Troisième Commission: adoption de 11 projets de résolution, dont un inédit sur le volontariat pour le développement
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La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles a poursuivi cet après-midi l’adoption de projets de texte qui lui sont soumis à cette session. Au deuxième jour de ce processus marathon qui doit durer jusqu’au vendredi 22 novembre, 11 textes ont été adoptés, dont 5 après une mise aux voix, à chaque fois à la demande des États-Unis.
Seul projet inédit de la séance et qualifié de « particulièrement important », le texte du Japon et du Brésil traitant des moyens de renforcer le volontariat pour atteindre les objectifs de développement durable, en ne laissant personne de côté (A/C.3/79/L.14/Rev.1) a été adopté sans vote.
Selon ses termes, l’Assemblée générale encouragerait les organismes des Nations Unies, la société civile et le secteur privé, agissant en partenariat avec les États Membres, à promouvoir un climat propice au volontariat et à l’action des volontaires pour favoriser la poursuite du développement.
Parmi les six autres textes adoptés par consensus, celui sur le rapport du « Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés » (A/C.3/79/L.31, tel qu’amendé) présenté par la Norvège au nom des pays nordiques, a été longuement discuté. Après l’adoption par consensus d’un amendent proposé par Cuba, qui rappellerait que l’activité du Haut-Commissaire ne comporte aucun caractère politique, de nombreuses délégations ont exprimé des réserves quant aux libellés considérés comme « non consensuels ».
Dénonçant des « pratiques politisées et sélectives en contradiction avec le mandat du HCR », Cuba a regretté que les Jeux olympiques de Paris 2024 aient été utilisés à des fins de « politisation honteuse » du fait de l’accès au statut de réfugié de deux athlètes cubains inclus dans l’équipe olympique des réfugiés. La délégation s’est aussi inquiétée de l’absence de mentions de l’impact des mesures coercitives unilatérales dans le projet, un point également soulevé par la Syrie et l’Iran.
L’Argentine a récusé l’emploi du terme « désinformation »; le Sénégal, le Niger ou encore l’Indonésie sont restés réservés sur les termes « violences sexuelles fondées sur le genre », « santé sexuelle et reproductive » et « genre », tandis que la Hongrie s’est dissociée de toute référence au Pacte mondial sur les réfugiés. L’Union européenne, de même que le Canada, l’Australie, et la Nouvelle-Zélande, a au contraire salué ce projet de texte, qui selon eux, souligne l’importance de garantir un accès humanitaire, notamment pour les plus vulnérables.
Selon ses termes, l’Assemblée générale condamnerait énergiquement les attaques et toutes les formes de violence, dont les violences sexuelles et fondées sur le genre, les menaces et les actes d’intimidation visant le personnel humanitaire, le personnel des Nations Unies et le personnel associé, y compris le personnel recruté sur les plans national et local. De même, elle exhorterait les États à coopérer pour trouver des solutions aux problèmes que posent les mouvements secondaires.
La Troisième Commission a également adopté sans vote, le projet présenté par le Guatemala sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes à des fins de prélèvement d’organes et de trafic d’organes humains (A/C.3/79/L.7/Rev.1) qui encourage les États Membres à ériger en infraction pénale la traite des personnes aux fins du prélèvement d’organes.
Présenté par Cuba, au nom du Mouvement des pays non alignés, le texte sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits humains, (A/C.3/79/L.23) a également été adopté sans vote, de même que celui sur le droit à l’alimentation(A/C.3/79/L.32), présenté par Cuba dans sa seule capacité nationale, sans nouveautés notables non plus.
Enfin, dernier texte passé sans vote, celui sur les droits humains dans l’administration de la justice (A/C.3/79/L.40) présenté par l’Autriche. Selon ses termes, l’Assemblée générale demanderait aux États Membres et, le cas échéant, aux autres parties prenantes, notamment le secteur privé, de veiller à ce qu’il existe des lois rigoureuses sur la protection des données, de prévenir les préjudices individuels causés par les systèmes d’intelligence artificielle et de s’abstenir ou de cesser de se servir des applications d’intelligence artificielle qu’il est impossible d’utiliser dans le respect du droit international des droits humains.
Bien que s’étant joints au consensus, les États-Unis se sont déclarés préoccupés par le fait que le texte appelle à respecter ou à mettre en œuvre les obligations découlant de traités auxquels ils ne sont pas soumis. Ils ont en outre estimé que l’affirmation selon laquelle les États devraient envisager de créer un mécanisme indépendant pour surveiller les lieux de détention, notamment en effectuant des visites inopinées, est incompatible avec les politiques et pratiques américaines qui garantissent déjà des normes acceptables. Le Saint-Siège a regretté de son côté que la mention de la criminalisation potentielle des enfants ait été supprimée du texte avant d’exprimer des réserves sur le terme « genre » et ses dérivés.
Droits humains et autodétermination : mise aux voix de cinq textes
Au cours de cette séance, les États-Unis ont par ailleurs demandé la mise aux voix de cinq textes présentés au titre de la promotion et protection des droits humains et du droit des peuples à l’autodétermination.
Ainsi le texte présenté par Cuba et pourtant inchangé sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits humains et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à l’autodétermination (A/C.3/79/L.24), a été adopté par 125 voix pour, 51 voix contre et 6 abstentions (Kiribati, Mexique, Palaos, Paraguay, Suisse et Tonga).
Les États-Unis ont rappelé qu’ils établissent une différence entre les activités mercenaires déstabilisatrices et le rôle que peuvent jouer les sociétés militaires et de sécurité privée. Ce projet mélange les mercenaires et les sociétés militaires et de sécurité privée, lesquelles jouent un rôle essentiel pour la sécurité des ambassades, a regretté le Royaume-Uni qui a jugé que ce texte n’est pas clair quant à son but.
De son côté, le Chili a regretté que le texte se concentre de plus en plus sur la souveraineté des États, au détriment du point à l’ordre du jour. Il a appelé à rectifier le tir afin que ce texte se rapproche de celui adopté par le Conseil des droits de l’homme, qui porte davantage sur les effets des activités des mercenaires.
Entériné avec 125 voix pour, 55 contre et aucune abstention, après avoir été présenté par Cuba au nom du Mouvement des pays non alignés, le projet sur les droits humains et mesures coercitives unilatérales (A/C.3/79/L.25) prierait les États de s’abstenir d’établir des listes illégales et unilatérales, telles que la liste des États qui soutiendraient le terrorisme, qui constitue une mesure coercitive unilatérale supplémentaire. Les États et organismes compétents des Nations Unies seraient également appelés à prendre des mesures concrètes pour atténuer les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’aide humanitaire.
S’exprimant au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, le Venezuela a rejeté l’usage des mesures coercitives unilatérales qui « ont un effet dramatique sur les droits humains de plus d’un tiers de l’humanité », notamment les droits à la vie, à la santé ou au développement. Il a estimé qu’elles étaient devenues un outil de pression utilisé par certains États contre les pays en développement et a exigé leur abandon.
Ce ne sont pas les sanctions qui minent les droits humains, mais ceux qui commettent des violations des droits humains, a rétorqué la délégation des États-Unis, un point de vue également partagé par la Hongrie, au nom de l’Union européenne. Le Royaume-Uni a rappelé pour sa part que les mesures coercitives unilatérales prévoyaient des exceptions à des fins humanitaires.
Autre pomme de discorde, le texte sur le droit au développement (A/C.3/79/L.28) a tout de même été adopté par 129 voix pour, 25 voix contre et 30 abstentions. Présenté par Cuba au nom du Mouvement des pays non alignés, il recommande à l’Assemblée générale de tenir, en marge du débat général de sa quatre-vingt-unième session en 2026, un débat de haut niveau d’une journée consacré à la célébration du quarantième anniversaire de la Déclaration sur le droit au développement.
Lors des explications de vote, les États-Unis ont dit craindre que ce projet de résolution cherche à élever le processus de développement au-dessus des droits humains. En outre, le droit au développement identifié dans le texte semble protéger les États plutôt que les individus.
Le Royaume-Uni a pointé l’absence de définition convenue sur le droit au développement, tandis que la Hongrie, au nom de l’Union européenne, a justifié son vote contre par le fait que la création d’un instrument juridiquement contraignant ne fait pas consensus. Pour qu’un instrument juridiquement contraignant soit robuste, il faut un large consensus sur la nécessité d’élaborer un traité, et de la clarté sur la portée de ce droit, a renchéri le Chili, selon qui le projet de pacte renvoyé à l’Assemblée générale ne remplit pas ces conditions.
L’Argentine a constaté que les conditions ne sont pas réunies pour adopter un instrument juridiquement contraignant, tandis que le Liechtenstein, qui s’exprimait au nom d’un groupe de pays, a estimé qu’un instrument juridiquement contraignant pourrait empêcher d’avancer sur le droit au développement. Au lieu de créer de nouveaux instruments juridiquement contraignant, la communauté internationale devrait se concentrer sur le fait que les États doivent permettre à tous de jouir des droits fondamentaux, a dit le Canada.
Sans nouveauté par rapport à leur version précédente, le projet sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable (A/C.3/79/L.26) a été adopté par 120 voix pour, 55 voix contre et 8 abstentions (Arabie saoudite, Arménie, Chili, Costa Rica, Mexique, Panama, Pérou et Uruguay), tandis que le texte sur la promotion de la paix, condition essentielle du plein exercice par tous de tous les droits humains (A/C.3/79/L.27) a été soutenu par 130 voix pour, 54 voix contre et aucune abstention. Avant le vote, les États-Unis ont fait savoir qu’ils n’appuient pas la définition d’un droit à la paix collectif.
Ces deux textes ont été présentés par Cuba.
La Troisième Commission continuera à se prononcer sur ses projets de résolution jeudi 14 novembre, à partir de 10 heures.
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