Soixante-dix-septième session,
4e & 5e séances plénières, Matin & après-midi
FEM/2222

Commission de la condition de la femme: pour combler le fossé numérique, les délégations misent sur l’éducation et l’innovation inclusives

La Commission de la condition de la femme a tenu aujourd’hui quatre tables rondes ministérielles en lien avec le thème prioritaire de sa soixante-septième session, soit l’innovation et l’éducation à l’ère du numérique aux fins de la réalisation de l’égalité des sexes, en mettant l’accent sur l’éducation et l’innovation inclusives en tant que vecteurs de l’autonomisation des femmes. 

« Malgré les progrès réalisés au cours de la dernière décennie, la fracture numérique entre les hommes et les femmes persiste », s’est inquiétée la Ministre du développement social de l’Afrique du Sud, Mme Lindiwe Zulu, en ouvrant l’une des deux tables rondes consacrées aux bonnes pratiques permettant de surmonter les obstacles à la réduction de la fracture numérique entre les hommes et les femmes et de promouvoir l’éducation à l’ère numérique pour atteindre l’égalité. 

Selon elle, l’accès limité des femmes et des filles aux nouvelles technologies et aux compétences numériques s’explique par des raisons financières et éducatives, ainsi que par des normes sociales négatives.  Une situation qui affecte en particulier les femmes rurales, les migrantes, les femmes handicapées ou âgées disposant de faibles niveaux d’alphabétisation et de revenus. 

« La révolution numérique ne doit pas être une énième révolution dont les femmes seraient mises à l’écart », a prévenu la Secrétaire d’État chargée de l’économie sociale et solidaire de la France, Mme Marlene Schiappa, en annonçant l’objectif de son pays d’atteindre la parité dans les métiers scientifiques d’ici à 2027. 

Afin de combler ce fossé numérique, « nouveau visage des inégalités entre les femmes et les hommes », selon les mots de la Vice-Première Ministre de Serbie, et profiter des millions d’emplois engendrés par la révolution technologique, plusieurs délégués ont insisté sur l’importance de l’éducation et de développer des outils technologiques adaptés. 

Alors que 85% des femmes ont été témoin ou ont expérimenté de la violence en ligne, le Ministre d’État pour le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord, l’Asie du Sud et les Nations Unies du Royaume-Uni, M. Tariq Ahmad, a souligné à son tour l’importance de la recherche, de l’accès à la technologie et de législations ciblées pour faire en sorte que les femmes ne soient pas exclues du monde numérique.  Pour la Ministre de l’autonomisation des femmes et de la protection des enfants de l’Indonésie, Mme I Gusti Ayu Bintang Darmawati, seules l’autonomisation numérique, l’acquisition de compétences informatiques et la levée des obstacles culturels sauront mener à une innovation inclusive. 

« L’inégalité des genres dans le monde réel se traduit également dans le monde numérique », a prévenu la Vice-Ministre des affaires européennes de la Tchéquie, Mme Klára Šimáčková Laurenčíková.  Pour la Secrétaire générale de l’Union internationale des télécommunications (UIT), Mme Doreen Bogdan-Martin, des politiques efficaces peuvent contribuer à combler le fossé technologique « avant 300 ans », à condition de s’attaquer aux normes sociales négatives, de prioriser l’éducation numérique et de disposer d’informations ventilées par genre.  « Nous devons oser agir », a-t-elle dit, en enjoignant les États Membres à assurer aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes. 

Cette séance a également été marquée par l’organisation de deux autres tables rondes au cours desquelles les délégations ont débattu des moyens de favoriser l’innovation inclusive et le changement technologique afin de créer des espaces numériques plus sûrs. 

À cette occasion, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, a préconisé quatre domaines d’action pour faire de la parité numérique une réalité, à commencer par assurer un accès équitable à l’Internet aux femmes.  « Si vous éduquez une fille, vous éduquez une nation », a déclaré Mme Mohamed, pour qui les États Membres doivent accorder la priorité à l’éducation scientifique et mathématique des filles.  Elle a encouragé les gouvernements, les entreprises et la société civile à s’unir pour lutter contre la violence sexiste et les discours de haine en ligne, soulignant en outre l’importance d’une innovation inclusive. 

La Commission de la condition de la femme poursuivra sa discussion générale demain, mercredi 8 mars, à 15 heures. 

SOIXANTE-SEPTIÈME SESSION DE LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME

Suite des débats

Table ronde ministérielle 1  

En matinée, la première table ronde ministérielle a porté sur les bonnes pratiques permettant de surmonter les obstacles à la réduction de la fracture numérique entre les hommes et les femmes et de promouvoir l’éducation à l’ère numérique pour atteindre l’égalité. 

La modératrice et Ministre du développement social de l’Afrique du Sud, Mme Lindiwe Zulu, a déclaré d’emblée que l’accès limité des femmes et des filles aux nouvelles technologies et aux compétences numériques s’explique par des raisons financières et éducatives, ainsi que par des normes sociales négatives qui les empêchent d’accéder librement aux téléphones portables ou à l’Internet.  Les femmes vivant dans des zones rurales, les migrantes, les femmes handicapées ou âgées, surtout celles disposant d’un faible niveau d’alphabétisation ou de revenus, sont particulièrement affectées, a-t-elle relevé. 

« Malgré les progrès réalisés au cours de la dernière décennie, la fracture numérique entre les hommes et les femmes persiste, » a encore dit Mme Zulu, en s’inquiétant de ce fossé dans un contexte de mondialisation croissante et d’un monde du travail de plus en plus numérisé.  Afin de profiter des millions d’emplois décents qui seront créés par la révolution technologique, nous devons nous attaquer sans tarder aux lacunes actuelles en matière de compétences et aux stéréotypes, a-t-elle ajouté. 

Un sentiment partagé par le Vice-Premier Ministre et Ministre du travail, de la famille, des affaires sociales et de l’égalité des chances de la Slovénie, M. Luka Mesec, qui a appelé à modifier non seulement les institutions nationales mais aussi « les cœurs et les esprits », afin que les femmes prennent la place qui leur revient dans les technologies d’aujourd’hui. 

« La révolution numérique ne doit pas être une énième révolution dont les femmes seraient mises à l’écart », a renchéri la Secrétaire d’État chargée de l’économie sociale et solidaire de la France, Mme Marlene Schiappa.  Alors que les femmes sont toujours sous-représentées dans les formations et les métiers du numérique, elle a annoncé l’objectif de son pays d’atteindre la parité dans les métiers scientifiques d’ici à 2027.  « Une économie inégalitaire entre les femmes et les hommes est une économie de la pénurie, pénurie de la compétence et donc de la capacité à innover », a-t-elle martelé. 

Aux yeux de la Vice-Première Ministre et Ministre de la culture de la Serbie, Mme Maja Gojković, la « fracture numérique » est le nouveau visage des inégalités entre les femmes et les hommes.  La multiplication des nouvelles technologies vient en effet s’ajouter aux inégalités et aux stéréotypes existants, qui ne peuvent être surmontés que par l’éducation et la formation. 

La Ministre du développement social de Jordanie, Mme Wafa Bani Mustfa, s’est félicitée des progrès réalisés en vue d’atteindre la parité entre les garçons et les filles en matière d’éducation publique numérique à tous les niveaux, y compris pour les réfugiés, ce qui implique une formation accrue du personnel enseignant aux technologies de l’information.  Aux Bahamas, des processus visant à adapter la technologie dans le domaine de l’agriculture ont été mis en place afin d’accroitre les rendements agricoles, en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a noté Mme Pia Glover-Rolle, Ministre adjointe chargée de la fonction publique

Si de telles mesures sont essentielles, il faut cependant veiller à ce que ces technologies ne viennent pas renforcer la fracture numérique et permettent à chacun de tirer parti de la numérisation, a prévenu le Ministre de l’enfance, de l’égalité, du handicap, de l’intégration et de la jeunesse de l’Irlande, M. Roderic O’Gorman.  Pour y parvenir, la Gambie fait la promotion des sciences, technologie, ingénierie et mathématiques auprès des filles au moyen de bourses dont 60% leur sont destinées, a expliqué Mme Fatou Kinteh, Ministre du genre, de l’enfance et du bien-être social

La Ministre de l’égalité des sexes et de la promotion de la famille du Rwanda, Mme Jeannette Bayisenge, a indiqué pour sa part que son pays mise sur l’innovation et les changements technologiques pour favoriser le développement et le progrès.  Un service de SMS rapide a ainsi permis de réduire la mortalité infantile, des applications mobiles permettent un meilleur accès aux marchés et un programme spécifique fait la promotion de solutions technologiques à l’intention des femmes, a-t-elle expliqué. 

Le Ministre des affaires sociales et de la culture du Liechtenstein, M. Manuel Frick, a déploré que le manque d’aptitudes numériques, le coût et l’accès à Internet et à l’électricité constituent autant d’obstacles à l’accès des femmes et des filles aux outils numériques.  Ces écarts sont, selon lui, ancrés dans des stéréotypes persistants qui empêchent tout progrès significatifs. 

L’autonomisation numérique, l’acquisition de compétences informatiques et la levée des obstacles culturels garantiront pourtant une innovation inclusive pour les femmes et les filles, a argué la Ministre de l’autonomisation des femmes et de la protection des enfants de l’Indonésie, Mme I Gusti Ayu Bintang Darmawati. 

De son côté, la Ministre de la condition féminine de l’État de Palestine, Mme Amal Hamad, a signalé que l’occupation israélienne empêche tout effort visant à défendre les droits des femmes en Palestine, où il n’existe aucune infrastructure numérique, ni électricité, ni Internet dans les zones où vivent les communautés marginalisées.  Malgré ces obstacles, des ordinateurs sont présents dans chaque salle de classe et des programmes ont été établis pour favoriser l’accès des filles aux programmes scientifiques et informatiques, a-t-elle assuré. 

M. Tariq Ahmad, Ministre d’État pour le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord, l’Asie du Sud et les Nations Unies du Royaume-Uni, a observé pour sa part que 85% des femmes ont été témoin ou ont expérimenté de la violence en ligne, une donnée « inacceptable ».  Pour faire en sorte que les femmes ne soient pas exclues du monde numérique, il a, à son tour, mis en exergue l’importance de la recherche, de l’accès à la technologie et de législations ciblées. 

À moins de combler ces lacunes, bon nombre de femmes seront laissées de côté, avec un coup important pour leur bien-être, leur avenir et celui de leur communauté, a mis en garde la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Mme Catherine Russell.  « Leur avenir et le nôtre en dépendent », a-t-elle souligné.

Table ronde ministérielle 2

Sur le thème « favoriser l’innovation inclusive et les progrès technologiques en vue de renforcer les moyens d’action des femmes et des filles et de créer des espaces numériques plus sûrs », cette deuxième table ronde ministérielle a été l’occasion pour les délégations de souligner l’apport de la numérisation pour l’égalité entre les sexes et de se pencher sur les moyens de promouvoir cet outil de façon pertinente et durable tout en examinant les dangers inhérents à son usage, notamment pour les femmes et les filles.

Cadrant ce débat, la Secrétaire d’État parlementaire, Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse de l’Allemagne, a reconnu que les technologies sexistes contribuent à faire reculer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.  De fait, a averti Mme Kin Deligöz, les femmes « en vue » courent un plus grand risque d’être ciblées et forcées de s’autocensurer ou de réduire leur interaction dans les espaces en ligne.  Dans le cas de la prestation de services fondée sur l’intelligence artificielle, il en résulte souvent une baisse de la qualité des services et un renforcement des stéréotypes néfastes existants, a-t-elle fait remarquer.

Il faut créer le cadre politique nécessaire pour veiller à ce que tout un chacun ait la même possibilité d’accès aux outils numériques, ont répondu plusieurs délégations.  De fait, l’intégration de l’égalité des sexes dans les politiques publiques et le financement de la technologie et de l’innovation devrait devenir la norme, a fait valoir le Ministre de la coopération des pays nordiques et de l’égalité de la Finlande, M. Thomas Blomqvist, indiquant que son gouvernement avait alloué 17 millions d’euros à l’intersection de la technologie, de l’innovation et de l’égalité des sexes.

À Malte, le Gouvernement a investi dans la transformation numérique pour les femmes et les filles en leur donnant accès au développement des compétences en ligne par le biais des différents programmes soutenus par Malta Enterprise, s’est enorgueillie la Secrétaire parlementaire pour les réformes et l’égalité, Mme Rebecca Buttigieg.  La Ministre des femmes du Paraguay, Mme Celina Lezcano, est, quant à elle, revenue sur le programme d’alphabétisation numérique, dispensé dans le cadre de télécentres régionaux au profit des femmes dans les régions enclavées.

Fournir un accès sûr, inclusif et égal aux outils numériques à toutes les femmes et les filles voilà la priorité, a abondé, la Secrétaire d’État parlementaire de l’Allemagne, qui s’exprimait en sa capacité nationale.  Cependant, la fracture numérique entre les pays du Sud et du Nord aggrave encore les défis auxquels sont confrontées les femmes et les jeunes filles dans la plupart des pays en développement, déjà en prise avec les normes patriarcales, a regretté la Présidente de l’Union nationale des femmes de l’Érythrée.

La Vice-Présidente de la Commission européenne, Mme Věra Jourová, a insisté sur la nécessité d’espaces numériques sûrs, détaillant les mesures prises à cette fin à l’échelle européenne, notamment une pénalisation de la violence, ainsi que la suppression rapide de tout contenu illégal basée sur le genre.  Une approche soutenue par la Ministre du genre et de la famille de la République de Corée, Mme Hyun-sook Kim, qui a parlé de mesures en amont pour protéger « nos enfants » de la cybercriminalité à travers des mesures de répression plus rigoureuses, ainsi que par le Gouvernement du Brésil dont la priorité est de promouvoir des mesures visant à lutter contre le harcèlement en ligne.

La Ministre des femmes de l’Égypte, Mme Maya Morsy, a partagé l’expérience conduite avec l’UNICEF dans le cadre d’une série de discussions avec des adolescents pour mieux comprendre comment les médias sociaux et les jeux en ligne ont une influence sur leur sécurité.  « Lorsqu’on les interroge sur les risques en lignes, les filles parlent de piratage, de vol d’identité et de dépression », a-t-elle dit.  L’occasion pour la représentante du Chili de souligner le rôle des fournisseurs des services en ligne pour éradiquer les violences sur le net.

En Belgique, notre plan national contre la violence fondée sur le genre, adopté en 2021, est pleinement conforme à la Convention d’Istanbul, et est élaboré main dans la main avec la société civile, a fait savoir la Ministre de la culture, des médias, des droits de la femme, de la petite enfance et de la santé, Mme Bénédicte Linard.  Le Président de la Confédération suisse, M. Alain Berset, a parlé de l’initiative de lutte contre la cyberviolence Stop Hate Speech, expliquant que cet algorithme détecte les propos haineux sur la toile et leur oppose un contre-discours efficace.

Il faut également un accès à la justice, ce qui implique des processus civils et administratifs, notamment dans les domaines de la prévention, la protection, les poursuites et la réparation pour les survivants, a estimé pour sa part la Secrétaire de cabinet de la fonction publique du Kenya, Mme Aisha Jumwa Katana.  La Ministre d’État pour le genre, pour la famille et des services sociaux des Maldives, Mme Zifleena Hassan, s’est félicitée de son côté de la modification en 2019, du code pénal pour y inclure des dispositions sur le harcèlement en ligne. 

Dans un contexte de guerre, l’innovation inclusive et le changement technologique peut être d’un grand apport, notamment en Ukraine, où les femmes ont la garantie d’un accès numérique à l’éducation, à l’emploi, aux ressources commerciales et aux services sociaux.  Si notre ennemi pense que la guerre peut rendre les femmes ukrainiennes impuissantes, qu’elle peut les forcer à abandonner l’éducation, leurs affaires et leurs propres rêves, il se trompe lourdement, a lancé la Ministre adjointe de l’économie de l’Ukraine, faisant valoir, qu’au contraire de tels défis ont permis la mise en œuvre des solutions numériques encore plus créatives qui renforceront le statut des femmes ukrainiennes.

Établissant une corrélation entre la violence sexiste physique en présentiel et celle en ligne, la Directrice exécutive adjointe d’ONU-Femmes en charge des politiques, des programmes, de la société civile et de l’appui normatif aux États Membres, Mme Åsa Regner, a signalé que les technologies aggravent souvent le degré de violence perpétrée à l’encontre des femmes.  Cela a pour effet de réduire l’interaction des femmes en ligne, ce qui limite leur participation à la vie publique et sape la démocratie et les droits de la personne de façon générale, a-t-elle regretté.

L’occasion pour le Président de la Confédération suisse de proposer de mettre à disposition de la communauté internationale deux applications pour renforcer les droits des femmes.  L’une intitulée Women’s Human Rights, constitue une banque de données numériques unique des textes normatifs de référence sur les droits des femmes.  Quant à la seconde, Women, Peace and Security, elle analyse l’engagement du Conseil de sécurité et permet de suivre les progrès des États et des organisations internationales.

Table ronde ministérielle 3

Présentée en après-midi, la troisième table ronde ministérielle portait, comme la première, sur les bonnes pratiques permettant de surmonter les obstacles à la réduction de la fracture numérique entre les hommes et les femmes et de promouvoir l’éducation à l’ère numérique pour atteindre l’égalité. 

Le modérateur et Vice-Ministre du travail et de la protection sociale de la Mongolie, M. Zulphar Sarkhad, a indiqué que son pays a réussi à faire des progrès notables en vue de la transition vers le numérique, en favorisant la gouvernance numérique et la mise en place d’un cadre juridique approprié.  Cette transition des processus gouvernementaux a permis aux citoyens d’accéder à une gamme de services en ligne, tout en permettant aux femmes d’acquérir de nouvelles compétences, favorisant ainsi leur autonomisation. 

L’égalité n’est pas seulement une question de droits et de valeurs, mais aussi de bien-être économique et social, a expliqué le Secrétaire d’État aux affaires politiques au Ministère des affaires étrangères et européennes, M. Frano Matusic, en décrivant la stratégie numérique adoptée par la Croatie jusqu’en 2032, en mettant l’emphase sur l’accès à des connections à haut débit dans les zones rurales et le développement des compétences numériques chez les femmes.  Une approche similaire à celle du Japon, qui a lancé l’an dernier une stratégie pour le développement des ressources humaines numériques à l’intention des femmes, a expliqué sa représentante. 

La Vice-Présidente de la Commission nationale de travail sur les enfants et les femmes du Conseil d’État de Chine, Mme Frano Yi Lin, a quant à elle décrit les efforts déployés par son pays pour assurer la formation des femmes aux outils numériques ainsi que leur développement professionnel dans ce secteur, où elles représentent désormais 40% des entrepreneurs. 

Les technologies numériques étant aujourd’hui des outils essentiels pour travailler, commercer et participer à la société, la Vice-Ministre du travail et des affaires sociales de la Grèce, chargée de l’égalité entre les hommes et les femmes, de la démographie et de la famille, Mme Maria Syrengela, a jugé qu’il incombe aux gouvernements d’élaborer des politiques favorisant l’accès à ces compétences afin que les filles, comme les garçons, soient autonomisés sur le plan numérique. 

Dans cette optique, le Ministre du développement social du Soudan, M. Ahmed Adam Bakhiet, a souligné l’importance du partage d’informations et de bonnes pratiques entre les États Membres afin de résorber les inégalités régionales dans les domaines des technologies numériques et d’atteindre la parité dans la participation des femmes et des hommes à la société. 

Si les femmes et les filles sont moins scolarisées et utilisent moins les outils numériques que les hommes, l’accès à Internet et à des téléphones portables leur permet cependant d’augmenter leurs revenus, d’accroître les possibilités d’emploi et d’avoir accès à de nouvelles informations afin de bâtir un monde numérique plus inclusif, a renchéri la Ministre du genre, de l’enfance et de la protection sociale du Libéria, Mme Williametta E.  Saydee Tarr.  Pour lever ces obstacles et refermer la fracture numérique, il nous faut plaider à la fois en faveur de l’éducation numérique et de l’éducation formelle, a-t-elle ajouté, notamment dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques. 

Un appel entendu par le Botswana, qui a lancé un projet de numérisation des écoles afin de mettre en place un modèle d’enseignement hybride ciblant tant les élèves que les enseignants, a expliqué le Ministre de la jeunesse, de l’égalité des sexes, des sports et de la culture, M. Tumiso Macdonald Rakgare.  À l’université, un programme encourage également les femmes à étudier dans les sciences, la technologie et l’ingénierie, de même que les personnes en situation de handicap et celles vivant dans les zones rurales. 

En Équateur, le Gouvernement a mis en œuvre des formations à l’intention des dirigeantes autochtones, historiquement discriminées, afin de garantir leur participation aux nouveaux moyens de communication et d’améliorer leur alphabétisation, a noté la Ministre des femmes et des droits humains, Mme Paola Flores. 

La Vice-Ministre des affaires européennes et Commissaire du Gouvernement pour les droits de l’homme de la Tchéquie, s’est toutefois inquiétée du risque de fragmentation de nos sociétés qui accompagne le développement des nouvelles technologies aux niveaux national et mondial.  « L’inégalité des genres dans le monde réel se traduit également dans le monde numérique », a notamment relevé Mme Klára Šimáčková Laurenčíková, et la sécurité des filles et des femmes doit y être assurée au même niveau que dans le monde réel. 

Pour la Secrétaire générale de l’Union internationale des télécommunications (UIT), Mme Doreen Bogdan-Martin, des politiques efficaces peuvent nous aider à combler le fossé technologique « avant 300 ans », en s’attaquant aux normes sociales négatives, en priorisant l’éducation numérique et en disposant d’informations ventilées par genre.  Alors que les femmes sont souvent exclues du processus décisionnel concernant les nouvelles technologies, l’UIT lancera demain un manuel sur ces questions, notamment les obstacles à la connectivité des femmes.  « Nous devons oser agir », a-t-elle dit, en enjoignant les États Membres à assurer aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes. 

Table ronde ministérielle 4

La quatrième table ronde ministérielle s’est de nouveau centrée sur comment « Favoriser l’innovation inclusive et les progrès technologiques en vue de renforcer les moyens d’action des femmes et des filles et de créer des espaces numériques plus sûrs ». 

Les femmes sont rarement considérées et responsabilisées en tant que créatrices de technologies et décideurs, ce qui limite leur capacité à créer des outils qui répondent aux priorités des femmes et des filles, a relevé à cette occasion la Secrétaire d’État aux politiques d’égalité et de diversité, Ministère des femmes, des genres et de la diversité de l’Argentine, Mme Pauline Calderon, dans une note de cadrage. 

Intervenant, ensuite en sa capacité nationale, elle a indiqué que les efforts de son gouvernement se heurtent à une culture « machiste », évoquant une augmentation des violences en ligne et des féminicides.  Nous essayons de changer la culture et créer les pratiques et coutumes dont nous avons besoin, a-t-elle témoigné. 

Intervention liminaire

Mme AMINA MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a relevé que les femmes ont 21% moins de chances que les hommes d’être en ligne, un écart qui atteint 52% dans les pays les moins avancés et qui empêche les femmes et les filles de participer à l’éducation en ligne, les prive de l’information et les empêche d’accéder à des services mobiles (banque, soins de santé), ou encore de s’exprimer en ligne.  Si ce fossé numérique n’est pas comblé, les femmes resteront encore plus à la traîne lorsque les sociétés récolteront les fruits des avancées technologiques, a-t-elle averti. 

En outre, les femmes et les filles ont 25% moins de chance que les hommes de disposer des connaissances et compétences nécessaires pour utiliser les technologies numériques.  De plus, elles ne représentent que 28% de la main-d’œuvre dans les domaines des STIM, et elles resteront sous-représentées dans ce secteur si rien n’est fait, a averti la responsable onusienne qui a pressé tous les États Membres à donner la priorité à l’éducation scientifique et mathématique des filles. 

Poursuivant, Mme Mohammed a sensibilisé sur la gestion des risques liés à la présence en ligne, sachant que les filles et les femmes, y compris les politiques et les journalistes, sont souvent la cible de harcèlement et d’abus en ligne.  Elle a encouragé les gouvernements, les entreprises privées et la société civile à s’unir pour lutter contre la violence et les discours de haine sexistes facilités par la technologie.  Pour leur part, a-t-elle confié, les Nations Unies travaillent avec un large éventail d’acteurs pour créer un code de conduite pour assurer l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  L’objectif est de réduire les dommages et d’accroître la responsabilité tout en défendant le droit à la liberté d’expression.

   La Vice-Secrétaire générale a ensuite attiré l’attention sur le fait que les algorithmes qui façonnent l’environnement numérique sont souvent basés sur des données qui excluent les femmes et les filles.  En fait, la discrimination est intégrée dès le départ, s’est-elle désolée, plaidant pour une approche basée sur des données inclusives et diverses.  En outre, l’exclusion des femmes du monde numérique a amputé le PIB des pays à revenu faible ou intermédiaire d’un billion de dollars au cours de la dernière décennie.  Et cette perte de productivité se traduit par des milliards de dollars de pertes en impôts et en investissements dans les services publics.  La technologie numérique peut être un multiplicateur de force pour le développement durable, à condition d’assurer la pleine participation des femmes et des filles qui sont à la « hauteur de la tâche », a insisté Mme Mohamed qui a rappelé que ce sont les femmes qui ont lancé le mouvement inspirant d’activisme numérique #MeToo.

Débat interactif

Ce n’est qu’en abordant les questions d’égalité des sexes et de non-discrimination dès les premières étapes de l’éducation que nous pourrons contribuer à l’éradication des stéréotypes liés au genre, a affirmé la Ministre des femmes et des populations vulnérables du Pérou.  Mme Nancy Rosalina Tolentino Gamarra a notamment mis en avant l’outil « Learning Routes » qui vise à démystifier et à éliminer les préjugés liés au genre concernant la participation des femmes et des adolescentes dans les secteurs de l’ingénierie et des mathématiques. 

La Ministre des affaires sociales et du développement communautaire et Ministre d’État pour les femmes et les enfants du Koweït, Mme May Al-Baghly, s’est enorgueillie que son pays dispose du plus haut taux de téléphonie et de l’Internet par habitant, ainsi que de la promulgation d’une loi qui vise à protéger les femmes et les filles des violences dans l’espace cybernétique.  Le Secrétaire d’État au développement international, Ministère des affaires étrangères de Norvège, M. Bjorg Sandkjaer, a ensuite cité les mérites de la Digital Public Goods Alliance et de la création d’un pacte numérique mondial, appelant à soutenir les solutions numériques qui renforcent la participation économique et politique des femmes. 

La Ministre de la femme, de la famille et de l’enfance de Côte d’Ivoire, Mme Nasseneba Toure, a mis en avant la Stratégie nationale de développement du numérique à l’horizon 2025 pour un investissement de 3,25 milliards de dollars, suivie de la Ministre de la promotion de la femme et de la protection de l’enfance du Niger, Mme Aminata Zourkaleini, qui a parlé de la création en 2020 d’une école de codage, précisant que les filles représentaient 33% et 44% des promotions 2021 et 2022.

À son tour, la Ministre d’État, Ministère des affaires intérieures et Ministère du développement social et familial de Singapour, Mme Xueling Sun, a indiqué que dans son pays, quatre professionnels de la technologie sur 10 sont des femmes, ce qui est bien supérieur à la moyenne mondiale de 28%.  Même son de cloche du côté de l’Arabie saoudite où selon la Conseillère principale à l’autorité nationale de cybersécurité, Mme Aya Almagwashi, les femmes représentent 50 à 70% des participants dans les programmes de formation sur les compétence cybernétiques et numériques. 

Certes, mais avant de combler le fossé numérique entre les sexes, il faut déjà combler la fracture numérique entre pays afin d’éliminer l’analphabétisme numérique qui touche en particulier les femmes et les filles, a estimé la Directrice générale du service de l’autonomisation des femmes de l’Iraq, Mme Yusra Kareem Mohsin.  À ce propos, la Ministre d’État chargée de la transformation sociale d’Antigua-et-Barbuda a indiqué qu’en juillet 2022, le Ministère de l’éducation a organisé son premier camp d’été sur les STIM et la robotique.  Mme Samantha Marshalle a précisé qu’il s’agira d’un événement annuel en reconnaissance du fait qu’au moins 80% des possibilités d’emploi actuelles et futures sont liées aux STIM d’une manière ou d’une autre.  Le Bélarus a lui aussi misé sur la construction d’un pays informatique, en créant dès 2005 le High Technology Park, qui est devenu la « Silicon Valley » biélorusse et le premier cluster informatique de la région, s’est enorgueillie la Cheffe de la direction générale de la diplomatie multilatérale, Ministère des affaires étrangères, Mme Irina Velichko.

Après le Ministre de la femme, de la jeunesse, des sports et des affaires sociales du Kiribati, M. Martin Moreti, qui a fait état d’obstacles à la pleine participation des femmes et des filles à l’alphabétisation numérique et au commerce électronique, le Ministre de l’autonomisation des populations et des affaires des anciens de la Barbade, M. Kirk Humphrey, a partagé l’initiative Girls Power Tech.  Lancée dès 2018, celle-ci vise à encourager les filles âgées de 13 à 14 ans à rejoindre les programmes STIM. De son côté, la Vice-Ministre de l’innovation, de la transparence et de l’attention aux citoyens de la République dominicaine, Mme Dilia Leticia Jorge Mera, a indiqué qu’un programme de conseils d’orientation professionnelle a bénéficié à quelque 1 800 filles

La Vice-Ministre adjoint chargé des australiens autochtones et de la santé des autochtones de l’Australie, Mme Malarndirri McCarthy, a rappelé que, dès 2015, son pays a réalisé une première mondiale en matière d’égalité des sexes en créant la première commission eSafety au monde, chargée d’assurer la sécurité en ligne de tous les Australiens.

La Ministre de l’égalité des sexes et de l’enfance de Trinité-et-Tobago, Mme Alyanna Webster-Roy, a mis en avant le soutien TIC aux écoles, l’objectif étant notamment de résorber la fracture numérique dans son pays en faveur des femmes et des filles.  La Vice-Ministre de l’enseignement supérieur, des sciences et de l’innovation d’Ouzbékistan, Mme Shahlokon Turdikulova, a évoqué de son côté l’application Women’s Register, qui fournit un soutien socioéconomique, médical, juridique et psychologique à environ 900 000 femmes.  La Ministre des affaires sociales, de la famille et du genre de l’Angola, Mme Ana Paula Do Sacramento Neto, a ensuite parlé de lancement du projet SMS pour les jeunes, un outil de messagerie gratuit pour les aider à prendre des décisions positives et à suivre de bonnes pratiques en termes de santé sexuelle et reproductive, de citoyenneté, de genre et de prévention des maladies. 

Après la Ministre de l’égalité des sexes de la Suède, Mme Paulina Brandberg, qui a jugé essentiel de prévenir et combattre la violence sexiste en ligne, le Ministre du développement numérique, de l’innovation et de l’industrie aérospatiale du Kazakhstan, M. Bagdat Mussin, a fait observer que l’élimination des différences salariales ainsi que l’augmentation du nombre de femmes dans les postes de responsabilité a contribué à promouvoir la place de la femme.  De son côté, la Ministre des femmes, des enfants et de la lutte contre la pauvreté des Fidji, Mme Lynda Tabuya a signalé que si la technologie et l’innovation numériques peuvent créer de nouvelles possibilités d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques, elles peuvent également accroître l’empreinte carbone du secteur des TIC.

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