Conseil dans le pays le mois prochain
Au nom du Groupe A3+1 (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana), Mme CAROLYN RODRIGUES-BIRKETT(Guyana) a salué la détermination et les efforts du Président Gustavo Petro, de son gouvernement et du peuple colombien pour promouvoir la paix et la sécurité dans le pays. Elle a souligné que la question de l’accès à la terre est un élément essentiel du processus de paix en Colombie, avant de saluer les récents accords de cessez-le-feu passés entre le Gouvernement et les groupes ELN et EMC-FARC-EP, ainsi que les récentes élections municipales et départementales. La déléguée a insisté sur l’importance de la réintégration des anciens combattants, de la mise en œuvre des réformes institutionnelles en ce sens, d’une réforme agraire complète et de la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’accord. Elle a relevé l’absence de progrès de fond sur ce chapitre ethnique et la poursuite des problèmes sécuritaires qui touchent avant tout les communautés autochtones et afrocolombiennes dans des zones où la présence de l’État reste limitée. Elle a donc appelé les autorités colombiennes à rétablir la présence de l’État dans ces zones et à accélérer la mise en œuvre des composantes essentielles de l’Accord final.
M. GENG SHUANG (Chine) a souligné la nécessité de parvenir à de nouveaux résultats dans la mise en œuvre de l’Accord final, félicitant le Gouvernement colombien d’en avoir fait une priorité et d’avoir augmenté les investissements dans la réforme rurale, la redistribution des terres et la réintégration des anciens combattants. Le représentant a estimé qu’il faut continuer de progresser dans le dialogue et les négociations, saluant les bons résultats obtenus au cinquième tour des pourparlers de paix entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale. Cependant, le peuple colombien reste exposé à des menaces sécuritaires, comme les violences criminelles qui demeurent un obstacle à la mise en œuvre de l’accord de paix, a regretté le délégué. Reste que, pour la Chine, le processus de paix en Colombie offre un exemple de règlement d’un conflit par le dialogue et la négociation, et sert de référence utile au Conseil de sécurité pour les autres crises dans le monde.
Mme SHINO MITSUKO (Japon) a jugé essentiel de protéger et d’intégrer tous les individus, y compris les plus vulnérables, afin de maintenir la paix en Colombie. La mise en place d’un environnement où la sécurité, la justice et l’égalité sont assurées permettra aux populations de réaliser leur plein potentiel, dans l’intérêt de la paix et du développement du pays. Dans ce contexte, le Japon, a dit la représentante, se félicite des progrès réalisés dans les processus de planification et de conception de plusieurs domaines de l’Accord final, tels que la protection et la réintégration, la réforme rurale globale, la promotion de l’égalité ethnique ainsi que de l’égalité entre les hommes et les femmes. La représentante a ainsi encouragé l’ensemble des parties prenantes à coopérer à la mise en œuvre effective de l’Accord final. Elle s’est félicitée des efforts déployés par la Mission des Nations Unies pour aider le Gouvernement colombien, notamment la mise en place de mesures préventives grâce à une approche de gestion des risques. La représentante a formé le vœu que la visite prochaine en Colombie des membres du Conseil de sécurité leur permettra d’examiner la manière dont cet organe peut jouer au mieux son rôle en faveur de la paix.
Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a d’ores et déjà salué la prochaine visite du Conseil en Colombie, « un signal politique de soutien aux efforts de paix ». Une approche stratégique, holistique et interinstitutionnelle, en coopération avec les autorités locales et régionales, est essentielle au succès de l’accord de paix final ainsi qu’à la politique de paix totale du Gouvernement, a estimé la représentante ravie des nominations de M. Otty Patiño en tant que nouveau Haut-Commissaire pour la paix et de Mme Vera Grabe en tant que Cheffe de délégation pour le processus de l’Armée de libération nationale (ELN). Les pourparlers actuels continuent de porter leurs fruits, s’est félicitée la déléguée notant que la surveillance et la vérification des cessez-le-feu ont contribué à la désescalade des hostilités bilatérales. Elle a appelé les parties aux accords de cessez-le-feu en cours à les renouveler et à considérer l’intégration des éléments multilatéraux pour renforcer leurs effets.
S’agissant de la protection des civils, les garanties de leur participation au processus de paix, la réintégration des ex-combattants et la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants par les groupes armés doivent rester au centre des préoccupations de tous, a recommandé la représentante. Elle a dit attendre avec intérêt la finalisation du premier plan d’action national de la Colombie sur les femmes, la paix et la sécurité. Il est important d’assurer la cohérence de ce plan avec la politique de paix totale et les dispositions de l’Accord de paix final, a-t-elle dit avant d’insister en conclusions sur le rôle central des femmes dans le processus de paix, le mécanisme unique de justice transitionnelle, le chapitre ethnique, les efforts de réintégration ainsi que la politique de paix du gouvernement en général.
Il est clair, a estimé Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie), qu’il faut faire plus dans les domaines du renforcement de l’autorité de l’État, de la mise en œuvre de programmes de substitution à la drogue et de la réintégration socioéconomique et politique des anciens rebelles. La représentante a déploré le niveau anormalement élevé de la violence contre des participants aux efforts de consolidation de la paix, notamment les anciens membres des FARC et insisté pour que la priorité soit l’offre de garanties adéquates en matière de sécurité. Elle a dit comprendre à quel point le dialogue du Gouvernement avec d’autres groupes rebelles, tels que l’Armée de libération nationale (ELN) et l’État-major central, est difficile et laborieux. Elle s’est donc félicitée de ce que les régimes de cessez-le-feu avec ces milices, bien que fragiles, soient généralement respectés.
La représentante a souligné le rôle de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie et a convenu avec le Secrétaire général que la situation générale alarmante en matière de sécurité dans le pays reste, malgré les efforts sincères du Gouvernement, peut-être le principal obstacle à la pleine mise en œuvre de l’accord de paix global et d’autres accords de paix. Pour accroître l’impact des activités de la Mission et de l’ensemble des Nations Unies dans la vérification des accords de paix actuels, la représentante a estimé qu’il serait utile que les autorités colombiennes fournissent au Conseil des idées sur les buts et objectifs de leurs efforts de consolidation de la paix et sur leur calendrier. Une telle feuille de route aiderait les membres du Conseil de sécurité, au moment de leur prochaine visite sur place. Ils pourront ainsi mieux évaluer les résultats des mesures déjà prises et, le cas échéant, identifier les ajustements éventuels à apporter aux modalités de travail de la Mission de vérification.
Mme ELISABETH MILLARD (États-Unis) a réitéré le soutien ferme de son gouvernement en faveur de la mise en œuvre continue de l’Accord final, la jugeant essentielle pour que la Colombie s’achemine sur la voie de la justice pour les victimes du conflit, de même que pour garantir sécurité et stabilité et atteindre les objectifs de lutte contre le trafic de stupéfiants. Elle a salué le fait qu’un travail préparatoire est en cours pour les peines à des fins de justice réparatrice. La représentante s’est également félicitée du dialogue continu entre le Gouvernement colombien et l’ELN ainsi que du déploiement d’une centaine de membres du personnel pour le mécanisme de vérification du cessez-le-feu bilatéral. Si elle s’est dite heureuse d’entendre que ce mécanisme permet de réduire les affrontements, la déléguée a toutefois exprimé sa préoccupation devant la capacité limitée du commandement central de l’ELN à maintenir le cessez-le-feu.
À propos des discussions en cours entre le Gouvernement colombien et les FARC-EP, la représentante américaine a noté qu’un troisième cycle de discussions aura lieu le mois prochain. Les États-Unis, a-t-elle ajouté, continueront à suivre ces progrès avant d’envisager une nouvelle extension du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies pour y inclure le contrôle du cessez-le-feu entre le Gouvernement colombien et les FARC-EP.
M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a salué les progrès réalisés par le Gouvernement colombien dans la mise en œuvre de l’Accord final de 2016, et réaffirmé le soutien de son pays aux efforts déployés par la Mission de vérification des Nations Unies. Afin d’assurer une paix durable dans le pays, notamment en s’attaquant aux causes profondes du conflit, il est impératif de mettre en œuvre une réforme rurale globale et d’autonomiser les populations marginalisées. Le représentant s’est félicité des dispositions de l’Accord final relatives à la réforme agraire et a salué les progrès réalisés par l’Agence nationale des terres en milieu rural. En tant que partenaire de développement de la Colombie, la République de Corée a contribué au projet sur l’accélération de l’autonomisation économique des femmes rurales et le renforcement des mécanismes de gouvernance inclusifs dans les régions touchées par les conflits, a-t-il rappelé.
Le représentant a appelé à des mesures immédiates pour mettre fin à la violence persistante contre les anciens combattants, les dirigeants sociaux, les femmes et les filles. Les garanties de sécurité pour les groupes vulnérables sont une condition préalable à la promulgation de peines réparatrices, a-t-il argué, en espérant que les premières condamnations seront prononcées par la Juridiction spéciale pour la paix au cours du premier trimestre de 2024. Dans l’intervalle, le délégué a dit attendre avec impatience les résultats des derniers pourparlers de paix entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN). Selon lui, les cessez-le-feu et les négociations de paix en cours peuvent contribuer à réduire la violence de manière significative.
M. SAMUEL ŽBOGAR (Slovénie) a exprimé son soutien sans équivoque aux travaux de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie. À l’occasion de la commémoration du septième anniversaire de la signature de l’Accord final entre le Gouvernement colombien et les ex-FARC-EP, la priorité reste sa mise en œuvre intégrale et réussie, a-t-il fait valoir. Préoccupé par les attaques perpétrées par des groupes armés et criminels, le représentant a encouragé le Gouvernement à déployer une présence intégrée des institutions et des services de l’État, y compris dans les zones touchées par les conflits. Inquiet aussi de l’augmentation des violences à l’égard des femmes, le délégué a appelé à combattre cette violence et à adopter une approche centrée sur les survivantes pour mettre en œuvre les dispositions de l’Accord final relatives au genre.
Le représentant a salué l’ouverture d’enquêtes visant les violences basées sur le genre, les violences sexuelles et reproductives. Il a aussi demandé la participation des femmes au Forum de haut niveau sur l’égalité des sexes organisé par le Gouvernement ainsi qu’à l’élaboration du plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité. Enfin, il a attiré l’attention sur le lien entre les conflits, la paix et l’environnement, estimant que le processus de paix devrait être l’occasion d’autonomiser les communautés touchées par le conflit grâce à la protection de l’environnement. La visite du Conseil de sécurité, en févier, sera une occasion de soutenir le travail de la Mission et du Gouvernement en matière de consolidation de la paix, s’est-il réjoui.
Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a plaidé pour une application intégrale de l’Accord final, avant de se féliciter de l’accent mis sur les peuples autochtones. Elle a salué les progrès de la réforme agraire, ainsi que les efforts du Gouvernement visant à faire baisser la violence. Elle a souligné l’importance d’une bonne participation des femmes au processus de paix. Elle a demandé une prolongation du cessez-le-feu, avant de déplorer le manque de garanties sécuritaires permettant la réintégration des anciens combattants. La représentante a déploré la persistance de la violence contre les femmes et les défenseurs des droits humains. Le Gouvernement devrait renforcer son déploiement dans les régions où l’insécurité prédomine, a conclu la déléguée.
Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a salué les efforts du Gouvernement colombien pour négocier avec les groupes armés, en complément de la mise en œuvre intégrale de l’Accord final de 2016. Elle s’est félicitée des négociations en cours avec le groupe autoproclamé FARC-EMC et l’annonce d’un cessez-le-feu jusqu’au 15 janvier. De même la France soutient-elle la poursuite de pourparlers entre l’Armée de libération nationale (ELN) dans l’objectif de prolonger le cessez-le-feu signé le 3 août dernier. « Ces développements doivent permettre aux communautés touchées de pouvoir enfin vivre en paix », a déclaré la déléguée.
La France se tient prête à examiner une extension du rôle de la Mission pour surveiller la mise en œuvre des engagements pris à l’issue des discussions avec l’EMC, a-t-elle précisé. Elle a également promis d’être attentive aux conclusions de l’Experte internationale des droits de l’homme chargée de recenser les obstacles à la mise en œuvre de l’Accord final, dont le mandat a été créé par le Conseil des droits de l’homme à l’initiative de la Colombie. « La mission qu’effectuera le Conseil de sécurité en Colombie début février est particulièrement pertinente pour nous permettre d’apporter le soutien le plus adéquat aux efforts de paix », a jugé la représentante, en soulignant l’importance des questions de développement, de réforme rurale et d’accès à la terre ou encore de justice transitionnelle. Celle de l’égalité entre les femmes et les hommes est l’une des clefs de la réussite de ce processus, a-t-elle ajouté, en considérant qu’il s’agit d’une problématique transversale.
M. ÁLVARO LEYVA DURÁN, Ministre des affaires étrangères de la Colombie, s’est d’abord félicité de la prorogation d’un an de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie par le Conseil de sécurité, sans laquelle la paix serait restée lettre morte. L’Accord final est enregistré en tant que document du Conseil de sécurité, un « précédent historique » qui constitue une condition préalable à la paix nationale, a-t-il rappelé. Il a aussi souligné que le caractère contraignant de la Déclaration unilatérale d’État a été reconnu par la Cour internationale de Justice (CIJ). Dans sa lettre du 27 novembre 2023 au Secrétaire général, le Président colombien a d’ailleurs reconnu que cette Déclaration comporte des obligations indispensables pour son pays qu’il s’est engagé à mettre en œuvre.
S’agissant de la Juridiction spéciale pour la paix, le Ministre a considéré que le contenu du document émanant du Conseil de sécurité joue un rôle essentiel, les droits qui y sont consacrés ne pouvant être sapés. Cette juridiction est donc désormais « internationalisée », a-t-il fait remarquer en rappelant que les droits qui y sont énoncés doivent être respectés. Selon le Ministre, les négociateurs de la paix pourraient également mettre en place un tribunal hybride permettant de créer un mécanisme de clôture afin de tourner la page et d’accorder une deuxième chance aux défenseurs de la patrie. En tant que compagnons sur le chemin de la paix, il nous incombe d’illuminer la partie de l’humanité qui recherche la paix de façon inlassable, a-t-il ajouté, conformément à la politique de paix totale du Président colombien. Le Ministre a réaffirmé l’engagement de celui-ci en faveur de la construction d’un pays fort, résilient et juste, donnant voix au chapitre à la population pour faire de la Colombie une « puissance mondiale de l’espoir ».