Conseil de sécurité: investir dans le développement, c’est investir dans la paix, soulignent le Secrétaire général et les délégations lors d’un débat public
Le lien vital qui existe entre paix et développement « définit » l’ONU depuis le tout début, a fait remarquer le Secrétaire général à l’ouverture du débat public sur le thème: « Maintien de la paix et de la sécurité internationales: mettre le développement commun au service de la pérennisation de la paix », moment fort de la présidence de la Chine au mois de novembre. Plus de 70 délégations en ont profité pour aborder les problèmes de sécurité sous l’angle du développement.
Évoquant le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ses 17 objectifs dont 85% des cibles « ne sont pas en bonne voie », M. António Guterres a incité à « abandonner la logique de la concurrence à somme nulle », vouée à l’échec selon lui, pour un réengagement dans la voie de la coopération. Le Conseil de sécurité doit être au cœur de cet effort vital, a-t-il déclaré.
Mme Dilma Roussef, Présidente de la Nouvelle Banque de développement, a reconnu qu’une coopération favorisant le dialogue et le consensus est un principe directeur pour parvenir à la paix et au développement. « Nous avons pour mission de responsabiliser l’ONU et de réformer les institutions de Bretton Woods », a-t-elle expliqué.
J’ai proposé une série de mesures concrètes, a rappelé le Secrétaire général, notamment un plan de relance des objectifs de développement durable à hauteur de 500 milliards de dollars par an, pour réduire le fardeau de la dette et libérer des ressources en vue d’un financement à long terme et abordable provenant de sources multilatérales et privées, car « investir dans le développement aujourd’hui signifie investir dans un avenir plus pacifique ».
Pour casser la logique de la violence et des coups d’État à répétition, M. Jeffrey Sachs, Président du Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies et Directeur du Centre pour le développement durable de l’Université Columbia, a plaidé pour la création d’un fonds pour la paix et le développement qui serait financé par des ressources prises sur les dépenses militaires des membres permanents du Conseil de sécurité.
Le Secrétaire général a encore souligné que son Nouvel Agenda pour la paix offre une vision pour prévenir les conflits, pérenniser la paix et promouvoir le développement qui s’applique à toutes et tous, dans tous les pays, à chaque instant. En tant que communauté internationale, nous devons prendre conscience que nous ne sommes qu’aussi forts que notre maillon le plus faible, a dit M. Guterres. « Ce sentiment d’une vulnérabilité partagée doit se traduire en un objectif commun pour sauver des vies et préserver les avancées en matière de développement. »
Selon le rapport de 2022 sur les tendances mondiales, établi par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, plus de 108 millions de personnes dans le monde ont été contraintes de fuir leur foyer en raison de la guerre et de la violence, un chiffre sans précédent, qui est deux fois plus élevé qu’il y a 10 ans. Les conflits armés auraient également coûté la vie à 238 000 civils en 2022, soit le nombre le plus élevé de victimes civiles dans le monde au cours de ce siècle. Ces chiffres alarmants soulignent la nécessité de revoir les stratégies et les approches de pérennisation de la paix, a fait valoir la Chine dans sa note de cadrage pour le débat.
« On ne peut plus considérer les solutions militaires traditionnelles comme les seuls moyens de promotion de la paix », a ainsi prévenu le Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Mozambique, M. Manuel José Gonçalves. Préoccupé par le lent progrès du Programme 2030, il a estimé qu’en l’absence de mesures plus audacieuses, le potentiel de conflit risque d’augmenter.
Qu’adviendra‑t‑il de l’engagement commun de l’ONU à ne laisser personne de côté si nous ne travaillons pas ensemble à l’avènement d’un monde de paix? a lancé le Premier Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba. Alarmé par l’augmentation continue des dépenses militaires mondiales, il a dénoncé des ressources exorbitantes, « dilapidées dans des engins de mort sophistiqués », alors que les engagements en matière d’aide publique au développement ne sont pas respectés.
Pour sa part, le Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, M. Péter Szijjàrto, a jugé que l’Europe était confrontée à de graves problèmes sécuritaires liés à l’immigration, qu’alimentent notamment la guerre en Ukraine et les conflits au Moyen-Orient. Il a lancé un appel à la protection des frontières de l’Union européenne, déplorant que cette question soit abordée sous l’angle des droits humains, alors qu’elle relève avant tout de la sécurité.
Premier partenaire mondial pour les objectifs de développement durable (ODD), l’Union européenne a, avec ses États membres, déboursé 92,8 milliards de dollars en 2022, soit 43% de l’aide mondiale, a tenu à rappeler le représentant. Il s’est félicité, de la signature, le 15 novembre dernier, du nouvel accord de partenariat entre l’Union européenne (UE) et les membres de l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP), dit Accord de Samoa, qui couvre des thèmes tels que le développement et la croissance durables, les droits humains ou encore la paix et la sécurité.
Comme plusieurs pays, les États-Unis ont salué le rôle important de la Commission de consolidation de la paix pour identifier et aider les États et les communautés fragiles, et encouragé une coopération plus étroite entre le Conseil de sécurité et la Commission. S’ils ont insisté sur la transparence dans l’utilisation des fonds pour le développement et sur l’impératif d’un endettement responsable, la Fédération de Russie a, de son côté, plaidé pour des méthodes « alternatives » et la création de mécanismes de sécurité « échappant au contrôle de Washington ».
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Promouvoir une paix durable par le développement commun (S/2023/870)
Déclarations
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a affirmé que le lien vital qui unit le développement et la pérennisation de la paix « définit depuis le tout début » l’ONU qui repose sur les trois piliers de la paix, du développement et des droits humains. Le développement, à lui seul, ne suffit pas à garantir la paix, mais il demeure essentiel, a‑t‑il souligné. Aucune paix n’est garantie en l’absence d’un développement inclusif et durable qui ne laisse personne de côté, et il va de soi que ce constat définit aussi le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ses 17 objectifs.
Tout comme la progression d’un objectif entraîne tous les autres objectifs, l’échec dans un domaine risque d’effacer toutes les avancées, a toutefois averti le Secrétaire général. Aucun échec n’est pire que l’impossibilité de prévenir un conflit. Les acquis du développement sont souvent les premières victimes de la guerre, a‑t‑il fait remarquer. « Plus un pays est proche d’un conflit, plus il s’éloigne d’un développement durable et inclusif. » C’est ainsi que 9 des 10 pays ayant les indices de développement humain les plus faibles au monde ont connu des conflits ou des violences pendant la décennie écoulée; et que les inégalités et l’absence de perspectives, d’emplois décents et de liberté, peuvent engendrer la colère et soulever le spectre de la violence et de l’instabilité.
M. Guterres a noté que la faiblesse des institutions et la corruption augmentent le risque de conflit tandis que le chaos climatique et la dégradation de l’environnement amplifient les crises. De ce fait, l’aggravation constante des urgences climatiques, les records de chaleur et la rivalité croissante autour de ressources qui s’amenuisent entraînent des déplacements de population, ce qui les fragilise et les insécurise davantage. Parallèlement, la criminalité organisée, l’extrémisme violent et les groupes terroristes trouvent un terreau fertile dans ces environnements, effilochant le tissu social, accentuant davantage les insécurités et affaiblissant une gouvernance effective.
Au contraire, a‑t‑il plaidé, « le développement humain éclaire la voie de l’espoir et favorise la prévention, la sécurité et la paix », ce qui implique que l’avancée de la paix et la progression d’un développement durable et inclusif vont de pair.
Édifier la paix signifie garantir la sécurité alimentaire, l’accès à l’éducation, le renforcement des compétences, les soins de santé, la protection sociale et la dignité pour tous, a précisé le Secrétaire général. Il a prôné la résilience face aux chocs climatiques; l’investissement dans l’adaptation; la réduction de la fracture numérique et l’exploitation des avantages de l’inclusion numérique, tout en se protégeant contre les dangers des nouvelles technologies; la participation égale des femmes; la création de possibilités pour les jeunes; et l’augmentation massive des financements à long terme abordables pour les pays en développement afin qu’ils puissent investir dans les biens et services publics pour leurs populations.
Alors que 85% des cibles liées aux objectifs de développement durable « ne sont pas en bonne voie », M. Guterres a exhorté à « agir de façon beaucoup plus urgente et plus ambitieuse ». Les pays en développement, en particulier les pays les moins avancés, font face à une convergence de crises, une dette écrasante, une marge de manœuvre budgétaire réduite et l’envolée des prix, l’intensification des catastrophes climatiques, le creusement des inégalités et l’aggravation du chômage et de la pauvreté, et les effets persistants de la pandémie de COVID‑19. « Cela mène tout droit aux conflits sociaux, à l’instabilité politique, voire à un conflit ouvert », a‑t‑il averti.
Invitant à faire davantage pour aider les pays qui sont dans une mauvaise passe, le Secrétaire général a évoqué les « mesures audacieuses » qu’il a lui-même préconisées afin de rendre les institutions mondiales, dont le dispositif financier international, plus représentatives des réalités actuelles et plus réactives aux besoins des économies en développement. Il a rappelé avoir notamment proposé un plan de relance des objectifs de développement durable à hauteur de 500 milliards de dollars par an, pour réduire le fardeau de la dette et libérer des ressources, car « investir dans le développement aujourd’hui signifie investir dans un avenir plus pacifique ».
M. Guterres a fait valoir que, chaque jour, les fonctionnaires de l’ONU concrétisent le lien entre la paix, le développement et la justice dans leurs activités, partout dans le monde. Dans ce contexte, les équipes de pays sont le fer de lance de l’action visant à accompagner les priorités nationales en matière de développement durable et inclusif. De leur côté, les opérations de maintien de la paix aident les États Membres, tandis qu’ils gèrent et règlent les conflits, alors que les envoyés spéciaux et les missions politiques spéciales facilitent les processus politiques par la médiation.
Le Secrétaire général a demandé aux États de renforcer la Commission de consolidation de la paix et ses travaux car celle-ci réunit la communauté internationale autour de la notion d’un renforcement mutuel de la paix et du développement. M. Guterres a aussi suggéré, en particulier au Conseil de sécurité, de solliciter plus systématiquement les avis de cette commission. Nos opérations de paix devraient être habilitées à jouer un plus grand rôle dans la pérennisation de la paix, à toutes les étapes du conflit et dans toutes ses dimensions, a‑t‑il analysé, signalant d’autre part qu’il faut mieux relier l’action humanitaire et l’action de paix et de développement. Il a rappelé ses propositions en vue d’un Nouvel Agenda pour la paix à une époque de tensions croissantes et de prolifération des conflits, en déclarant que ses idées s’articulent autour des principes fondateurs de la Charte des Nations Unies. Nous proposons des réflexions approfondies, conscients de la nature interdépendante des nombreux problèmes auxquels nous faisons face, ce qui reflète clairement notre attachement à arrimer plus fermement l’action pour la paix dans les objectifs de développement durable, a‑t‑il résumé.
Le Secrétaire général a ainsi appelé à agir plus résolument pour renforcer la prévention, ancrée dans le plein respect de tous les droits humains: civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Il faudra également transformer les dynamiques de pouvoir dans tous les domaines, y compris la paix et la sécurité, a poursuivi M. Guterres, qui a estimé qu’il est grand temps d’agir pour garantir le rôle moteur des femmes et des jeunes.
Le « Nouvel Agenda pour la paix » présente une vision pour prévenir les conflits, pérenniser la paix et promouvoir le développement qui s’applique à toutes et tous, dans tous les pays, à chaque instant. En tant que communauté internationale, nous devons prendre conscience que « nous ne sommes qu’aussi forts que notre maillon le plus faible », a‑t‑il commenté. Ce sentiment « d’une vulnérabilité partagée » doit se traduire en un objectif commun pour sauver des vies et préserver les avancées en matière de développement, à tout moment, et partout où ces avancées sont menacées.
Dans ce contexte, M. Guterres s’est félicité de l’adoption, en septembre dernier, de la Déclaration politique issue du Sommet sur les objectifs de développement durable et de l’engagement commun pris par les États Membres de mettre en œuvre « des mesures audacieuses, ambitieuses, régulières, justes et transformatrices, ancrées dans la solidarité internationale, et une coopération efficace à tous les niveaux ».
Partant, le Secrétaire général a invité tous les États Membres à aborder le Sommet de l’avenir dans ce même esprit de solidarité et d’ambition. Il a incité à « abandonner la logique de la concurrence à somme nulle », vouée à l’échec selon lui, pour un réengagement dans la voie de la coopération et pour trouver le courage de faire des compromis. Le Conseil de sécurité doit être au cœur de cet effort vital, a‑t‑il conclu.
Mme DILMA ROUSSEFF, Présidente de la Nouvelle Banque de développement, a déclaré qu’une coopération favorisant le dialogue et le consensus est un principe directeur pour parvenir à la paix et au développement. Elle a rappelé qu’en 2011, alors qu’elle était Présidente du Brésil, elle avait elle-même proposé un débat sur l’interdépendance entre sécurité et développement, soulignant que la reconstruction et la revitalisation de l’économie sont des éléments cruciaux pour le développement à long terme.
Notant qu’une paix durable nécessite la prise en compte des causes de la situation socioéconomique, la Présidente de la banque des BRICS a déclaré que la pauvreté à elle seule n’explique pas la violence. Tous les individus ou groupes souffrant de pauvreté ne recourent pas à l’agression, a‑t‑elle observé, ajoutant toutefois que l’exclusion sociale, politique et économique peut alimenter les conflits.
Soulignant l’interdépendance et le renforcement mutuel du développement, de la paix, de la sécurité et des droits de l’homme, Mme Roussef a souligné la nécessité d’un développement technologiquement inclusif. La concentration croissante des richesses entre les mains d’une minorité a accru les inégalités dans les pays en développement, tout en créant pauvreté et spéculation, a‑t‑elle dénoncé. Notant que la faible régulation de la finance internationale n’a pas réussi à empêcher des crises récurrentes liées à la financiarisation, elle a rappelé que les mesures réglementaires préconisées après la crise financière de 2008-2009 n’avaient pas réussi à empêcher l’apparition de nouvelles bulles spéculatives ou de problèmes de liquidité excessive. De plus, depuis la dernière crise financière mondiale, la mondialisation s’est affaiblie, tout en étant également impactée par la pandémie de COVID-19 et les tensions géopolitiques.
« Nous avons pour mission de responsabiliser l’ONU et de réformer les institutions de Bretton Woods », a souligné Mme Roussef, qui a dit militer contre les doubles standards appliqués lors des crises. Elle a ajouté que la crise climatique n’avait pas été abordée au prisme des décisions prises lors des forums environnementaux internationaux, déplorant que ni le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ni l’Accord de Paris sur le climat ne se soient concrétisés.
Soulignant que les pays les plus pauvres ont besoin de ressources pour atteindre les objectifs de développement durable, le Présidente de la Nouvelle Banque de développement a souligné la nécessité d’un consensus entre les pays développés et les pays en développement. Elle a également relevé que de nombreux pays n’ont pas atteint la troisième révolution industrielle et technologique, soulignant combien le fossé technologique et la fracture numérique créent des inégalités.
M. JEFFREY SACHS, Président du Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies et Directeur du Centre pour le développement durable de l’Université de Columbia, a expliqué que les guerres qui dévastent actuellement d’immenses parties du globe peuvent paraître insolubles, alors qu’en réalité, un seul accord pleinement appliqué du Conseil de sécurité pourrait suffire à y mettre un terme. Un tel accord devrait, selon lui, viser à ce que les membres permanents du Conseil s’attaquent aux facteurs socioéconomiques sous-jacents des guerres en Ukraine, au Moyen-Orient, en Syrie et au Sahel. Ainsi a‑t‑il d’abord plaidé pour la création d’un nouveau fonds pour la paix et la sécurité pour aider l’Ukraine et les autres zones en guerre afin que les pays touchés puissent tourner le dos à la guerre et envisager la reconstruction à long terme et le développement.
S’agissant de la guerre israélo-palestinienne, M. Sachs a estimé que les parties ne parviennent plus depuis longtemps à trouver un accord de paix basé sur les résolutions du Conseil de sécurité. C’est pourquoi il a appelé ses membres permanents à concevoir une solution juste et durable, ne laissant aucune possibilité aux franges les plus dures du conflit de la fouler aux pieds. Le Conseil devrait également déployer une force de maintien de la paix en Palestine, alimentée par des contingents fournis par les pays voisins d’Israël et de la Palestine, a‑t‑il avancé, ajoutant que ces deux derniers États pourraient se tourner ensemble, dans le cadre d’accords internationaux, vers l’économie verte et la lutte contre les changements climatiques, qui leur offrent des défis communs et vitaux à relever.
M. Sachs a ensuite préconisé que le Conseil de sécurité œuvre avec le Gouvernement syrien au développement régional, en l’intégrant dans les circuits d’échanges commerciaux et économiques en Méditerranée orientale. « Rien ne sert de vouloir renverser des régimes », a‑t‑il analysé, considérant que les guerres au Sahel ont découlé directement de la volonté des pays de l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) de renverser le régime de M. Kadhafi, outrepassant en cela le mandat du Conseil de sécurité, qui ne prévoyait que la protection des civils. Pour casser la logique des violences et des coups d’État à répétition, M. Sachs a plaidé pour la création d’un fonds pour la paix et le développement. Celui-ci serait, a‑t‑il dit, financé par les ressources prises sur les dépenses militaires des membres permanents du Conseil de sécurité. En consacrant 10% de ces dépenses, le fonds pourrait allouer 60 milliards de dollars par an à la stabilité économique dans les régions en proie aux guerres, a‑t‑il affirmé, voyant dans cette approche le meilleur rempart au terrorisme et à l’extrême pauvreté endémique.
M. ZHANG JUN (Chine) a jugé essentiel de reconnaître que la paix et le développement sont liés de façon intrinsèque. Alors que certains points chauds du monde sont des « plaies béantes » depuis longtemps, il importe selon lui de proposer des solutions du point de vue du développement, ce que ce débat public initié par la Chine vise à produire. Parvenir à un développement durable et inclusif est la pierre angulaire de la stabilité des États, a‑t‑il fait valoir, relevant que la majorité des questions dont est saisi le Conseil de sécurité concernent des pays où la pauvreté est prégnante. De même, a poursuivi le représentant, renforcer le développement industriel, agricole, sanitaire et éducatif est crucial pour éliminer le terreau de l’extrémisme. « Ce n’est qu’en éliminant la pauvreté que l’on asséchera le terreau de la violence », a‑t‑il encore professé, avant d’appeler à une réduction des écarts entre les riches et les pauvres et entre les pays développés et ceux en développement.
Le représentant a ensuite déploré que certains pays utilisent la démocratie comme prétexte pour s’ingérer dans les affaires internes d’autres États et imposent des modèles de gouvernance. Ces pratiques se sont retournées contre leurs auteurs et ont abouti à des crises, notamment migratoires, a‑t‑il constaté, estimant que la répétition des conflits dans les pays africains démontre que les politiques imposées de l’extérieur ne sont pas efficaces. Les pays développés devraient plutôt respecter leur engagement d’aider au développement de ces pays, a ajouté le représentant, en se félicitant de l’essor de la coopération régionale. À présent, il faut renforcer les intégrations économiques infra-internationales et les aides internationales pour aider au développement, a‑t‑il plaidé, non sans regretter que les pays en développement restent marginalisés et confinés au plus bas dans la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Appelant à rejeter les protectionnismes et la pratique consistant à mettre son pays en premier, le représentant a dénoncé les pays développés qui font obstacle au développement en montant des barrières. Il a également rappelé que de nombreux pays en développement sont confrontés à des crises ou à des risques accrus, surtout après la pandémie de COVID‑19. Dans ce contexte, il a fait sien l’appel du Secrétaire général à accélérer la réforme de l’architecture internationale et a exhorté les institutions financières internationales à continuer leur action en matière de renforcement des capacités. Il a par ailleurs enjoint aux pays développés de respecter leurs obligations en matière de lutte contre les changements climatiques. À ses yeux, la pérennisation de la paix ne pourra se réaliser si quelques pays continuent de s’enrichir alors que d’autres sont en train de s’appauvrir. « Sur la voie de la paix, aucun pays ne doit souffrir », a‑t‑il scandé, assurant que la Chine continuera de mener des réformes, de défendre l’ordre mondial et d’appliquer une politique de bon voisinage dans la région Asie-Pacifique.
M. MANUEL JOSÉ GONÇALVES, Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Mozambique, a fait remarquer que de nombreux conflits sont liés à des asymétries de développement. Il a plus particulièrement insisté sur les conséquences délétères des limites en termes d’accès aux ressources ou de l’utilisation inappropriée des technologies émergentes, estimant qu’elles engendrent un environnement favorable aux conflits, susceptible d’être exploité par des groupes terroristes. À ce titre, il a considéré qu’un développement durable et inclusif est le seul moyen de parvenir à une paix pérenne. Ce constat invite à revoir nos stratégies de résolution des conflits, a‑t‑il affirmé. Pour le Vice-Ministre, les discussions sur les liens entre paix, sécurité et développement répondent à l’essence même de l’ONU et de ses principaux piliers. Il a rappelé que ce lien a été mis en relief par diverses instances, dont le Conseil de sécurité, et qu’il figure en bonne place du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Alors que nous nous trouvons à mi-chemin de l’échéance dudit programme, nous n’avons réalisé que 12% de ses objectifs, s’est-il inquiété. « En l’absence de mesures plus audacieuses, le potentiel de conflit risque d’augmenter. »
Évoquant des initiatives déployées à l’échelle nationale, M. Gonçalves a rappelé que le Mozambique compte assurer la stabilité sociale à travers le développement du capital humain, notamment avec son programme « Faire taire les armes ». Il a également mentionné la création par son pays de l’Agence de développement intégré du Nord, qui vise notamment à promouvoir le développement en fournissant un accès à l’eau, à la santé, à l’éducation, à la terre et à la justice. « On ne peut plus considérer les solutions militaires traditionnelles comme les seuls moyens de promotion de la paix », a‑t‑il conclu, lançant notamment un appel pour que l’on accorde la même attention aux dimensions économique, sociale et inclusive du développement.
Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que, lorsque la population d’un pays ne peut pas, sur un pied d’égalité, tirer parti du développement et lorsque ses droits humains ne sont pas respectés, le risque de violence et de conflit s’accroît. Elle a donc rappelé aux membres du Conseil de sécurité leur responsabilité en termes de promotion et de renforcement des droits humains et du développement durable pour prévenir les conflits.
Prenant l’exemple de l’insécurité alimentaire mondiale, la représentante a fait observer que la faim est un moteur des conflits et qu’il appartient au Conseil de sécurité de mettre fin à ce cycle. Il ne s’agit pas simplement de réagir aux famines actuelles mais d’anticiper celles à venir en misant sur des cultures qui résistent aux changements climatiques, ou encore de faciliter l’accès aux terres et un soutien aux exploitants, a‑t‑elle ajouté. Aux côtés du G7, les États-Unis se sont engagés à mobiliser 600 milliards de dollars en nouveaux investissements d’ici à 2027 grâce au partenariat pour les infrastructures et les investissements mondiaux, a‑t‑elle précisé. Elle a insisté sur la transparence dans une utilisation responsable des fonds pour le développement et sur l’impératif d’un endettement responsable, voire de venir en aide aux pays qui ont du mal à payer leur dette. Les États-Unis travaillent avec une vaste coalition pour coopérer avec les banques multilatérales de développement, a‑t‑elle rappelé à ce sujet. Ils sont déterminés à accorder la priorité à l’objectif de développement durable no 17 -les partenariats-, tant au plan bilatéral que régional et multilatéral.
Promouvoir la paix à travers le développement et les droits humains signifie qu’il faut veiller à ne laisser personne de côté, faute de quoi le développement n’en sera que plus illusoire, et la communauté internationale devra à nouveau réagir plutôt qu’anticiper lorsqu’il s’agit de la paix, a rappelé Mme Thomas-Greenfield. À cette fin, la représentante a salué le rôle important de la Commission de consolidation de la paix et de son fonds pour identifier et aider les États et les communautés fragiles, en encourageant une coopération plus étroite entre le Conseil de sécurité et la Commission. Il faut veiller à ce que le développement durable repose sur les principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme, afin de pouvoir réaliser cette vision stratégique d’un monde sans conflit, a‑t‑elle conclu.
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que, face à l’ampleur des tensions internationales, il s’avère indispensable de revoir les modes d’action aux fins de créer réellement les conditions d’une paix durable, en traitant les causes profondes des conflits, intrinsèquement liés à des problématiques de développement. Les changements climatiques et la dégradation de l’environnement sont des facteurs d’instabilité supplémentaires dont les effets délétères vont croître dans les prochaines décennies, a‑t‑il mis en garde.
Assurer la paix et la sécurité est une condition intrinsèque du développement durable, raison pour laquelle l’ensemble du système des Nations Unies -le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale, les organisations, les fonds et programmes ainsi que l’ensemble des partenaires au développement- doit travailler de concert, a déclaré le représentant. Il a ensuite estimé que le Nouvel Agenda pour la paix offrait l’opportunité d’un réengagement collectif des États Membres. Il a rappelé que cette vision conjugue le développement avec le soutien aux processus politiques, le respect des droits de l’homme et la mise en œuvre du mandat des opérations de paix.
Réitérant l’appel de la France à l’action collective, relayé à l’occasion du Sommet pour un nouveau Pacte financier mondial en juin dernier, lequel a permis de donner une impulsion au plus haut niveau et de proposer des solutions concrètes sur la base des besoins exprimés par les pays en développement, le représentant a invoqué l’exigence de solidarité internationale, qui est au cœur du Pacte de Paris pour les peuples et la planète. Il a encouragé à l’établissement d’un « cercle vertueux » entre développement économique, social et actions en faveur du climat et de la biodiversité. C’est l’objectif du projet de la Grande Muraille verte, qui vise à lutter contre les effets des changements climatiques, la désertification, l’insécurité alimentaire et la pauvreté, du Sénégal à Djibouti, auquel la France a contribué à mobiliser 16 milliards de dollars, a déclaré le représentant.
Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a souligné les multiples défis auxquels les personnes vulnérables dans les pays en conflit devaient faire face. Le développement durable favorise la prévention des conflits, a‑t‑elle rappelé, les droits humains et la bonne gouvernance allant de pair avec un développement inclusif, deux approches qu’elle a jugées interdépendantes et sur lesquelles les organes de l’ONU, notamment le Conseil de sécurité mais aussi le Conseil des droits de l’homme, devraient coopérer. Elle a aussi rappelé que les missions de maintien de la paix, les missions politiques spéciales, ou encore les bureaux régionaux et nationaux de l’ONU étaient en mesure d’identifier « les causes profondes » de l’instabilité dans les pays concernés. La représentante a souligné que l’Union européenne (UE) et ses États membres étaient les premiers donateurs mondiaux en matière d’aide au développement et de coopération et que l’UE investirait 300 milliards d’euros dans le développement durable au cours des cinq prochaines années, sur la base de partenariats solides « fondés sur les droits humains », mais aussi en reconnaissant les besoins spécifiques des femmes et des filles dans les situations de conflit et d’après conflit, l’importance de l’alphabétisation et de l’accès à l’éducation et à l’emploi, en particulier pour les plus jeunes, ou encore la réduction de la fracture numérique pour « donner à tous les moyens de participer pleinement aux systèmes démocratiques ». Elle a par ailleurs mis en garde contre les risques sécuritaires liés au climat, qu’il s’agisse de l’élévation du niveau de la mer ou des phénomènes météorologiques extrêmes qui augmentent les risques de conflit et d’instabilité dans les régions vulnérables. « Nous restons convaincus que le Conseil de sécurité a un rôle important à jouer pour relever ces défis » et pour que des décennies de progrès en matière de développement ne soient pas réduites à néant, a‑t‑elle conclu.
M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a jugé « évident » que, dans plusieurs régions du monde, les déficits en matière de développement constituent un véritable défi qui menace la coexistence pacifique des communautés, alimente les antagonismes, fragilise les institutions étatiques et fait prospérer l’intolérance. Il apparaît donc fondamental d’investir massivement dans le développement pour paver la voie vers une paix durable, a estimé le représentant, parlant d’un impératif pour briser le cercle vicieux de l’instabilité, tout en ajoutant qu’il fallait aussi, parallèlement, s’attaquer aux causes profondes de la fragilité des États plutôt que de s’appesantir sur les aspects symptomatiques des crises.
Le représentant a ensuite estimé que l’action collective gagne en efficacité lorsqu’est renforcée, avant tout, la résilience sociétale. Il s’est dit d’accord avec le Secrétaire général, qui, dans son rapport 2022 sur la consolidation et la pérennisation de la paix, estime que « la meilleure défense contre les conflits violents est un développement inclusif qui ne laisse personne de côté ». Cela a le mérite de souligner l’importance d’un développement centré sur l’être humain, a‑t‑il encore commenté.
Le représentant a en outre qualifié de « primordial », le rôle des institutions financières internationales comme la Banque africaine de développement, notamment dans le financement des programmes de formation ou de création d’emplois. Il faut toutefois aller au-delà de la sphère multilatérale, a‑t‑il ajouté, appelant à mobiliser aussi bien le secteur public que privé, y compris la société civile, pour construire un véritable pacte global de développement socioéconomique au profit notamment des États fragiles, lesquels ont particulièrement besoin de financement substantiel pour leur processus de relèvement.
Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a souligné la relation entre la vulnérabilité, les changements climatiques et les conflits armés, qui peut former un cycle destructeur auquel le Conseil de sécurité doit s’attaquer. Sur les 20 pays les plus vulnérables aux changements climatiques, 15 sont classés par la Banque mondiale comme fragiles ou touchés par un conflit, a relevé la représentante, invitant le Conseil à adopter des approches innovantes pour considérer les conflits sous l’angle du climat afin de faire face plus efficacement à ce phénomène. Rappelant que par sa résolution 2677 (2023), le Conseil a demandé au Secrétaire général d’incorporer une analyse des risques associés aux changements climatiques susceptibles de nuire à la paix et à la sécurité au Soudan du Sud dans son rapport sur la mission des Nations Unies dans ce pays (MINUSS), elle a souhaité que soient soumises des demandes de rapports similaires lors d’autres renouvellements de mandat.
Concernant le financement du développement commun, la représentante a appelé à veiller à ce que les pays en développement y aient accès à long terme et à faible coût. « Il faut que les besoins des pays les plus vulnérables soient au centre des préoccupations des États Membres les plus puissants, notamment pour renforcer leur résilience aux effets des changements climatiques ». Cela nécessite des décisions audacieuses et une réforme de l’architecture financière internationale, a‑t‑elle ajouté, saluant en ce sens l’Initiative de Bridgetown, qui vise à accélérer les investissements privés dans les pays pauvres. Pour la représentante, le développement durable et la consolidation de la paix vont de pair, et « soutenir dès à présent ces efforts inclusifs permettra d’éviter d’avoir à payer plus tard les coûts immenses d’autres instabilités et conflits ».
M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a observé que le sous-investissement dans la prévention et le développement économique et social contraste avec la « terrible » augmentation des dépenses militaires. Dans ce contexte, des pays qui semblaient s’être stabilisés sont retombés dans la misère, a‑t‑il constaté, avant de saluer l’analyse de la note d’orientation du Secrétaire général sur le Nouvel Agenda pour la paix, en particulier ses arguments en faveur de la prévention. Des investissements importants dans le développement social et économique font partie intégrante de cette approche, tout comme la nécessité de garantir la place des femmes, a souligné le représentant. Si le développement est essentiel pour la prévention, il l’est tout autant pour le rétablissement de la paix dans les pays touchés par un conflit, a‑t‑il encore fait valoir, estimant que soutenir ces pays vers la paix et la prospérité doit être un engagement à l’échelle du système des Nations Unies, comme c’est le cas pour les objectifs de développement durable (ODD).
De l’avis du représentant, les institutions financières internationales devraient prendre part à ces efforts en tant que partenaires pour la mise en œuvre des ODD, via le financement d’initiatives de renforcement des capacités liées à la consolidation de la paix et à la prévention des conflits. « Au lieu d’exiger des politiques fiscales austères, ces institutions devraient appuyer des projets qui créent les conditions de l’inclusion économique et sociale », a‑t‑il plaidé, appelant à promouvoir un type de développement inclusif qui intègre les avancées technologiques et comble le fossé numérique. Il a d’autre part estimé que la Commission de consolidation de la paix (CCP) est bien placée pour s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits, qui, pour beaucoup, ne sont pas traitées par le Conseil de sécurité. À cet égard, il a jugé que les propositions présentées dans le Nouvel Agenda pour la paix sur la manière d’élever le travail de la CCP constituent un bon point de départ pour le prochain Sommet de l’avenir en 2024 et l’examen de l’architecture de consolidation de la paix en 2025. Ce n’est qu’en adoptant une perspective globale sur la nature et les circonstances particulières qui sont à l’origine des conflits que nous pourrons à la fois les prévenir et les traiter de manière adéquate, avec des solutions réelles et à long terme, a‑t‑il conclu.
M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a rappelé que le maintien de la paix nécessite non seulement une réponse à court terme, mais également des efforts à moyen et long terme pour prévenir les récurrences des conflits. À ce titre, il a plaidé en faveur d’une approche axée sur le lien entre paix, action humanitaire et développement. Il s’agit de fournir des infrastructures et des opportunités économiques, tout en entretenant la confiance entre les personnes, les communautés et le gouvernement, a‑t‑il argué. Dans ce cadre, il a exhorté la communauté internationale à soutenir les efforts nationaux destinés à bâtir des institutions fondées sur l’état de droit et à investir dans les personnes. Faisant valoir que la paix et la sécurité reposent sur le développement économique, mais visent en dernier ressort la dignité humaine, il a préconisé le déploiement d’initiatives de développement inclusives, avant de juger vitale la participation des femmes et des filles dans les processus de paix.
À cette aune, le représentant a estimé que le Conseil de sécurité devrait adopter une approche cohérente, basée sur le lien entre l’action humanitaire, le développement et la paix, afin de prévenir la répétition des conflits et permettre une paix durable. Cela nécessite une coopération organique au sein du système des Nations Unies et au-delà, a‑t‑il ajouté, rappelant l’engagement multipartite lancé par son pays, en collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), en vue du deuxième Forum mondial sur les réfugiés, en décembre. Il a également exhorté le Conseil à encourager, dès le début des opérations de paix, une coopération entre les équipes nationales et les diverses agences, fonds et programmes. Il importe selon lui d’aligner les objectifs de ces opérations à ceux des institutions financières internationales pour parvenir à des synergies supplémentaires. Enfin, il a invité le Conseil à recourir davantage à la fonction consultative de la Commission de consolidation de la paix, laquelle peut contribuer à la compréhension des causes profondes des conflits ou informer sur les meilleures pratiques.
Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a tout d’abord fait valoir que la sécurité et le développement d’un pays sont liés à ceux des autres pays, avant de mettre en avant le lien entre droits humains, développement et paix. Considérant que la meilleure manière de prévenir la répétition des conflits est de rester fidèle à un ordre mondial basé sur des règles, elle a mis en garde contre l’érosion des valeurs et principes partagés. Dans ce cadre, il n’est pas possible de garantir les droits fondamentaux pour tous si l’on choisit un sous-ensemble de droits tout en en ignorant d’autres, a souligné la représentante. Se disant convaincue qu’il n’y a pas de désaccord sur les causes profondes des conflits, elle a appelé à miser sur le développement commun en promouvant la capacité de développement des pays en conflit. Pour cela, les institutions financières internationales seront appelées à jouer un rôle de premier plan, aux côtés des opérations de paix et des missions politiques de l’ONU, a estimé la représentante, insistant également sur la justice en tant que composante essentielle de la paix et de la stabilité.
M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a d’abord rappelé la formule de l’ancien Secrétaire général Kofi Annan: « Pas de développement sans paix, pas de paix sans développement et ni l’un ni l’autre sans les droits humains ». Le représentant a ajouté qu’alors que le monde fait face à une crise profonde, qu’il doit retrouver son humanité, il est important de se rappeler les liens intrinsèques entre ces trois piliers de l’ONU. Il a ensuite noté que l’objectif de développement durable (ODD) no 16 rappelle que le développement ne peut être durable que s’il est appuyé par des sociétés pacifiques et inclusives, dirigées par une bonne gouvernance.
La Suisse reste, à cet égard, convaincue que des réponses communes peuvent être trouvées en menant des échanges constants et constructifs. « Il n’y a pas de formule magique, nous avons besoin de confiance, dialogue et de bonne foi », a souligné le représentant, pour qui cette approche doit guider la mise en œuvre du Nouvel Agenda pour la paix, lequel « plaide très clairement en faveur d’une collaboration sur ce qui nous unit, et non sur ce qui nous divise. » Il a attiré l’attention sur le fait que ce programme établit que la coopération ne peut fonctionner sans que les États respectent leurs engagements et la Charte des Nations Unies dans leur intégralité. « Si la confiance entre les États est vitale pour la coopération internationale, la confiance entre les gouvernements et leur population fait partie intégrante du fonctionnement des sociétés », a‑t‑il ajouté.
Pour la Suisse, la diplomatie préventive, la prévention de la militarisation de l’espace numérique, l’accélération de la mise en œuvre des objectifs de développement durable, le traitement des moteurs sous-jacents de la violence et de l’insécurité, et celui des liens entre le climat, la paix et la sécurité sont les instruments dont dispose notamment le Conseil de sécurité pour avancer sur la voie du développement commun. « Aucune société ne peut bénéficier d’un tel développement sans l’inclusion de tous ses membres et aucune société ne peut prévenir et résoudre les conflits sans l’intégration équitable des femmes dans les processus de paix », a affirmé le représentant, qui a également fait observer que les avis de la Commission de consolidation de la paix sont précieux et peuvent galvaniser les efforts d’autres acteurs comme les institutions financières internationales.
M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a rappelé que la construction de la paix exigeait des réponses de long terme, mais aussi des résultats immédiats dans le but de servir les populations. À cet égard, il a insisté sur deux points particuliers. En premier lieu, la mise en place d’institutions fortes, notamment en facilitant l’accès à la justice conformément à l’objectif de développement durable no 16, et en mettant en place des programmes et projets au cas par cas. En second lieu, l’importance des synergies entre les missions de paix ou les missions politiques spéciales avec le travail des différentes agences des Nations Unies aux niveaux régional et national.
Le représentant a rappelé que les pays en conflit ou qui sortent d’un conflit sont souvent surendettés, nécessitant des investissements publics dans les services de base, la santé, l’éducation et les infrastructures. Il a souligné, en appelant à plus de transparence, que la corruption affaiblissait la démocratie et les systèmes politiques. Il a appelé à la mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement et suggéré que les pays développés consacrent 0,7% de leur PIB à l’aide publique au développement, et 0,15% à 0,20% de ce PIB aux pays les moins avancés.
Le représentant a ajouté que l’investissement dans les outils numériques pouvait contribuer au développement, jugé essentiel l’accès aux financements dans ce domaine, et réitéré l’importance du Fonds pour la consolidation de la paix comme catalyseur d’une coopération internationale efficace, tout en soulignant le rôle de la Commission de consolidation de la paix, notamment en matière d’échange de bonnes pratiques.
M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a rappelé que le sous-développement est à l’origine des conflits, suscitant eux-mêmes plus de sous-développement. Pour briser ce cycle, le Gouvernement du Royaume-Uni a notamment lancé un nouveau « Livre blanc » sur le développement international, a expliqué le représentant. De l’Éthiopie à la Colombie en passant par le Myanmar, le Royaume-Uni œuvre en faveur du développement durable et de la paix, a‑t‑il résumé.
Face aux défis économiques, il est essentiel que nous investissions de manière stratégique, a poursuivi le représentant, pour qui la paix, le développement et les droits humains sont comme les trois faces d’une même réalité. Pour maintenir la paix, nous devons identifier et traiter les facteurs de risque, tels que l’inégalité horizontale et la discrimination, et renforcer les facteurs de protection qui atténuent les risques, a poursuivi le représentant. Aux Nations Unies, cela implique de mieux travailler « entre les piliers » et avec des partenaires tels que la Banque mondiale, a‑t‑il poursuivi. Enfin, le représentant a assuré que son pays continuera d’offrir un soutien au développement dans le monde entier, et du même coup une alternative aux « offres contraignantes d’autres pays ».
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), rappelant la corrélation liant le manque de développement aux conflits, a aussi regretté le défi que constitue « l’État inefficace ». Il a toutefois précisé que ces États continuent de subir les pratiques d’un système financier et de développement mondial injuste, qui limite leur accès aux ressources et leur capacité à satisfaire leurs citoyens. Cette gouvernance inefficace crée des déficits dans l’action de l’État, qui contribuent à l’instabilité et aux conflits, a ensuite analysé le représentant.
En outre, il est évident que l’architecture financière internationale n’est pas adaptée, puisqu’elle a été incapable de remédier aux inégalités entre les pays, comme de soutenir les efforts des États face aux inégalités de leurs sociétés, a poursuivi le représentant. Abordant le volet des solutions, il a, entre autres, exhorté les institutions financières internationales et les banques multilatérales de développement à octroyer un soutien à long terme aux pays vulnérables. L’objectif serait de rendre le stock de dette de ces pays soutenable, a‑t‑il expliqué.
Plaidant par ailleurs en faveur d’une détection des conflits à un stade précoce, le représentant a préconisé un « multilatéralisme en réseau », qui renforcerait des partenariats avec des arrangements régionaux tels que l’Union africaine et ses communautés économiques régionales, comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. Il convient, en bref, de générer les ressources nécessaires au niveau mondial pour rendre résilientes les nations les plus vulnérables, a conclu le représentant.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a tout d’abord estimé que les questions de développement devraient avant tout être traitées par l’Assemblée générale et le Conseil économique et social (ECOSOC). Il a ensuite constaté que l’éradication de la pauvreté est au point mort, en raison selon lui de « graves erreurs » commises par « l’Occident collectif », notamment la pratique des mesures coercitives unilatérales illégales qui nuisent aux États les plus vulnérables et conduisent à la fragmentation du commerce mondial, limitant l’accès à l’investissement et à la technologie. Il a déploré que les pays développés n’honorent pas leurs engagements envers le Sud concernant l’aide publique au développement et le financement de la lutte contre les changements climatiques. Au contraire, ils augmentent les transferts d’armes vers les zones de conflit, a‑t‑il dénoncé, déplorant en outre que l’aide au développement des Occidentaux s’accompagne d’une ingérence dans les affaires intérieures des pays en développement. Le représentant a par ailleurs noté que l’Union européenne et les États-Unis imposent aux pays du Sud une transition énergétique forcée, avec l’abandon des combustibles traditionnels, alors qu’eux-mêmes n’hésitent pas les utiliser si nécessaire.
Pour le représentant, la note conceptuelle de « nos amis chinois » sur l’inégalité d’accès aux financements publics et privés s’explique largement par la structure du système financier international et ses institutions « créées par l’Occident pour servir ses propres intérêts ». Selon lui, l’aggravation de la crise de la dette, les problèmes de dépendance des anciennes colonies à l’égard des matières premières et la partialité des agences de notation et des tribunaux d’arbitrage anglo-saxons visent à « maintenir l’asservissement des pays en développement ». Il a donc plaidé pour une transformation radicale du système économique international de développement. Observant à cet égard que les restrictions unilatérales imposées à la Syrie, à l’Afghanistan et à certains États africains rendent difficile l’accès au financement international, il a rappelé que, selon l’ONU, il faut environ 4 200 milliards de dollars chaque année pour espérer atteindre les objectifs de développement durable. Cependant, ces moyens seuls ne suffiront pas, a‑t‑il dit, plaidant pour des méthodes alternatives qui permettent d’assurer la stabilité mondiale, notamment par la création de mécanismes de sécurité échappant au contrôle de Washington et la formation de zones de coopération et de développement pragmatiques dans diverses régions de la planète. Il a ainsi relevé que le format de la coopération Sud-Sud et triangulaire suscite un intérêt croissant. Le représentant a enfin jugé inacceptable qu’il y ait des notations du « potentiel de conflit » des pays, y compris celles basées sur des questions de développement, y voyant là encore un risque d’ingérence dans les affaires intérieures.
M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, a jugé que l’Europe était confrontée à de graves problèmes sécuritaires liés à l’immigration, qu’alimentent notamment la guerre en Ukraine et les conflits au Moyen-Orient. Il a lancé un appel à la protection des frontières de l’Union européenne, déplorant que cette question soit abordée sous l’angle des droits humains, alors qu’elle relève avant tout de la sécurité. Accusant Bruxelles et sa politique migratoire de faire « les affaires des contrebandiers », il a évoqué des tirs de gangs contre les gardes-frontières et la police hongroise. Se prononçant en faveur d’une stricte protection des frontières, le Ministre a estimé que leur viol constitue un crime qui doit être puni. Il s’est toutefois déclaré conscient des causes profondes des conflits à l’origine de cette situation. À ce titre, il a considéré qu’il fallait garantir la sécurité des régions affectées, mais aussi leur apporter des investissements et des emplois. Terrorisme et immigration s’enchevêtrent dans un cycle maléfique, a‑t‑il poursuivi, estimant qu’ils sont les causes et les conséquences l’un de l’autre. Le Ministre s’est dit particulièrement inquiet de la situation au Sahel, mentionnant des initiatives de son pays pour fournir des crédits aux pays africains ou pour déployer 200 soldats au Tchad, en collaboration avec le Gouvernement de ce pays, afin de contribuer à la stabilité et de prévenir les flux migratoires vers l’Europe.
M. GERARDO PEÑALVER PORTAL, Premier Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba, a relevé que des décennies de néolibéralisme « impitoyable », la persistance de modèles irrationnels de production et de consommation capitalistes qui dégradent l’environnement, les politiques protectionnistes et les pratiques spéculatives des grandes entreprises, qui font grimper les prix des biens et des services de base, et la dette extérieure qui réduit la disponibilité des ressources dans les pays en développement, pèsent sur les aspirations des nations à parvenir à un développement durable. Dans le même temps, la paix et la sécurité internationales sont constamment menacées par des conflits, des actes d’agression, des guerres non conventionnelles, des blocus, des tentatives de changement de régime et des violations fréquentes de la Charte des Nations Unies et du droit international. Qu’adviendra‑t‑il de l’engagement commun de l’ONU à ne laisser personne de côté si nous ne travaillons pas ensemble à l’avènement d’un monde de paix? a‑t‑il demandé. Alarmé par l’augmentation continue des dépenses militaires mondiales, qui ont atteint l’an dernier le chiffre « scandaleux » de 2,24 milliards de dollars, le responsable a dénoncé des ressources exorbitantes, « dilapidées dans des engins de mort sophistiqués », alors que les engagements en matière d’aide publique au développement ne sont pas respectés. M. Peñalver Portal a également pointé l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les efforts des pays touchés pour atteindre les ODD et le développement durable en général, en appelant la communauté internationale et l’ONU à œuvrer à leur élimination inconditionnelle. « Les blocus et les sanctions ne contribuent pas à la paix et à la sécurité internationales », a‑t‑il tranché. Il faut s’attaquer aux causes profondes des conflits pour parvenir à une paix durable, notamment aux problèmes de développement socioéconomique des pays du Sud, a‑t‑il conclu en saluant les initiatives mondiales de la Chine en ce sens.
M. AHMED MOHAMED EZZAT AHMED ELSHANDAWILY (Égypte) a réclamé des solutions pratiques et permanentes aux crises et conflits au niveau mondial, et plus particulièrement en Afrique. La seule manière de prévenir les conflits, c’est de mettre en œuvre les objectifs de développement durable, d’améliorer le développement économique et de réduire les inégalités sociales, car développement économique et paix et sécurité « sont les deux faces d’une même médaille », a affirmé le représentant, en appelant à intensifier les efforts de réconciliation nationale dans de nombreux pays en conflit.
Le représentant a dressé une liste des priorités à suivre pour mettre en place la vision d’une paix pérenne, à commencer par la mobilisation des ressources, afin de créer les conditions du développement économique. Il a aussi réclamé la mise en place d’une « action collective » en matière de financement du développement, y compris pour atténuer le fardeau de la dette et lutter contre la pauvreté en augmentant la résilience de ces pays face aux crises. À cette fin, il a suggéré d’utiliser des outils de financement innovants, en plus d’améliorer ceux qui existent déjà.
Le représentant a, en outre, souligné que la faiblesse des institutions, des capacités et de la gouvernance de certains pays devait être combattue en aidant les autorités nationales à identifier leurs propres priorités nationales, et appelé à assécher les sources de financement du terrorisme. Enfin, il a suggéré d’examiner en détail la recommandation du Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général relative à la mise en place d’un « nouveau système de prévention pour lutter contre toutes les formes de violence ».
Pour M. VATHAYUDH VICHANKAIYAKIJ (Thaïlande), « les conflits ne se produisent pas en vase clos ». Le représentant a fait valoir l’importance du contexte et des facteurs de risques, et la nécessité de s’attaquer aux causes profondes des conflits. Le développement inclusif et durable est un élément essentiel tout au long du continuum de la paix, a‑t‑il affirmé, en demandant d’intégrer les besoins en matière de développement local à chaque étape vers la paix, de la prévention des conflits au maintien, jusqu’à la consolidation de la paix, afin de forger une base solide propice à une paix durable et d’empêcher les pays de connaître le cercle vicieux des conflits et de la pauvreté.
À l’approche du Sommet de l’avenir en 2024, qui vise à renforcer le multilatéralisme avec l’ONU en son centre, le représentant a proposé de mobiliser les efforts collectifs pour promouvoir des moyens et un règlement pacifique des différends, conformément à la Charte des Nations Unies, au droit international applicable et aux résolutions du Conseil de sécurité, car la paix est une condition préalable à l’enracinement du développement. Pour le représentant, ce Sommet devrait orienter vers l’éradication de la pauvreté, de l’écart en matière de développement et de la fracture numérique, en intensifiant les efforts pour répondre aux défis existants et émergents, y compris les changements climatiques, et en accélérant les efforts pour atteindre les objectifs de développement durable. Les bénéficiaires ultimes du travail de l’ONU, qu’il s’agisse de paix ou de développement, sont les populations elles-mêmes, a‑t‑il insisté.
Appuyant également les synergies, le représentant a encouragé le Conseil à collaborer avec d’autres organes de l’ONU, afin de mieux intégrer leur expertise en matière de développement dans ses travaux. Les institutions financières internationales pourraient également être un catalyseur essentiel à la fois dans le financement du développement et dans le financement de la consolidation de la paix, a‑t‑il indiqué.
M. GIANLUCA GRECO (Italie) a déclaré que la voie de la paix et du développement se trouve dans la redevabilité et la solidarité, au niveau national comme au plan international. Chaque fois qu’un pays viole le droit international, il devient lui-même un moteur de conflits et d’insécurité, entravant le développement, a estimé le représentant. Les engagements universels inscrits dans la Charte des Nations Unies, notamment le respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale, ne peuvent être remis en question.
Pour le représentant, paix et développement, solidarité et responsabilité doivent aller de pair. Il faut exploiter le potentiel de la boîte à outils de l’ONU qui relie le programme de développement à la paix et la sécurité, en prenant pleinement en compte le lien entre les conflits et la faim et le lien entre le climat et la paix et la sécurité. Et le rôle du système des Nations Unies et de ses agences, fonds et programmes reste crucial et doit continuer à être soutenu politiquement et financièrement par tous les États membres, a‑t‑il plaidé.
Dans ce contexte, la Commission de consolidation de la paix et le Fonds pour la consolidation de la paix sont dans une position unique pour mobiliser des ressources financières, a encore estimé le représentant. L’Italie vient de doubler sa contribution annuelle au Fonds et s’engage à garantir un financement adéquat, prévisible et durable pour la consolidation de la paix, également par le biais des contributions statutaires des Nations Unies, a‑t‑il ajouté.
Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a déclaré qu’il est de plus en plus évident que, pour parvenir à une paix durable, il importe de s’attaquer de manière globale aux causes multidimensionnelles des conflits. À ce propos, elle a fait observer que, dans sa région, la situation actuelle d’insécurité en Haïti n’est pas seulement la conséquence d’une crise politique, mais aussi de facteurs liés au développement, notamment les inégalités, la pauvreté et la dégradation de l’environnement. La représentante a donc invité le Conseil de sécurité à adopter une approche globale pour remplir son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales; ce qui impose, selon elle, d’agir pour renforcer l’état de droit, promouvoir les droits humains et appuyer une croissance économique durable, en vue d’éradiquer la pauvreté, de réaliser le développement durable et de parvenir à la réconciliation nationale. Elle a demandé aux membres du Conseil de sécurité de placer ces facteurs au cœur des mandats des missions de paix et des missions politiques spéciales, y compris en amont de leur renouvellement. La représentante a également souligné la nécessité de relever des défis multidimensionnels, tels que la dette exorbitante de nombreux pays en développement, jugeant essentiel de réformer les institutions financières internationales sur la base d’une approche coopérative. Dans le même ordre d’idées, elle a appelé à une coopération plus étroite et inclusive entre le Conseil économique et social et la Commission de consolidation de la paix.
M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) s’est inquiété des défis auxquels fait face la communauté internationale: conflits, changements climatiques ou terrorisme. Insistant sur la nature imbriquée de la paix et du développement durable, il a lancé un appel pour que soit tiré un bilan des mesures concluantes et des échecs de ces 20 dernières années. Cet exercice, a‑t‑il poursuivi, permettrait de mieux naviguer la transformation du système international. La paix et le développement reposent en premier lieu sur des institutions inclusives, qui rendent des comptes et promeuvent l’emploi, la santé et l’éducation, a‑t‑il considéré. Pour s’attaquer aux causes profondes des instabilités, le délégué a préconisé un processus basé sur les spécificités nationales, plutôt qu’une approche « monolithique ». Il a désigné la pauvreté, les politiques de « deux poids, deux mesures », et les inégalités socioéconomiques comme étant à l’origine des guerres et des violations graves du droit international qui ébranlent aujourd’hui l’Europe et le Moyen-Orient. Or, le développement durable ne peut avoir lieu dans l’ombre des conflits, et la paix ne peut être conclue sans développement durable. Dans ce cadre, le délégué a insisté sur la nécessité d’un meilleur partage des fruits du développement, tout particulièrement pour les pays les moins avancés. « Nous vivons dans des siècles différents », a‑t‑il déploré, où certains n’ont toujours pas accès à internet, malgré la rapidité des évolutions technologiques.
Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) qui s’exprimait au nom des pays du Benelux (Belgique, Luxembourg et Pays-Bas), a déclaré que la paix, le développement et les droits humains forment un triangle indissociable et essentiel pour parvenir à une paix durable, reflété dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et qui doit continuer à nous guider. Pour mettre en œuvre ce programme, il va falloir collectivement faire mieux pour parvenir à un monde plus pacifique et plus juste, a averti la représentante, qui a appelé tous les États Membres à redoubler d’efforts, y compris pour réaliser les réformes essentielles à l’accomplissement des objectifs de développement durable.
Les pays du Benelux soutiennent fermement la réforme du système des Nations Unies pour le développement, en général, et le système des coordinateurs résidents, en particulier. À cet égard, la représentante a salué les progrès considérables réalisés en matière de cohérence, de coopération et d’action collective au niveau des pays; ce qui devrait permettre aux coordinateurs résidents de se concentrer davantage sur tous les aspects du « triangle paix-développement-droits humains » au niveau national.
Concernant la réforme de l’architecture financière internationale, les pays du Benelux partagent l’avis du Secrétaire général sur l’inadaptation du système multilatéral dans son ensemble, insuffisamment équipé pour relever les défis actuels en matière de développement. Il faut mobiliser davantage de capitaux, y compris des capitaux privés, pour le financement des objectifs de développement durable et du climat, et, pour ce faire, tendre la main aux donateurs non traditionnels, par exemple par le biais de la coopération trilatérale, a plaidé la représentante. En conclusion, elle a souligné qu’il incombe au Conseil de sécurité d’examiner les questions de paix et de sécurité d’une manière globale, martelant que le développement et les droits humains doivent faire partie intégrante de ses discussions.
M. TESFAYE YILMA SABO (Éthiopie)a plaidé pour que les institutions financières internationales mettent systématiquement en œuvre les agendas pour la paix et le développement sans créer de « priorisation indue ». Les plans de développement, en particulier, doivent être axés sur les contextes locaux, a‑t‑il demandé, afin que les États puissent concevoir leurs politiques de manière totalement souveraine. « Nous devons créer des conditions permettant aux pays en développement de convertir leurs ressources nationales en actifs productifs », a‑t‑il précisé, abordant le volet des solutions. À ce titre, les cadres de coopération doivent lutter contre l’exploitation illégale des ressources, en particulier des métaux précieux, comme en Afrique. De son côté, le Conseil de sécurité devrait « lutter contre la politisation des projets de développement nationaux ». Le délégué a regretté un déséquilibre entre les investissements dans le fonctionnement des missions de maintien de la paix, d’une part, et dans le développement national, d’autre part. Dans nombre de pays hôtes, les instances nationales ont un accès limité au financement international, ce qui fait que les missions de paix sont finalement perçues comme des concurrents dans l’affectation des ressources, a‑t‑il déploré. Il convient d’y remédier par le biais d’une affectation équilibrée des ressources entre les efforts de maintien de la paix et le renforcement des institutions nationales, a insisté le délégué.
Mme MARISKA DWIANTI DHANUTIRTO (Indonésie) a jugé, en premier lieu, que la situation à Gaza démontre que les droits humains s’appliquent de manière différenciée selon les populations, les régions et les conflits dans le monde. Elle a ensuite estimé que le droit au développement et à la paix doit être placé au centre des efforts de l’ONU, en particulier du Conseil de sécurité chargé, grâce à son mandat et aux missions de paix, de constituer un « socle solide » pour un développement social et économique pérenne. Elle a, par ailleurs, insisté sur l’importance des partenariats dans l’ensemble du système onusien et sur le rôle du Conseil de sécurité, qui devrait, selon elle, initier des synergies avec d’autres organes, notamment la Commission de consolidation de la paix, afin de trouver des solutions aux défis émergents comme l’insécurité alimentaire ou les changements climatiques. L’architecture régionale peut et doit aussi être l’une des fondations du développement et du règlement des conflits, comme cela est le cas en Asie du Sud-Est, a‑t‑elle ajouté, en se félicitant du fait que l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) soit devenue un pôle de paix et de stabilité pour la région.
M. ROBERT RAE (Canada) a reconnu le lien intrinsèque entre la paix et le développement, rappelant que dans son Nouvel Agenda pour la paix, le Secrétaire général plaide pour une approche plus délibérée et explicitement universelle de la prévention des conflits et de la violence qui s’alignerait sur l’approche guidant l’action à travers les piliers des droits de la personne et du développement durable. Dans ce même document, a‑t‑il ajouté, il est précisé que les défis de notre époque exigent l’universalité dans la mise en œuvre des engagements, et non la sélectivité. Pour le représentant, il ne suffit pas de proclamer l’interdépendance du bout des lèvres, il faut « la mettre en pratique dans tout ce que nous faisons ».
De même, atteindre la paix impose de se concentrer sur le développement, mais aussi sur la promotion et la protection des droits humains, a soutenu le délégué, appelant à reconnaître les liens profonds qui existent entre les trois piliers du développement commun. Il s’agit là d’une approche plus sûre pour bâtir une paix durable, a‑t‑il insisté, avant de souligner combien la pleine jouissance par les femmes et les filles de leurs droits humains, ainsi que leur participation pleine et sur un pied d’égalité avec les hommes, sont fondamentales pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD). « Nous ne pouvons pas non plus espérer parvenir à une paix durable si les femmes et les filles, qui constituent une force incomparable pour la résolution des conflits, continuent d’être exclues des questions de paix, de sécurité et de développement », a‑t‑il dit, réaffirmant le caractère crucial de l’autonomisation des femmes et des filles dans toutes les sphères de la vie.
M. CLAUDIO ERNESTO GARRIDO MELO (Chili) a estimé que la revitalisation du système multilatéral actuel exige une approche holistique de la sécurité et a appuyé la proposition du « Nouvel Agenda pour la paix » à savoir que « la paix ne peut être poursuivie qu’en même temps que le développement durable et les droits de l’homme ». Pour le Chili, le concept de développement fait référence à l’amélioration de la qualité de vie de chaque individu, quel que soit son origine ou son statut social ce qui en fait un catalyseur pour l’édification de sociétés stables et sûres.
La paix n’est pas simplement l’absence de conflit armé, a ajouté le représentant, pour qui les États doivent être en mesure de s’attaquer aux causes sous-jacentes de la discorde et de favoriser la coexistence pacifique. Il a en outre affirmé que le « développement agit comme un antidote » au désespoir et à la marginalisation, facteurs qui alimentent souvent la violence et l’extrémisme. En offrant des perspectives meilleures, le développement diminue les motivations à s’engager dans des activités violentes.
De surcroît, l’accès équitable aux ressources et aux opportunités réduit la concurrence et la confrontation, a fait valoir le représentant, arguant que les sociétés qui répartissent équitablement les dividendes du développement sont moins enclines aux bouleversements sociaux et au mécontentement. L’équité économique et sociale est donc un socle sur lequel une paix durable peut être construite, tout comme la prévention des conflits, la consolidation de la paix, renforcement de la démocratie et de l’état de droit, ainsi que la préservation des libertés individuelles sont des outils pour la paix.
M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a estimé que les expériences de son pays en matière de consolidation de la paix et d’ouverture de nouvelles voies de coopération dans la région autonome bangsamoro en Mindanao musulman sont un exemple de coordination réussie et efficace entre les efforts axés sur la sécurité et les initiatives de développement. En intégrant l’engagement communautaire et le développement socioéconomique dans nos efforts de sécurité, il est possible de faire face aux menaces immédiates, mais aussi jeter les bases d’une stabilité à long terme, a‑t‑il fait valoir, jugeant que cette approche reflète la compréhension selon laquelle la sécurité et le développement se renforcent mutuellement.
Rappelant l’attachement de son pays à un ordre international fondé sur des règles, le représentant a également plaidé pour une coopération accrue avec les pays touchés par un conflit, afin de renforcer leurs capacités de développement et leur résilience. C’est pourquoi, a‑t‑il poursuivi, nous attendons avec impatience le Sommet de l’avenir de l’an prochain, qui sera l’occasion de tracer collectivement notre voie vers la paix et le développement. En tant que partenaire, éclaireur et artisan de la paix, les Philippines sont prêtes à partager leurs idées et leurs expériences avec le Conseil de sécurité, garantissant ainsi une approche ciblée et efficace face aux défis mondiaux en matière de paix et de sécurité, a conclu le représentant.
M. BJÖRN OLOF SKOOG, de l’Union européenne (UE), a insisté sur l’importance des droits humains pour assurer la stabilité, indiquant que les femmes et les jeunes, en tant qu’agents du changement, doivent être au cœur de la réponse. Il a évoqué les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité qui soulignent que le développement, la paix et la sécurité internationales, et les droits humains se renforcent mutuellement. À cet égard, l’Observateur s’est félicité de la signature, le 15 novembre dernier, de l’Accord de Samoa, un nouvel accord de partenariat entre l’UE et les membres de l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP) qui couvre les thèmes susmentionnés.
L’UE est le premier partenaire mondial pour les objectifs de développement durable (ODD) a rappelé l’Observateur, précisant que l’UE et ses États membres ont déboursé collectivement 92,8 milliards de dollars en 2022, soit 43% de l’aide mondiale. En outre, depuis 2022, l’UE déploie sa stratégie d’investissement durable dans des infrastructures à l’échelle mondiale par le biais de la stratégie « Global Gateway », contribuant directement à la réalisation d’une série d’ODD interdépendants. Soulignant que cette stratégie appuie notamment des processus d’intégration régionale en Afrique, il a fait valoir que « les investissements, en créant des sociétés plus résilientes, contribuent à la paix ». L’Observateur a également plaidé en faveur d’une architecture financière plus équitable rappelant que les emprunts des économies africaines coûtent huit fois plus cher que ceux du reste du monde. Il a ainsi jugé indispensable que les banques multilatérales de développement accordent davantage de prêts à des conditions préférentielles avant de souligner la nécessité de s’attaquer au problème de la dette.
S’agissant de la Commission de consolidation de la paix, M. Skoog a appuyé un mandat qui lui permette de rencontrer tout organe de l’ONU pertinent, y compris en matière de droits humains. Évoquant ensuite le rôle des conseillers en matière de paix et de développement et en matière de droits humains, il s’est dit alarmé par le déficit de financement dont souffrent la consolidation de la paix et la prévention des conflits, alors même que ces derniers sont en augmentation. De surcroit, s’est-il inquiété, cette aide dépend d’un petit nombre de donateurs. Concluant sur la nécessité d’assurer un financement plus prévisible et durable de la consolidation de la paix, il a estimé que le Nouvel Agenda pour la paix offre une occasion unique de réfléchir à ce sujet.
M. MICHAEL ALEXANDER GEISLER (Allemagne) a appelé à un renforcement des approches visant à répondre aux causes profondes des conflits et à mobiliser davantage de ressources en faveur du programme de maintien et de consolidation de la paix de l’ONU. Le représentant a souligné la nécessité d’un financement adéquat des défis au maintien de la paix. Il a demandé que la Commission de consolidation de la paix (CCP) devienne la plateforme onusienne centrale de coordination des efforts dans ce domaine et renforce sa coopération avec le Conseil économique et social, les institutions financières internationales et les banques de financement régionales.
Grâce à un renforcement de son rôle consultatif, la CCP pourrait aussi fournir des recommandations au Conseil de manière plus systématique, a suggéré le représentant. Enfin, il a indiqué qu’en tant que cofacilitateur du processus conduisant au Sommet de l’avenir, il écoutait avec attention les idées exprimées lors de ce débat.
M. SAMUEL ZBOGAR (Slovénie) a estimé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 fournit un cadre complet pour la protection de l’environnement naturel, la promotion du développement économique et l’éradication de la pauvreté, ainsi que la promotion de sociétés justes et inclusives. La Slovénie a encouragé à des changements dans la gouvernance et les institutions, à une coopération internationale et transfrontalière efficace et à une promotion active du développement durable par la science, la technologie et l’innovation, a déclaré le représentant, qui a cité à cet égard le programme slovène de coopération pour le développement au Darfour méridional, dirigé par l’Institute Circle, en réponse à une grave insécurité alimentaire et en eau.
Le représentant a souligné que le lien entre l’humanitaire, le développement et la paix doit occuper une place prééminente, ajoutant que la planification coordonnée de l’aide humanitaire, de la coopération au développement et de la consolidation de la paix constitue un élément clef de la prévention.
De son côté, le Conseil de sécurité est bien équipé avec des mécanismes qui, soutenus par les conseillers pour la paix et le développement, se sont avérés aptes à renforcer l’édification de l’État par le biais d’une bonne gouvernance, a estimé le représentant. Ces conseillers ont soutenu la stabilisation par la primauté du droit et la mise sur pied d’institutions résilientes, et sont indispensables à la participation pleine, égale et significative des femmes et des jeunes aux processus de paix et de sécurité, a‑t‑il soutenu. La Slovénie, qui entrera en janvier au Conseil de sécurité comme membre élu pour deux ans, est prête à collaborer au sein du Conseil et au-delà pour intégrer les efforts de développement dans des mandats de maintien de la paix flexibles et adaptatifs, axés sur le renforcement des capacités et les partenariats locaux, qui sont essentiels pour harmoniser les efforts de sécurité et de développement. C’est ainsi que les investissements dans la paix se traduiront par un développement à long terme, inclusif et durable, a conclu le représentant.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a souligné qu’il est largement reconnu que la pauvreté, qui découle du sous-développement et des inégalités socioéconomiques, figure en bonne place parmi les causes profondes des conflits, de l’insécurité et de la fragilité, comme en témoigne l’omniprésence de conflits et de l’instabilité dans certaines régions d’Afrique, notamment au Sahel, dans la Corne de l’Afrique et dans la région des Grands Lacs.
La meilleure défense contre les conflits est un développement inclusif qui ne laisse personne de côté, a fait valoir le représentant, qui a appelé le Conseil de sécurité à toujours tenir compte des dimensions économiques, politiques et sociales des conflits et à abandonner ses approches de stabilisation à court terme pour se concentrer sur des solutions à long terme spécifiques à chaque contexte de conflit, y compris celles qui reconnaissent le rôle et les besoins uniques des femmes et des jeunes. Le Conseil pourrait recalibrer les mandats des missions de maintien de la paix et des missions politiques spéciales afin qu’elles jouent un rôle plus efficace dans la prévention de la reprise des conflits, a‑t‑il également suggéré. Ces missions peuvent s’associer aux pays d’accueil pour faciliter une reconstruction inclusive au niveau de la communauté, en servant de pivot au lien entre le maintien de la paix, la consolidation de la paix, le développement, la paix et la stabilité politique.
Le représentant a également incité le Conseil de sécurité à utiliser davantage les avis de la Commission de consolidation de la paix et à soutenir les efforts visant à concrétiser l’ambition de sa résolution sur le financement de la consolidation de la paix, à savoir des flux de financement multiples, y compris des financements volontaires, innovants et évalués. Enfin, il a exhorté le Conseil à aider les pays à mettre un terme à l’exploitation et au commerce illicites des ressources naturelles, fléaux qui ont contribué au sous-développement et aux conflits dans de nombreux pays africains.
Mme ANA JIMENEZ DE LA HOZ (Espagne) a plaidé en faveur d’une approche élargie du lien entre, d’une part, la sécurité et la paix internationales, et, d’autre part, l’aide humanitaire, le développement, les droits humains, l’action climatique et la participation égale des femmes dans tous les domaines. Ces éléments se soutiennent et se renforcent tous, a‑t‑elle affirmé, se référant notamment à l’ODD no 16. Dans ce cadre, les institutions financières internationales jouent un rôle clef, a‑t‑elle poursuivi. Réitérant l’engagement de son pays à accroître la capacité des banques de développement, mais aussi à rendre l’architecture financière internationale plus efficace, inclusive, transparente et démocratique, elle a rappelé que l’Espagne a proposé d’accueillir la quatrième Conférence sur le financement du développement en 2025. La déléguée a également évoqué le lien entre accès au numérique et développement, conformément à l’ODD no 4. Dans ce but, son pays participe à l’initiative Giga, promue par le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et l’Union internationale des télécommunications (UIT), pour connecter toutes les écoles du monde à Internet d’ici à 2030. Enfin, elle a salué le rôle des opérations de maintien de la paix de l’ONU et de ses missions politiques spéciales, estimant qu’elles facilitent le développement durable dans les pays bénéficiaires. Pour consolider la paix, elle a préconisé des transformations sociales, économiques et institutionnelles. Sur toutes ces questions, le Nouvel Agenda pour la paix et le Pacte pour l’avenir représentent une opportunité de progresser dans ce sens, a‑t‑elle conclu.
M. OMAR HILALE (Maroc) a rappelé que sans développement durable, la paix et la sécurité étaient menacées et que dans les sociétés affectées par des conflits, le développement était souvent entravé, ajoutant qu’« investir dans le développement, c’est investir dans la paix ». Les efforts des États doivent aussi se focaliser sur la consolidation de la paix pour éviter les rechutes dans les conflits, les prévenir et éradiquer leurs causes profondes, a‑t‑il expliqué. Il a appelé au renforcement des capacités nationales, à l’émancipation des femmes et des jeunes, ou encore à la transparence et la bonne gouvernance, et déploré l’insuffisance des investissements dans le développement, en suggérant par exemple de renforcer les capacités du Fonds pour la consolidation de la paix, « pierre angulaire du financement » de telles activités dans les zones touchées par les conflits. Le représentant s’est, en outre, félicité du rôle de la Commission de consolidation de la paix, notamment pour sa fonction de « relais » au sein du Conseil de sécurité. Il a estimé qu’une réponse concertée aux défis des pays en situation de conflit et de post-conflit exigeait un engagement coordonné de l’ensemble du système des Nations Unies. Rappelant que le Maroc disposait d’un grand nombre d’accords et de partenariats avec d’autres pays africains, il a conclu son intervention en expliquant que la seule voie vers la paix était « la voie du développement durable ».
M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a rappelé avoir été un grand défenseur de l’approche du développement axée sur la population qui a impliqué de grands changements dans la reconstruction. Au cours des 20 dernières années, 320 milliards de dollars ont été investis en Azerbaïdjan, dont près de 200 milliards dans des secteurs ne relevant pas de l’énergie, a‑t‑il souligné. L’Azerbaïdjan est devenu aujourd’hui un centre de transport entre l’Europe et l’Asie, ce qui a permis de renforcer la coopération avec les partenaires régionaux. Tous ces efforts ont été menés malgré des décennies de conflit armé avec des répercussions humanitaires dévastatrices. Revenant sur les causes de la guerre avec l’Arménie, le délégué a estimé que ceux qui ont voulu expulser les Azerbaidjanais de leur patrie et leur refusent leur droit de retour étaient inspirés par des « considérations de pureté ethnique ». Ils ont procédé à un nettoyage ethnique, ont rasé neuf villes et des centaines de villages pour des raisons ethniques. Ceux qui, en Arménie, ne poursuivent pas les auteurs de ces crimes sont guidés par la même haine, a‑t‑il déploré. Le fait d’appuyer les États touchés par les conflits doit rester une des priorités de l’ONU, a‑t‑il souligné. Cette solidarité est essentielle. Trois ans après la fin de la guerre, après des actions de déminage, la vie revient progressivement dans les territoires. Malgré les perspectives de paix et de développement, l’Arménie a choisi de garder ses revendications territoriales et voulu conserver des forces militaires, a encore déploré le délégué. « En septembre dernier, dans le Garabagh, l’Azerbaïdjan a repris possession de ses terres en moins de 24 heures. » Nous nous attendons à ce que l’Arménie remplisse ses obligations internationales, afin de stabiliser la paix au niveau international. Les tentatives de certains États de faire du sud du Caucase un lieu de confrontation géopolitique en armant l’Arménie ne servent pas les efforts de paix, a‑t‑il conclu.
M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) a déclaré que le lien fondamental entre paix et développement est encore plus crucial dans le contexte actuel de conflits plus nombreux alors que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est loin d’être sur la bonne voie. Rappelant que la promotion du développement n’est pas la responsabilité première du Conseil de sécurité, le représentant a toutefois rappelé que celui-ci joue un rôle essentiel en créant les conditions préalables au développement grâce au maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Pour le représentant, le Conseil doit jouer un rôle de premier plan dans la prévention de la course aux armements et dans la résolution des conflits par des moyens pacifiques, afin que davantage de ressources puissent être consacrées au développement « dans l’intérêt de l’humanité ». Il a jugé impératif que le Conseil accorde une importance plus grande à la lutte contre les causes profondes liées au développement dans l’origine des conflits et adopte une approche systémique pour promouvoir une paix et un développement durables et briser le cercle vicieux du conflit et de la pauvreté. À ces fins, le Conseil de sécurité doit travailler en étroite coordination avec la Commission de consolidation de la paix, les agences compétentes des Nations Unies ainsi qu’avec les institutions financières internationales et la communauté des donateurs, a-t-il souligné.
Enfin, le représentant a également jugé essentiel que le Conseil de sécurité accorde davantage d’attention à la réponse aux menaces émergentes et « non traditionnelles » qui pèsent à la fois sur le développement et la sécurité commune, notamment les changements climatiques et l’élévation du niveau de la mer.
M. HYUN WOO CHO (République de Corée) s’est félicité des progrès entrepris par son pays, rappelant qu’en l’espace d’une seule génération, la République de Corée a été en mesure de parvenir au développement économique et à l’approfondissement de la démocratie. L’expérience de la Corée démontre que la croissance économique et le développement de la démocratie se renforcent mutuellement, a analysé le représentant.
Toutefois, face aux crises mondiales multiformes actuelles, le fossé entre les pays se creuse dans plusieurs domaines, a fait remarquer le représentant, estimant que les pays en développement doivent désormais relever simultanément des défis complexes et interdépendants, alors que la réduction de l’écart de développement ne suffit plus pour parvenir à une paix durable. Après avoir fait part de préoccupations relatives à la crise climatique et à la fracture numérique, il a jugé nécessaire pour la communauté internationale de rester unie, avec les Nations Unies en son centre, afin d’apporter le soutien nécessaire aux pays en développement.
La République de Corée entend doubler encore l’an prochain l’augmentation de 21,3% de son budget d’Aide publique au développement enregistré cette année, en mettant l’accent sur l’éducation, la formation et les technologies vertes.
Le représentant a souligné le rôle vital du Conseil de sécurité et la nécessité d’une approche systématique et intégrée, pour s’attaquer aux multiplicateurs de conflit. Le Conseil devrait accorder une attention particulière à des défis tels que le changement climatique, l’intelligence artificielle et les technologies numériques, a-t-il ajouté. Il a aussi souligné la nécessité pour toutes les organisations de l’ONU, y compris le Conseil de sécurité, de travailler conjointement et de manière stratégique, en insistant tout particulièrement sur le rôle de la Commission de consolidation de la paix et du Fonds pour la consolidation de la paix dans la résolution des problèmes complexes existants. Il a ensuite plaidé en faveur du renforcement du lien entre questions humanitaires, développement et la paix, ainsi que l’élargissement du partenariat avec toutes les autres parties prenantes, y compris les institutions financières internationales, les organisations régionales, le secteur privé et la société civile.
M. HRVOJE ĆURIĆ HRVATINIĆ (Croatie)a notamment plaidé, face à la multiplication des crises, pour la mise en œuvre intégrale de l’état de droit. Le représentant a également vu dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ses objectifs un excellent cadre pour s’attaquer aux causes profondes des conflits. Pour la Croatie, les synergies entre le maintien de la paix, la consolidation de la paix et le développement durable devraient être utilisées de manière systémique, et la réalisation du Programme 2030 dépend du succès à maintenir la paix comme un bien public mondial.
La CCP se trouve dans une position unique pour relever les défis de la pérennisation et de la consolidation de la paix de manière intégrée, a poursuivi le représentant, qui a plaidé pour un renforcement de la CCP, afin d’accroître son efficacité. Celle-ci peut être améliorée aussi en renforçant les liens de la Commission avec les organisations régionales et sous-régionales, ainsi qu’avec les institutions financières internationales et régionales, a également estimé le représentant. À ses yeux, le Sommet de l’avenir en 2024 et la révision de l’architecture de consolidation de la paix en 2025 offriront des opportunités précieuses pour renforcer la CCP.
M. MARTHINUS CHRISTOFFEL JOHANNES VAN SCHALKWYK (Afrique du Sud), évoquant plusieurs pistes pour promouvoir le développement, a appuyé les projets à « effet rapide » renforcés par l’appui des communautés locales. D’après lui, la relation établie entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales demeure cruciale dans la résolution et la prévention des conflits, ainsi que dans les discussions portant sur le développement durable. C’est la raison pour laquelle l’Afrique du Sud a toujours estimé que les instances régionales et infrarégionales financières sont très bien placées pour fournir aux acteurs nationaux l’aide requise dans les situations de conflit ou faisant suite à un conflit. Le délégué a conclu en appelant à revoir le système de sécurité collective dans le cadre du Nouvel Agenda pour la paix.
M. MATEUS PEDRO LUEMBA (Angola) a appelé à répondre aux causes profondes des conflits et à intensifier le recours à la diplomatie préventive. Il a souligné l’acuité du défi du surendettement pour les pays en développement, obérant leurs perspectives économiques. Le délégué a appelé à une restructuration de l’architecture financière internationale, avant de plaider pour des investissements accrus dans les infrastructures et dans le secteur de l’éducation. Il a appelé à promouvoir l’égalité entre les sexes et la participation des jeunes. Il n’y a pas de développement possible sans atténuation des conséquences des changements climatiques, a conclu le délégué, en soulignant l’importance de la prochaine COP28.
M. ZENON NGAY MUKONGO (République démocratique du Congo) a estimé que le développement durable pour tous est un impératif dont on ne peut se passer, tant il contient les réponses aux défis multidimensionnels que rencontrent de nombreux pays. Pour cette raison, les efforts de développement durable doivent être collectifs, a plaidé le représentant, avant de présenter les mesures prises par son gouvernement au niveau national, notamment l’adoption d’un plan de développement local portant sur 145 territoires. Ce plan, à majorité financé par la République démocratique du Congo, ambitionne, à terme, de sortir 25 millions de Congolais de la pauvreté, a‑t‑il indiqué.
Sur le plan sécuritaire, le représentant a rappelé que son pays fait face à « l’occupation » d’une partie de son territoire. Cette véritable « agression » a déjà mis en errance plus de 2,4 millions de déplacés internes, dont 1,6 million autour de la ville de Goma, a‑t‑il signalé, avant d’appeler le Conseil de sécurité à mettre fin à cette situation, en tant qu’organe garant de la sécurité internationale. Il a dit attendre de ce débat des solutions pratiques pour faire le lien entre la paix et le développement, et permettre le retour de ces personnes déplacées chez elles.
Mme TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria) a rappelé l’impact considérable des conflits sur les civils, qui sont déplacés, perdent leur dignité, leurs moyens de subsistance ou les infrastructures essentielles pour leur subsistance. Pour remédier aux effets multiples de tels conflits sur les économies, « nous avons besoin d’actions de transformation concrètes, globales et solides », a déclaré la représentante. Elle a cité les mots de l’ancien Secrétaire général Kofi Annan selon lequel « les mauvaises performances économiques ou le développement inéquitable ont entraîné une crise économique quasi permanente pour certains États et exacerbé les tensions internes ».
La prévention et la résolution des conflits impliquent donc une série d’acteurs qui se renforcent mutuellement, a noté la représentante. Soulignant que les ressources naturelles et leur exploitation ont été un facteur majeur de tensions, elle a insisté sur l’importance de gérer de manière responsable ces ressources au profit de la population et sur le rôle que le Conseil de sécurité peut jouer s’agissant de l’exploitation des ressources naturelles en tant qu’une des causes profondes des conflits.
La représentante a ajouté à la liste de ces causes profondes celle de la prolifération des armes légères et de petit calibre et ses liens avec le terrorisme. Plus largement, elle a insisté sur le rôle d’un financement adéquat des activités de paix de l’Union africaine, des institutions régionales et des États africains. Rappelant enfin l’importance de l’agriculture dans le développement des pays de cette région, elle a appelé à la mobilisation des ressources et d’« investissements socialement responsables et écologiquement durables » pour s’attaquer à la pauvreté.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a souligné l’interdépendance entre la paix et le développement, en notant que la prospérité n’a pas encore été atteinte pour tous les peuples des Nations Unies, que les inégalités se creusent et que les progrès en matière de développement ont été mis à mal par la pandémie et les conflits. Pour le représentant, la faim et l’exploitation illégale des ressources font partie des principales causes des conflits. Il a appuyé les efforts de la Commission de consolidation de la paix, avant de remarquer toutefois que les efforts de développement sont vains lorsque les populations vivent sous occupation, comme en Palestine ou au Jammu-et-Cachemire.
Le représentant a appelé à reformer l’architecture financière internationale, à investir dans les infrastructures durables et à réduire le fossé numérique, entre autres pour avancer sur la voie du développement durable pour tous. À cet égard, il a signalé que l’initiative globale de développement lancée par la Chine, il y a trois ans, constitue un modèle de développement pour le Sud global.
M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a fait part de la vision et de la stratégie de son pays pour réaliser la paix et la prospérité dans le monde. À cet égard, il a souligné l’importance de mettre un terme au conflit israélo-palestinien. Le représentant a réaffirmé la position de principe de son pays concernant la situation tragique à Gaza, en condamnant le fait que des civils innocents soient tués. Après avoir appelé à mettre rapidement un terme à l’escalade en cours, il a rappelé que Bahreïn plaide en faveur d’un règlement des différends par la diplomatie et sur la base du droit international. De plus, l’une de ses priorités consiste à diffuser des valeurs de la tolérance et du dialogue interconfessionnel, lesquels sont des piliers essentiels pour garantir la sécurité, le développement et les droits humains. Le représentant a insisté sur l’importance de créer un environnement propice au dialogue et au libre-échange afin de garantir une meilleure stabilité économique tout en satisfaisant les aspirations des populations, ce qui requiert des efforts et des investissements accrus.
Mme CHRISTINA MARKUS LASSEN (Danemark), qui s’exprimait également au nom de la Finlande, de l’Islande, de la Norvège et de la Suède, a fait remarquer que les pays nordiques reconnaissent depuis longtemps le lien entre le développement durable, la paix et le respect des droits humains. Déplorant la multiplication des conflits armés, elle a appelé à une action urgente, dirigée contre les facteurs sous-jacents de l’insécurité, dans le cadre de la réalisation des objectifs de développement durable. Il n’y a pas de paix pérenne sans développement, ni de paix et de développement sans droits humains, a-t-elle poursuivi, avant d’égrener quelques recommandations. En premier lieu, la représentante a préconisé de lutter contre les inégalités entre les nations, soulignant les répercussions néfastes des changements climatiques, particulièrement sur les pays les moins avancés. Ces derniers sont responsables de moins de 4% des émissions mondiales, mais paient le plus fort tribut à la crise climatique, a-t-elle déploré, estimant que la recherche de solutions relève du devoir conjoint de tous les pays. En second lieu, elle a rappelé que le Nouvel Agenda pour la paix mentionne la nécessité d’engagements multidimensionnels pour pérenniser la paix et prévenir les conflits. La représentante a ensuite appelé à la réduction de la dette des pays en transition, sans quoi ils ne pourraient pas concrétiser ces programmes. Enfin, elle a réaffirmé l’engagement des pays nordiques en faveur de l’inclusion, notamment des femmes, et lancé un appel pour opérationnaliser de manière complète le lien entre l’action humanitaire, la paix et le développement.
M. ISSA KONFOUROU (Mali) a indiqué que son pays a connu une expérience « non réussie » de gestion de crise par la communauté internationale. « En effet, après plus d’une dizaine d’années de présence de la mission des Nations Unies et d’autres puissances étrangères dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Mali, la situation sécuritaire dans mon pays s’est plutôt largement dégradée », a-t-il déploré. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement malien a demandé, en juin 2023, le retrait, sans délai, de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) face au constat de son échec à protéger les personnes et les biens et à aider le pays à recouvrer son autorité sur l’ensemble du territoire national. Le processus de retrait de la Mission est en cours et nous souhaitons qu’il soit terminé le plus tôt possible, a déclaré le délégué. Il a enfin indiqué que l’État du Mali s’attelle actuellement à la sécurisation des zones ainsi libérées, au retour de l’administration, des services sociaux de base, des réfugiés et des déplacés internes. « Nous sommes ouverts à tous les partenariats à cet égard, en vue de consolider la paix durable et de relancer le développement », a-t-il conclu.
M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie) a rappelé l’importance de la réalisation des ODD et l’interconnexion des défis auxquels doit faire face la communauté internationale. Il a indiqué que son pays prend part à cette quête d’objectifs partagés, comme l’atteste son engagement à débourser 1,7 milliard de dollars australiens supplémentaires au titre de l’aide publique au développement au cours des cinq prochaines années. L’Australie a en outre réaffecté 3 milliards de dollars américains de ses droits de tirage spéciaux pour soutenir les efforts de développement des pays vulnérables, a ajouté le représentant. De plus, le pays travaille à l’élaboration d’un indice de vulnérabilité et soutient ses partenaires de la région Indo-Pacifique pour bâtir des États efficaces et responsables de leur propre développement, a-t-il expliqué.
Déplorant l’aggravation des conflits, l’Australie a rappelé que le Nouvel Agenda pour la paix vise à remédier au déclin de la confiance par le biais d’un renouveau démocratique. À cette aune, l’Australie promeut et protège les droits humains dans ses efforts bilatéraux et multilatéraux, a assuré le représentant. Elle est également fière de figurer parmi les 10 premiers donateurs du Fonds pour la consolidation de la paix et attend avec impatience de redevenir membre de la Commission de la consolidation de la paix en 2025. Enfin, a-t-il conclu, l’Australie espère devenir membre élu du Conseil de sécurité en 2029 pour démontrer à quel point elle chérit la paix et le développement.
Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a dénoncé l’occupation comme une entrave à la paix et au développement durable, objectifs qui ne peuvent se concrétiser dans une situation de colonialisme. Évoquant à cet égard les événements en cours en Palestine, elle a accusé Israël d’y commettre des crimes de guerre et un génocide. Face à cette situation, elle a exhorté le Conseil de sécurité à s’acquitter de ses obligations morales et juridiques et à mettre un terme à l’escalade. Elle a préconisé des efforts internationaux inclusifs et axés sur la prévention, en tenant compte des causes profondes des conflits, y compris régionaux.
La représentante a mentionné la participation de son pays à plusieurs efforts bilatéraux et multilatéraux, y compris dans le cadre de l’ONU. Elle a exprimé l’espoir que nul ne soit marginalisé et que la justice soit accessible à tous, conformément à l’ODD n° 15. Elle a également rappelé qu’en mars 2023, le Programme d’action de Doha en faveur des pays les moins avancés a souligné l’impossibilité de réaliser le développement durable sans paix et sécurité, et, réciproquement, le rôle du développement durable pour atténuer les facteurs de conflit et diminuer les risques. Enfin, elle a lancé un appel au dialogue et à l’investissement dans la consolidation de la paix, via le renforcement du rôle des femmes et de la jeunesse, conformément au Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.
Mme MARKOVA CONCEPCIÓN JARAMILLO (Panama) a constaté une augmentation du nombre de personnes ayant dû quitter leur foyer à la recherche de meilleures conditions de vie. Cette situation, a-t-elle expliqué, n’épargne pas son pays puisque plus de 474 565 personnes ont transité par le Panama cette année, dont 22% étaient des mineurs et des nourrissons, ce qui est sans précédent. Observant que les sociétés où les niveaux de pauvreté sont élevés ont tendance à être plus sujettes à l’instabilité et aux conflits, elle a affirmé que la protection des droits humains et la promotion du développement sont des conditions primordiales pour lutter contre ces défis, lesquels ne peuvent pas être résolus efficacement par le recours à la force. Dans cette « danse complexe » entre le développement et la paix, la représentante a jugé vital d’identifier et de renforcer le lien entre des institutions étatiques inclusives et une démocratie effective.
Les exclusions systémiques peuvent devenir un terreau fertile pour la méfiance et le ressentiment, divisant les communautés et affaiblissant le tissu social, a prévenu la représentante, en insistant sur l’importance du renforcement institutionnel pour prévenir les conflits potentiels. À cet égard, elle a mis en exergue le rôle à la fois de l’ONU et du Conseil de sécurité dans la promotion d’institutions étatiques inclusives et efficaces, via la fourniture d’une assistance technique et le renforcement des capacités. Invitant le Conseil à prévoir un tel appui dans les mandats des opérations de paix, elle estimé que cela exige en parallèle un suivi et une redevabilité concernant l’utilisation des ressources.
M. ZÉPHYRIN MANIRATANGA (Burundi) a reproché aux Nations Unies de n’avoir pas toujours été à la hauteur pour mobiliser les ressources financières nécessaires à la relance économique des pays en situation d’après-conflit, ajoutant que les programmes de consolidation de la paix n’avaient pas non plus toujours été suffisamment concrets et avaient manqué des liens nécessaires entre stabilité et développement communautaires. Il a, de même, reproché aux institutions financières internationales de ne plus répondre à la conjoncture du moment, d’enserrer les États souhaitant reconstruire leur tissu sociopolitique et économique dans des schémas préétablis inefficaces, et de ne pas réussir à mobiliser les financements pour le développement des pays post-conflit.
Le représentant a donc plaidé pour une nouvelle génération de missions spéciales qui ne se limiterait plus à l’action humanitaire mais établirait directement un pont entre la paix et le développement humain dans les pays post-conflit, en appuyant suffisamment les programmes nationaux de reconstruction, le soutien au développement ne produisant des effets bénéfiques que lorsqu’il est réfléchi et se fonde sur les réalités nationales. Il a également mis l’accent sur la nécessité de réduire la fracture numérique aux fins du développement. Il a appelé le Conseil de sécurité à vivement recommander l’appui au développement pour la prévention des conflits et la stabilisation des régions post-conflit. Il a, enfin, jugé indispensable de sortir des « sentiers battus du développement imposés à partir de Bretton Woods », de déconstruire l’ordre économique et financier international actuel et d’en bâtir un nouveau, capable de répondre à la conjoncture internationale actuelle et d’apporter une valeur ajoutée au développement communautaire.
Mme TATIANA BÁRBARA MUÑOZ PONCE (Bolivie) s’est dite convaincue que la paix et la sécurité internationales ne seront possibles que lorsqu’il y aura une justice sociale et lorsque tous les êtres humains, parce qu’ils sont êtres humains, a-t-elle insisté, auront droit à une éducation et à des soins de santé de qualité, un logement digne et un accès aux services de base. Il faut donc une réflexion globale sur ce sujet, car il est inconvenable qu’alors que des millions de femmes, d’enfants, de jeunes et d’adultes cherchent à se nourrir, des milliards de dollars sont dépensés pour fabriquer des armes et faire la guerre. Il faut travailler avec un sentiment d’urgence, pour qu’un jour, au lieu de faire des missions de paix, on se mette d’accord pour déployer, à la demande des États, des missions de développement.
La représentante a également déclaré qu’alors que l’on avance vers le renforcement de la coopération en lieu et place des intérêts hégémoniques, il faut moins dépenser pour faire la guerre, renforcer les capacités productives des États et honorer les engagements existants en matière de financement du développement. Les peuples du monde pourront envisager un autre avenir le jour où les efforts de coopération internationale se fonderont sur la complémentarité, la réciprocité, la reconnaissance des responsabilités historiques et la fin des mesures coercitives. Il faut travailler tout de suite, y compris pour réformer le système international, a conclu la représentante.
Mme JOANNA SYLWIA SKOCZEK (Pologne) a déclaré que l’ONU et le Conseil de sécurité devraient être à l’avant-garde des actions visant à renforcer la résilience aux risques pesant sur la sécurité internationale. Le maintien de la paix contribue de manière essentielle au continuum de la paix dans toutes ses dimensions, de la prévention et du règlement des conflits au relèvement post-conflit, a-t-elle ajouté.
Pour la représentante, les soldats de la paix jouent dans cette perspective un rôle central dans la réalisation et la facilitation des transitions, ainsi que dans la préparation du terrain aux acteurs de la consolidation de la paix. Ainsi, le retrait ou la réduction de la taille des opérations de maintien de la paix de l’ONU comme des missions politiques spéciales constituent-ils un défi sérieux en termes de garantie du « continuum de la paix ».
La résolution du Conseil de sécurité de 2020 sur l’examen de l’architecture de consolidation de la paix a confirmé qu’une consolidation de la paix efficace nécessite un engagement multi-piliers de l’ensemble du système des Nations Unies, et doit être intégrée dans diverses actions de l’ONU à toutes les étapes du conflit, a rappelé la représentante. C’est pourquoi elle a insisté sur l’importance que les considérations liées à la transition et à la consolidation de la paix fassent partie du mandat initial de chaque mission ou opération. Elle a conclu en appelant les États Membres à veiller à ce que la paix et la stabilité demeurent au cœur du programme de développement mondial.
M. JORGE EDUARDO FERREIRA SILVA ARANDA (Portugal) a appelé à faire le lien entre la paix, le développement et les droits humains. De manière directe, a-t-il dit, car la connectivité sera un élément important pour libérer le potentiel de développement de tous les pays, « qu’il s’agisse de connectivité via les infrastructures de transport mais aussi de connectivité énergétique et numérique ». Pour cela, le représentant a souligné la nécessité d’améliorer la numérisation des mécanismes d’alerte précoce afin de rendre plus efficaces les efforts de prévention des conflits, ceux-ci devant être combinés au traitement des données qui permettent de mieux identifier les opportunités de développement. Il a en outre attiré l’attention sur l’importance de la composante sociale du développement, la jugeant essentielle pour garantir la résilience des communautés et favoriser l’autonomisation économique des femmes et des jeunes, indispensable à la croissance d’une classe moyenne émancipée et prospère dans les pays en développement. Le représentant a par ailleurs indiqué que le Portugal et Cabo Verde ont récemment conclu un accord visant à convertir leur dette en investissement climatique. Il s’agit d’une solution financière innovante, a-t-il précisé, d’une nouvelle façon d’envisager le financement du développement.
M. MADHU SUDAN RAVINDRAN (Inde) a fait observer que pour avancer en même temps le développement et la paix, la communauté internationale s’est réunie pour articuler les 17 objectifs de développement durable. Nous devons garantir l’indivisibilité de ces objectifs et travailler à l’unisson à leur réalisation, a insisté le représentant. La paix étant insaisissable et le développement, un rêve lointain si la pénurie de ressources persiste, l’Inde a, dans divers forums, surtout maintenant qu’elle préside le G20, appelé à la réforme des institutions financières internationales. Il nous faut, s’est expliqué le représentant, un financement transparent et équitable et être vigilant face au danger d’un financement non durable qui conduit au cercle vicieux de la dette.
Arguant que sans représentation adéquate, la voix du Sud est perdue ou oubliée, il a estimé qu’une ONU adaptée aux aspirations et aux besoins du XXIe siècle n’est possible que par un multilatéralisme réformé, en particulier par l’élargissement des deux catégories de membres du Conseil de sécurité. Une vision globale de la sécurité internationale doit englober l’interdépendance des trois piliers du système des Nations Unies: la paix et la sécurité, le développement, et les droits humains. Cela signifie que le Conseil de sécurité ne doit pas tout assumer car la sécurité est multidimensionnelle. En effet, l’implication du Conseil de sécurité dans tous les domaines, y compris ceux qui relèvent d’autres organes de l’ONU, n’est pas souhaitable.
M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) a plaidé en faveur d’institutions multilatérales de développement fournissant des financements à grande échelle et contribuant à l’établissement d’un système financier international plus juste et plus équitable. À cet égard, le représentant a appelé toutes les parties concernées à fournir un effort significatif et décisif pour trouver une solution systémique à la crise de la dette. C’est une question de vie ou de mort, a-t-il insisté.
Le représentant a estimé que le Conseil de sécurité devait trouver des solutions à l’impasse croissante qui affecte son efficacité, son autorité et sa légitimité, lesquelles ont des conséquences extrêmement négatives pour la paix et la sécurité dans de nombreuses régions du monde. En outre, il a affirmé que le Conseil devrait surveiller et exiger la mise en œuvre cohérente de ses résolutions, déplorant des résolutions non respectées ou encore des efforts de médiation sapés, ayant abouti à des conflits qui demeurent non résolus et risquent de s’envenimer.
La menace terroriste se métastase, a alerté le représentant, qui a aussi dénoncé une « épidémie de coups d’État » en Afrique, reprenant les propos du Secrétaire général de l’ONU. S’il a reconnu que les opérations de maintien de la paix des Nations Unies ont fait leurs preuves, sauvant de nombreuses vies, il a également jugé nécessaire, face à la nature changeante des conflits, de mettre en place des opérations d’imposition de la paix, dotées d’un mandat solide, financées par les contributions des Nations Unies et équipées de manière adéquate.
Selon M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce), le développement durable est entravé par les incertitudes et les divisions géopolitiques. Or ce développement est lié à la paix dans un contexte marqué par l’aggravation de la violence, l’urgence climatique et les besoins humanitaires accrus. Rappelant que les inégalités et la pauvreté conduisent souvent aux conflits et à l’instabilité politique, il a préconisé de s’attaquer à la réalisation des objectifs de développement durable. On ne peut pas imaginer une priorité plus élevée que la vie humaine, a-t-il poursuivi, évoquant le demi-millier de femmes qui meurent chaque jour de complications liées à leur grossesse et mentionnant un projet de son pays pour réduire le taux de mortalité maternelle. Il a également salué la stratégie globale de l’Union européenne pour mobiliser des investissements en faveur des pays partenaires, afin de favoriser la transition numérique, le secteur du transport ou celui de l’éducation. Enfin, il a rappelé que le multilatéralisme a toujours été et qu’il reste l’outil le plus efficace pour maintenir la paix internationale. Les femmes et les filles doivent être placées au cœur du processus, a-t-il conclu.
Déplorant la situation des pays les moins avancés (PMA) ou en développement, M. MD RAFIQUL ALAM MOLLA (Bangladesh) s’est alarmé du manque de financement des objectifs de développement durable. Il est donc essentiel d’intégrer le développement dans toutes les politiques du système des Nations Unies, tout en soutenant des initiatives similaires au sein des institutions de Bretton Woods et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Les cadres financiers internationaux devraient aller au-delà des analyses coût-avantage traditionnelles, pour proposer des approches novatrices. Soulignant le rôle des opérations de paix, le délégué a estimé que le Conseil de sécurité a un rôle essentiel à jouer, en intensifiant les activités de consolidation de la paix dès le début d’une opération.
Abordant des questions transversales, le délégué s’est alarmé du tiers de la population mondiale toujours dépourvu d’accès à Internet. C’est une « exclusion sociale des temps modernes », s’est-il ému, avant de souligner, face aux souffrances inégalées engendrées par les effets des changements climatiques, la nécessité urgente de mettre en œuvre l’agenda des pertes et dommages et de garantir un financement adéquat de l’action climatique.
M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a commencé par contester les propos de la Fédération de Russie, qui au lieu d’assumer son sentiment impérialiste, a avancé un tas de fausses raisons pour se justifier et rejeter la faute sur la victime. La prétendue expansion de l’OTAN en Ukraine est un mensonge pur et simple car lorsque la tentative d’annexion de la Crimée a commencé, en février 2014, l’Ukraine ne cherchait nullement à adhérer à l’OTAN. Elle bénéficiait alors d’un statut hors bloc, inscrit dans sa législation, auquel elle n’a renoncé que 10 mois plus tard, en décembre 2014, en réponse à l’occupation illégale de la Crimée et du Donbass. Le Président Vladimir Putin, a accusé le représentant, cherche à camoufler le néocolonialisme et le néo-impérialisme de la Russie sous le pilier du développement puisqu’il défend l’idée que le développement, à l’exception de celui des grandes puissances, ne sera possible que si l’on oubliait le principe de l’égalité souveraine et que l’on se pliait aux desiderata des grands voisins.
Le développement sera impossible tant que l’agression contre la souveraineté et l’indépendance des autres États sera tolérée, en particulier par le Conseil de sécurité. La solution, a dit le représentant en parlant de son pays, ne peut être trouvée en persuadant la partie qui se défend de cesser sa résistance et de faire des concessions à l’agresseur. Le comportement agressif de la Russie sape la capacité de l’Ukraine à se concentrer sur la réalisation des ODD. La lutte contre ces schémas agressifs du Kremlin passe par la défaite de la Russie en Ukraine, a tranché le représentant.
Profondément préoccupé par les tendances mondiales et le scénario géopolitique actuels, M. CARLOS EFRAÍN SEGURA ARAGÓN (El Salvador) a jugé impératif de progresser dans le respect des engagements internationaux dans le domaine du développement durable, afin que la prévention puisse être au centre des efforts; d’investir dans des politiques et des programmes sociaux qui favorisent l’inclusion, et de fournir les ressources financières nécessaires à la consolidation de la paix. Il est tout aussi indispensable d’analyser de nouvelles façons de renforcer le lien intrinsèque entre la paix et le développement durable, en fonction des particularités et des besoins de chaque pays, a-t-il déclaré. Le délégué a proposé que l’examen de cette question par le Conseil devienne périodique, systématique et lorsque cela est nécessaire, en coordination avec d’autres organes onusiens. Il a expliqué que, dans le cadre de l’examen national volontaire de la réalisation des objectifs de développement durable en 2022, El Salvador avait mis en évidence des progrès substantiels dans les cibles et les indicateurs liés à la paix, à la justice et à des institutions fortes.
Il a relevé que la note d’orientation du Secrétaire général sur le Nouvel Agenda pour la paix reconnaît l’importance d’envisager la paix sous l’angle du développement durable et des droits humains; et recommande de fournir un financement plus durable et prévisible aux efforts de consolidation de la paix, afin de soutenir les stratégies nationales de prévention visant à s’attaquer aux différents facteurs de violence et de conflit dans les sociétés. Invitant à la mise en œuvre de la résolution 76/305, El Salvador s’est vivement inquiété des défis persistants en termes de financement suffisant, prévisible et durable pour la consolidation de la paix.
M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a déclaré d’emblée que le Conseil de sécurité n’est pas l’organe compétent pour traiter des questions liées au développement, tout en admettant que ses décisions dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales peuvent avoir un impact positif sur ledit développement. Parfois, les décisions ou l’absence de décision du Conseil peuvent également avoir des conséquences négatives sur le bien-être et l’avenir de nations, a-t-il souligné, en mettant l’accent sur le fait que ce débat ouvert offre une occasion privilégiée de souligner l’importance du développement inclusif dans la construction de sociétés justes, équitables et pacifiques, en tant que condition fondamentale pour prévenir, traiter et surmonter les conflits et la violence. Il faut aussi comprendre, a-t-il précisé, qu’il n’y a pas de modèle unique de développement et que chaque nation est libre de décider souverainement de son propre destin et de sa propre vision.
S’agissant des causes sous-jacentes des déséquilibres politique, économique et social de l’ordre mondial actuel qui génèrent des tensions, créent et prolongent les conflits, notamment celles résultant de situations héritées du colonialisme, il a cité le cas de la Palestine. Bien qu’il soit évident que le colonialisme et l’occupation étrangère font partie des causes profondes de ce conflit prolongé et douloureux, le Conseil de sécurité reste paralysé par les États-Unis, principal partenaire et complice des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, de la politique d’extermination et de génocide de la Puissance occupante.
M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a insisté sur la nécessité de la coopération internationale pour résoudre les problèmes internationaux et relever les défis de ce monde. Ce qu’il faut, c’est épargner au monde des politiques dénuées de tout réalisme et qui ne s’inquiètent pas de leurs conséquences sur l’économie et les personnes, a-t-il dit.
Le représentant a ensuite cité quelques-unes des initiatives et engagements pris par son pays sur le plan international, notamment en ce qui concerne la sécurité alimentaire, à laquelle, a-t-il rappelé, l’Arabie saoudite a consacré près de 2 milliards de dollars. Il a également annoncé la création d’une organisation mondiale de l’eau, dont le siège se trouvera à Riyad.
M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka), faisant le bilan des menaces fragilisant nombre d’États, a rappelé que les pays les plus pauvres utilisent 14% de leurs recettes pour payer les intérêts de leur dette, soit quatre fois plus que les pays développés. En l’état, le système financier international est tel que, plus la situation d’un État est difficile, moins il est susceptible d’obtenir une aide financière, et ceci risque d’emporter certains pays dans un cercle vicieux, a fait observer le représentant, qui s’en est alarmé. Se félicitant que la situation économique de son pays ait pu être stabilisée- avec l’aide de ses partenaires -après les turbulences de l’année passée, le représentant a souligné l’importance de la réforme du système financier international, qu’il a présentée comme un impératif mondial.
L’aide internationale octroyée via les instances multilatérales doit être apportée quand un pays en a besoin pour son relèvement et non quand il est déjà au bord de l’effondrement, a affirmé le représentant. Guerres, insécurité, changements climatiques et perte de biodiversité touchent les pays en développement de manière accrue et ce, alors que la plupart d’entre eux ne sont pas responsables de ces défis, a-t-il aussi déploré. Pourtant, a-t-il assuré, les efforts communs de développement peuvent aider à créer des sociétés stables et résilientes, mais cela nécessiterait une réelle coopération. La fin de la pauvreté n’est pas une question de charité, mais bien de justice, a conclu le représentant.
M. NACIM GAOUAOUI (Algérie) a estimé que la pérennisation de la paix nécessite une démarche intégrée et globale qui passe par le développement inclusif et des réponses aux causes sous-jacentes des conflits. Pour le représentant, la réalisation des objectifs de développement durable est la meilleure réponse aux crises et aux conflits mais, a-t-il souligné, cela suppose un appui aux gouvernements des pays en développement. Il a également mis en exergue l’importance du financement de la consolidation de la paix, notamment à travers le Fonds pour la consolidation de la paix.
Le représentant a plaidé en faveur d’une accélération de la mise en œuvre du Programme 2030, ajoutant toutefois qu’il était pour cela primordial que les pays développés respectent leurs engagements en termes d’aide publique au développement et que le fonds pour les pertes et les dommages mis en place au profit des pays victimes des changements climatiques soit opérationnalisé. Pour sa part, l’Algérie a décidé en 2020 d’affecter un milliard de dollars au financement de projets de développement en Afrique, son représentant précisant qu’il s’agissait de mettre l’accent sur l’intégration continentale. En outre, l’Algérie a annulé la dette de 16 pays en développement au cours de la décennie écoulée, pour un montant de plus d’1,5 milliard de dollars, ce qui, a ajouté le représentant, s’inscrit dans une volonté de mettre l’Afrique sur une voie durable du développement.
M. AMARA SHEIKH MOHAMMED SOWA (Sierra Leone) a estimé qu’en raison des incertitudes mondiales et des crises complexes et interconnectées actuelles, il devient de moins en moins plausible d’éradiquer l’extrême pauvreté et réaliser le Programme 2030. De surcroît, les pays les moins avancés voient peser sur eux le fardeau de la dette, lequel compromet leur capacité à réaliser des investissements suffisants pour atteindre les objectifs de développement durable, a déploré le représentant. Il a donc souligné la nécessité, pour les pays développés, de s’associer aux PMA et aux pays en situation de fragilité afin de construire des sociétés pacifiques et prospères en renforçant l’aide au développement, le financement de la lutte contre les changements climatiques et les transferts de technologie.
Après avoir souligné l’importance de maintenir et de mettre en œuvre les engagements pris dans le cadre du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement, le représentant a jugé impératif de renforcer la coopération mondiale pour faire face au fardeau croissant de la dette publique, envisager l’annulation de la dette et allouer des droits de tirage spéciaux. Il a ensuite appuyé plusieurs propositions du Secrétaire général en la matière, avant de faire état de ses préoccupations face à la fracture technologique et numérique. Cette dernière, a-t-il estimé, creuse les inégalités, et il a insisté sur la nécessité d’accroître la collaboration dans les domaines de la science et de la technologie, afin de créer un écosystème fertile pour le développement et l’innovation.
Se penchant sur le lien entre la paix, le développement et l’aide humanitaire, le représentant a souligné l’importance d’un financement adéquat pour soutenir le Fonds pour la consolidation de la paix et le rôle des institutions financières internationales. En outre, les partenaires du développement doivent accroître et respecter leurs engagements en matière d’aide publique au développement, garantir des politiques commerciales équitables et assurer un redressement durable pour tous les pays, a plaidé le représentant, qui a jugé urgente la levée des barrières commerciales et l’accroissement de l’aide au commerce.
M. OUMAROU GANOU (Burkina Faso) a dit ne pas perdre de vue que si le terrorisme a été introduit dans son pays par des nébuleuses terroristes, celles-ci ont profité de conditions internes favorables comme le chômage des jeunes et la frustration des populations du fait de systèmes de gouvernances non vertueuses. C’est pourquoi, a expliqué le représentant, les autorités de la transition ont pris des initiatives pour améliorer la gouvernance et promouvoir le développement à la base, citant la refondation de l’État, la reconstruction d’infrastructures, la promotion de l’entreprenariat communautaire et la recherche de l’autosuffisance alimentaire.
Mettant l’accent sur la coopération et le partenariat au niveau régional face à une communauté de défis, le représentant a célébré le renforcement de la coopération entre son pays, le Mali et le Niger avec la création de l’Alliance des États du Sahel, présentée comme la concrétisation d’une volonté de créer un cadre permanent de défense collective et d’assistance mutuelle. Il a ensuite lancé un appel à l’assistance internationale pour renforcer sa capacité à lutter contre les activités criminelles et terroristes et promouvoir la coopération régionale pour le développement. Estimant que le continuum de la paix à lui seul ne peut pas créer une paix durable si les conditions qui ont mené au conflit restent inchangées, le représentant a appelé à accompagner les solutions politiques par des investissements à long terme dans un développement équitable et durable. Il a vu dans le Fonds pour la consolidation de la paix un outil important à cet égard, tout en demandant des financements plus prévisibles et flexibles. Enfin, il a appelé à tirer les leçons du passé, estimant que le sous-développement, les inégalités et la mauvaise gouvernance « sont des prédicteurs fiables de conflits ».
Mme CECILIA A. M. ADENG (Soudan du Sud) a reconnu les liens complexes entre les questions de paix et de développement, préconisant à ce titre une approche globale. Elle a souligné l’urgence de s’attaquer aux causes profondes des conflits et de favoriser le développement durable. Le Soudan du Sud, a poursuivi la représentante, a vécu les conséquences dévastatrices de la guerre. À la lumière des chiffres du rapport sur les tendances mondiales 2022 du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, elle a estimé qu’il fallait revoir les stratégies et les approches de maintien de la paix. Elle a notamment considéré qu’une telle voie vers la paix et la stabilité est décrite dans le Programme 2030.
La représentante a ensuite émis une série de recommandations. Elle a d’abord préconisé des investissements dans les infrastructures critiques, pour améliorer les compétences de la main d’œuvre locale à travers la formation et pour créer des emplois, particulièrement à l’intention des jeunes. Elle a également appelé de ses vœux un développement en pleine conscience des répercussions sur les dynamiques locales, afin de promouvoir la cohésion et d’éviter l’exacerbation des tensions. Appelant à davantage d’assistance internationale en termes d’aide financière et d’expertise technique, elle a souligné l’importance du transfert de technologies pour favoriser l’inclusion numérique. Enfin, elle a souhaité voir se mettre en place une synergie plus étroite entre les opérations de maintien de la paix et les efforts de développement.