Soixante-dix-huitième session,
84e séance plénière – matin
AG/12603

Assemblée générale: le Président du Guatemala appelle chaque nation constituant l’ONU à s’engager fermement en vue de sauver le multilatéralisme

L’Assemblée générale a entendu, cet après-midi, une ode au multilatéralisme délivrée par le Président de la République du Guatemala, M. César Bernardo Arévalo de León, élu le 15 janvier 2024 par « un peuple soucieux de laisser derrière lui les fantômes de la violence et de l’autoritarisme afin d’évoluer vers une vie juste et équitable ».  Le Président de l’Assemblée générale, qui l’a accueilli, a appelé les États Membres à saisir l’opportunité du Sommet de l’avenir, en septembre 2024, pour travailler à revigorer et renforcer le multilatéralisme.

Le Chef de l’État du Guatemala a rappelé d’emblée que son pays est le berceau de l’une des plus belles civilisations de l’humanité.  Le peuple maya, auquel la grande majorité des Guatémaltèques s’identifient encore aujourd’hui, a en effet produit, avant l’arrivée des premiers Européens, la science et les connaissances anciennes qui ont survécu à des générations de pillage et d’exploitation, a-t-il fait valoir.  Il a en même temps évoqué un pays où manquent des perspectives d’avenir décent: beaucoup de jeunes le quittent pour émigrer vers dans d’autres pays.

Pourtant, « nous sommes une nation plurielle et diversifiée qui n’a pas baissé les bras face à ces difficultés », a déclaré le Président Arévalo: « notre détermination à parvenir au bien-être et à la paix, pour tous ceux d’entre nous qui vivons au Guatemala, nous a permis de tracer notre chemin et de laisser derrière nous les fantômes de la violence et de l’autoritarisme et d’évoluer vers une vie juste et équitable ».  Le Président a tiré les leçons de l’expérience de son peuple, à savoir qu’il est possible de surmonter les conflits lorsque les gens sont convaincus qu’ils peuvent vivre mieux.  Son gouvernement, a-t-il continué, est le produit de cet espoir cristallisé par la détermination de la société guatémaltèque à surmonter « une étape trouble et sombre de notre histoire au cours de laquelle les institutions étatiques avaient été cooptées par des réseaux politico-criminels dédiés à la poursuite de l’enrichissement illicite au détriment du bien-être de la société tout entière ». 

C’est cet espoir qui a débouché en 2023 sur un verdict retentissant lors des élections, a rappelé le Président en soulignant « la clameur des citoyens » en faveur de la transformation et du changement.  Selon lui, les Guatémaltèques vivent aujourd’hui en démocratie grâce au soutien solidaire et énergique reçu de la communauté internationale.  Il a souligné à ce propos l’importance du multilatéralisme, l’un des outils clefs pour créer un monde plus juste et durable, qui passe par des approches collaboratives et coordonnées aux problèmes qui, bien qu’ils se manifestent individuellement dans nos territoires, sont en réalité des défis communs.  Parmi ces défis mondiaux, il a cité les changements climatiques, les migrations causées par la pauvreté ou les guerres, l’éradication de la faim et la lutte contre la pauvreté ainsi que la recherche du bien-être et d’une justice équitable pour toutes les nations.

Le multilatéralisme, a insisté le Président Arévalo, rappelle que la diplomatie, la coopération et le dialogue sont les seuls mécanismes permettant de relever de manière globale les défis mondiaux.  Il a misé sur cette « mutualisation des efforts » et sur l’esprit de collaboration.  Le Président a aussi voulu partager avec l’Assemblée générale l’une des principales leçons apprises par le Guatemala pendant son développement politique ces dernières décennies: le rôle crucial de l’éthique et de l’intégrité dans la fonction publique. Ce sont les conditions nécessaires au développement durable. 

À l’inverse, a observé le Président, la corruption rend non viable tout effort de développement, en détournant « dans les poches privées » les ressources qui devraient être allouées à l’investissement dans le bien-être des gens.  La corruption érode et finit par réduire à néant l’efficacité des institutions publiques.  Elle trahit la démocratie en déformant le principe de souveraineté populaire qui devrait régir son établissement.  De même, la corruption rend la justice impossible, pendant que le pouvoir corrompu affaiblit les principes de liberté du peuple et se nourrit des injustices.  Et là où il n’y a pas de justice, il n’y a pas de paix, a tranché le Chef d’État.  Il a expliqué que les conflits et les guerres sont déclenchés par les injustices, les illégalités et la corruption, accusant aussi celle-ci d’être « l’huile qui lubrifie le commerce de substances illicites, le trafic d’armes ou encore la traite d’êtres humains ».  La corruption est une menace pour la démocratie, la paix et le développement.

Fort de ces constats, le Chef de l’État du Guatemala a recommandé que les gouvernements soient comptables non seulement face à leurs peuples, mais également devant leurs pairs, car les pays qui entrent dans la spirale de la corruption constituent une menace et un fardeau pour leurs voisins et pour leur région.  La corruption dans une nation est un problème pour toutes les nations, a-t-il résumé en priant la communauté internationale d’y mettre un terme. 

Le Président a mis en avant les efforts « considérables » et l’expérience « précieuse » du Guatemala dans la lutte contre la corruption. C’est ainsi que le Gouvernement a pu saisir le Procureur de plus de 84 plaintes pour grande corruption et qu’une commission spéciale bénéficiant de la participation de la société civile a été chargée d’identifier les schémas d’enrichissement illégal, afin de les dénoncer et de concevoir des politiques publiques de prévention efficaces.  « Nous sommes convaincus que notre combat est plus efficace lorsque nous le faisons en solidarité avec d’autres nations comme l’histoire nous l’a déjà montré. »

Allant plus loin, le Président du Guatemala a craint que l’affaiblissement d’un « ordre international fondé sur l’égalité entre les États et le respect du droit international et des droits humains » soit une menace existentielle.  « Nous ne pouvons pas nous permettre de revenir à des systèmes basés sur la loi du plus fort qui nous condamne à des cycles sans fin de conflits et de violence. »  Il a donc suggéré de revoir et de perfectionner « nos institutions »: un multilatéralisme renforcé exige que l’ONU soit une institution efficace, inclusive et harmonieuse.  Il a toutefois regretté que son efficacité soit entravée et même paralysée par « l’exercice irresponsable du droit de veto » au Conseil de sécurité. 

Le Président guatémaltèque a appelé au renouveau de l’ONU, avec l’objectif de garantir les intérêts de tous et de forger une Organisation qui soit capable de faire face aux menaces collectives.  En même temps que l’on construit la paix, il a appelé à être plus efficace dans la poursuite du développement, en s’appuyant sur l’engagement pris en 2015 en faveur des objectifs de développement durable (ODD).  Il a espéré des progrès dans le cycle de réformes institutionnelles, soulignant l’un des plus grands défis qui est de mobiliser un financement adéquat. Il a aussi appelé à réformer le système financier mondial pour faire face aux futures crises de la dette et lutter efficacement contre la corruption.

Le Président guatémaltèque n’a pas manqué, dans son discours, de plaider également pour une mise à jour du système de représentation à l’ONU, appelant à renforcer le pouvoir de l’Assemblée générale pour qu’elle agisse lorsque le Conseil de sécurité ne parvient pas à préserver la paix et la sécurité internationales.  « Cette Organisation peut faire bien plus, cette Organisation doit faire bien plus. »

Mettant en avant l’exemple donné par le Guatemala, il a souligné que son peuple a choisi la voie de la transformation par lui-même.  « Nous montrons au monde que même dans l’obscurité la plus profonde, la volonté de changement peut briller de sa propre lumière. »  Il a toutefois reconnu que son pays a besoin du monde pour atteindre ses objectifs, interpellant les nations et organisations engagées dans cet avenir de paix et de développement qui ont inspiré la création de l’ONU.

Le Président de la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis, a invité à son tour chaque État Membre à saisir l’opportunité offerte par cette allocution du Président guatémaltèque pour réaffirmer leur engagement en faveur du multilatéralisme.  Il a appelé à comprendre la nécessité de « revenir à nos racines multilatérales » comme notre meilleure chance de surmonter les conflits, rappelant que l’engagement commun en faveur du multilatéralisme est inscrit dans la Charte des Nations Unies.

Le Président de l’Assemblée a rendu hommage au peuple du Guatemala qui a mis fin à une époque de terrible violence et qui a inauguré une nouvelle ère de tranquillité et de stabilité durables.  Selon lui, le succès du Guatemala témoigne clairement de la valeur du travail collectif pour le bien commun.  Dans cette optique, le Sommet de l’avenir, prévu en septembre 2024, est l’opportunité pour les États Membres de travailler ensemble pour revigorer et renforcer le multilatéralisme, a-t-il lancé à l’assemblée.  Il a exhorté les délégations à profiter de cette « opportunité unique dans une génération » pour redéfinir la coopération multilatérale et revenir aux principes fondateurs de la Charte des Nations Unies.  Cela permettra de restaurer la crédibilité du système multilatéral pour des générations à venir et de retrouver l’autorité et la légitimité autrefois impressionnantes de cette Organisation unique.

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