Assemblée générale: la question de la représentation équitable au Conseil de sécurité peut s’appuyer sur le nouveau Pacte pour l’avenir
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L’Assemblée générale s’est penchée, aujourd’hui, sur la question de la représentation équitable au Conseil de sécurité et de l’augmentation du nombre de ses membres et autres questions ayant trait au Conseil. Ce point inscrit depuis longtemps à son ordre du jour figure spécifiquement dans le Pacte pour l’avenir adopté par l’Assemblée le 22 septembre dernier, ce que n’ont pas manqué de rappeler la soixantaine de délégations ayant pris part au débat.
À la veille de la reprise des négociations intergouvernementales sur la question, les délégations ont appelé en majorité à considérer le Pacte pour l’avenir comme un levier pour les discussions, et à corriger l’injustice historique faite notamment à l’Afrique. Ce document, a déclaré le Vice-Président de l’Assemblée générale, M. Cherdchai Chaivaivid (Thaïlande), offre « une base solide » pour faire avancer la réforme, et souligne en outre l’importance de rendre le Conseil plus représentatif.
Quinze ans après le début de ces négociations, les délégations ont eu du mal à cacher leur impatience et ont espéré une véritable percée lors du prochain cycle mené sous la houlette de l’Autriche et du Koweït. Il a été rappelé que la réforme du Conseil de sécurité porte sur cinq aspects: les catégories de membres; la représentation géographique; la relation entre le Conseil et l’Assemblée générale; la taille d’un Conseil élargi et ses méthodes de travail; et la question du droit de veto.
Si tous sont convenus que les négociations intergouvernementales demeurent « l’unique forum », « la seule plateforme légitime » de discussion sur un Conseil réformé qui reflète les enjeux complexes du monde actuel, il y a eu en revanche des divergences sur l’approche à adopter pour y parvenir.
Au nom du Groupe des Quatre (Allemagne, Brésil, Inde et Japon), la déléguée allemande a exhorté tous les États Membres à participer de manière constructive aux négociations, le but étant d’élaborer à terme un modèle consolidé, « comme l’ont demandé tous les dirigeants du monde dans le Pacte pour l’avenir ». De l’avis du Groupe, la demande générale des États Membres en faveur d’un élargissement des deux catégories de membres et d’une meilleure représentation des régions non représentées et sous-représentées, telles que l’Afrique, l’Asie-Pacifique et l’Amérique latine et les Caraïbes, doit se refléter dans les résultats des négociations de cette année.
La déléguée de Saint-Vincent-et-les Grenadines, s’exprimant au nom du Groupe L.69 -constitué d’une quarantaine d’États d’Afrique, d’Amérique latine et des Caraïbes, d’Asie et du Pacifique- a indiqué, à son tour, qu’un texte de négociation consolidé est essentiel pour aller de l’avant. Elle a regretté que, malgré les efforts des coprésidents, le processus des négociations intergouvernementales n’ait pas encore réalisé de progrès concrets. « L’idée de quelques-uns selon laquelle nous devons parvenir à un accord avant d’introduire un texte est à la fois redondante et irrationnelle », a-t-elle critiqué. Un texte de négociation ne marque pas la fin selon elle, il fournit simplement une base structurée pour les discussions, permettant à toutes les parties de travailler à partir d’un document commun qui capture les positions et propositions clefs.
De plus, a ajouté la déléguée du Groupe L.69, l’argument selon lequel un texte de négociation enfermerait les États Membres dans des positions fixes est « sans fondement »: les États Membres sont pleinement conscients que, compte tenu du large éventail de positions et de propositions, un compromis est essentiel.
De son côté, la France a réitéré son appel à lancer sans délai des négociations sur la base d’un projet de résolution susceptible d’être soutenu par deux tiers des États Membres. Il s’agit là, a justifié le délégué, d’une procédure conforme à la Charte des Nations Unies, « plus réaliste que la recherche d’une hypothétique unanimité risquant de nous conduire à l’immobilisme ».
Rien ne sert de se précipiter, ou de forcer le processus de réforme, cela ne ferait qu’entraîner de nouveaux désaccords, a cependant averti la Chine. « Il faut respecter le consensus entre les États Membres. » La Türkiye a recommandé de procéder à un travail d’analyse des divergences et de rapprochement des points de vue, afin de forger l’accord politique le plus vaste possible sur les principaux paramètres d’une réforme.
Pour le Groupe des États d’Afrique et le Groupe des États arabes, le Pacte pour l’avenir démontre l’engagement ferme de l’ONU à corriger les injustices et les déséquilibres prolongés par la structure actuelle du Conseil, en accord avec la Position commune africaine, le consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte. De plus, a constaté Bahreïn, le Pacte inclut des engagements forts pour la réforme, y compris des dispositions pour une représentation accrue des États arabes, africains et d’autres régions sous-représentées du Sud, notamment l’Amérique latine ou l’Asie et le Pacifique. Un appel entendu par la délégation des États-Unis qui s’est prononcée en faveur de l’ajout de deux sièges permanents pour l’Afrique et pour l’inclusion d’un siège tournant pour les petits États insulaires en développement.
L’élargissement des deux catégories ne doit pas être partiel ou sélectif, a martelé Cuba pour qui le Conseil doit compter 27 membres au moins. Les Émirats arabes unis ont fait remarquer que ces régions sous-représentées, aussi bien dans la catégorie des membres permanents que dans celle des membres non permanents, sont les plus directement concernées par l’ordre du jour du Conseil. En 2023, 38% et 33% des questions examinées étaient ainsi liées respectivement à l’Afrique et au monde arabe.
S’agissant du veto, plusieurs délégations se sont dites opposées par principe à ce droit, mais tant qu’il n’est pas aboli les nouveaux membres permanents devraient pouvoir jouir des mêmes droits et prérogatives que les membres permanents actuels, y compris le droit de veto si celui-ci est maintenu, a tranché le Groupe des États d’Afrique. Le Pacte pour l’avenir a affirmé la nécessité de redoubler d’efforts pour parvenir à un accord sur la question du droit de veto, notamment en examinant s’il faut limiter son champ d’application et son utilisation, a reconnu l’Afrique du Sud, mais « il ne peut y avoir d’approche fragmentaire pour aborder la question du veto et de son utilisation ».
Des intervenants ayant condamné le manque de cohésion du Conseil face à la situation à Gaza, la Fédération de Russie a déclaré, en pointant les États-Unis, que « le problème ici, ce n’est pas une question de veto, mais le comportement irresponsable d’un État Membre ». La Fédération de Russie s’était dissociée du Pacte pour l’avenir lors de son adoption. Quant à l’Ukraine, elle a jugé vains les efforts entrepris pour rendre le Conseil de sécurité plus efficace « si l’origine du problème demeure », à savoir « l’approbation tacite de l’occupation par la Fédération de Russie du siège vacant laissé par l’Union soviétique ».
La France et le Mexique ont rappelé qu’ils portent conjointement une initiative visant à encadrer le recours au veto en cas d’atrocités de masse, une initiative qui ne nécessiterait pas de modification de la Charte pour être mise en œuvre, et à laquelle 105 États Membres ont déjà apporté leur soutien.
Enfin, des intervenants ont dit attendre les modèles de réforme que présenteront les différents groupes et les États Membres, ainsi que l’élaboration par les coprésidents d’un modèle récapitulatif des positions de tous les États Membres faisant fond sur les points de convergences à l’égard des cinq points précités. L’Italie, au nom du Groupe du consensus, qui a déjà présenté son modèle en mars dernier, a encouragé à son tour ses pairs à présenter ou à réviser leurs modèles, afin de faciliter des discussions productives et la recherche d’un consensus.
En fin de compte, a résumé le Vice-Président de l’Assemblée, « la voie de la réforme repose sur vous, les États Membres ». Il a invité les délégations à faire preuve de créativité, de souplesse et d’un esprit de consensus pour tenir les promesses et renouveler la foi dans le multilatéralisme.
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