En cours au Siège de l'ONU

9344e séance – après-midi
CS/15317

Conseil de sécurité: la Présidente du Mécanisme international des tribunaux pénaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda annonce la fin prochaine des audiences

En évoquant l’avenir du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, sa présidente a indiqué que c’est la première fois que l’un des présidents du Mécanisme est en mesure d’annoncer au Conseil de sécurité que les procédures en salle d’audience sont pratiquement terminées.  Mme Graciela Gatti Santana a indiqué que le Mécanisme s’apprête à entamer la prochaine phase de ses activités, lors de laquelle ses responsabilités quotidiennes effectives correspondront davantage à son nom et à sa vocation. 

Les intervenants au cours du débat de cet après-midi ont pour la plupart salué cette évolution, ainsi que la conclusion de l’affaire Stanišić et Simatović, ce qui marque, 30 ans après sa création, l’achèvement du mandat confié par le Conseil de sécurité au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).  Les affaires relatives aux 161 personnes qu’il a mises en accusation étant désormais closes. Le fait que le Mécanisme réduise actuellement ses activités ne signifie pas qu’il est prêt à fermer ses portes, a relevé sa présidente.  « Nous n’en avons pas terminé avec notre travail; nous nous préparons plutôt à entrer dans une nouvelle phase », a-t-elle précisé en notant que dans un an exactement le Conseil de sécurité procèdera à son cinquième examen de l’avancement des travaux du Mécanisme. 

En relevant un autre fait nouveau, elle a noté qu’il ne reste plus qu’une seule affaire en rapport avec les crimes principaux commis au Rwanda, celle mettant en cause Félicien Kabuga. Justement, le 6 juin, la Chambre de première instance a rendu sa décision concernant l’aptitude du mis en cause à être jugé, constatant qu’il n’était pas apte et qu’il était peu probable qu’il le redevienne.  Néanmoins, la Chambre poursuivra le procès au moyen d’une procédure alternative, afin de donner à Félicien Kabuga la possibilité d’établir son innocence.  À ce sujet, la Fédération de Russie a reproché au Mécanisme d’avoir « inventé une autre façon de prolonger son existence » alors que son « panier judiciaire » est vide. Le Procureur du Mécanisme a prévenu, dans son exposé devant le Conseil, qu’il ferait appel de cette décision.  M. Serge Brammertz s’est également réjoui de l’arrestation, le 23 mai à Paarl, en Afrique du Sud, de Fulgence Kayishema, le fugitif rwandais le plus recherché.  Il est accusé du meurtre de plus de 2 000 femmes, hommes, enfants et personnes âgées innocents dans l’église de Nyange, au Rwanda, le 16 avril 1994. 

Saluant cette arrestation, comme nombre de délégations, les États-Unis ont rappelé qu’une récompense de 5 millions de dollars serait distribuée pour les contributions à l’arrestation des trois fugitifs du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) encore en cavale.  Cette arrestation constitue un exemple de coopération internationale efficace et effective dans la lutte contre l’impunité, a renchéri la France qui a rappelé que depuis le 15 mai et jusqu’au 30 juin, se tient à la cour d’assises de Paris le procès de Philippe Hategekimana Manier, notamment poursuivi pour des faits de génocide et crimes contre l’humanité. 

La Présidente du Mécanisme est ensuite revenue sur trois domaines appelant l’attention immédiate du Conseil.  Elle a d’abord évoqué l’exécution des peines.  La répartition de cette charge entre les États est inégale, a-t-elle pointé.  En effet, plus de la moitié des 45 personnes condamnées purgent leur peine dans deux pays africains.  En Europe, 10 États sont chargés de l’exécution des peines et seules 18 personnes y sont emprisonnées, dont quatre se trouvent au quartier pénitentiaire des Nations Unies, à La Haye, dans l’attente de leur transfèrement vers l’État où elles purgeront leur peine.  Elle a ensuite évoqué la situation « délicate » des personnes acquittées -ou libérées- réinstallées au Niger en décembre 2021 que « le Mécanisme n’est tout simplement pas en mesure de régler seul ».  Ce constat a fait dire au Ghana que le fait que ces personnes soient toujours privées de liberté est une « tache » sur la justice internationale. 

Enfin, la Présidente a dénoncé les tentatives inlassables visant à remettre en cause non seulement le travail actuel, mais aussi les jugements et arrêts rendus par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme, « sans doute la menace la plus grave à laquelle nous soyons confrontés ».  S’ajoute à cela « la tendance inquiétante qui se manifeste par le déni du génocide, la glorification de criminels de guerre, les tentatives visant à réécrire l’histoire, et même des propos provocateurs tenus par des personnes condamnées qui reconnaissent sans aucune honte qu’elles récidiveraient volontiers ».  Cela s’explique par « la partialité des décisions du TPIY et du Mécanisme », a réagi la Russie, soulignant que la grande majorité des personnes condamnées sont des Serbes, alors que les représentants d’autres parties au conflit sont peu condamnés. 

Pour la suite, le Procureur a assuré que son bureau devra mener à bien la tâche de soutien aux juridictions nationales afin qu’elles poursuivent le processus d’établissement des responsabilités pour les crimes internationaux commis au Rwanda et sur le territoire de l’ex-Yougoslavie.  Il a rappelé qu’au Rwanda, plus d’un millier de fugitifs doivent encore être poursuivis. De même, en ex-Yougoslavie, les procureurs nationaux doivent encore traiter plusieurs milliers d’affaires.  Après la fin du dernier procès dans cette région, la Serbie a dit espérer une meilleure coopération avec le Mécanisme dans le cadre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  La délégation a déclaré que le Bureau du Procureur ignore le fait qu’il existe un cadre de coopération entre les bureaux des procureurs de la Serbie et de la Croatie, rendu possible par les accords européens et qui ne nécessite plus d’établir un accord bilatéral. 

La Croatie a de son côté regretté l’absence de volonté politique serbe dans la recherche des 1 807 citoyens croates toujours portés disparus, notamment en bloquant l’accès aux archives.  Pour la Bosnie-Herzégovine, « peut-être que les pays de l’ancienne Yougoslavie pourront de nouveau se faire confiance », mais « le pardon ne peut venir qu’après l’aveu ».  Le Rwanda a appelé les 33 États saisis par des demandes de coopération à redoubler d’efforts pour arrêter les fugitifs se trouvant dans leurs juridictions.  La délégation a regretté que la justice soit ralentie par le manque de coopération de certains États Membres, malgré les mandats clairs du Conseil de sécurité et des mécanismes juridiques pertinents.  La lutte contre l’impunité n’est pas une tâche que le Rwanda doit assumer seul, il s’agit d’une responsabilité collective de la communauté internationale, a conclu la délégation. 

MÉCANISME INTERNATIONAL APPELÉ À EXERCER LES FONCTIONS RÉSIDUELLES DES TRIBUNAUX PÉNAUX

Déclarations

Mme GRACIELA GATTI SANTANA, Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (MIFRTP), a commencé son intervention en prévenant que « rien n’encourage plus le crime que l’impunité » avant d’effectuer un rappel historique.  En mai 1993, le Conseil de sécurité a décidé à l’unanimité de prendre une mesure exceptionnelle dans le cas de l’ex-Yougoslavie et de créer un tribunal pénal international: une initiative courageuse, qui a permis d’asseoir l’état de droit et a servi d’avertissement à d’autres, partout ailleurs: les violations du droit international humanitaire ne seront ni tolérées, ni impunies.  Ce même sentiment l’a emporté en 1994 avec la création du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a poursuivi la Présidente.  Et, en 2010, succédant aux tribunaux ad hoc, le Mécanisme a été mis sur pied pour incarner « cet engagement collectif continu en faveur d’un système indispensable de justice internationale ».  Dans le cadre du vaste mandat du Mécanisme, une attention particulière a été accordée au fait de rendre la justice, d’établir la vérité, de respecter les normes internationales en matière de garanties procédurales et du droit à un procès équitable, et de condamner ceux dont la culpabilité pour les crimes les plus atroces a été établie au-delà de tout doute raisonnable.

Il y a deux semaines, s’est félicitée Mme Gatti Santana, la Chambre d’appel a rendu son dernier arrêt concernant les crimes commis pendant les conflits en ex-Yougoslavie, dans l’affaire mettant en cause Jovica Stanišić et Franko Simatović.  « Avec cet arrêt prend fin l’ambitieux parcours du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) », les affaires relatives aux 161 personnes qu’il a mises en accusation étant désormais closes.  Il ne reste donc plus qu’une seule affaire en rapport avec les crimes principaux commis au Rwanda, celle mettant en cause Félicien Kabuga.  Revenant sur les récents développements de cette affaire, Mme Gatti Santana a souligné que le 6 juin, la Chambre de première instance a rendu sa décision concernant l’aptitude de Félicien Kabuga à être jugé et l’avenir de son procès.  Les juges siégeant dans l’affaire ont décidé, à la majorité, qu’il n’était pas apte et qu’il était peu probable qu’il le redevienne.  Néanmoins, a-t-elle informé, la Chambre poursuivra le procès au moyen d’une procédure alternative, afin de donner à Félicien Kabuga la possibilité d’établir son innocence.  Cette décision devrait faire l’objet d’un appel.  S’agissant des autres fonctions importantes du Mécanisme, la Présidente a loué la qualité exceptionnelle de l’équipe du Procureur chargée de la recherche des fugitifs, en revenant sur l’arrestation récente en Afrique du Sud de Fulgence Kayishema, l’un des quatre derniers fugitifs du TPIR, arrestation rendue par la coopération des États.

La Présidente du Mécanisme est ensuite revenue sur trois domaines appelant l’attention immédiate du Conseil.  Elle a d’abord évoqué l’exécution des peines.  La répartition de cette charge entre les États est inégale, a-t-elle pointé.  En effet, plus de la moitié des 45 personnes condamnées purgent leur peine dans deux pays africains.  En Europe, 10 États sont chargés de l’exécution des peines et seules 18 personnes y sont emprisonnées, dont quatre se trouvent au quartier pénitentiaire des Nations Unies, à La Haye, dans l’attente de leur transfèrement vers l’État où elles purgeront leur peine.  La législation interne de certains États chargés de l’exécution des peines limitant leurs capacités, le Mécanisme a récemment été confronté à des situations où des personnes condamnées ont dû être renvoyées au quartier pénitentiaire de La Haye dans l’attente de la désignation d’un nouvel État.  Ces situations, qui devraient se reproduire à l’avenir, ont des effets préjudiciables, a déploré Mme Gatti Santana, citant des répercussions financières pour le Mécanisme et un lourd fardeau pour l’État hôte. 

Ensuite, la Présidente a évoqué la situation des personnes acquittées -ou libérées- réinstallées au Niger en décembre 2021.  Elle a fait part de nouvelles reçues ce week-end concernant le décès de l’une de ces personnes, Tharcisse Muvunyi: le Mécanisme tente d’obtenir davantage d’informations sur les circonstances précises de ce décès.  Mme Gatti Santana a relevé que la situation au Niger contrevient à l’accord relatif à la réinstallation conclu avec l’ONU et que « le Mécanisme n’est tout simplement pas en mesure de régler seul cette situation délicate ».  Toute décision portant sur la réinstallation de ces personnes devrait être conforme à la résolution 2637 (2022), sans préjudice des efforts que ces personnes déploient elles-mêmes pour trouver une solution, a-t-elle fait valoir.  Dans l’intervalle, la Présidente a demandé au Conseil de reconnaître à quel point « ce statu quo est intenable à tous égards ».

Enfin, la Présidente a dénoncé les tentatives inlassables visant à remettre en cause non seulement le travail actuel, mais aussi les jugements et arrêts rendus par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme, « sans doute la menace la plus grave à laquelle nous soyons confrontés ».  Il s’agit notamment du mépris flagrant par la Serbie de ses obligations légales internationales fixées par le Conseil, a-t-elle élaboré, et de son refus persistant de procéder à l’arrestation et à la remise de Petar Jojić et de Vjerica Radeta.  Mme Gatti Santana a rappelé que cette absence de coopération empêche le Mécanisme d’exécuter son mandat.  S’ajoute à cela « la tendance inquiétante qui se manifeste par le déni du génocide, la glorification de criminels de guerre, les tentatives visant à réécrire l’histoire, et même des propos provocateurs tenus par des personnes condamnées qui reconnaissent sans aucune honte qu’elles récidiveraient volontiers ».  Face à ces défis, la Présidente a indiqué que sa priorité principale est de « consolider, préserver et rendre plus accessible l’héritage précieux des Tribunaux ad hoc et du Mécanisme ».

Évoquant l’avenir du Mécanisme, Mme Gatti Santana a indiqué que c’est la première fois que l’un des présidents du Mécanisme est en mesure d’annoncer au Conseil que les procédures en salle d’audience sont pratiquement terminées.  Il s’agit d’un tournant dans la vie de l’institution et pour la justice pénale internationale d’une manière plus générale, a-t-elle dit. Le Mécanisme s’apprête à entamer la prochaine phase de ses activités, lors de laquelle ses responsabilités quotidiennes effectives correspondront davantage à son nom et à sa vocation.  Cela étant dit, le fait que le Mécanisme réduise actuellement ses activités ne signifie pas qu’il est prêt à fermer ses portes, a relevé sa présidente.  « Nous n’en avons pas terminé avec notre travail; nous nous préparons plutôt à entrer dans une nouvelle phase. »  Sachant que dans un an exactement le Conseil de sécurité procèdera à son cinquième examen de l’avancement des travaux du Mécanisme, la Présidente s’est dite déterminée à continuer de rechercher des moyens innovants et plus efficaces pour continuer d’obtenir des résultats.

M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (MIFRTP), a précisé que bien que son rapport couvre une période prenant fin le 15 mai, il s’exprime aujourd’hui sur plusieurs événements importants survenus ces dernières semaines.  Il s’est réjoui de l’arrestation, le 23 mai à Paarl, en Afrique du Sud, de Fulgence Kayishema, le fugitif rwandais le plus recherché.  Il est accusé du meurtre de plus de 2 000 femmes, hommes, enfants et personnes âgées innocents à l’église de Nyange, au Rwanda, le 16 avril 1994.  Il lui est reproché d’avoir tenté de mettre le feu à l’église, alors que les réfugiés se trouvaient à l’intérieur.  N’y parvenant pas, il a fait venir un bulldozer pour faire s’écrouler le toit de l’édifice, tuant ceux qui étaient toujours en vie.  « L’arrestation de Fulgence Kayishema constitue un moment phare dans les efforts déployés dans le monde entier pour punir les auteurs de génocide », a-t-il affirmé.  Des résultats comme ceux-ci redonnent foi en la justice internationale, a-t-il clamé, ajoutant que les familles de 2 000 victimes verront maintenant Fulgence Kayishema répondre des crimes qui lui sont reprochés.  Cette arrestation est l’illustration de ce que qui peut être réalisé grâce à la coopération des autorités judiciaires internationales et nationales, a ajouté M. Brammertz, saluant notamment la coopération de l’Afrique du Sud, d’Eswatini, du Mozambique et des autorités rwandaises.

Il ne reste à présent que trois fugitifs.  Mon bureau travaille d’arrache-pied pour les retrouver, et pour mener à bien la mission qui lui a été confiée à cet égard, a poursuivi le Procureur.  Il a ensuite relevé qu’une semaine après l’arrestation de Fulgence Kayishema, la Chambre d’appel du Mécanisme a rendu son dernier arrêt dans une affaire du TPIY, l’affaire Stanišić et Simatović. Il a salué le fait que la Chambre d’appel ait retenu des aspects essentiels de l’appel que son bureau avait fait.  La Chambre d’appel a en outre alourdi leur peine, la portant à 15 ans de prison pour chacun.  Ce jugement conclut de manière appropriée les travaux du TPIY, s’est réjoui M. Brammertz.  En 30 ans d’activité, nous avons été en mesure de juger avec succès de hauts responsables politiques, militaires et de la police, issus de toutes les parties au conflit, a-t-il résumé. 

Au sujet de la décision rendue par la Chambre de première instance la semaine dernière dans l’affaire Kabuga, le Procureur a précisé que cette décision n’est pas encore définitive et fera certainement l’objet d’un appel.  « Je peux dire à ce stade que mon bureau considère que le procès contre Félicien Kabuga peut et doit être mené à terme, dans le respect des droits de l’accusé », a—t-il argué.  Sous la direction de sa présidente, le Mécanisme prépare activement son avenir en tant qu’institution véritablement résiduelle, a-t-il assuré, notant que son bureau participe activement à ce processus, auquel il apporte sa contribution et son soutien.  « Le Mécanisme doit être, et sera bientôt, une institution plus petite qu’aujourd’hui. »  Cela impliquera de se concentrer exclusivement sur les fonctions essentielles. 

Pour la suite, le Procureur a assuré que son bureau devra mener à bien la tâche de soutien aux juridictions nationales afin qu’elles poursuivent le processus d’établissement des responsabilités pour les crimes internationaux commis au Rwanda et sur le territoire de l’ex-Yougoslavie.  Il a rappelé qu’au Rwanda, plus d’un millier de fugitifs doivent encore être poursuivis.  De même, en ex-Yougoslavie, les procureurs nationaux doivent encore traiter plusieurs milliers d’affaires. 

Outre l’appui qu’il fournit sur le plan du droit et des éléments de preuve, mon bureau ne ménage pas ses efforts pour résoudre les difficultés qui se présentent en matière de coopération judiciaire régionale, a affirmé M. Brammertz.  En outre, chaque année, des pays du monde entier identifient sur leur territoire des personnes soupçonnées d’avoir commis des crimes au Rwanda ou en ex-Yougoslavie. Des enquêteurs et des procureurs de nombreux pays sollicitent l’assistance de mon bureau pour obtenir des éléments de preuve, préparer des stratégies d’enquête, rédiger des actes d’accusation et prouver leurs thèses aux procès, a-t-il relevé.  Selon M. Brammertz, le déni du génocide et la glorification des criminels de guerre restent très préoccupants.  Si la communauté internationale est déterminée à traduire les criminels de guerre en justice, elle devrait être tout aussi attachée à promouvoir la vérité à l’issue des procès qui se tiendront, a-t-il souhaité. 

Mme ANNETTE ANDRÉE ONANGA (Gabon) a rappelé que la réunion se tenait 30 ans après la création des tribunaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.  Elle a appuyé l’ensemble des mesures prises en vue de permettre au MIFRTP de devenir une institution complétement résiduelle, afin d’assurer notamment la traque des fugitifs, l’assistance technique aux autorités nationales, la protection des victimes et témoins et les efforts visant à l’archivage et à la préservation de l’héritage des Tribunaux.  Elle a salué la conclusion des affaires Jovica Stanišić et Franko Simatović, y voyant « une étape cruciale de la lutte contre l’impunité », ainsi que l’arrestation de Fulgence Kayishema, appelant tous les États Membres à permettre l’arrestation des fugitifs et de leurs complices. 

Mme RICCARDA CHANDA (Suisse) a salué les efforts déployés par le Mécanisme, notamment pour mener à son terme l’affaire Stanišić et Simatović.  Citant la poursuite des efforts dans l’affaire Kabuga, elle s’est félicitée à cet égard de la collaboration étroite avec les autorités locales.  « Compte tenu de la réduction des effectifs et des contraintes budgétaires du Mécanisme, ces résultats sont d’autant plus impressionnants. »  Rappelant que tous les États sont tenus de coopérer avec le Mécanisme, y compris en matière d’arrestation et de remise des fugitifs, la déléguée a souligné la récente arrestation de M. Kayishema avec le soutien de l’Afrique du Sud.  En revanche, elle a jugé inquiétante la situation des huit personnes acquittées ou libérées qui ont été réinstallées au Niger.  Elle a encouragé les États à respecter tous les accords conclus avec le Mécanisme, ainsi qu’à intensifier leurs efforts en matière d’exécution des peines.  Jugeant le travail du Mécanisme essentiel pour prévenir la commission de nouvelles atrocités, la déléguée a mis en garde contre les discours de haine, la glorification des criminels de guerre, le révisionnisme historique et la désinformation qui se propagent dans les Balkans occidentaux notamment.  Elle a conclu en soulignant l’importance de garantir la protection des témoins et des victimes, tout en planifiant l’avenir du Mécanisme pour assurer sa continuité.

Mme DIARRA DIME-LABILLE (France) a estimé que ces six derniers mois ont montré la détermination du Mécanisme à mettre en œuvre son mandat et à traduire en justice toutes les personnes mises en accusation par les Tribunaux ad hoc.  Le Conseil de sécurité doit l’appuyer dans son action, a-t-elle plaidé.  Selon elle, le prononcé de l’arrêt d’appel dans l’affaire Stanišić et Simatović, le 31 mai dernier, marque une étape cruciale de l’activité judiciaire du Mécanisme.  En effet, il concrétise, pour les victimes, « la victoire de la justice face à l’impunité », 30 ans après la création du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.  Dans leur décision du 6 juin, les juges de la Chambre de première instance ont conclu que M. Kabuga, arrêté par la France en 2020 et remis au Mécanisme, n’était pas apte à être jugé et ne le serait probablement pas à l’avenir.  Nous encourageons le Mécanisme à trouver les moyens de répondre à la quête de justice des victimes, a-t-elle lancé.

La déléguée a regretté que certains partenaires se refusent à coopérer avec le Mécanisme, malgré les multiples appels de la Présidente du Mécanisme, du Procureur et de nombreux États Membres.  Il est primordial que les derniers fugitifs mis en accusation par le Tribunal pénal international pour le Rwanda puissent comparaître devant la justice, a-t-elle déclaré.  Elle a salué l’arrestation de Fulgence Kayishema le 24 mai dernier, grâce à la collaboration du Bureau du Procureur et des autorités sud-africaines et d’autres pays. Cette arrestation constitue un exemple de coopération internationale efficace et effective dans la lutte contre l’impunité.  Elle a rappelé que depuis le 15 mai et jusqu’au 30 juin, se tient à la cour d’assises de Paris le procès de Philippe Hategekimana Manier, notamment poursuivi pour des faits de génocide et crimes contre l’humanité.  La déléguée a souligné que le travail mémoriel est également essentiel à la réconciliation.  Elle s’est dite préoccupée par le déni des crimes et la glorification de génocidaires et criminels de guerre condamnés par les tribunaux pénaux internationaux au terme de procédures impartiales et indépendantes.  Enfin, elle a appuyé les efforts du Mécanisme dans la lutte contre le révisionnisme dans toutes ses formes.

M. DOMINGOS FERNANDES (Mozambique) s’est dit préoccupé par l’utilisation abusive du statut de réfugié par certains fugitifs.  Les États doivent rester vigilants et prendre les mesures nécessaires pour que cette pratique ne soit pas utilisée pour échapper aux mailles de la justice, a-t-il pointé.  L’orateur a relevé l’importance de la coopération entre le Mécanisme et les États, qui permet au Mécanisme de remplir correctement ses fonctions.  Il a appelé les États à respecter leurs obligations légales et à coopérer avec le Mécanisme notamment dans le domaine de l’exécution des peines et de la réinstallation des personnes acquittées et libérées.  Concernant l’exécution des peines, les personnes condamnées devraient dans l’idéal être autorisées à purger leur peine de prison dans leur pays d’origine, avec l’aide du Mécanisme et d’autres organisations pour soutenir les pays d’accueil dans cette entreprise, a été d’avis le délégué du Mozambique.  Il a aussi espéré qu’une solution permanente soit trouvée pour régler la situation des huit personnes acquittées et libérées relocalisées au Niger, envisageant une relocalisation dans leur pays d’origine, si les conditions sont réunies.  S’agissant enfin de l’héritage des tribunaux ad hoc et du Mécanisme, le délégué a souligné que la bonne gestion des dossiers, leur conservation ainsi que l’accès du public à ces documents sont importants pour la recherche et l’éducation.  Ils peuvent contribuer de manière significative à la lutte contre le déni et le révisionnisme, contribuant au maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il souligné.

Mme JANE GASU AHETO (Ghana) a réitéré l’appel du Ghana à tous les États pour qu’ils coopèrent avec le Mécanisme en remettant les fugitifs pour permettre que les processus judiciaires se poursuivent et s’achèvent.  Elle a également appelé à la coopération des États dans l’exécution des peines.  Concernant les difficultés rencontrées par le Mécanisme pour relocaliser les personnes acquittées ou ayant purgé leur peine, conformément à la résolution 2529 (2020) du Conseil de sécurité, elle a regretté que ces personnes envoyées au Niger soient toujours détenues dans une maison sécurisée contre leur gré, étant donné le retrait du Niger de l’accord de coopération signé avec les Nations Unies. Le fait que ces personnes soient toujours privées de liberté est une tache sur la justice internationale, a-t-elle argué. La représentante a souhaité que ces personnes soient libérées au plus vite.  De même, étant donné que peu d’États ont exprimé leur intérêt à les accueillir, elle s’est demandé combien de temps le Mécanisme continuerait à assumer leur prise en charge, s’interrogeant aussi sur les implications budgétaires de cette situation.

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a salué le Mécanisme résiduel et les autorités d’Afrique du Sud pour leur rôle dans la capture de Fulgence Kayishema.  Il a rappelé qu’une récompense de cinq millions de dollars serait distribuée pour les contributions à l’arrestation des fugitifs du TPIR encore en cavale.  Il s’est aussi félicité de la condamnation en appel de Jovica Stanišić et Franko Simatović pour leurs actes inhumains commis en Bosnie-Herzégovine et en Croatie.  Cette sentence clôt un chapitre important de l’histoire de la justice pénale internationale, a-t-il observé.  Saluant les efforts du Mécanisme visant à assurer une « transition en douceur » vers des fonctions plus résiduelles, il a aussi salué ceux menés dans le même sens par les tribunaux spéciaux pour le Cambodge et la Sierra Leone.  Enfin, le représentant a encouragé la Serbie à veiller à ce que Petar Jojić et Vjerica Radeta soient finalement jugés. 

M. VICTOR SILVEIRA BRAOIOS (Brésil) a jugé très important de préserver l’héritage du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).  Un an avant l’expiration des mandats en cours de son Procureur et des juges, force est de constater que le Mécanisme a encore besoin de temps pour achever les tâches de son mandat consistant à remplir les fonctions résiduelles du TPIY et du TPIR. Toutefois, le Mécanisme doit s’engager vers la conclusion de toutes ses activités, a argué le délégué, rappelant que le Conseil de sécurité l’avait conçu pour être temporaire et que ses fonctions devaient diminuer avec le temps.  Il a salué les efforts « remarquables » de la juge Gatti Santana qui promeut une réflexion sur la meilleure façon de cesser progressivement les activités du Mécanisme. Au sujet de l’affaire Kabuga, le délégué a rappelé que le 7 juin dernier, la Chambre de première instance l’a jugé inapte à subir son procès.  Il a soutenu la décision de la Chambre de procéder à l’audition des preuves, même face à l’impossibilité d’une condamnation.  Il a en outre indiqué qu’il existe des fonctions résiduelles à long terme que le Mécanisme est censé effectuer.  C’est le cas du contrôle de l’exécution des peines, a-t-il lancé, précisant que cette tâche doit être effectuée jusqu’au décès du dernier condamné ou quand la dernière peine sera purgée.  La recherche des fugitifs est également une fonction clef du Mécanisme pour s’assurer qu’il n’y ait pas d’impunité pour les crimes graves, a-t-il déclaré.  Le délégué a rappelé que le Mécanisme a besoin du soutien de la communauté internationale pour s’acquitter de ses mandats. Enfin, il a réitéré sa conviction que les États sont responsables au premier chef de la poursuite des responsables de crimes sur leur territoire.  Les tribunaux internationaux sont ainsi complémentaires des systèmes judiciaires nationaux et ne doivent agir que lorsque les institutions nationales ne sont pas en mesure de juger ou ne veulent pas juger elles-mêmes ces crimes.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a relevé que la coopération est essentielle pour que le Mécanisme puisse réaliser son mandat et a donc exhorté tous les États à respecter leurs obligations, ainsi qu’à coopérer pleinement avec le Mécanisme dans ses efforts pour arrêter et remettre les fugitifs.  Il a demandé une solution urgente face à la situation persistante des personnes acquittées et libérées qui ont été relocalisées au Niger en décembre 2021.  Appelant les États concernés à respecter les dispositions de la résolution 2637 (2022), le délégué maltais a ensuite évoqué « la dangereuse question de la non-acceptation des faits historiques ».  Se joignant aux appels du Procureur pour rompre avec la rhétorique du passé et prendre des initiatives en faveur de la réconciliation et de la consolidation de la paix, il a salué la poursuite par le Mécanisme, en collaboration avec l’Union européenne (UE), du programme d’information pour les communautés affectées, ainsi que la récente parution d’un guide pour les professeurs d’histoire, soit deux initiatives permettant au public d’accéder aux dossiers judiciaires du Mécanisme, et qui contribuent ainsi à « défendre la vérité ».

M. DMITRY CHUMAKOV (Fédération de Russie) a rappelé que le Mécanisme avait été créé en tant que « petite structure temporaire et efficace dont les fonctions et la taille diminueraient avec le temps ».  Il a dit continuer de suivre de près la réalisation par le Mécanisme de ses promesses, y compris la diminution de son personnel.  Se référant à l’affaire Kabuga, le délégué a estimé que le Mécanisme ne devrait pas multiplier ce type d’affaires pour étendre artificiellement son existence.  Selon lui, l’initiative d’un « procès sur les faits » dans ladite affaire, sans la participation de l’inculpé, n’est pas fondée sur les documents statutaires du Mécanisme et soulève des questions pratiques.  « Le Mécanisme a inventé une autre façon de prolonger son existence » alors que son « panier judiciaire » est vide, a tranché le délégué.  Dans ce contexte, aucun exercice d’équilibre verbal dans les rapports de cette structure ne pourra plus justifier la préservation d’une immense machine bureaucratique de 388 personnes.  Il a exigé la réduction rapide des effectifs excédentaires et invité le Secrétariat de l’ONU à faire des recommandations pour aider le Mécanisme à suivre enfin les instructions du Conseil en rapport avec son mandat, notamment en réduisant ses dépenses liées au personnel et son budget.  Nous voulons aussi connaître la date de cessation des fonctions de cette structure, créée à l’origine comme temporaire, a-t-il demandé.

Le délégué a évoqué le cas de Radovan Karadžić qui purge une peine au Royaume-Uni à la prison de Parkhurst, connue pour ses conditions de détention « inacceptables et nocives pour la santé des détenus », selon les activistes des droits de l’homme.  Le condamné, a-t-il déploré, est privé de tout moyen de communication, de livres et dossiers personnels, et il lui est interdit de parler sa langue maternelle, prétendument « pour des raisons de sécurité » par crainte d’un attentat contre sa vie de la part de détenus musulmans.  Nous exigeons du Mécanisme qu’il prenne des mesures urgentes pour rectifier cette situation inacceptable et fournir au condamné des conditions appropriées pour purger sa peine, a lancé le délégué.  Concernant le général serbe Ratko Mladić, il a dit ne pas être sûr qu’il reçoive des soins médicaux de qualité en prison.  Il a aussi rappelé le cas de Radoslav Brjanin qui avait reçu une libération anticipée littéralement quelques jours avant sa mort. 

Revenant sur l’évocation par le Procureur de la montée des discours faisant l’apologie des crimes de guerre, le délégué a déclaré que cela s’explique par « la partialité des décisions du TPIY et du Mécanisme », car la grande majorité des personnes condamnées sont des Serbes, alors que les représentants d’autres parties au conflit sont peu condamnés.  Il a fustigé le « deux poids, deux mesures » et la « politisation du travail des organes de justice pénale internationale ».  Quant au procès contre MM Stanišić et Simatović, il restera probablement dans l’histoire comme l’un des plus longs et des plus controversés de l’histoire de la justice internationale.  Cela a commencé par la présentation des accusations en 2003, a retracé le délégué.  Ensuite, en 2013, la Chambre de première instance du TPIY a entièrement acquitté les deux accusés, puisque leur implication directe dans les événements tragiques survenus sur le territoire de l’ancienne Yougoslavie n’a pas été établie.  Un appel a suivi et le 15 décembre 2015, la Chambre d’appel du TPIY a annulé les acquittements et ordonné un nouveau procès, repris par le Mécanisme en 2017.  Les deux prévenus ont été condamnés à 12 ans de prison le 30 juin 2021, et la procédure d’appel a traîné jusqu’au 31 mai 2023 quand les inculpés ont vu leur peine passer de 12 à 15 ans.  « Nous considérons ce verdict comme une parodie flagrante des dispositions des instruments juridiques internationaux fondamentaux », a conclu le délégué. 

M. ANDRIS STASTOLI (Albanie) a salué l’arrêt du 31 mai 2023 du Mécanisme résiduel, qui condamne deux alliés de l’ancien Président serbe Slobodan Milošević, comme étape importante dans la quête de justice dans les Balkans.  Il a aussi salué le Bureau du Procureur et de l’équipe de recherche pour l’arrestation de M. Kayishema, tout en regrettant que M. Kabuga ait été déclaré inapte à être jugé, privant de justice les personnes lésées.  Rappelant que les États Membres sont tenus de coopérer avec le Mécanisme pour exécuter les mandats d’arrêt sans délai, il a déploré le refus persistant de certains d’entre eux de coopérer, en particulier concernant les mandats contre Jojić et Radeta qui doivent être exécutés rapidement par la Serbie.  Cette attitude « offense et déshonore la mémoire de milliers de victimes partout dans le monde, notamment à Srebrenica, Vukovar et Raçak », a-t-il affirmé.  Qualifiant les atrocités commises en ces lieux de « chapitre le plus sombre » de l’histoire des Balkans, il a ajouté que leur traitement par la justice était nécessaire afin d’ouvrir une période de réconciliation et de paix durable dans la région.  Il a affirmé que la lutte contre l’impunité, l’incitation à la violence et la négation des atrocités, ainsi que la condamnation de la glorification des criminels de guerre, étaient essentielles pour empêcher la répétition de crimes odieux et aller de l’avant vers un avenir plus prometteur.  Enfin, le délégué a appelé le Conseil de sécurité à veiller à ce que le Mécanisme reçoive les ressources nécessaires pour remplir pleinement son mandat.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a soutenu le rôle du Mécanisme et enjoint tous les États à coopérer avec lui.  Elle a salué la récente arrestation de Fulgence Kayishema qui fut longtemps recherché pour le meurtre atroce présumé de plus de 2 000 réfugiés tutsis.  La déléguée a félicité le Procureur et ses équipes pour leurs efforts, ainsi que l’Afrique du Sud, l’Eswatini, le Mozambique et le Rwanda pour leur soutien important.  Elle espéré que les trois autres fugitifs seront tenus pour responsables de leurs actes dans un proche avenir.  Au sujet de la conclusion de l’affaire Stanišić et Simatović, elle s’est félicitée de constater que 30 ans après sa création, « nous avons enfin assisté à l’achèvement du mandat confié par le Conseil de sécurité au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ».  En ce qui concerne les autres affaires en cours, comme l’affaire Kabuga, la déléguée à pris note de la décision de la Chambre de première instance d’adopter la procédure dite du « procès des faits », souhaitant qu’elle permette de découvrir la vérité et de contribuer à une future réconciliation.  Même si une procédure équitable et légitime demande du temps, a-t-elle conclu, la justice doit être rendue le plus rapidement possible pour les victimes et la société. 

M. GENG SHUANG (Chine) a fortement insisté sur le fait que le Mécanisme a été conçu pour être une structure de « petite taille », « temporaire » et « efficace ».  Il a appelé à rationner ses dépenses, espérant que ses fonctions judiciaires diminueraient au fil du temps.  « Le Mécanisme doit limiter ses dépenses », a insisté le délégué chinois.  Il a également souligné la nécessaire coopération entre États pour qu’il s’acquitte de son mandat.  Le délégué a enfin témoigné de sa préoccupation au sujet de la situation des personnes acquittées ou libérées ayant été réinstallées au Niger en décembre 2021, jugeant important que le Conseil s’y penche.

M. CHANAKA LIAM WICKREMASINGHE (Royaume-Uni) a félicité le Mécanisme résiduel pour les condamnations définitives de Jovica Stanišić et Franko Simatović, qui concluent les principales affaires du TPIY et constituent des succès de taille pour la justice internationale.  Il a aussi salué l’arrestation récente de Fulgence Kayishema par les équipes de recherche des fugitifs du Mécanisme et les autorités sud-africaines, qui rappelle l’engagement permanent du MIFRTP à rendre justice aux victimes du génocide tutsi au Rwanda.  Il a également salué « l’importante contribution » de l’Eswatini et du Mozambique à cette enquête.  Prenant note de la décision de la Chambre de première instance estimant que Félicien Kabuga n’était plus en état d’être jugé et que son affaire devait être poursuivie dans le cadre d’une procédure alternative de recherche de preuves, il a dit « attendre avec impatience » les prochaines mises à jour sur son cas et souligné l’engagement de son pays pour que les auteurs du génocide contre les Tutsis rendent compte de leurs actes.  Il s’est dit préoccupé par les informations faisant état d’un déni continu du génocide et a qualifié cette situation d’insupportable, tant par son impact sur les victimes que par le fait qu’elle entrave les efforts de la communauté internationale visant à décourager de nouvelles atrocités.  Il s’est aussi dit « profondément préoccupé » par les rapports continus du Mécanisme concernant certains États qui bloquent la coopération dans les Balkans occidentaux, ajoutant qu’il était grand temps que la Serbie arrête et transfère Petar Jojić et Vjerica Radeta au Mécanisme. Constatant que ce dernier avait encore beaucoup de travail devant lui, même si la phase de procès était presque terminée, il a rappelé qu’il lui incombait de superviser les peines de 47 personnes, de protéger des témoins et de soutenir des procédures nationales au Rwanda et en ex-Yougoslavie. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a salué le rôle du Mécanisme, disant attendre avec intérêt la suite donnée à l’arrêt rendu dans l’affaire Kabuga.  Il a rappelé l’importance de la coopération judiciaire entre le Mécanisme et les tribunaux nationaux, afin de veiller à ce que les crimes comme les génocides ne restent pas impunis.  Il a aussi encouragé la Présidente du Mécanisme à œuvrer pour la transition des activités du tribunal.  Une transition en douceur, a-t-il précisé, pour permettre de préserver l’héritage des tribunaux pénaux du Rwanda et de l’ex-Yougoslavie.  Il a enfin condamné la tendance actuelle à la négation des crimes de guerre et de génocide, indiquant que cela rend les efforts de réconciliation encore plus ardus.

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a salué les fonctions résiduelles du Mécanisme, dont la contribution joue un rôle de premier plan dans la reddition de la justice et la lutte contre l’impunité. Elle a de nouveau dit à la communauté internationale qu’elle se devait d’aborder les causes profondes des crimes mis en lumière par le Mécanisme, crimes très souvent alimentés par les discriminations, le racisme et les discours de haine.  Exprimant ses condoléances aux victimes et aux survivants des crimes, elle a rappelé au Mécanisme ses fonctions de premier plan dans l’affaire Kabuga.  La responsabilité du Mécanisme est aussi d’aider les instances juridictionnelles nationales, en prêtant main forte aux procureurs et aux juges de juridictions internes, a-t-elle souligné.  Son efficacité assurée, le Mécanisme doit maintenant pouvoir planifier sa transition, conformément au mandat instauré par le Conseil de sécurité.  La déléguée émirienne a exhorté tous les États à collaborer avec le Mécanisme et à le soutenir.  La coopération peut engendrer des résultats, comme en témoigne l’arrestation récente en Afrique du Sud du Rwandais Fulgence Kayishema, en cavale depuis plus de deux ans, a-t-elle conclu.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a affirmé que son pays appréciait la coopération avec le Mécanisme résiduel et a félicité le Procureur pour la récente arrestation de Fulgence Kayishema, l’un des fugitifs figurant sur la liste des personnes les plus recherchées par le TPIR.  Il a salué la coopération des forces de l’ordre de l’Afrique du Sud, du Mozambique, de l’Eswatini et des enquêteurs des Nations Unies dans cette affaire.  Le délégué a souligné que le Mécanisme résiduel avait officiellement confirmé la capacité du Rwanda à mener des procès pour génocide dans le respect total des normes internationales, rappelant que son pays avait tenu les procès des affaires renvoyées par le Mécanisme.  Compte tenu du nombre important d’appels, le Rwanda se félicite du soutien continu fourni par le Mécanisme. 

Indiquant qu’en juin 2023, le Rwanda aura émis 1 148 actes d’accusation contre des suspects de génocide dans 33 pays et au Secrétariat d’Interpol, le délégué a appelé les pays concernés à redoubler d’efforts pour arrêter les fugitifs se trouvant dans leurs juridictions.  Il a regretté que la justice soit ralentie par le manque de coopération de certains États Membres, malgré les mandats clairs du Conseil de sécurité et des mécanismes juridiques pertinents, estimant que de tels retards entravaient la possibilité de juger les criminels.  La décision de la Chambre de première instance du Mécanisme résiduel, selon laquelle Félicien Kabuga n’est pas apte à poursuivre son procès, est un exemple récent de ce problème, selon lui.  Le délégué a exprimé sa gratitude envers les pays ayant démontré leur engagement en faveur de la justice en extradant ou en poursuivant les fugitifs sur leur sol, notamment la Belgique, la France, les États-Unis, l’Ouganda, les Pays-Bas, le Canada, la Norvège, l’Allemagne, la République démocratique du Congo (RDC), le Danemark, la Suède, le Malawi, le Congo, la Finlande et la Suisse.  La lutte contre l’impunité n’est pas une tâche que le Rwanda doit assumer seul, a-t-il insisté, il s’agit d’une responsabilité collective de la communauté internationale.  En conclusion, le délégué a demandé à tous les États de tenir compte de la gravité des crimes commis pendant le génocide contre les Tutsis, de la souffrance prolongée des survivants et de l’instabilité potentielle que favorise l’impunité persistante: « une justice retardée est une justice refusée ».

M. SVEN ALKALAJ (Bosnie-Herzégovine) a effectué un rappel historique, remontant à juin 1992, quand son pays a recouvré son indépendance, « très cher payée », la Bosnie ayant été attaquée de l’extérieur et de l’intérieur, coupée en deux contre son gré.  En mettant en place le TPIY, le Conseil a contribué à la justice de manière déterminante. Pour la Bosnie-Herzégovine, l’importance de ce tribunal est immense, a insisté le délégué, saluant son rôle en droit international humanitaire et la lutte contre le révisionnisme et le déni de l’histoire, surtout dans l’affaire Stanišić et Simatović.  Il a été prouvé, sans le moindre doute, que le massacre de Srebrenica fut un génocide, a-t-il martelé.  Même si les membres des familles des victimes ne pourront jamais revoir leurs proches, « justice a été rendue ». 

Déplorant un manque de contrition des criminels de guerre, le délégué a mentionné le Croate de Bosnie Dario Kordić, qui a déclaré qu’il commettrait ses crimes de nouveau si c’était à refaire.  S’insurgeant contre le déni et le révisionnisme en assurant qu’ils continueraient à être voués à l’échec, le délégué les a comparés à « une maladie terrible » et prévenu que tant que certaines personnes refuseront de se remettre en question, le danger guettera encore.  Il a aussi mis en garde contre la fragilisation du retour de la confiance entre la Bosnie-Herzégovine et ses voisins.  Peut-être que les pays de l’ancienne Yougoslavie pourront de nouveau se faire confiance, mais « le pardon ne peut venir qu’après l’aveu », a-t-il déclaré.  Certaines affaires n’ont toujours pas trouvé d’issue.  Le travail d’assistance du Mécanisme est essentiel, mais c’est aux institutions judiciaires nationales de prendre le relais, s’agissant des crimes commis en Croatie, en Serbie ou au Monténégro.  La Bosnie-Herzégovine, a assuré le délégué, est décidée à poursuivre toute personne potentiellement coupable de crimes, quels que soient l’endroit où elle se trouve, ses origines ou sa religion.  À cette fin, elle continue de coopérer étroitement avec le Mécanisme pour résorber les retards accumulés. 

M. NEMANJA STEVANOVIC (Serbie) a constaté qu’avec une décision définitive prise dans l’affaire Stanišić et Simatović, les dossiers en rapport avec le TPIY sont terminés.  Il a espéré que le Mécanisme respectera les dispositions des résolutions 1966 (2010) et 2637 (2022) du Conseil de sécurité, le Mécanisme devant établir un calendrier de transition afin de diminuer ses tâches.  Cela permettrait aux systèmes de justice pénale nationaux de poursuivre le travail entrepris.  La Serbie pour sa part est prête à prendre le relai et à respecter les décisions prises par le Mécanisme, a assuré le délégué. 

Le délégué a dénoncé le fait que le Mécanisme refuse de renvoyer des documents pertinents en Serbie, malgré l’insistance du pays qui ne comprend pas pourquoi ce n’est pas le cas.  Il s’est dit surpris que le rapport du Mécanisme mentionne un manque de coopération entre la justice serbe et la justice croate, ce qui permettrait à l’impunité de perdurer.  Selon lui, le Bureau du Procureur ignore le fait qu’il existe un cadre de coopération entre les bureaux des procureurs des deux pays, rendu possible par les accords européens et sans qu’il soit nécessaire d’établir un accord bilatéral. Après la fin du dernier procès sur l’ex-Yougoslavie, la Serbie espère une meilleure coopération avec le Mécanisme dans le cadre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, a conclu le délégué. 

M. IVAN ŠIMONOVIC (Croatie) a rappelé que le Mécanisme résiduel avait finalement rendu son dernier jugement pour des crimes perpétrés en Croatie et en Bosnie-Herzégovine dans les années 90.  Il a souligné que le verdict contre Jovica Stanišić et Franko Simatović, anciens hauts responsables des services de sécurité serbes, qui ont participé à une entreprise criminelle commune dirigée par feu Slobodan Milošević, avec la participation des chefs rebelles serbes de Croatie et de Bosnie-Herzégovine, établit un lien clair entre les dirigeants serbes et les crimes atroces commis en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.  Regrettant que Stanišić et Simatović n’aient pas été condamnés pour une longue liste de crimes supplémentaires, le représentant a espéré que ce jugement apportera un peu de réconfort aux victimes et contribuera à la réconciliation et à une paix durable dans la région.

Le représentant a regretté que le Président du Mécanisme ait été contraint de souligner une nouvelle fois devant le Conseil de sécurité que la Serbie n’avait pas arrêté et transféré Petar Jojić et Vjerica Radeta à La Haye.  « L’intimidation et la corruption de témoins sont des crimes graves et agir conformément au mandat d’arrêt du Mécanisme est une obligation nationale en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies », a-t-il ajouté.  La Croatie attend toujours la réponse de la Serbie à son invitation au quatrième et dernier cycle de négociations en vue d’un accord bilatéral sur le traitement des crimes de guerre, a rappelé le représentant, fustigeant les procédures à motivation politique non conformes aux normes juridiques internationales.  Il a qualifié d’inacceptables la glorification des criminels de guerre et la négation des crimes commis, y compris le génocide de Srebrenica, car elles augmentent la souffrance des victimes, entravent la réconciliation et déstabilisent la région.  Il a aussi regretté l’absence de volonté politique serbe dans la recherche des 1 807 citoyens croates toujours portés disparus, notamment en bloquant l’accès aux archives.  Appelant à l’amélioration de la coopération bilatérale entre les deux États, il a demandé au Mécanisme de donner la priorité à la recherche des disparus et des dépouilles mortelles au cours du court mandat qui lui reste à accomplir.

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