Commission de la condition de la femme: le Secrétaire général appelle à « ne pas laisser les Silicon Valleys se transformer en vallées de la mort pour les droits des femmes »
La Commission de la condition de la femme a ouvert aujourd’hui les travaux de sa soixante-septième session durant laquelle les délégations examineront, deux semaines durant, le rôle de l’innovation et l’évolution technologique, et de l’éducation à l’ère du numérique dans la réalisation de l’égalité des sexes.
À cette occasion, le Secrétaire général de l’ONU a constaté qu’à mesure que la technologie progresse, les femmes et les jeunes filles sont laissées à la traîne, notant que des siècles de discrimination et de stéréotypes néfastes ont créé un énorme fossé entre les genres dans le domaine scientifique et technologique.
De fait, s’est-il alarmé, trois milliards de personnes, en majorité des femmes et des jeunes filles vivant dans des pays en développement, ne sont toujours pas connectées à Internet. À l’échelle de la planète, les filles et les femmes ne représentent qu’un tiers des effectifs dans les filières d’études relatives aux sciences, à la technologie, à l’ingénierie et aux mathématiques. Et seulement une personne sur cinq travaillant dans le domaine de l’intelligence artificielle est une femme.
M. António Guterres a également dénoncé la désinformation et la mésinformation à caractère misogyne qui fleurissent sur les médias sociaux, décriant le « gender-trolling » qui vise tout spécialement à réduire les femmes au silence et à les écarter de la vie publique. En outre, les mégadonnées, qui sont un élément essentiel à la prise des décisions politiques et commerciales, prennent rarement en compte les différences entre les genres, voire le genre féminin tout court ce qui fait que des produits et services portent, dès leur conception, la marque de l’inégalité entre les femmes et les hommes. « Nous ne pouvons pas laisser les Silicon Valleys de notre monde se transformer en vallées de la mort pour les droits des femmes », a tempêté M. Guterres qui a exhorté à prendre des mesures sans délai pour accroître les niveaux d’éducation, de revenu et d’emploi des femmes et des filles; à promouvoir leur pleine participation et leur accès aux plus hautes fonctions dans les domaines scientifique et technologique; et à créer un environnement numérique sûr pour elles.
À l’instar de la Présidente de la Commission de la condition de la femme, le Président de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösia, a fait observer que lorsqu’elles sont bien utilisées, les nouvelles technologies offrent une « force puissante et égalisatrice » pour appuyer l’égalité entre les sexes, notant que l’apprentissage en ligne réduit les écarts d’éducation entre les sexes et prépare les femmes aux emplois numériques.
Les technologies ont ouvert les portes aux femmes aux quatre coins du monde, leur donnant accès à l’éducation, à la formation et à des informations sensibles liées à la santé sexuelle et reproductive, a renchéri l’Envoyé du Secrétaire général pour les technologies, M. Amandeep Singh Gill. Dans le même temps, les technologies sont le miroir du côté sombre et obscur de notre planète, a-t-il fait remarquer, notant que les plateformes numériques ont multiplié la portée de la pornographie, et conduit à de nouvelles formes de haine qui se répandent en ligne, empêchant les femmes de jouir de leurs droits humains, et privant les femmes dirigeantes de la place qui leur revient sur la scène la politique.
Si la révolution numérique offre des possibilités sans précédent pour les femmes et les filles, elle a également aggravé les inégalités entre les sexes, a résumé la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme Sima Bahous, selon qui la fracture numérique serait le nouveau visage de l’inégalité entre les sexes. Elle s’est également inquiétée de la situation en Afghanistan et en Iran où de nombreuses femmes et filles sont prises pour cibles en raison de leurs activités en ligne.
Au cours de la discussion générale, marquée par la présence de plusieurs Présidents et Premiers Ministres, plusieurs États Membres ont détaillé les divers efforts déployés au niveau national pour faire du numérique un outil d’autonomisation de la femme et de la fille, tout en contrant les effets sexistes néfastes qui entourent la technologie et l’innovation. Les délégations se sont notamment accordées sur l’importance de s’attaquer aux stéréotypes qui découragent les filles d’embrasser des carrières dans les domaines des sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM).
En début de séance, la Commission a adopté l’ordre du jour provisoire (E/CN.6/2023/1) et le projet d’organisation des travaux (E/CN.6/2023/1/Add.1), après avoir élu Mme María del Carmen Squeff (Argentine) et Mme Chimguundari Navaan-Yunden (Mongolie) à la vice-présidence. Cette dernière assumera aussi les fonctions de Rapporteuse. En outre, le Bangladesh, la République dominicaine et le Maroc rejoignent la Fédération de Russie et la Türkiye, comme membres du Groupe de travail des communications.
En outre, la Commission a adopté un projet de décision orale concernant la participation des Îles Cook aux travaux de l’actuelle session conformément aux dispositions de l’article 69 du règlement intérieur des commissions techniques du Conseil économique et social (ECOSOC).
La Commission de la condition de la femme poursuivra ses travaux demain, mardi 7 mars, à partir de 10 heures.
SOIXANTE-SEPTIÈME SESSION DE LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME
Déclarations liminaires
Mme MATHU JOYINI, (Afrique du Sud), Présidente de la soixante-septième session de la Commission de la condition de la femme, a exprimé sa solidarité avec toutes les femmes et les filles dans les situations de conflit et des zones touchées par des catastrophes. Elle a indiqué que cette session sera l’occasion de procéder à une évaluation des progrès accomplis pour surmonter les inégalités entre les femmes et les hommes dans le domaine de « l’innovation et évolution technologique, et l’éducation à l’ère du numérique aux fins de la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation de toutes les femmes et de toutes les filles », thème prioritaire de cette session. La Commission examinera aussi les nouveaux problèmes pour parvenir à l’égalité entre les sexes dans le cadre des urgences qui se chevauchent actuellement. Enfin, pour la première fois de son histoire, la Commission discutera du thème prioritaire dans le cadre d’un « segment jeune ».
La Présidente a estimé que le thème de cette année ne pouvait être plus opportun, notant que les technologies de la numérisation permettent de réaliser des progrès sans précédent pour améliorer la situation socioéconomiques des femmes et des filles. Cependant, a-t-elle tempéré, cela crée aussi de nouvelles difficultés qui peuvent maintenir ou aggraver les inégalités entre les sexes.
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que la Commission de la condition de la femme revêt une importance encore plus grande à l’heure où les droits des femmes sont bafoués, menacés et battus en brèche dans le monde entier. Il a notamment évoqué la situation en Afghanistan, où les femmes et les filles ont été effacées de la vie publique, ainsi que dans certains des pays les plus riches, où les droits sexuels et procréatifs des femmes sont attaqués. L’égalité des genres est un horizon de plus en plus lointain. ONU-Femmes estime qu’au rythme actuel, il faudra attendre 300 ans avant de l’atteindre, s’est-il alarmé. Le Secrétaire général a également fait état d’une augmentation de la mortalité maternelle, relevant en outre que les effets de la pandémie de COVID-19 continuent notamment de peser sur des millions de filles contraintes d’abandonner leurs études. De l’Ukraine au Sahel, les femmes et les filles sont les premières et les plus gravement touchées par les crises et les conflits, a déploré M. Guterres, regrettant qu’au niveau international, certains pays s’opposent désormais à la perspective de genre dans les négociations multilatérales. « La patriarchie contre-attaque. Mais nous ripostons », a déclaré M. Guterres qui a exhorté à changer les cadres internationaux qui, selon lui, ne sont pas adaptés aux besoins et aspirations des femmes et des filles du monde.
Passant ensuite au thème prioritaire de la session, le Secrétaire général a constaté qu’à mesure que la technologie progresse, les femmes et les jeunes filles sont laissées à la traîne. De fait, s’est-il alarmé, trois milliards de personnes, en majorité des femmes et des jeunes filles vivant dans des pays en développement, ne sont toujours pas connectées à Internet. Dans les pays les moins avancés, seules 19% des femmes utilisent Internet. À l’échelle de la planète, les filles et les femmes ne représentent qu’un tiers des effectifs dans les filières d’études relatives aux sciences, à la technologie, à l’ingénierie et aux mathématiques. Dans le secteur technologique, les hommes sont deux fois plus nombreux que les femmes. En outre, seulement une personne sur cinq travaillant dans le domaine de l’intelligence artificielle est une femme.
Cet état a été amplifié par la pandémie de COVID-19 qui a creusé les inégalités d’accès à Internet et accentué les dangers qui guettaient les femmes et les filles en ligne, a relevé M. Guterres, s’emportant contre la désinformation et la mésinformation à caractère misogyne qui fleurissent sur les médias sociaux et décriant le « gender-trolling » qui vise tout spécialement à réduire les femmes au silence et à les écarter de la vie publique.
Des siècles de patriarcat, de discrimination et de stéréotypes néfastes ont créé un énorme fossé entre les genres dans le domaine scientifique et technologique, s’est désolé le Secrétaire général qui a déploré que les femmes ne représentent que 3% des personnes récompensées par un prix Nobel dans des catégories scientifiques. En outre, les mégadonnées, qui sont un élément essentiel à la prise des décisions politiques et commerciales, prennent rarement en compte les différences entre les genres, voire le genre féminin tout court ce qui fait que des produits et services portent, dès leur conception, la marque de l’inégalité entre les femmes et les hommes. « Nous ne pouvons pas laisser les Silicon Valleys de notre monde se transformer en vallées de la mort pour les droits des femmes », a tempêté M. Guterres.
Le Secrétaire général a appelé à prendre des mesures sans délai pour équilibrer la répartition du pouvoir dans trois domaines, tout d’abord en accroissant les niveaux d’éducation, de revenu et d’emploi des femmes et des filles, en particulier dans les pays du Sud. Pour que les femmes de ces pays soient connectées au monde en ligne, il faut combattre la pauvreté et les inégalités, qui ne cessent d’augmenter, a-t-il indiqué.
En deuxième lieu, il a engagé les dirigeantes et dirigeants à promouvoir la pleine participation des femmes et des filles et leur accès aux plus hautes fonctions dans les domaines scientifique et technologique, des gouvernements aux conseils d’administration, en passant par les établissements scolaires.
Enfin, dans un troisième point, il a plaidé pour la création d’un environnement numérique sûr pour les femmes et les filles. À cet égard, il a indiqué que l’ONU travaille avec diverses parties prenantes pour promouvoir un code de conduite portant sur l’intégrité de l’information diffusée sur les plateformes numériques. L’objectif étant, selon lui, d’atténuer le préjudice causé et de lutter contre l’impunité, tout en défendant le droit à la liberté d’expression.
Mme LACHEZARA STOEVA, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a noté que le rythme inégal de la transformation numérique a exacerbé les obstacles auxquels sont confrontées les femmes et les filles, jugeant « extrêmement opportun » le thème prioritaire de la Commission. L’éducation à l’ère numérique, dans le contexte d’une innovation et d’une évolution technologique rapides, est essentielle pour relever les défis existants et émergents dans notre monde interconnecté et numérisé, a relevé Mme Stoeva pour qui l’intégration d’une perspective de genre dans la technologie et l’innovation est essentielle. Elle a espéré que les travaux de la Commission fourniront un cadre susceptible de faire de la technologie un outil de transformation pour le changement social et l’atteinte des objectifs de développement durable. La Présidente a par ailleurs remercié la Commission pour sa collaboration avec d’autres organes subsidiaires de l’ECOSOC et de l’ONU, alors que le renforcement de ces approches collaboratives figurait parmi les recommandations de l’examen des travaux des commissions techniques et des organes d’experts de l’ECOSOC entrepris l’an dernier.
M. CSABA KŐRÖSI, Président de l’Assemblée générale, a déclaré que promouvoir une éducation de qualité à l’ère numérique est essentiel pour atteindre les objectifs de développement durable et la promesse de ne laisser personne de côté. « Si nous n’exploitons pas le plein potentiel de la moitié de l’humanité, comment sommes-nous censés atteindre les objectifs ambitieux énoncés dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030? » s’est demandé le Président. Il a ensuite relevé que les femmes sont toujours minoritaires dans les domaines de l’informatique, de la physique, des mathématiques et de l’ingénierie, représentant moins de 35% des travailleurs du secteur des technologies de l’information et des communications.
Or, lorsqu’elles sont bien utilisées, les nouvelles technologies offrent une « force puissante et égalisatrice » pour changer cet état de fait, a fait valoir le Président. Dans certaines régions, l’apprentissage en ligne réduit les écarts d’éducation entre les sexes, prépare les femmes aux emplois numériques et offre des possibilités d’emploi. De plus, l’intelligence artificielle peut être conçue de manière à exclure toute discrimination de genre. Pour sa part, M. Kőrösi a dit continuer de travailler avec son conseil consultatif sur l’égalité des sexes pour intégrer cette perspective dans les travaux de l’Assemblée générale. Il a encouragé les déléguées à veiller à ce que les politiques d’égalité entre les sexes reposent sur des preuves scientifiques, afin de désamorcer les questions controversées. Comme la Commission l’a prouvé à maintes reprises, les discussions difficiles peuvent mener à des changements significatifs, a-t-il conclu.
M. AMANDEEP SINGH GILL, Envoyé du Secrétaire général pour les technologies, a déclaré que les technologies ont ouvert les portes aux femmes aux quatre coins du monde, leur donnant accès à l’éducation, à la formation et à des informations sensibles liées à la santé sexuelle et reproductive. Elles ont également aidé à faire tomber les barrières de la connaissance qui était considérée comme étant l’apanage des hommes. Dans le même temps, les technologies sont le miroir du côté sombre et obscur de notre planète, a-t-il fait remarquer, notant que les plateformes numériques ont multiplié la portée de la pornographie, réduisant les femmes et les filles à des objets. C’est là un élément qui amplifie la violence fondée sur le genre facilitée par les nouvelles technologies, a-t-il déploré. Ces plateformes ont également conduit à de nouvelles formes de haine qui se répand en ligne, empêchant les femmes de jouir de leurs droits humains, et privant les femmes dirigeantes de la place qui leur revient sur la scène la politique.
L’Envoyé du Secrétaire général a encouragé à une amélioration de l’accès des femmes et des filles aux compétences, notamment dans le domaine des technologies de pointes, et à veiller à ce que les politiques soient alignées et tiennent compte de la dimension de genre. Il a également appelé à intégrer les femmes dans les technologies puissantes de l’intelligence artificielle, y voyant l’un des leviers les plus puissants pour changer notre environnement numérique. Il a en outre indiqué que l’exclusion des femmes du monde numérique est à l’origine de la perte de milliers de milliards de dollars du PIB mondiale. Ne serait-ce que pour avancer sur la voie des ODD, il faut faciliter la participation accrue des femmes dans les nouvelles technologies, a-t-il insisté.
Mme LATANYA MAPP FRETT, représentante de la société civile, s’est dite engagée à faire avancer la technologie et l’innovation féminines. Les infrastructures technologiques que nous créons forgeront en effet les cheffes de l’avenir. La technologie peut être un outil pour propulser les mouvements féministes, a-t-elle noté, en mettant en garde contre l’intégrisme et la désinformation, qui peuvent être contrés au moyen d’initiatives sur le modèle du programme Verified de l’ONU. Pour y parvenir, la présence de communautés en ligne est à ses yeux nécessaire pour assurer un plaidoyer efficace. Elle a appelé à notre « responsabilisation collective » afin d’utiliser les technologies de l’information pour favoriser une plus grande égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.
Dans un message vidéo préenregistré, Mme LORENA DE LA CRUZ, représentante du collectif de jeunes femmes de Quilla Catambuco en Colombie, a souhaité, en tant que jeune paysanne d’origine autochtone, partager sa vision et son expérience d’une vie meilleure avec une compréhension innovante de « l’ensemble » comme un système vivant et interconnecté. Elle a invité à réfléchir à la crise de la vie à laquelle l’humanité est confrontée, accusant la « pensée occidentale » d’être derrière la « logique du mieux-vivre par la prédation et la compétition », où seuls quelques-uns sont dans l’opulence mondiale. Aujourd’hui, les êtres humains se sont séparés de la nature, se considérant comme les rois autoritaires de la création, usant et abusant des autres formes d’existence, a-t-elle déploré.
Afin de tirer profit de l’innovation et de la technologie en faveur d’une vie meilleure, la représentante de la société civile a appelé à concevoir une structure éducative loin de la hiérarchie et de l’individualité, conseillant d’explorer et d’apprendre des pédagogies communautaires, où l’éducation est circulaire et égale pour tous. Dans cette approche, les filles et les femmes des zones rurales ont la garantie du droit à l’éducation, ce qui contribue à corriger leur sous-représentation dans la science et la technologie. De même, a-t-elle estimé, il est urgent de générer un changement dans l’utilisation de la technologie, conçue actuellement comme une distraction et ne profitant pas à la créativité et la pensée critique égalitaire. Enfin, elle a défendu la garantie de l’accès à la technologie à partir d’une vision qui permette de pérenniser des pratiques communautaires, seule façon, à ses yeux, de commencer à construire une structure commune qui émerge de la cosmovision communautaire et « nous permette de mieux vivre ».
Mme SIMA BAHOUS, Secrétaire générale adjointe et Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a fait état d’un nouveau type de pauvreté, celui de la « pauvreté numérique », qui exclut les femmes et les filles de manière « dévastatrice ». « La fracture numérique est devenue le nouveau visage de l’inégalité entre les sexes », a-t-elle ajouté, en appelant la Commission à élaborer des normes à cet effet. Si la révolution numérique offre des possibilités sans précédent pour les femmes et les filles, elle a également aggravé les inégalités entre les sexes, a constaté Mme Bahous qui a relevé que dans le monde, seuls 28% des diplômés en ingénierie et 22% des travailleurs du domaine de l’intelligence artificielle sont des femmes, bien que les filles obtiennent des résultats équivalents à ceux des garçons dans ces domaines.
Mme Bahous a notamment cité l’exemple des femmes afghanes qui se sont exprimées par le biais de YouTube et de blogs et qui ont vu leurs portes marquées par les Taliban. En Iran, de nombreuses femmes et filles continuent d’être prises pour cible en raison de leur participation à des campagnes en ligne. « Les militantes des droits des femmes ne peuvent pas jouer leur rôle de promotion de l’égalité si elles craignent des représailles », a-t-elle relevé, craignant qu’elles ne deviennent « invisibles ». « Il s’agit de la nouvelle répression et oppression numérique. » Selon elle, technologie et innovation constituent des accélérateurs éprouvés qui permettent de réaliser des progrès concrets pour réduire la pauvreté et la faim, améliorer la santé, créer de nouveaux emplois, atténuer les changements climatiques, faire face aux crises humanitaires et améliorer l’accès à l’énergie. Dans des pays comme le Niger et Haïti, nous avons été en mesure de numériser la collecte de données dans le cadre des évaluations rapides de genre. Et en Ukraine, les autorités nationales, la société civile et le secteur privé travaillent de concert pour trouver des solutions numériques tenant compte du genre.
Pour aller de l’avant, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a appelé à réformer et corriger les institutions et les stéréotypes sexistes néfastes qui entourent la technologie et l’innovation. Il faut aussi investir dans l’éducation numérique, scientifique et technologique des filles et des femmes, tout en faisant en sorte que les femmes occupent des postes de direction dans ces secteurs. Enfin, il importe de créer des espaces en ligne exempts de violence et d’abus, avec des mécanismes et une responsabilité claire pour lutter contre toutes les formes de harcèlement et de discrimination.
Mme ANA PELÁEZ NARVÁEZ, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a rappelé l’examen, en octobre 2022, du neuvième rapport périodique de l’Ukraine par le Comité et ses recommandations pour la protection et la promotion des droits des femmes, notamment dans les zones touchées par le conflit et des femmes déplacées. Elle a dénoncé la situation humanitaire désastreuse des femmes et des filles en Afghanistan, où le Comité a récemment mené une visite technique conjointe. Pourtant, a poursuivi la Présidente, il est de plus en plus évident que le leadership des femmes dans les systèmes de prise de décisions se traduit par des gains tangibles pour la démocratie.
Selon la Présidente, il est essentiel que les femmes soient représentées de manière égale dans la conception et la prise de décisions concernant l’intelligence artificielle, afin d’éviter que la discrimination à l’égard des femmes persiste dans les systèmes automatisés qui façonneront notre avenir. Si cette technologie n’est pas accessible et utilisable pour les groupes de femmes défavorisées, elle laissera de côté les talents de milliers de femmes et de filles dans le monde, s’est inquiétée la Présidente.
Dans un message préenregistré, Mme REEM ALSALEM, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences, a déclaré que les progrès technologiques ne sont pas une finalité, mais un moyen pour réaliser l’autonomisation des femmes et des filles et l’égalité des sexes. Elle a constaté que l’interaction entre l’innovation, les changements technologiques et l’éducation, d’une part, et l’égalité entre les hommes et les femmes, d’autre part, ne se produit jamais dans le vide et est toujours influencée par les éléments structurels du patriarcat et les formes de discrimination qui se chevauchent. C’est pourquoi, la Rapporteuse spéciale a recommandé de multiplier les mesures de prévention et de réponse globales et interconnectées afin de créer un contexte plus favorable à l’égalité entre les femmes et les hommes. Cela suppose également de revenir au principe de base consistant à adopter une approche intersectionnelle pour toutes interventions, a-t-elle estimé.
La Rapporteuse spéciale a ensuite invité à accorder une attention particulière à la situation des femmes et des filles en Afghanistan et en Iran, car ces deux pays représentent des exemples dramatiques de la riposte mondiale contre les droits des femmes et des filles. De telles discussions peuvent transmettre un message bien nécessaire, à savoir que la Commission, le principal organe intergouvernemental consacré à l’égalité des sexes, est activement saisie de leur situation, a-t-elle indiqué.
Discussion générale
Mme MANTY B. TARAWALLI, Ministre de l’égalité des sexes et de l’enfance de Sierra Leone, au nom du Groupe des États d’Afrique, a constaté avec une vive inquiétude que près de la moitié de la population mondiale n’a pas accès à Internet, en particulier les femmes et les filles, les personnes en situation de vulnérabilité, notamment les personnes handicapées, les personnes vivant avec le VIH/sida, les réfugiés et les habitants des pays les moins avancés, dont la majorité se trouve en Afrique. De plus, a-t-elle fait remarquer, l’impact de la pandémie de COVID-19 a exacerbé les inégalités causées par la fracture numérique, puisque les plus pauvres et les plus vulnérables, qui sont les plus durement touchés, accusent un retard dans l’accès aux TIC.
Abordant la question de l’agriculture familiale, la Ministre a insisté sur la nécessité de promouvoir l’éducation, la formation et l’information pertinente pour les agriculteurs et les agricultrices, en utilisant des moyens abordables, le transfert de technologie et des mesures concrètes pour améliorer les compétences, la productivité et les possibilités d’emploi des femmes. Elle a estimé nécessaire d’aborder les technologies numériques nouvelles et émergentes d’une manière qui respecte les obligations des États en vertu du droit international. Elle s’est ensuite élevée contre la désinformation, et la diffusion d’informations conçues pour inciter à la violence, à la haine, à la discrimination et à l’hostilité.
Mme PAULINA BRANDBERG, Ministre du genre et de l’égalité de la Suède, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a constaté que dans le monde, une fille a cinq fois moins de chances qu’un garçon d’envisager une carrière dans la technologie. Elle a indiqué que 2023, correspond à l’Année européenne des compétences, précisant que dans le cadre de l’initiative « Décennie numérique », l’UE s’est engagée à doubler le nombre de spécialistes des TIC pour atteindre 20 millions, avec un meilleur équilibre entre les sexes. De plus, l’UE finance des initiatives dans le monde entier pour mettre les technologies numériques au service d’une éducation centrée sur l’apprenant.
À l’échelle mondiale, la représentante a appelé à redoubler d’efforts pour trouver des solutions en matière d’éducation numérique, notamment en adoptant des approches transformatrices pour s’attaquer aux causes profondes des inégalités entre les sexes dans le cadre de l’élaboration des politiques et la prise de décisions. Ces efforts devraient en outre inclure les personnes handicapées, tenir compte de l’âge, et être adaptés aux zones pauvres et rurales et aux contextes de conflit, a-t-elle recommandé. Elle a aussi insisté sur la nécessité de s’attaquer aux obstacles structurels et institutionnels qui limitent le potentiel de toutes les femmes et les filles -en particulier celles en situation de vulnérabilité- à conduire et à bénéficier de la transition numérique.
Au nom du Groupe restreint LGBTI, M. THOMAS BLOMQVIST, Ministre de la coopération nordique et de l’égalité de la Finlande, a estimé que l’innovation et le changement technologique offrent à la communauté internationale l’occasion d’assurer l’inclusion pleine, égale et significative des femmes et des filles lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexuées dans l’éducation et les politiques publiques. La discrimination à l’école entrave en effet l’accès des jeunes qui sont ou qui sont perçus comme lesbiennes, bisexuels, transgenres et intersexués à une éducation de qualité.
L’apprentissage numérique peut accroître l’accès à divers modèles féminins et éliminer les préjugés et les stéréotypes sexistes des programmes pédagogiques, contribuant ainsi à la mise en œuvre de stratégies d’enseignement transformatrices en matière de genre, a poursuivi le Ministre. Internet et les technologies numériques connexes sont des outils importants pour améliorer la connectivité des groupes marginalisés, a-t-il noté, en appelant les gouvernements à faciliter l’accès de tous à Internet, à des services publics accessibles et inclusifs et à des solutions d’apprentissage à distance. À l’opposé, l’exclusion numérique, le harcèlement en ligne et la cyberintimidation peuvent être particulièrement préjudiciables. Le Ministre a condamné le recours à la censure des sites Web consacrés aux personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées, souvent utilisés pour construire des communautés. Ces atteintes à la sûreté et à la sécurité en ligne sont particulièrement répandues dans les États où leur identité est criminalisée ou soumise à des lois punitives, a-t-il relevé.
Mme IRINA VELICHKO (Bélarus), s’exprimant au nom du Groupe des Amis de la famille, s’est inquiétée de l’affaiblissement de l’institution de la famille, qui peut avoir des effets préjudiciables sur la croissance économique, la démographie, la santé publique et l’avenir des enfants. Elle a indiqué que tout en reconnaissant l’importance de la maternité et du rôle important des femmes dans l’éducation des enfants, le Groupe est engagé à développer les politiques visant à soutenir les multiples rôles des femmes dans la société, y compris dans les domaines de la science et de la technologie. À cette fin, il est nécessaire, selon elle, de gérer les changements technologique et numérique pour favoriser l’autonomisation économique des femmes et leur permettre de développer leurs compétences dans ces domaines. Elle a souligné l’importance de promouvoir l’équilibre travail-famille dans le monde numérique et d’accorder aux femmes exerçant des responsabilités familiales la flexibilité nécessaire.
M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq), au nom du Groupe des États arabes, s’est félicité des possibilités offertes par les nouvelles technologies pour améliorer la situation socioéconomique des femmes et combattre les stéréotypes négatifs à cet égard. Il a dénoncé les défis que constituent pour les femmes la violence engendrée par l’utilisation des technologiques de l’information, les politiques coloniales et les législations discriminatoires de l’occupation israélienne en Palestine. Le fossé numérique existant entre les sexes constitue à ses yeux un obstacle à l’autonomisation des femmes de la région. La coopération régionale et l’amélioration des possibilités d’emploi pour les femmes dans le domaine numérique peuvent, selon lui, combler ce fossé et assurer leur accès aux innovations technologiques.
Mme GISELE NDAYA LUSEBA, Ministre du genre, famille et enfant de la République démocratique du Congo, au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a mis en avant les nombreux cadres politiques établis par la SADC pour promouvoir l’innovation et l’utilisation des technologies à tous les niveaux, à commencer par l’approbation, en 2017, de la Charte de la SADC sur la création de l’Organisation des femmes dans le domaine des sciences, de l’ingénierie et de la technologie. Le Protocole de la SADC sur le genre et le développement, qui a été révisé en 2016, appelle, en outre, les États parties de la SADC à prendre des mesures spéciales pour augmenter le nombre de filles choisissant les matières STIM et les TIC aux niveaux secondaire, tertiaire et supérieur d’ici à 2030.
Pour faire en sorte que les femmes et les filles soient au centre du changement dans l’innovation technologique, la Ministre a recommandé que les lacunes des politiques et des cadres et processus législatifs soient comblées et qu’il y ait des investissements dans l’infrastructure numérique pour combler le clivage entre les sexes. Elle a également appelé à faire de la formation aux compétences numériques des femmes et des filles une priorité; à renforcer leur alphabétisation numérique et à faciliter leur accès aux appareils et outils numériques. Il faut en outre s’attaquer aux stéréotypes qui découragent les filles d’embrasser des carrières dans les domaines des STIM et s’assurer que l’économie numérique puisse garantir la participation sûre et sécurisée des femmes et des filles.
Mme LYNDA TABUYA, Ministre des femmes, des enfants et de la lutte contre la pauvreté des Fidji, qui s’exprimait au nom du Forum des îles du Pacifique, est revenue sur la Stratégie 2050 pour le continent bleu du Pacifique qui inclut la technologie et la connectivité comme domaine thématique, et souligne l’importance d’une région bien connectée tout en garantissant l’inclusion, l’accessibilité et le caractère abordable. Elle s’est aussi enorgueillie que plusieurs pays insulaires du Pacifique ont formé des groupes « Women in IT » (femmes dans les TIC) et offrent des bourses d’études et des possibilités de formation pour les femmes et les filles dans le domaine des STIM.
Elle a expliqué que dans la région du Pacifique, les femmes représentent 24% des membres des conseils d’administration du secteur de la finance et des TIC, ce qui est supérieur à la moyenne mondiale de 17%. Cependant, de nombreuses femmes continuent de se heurter à des obstacles pour accéder à la technologie en raison du manque de connaissances numériques, des normes sociales et culturelles et du manque de ressources financières, notamment dans les communautés rurales et maritimes. Elle a appelé à accroître les investissements dans le développement et mettre en œuvre des politiques et des plans d’action complets en matière de TIC axés sur la remise en question des stéréotypes sexistes traditionnels, en atteignant les femmes rurales et âgées et en promouvant les femmes aux postes de décision et aux normes sociales. De même, il faut encourager le secteur privé dans les petits États insulaires en développement à rendre les services financiers et les transactions en ligne accessibles et abordables afin de soutenir l’autonomisation économique des femmes, en particulier celles qui vivent dans les zones rurales et reculées.
Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), Mme I GUSTI AYU BINTANG DARMAWATI, Ministre de l’autonomisation des femmes et de la protection des enfants, a estimé que l’innovation et le changement technologique sont des outils essentiels pour atteindre l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. Malgré les progrès accomplis par les pays de l’ASEAN au cours des dernières décennies, elle a reconnu que des lacunes subsistent dans les domaines de l’éducation, des moyens de subsistance, des soins de santé et des services essentiels. La Ministre a rappelé les récentes initiatives de l’ASEAN pour renforcer le rôle des femmes dans la paix, la stabilité et le développement durable à l’ère numérique, notamment l’organisation du Sommet des femmes leaders de l’ASEAN et le soutien à l’entrepreneuriat féminin. L’ASEAN a outre mis en œuvre des politiques afin d’assurer l’intégration de perspectives de genre dans ses travaux, a-t-elle ajouté.
Mme SACRAMENTO NETO (Angola), au nom de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), s’est inquiétée de l’impact continue de la COVID-19 sur le creusement du fossé numérique et de ses répercussions sur les plus vulnérables. Elle a aussi dénoncé l’impact des conflits sur les femmes, appelant à la mise en œuvre de toute urgence de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Elle a assuré que la CPLP a identifié plusieurs priorités en matière d’égalité des sexes d’ici à 2024 et a rappelé l’existence d’un mémorandum d’entente entre la Communauté et ONU-Femmes sur un certain nombre de questions. La représentante s’est ensuite inquiétée du fait que la moitié de l’humanité n’a pas accès à Internet et a appelé à remédier à cette situation. Elle a également appelé à prévenir les dangers qui découlent des TIC et à mettre en place des moyens de lutte contre la violence sexiste dans le contexte numérique. L’éducation est considérée comme une priorité en matière de coopération, a-t-elle ajouté, appelant ensuite à mettre un terme à la fracture numérique sexiste.
M. OBEDIAH H. WILCHCOMBE, Ministre des services sociaux et du développement urbain des Bahamas, a déclaré, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), que la transformation numérique ouvre de nouvelles voies pour l’autonomisation économique des femmes et peut contribuer à l’égalité des sexes. Un accès à Internet et des compétences numériques offrent aux femmes un éventail de possibilités en matière d’éducation et d’emploi, d’échange d’informations et de réseautage, accroissant d’autant leur participation à la vie publique. Il est donc impératif, selon lui, que les femmes et les filles soient à la fois des agents et des bénéficiaires de la technologie, de l’innovation et de la numérisation. Le Ministre a indiqué que le groupe de travail sur les compétences numériques de la CARICOM s’emploie à faire progresser les compétences dans la région en dispensant des conseils sur le développement des compétences numériques. Le programme de partenariat CARICOM Girls in ICT a pour objectif de s’attaquer à la sous-représentation historique des femmes et des filles dans ces domaines, le plus souvent en raison de stéréotypes sexistes, a expliqué le Ministre. De même, les technologies de l’information peuvent contribuer à relever les défis des changements climatiques et de l’élévation du niveau de la mer, questions cruciales pour les États membres de la CARICOM.
Mme MARÍA INÉS CASTILLO DE SANMARTÍN (Panama), intervenant en sa capacité de Présidente de la Commission interaméricaine des femmes de l’Organisation des États américains (OEA), a observé que si la pandémie de COVID-19 a mené à une plus grande utilisation des outils numériques, elle a également révélé un « énorme écart » entre les sexes en termes d’accès aux technologies de la communication, à l’éducation en ligne et au télétravail. La plus grande présence des femmes dans l’espace numérique a également entraîné une augmentation de la violence à leur encontre. Nous manquons toujours de définitions, de cadres juridiques et de ressources pour imposer des sanctions à cet égard, a-t-elle déploré. « Le monde numérique ne peut pas en être un où nos femmes et nos filles sont en danger, où les femmes militantes ont peur, où les femmes politiques sont harcelées et où les femmes dans toute leur diversité sont invisibles en raison des obstacles qui se dressent devant elles », s’est inquiétée la représentante. Ces dernières années, la Commission interaméricaine des femmes a déployé des efforts importants pour élargir sa coordination avec les représentants des États membres de l’OEA pour forger de nouvelles alliances avec le mouvement féministe, a précisé la déléguée.
M. BAGDAT MUSSIN, Ministre du développement numérique, des innovations et de l’industrie aérospatiale du Kazakhstan, qui s’exprimait au nom des pays d’Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan) a partagé la nouvelle approche régionale en matière d’économie numérique pour accélérer l’égalité des sexes. Ces mesures, a-t-il précisé, englobent l’infrastructure numérique, les plateformes publiques numériques, les services financiers numériques, les entreprises numériques et les compétences numériques. Pour ce faire, les différents gouvernements et les opérateurs de télécommunications s’emploient conjointement à combler les lacunes en matière de couverture et d’utilisation afin de garantir une connectivité complète et de qualité, en particulier dans les zones rurales, où la fracture numérique persiste, a indiqué le Ministre.
En plus de développer des services publics numériques et des plates-formes d’administration en ligne sur la base des principes de transparence, d’intégrité et de responsabilité, il s’agit également de créer un environnement politique et commercial favorable aux femmes entrepreneurs en Asie centrale. Ces dernières années, l’Asie centrale a montré une formidable opportunité pour la croissance de la technologie financière et des services numériques, car la pénétration du mobile, le soutien du gouvernement et l’innovation financière du secteur privé n’ont cessé d’augmenter, s’est-il félicité.
Mme VERA JOUROVA, Vice-Présidente de la Commission européenne et Commissaire chargée des valeurs et de la transparence, qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles, a indiqué être préoccupée par les risques potentiels posés par les progrès rapides de l’innovation et de l’évolution technologique, en particulier les différents types de violence, de harcèlement et d’abus fondés sur le sexe. Elle a appelé à intensifier l’action aux niveaux national, régional et international et renforcer les normes relatives à la violence fondée sur le sexe en ligne et par le biais des technologies numériques.
Elle a appelé la communauté internationale à sensibiliser aux cas de violence sexiste commis en ligne et par le biais des technologies numériques, et à établir des lois, mécanismes réglementaires et recours pour y faire face et engager des poursuites, en utilisant une approche centrée sur la survivante. De même, elle a sensibilisé sur la prise pour cible en ligne des femmes et des filles, y compris les politiciennes, les journalistes, les défenseuses des droits humains, et les militantes pour la paix. Enfin, l’intervenante a exhorté à garantir un accès à la justice, à des voies de recours efficaces et centrées sur les survivants, ainsi qu’à des services de santé mentale et de soutien psychosocial.
Mme KATALIN NOVÁK, Présidente de la Hongrie, a parlé de la vie dans son pays, dans l’ombre de la guerre en Ukraine, « dont on ne voit plus la fin ». Nous ne pouvons pleinement soutenir les femmes sans prendre en compte le fait que la plupart d’entre elles sont ou seront des mères, a-t-elle dit, en appelant les États Membres à leur fournir les mêmes chances de s’épanouir personnellement et professionnellement que les hommes. Alors que plus 6% du budget de son pays est consacré au soutien à la famille, elle a noté que certaines considèrent la vie familiale comme dépassée. Elle a appelé à protéger la famille et les valeurs familiales, ajoutant avoir l’impression que « ceux qui n’ont pas eux-mêmes d’enfants veulent élever les nôtres ». Nous défendrons nos enfants, notre culture, nos traditions et notre liberté, sans compromis, a-t-elle affirmé.
M. ALAIN BERSET, Président de la Confédération suisse, s’est inquiété que la tendance positive vers l’égalité des sexes commence à s’inverser du fait des crises actuelles qui ont un impact disproportionné sur les femmes, qui occupent généralement des emplois moins sûrs et moins bien rémunérés. Pour y faire face, il a prôné le respect de l’état de droit et des instruments multilatéraux tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Si la transformation numérique est un levier puissant pour l’autonomisation des femmes et des filles, elle comporte également le risque de reproduire les biais de genre du fait d’algorithmes discriminatoires, a-t-il relevé. Les nouvelles technologies alimentent aussi la violence fondée sur le genre en ligne, ce qui empêche les femmes et les filles de faire valoir leurs idées et de participer pleinement au débat démocratique. Dans le cadre notamment des négociations de la convention-cadre sur l’intelligence artificielle du Conseil de l’Europe, la Suisse poursuit son engagement à faire en sorte, que les nouvelles technologies favorisent le développement durable et l’égalité des genres, a-t-il assuré.
Mme SALOME ZOURABICHVILI, Présidente de la Géorgie, s’est engagée à assurer que ce siècle de technologie et d’innovation n’aura pas d’effets négatifs et ne fera que renforcer les opportunités pour les femmes et les filles. Elle a reconnu que, malgré des progrès tangibles, la Géorgie doit encore relever des défis importants. De fait, a-t-elle détaillé, 48% des femmes âgées de 24 à 35 ans ne sont pas économiquement actives, surtout dans les zones rurales, et plus de la moitié des femmes politiques ont subi une forme de violence.
Un autre défi concerne le rôle de la société civile, qui est central pour permettre aux voix des femmes d’être mieux entendues. À cet égard, a-t-elle indiqué, l’introduction par certains groupes d’un projet de loi qui restreindrait la liberté des organisations non gouvernementales serait extrêmement préjudiciable à la transformation démocratique de notre société, à l’élimination de la discrimination et de la violence fondées sur le sexe et, à notre parcours d’intégration européenne. Elle a ajouté avoir exprimé en interne ses vives objections à ce projet de loi.
Mme ENSIEH KHAZALI (République islamique d’Iran) a déploré que des Iraniennes soient « privées de leur droit légal d’être membres de cette Commission par certains politiciens occidentaux », sous de « faux prétextes » et selon une « procédure dangereuse et inappropriée », en violation des principes des Nations Unies. Elle a relevé « l’ironie amère » de ces actions de la part de certains pays qui enregistrent le plus grand nombre de femmes assassinées ou incarcérées, en particulier parmi les personnes de couleur. L’adhésion de l’Iran à la Commission a été annulée alors que les femmes iraniennes ont un statut plus élevé que les femmes de ces pays, a poursuivi la déléguée, en fustigeant les « mensonges et la pression des puissances hégémoniques et le battage médiatique créé par des médias achetés, dans le but purement politique d’isoler l’Iran ». Pourtant, a-t-elle ajouté, l’Iran a éradiqué l’analphabétisme chez les filles, 60% des enseignants iraniens sont des femmes et 56% de l’enseignement supérieur est dispensé par des femmes, qui participent également au développement des nouvelles technologies.
Mme REBECCA NYANDENG DE MABIOR, Vice-Présidente du Soudan du Sud, a reconnu que les femmes et filles dans son pays continuent de se heurter à de nombreux obstacles les empêchant de s’émanciper pleinement. En tant que Présidente du Groupe de la thématique femme et jeunesse, elle a expliqué avoir placé l’éducation, la santé et les possibilités économiques au cœur de ses priorités. Ainsi, elle a indiqué travailler avec « nos partenaires » et pour la toute première fois une conférence sur le leadership transformationnel pour les femmes a eu lieu le mois dernier à Juba. Cela relève, selon elle, d’une véritable volonté politique dans l’intérêt de la paix et de l’équité au Soudan du Sud. Il s’est agi de donner aux femmes dirigeantes un espace leur permettant de réfléchir au rôle de chef de file qu’elles pourraient jouer, a-t-elle dit.
Mme KATRÍN JAKOBSDÓTTIR, Première Ministre de l’Islande, a déclaré que les algorithmes sont aussi défectueux que leurs créateurs, s’inquiétant de l’intégration de préjugés sexistes. Notant l’importance des données pour l’intelligence artificielle, elle s’est également préoccupée de l’énorme déficit de données sur le rôle des femmes dans la société. Si nous n’avons pas de données sur les femmes et si les algorithmes sont majoritairement conçus par des hommes, le risque est que les nouvelles technologies rendent notre monde encore plus inégalitaire, a-t-elle averti. En outre, la numérisation a renforcé une résistance croissante à l’égalité des sexes et créé une nouvelle plate-forme pour la violence sexiste. Des chiffres récents montrent que 38% des femmes ont été victimes de violence en ligne.
La dignitaire s’est également inquiétée de la recrudescence de la violence sexiste en temps de guerre, notamment en Ukraine où, a-t-elle indiqué, des femmes ont été violées et agressées sexuellement dans le cadre de la stratégie militaire russe. La violence domestique continue aussi d’être l’une des plus grandes menaces pour les femmes et représentait 50% de l’ensemble des crimes violents signalés en 2020 en Islande. Elle a précisé que ce taux élevé fait suite à un changement de protocole sur la façon dont sont traité les crimes de violence domestique. L’Islande a par ailleurs adopté une législation progressiste sur l’avortement en 2019, garantissant l’autodétermination des femmes sur leur corps.
M. MARIAN JUREČKA, Vice-Premier Ministre et Ministre du travail et des affaires sociales de la Tchéquie, a estimé que la technologie moderne et la transition numérique peuvent contribuer à l’élimination des inégalités entre les sexes. Afin que la technologie soit utilisée « pour faire tomber les barrières et non pour les renforcer », il a appelé à la concevoir d’une manière qui respecte les droits humains et favorise l’autonomisation des femmes et des filles. Pour ce faire, l’espace en ligne doit être ouvert, accessible, gratuit, sûr et sécurisé pour tous. L’agression de la Russie contre l’Ukraine a mis en danger le fragile processus de reprise après la pandémie de COVID-19 et a affecté les prix des biens, des services, de l’énergie et du logement, a-t-il noté, alors que près d’un demi-million de personnes ont obtenu une protection temporaire en Tchéquie, pour la plupart des femmes et des enfants. « La voie vers une croissance économique plus durable sera tracée si nous parvenons à construire un lieu où les femmes et les hommes, les filles et les garçons, dans toute leur diversité, ont des chances égales de réussir et de participer à la société », a fait valoir le Ministre.
M. LUKA MESEC, Vice-Premier Ministre et Ministre du travail, de la famille, des affaires sociales et de l’égalité des chances de la Slovénie, a dit que si la technologie numérique offre des possibilités, elle peut également contribuer à creuser les inégalités. « L’écart numérique entre les sexes est réel », a-t-il ajouté, ce qui se traduit non seulement par des occasions perdues, mais également par l’augmentation des inégalités économiques. Les femmes âgées et rurales sont particulièrement vulnérables à cet égard, étant le plus souvent exclues ou sous-représentées dans la sphère numérique. En Slovénie, a poursuivi le Ministre, près de 90% des salariés diplômés des technologies de l’information sont des hommes. Le plan d’action pour l’éducation numérique 2021-2027 prévoit d’ailleurs une réforme des programmes scolaires obligatoires pour y intégrer l’acquisition de compétences numériques. Pour appuyer l’autonomisation et l’éducation numériques des femmes, la Slovénie a adopté une résolution sur le Programme national pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes qui fait la promotion de l’inclusion des femmes dans les professions, les secteurs et l’entrepreneuriat à haut potentiel (STIM), ainsi que l’inclusion des hommes et des femmes dans les professions atypiques.
Mme MAJA GOJKOVIĆ, Vice-Première Ministre de la Serbie, a indiqué que son gouvernement a mis en œuvre diverses mesures visant à améliorer l’accès aux technologies, notamment dans les zones rurales où l’accès à l’informatique est limité. Elle a parlé de plusieurs initiatives qui ont été lancées visant à améliorer les connaissances des femmes dans ce domaine, dont le programme Girls in Technology qui offre une formation et un mentorat aux jeunes femmes qui souhaitent améliorer leurs compétences informatiques et commerciales.
La Serbie met aussi en œuvre un certain nombre de politiques sensibles au genre pour appuyer la participation des femmes à l’économie numérique. Il s’agit notamment d’initiatives visant à réduire les écarts de rémunération entre les sexes et à augmenter le nombre de femmes cadres, a-t-elle précisé. À l’heure actuelle, a-t-elle ajouté, la Serbie compte 1 400 entreprises innovantes dans ce domaine, où les femmes cadres et employées sont présentes en nombre, et le secteur des TIC rapporte à son pays plus de 2,7 milliards d’euros.
Mme OLHA STEFANISHYNA, Vice-Première Ministre de l’Ukraine, a indiqué que depuis l’invasion de son pays, huit millions d’Ukrainiens, pour majorité des femmes et des enfants ont dû prendre la fuite, souvent sans prendre leurs documents avec eux. Grâce à la numérisation, ils ont rapidement pu en obtenir de nouveaux. Les Ukrainiens ont également été 1,4 millions à utiliser leur smartphone pour s’inscrire en tant que personnes déplacées et faire une demande d’aide. Elle a fait savoir que de nombreuses Ukrainiennes ont perdu leur emploi et que le Gouvernement s’efforce en outre de rendre le marché du travail accessible grâce à la numérisation et 72 000 femmes utilisent le service public pour l’emploi qui a en outre lancé un programme de bourse à l’intention des femmes dans l’armée de l’air. La dignitaire a également indiqué que les femmes représentent 35% des employés du secteur des TI et 50% des cadres dans certaines entreprises, chiffres que le Gouvernement entend augmenter grâce à l’éducation et à la formation. Malgré la guerre, nous nous efforçons également d’assurer un Internet haut débit dans tout le pays et d’améliorer l’accès à Internet dans les zones reculées et rurales, a ajouté la Vice-Première Ministre qui a souligné que la numérisation, la transparence, le développement durable et l’égalité sont essentiels pour la reconstruction de l’Ukraine.
Mme EVELYN WEVER-CROES, Première Ministre d’Aruba (Pays-Bas), a déploré que la prolifération des nouvelles technologies amplifient les inégalités et les stéréotypes, la violence sexiste en ligne ainsi que les écarts entre les sexes dans l’accès aux compétences numériques. Il nous incombe donc de permettre aux femmes et aux filles de saisir les possibilités offertes par l’innovation numérique en termes d’inclusion sociale et de perspective économique, tout en en atténuant les dangers. À cet égard, une représentation égale des femmes et des filles dans les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques ainsi que la recherche et le développement, secteurs toujours dominés par les hommes, est cruciale. Pour sa part, Aruba, s’efforce de susciter l’intérêt des filles pour ces domaines au moyen d’expériences immersives dans le laboratoire national d’innovation Futura, a-t-elle expliqué. En outre, l’Université d’Aruba, comme d’autres aux Pays-Bas, a mis en place un programme axé sur le développement durable reposant sur la technologie dans les petits États insulaires en développement.
Mme DERYA YANIK, Ministre de la famille et des services sociaux de Türkiye, a estimé que les deux tremblements de terre meurtriers qui ont récemment touché son pays ont prouvé une fois de plus l’importance d’atteindre les ODD à l’aide de nouvelles solutions. « Le monde ne peut pas se permettre de laisser les femmes de côté, surtout à l’ère du numérique », a-t-elle ajouté. L’accès accru à la technologie et à Internet a en effet offert aux femmes de nouvelles possibilités de participer à l’économie, à l’éducation et à la politique. Nous devons toutefois garder à l’esprit que les nouvelles technologies peuvent également perpétuer les inégalités existantes. À cet égard, la Ministre a expliqué que son pays mène des activités d’alphabétisation numérique et d’éducation familiale à l’intention des femmes.
Mme KIM HYUN SOOK, Ministre de l’égalité des sexes et de la famille de la République de Corée, a mis en avant les efforts de son pays visant à intensifier la formation professionnelle et à remédier au déséquilibre entre les sexes dans le domaine des technologies émergentes et des secteurs à forte valeur ajoutée tels que l’informatique, l’intelligence artificielle (IA) et les mégadonnées. L’objectif est de faire progresser la présence des femmes dans des domaines où la demande d’emplois est appelée à croître, a expliqué la Ministre.
C’est dans cet esprit que sera mis en place un organe consultatif (public/privé) en vue d’améliorer le développement des talents féminins dans des secteurs tels que les TIC, les semi-conducteurs et les petites et moyennes entreprises manufacturières. Le Gouvernement veille également à favoriser un environnement numérique sûr à travers l’intensification des sanctions et la mise en place de réformes législatives dans le but d’éradiquer les crimes sexuels numériques et apporter un soutien complet aux victimes. La République de Corée s’est aussi attelée à combattre les préjugés sexistes découlant du développement technologique, notamment au niveau des données et des algorithmes. La Ministre a par ailleurs informé que le Centre d’excellence pour la promotion de l’égalité des sexes dans la région Asie-Pacifique prévoit d’organiser cette année un forum international sur l’innovation et le changement technologique à l’ère numérique pour atteindre l’égalité des sexes.
Mme MARLENE SCHIAPPA, Secrétaire d’État chargée de l’économie sociale et solidaire de la France, a déclaré que les outils du numérique sont de formidables outils d’émancipation. Ils permettent de mobiliser, d’agir, d’accompagner, de soutenir, a-t-elle affirmé, notant que grâce à #MeToo plus personne ne peut fermer les yeux et les oreilles face aux violences sexuelles. Elle a mis en avant la volonté de son gouvernement pour que les femmes prennent toute leur place dans « la tech » et dans les formations scientifiques. Nous avons fait de la création et la reprise d’entreprises par des femmes une priorité de la banque publique d’investissement française. Fait inédit, a-t-elle ajouté, les entreprises qui ne respectent pas l’index d’égalité professionnelle, ne seront pas financées. Et l’ensemble des aides d’État seront désormais conditionnées à l’index d’égalité professionnelle et notamment au fait qu’elles présentent un bilan paritaire exemplaire. De même, la France s’est également donnée comme objectif d’atteindre la parité dans les filières scientifiques d’ici à 2027 et de créer un programme pour accompagner 10 000 jeunes filles à se former aux métiers de la tech. « Nous voulons des milliers de petites Marie Curie », a-t-elle soutenu.
Enfin, son gouvernement va consacrer d’ici à 2027, 75% de son aide publique au développement à la lutte contre les inégalités de genre, a-t-elle dit. Elle a appelé à agir pour faire d’Internet un endroit sûr pour les femmes, indiquant que la loi Schiappa du 3 août 2018 introduit un délit de « harcèlement groupé » qui réprime les phénomènes de « meute » en ligne. « Let’s get loud! », a-t-elle ensuite lancé en anglais, citant la « grande autrice contemporaine » Jennifer Lopez.
Mme MAYA MORSI, Ministre des femmes et Présidente du Conseil national des femmes de l’Égypte, a parlé des cadres et initiatives nationales en matière d’autonomisation des femmes, mettant en avant les investissements en matière de sensibilisation. Les femmes représentent 14% des diplômés universitaires, 48% des chercheuses, 40% du personnel des entreprises TIC et occupent 15% des postes à responsabilité dans les ministères des TIC, a-t-elle détaillé.
Pour la toute première fois, un partenariat a été conclu avec l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) afin d’autonomiser les femmes au sein des communautés locales, a-t-elle indiqué, précisant qu’une plateforme a été mise en place pour promouvoir les idées les plus novatrices. Le Gouvernement a par ailleurs aidé un million de femmes à diriger des microentreprises et près de 2 000 jeunes filles ont bénéficié de programmes d’apprentissage en informatique, ce qui leur a permis de mieux s’insérer au marché du travail.
Mme CELINA LEZCANO, Ministre des femmes du Paraguay, s’est inquiétée des inégalités persistantes qui limitent l’accès des femmes et des filles à l’innovation et aux changements technologiques et les empêchent de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux. À ses yeux, la pandémie de COVID-19 a mis en évidence l’urgence de réduire la fracture numérique entre les hommes et les femmes, dont les effets sont ressentis avec une acuité particulière par les populations vulnérables, notamment les femmes rurales. C’est pourquoi le Gouvernement national a mis en place le programme Agenda Digital, une stratégie de transformation numérique et de modernisation de l’État. Des centres régionaux pour les femmes ont été munis de matériel informatique et des services sociaux complets leur sont fournis via l’application Centro Ciudad Mujer, afin de favoriser leur autonomisation. Le Paraguay s’est en outre associé à la plateforme #Todasconectadas, qui fait partie de l’Alliance régionale pour la numérisation des femmes en Amérique latine et dans les Caraïbes, en offrant des outils pour les entreprises numériques.
Mme MONIKA NAVICKIENĖ, Ministre de la sécurité sociale et du travail de la Lituanie, a déclaré que malgré les drones et les bombes russes, les femmes ukrainiennes continuent de faire entendre leurs voix grâces aux nouvelles technologies. Elle a cité l’exemple de la base de données Dattalion, opérée essentiellement par des femmes qui répertorient les crimes de guerre commis par les soldats en Ukraine afin de les exposer au grand jour. La Ministre a dénoncé les violences sexuelles liées au conflit et renforcées par les technologies numériques alors que, par leur conception même, certaines applications protègent les responsables. À cet égard, les femmes et les filles doivent apprendre à protéger leur vie privée sur Internet et dans les médias sociaux, a-t-elle ajouté.
Mme AAWATIF HAYAR, Ministre de la solidarité, de l’intégration sociale et de la famille du Maroc, a décrit le programme de développement économique mis en place par son pays sur la base de l’innovation et de la numérisation, en tenant compte de toutes les strates de la société, y compris les femmes et les filles. De même, le Gouvernement a mis en place l’entité royale pour la protection sociale afin de résorber les inégalités, et protéger les filles et les femmes contre toutes les formes d’abus et de discrimination, y compris dans le domaine technologique. De plus, a-t-elle relevé, un Comité national pour l’égalité de sexes et l’autonomisation des femmes a été créé en 2022 ainsi que des centres de refuges d’urgence.
M. RODERIC O’GORMAN, Ministre de l’enfance, de l’égalité, du handicap, de l’intégration et de la jeunesse de l’Irlande, a indiqué que dans la stratégie « Harnessing Digital », lancée l’année dernière, son pays s’est engagé à augmenter le nombre de femmes occupant des postes de direction dans les entreprises numériques et les start-ups. Cette stratégie nationale en matière d’intelligence artificielle vise à améliorer l’équilibre entre les sexes dans ce domaine, a-t-il soutenu, se disant parfaitement conscient des risques sexospécifiques liés aux technologies émergentes, notamment celui de la violence sexiste facilitée par la technologie. C’est pourquoi, l’année dernière, son gouvernement a adopté une loi visant à établir un nouveau cadre réglementaire pour la sécurité en ligne.
Mme SUSANNE RAAB, Ministre fédérale des femmes, de la famille et de l’intégration des médias de l’Autriche, a dit être résolue à éliminer les stéréotypes sexistes et à renforcer la position des femmes et des filles dans le domaine des sciences, des technologies et de l’ingénierie.
Parmi les initiatives actuelles, elle a cité le Fonds national autrichien pour l’autonomisation des femmes et des filles Let’s Empower Austria. Fondée il y a un an, LEA fonctionne comme une plateforme pour les initiatives d’autonomisation existantes, notamment dans le domaine des STIM. Cette approche consiste, a expliqué la Ministre, à une mise en relation dans les écoles au profit des jeunes filles. L’Autriche a également mis en œuvre des mesures dans le domaine de la politique du marché du travail afin d’améliorer les compétences numériques des femmes et des filles, comme le programme de formation Frauen in die Technik du service public de l’emploi autrichien.
M. CHUTI KRAIRIKSH, Ministre du développement social et de la sécurité humaine de la Thaïlande, s’est félicité des efforts déployés par son pays depuis 2019 en matière d’accélération de la réduction de la fracture numérique, en particulier pour les femmes et les filles dans les zones reculées. Parmi les projets mis en œuvre, le Ministre a cité Village Broadband Internet Project qui fournit un accès gratuit à l’Internet aux femmes et aux filles pour bénéficier de l’éducation en ligne et des opportunités d’emploi. Une formation de formateurs à la culture numérique a également été organisée au profit de près d’un million de personnes à travers le pays, a ajouté le Ministre.
Dans le domaine de l’économie numérique, le Gouvernement thaïlandais collabore avec des associations de femmes d’affaires pour renforcer les connaissances commerciales et les compétences numériques des femmes entrepreneurs dans les microentreprises et petites et moyennes entreprises, a-t-il renseigné. Il a également attiré l’attention sur le programme Women in STEM Workforce Readiness and Development et rappelé la célébration chaque année en Thaïlande de la « Journée internationale des filles dans les TIC », qui vise à inciter les jeunes filles à s’engager dans la révolution technologique et à acquérir les compétences nécessaires à l’évolution de leur carrière.
Mme PAULINE KEDEM TALLEN, Ministre des affaires des femmes du Nigéria, a expliqué que son gouvernement a adopté une approche budgétaire fondée sur le genre dans ses plans fiscaux. Une telle approche signifie que les femmes et les filles figurent plus que jamais au premier plan du développement national, notamment les femmes en situation de handicap. Ces efforts reposent sur les 35% d’actions affirmatives, principe figurant dans la politique nationale sur le genre révisée 2021-2025, a-t-elle noté. Le Nigéria représente aujourd’hui le plus grand marché technologique en Afrique sub-saharienne, alors que les technologies de l’information enregistrent la plus grande croissance de tous les secteurs. Des programmes de formation aux technologies de l’information ont été mis en place afin de résorber le fossé numérique. Pour exploiter pleinement du développement économique engendré par la technologie, il est nécessaire d’adopter des politiques, de construire les infrastructures et d’effectuer et assurer les investissements nécessaires, a assuré la Ministre.
Mme TAINA BOFFERDING, Ministre de l’égalité entre les femmes et les hommes du Luxembourg, a déclaré que l’enjeu majeur de la transition vers l’ère digitale est de faire du numérique une chance pour toutes et tous. Elle a indiqué qu’au Luxembourg, uniquement 16,8% des spécialistes en matière des TIC sont des femmes, et a souligné que garantir une place aux femmes dans l’innovation et les changements technologiques n’est non seulement une question de droits, d’équité et d’égalité mais également une nécessité pour l’emploi et la croissance économique. Il nous faut agir de manière proactive, et ce, dès le plus jeune âge, a-t-elle affirmé.
La Ministre a ensuite passé en revue certaines des initiatives lancées par son gouvernement, dont le site Internet girlsindigital.lu qui fournit aux femmes et aux filles un accès à l’information sur les opportunités de la digitalisation et les voies possibles pour s’y investir. Elle a appelé à intégrer la dimension du genre dans toutes les initiatives liées à la digitalisation, mais aussi à rester vigilants par rapport aux effets négatifs que la digitalisation, et particulièrement l’intelligence artificielle, peut avoir sur l’égalité́ entre les genres. La reproduction et la diffusion de stéréotypes de genre doivent être contrecarrées, a-t-elle insisté. D’autre part, les risques d’exposition à des formes de violence digitale sexuelle et sexiste sont réels, surtout pour les filles et les femmes, et doivent être évités à tout prix.
Mme LINDIWE ZULU, Ministre du développement social de l’Afrique du Sud, a salué le rapport du Secrétaire général qui contient des conseils sur la manière d’exploiter les technologies numériques pour assurer l’égalité des chances et les droits des femmes et des filles, comme le veut la Position africaine commune sur la construction d’une économie et d’une société numériques inclusives. Pour y parvenir, le Gouvernement sud-africain travaille avec les établissements d’enseignement supérieur et les organisations impliquées dans l’innovation et la technologie par le biais de partenariats public-privé. La Ministre a cité l’exemple d’une plate-forme dédiée au signalement des cas de violence sexiste à l’aide d’un système de suivi en ligne. Elle s’est dite déterminée à réduire la fracture numérique entre les sexes afin que les femmes et les filles soient pleinement en mesure de jouir de leurs droits humains.
Mme PAOLA FLORES, Ministre des femmes et des droits humains de l’Équateur, a indiqué que son pays a adopté des politiques publiques avec pour vocation d’éradiquer la violence faite aux femmes, de résorber la fracture numérique et de mettre sur pied des politiques exhaustives pour renforcer la prévention des cycles de violence subis par les femmes.
C’est dans cet esprit, que l’Équateur a mis sur pied en novembre 2022, et pour la toute première fois, un ministère des droits humains qui agit dans l’intérêt des femmes et dont l’objectif est de faire en sorte que les femmes ne connaissent plus la violence. Pour finir, la Ministre a mis en exergue les efforts consentis pour fixer un objectif de transformation vers le numérique grâce à la participation des femmes, et ce, dans tous les domaines relevant de la plateforme de Beijing.
M. OGURA MASANOBU, Ministre d’État pour l’égalité des sexes du Japon, a estimé très important de promouvoir l’emploi dans le secteur numérique en vue de générer des opportunités pour les femmes et les communautés locales.
L’autonomisation des femmes dans le secteur numérique est l’un des principaux moteurs de la croissance économique, a-t-il affirmé. C’est dans cet esprit que son gouvernement s’efforce de créer des opportunités pour les étudiantes et de les attirer vers les sciences et les technologies, et de promouvoir la compréhension du choix des STIM parmi les étudiantes, les parents et les enseignants.
Enfin, le Ministre a annoncé que dans le cadre de la présidence japonaise du Groupe des Sept cette année, il est prévu une réunion ministérielle en juin prochain à Nikko, Tochigi, qui se penchera sur l’autonomisation économique des femmes, notamment dans le secteur numérique, et des mesures à prendre pour relever les défis apparus dans le cadre de la pandémie de COVID-19.