La question du financement s’invite à nouveau dans les débats du Forum sur les forêts
La lancinante question du financement s’est de nouveau invitée au quatrième jour des débats du Forum des Nations Unies sur les forêts. « Les contributions volontaires au Fonds d’affectation spéciale pour le Forum sont en baisse », a en effet noté la Directrice du secrétariat du FNUF, Mme Juliette Biao. Or, a-t-elle rappelé, les contributions volontaires des États Membres, ajoutées aux ressources provenant du budget ordinaire de l’ONU, sont essentielles pour la mise en œuvre de ses activités clefs.
Si cette tendance se maintient, il deviendra de plus en plus difficile pour le secrétariat de faciliter une représentation équilibrée des pays développés et en développement, a prévenu Mme Biao qui a précisé que l’an dernier, cinq États Membres, à savoir l’Australie, la Chine, les États-Unis, la République de Corée et la Suisse, ont contribué au Fonds, pour un montant total de 975 833 dollars.
Face à cette situation, la République de Corée a appelé les États Membres à augmenter les contributions volontaires. À l’instar de l’Australie et de l’Allemagne, la Suisse a souhaité obtenir des précisions sur les projets nécessitant des financements supplémentaires afin de mieux comprendre les besoins temporaires et permanents du FNUF, notamment en ce qui concerne le personnel. De son côté, la Chine a dit espérer que le secrétariat du FNUF sera en mesure d’améliorer l’efficacité du Fonds d’affectation afin d’en faire davantage avec les ressources disponibles.
« Le Fonds d’affectation ne permet pas de répondre aux grands défis d’aujourd’hui en matière forestière », a tranché le Forum forestier africain, en invitant le FNUF à prendre des mesures concrètes pour faire en sorte que des ressources soient disponibles pour l’ensemble de ses activités. Le Forum forestier africain a également exhorté les États Membres à donner au FNUF les moyens de demeurer l’institution mondiale dédiée aux politiques forestières.
Le Forum sur les forêts s’est ensuite penché sur une question émergente relative à l’énergie et aux moyens de subsistance, l’occasion pour les différents intervenants d’insister sur les avantages considérables de la bioénergie, la plus importante source d’énergie renouvelable au niveau mondial, selon M. Zhimim Wu, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Ce dernier a également signalé que 85% des arbres coupés par l’industrie du bois finissent en déchets. Un chiffre effarant, s’est-il inquiété, insistant sur l’importance d’une utilisation de ces déchets. L’énergie issue du bois est une ressource des plus écologiques pour autant qu’elle soit gérée de manière responsable, a déclaré Mme Sheam Satkuru, Directrice de l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT), avant de plaider pour une gestion durable des forêts tropicales.
Enfin, Mme Mirey Atallah, du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), qui a fait savoir que la gestion durable des forêts se traduirait par une diminution de 4 milliards de gigatonnes d’émissions, a réclamé davantage de ressources financières en faveur de la gestion durable des forêts. « Là où il y a financement, il y a action », a-t-elle notamment déclaré.
Le Forum des Nations Unies sur les forêts poursuivra ses travaux demain, vendredi 12 mai, à partir de 10 heures.
ÉTAT DES PRÉPARATIFS DE L’EXAMEN À MI-PARCOURS DE 2024 CONCERNANT L’EFFICACITÉ DE L’ARRANGEMENT INTERNATIONAL SUR LES FORÊTS, Y COMPRIS LA STRATÉGIE DE COMMUNICATION ET D’INFORMATION DU PLAN STRATÉGIQUE DES NATIONS UNIES SUR LES FORÊTS (2017-2030)
La première discussion générale de la journée était consacrée à l’état des préparatifs de l’examen à mi-parcours de 2024 concernant l’efficacité de l’arrangement international sur les forêts, y compris la stratégie de communication et d’information du plan stratégique des Nations Unies sur les forêts (2017-2030). La Directrice du secrétariat du FNUF, Mme JULIETTE BIAO, a présenté une note sur le sujet en indiquant que le secrétariat a élaboré un questionnaire concernant le processus de mise en œuvre après la dix-septième session du FNUF, avec la contribution des États Membres. Des événements ont en outre été organisés cette année, à Bangkok et à Rome, afin de discuter des principales conclusions des rapports d’évaluation sur les contributions du Forum au Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la participation des grands groupes et des partenaires régionaux. Le groupe d’experts se réunira à nouveau à Nairobi en juin de cette année pour discuter du Réseau mondial de facilitation du financement forestier et du plan stratégique.
Comme l’Inde, l’Union européenne s’est félicitée que ce prochain atelier se tiendra en format hybride, ce qui permettra à davantage d’experts des quatre coins du monde d’y participer. Elle a encouragé le secrétariat à fournir davantage d’informations en amont de ses réunions afin de faciliter la coordination et la planification. S’agissant de la communication avec les États Membres, la délégation a estimé qu’elle ne doit pas imposer de coûts additionnels. Étant donné le faible taux de réponse, les questionnaires ne constituent pas le moyen idoine de traiter les informations, a encore estimé la délégation qui a encouragé la diffusion de rapports volontaires des États Membres centrés sur la cible 1.1.
Compte tenu que cette année, les dates, les lieux, l’ordre du jour et les documents de cadrage n’ont pas toujours été publiés suffisamment à l’avance pour permettre aux délégations de se préparer comme il se doit, les États-Unis ont demandé au secrétariat, tout comme la Suisse et l’Australie, de publier à l’avance les arrangements prévus pour ces réunions, y compris les documents finaux.
La République de Corée a estimé pour sa part que le secrétariat devrait présenter les conclusions acceptées par l’ensemble des délégations, « brièvement et clairement », tout en regrettant qu’une partie de la note soit basée sur des sondages. Nous devons également réfléchir aux moyens de favoriser la participation des États Membres et des parties prenantes locales aux activités du FNUF. Une idée reprise par le Mexique, qui souhaité davantage d’échanges impliquant les communautés locales et autochtones.
FONDS D’AFFECTATION SPÉCIALE POUR LE FORUM DES NATIONS UNIES SUR LES FORÊTS
La Directrice du secrétariat du FNUF a ensuite présenté la note du secrétariat portant sur le Fonds d’affectation spéciale pour le Forum des Nations Unies sur les forêts. Les contributions volontaires des États Membres, ajoutées aux ressources provenant du budget ordinaire de l’ONU, sont essentielles pour la mise en œuvre des activités clefs du Forum, a-t-elle indiqué. L’an dernier, cinq États Membres, à savoir l’Australie, la Chine, les États-Unis, la République de Corée et la Suisse, ont contribué aux Fonds, pour un montant total de 975 833 dollars. Les voyages effectués aux fins du renforcement des capacités ont représenté 21% des coûts financées au moyen de ressources extrabudgétaires, et les frais liés aux postes, y compris les honoraires des consultants, ont constitué 53% des dépenses. Toutefois, les contributions sont à la baisse, a déploré la Directrice, en prévenant qu’il deviendra de plus en plus difficile pour le secrétariat de faciliter une représentation équilibrée des pays développés et en développement si cette tendance se maintient.
Faisant siennes les inquiétudes exprimées par la Directrice, la République de Corée a appelé les États Membres à intensifier l’urgence de la mise en œuvre du plan stratégique afin d’encourager davantage de contributions volontaires. Un appel repris par les États-Unis qui ont souligné l’importance « critique » de l’examen à mi-parcours de 2024 concernant l’efficacité de l’arrangement international sur les forêts. Comme la majeure partie des dépenses provenant du Fonds sont consacrées au personnel, la délégation a demandé à en connaître la composition.
À l’instar de l’Australie et de l’Allemagne, la Suisse a souhaité obtenir des précisions sur les projets nécessitant des financements supplémentaires afin de mieux comprendre les besoins temporaires et permanents du FNUF, notamment en ce qui concerne le personnel. De son côté, la Chine a dit espérer que le secrétariat du FNUF sera en mesure d’améliorer l’efficacité du Fonds d’affectation afin de faire plus avec les ressources disponibles. Après avoir alloué, cette année, 400 000 dollars au Fonds d’affectation, l’Allemagne a renouvelé son appui financier à la participation des grands groupes aux travaux du Forum en vue de l’examen à mi-parcours.
Les pays en développement continuent d’éprouver des difficultés à accéder au Fonds vert sur le climat en raison des processus « très lourds » pour débloquer des fonds, a déploré la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Le Fonds d’affectation ne permet pas de répondre aux grands défis d’aujourd’hui en matière forestière, a renchéri le Forum forestier africain en invitant le FNUF à prendre des mesures concrètes pour faire en sorte que des ressources soient disponibles pour l’ensemble de ses activités. Cette délégation a également invité les États Membres à donner au FNUF les moyens de demeurer l’institution mondiale dédiée aux politiques forestières.
En fin de séance, le Forum a repris ses discussions au titre du point 3 de son ordre du jour consacré aux discussions techniques sur la mise en œuvre du plan stratégique sur les forêts. Alors que plusieurs éléments figurant dans le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal et le cadre de suivi sont directement liés au forêts, l’Union européenne a incité le FNUF à contribuer à la mise en œuvre de ces mesures, notamment pour ce qui est de la conservation, la gestion durable et la restauration des forêts. Le secrétariat du FNUF a précisé à cet égard qu’il partage un ordre du jour conjoint avec le secrétariat du Cadre mondial de la biodiversité et que des initiatives communes sont envisagées.
NOUVELLE QUESTION
Le Forum s’est ensuite penché sur la question émergente des forêts, de l’énergie et des moyens de subsistance au service de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).
M. JOHN PARROTTA, de l’International Union of Forest Research Organizations (IUFRO), a fait une présentation sur ce sujet, en rappelant que la réalisation desdits ODD peut être accélérée en prêtant une attention accrue au rôle des forêts dans la vie quotidienne. Les forêts sont une source d’énergie sous forme de découpe de bois et de biomasse. Elles ont aussi une dimension spirituelle pour les peuples autochtones, a-t-il dit, en appelant à la valorisation des connaissances de ces peuples. Il a indiqué que la gestion durable des forêts permet une utilisation optimale des ressources forestières. La science a également un rôle essentiel à jouer, en permettant d’identifier les causes de la dégradation des forêts, a-t-il ajouté.
De son côté, Mme SHEAM SATKURU, Directrice de l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT), a insisté sur les immenses avantages de la bioénergie. L’énergie issue du bois est une ressource des plus écologiques pour autant qu’elle soit gérée de manière responsable, a-t-elle dit. Elle a plaidé pour une gestion durable des forêts tropicales, et a détaillé un projet de son organisation à Sumatra, en Indonésie, visant à restaurer des terres dégradées en vue de la production de biomasse. La bioénergie issue du bois est plus avantageuse que la bioénergie provenant de l’agriculture en termes d’atténuation des émissions de CO2, a-t-elle expliqué. Un autre projet de l’OIBT a consisté à doter des ménages au Cambodge de cuisinières utilisant de la bioénergie.
M. ZHIMIM WU, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a fait part des priorités forestières de la FAO, notamment mettre fin au déboisement et garantir des moyens de subsistance durables pour tous. Près de 33 millions de personnes dans le monde travaillent dans le secteur forestier, a-t-il dit, en ajoutant que le chiffre réel est sûrement plus élevé. Il a noté la baisse constante de la consommation de bois par personne sur la période 1970-2022, avant de rappeler que la bioénergie est la plus importante source d’énergie renouvelable au niveau mondial. Il a également signalé que près de 85% des arbres coupés par l’industrie du bois finissent en déchets, en se disant effaré par ce chiffre. L’utilisation de ces déchets est capitale, a-t-il insisté, attirant par ailleurs l’attention sur l’importance d’une meilleure collecte de données statistiques.
Pour sa part, M. TIM SCOTT, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a appelé à un renforcement des systèmes de gouvernance et à une transition énergétique juste, afin que les travailleurs des secteurs formels et informels ne pâtissent pas des conséquences de ladite transition. Il a plaidé pour un prix du bois qui reflète les véritables coûts de production.
Enfin, Mme MIREY ATALLAH, du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a déclaré que la gestion durable des forêts se traduirait par une diminution de 4 milliards de gigatonnes d’émissions de gaz à effet de serre. Cependant, les incitations pour une gestion durable des forêts ne sont pas encore suffisantes dans de nombreux pays, a-t-elle regretté. Elle a souhaité davantage de ressources financières en faveur de la gestion durable des forêts. « Là où il y a financement, il y a action », a-t-elle dit.
Lors de la discussion interactive, le délégué du Surinam a rappelé que son pays est considéré comme étant le plus boisé de la planète. Notre empreinte carbone est négative, s’est-il félicité, avant de souligner la vulnérabilité des forêts face aux changements climatiques. La Türkiye a rappelé le rôle clef des forêts dans l’absorption du carbone, avant de détailler l’action menée visant à augmenter l’utilisation de bois aggloméré dans le secteur du bâtiment. « Tous les nouveaux bâtiments qui seront construits en Türkiye seront neutres d’un point de vue carbone. » Le délégué de l’Inde a rappelé que 118 millions d’hectares de forêts ont été brûlés dans son pays en raison des incendies sur la période 2001-2021.
Son homologue de l’Indonésie a précisé que son pays a imposé un moratoire dans l’exploitation des forêts afin que celles-ci puissent se régénérer. L’Indonésie a pour ambition de devenir neutre d’un point de vue carbone en 2060, a-t-il ajouté, notant que la gestion durable des forêts fait partie intégrante d’une économie verte. La République du Congo a détaillé les deux projets ambitieux de plantation forestière, en rappelant que le bois est « l’énergie renouvelable par excellence ».
De son côté, l’Union européenne a souhaité que la gestion durable des forêts soit au cœur de la transition énergétique, prenant par ailleurs note de l’ensemble des ressources financières affectées aux différents instruments sur les forêts. La Chine devrait parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2060, a assuré pour sa part le délégué de ce pays, avant de passer en revue les efforts entrepris en vue d’une industrialisation de la production de biomasse. Le Brésil a invité à se garder « d’idées trop simplistes », notamment celle qui voudrait que le bois soit plus avantageux que la biomasse agricole. Le délégué brésilien a en outre souhaité un débat plus équilibré sur les biocarburants.
L’énergie venant du bois n’est pas infinie à la différence de l’énergie solaire, a d’ailleurs rappelé le Maroc qui a détaillé la stratégie bois-énergie développée par son pays, laquelle est venue s’insérer dans le plan biomasse. Le délégué de la République dominicaine a parlé de l’augmentation de la production de biomasse dans son pays. Si l’on veut préserver les moyens de subsistance découlant des forêts, il est alors crucial de les préserver et de les gérer de manière durable, a-t-il souligné. L’Australie a insisté sur la gravité de la menace posée par les incendies, avant d’insister sur la nécessité d’un marché pour les déchets de bois. Enfin, une déléguée de l’Organisation internationale sur le bambou et le rotin (INBAR) a vanté les qualités du bambou, qui est une ressource durable tant pour les foyers que pour les industries. La biomasse du bambou peut devenir un instrument stratégique dans la réalisation de nos objectifs climatiques, a-t-elle conclu.