9388e séance – après-midi  
CS/15369

République centrafricaine: le Conseil de sécurité reconduit pour un an l’embargo sur les armes avec une dérogation pour les forces de sécurité

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, reconduit jusqu’au 31 juillet 2024 le régime de sanctions s’appliquant en République centrafricaine (RCA), tout en décidant que l’embargo sur les armes qui en fait partie continuera de ne pas s’appliquer à la fourniture, à la vente ou au transfert d’armes et de matériel connexe aux forces de sécurité centrafricaines.

En adoptant par 13 voix pour et 2 abstentions –Chine et Fédération de Russie– la résolution 2693 (2023), le Conseil a également prorogé jusqu’au 31 août 2024 le mandat du Groupe d’experts associé à ce Comité. Condamnant par ailleurs les attaques commises par des groupes armés de la Coalition des patriotes pour le changement, il demande au Groupe d’experts d’envisager de proposer de nouveaux exposés des motifs ou de les actualiser afin qu’ils puissent être ajoutés à la Liste. 

Le Conseil se déclare particulièrement préoccupé par les informations selon lesquelles des réseaux transnationaux de trafiquants continuent de financer et d’approvisionner les groupes armés en République centrafricaine. Notant en particulier l’emploi de plus en plus fréquent d’engins explosifs improvisés et de mines terrestres, il demande au Groupe d’experts de prêter une attention particulière à l’analyse de ces réseaux et des menaces liées aux engins explosifs.

La Fédération de Russie s’est abstenue de voter en faveur de la résolution parce qu’elle soutient les demandes « répétées et absolument justifiées » du Gouvernement centrafricain de lever intégralement l’embargo sur les armes, dans la mesure où il entrave les efforts de Bangui pour lutter contre les milices illégales, sans pour autant prévenir la fourniture d’armes à ces mêmes milices.  « Elles ont reçu ces armes tout au long des dix ans d’existence du régime de sanctions, et son maintien ne changera rien à ce problème », a assuré le représentant, dont la position a été reprise par la Chine. 

Dénonçant le « cynisme » de la « délégation porte-plume », comme d’un certain nombre d’autres membres du Conseil de sécurité, la délégation russe a assuré que ce n’était un secret pour personne que les régimes de sanctions sont instrumentalisés par certains États pour exercer des pressions politiques « sous l’égide de l’ONU ».  Reste qu’au moment du vote, elle a jugé nécessaire de tenir compte de la position des membres africains du Conseil de sécurité, a nuancé son représentant.  Parmi eux, le Ghana a rappelé qu’à terme, tout régime de sanctions a vocation à être levé.

Le Royaume-Uni a en revanche insisté sur le fait que l’exigence en matière de notifications est importante pour contrôler les flux d’armes à travers le pays, lesquels profitent aux mercenaires du groupe Wagner, auteurs de véritables atrocités avérées en RCA.  La délégation britannique a encouragé le Gouvernement centrafricain à redoubler d’efforts en matière de réforme du secteur de la sécurité et de gestion des armes et des munitions.  La résolution demande d’ailleurs à Bangui, d’ici au 15 mai 2024, un rapport sur les progrès accomplis à cet égard.

La Ministre centrafricaine des affaires étrangères, de la Francophonie et des Centrafricains de l’étranger, Mme Sylvie Valérie Baïpo-Témon, a remercié les deux membres du Conseil qui se sont abstenus lors du vote, « par respect de la souffrance du peuple centrafricain ».  Elle a exprimé son incompréhension devant un texte « confus », qui ignore la réalité centrafricaine et constitue un « véritable affront » pour son pays.  Cette résolution continue d’être intitulée « Embargo sur les armes en République centrafricaine », alors qu’elle devrait plutôt s’appeler « Embargo sur les groupes armés ».

« Pourquoi l’appel de détresse du Gouvernement centrafricain face à l’agression de rebelles étrangers n’a pas rencontré le même écho que celui de l’Ukraine? », s’est-elle demandé.  Face à l’« incohérence » de ce texte et la politique de deux poids, deux mesures dont est victime son pays, la Ministre a considéré qu’il était temps de réfléchir à une « nouvelle organisation plus crédible »  au sein de laquelle les droits de tous seront respectés.

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 

Texte du projet de résolution (S/2023/360)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures, les déclarations de sa présidence et les déclarations à la presse sur la situation en République centrafricaine,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République centrafricaine, et rappelant l’importance des principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale,

Se félicitant des efforts faits par les autorités centrafricaines, en coordination avec leurs partenaires régionaux et internationaux, pour faire avancer la réforme du secteur de la sécurité, notamment le déploiement en cours des forces de défense et de sécurité centrafricaines, les encourageant à poursuivre et à renforcer l’application de leur plan national de défense, le concept d’emploi des forces et la politique nationale de sécurité, et reconnaissant que les autorités centrafricaines ont besoin de former et d’équiper de toute urgence leurs forces de défense et de sécurité pour être en mesure d’apporter une réponse proportionnée aux menaces contre la sécurité de l’ensemble des citoyens de la République centrafricaine et pour protéger et promouvoir les droits humains et prévenir les violations et les atteintes,

Réaffirmant que l’application de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine (« l’Accord de paix ») demeure le seul mécanisme en vue de parvenir à une paix et une stabilité durables en République centrafricaine, accueillant avec satisfaction la dissolution officielle récente de deux groupes armés et des factions de trois autres groupes armés qui sont signataires de l’Accord de paix, exhortant toutes les parties à respecter le cessez-le-feu annoncé par le Président Touadéra le 15 octobre 2021, constatant avec inquiétude que certains signataires de l’Accord de paix ne respectent toujours pas leurs engagements, exhortant tous les signataires à appliquer l’Accord de paix de bonne foi et sans délai, invitant instamment toutes les parties prenantes en République centrafricaine à engager un dialogue afin de poursuivre les progrès accomplis en vue de parvenir à la paix, à la sécurité, à la justice, à la réconciliation, à l’inclusion et au développement, et soulignant la nécessité pour les partenaires internationaux d’épauler l’application de l’Accord de paix par la voie de la feuille de route adoptée par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs à Luanda le 16 septembre 2021 et de continuer à coordonner leur action avec celle du Gouvernement centrafricain en vue de l’instauration d’une paix et d’une stabilité durables en République centrafricaine,

Condamnant les activités criminelles transfrontières, telles que le trafic d’armes, le commerce illicite, l’exploitation illégale et le trafic de ressources naturelles, notamment de l’or, des diamants et du bois d’œuvre, et le trafic d’espèces sauvages, ainsi que le transfert illicite, l’accumulation déstabilisatrice et le détournement d’armes légères et de petit calibre, qui menacent la paix et la stabilité de la République centrafricaine, condamnant également l’utilisation de mercenaires et les violations du droit international humanitaire et des droits humains et les atteintes à ces droits commises par ces derniers, encourageant le Gouvernement centrafricain à continuer de renforcer la collaboration établie avec les pays voisins pour sécuriser ses frontières et les autres points d’entrée et empêcher ainsi l’entrée sur son territoire de combattants armés, d’armes et de minerais provenant de zones de conflit, soulignant qu’il importe que les autorités centrafricaines achèvent et appliquent, en coopération avec les partenaires concernés, une stratégie de lutte contre l’exploitation illégale et le trafic des ressources naturelles, et encourageant le Gouvernement centrafricain et les pays voisins à travailler ensemble pour sécuriser leurs frontières,

Se déclarant vivement préoccupé par la situation humanitaire en République centrafricaine, se déclarant préoccupé par le conflit qui a éclaté au Soudan et par ses incidences sur les conditions de sécurité et la situation humanitaire en République centrafricaine, et exhortant toutes les parties aux conflits à respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire, en particulier à autoriser et à faciliter l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire à la population dans le besoin sur l’ensemble du territoire centrafricain,

Prenant note de la demande de levée de l’embargo sur les armes formulée par les autorités centrafricaines et prenant note également des positions exprimées par les organisations régionales et sous‑régionales africaines dans le cadre de leur soutien au processus de paix,

Rappelant que le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine (« le Comité ») a approuvé toutes les demandes de dérogation présentées par les autorités centrafricaines dans le cadre de l’embargo sur les armes,

Se félicitant de la détermination dont font preuve les autorités centrafricaines et leurs partenaires régionaux et internationaux, et des avancées réalisées dans cette perspective, pour atteindre les objectifs de référence en vue du réexamen des mesures d’embargo sur les armes, qui ont été définis dans la déclaration de son président datée du 9 avril 2019 (S/PRST/2019/3) (« les objectifs de référence »), notant en particulier les progrès accomplis par la Commission nationale de lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre, ainsi que les progrès vers un accord sur la forme que prendra le marquage des armes à l’échelle nationale, affirmant que les objectifs de référence constituent un cadre de coopération solide sur la réforme du secteur de la sécurité, le processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement et la gestion des armes et des munitions en République centrafricaine et réaffirmant la nécessité pour les autorités centrafricaines de continuer d’améliorer la protection physique, le contrôle, la gestion et la traçabilité des armes, des munitions et du matériel militaire placés sous son contrôle, et de rendre des comptes à leur sujet,

Encourageant les autorités centrafricaines à poursuivre leurs efforts visant à réformer leurs forces de sécurité, à mettre en œuvre le processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, conformément à l’Accord de paix, par la voie de la feuille de route, et à opérer un système efficace de gestion des armes et des munitions, demandant aux autorités centrafricaines et à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) de continuer de renforcer leur coordination, et demandantégalement aux autorités centrafricaines de prendre toutes les mesures appropriées pour renforcer la sûreté et la sécurité du personnel et du matériel des Nations Unies,

Se félicitant de tous les efforts faits par les autorités centrafricaines pour faire avancer le processus de réforme du secteur de la sécurité, le processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement et les réformes nécessaires en matière de gestion des armes et des munitions, encourageant les autorités centrafricaines à poursuivre leurs progrès à cet égard, et demandant aux partenaires régionaux et internationaux d’appuyer de manière coordonnée les efforts déployés par les autorités centrafricaines à ces fins, notant à cet égard le rôle de la MINUSCA, conformément à son mandat, de la mission militaire de formation de l’Union européenne en République centrafricaine, ainsi que celui des commissions bilatérales conjointes, 

Saluant le travail d’enquête réalisé par le Groupe d’experts sur les violations de l’embargo sur les armes, et déclarant son intention d’amener les auteurs de ces violations à rendre des comptes,

Soulignant que les livraisons d’armes, de munitions et de matériel militaire et la fourniture d’une formation ou d’une assistance technique aux forces de sécurité centrafricaines devraient contribuer au renforcement des institutions du secteur de la sécurité centrafricaines et répondre aux besoins spécifiques des forces de défense et de sécurité du pays,

Soulignant également que les mesures imposées par la présente résolution n’ont pas pour objet d’avoir des conséquences humanitaires négatives pour la population civile de la République centrafricaine, et rappelant la résolution 2664 (2022),

Rappelant la nécessité pour les États de faire en sorte que toutes les mesures prises pour mettre en œuvre la présente résolution soient conformes aux obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits humains et le droit international des réfugiés, selon qu’il convient,

Se félicitant du rapport du Secrétaire général du 15 mai 2023 (S/2023/442), présenté en application de la résolution 2659 (2022),

Prenant note de la lettre datée du 15 mai 2023, adressée à sa présidente par le Secrétaire général (S/2023/356) en application du paragraphe 13 de la résolution 2588 (2021) et du rapport des autorités centrafricaines, présenté au Comité le 26 juin 2023 conformément au paragraphe 13 de la résolution 2648 (2022),

Prenant note également du rapport final (S/2023/360) du Groupe d’experts sur la République centrafricaine créé en application de la résolution 2127 (2013) (« le Groupe d’experts »), dont le mandat a été élargi par la résolution 2134 (2014) et prorogé en application de la résolution 2588 (2021), et prenant note en outre des recommandations du Groupe d’experts,

Constatant que la situation en République centrafricaine continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide que les mesures d’embargo sur les armes imposées dans la résolution 2127 (2013) et les prescriptions en matière de notification énoncées au paragraphe 1 de la résolution 2648 (2022) ne s’appliquent plus à la fourniture, à la vente ou au transfert d’armes et de matériel connexe ni à la fourniture d’une assistance ou de services de conseil ou de formation aux forces de sécurité centrafricaines, dont les services publics civils chargés du maintien de l’ordre;

2.    Décide également que toutes les autres dispositions énoncées au paragraphe 1 de la résolution 2648 (2022) continuent de s’appliquer jusqu’au 31 juillet 2024, décide en outre qu’il incombe au premier chef à l’État Membre fournisseur ou à l’organisation internationale, régionale ou sous-régionale fournisseuse de notifier le Comité et que cette notification doit être donnée préalablement à la livraison d’articles ou à la fourniture d’une assistance et réaffirme que les prescriptions en matière de notification ne s’appliquent plus à la fourniture, à la vente ou au transfert d’armes et de matériel connexe ni à la fourniture d’une assistance ou de services de conseil ou de formation aux forces de sécurité centrafricaines, conformément au paragraphe 1 de la présente résolution;

3.    Décide de reconduire jusqu’au 31 juillet 2024 les mesures et les dispositions énoncées au paragraphe 4 de la résolution 2488 (2019), sauf celles qui concernent la fourniture, la vente ou le transfert d’armes et de matériel connexe et la fourniture d’une assistance ou de services de conseil ou de formation aux forces de sécurité centrafricaines, au paragraphe 5 de la résolution 2488 (2019) et au paragraphe 2 de la résolution 2399 (2018), et rappelle le paragraphe 9 de la résolution 2488 (2019);

4.    Décide également de reconduire jusqu’au 31 juillet 2024 les mesures et les dispositions énoncées aux paragraphes 9, 14 et 16 à 19 de la résolution 2399 (2018) et prorogées par le paragraphe 4 de la résolution 2536 (2020), et rappelle les paragraphes 10 à 13 et 15 de la résolution 2399 (2018);

5.    Réaffirme que les mesures énoncées aux paragraphes 9 et 16 de la résolution 2399 (2018) s’appliquent aux personnes et entités désignées par le Comité, conformément aux dispositions des paragraphes 20 à 22 de la résolution 2399 (2018), prorogées par le paragraphe 5 de la résolution 2648 (2022), notamment pour le fait de préparer, de donner l’ordre de commettre, de financer ou de commettre, en République centrafricaine, des actes contraires au droit international humanitaire, notamment les attaques contre le personnel médical ou humanitaire;

6.    Décide de proroger jusqu’au 31 août 2024 le mandat du Groupe d’experts, tel qu’il l’a énoncé aux paragraphes 30 à 39 de la résolution 2399 (2018) et reconduit au paragraphe 6 de la résolution 2648 (2022), exprime son intention de réexaminer le mandat et de faire le nécessaire concernant sa nouvelle reconduction le 31 juillet 2024 au plus tard, et prie le Secrétaire général de prendre dès que possible les dispositions administratives voulues pour permettre au Groupe d’experts de poursuivre ses travaux sans interruption, en consultation avec le Comité, en faisant au besoin appel aux compétences des membres actuels du Groupe d’experts;

7.    Prie le Groupe d’experts de lui remettre, après concertation avec le Comité, un rapport à mi-parcours d’ici au 31 janvier 2024, et un rapport final d’ici au 15 juin 2024, et de lui adresser au besoin des rapports d’étape;

8.    Condamne fermement les attaques commises par des groupes armés de la Coalition des patriotes pour le changement et demande au Groupe d’experts, dans le cadre de l’exécution de son mandat, d’envisager de proposer de nouveaux exposés des motifs ou de les actualiser afin qu’ils puissent être ajoutés à la Liste, si nécessaire, conformément aux paragraphes 20 et 21 de la résolution 2399 (2018);

9.    Se déclare particulièrement préoccupé par les informations selon lesquelles des réseaux transnationaux de trafiquants continuent de financer et d’approvisionner les groupes armés en République centrafricaine, note en particulier l’emploi de plus en plus fréquent d’engins explosifs, notamment les engins explosifs improvisés et les mines terrestres, qui occasionnent un nombre croissant de victimes civiles et de destructions de biens civils et continuent d’entraver l’accès humanitaire, et demande au Groupe d’experts de prêter une attention particulière à l’analyse de ces réseaux et des menaces liées aux engins explosifs, dans le cadre de l’exécution de son mandat, en coopération, selon les besoins, avec les autres groupes d’experts qu’il a créés;

10.   Exhorte toutes les parties et tous les États Membres, ainsi que les organisations internationales, régionales et sous-régionales, à coopérer avec le Groupe d’experts et à assurer la sécurité de ses membres;

11.   Exhorte tous les États Membres et tous les organismes compétents des Nations Unies à permettre au Groupe d’experts de consulter toutes personnes et d’accéder sans entrave à tous documents et sites, afin qu’il puisse s’acquitter de son mandat, et rappelle qu’il est utile que la MINUSCA et le Groupe d’experts mettent en commun les informations dont ils disposent;

12.   Réaffirme les dispositions relatives au Comité et les dispositions concernant la présentation de rapports et la révision des mesures prises énoncées dans la résolution 2399 (2018) et prorogées par la résolution 2588 (2021);

13.   Prie les autorités centrafricaines de faire rapport au Comité, d’ici au 15 mai 2024, sur les progrès accomplis dans la réforme du secteur de la sécurité, le processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, conformément à l’Accord de paix par la voie de la feuille de route et la gestion des armes et des munitions;

14.   Prie le Secrétaire général, en étroite consultation avec la MINUSCA, y compris le Service de la lutte antimines, et le Groupe d’experts, de rendre compte, au plus tard le 15 mai 2024, des progrès accomplis par les autorités centrafricaines quant aux objectifs de référence;

15.   Affirme qu’il suivra de près l’évolution de la situation en République centrafricaine, y compris les progrès réalisés quant au processus de réforme du secteur de la sécurité, au processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, conformément à l’Accord de paix, par la voie de la feuille de route, et la gestion des armes et des munitions;

16.   Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations de vote

M. DMITRY A. POLYANSKIY(Fédération de Russie) s’est abstenu de voter en faveur de la résolution préparée par la France sur la prorogation du régime de sanctions contre la République centrafricaine.  Au cours des négociations de ce document, nous avons clairement exposé notre position selon laquelle le Conseil de sécurité doit enfin répondre aux demandes répétées et absolument justifiées du Gouvernement centrafricain de lever l’embargo sur les armes, demande qui bénéficie également d’un large soutien dans la société centrafricaine, a précisé le délégué.  En effet, l’embargo entrave les efforts de Bangui pour lutter contre les milices illégales, tout en n’ayant aucune valeur ajoutée pour contrecarrer la fourniture d’armes aux miliciens, qu’ils n’ont cessé de recevoir tout au long des dix ans d’existence du régime de sanctions.  Le maintien des restrictions ne résoudra en rien ce problème, a assuré le représentant. 

Il est clair que la délégation porte-plume, comme un certain nombre d’autres membres du Conseil de sécurité, a fait preuve de cynisme, a affirmé le représentant, les accusant d’avoir servi leurs propres intérêts en République centrafricaine et en Afrique dans son ensemble.  Ce n’est un secret pour personne que les régimes de sanctions sont utilisés par certains États comme des leviers de pression politique sous l’égide de l’ONU, a-t-il allégué.  Nous ne considérons pas une telle approche comme constructive, néanmoins, au moment du vote, nous avons jugé nécessaire de tenir compte de la position des membres africains du Conseil de sécurité, a précisé le représentant. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) s’est félicité de la prorogation du mandat du Groupe d’experts sur la République centrafricaine en ce qui concerne l’embargo sur les armes, les interdictions de voyage et le gel des avoirs. Les mesures prévues dans cette résolution sont essentielles à la promotion de la paix et de la stabilité dans ce pays et dans l’ensemble de la région, a-t-il dit.  La résolution contribuera en outre à maintenir les armes dangereuses et les ressources hors de portée des groupes armés, a-t-il relevé. Les États-Unis reconnaissent l’appel du Gouvernement centrafricain en faveur de la levée de l’embargo sur les armes, mais demeurent préoccupés par les conditions sécuritaires qui prévalent dans le pays.  Selon lui, « certains membres du Conseil de sécurité » et des autorités centrafricaines n’ont pas respecté des obligations en matière de notifications, tel que relevé par le Groupe d’experts.  Aucune disposition du présent régime de sanctions n’a cependant empêché les forces de sécurité centrafricaines de recevoir les armes ou les formations dont elles avaient besoin.  Le représentant s’est toutefois dit déçu que le Conseil n’ait pas inclus, en annexe à la résolution, les armes qui auraient dû faire l’objet de notifications au Comité des sanctions.  Il s’est par ailleurs dit alarmé par des rapports indiquant que des drones auraient été transportés vers le Soudan par le groupe Wagner, via la République centrafricaine.  En vertu de ce texte, la Fédération de Russie demeure tenue de notifier le Comité des sanctions de tous les transferts d’armes et de ressources à ses mercenaires du groupe Wagner dans le pays, a rappelé le délégué américain. 

Mme NANA AKUA BARNOR (Ghana) a dit avoir voté pour le projet et salué le fait que l’embargo sur les armes ne s’applique plus aux forces de sécurité gouvernementales.  La déléguée a encouragé les pays de la région à continuer de soutenir la RCA.  Tout régime de sanctions a vocation à être levé, a dit la déléguée, en saluant le pas en avant accompli aujourd’hui.  Elle a enfin rappelé l’attachement de son pays à la préservation de la souveraineté centrafricaine.

M. ZHANG JUN (Chine) a expliqué son abstention en disant que le Conseil venait d’adopter une résolution décidant que l’embargo sur les armes ne s’applique plus aux forces de sécurité de la République centrafricaine. Cette résolution permettra à Bangui de renforcer ses capacités en matière de sécurité et de sûreté.  La Chine, a dit le représentant, voit d’un bon œil le travail réalisé par toutes les parties en particulier par la France en tant que rédacteur.  Toutefois, cette résolution ne satisfait pas pleinement les aspirations de la République centrafricaine et d’autres pays de la région qui souhaitaient une levée complète des sanctions.  S’agissant des amendements proposés par la Chine, ils n’ont pas été pleinement pris en compte dans le projet de texte.  Ces circonstances expliquent le fait que la Chine a dû s’abstenir.  L’embargo sur les armes imposé en République centrafricaine dure déjà depuis dix ans.  Des progrès ont été réalisés en ce qui concerne la réforme du secteur de sécurité, le processus de DDR et l’embargo sur les armes. 

Selon le représentant, le Gouvernement centrafricain a, à plusieurs reprises, demandé la levée complète de l’embargo sur les armes soutenu en cela par les pays de la région et l’Union africaine.  Le Conseil devra respecter les préoccupations de la République centrafricaine et prendra des mesures supplémentaires dans ce domaine.  Ces dernières années, les pays d’Afrique ont vivement souhaité la levée de sanctions et d’embargo sur les armes imposées par le Conseil, estimant que ces mesures ont un effet négatif sur le renforcement des capacités de sécurité. En août de l’année dernière, dans le cadre de notre présidence du Conseil, la Chine a insisté sur la publication d’une déclaration de la Présidence demandant au Conseil de tenir compte des préoccupations africaines et de revoir, ajuster, lever les régimes de sanctions de manière opportune en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain.  Le Conseil devrait satisfaire aux exigences de cette déclaration de la présidence et ajuster les sanctions inutiles pour, à terme, les lever intégralement. 

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a indiqué avoir voté en faveur du projet de résolution, convaincu que l’approche progressive en vue d’une levée de l’embargo sur les armes est équilibrée.  Il a en outre pris bonne note des progrès réalisés par le Gouvernement centrafricain en matière de gouvernance.  Le représentant a appelé les autorités du pays à poursuivre ses efforts pour stabiliser et développer le pays. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni), qui a voté en faveur du texte, a insisté sur le fait que l’exigence en matière de notifications est importante pour contrôler le flux d’armes à travers le pays, lequel profite aux mercenaires du groupe Wagner, auteurs de véritables atrocités avérées en RCA.  Le représentant a encouragé le Gouvernement centrafricain à redoubler d’efforts en matière de réforme du secteur de la sécurité et de gestion des armes et des munitions. 

Mme SYLVIE VALÉRIE BAÏPO-TÉMON, Ministre des affaires étrangères, de la Francophonie et des Centrafricains de l’étranger de la République centrafricaine, a pris acte de la décision du Conseil de sécurité de proroger l’embargo sur les armes en République centrafricaine, tout en précisant que le texte ne s’applique pas aux forces gouvernementales.  Elle a remercié les deux États qui se sont abstenus lors du vote sur cette résolution, « en respect de la souffrance du peuple centrafricain ».  Ce faisant, ces pays ont refusé selon elle de « laisser tout un peuple à la merci des groupes armés ».  Elle a exprimé son incompréhension face un texte « confus » qui tente d’expliquer que l’embargo sur les forces gouvernementales est levé, mais qu'il est prorogé afin qu’il s’applique aux groupes armés.  Ce faisant, ce texte qualifie selon elle la République centrafricaine de « groupe armé », « un verdict inique et arbitraire que le Gouvernement et le peuple centrafricain ne peuvent accepter ».

Selon la Ministre, cette résolution relève de l’ignorance de la réalité centrafricaine, ou encore d’un « jeu trouble » à l’échelle internationale. Le texte adopté aujourd’hui constitue un véritable affront pour la République centrafricaine, qui ne correspond pas à un groupe armé, a martelé Mme Baïpo-Témon.  Qui plus est, cette résolution continue d’être intitulée « Embargo sur les armes en République centrafricaine, alors qu’elle devrait plutôt s’appeler « Embargo sur les groupes armés ».  « Pourquoi l’appel de détresse du Gouvernement centrafricain face à l’agression de rebelles étrangers n’a pas eu le même écho que celui de l’Ukraine », s’est-elle demandé.  Face à l’incohérence de ce texte et une politique de deux poids, deux mesures dont est victime son pays du fait des blocs imposés par les « puissances », la Ministre a considéré qu’il est temps de réfléchir à une « nouvelle organisation plus crédible » au sein de laquelle les droits de tous seront respectés.

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