La Troisième Commission examine la situation des 114 millions de réfugiés et déplacés dans le monde, total record dans l’histoire des déplacements forcés
Le nombre total des personnes forcées à fuir dans le monde s’élève aujourd’hui à plus de 114 millions, un chiffre record, en hausse de quatre millions depuis le dernier décompte, a alerté cet après-midi le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, venu dialoguer avec la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles.
Dès l’entame de son exposé à la Commission, M. Filippo Grandi s’est déclaré « choqué » par les événements survenus en Israël et à Gaza au cours des dernières semaines, se faisant l’écho des appels lancés par le Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu immédiat, d’un accès humanitaire sans entrave, de la libération des otages et de la reprise du processus de paix. Il s’est dit tourmenté par les pertes civiles israéliennes et palestiniennes, et par les immenses souffrances infligées aux habitants de la bande de Gaza, dont la moitié sont des enfants.
M. Grandi a averti que, bien que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) n’ait pas pour mandat d’intervenir dans les territoires palestiniens, une extension du conflit pourrait affecter les millions de réfugiés sous sa responsabilité dans les pays voisins.
Appelant la communauté internationale à se montrer capable de répondre à plus d’une crise à la fois, le Haut-Commissaire a indiqué que 90% des 114 millions de réfugiés vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, un constat appuyé par l’Égypte et le Nigéria. Le Maroc a, lui, rappelé qu’un réfugié sur cinq et qu’un déplacé sur trois vit en Afrique.
S’agissant des principales causes de déplacements enregistrées au cours de l’année écoulée, il a cité la guerre au Soudan, qui a fait cinq millions de déplacés et un million de réfugiés, les violences dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), qui ont déplacé 1,5 million de personnes, et les changements climatiques, qui, combinés au conflit, ont poussé 900 000 personnes à quitter leur foyer en Somalie. À ce sombre bilan, il a ajouté les plus de 400 000 déplacés au Myanmar -en plus de ceux qui ont cherché refuge à l’étranger, dont un million de Rohingya au Bangladesh– et les 100 000 réfugiés arrivés en quelques jours en Arménie le mois dernier, sans oublier les nombreux Ukrainiens qui continuent de fuir l’invasion russe.
Dans ce contexte, il a regretté que, face à un nombre record de crises -46 situations d’urgence dans 32pays au cours des 12 derniers mois- le financement ne suive pas. Malgré d’importants efforts de priorisation et de rationalisation, il a indiqué que le HCR est confronté à un déficit de 600 millions de dollars à combler avant la fin de l’année. Si les efforts déployés auprès du secteur privé lui ont permis de recevoir 1,2 milliard de dollars, « ce n’est pas assez », a-t-il dit. Alors que les perspectives pour 2024 sont encore plus inquiétantes, il a appelé tous les États Membres, notamment ceux du Golfe, à faire davantage pour le HCR.
De nombreux États se sont alarmés du manque de financement du HCR. Parmi eux, le Danemark a tenu à rappeler que, contrairement à d’autres, il verse à l’agence onusienne des contributions « inconditionnelles ». M. Grandi a précisé à cet égard que seulement 12% des fonds versés au HCR par les États le sont sans demande d’attribution précise, ce qui représente une « contrainte » non négligeable. Le Haut-Commissaire a indiqué que ces questions de financement seraient examinées lors du deuxième Forum mondial sur les réfugiés, organisé mi-décembre.
Saluant les efforts de rationalisation des activités du HCR, l’Union européenne l’a toutefois appelé à inclure des informations mises à jour régulièrement sur la définition des priorités, la réduction des coûts et l’accroissement de l’efficacité. Elle l’a aussi invité à élargir sa collaboration avec les autres agences des Nations Unies, notamment l’OIM, le PAM, l’UNICEF, l’OMS et le PNUD.
De son côté, soutenant que le HCR a pour mission d’aider les États à relever les défis liés aux routes migratoires, M. Grandi a assuré qu’il continuera à tout faire pour garantir l’accès des demandeurs d’asile au territoire de leur pays de destination. Insistant sur le principe de non-refoulement, il s’est fermement opposé à l’externalisation et à la sous-traitance de l’asile. En réponse aux interrogations sur les réfugiés climatiques, il a dit espérer que la COP28 abordera l’impact du dérèglement du climat sur les déplacements de population, avec des ressources à la clef. La Fédération de Russie a, pour sa part, estimé que le traitement de ces questions par le HCR outrepasse son mandat et relève de la compétence d’autres plateformes internationales, comme la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP).
Si l’Ukraine et la Pologne ont souhaité savoir comment le HCR entendait appuyer la réalisation du plan humanitaire à destination des réfugiés ukrainiens pour 2024, la Fédération de Russie a fait valoir qu’elle avait accueilli depuis février 2022 cinq millions de réfugiés ayant fui les régions de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporizhzhia. Observant que la « crise migratoire ukrainienne » en Europe a démontré qu’il est possible de gérer d’importants flux de réfugiés, la délégation russe a regretté que les pays occidentaux ne fassent pas preuve de la même volonté politique lorsqu’il s’agit des réfugiés en provenance d’autres régions du monde, évoquant la situation « tragique » en Méditerranée. Quant au droit au retour des réfugiés en provenance d’Arménie et d’Azerbaïdjan, M. Grandi a reconnu qu’il ne pourrait être envisagé que dans le cadre d’une solution politique à grande échelle, ce qui dépasse le mandat du HCR.
La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 1er novembre, à partir de 10 heures.
RAPPORT DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS, QUESTIONS RELATIVES AUX RÉFUGIÉS, AUX RAPATRIÉS ET AUX DÉPLACÉS ET QUESTIONS HUMANITAIRES (A/78/12 (Part I), A/78/12 (Part II), A/78/12/Add.1, A/78/183)
Déclaration liminaire d’un haut fonctionnaire duSecrétariat, suivie d’un dialogue interactif
Exposé
« Nous avons tous été choqués par les événements survenus en Israël et à Gaza au cours des quatre dernières semaines », a affirmé M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, se faisant l’écho des appels lancés par le Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu immédiat, d’un accès humanitaire sans entrave, de la libération des otages et de la reprise du processus de paix. Il a rendu hommage aux humanitaires, personnel des Nations Unies, des ONG, du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), du Croissant-Rouge, qui, sur le terrain, font ce qu’ils peuvent « dans des circonstances terrifiantes », avant de présenter ses condoléances aux familles et aux collègues des 63 employés de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) qui ont perdu la vie. Il a rappelé que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) n’a pas pour mandat de travailler dans les territoires palestiniens occupés, mais s’est dit tourmenté par les pertes civiles israéliennes et palestiniennes, et par les immenses souffrances infligées à la population de Gaza par l’opération militaire israélienne. Rappelant que la moitié des habitants de Gaza sont des enfants, il a appelé à protéger les civils et les infrastructures civiles, conformément au droit humanitaire international, et à leur fournir une aide humanitaire adéquate. Il s’est aussi inquiété d’une possible extension du conflit dans des pays voisins où le HCR intervient auprès de réfugiés.
Appelant la communauté internationale à être capable de répondre à plus d’une crise à la fois, M. Grandi a rappelé que plus de 114 millions de personnes ont été forcées de fuir à travers le monde, un chiffre en hausse de quatre millions depuis le dernier décompte du HCR, dont près de 90% vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. Dans un monde qui « tolère » une telle situation, il n’est guère étonnant, selon lui, de ne pas parvenir à accomplir des progrès significatifs dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Il a rappelé que la guerre qui a commencé le 15 avril au Soudan a poussé près de six millions de personnes à quitter leur foyer, dont plus d’un million de réfugiés dans des pays voisins déjà fragiles, comme le Tchad, dont la population de réfugiés a presque doublé pour atteindre un million en quelques mois. Après avoir plaidé pour un cessez-le-feu au Soudan et évoqué les nombreux Ukrainiens qui continuent de faire face à la mort et à la destruction résultant de l’invasion russe, il a aussi rappelé que, cette année, près de 1,5 million de personnes ont été déracinées par les violences dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) et qu’en Somalie, les changements climatiques, combinés au conflit, ont forcé près de 900 000 autres à quitter leur foyer. À ce sombre bilan annuel, il a ajouté les plus de 400 000 déplacés au Myanmar -en plus de ceux qui ont cherché refuge à l’étranger, dont un million de Rohingya au Bangladesh– et les 100 000 réfugiés arrivés en quelques jours en Arménie le mois dernier.
Dans ce contexte, le Haut-Commissaire a regretté que, face à un nombre record de crises -46 situations d’urgence dans 32 pays au cours des 12 derniers mois- le financement ne suive pas. Malgré d’importants efforts de priorisation et de rationalisation, il a indiqué que le HCR est confronté à un déficit de 600 millions de dollars à combler avant la fin de l’année. Si les efforts déployés par le HCR auprès du secteur privé lui ont permis de recevoir 1,2 milliard de dollars l’an dernier de particuliers, d’entreprises et de fondations, « ce n’est pas assez” ». Alors que les perspectives pour 2024 sont encore plus inquiétantes, il a appelé tous les États Membres, notamment à ceux du Golfe, à faire davantage pour le HCR. Plus alarmant encore, il a avoué s’inquiéter, pour la première fois en huit années de mandat, de la situation financière de l’ensemble du système humanitaire. « Nous sommes, collectivement, à un point de rupture », a-t-il martelé, pointant l’incapacité des États à prévenir les conflits et à y mettre fin. Au chapitre des motifs de satisfaction, il a noté le renforcement des partenariats avec les acteurs du développement, comme la Banque mondiale, la réinstallation des déplacés en hausse et des progrès pour lutter contre l’apatridie. Il a insisté sur la nécessité d’inclure les réfugiés dans les sociétés d’accueil, notamment grâce au travail.
Soutenant que le HCR est là pour aider les États à relever les défis liés aux routes migratoires, M. Grandi a assuré qu’il continuera à exercer son mandat et à faire tout ce qui est en son pouvoir pour garantir le maintien de l’accès au territoire pour demander l’asile, insistant sur le principe de non-refoulement et le refus de l’externalisation ou la sous-traitance de l’asile. Enfin, à l’approche du deuxième Forum mondial sur les réfugiés, mi-décembre, il a souhaité que les nations se rassemblent et se concentrent sur la protection, l’aide et la recherche de solutions pour les 114 millions de personnes dans le monde qui ont « toutes les raisons de se sentir
Dialogue interactif
À la suite de cet exposé, l’Égypte a appuyé les propos du Haut-Commissaire concernant le cessez-le-feu et l’accès humanitaire à Gaza. Indiquant qu’elle accueille 350 000 réfugiés et leur fournit un accès aux services de base, elle a rappelé que 76% des réfugiés dans le monde se trouvent dans des pays en développement, un constat repris également par le Nigéria. Dans ces conditions, quelles mesures financières innovantes permettraient d’éviter d’alourdir la charge qui pèse sur les pays en développement, a demandé la délégation égyptienne. Alors que les contributions volontaires au HCR posent problème, comment pourrait-on mettre en place un modèle avec des coûts quantifiables à la charge des pays, s’est interrogé le Bangladesh, avant de demander à M. Grandi comment il envisage l’avenir des opérations humanitaires. La Chine a, elle, insisté sur la nécessité pour tous les pays d’honorer leurs engagements et de fournir aux pays hôtes l’assistance financière et techniques.
Face aux défis humanitaires rencontrés cette année, le Canada s’est dit favorable au développement de nouveaux modèles, notamment en matière de financement. Quels sont les partenariats que le HCR recherche pour que les services d’éducation soient plus largement accessibles aux réfugiés, ont ensuite voulu savoir les États-Unis. Rappelant qu’elle co-organisera le deuxième Forum mondial sur les réfugiés en décembre, la Suisse a jugé impératif que la communauté internationale saisisse cette opportunité pour mobiliser toutes les forces vives autour d’une réponse efficace et cohérente. Qu’est-ce qu’il nous faut pour y parvenir malgré l’augmentation des raisons des déplacements et la réduction des moyens d’y faire face, a-t-elle demandé au Haut-Commissaire, rejointe dans cette interrogation par le Portugal.
L’Ukraine et la Pologne ont souhaité savoir comment le HCR entend appuyer la réalisation du plan humanitaire à destination des réfugiés ukrainiens pour 2024. De son côté, le Venezuela a dénoncé la sélectivité de certaines approches du HCR concernant sa situation particulière. Il s’est interrogé sur la définition du terme « déplacés » si le droit international n’est pas appliqué et si cette catégorie ne s’applique pas à toutes les régions. De plus, il a déploré l’absence de traitement des mesures coercitives unilatérales et de leurs conséquences par le HCR, demandant des éclaircissements sur ce point à M. Grandi. Dans le même ordre d’idées, la République islamique d’Iran a demandé l’avis du Haut-Commissaire sur l’assistance humanitaire qu’elle continue de fournir en dépit des sanctions qui lui sont imposées. Sur cette même ligne le Bélarus a demandé à M. Grandi comment il compte éviter la politisation du prochain Forum mondial sur les réfugiés.
Abordant la question des garanties à offrir aux réfugiés pour leur permettre un retour sûr et digne, l’Arménie a voulu savoir quels mécanismes le Haut-Commissaire compte mettre en place pour les réfugiés arméniens qui ne retourneront pas au Haut-Karabakh sans une protection suffisante. L’Afghanistan s’est, pour sa part, félicité que la situation des réfugiés afghans soit évoquée dans le rapport de M. Grandi. Après avoir rappelé que leur sort ne fait que s’aggraver en raison de l’absence de statut juridique, il a demandé au Haut-Commissaire ce qu’il compte faire face à la « déportation » de 1,4 million de réfugiés afghans au Pakistan. De même, le Liban s’est enquis des mesures prises par le HCR pour assister les déplacés internes en Syrie. Quelle méthodologie avez-vous appliquée pour mesurer l’impact des réfugiés dans les pays d’accueil, s’est interrogée la délégation.
L’Azerbaïdjan s’est, en revanche, dit déçu que le droit au retour de 200 000 réfugiés azerbaïdjanais n’ait pas été pris en compte dans les remarques du Haut-Commissaire. Le Maroc a rappelé que l’Afrique abrite un réfugié sur cinq et un déplacé sur trois dans le monde, notamment en raison des changements climatiques dont le continent n’est pas responsable. Il a demandé comment le HCR prévoit d’enregistrer les réfugiés dans des camps sous contrôle d’acteurs non étatiques et comment lutter contre les détournements de fonds dans ces situations. À sa suite, le Soudan a demandé des exemples de méthodes efficaces pour faire face aux besoins humanitaires, notamment pour les femmes et les enfants déplacés. Le Pakistan a quant à lui rappelé que, bien qu’il n’ait pas signé la Convention de 1951, il a accueilli des millions de réfugiés et travaille actuellement au rapatriement d’étrangers illégaux.
À son tour, l’Indonésie s’est inquiétée de la situation en Palestine, demandant instamment à la communauté internationale et aux organisations internationales de mettre un terme au cycle de violence actuel. La République arabe syrienne a invité les États Membres à coopérer avec elle pour reconstruire le pays et permettre le retour des réfugiés syriens. Le Cameroun s’est félicité du fait que l’éducation reste une priorité du HCR, avant de s’enquérir de sa stratégie pour accroître ces efforts. Au nom des pays nordiques, le Danemark s’est alarmé du manque de financement du HCR, tout en rappelant qu’il lui verse des contributions « inconditionnelles ». Il a souhaité savoir ce que le Haut-Commissaire attend en priorité du prochain Forum mondial sur les réfugiés. Enfin, après avoir détaillé l’aide qu’il fournit aux réfugiés, l’Ordre souverain de Malte a demandé à M. Grandi dans quelle mesure il est possible d’encourager à davantage de partage des responsabilités au niveau international, sans accroître le fardeau pour les pays en développement.
Réagissant aux interrogations et remarques des délégations, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés a d’abord répondu au Bangladesh, au sujet de la sécurité du personnel humanitaire. Selon lui, les événements de Gaza montrent à quel point les travailleurs humanitaires sont exposés, comme l’atteste la mort de 67 employés de l’UNRWA. À l’aune de ces risques, il faut répéter haut et fort que le droit international interdit le ciblage de civils, tout comme celui des travailleurs humanitaires, a-t-il martelé. Mais il convient aussi d’accroître les investissements dans la sécurité du personnel humanitaire, parfois couteuse, a-t-il ajouté.
Répondant ensuite au Canada, M. Grandi a déploré les « terribles défis » du financement des activités humanitaires. Renvoyant à sa déclaration liminaire, il a appelé à considérer de nouveaux modèles, qui s’appuient par exemple sur une coopération avec la Banque mondiale et d’autres institutions financières internationales. Ces nouveaux modèles non seulement permettent de mobiliser des ressources plus importantes, mais aident aussi les pays hôtes à mieux repartir les avantages entre les communautés d’accueil et les réfugiés. « Tout le monde y gagne », a-t-il résumé.
Le Haut-Commissaire a ensuite abordé la question de l’attribution des fonds soulevée par l’Algérie. Il a ainsi rapporté qu’en 2022, les fonds versés par les États sans demande d’attribution précise ne représentaient que 12% du total, ce qui représente une contrainte pour le HCR. Il a donc souhaité que les contributions volontaires cessent d’être accompagnées de conditions. Notre modèle est, certes, inadéquat, mais nous avons besoin de ressources, a-t-il expliqué, confirmant que le sous-financement actuel de 600 millions de dollars constitue une situation dramatique pour l’agence et ses programmes. Les questions de financement seront amplement examinées lors du Forum mondial sur les réfugiés, auquel participeront non seulement les États mais aussi des acteurs non étatiques, reflétant ainsi l’esprit du Pacte mondial sur les réfugiés, a-t-il ajouté.
À la question du Bélarus sur la « politisation » présumée du Forum mondial sur les réfugiés, M. Grandi a répondu que la lutte contre cette tendance incombe en premier lieu aux États Membres. « Nous ne politisons pas notre travail au HCR », a-t-il assuré. Il a par ailleurs remercié les États-Unis pour leur contribution financière « extraordinaire », qui est de loin la plus importante parmi les États. Réagissant à une remarque de la Suisse, il a dit espérer que la COP28 mettra sur la table l’impact des changements climatiques sur les déplacements de population ainsi que la mise à disposition de ressources.
Le Haut-Commissaire a d’autre part appelé la communauté internationale à aider l’Iran à accueillir les réfugiés afghans, avant de demander au Pakistan de traiter avec humanité ceux qui se trouvent sur son sol sans être officiellement enregistrés. Ces personnes peuvent être exposées à des situations particulièrement difficiles, a-t—il expliqué. Enfin, abordant le thème de l’exode des populations arméniennes du Haut-Karabakh, le Haut-Commissaire a estimé que, compte tenu de la complexité de la situation, le retour des réfugiés ne pourra être envisagé que dans le cadre d’une solution politique élargie, laquelle dépasse le cadre de travail du HCR.
Discussion générale
M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne (UE) a condamné l’augmentation du nombre de violations du droit international humanitaire, affirmant que l’accès à l’aide doit être préservé, de même que la sécurité des personnels humanitaires et médicaux, que les parties au conflit soient des acteurs étatiques ou non étatiques. Le représentant a, d’autre part, indiqué qu’en 2022, l’aide humanitaire totale apportée par l’UE et ses États membres a atteint 12,2 milliards d’euros, soit 30% du financement humanitaire mondial, dont la majeure partie est allée aux personnes déplacées de force et à leurs communautés d’accueil. Affirmant que l’UE et ses États membres entendent redoubler d’efforts dans ce domaine, il a précisé qu’ils consacreront au moins 0,7% de leur revenu national brut à l’aide publique au développement d’ici à 2030. Il a ensuite assuré que le droit d’asile et le principe de non-refoulement restent au cœur de la politique de l’UE. Il a par ailleurs qualifié le deuxième Forum mondial sur les réfugiés, attendu à la mi-décembre, de « tremplin important pour tous les acteurs », souhaitant qu’il produise des progrès tangibles et que ses conclusions fassent l’objet d’un suivi. Saluant les efforts de rationalisation des activités du HCR, il a appelé l’agence onusienne à inclure des informations mises à jour régulièrement sur la définition des priorités, la réduction des coûts et l’accroissement de l’efficacité. Il a enfin invité le HCR à élargir sa collaboration avec les autres agences des Nations Unies, notamment l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Programme alimentaire mondial (PAM), le Fond des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).
S’exprimant au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, M. ROBERT ALEXANDER POVEDA BRITO (Venezuela) a rappelé que le contexte actuel est marqué par des situations d’urgence majeures qui nécessitent une protection internationale pour des milliers de personnes contraintes de quitter leur lieu d’origine pour des raisons indépendantes de leur volonté. Il a appelé à redoubler tous les efforts diplomatiques et politiques en vue de parvenir à un cessez-le-feu et à un arrêt de toutes les violences contre les civils, tout en insistant sur l’adoption urgente de mesures visant à fournir une protection internationale pour les personnes déplacées et à leur famille à commencer par les Palestiniens. Après avoir estimé que les fondements de la Charte des Nations Unies sont de plus en plus menacés par les tendances unilatérales, il a salué le travail de l’ONU dans le domaine de l’assistance humanitaire, y compris celui du Bureau du HCR, en insistant sur la nécessité d’assurer une adhésion totale aux principes fondamentaux d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance opérationnelle, tels qu’énoncés dans la résolution 46/182 de l’Assemblée générale.
Le représentant a ensuite estimé que l’unilatéralisme, l’extrémisme et l’interventionnisme étranger sont les principales causes des crises mondiales qui génèrent des déplacements humains massifs. À ses yeux, les mesures coercitives unilatérales sont même la « cause fondamentale la plus sophistiquée et la plus cruelle des urgences humanitaires nouvelles et potentielles ». Enfin, après avoir souligné l’importance du pilier humanitaire de l’ONU, il a demandé instamment à toutes les parties impliquées dans ces opérations d’agir dans le strict respect de la législation nationale et internationale et d’éviter que leur travail ne soit détourné pour des motifs économiques ou commerciaux.
S’exprimant au nom des pays nordiques, Mme RASMUSSEN (Danemark) a rappelé que 67% des réfugiés et personnes déplacées se trouvent dans des situations de conflit. Cela affecte non seulement ces 110 millions de personnes concernées mais aussi les communautés et pays hôtes, a souligné la représentante, qui a insisté sur la nécessité de faire respecter le droit international humanitaire par toutes les parties à un conflit. Saluant le fait que la communauté internationale ait adopté, au fil des décennies, des mesures et des cadres qui guident l’aide aux populations réfugiées, elle a souhaité que les États Membres continuent d’agir sur la base du principe de solidarité.
La déléguée a ensuite déploré que les violences sexuelles et sexistes à l’encontre des personnes réfugiées et déplacées atteignent des niveaux alarmants, avant de saluer l’approche du HCR fondée sur le genre et la diversité. Elle a, d’autre part, souligné la nécessité d’élargir les partenariats stratégiques avec le HCR, notamment pour faire face au défi des changements climatiques pour les réfugiés et les personnes déplacées. Après cette année « difficile », elle a souhaité que le prochain Forum sur les réfugiés soit l’occasion de renforcer l’action collective pour ces populations et d’appuyer les pays hôtes.
Mme AL JARADI (Oman), qui s’exprimait au nom du Conseil de coopération du Golfe, a affirmé que l’aide aux personnes dans le besoin, priorité de son pays, obéit aux préceptes de l’Islam. Elle a ensuite condamné les opérations militaires menées par Israël dans les territoires palestiniens occupés, se déclarant préoccupée par le sort des populations déplacées à Gaza, qui sont victimes de bombardements indiscriminés. Elle a par ailleurs souligné l’importance de fournir aux réfugiés l’aide médicale qui leur fait défaut, appelant à cet égard tous les pays à collaborer avec le HCR.
Au nom du Groupe des pays d’Afrique, Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a exprimé sa profonde préoccupation face au nombre croissant de réfugiés sur le continent, rappelant que l’Afrique accueille un tiers des réfugiés dans le monde. Exhortant la communauté internationale à mener des efforts collectifs en faveur des personnes déplacées, la représentante est ensuite revenue sur plusieurs avancées réalisées à ce titre par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union africaine (UA), celle-ci ayant notamment approuvé le principe d’une agence africaine des personnes déplacées. Après avoir rappelé que le HCR travaille aussi avec les pays d’Afrique de l’Est pour les assister dans leur gestion des réfugiés, la déléguée s’est alarmée du sous-financement de l’agence onusienne et de nombreux programmes humanitaires. Il est, selon elle, essentiel que le fardeau des responsabilités soit partagé, en tenant compte de la crise multidimensionnelle qui touche certaines populations plus que d’autres.
M. MOHAMED OMAR ELFAROUK HASSAN MOHAMED (Égypte) a estimé que le rapport du HCR met en lumière la crise planétaire qui conduit à l’augmentation du nombre de réfugiés. Face à cette crise des réfugiés dans le monde, il a assuré que son pays « ouvre ses portes » à ceux qui sont contraints de fuir. Il a précisé, à cet égard, que l’Égypte compte 350 000 réfugiés et 9 millions de migrants, qui jouissent d’une liberté de mouvement et de résidence et ne sont pas enfermés dans des centres d’accueil. « Notre hospitalité est un devoir moral et humanitaire depuis des milliers d’années avant d’être un engagement juridique », a souligné le représentant. Il a toutefois appelé à conjuguer les efforts internationaux pour trouver des solutions durables, notamment en allouant des ressources nécessaires sur la base d’un partage équitable des responsabilités. Appelant à une mise en œuvre complète du Pacte mondial sur les réfugiés, il a souhaité que soient garantis le retour volontaire et la réinsertion de ces personnes. Enfin, après avoir plaidé pour le renforcement de la stabilité comme moyen le plus pérenne de prévenir les conflits, il a fait part de sa préoccupation concernant le sous-financement du HCR. Il a encouragé la communauté internationale à appuyer le Haut-Commissariat pour qu’il puisse remplir son mandat.
M. HADI HACHEM (Liban) s’est alarmé des vagues de déplacés syriens qui affectent tous les domaines de la vie dans son pays. Le Liban a pourtant averti les instances internationales de la menace existentielle que cela représente pour lui, mais en vain, a regretté le représentant. De fait, plus de 42% de la population du Liban est syrienne, a-t-il chiffré. L’accueil de ces populations déplacées coûte 5 milliards de dollars par an au Liban, a précisé le délégué, ajoutant que son pays souhaite le retour de ces personnes car « elles ne sont pas opprimées politiquement et pourraient donc rentrer chez elles dans le cadre de la fin des hostilités ». Selon lui, la communauté internationale devrait revoir ses stratégies pour aider au retour des Syriens, le Liban étant prêt à travailler avec les Nations Unies en ce sens, a précisé le délégué, souhaitant éviter une crise de grande envergure.
Mme ZHANG SISI (Chine) a noté à son tour que la plupart des réfugiés se trouvent dans des pays en développement; ce qui représente pour eux un « très lourd fardeau ». Saluant le travail mené par le HCR pour faire face à cette crise des réfugiés, elle a insisté sur l’importance de la protection et du renforcement de la résilience de ces populations. La représentante a, d’autre part, souligné la nécessité de proposer des solutions facilitant le retour sûr et volontaire de ces personnes. À cet égard, elle a plaidé pour une coopération internationale accrue, estimant que les pays développés doivent honorer leurs engagements en matière d’assistance. Elle a, en outre, appelé à ne pas politiser les questions humanitaires, afin notamment de garantir la protection des travailleurs humanitaires. Faisant mention de la situation au Moyen-Orient, la déléguée a exprimé sa « sympathie au peuple de Gaza ». Elle a demandé à Israël de lever le siège de Gaza, ainsi que l’ordre d’interdiction d’évacuation pour éviter une catastrophe humanitaire.
M. VATHAYUDH VICHANKAIYAKIJ (Thaïlande) s’est dit alarmé par le fait que le nombre des personnes déplacées de force dans le monde ait plus que doublé au cours de la dernière décennie. Face à ce constat, il a plaidé pour une revitalisation de l’esprit de partage des responsabilités, tel que souligné dans le Pacte mondial sur les réfugiés. Il a également souhaité que le prochain Forum mondial sur les réfugiés soit l’occasion de démontrer la solidarité mondiale envers les personnes déplacées et leurs communautés d’accueil. À cet égard, le représentant a salué la tenue de la réunion de haut niveau du HCR sur les réfugiés rohingya, le mois dernier à Bangkok, et a émis l’espoir que ce type de réunion préparatoire au Forum contribue à renforcer la complémentarité des efforts, notamment pour que le Bangladesh et les pays de transit de la région ne soient pas laissés à eux-mêmes.
Rappelant que la Thaïlande, pays d’accueil et de transit, continue de fournir une assistance humanitaire à ceux qui fuient le conflit au Myanmar voisin et respecte le principe de non-refoulement, le représentant a encouragé la communauté internationale à faire davantage en matière de prévention et de résolution de conflit, de consolidation de la paix et de développement pour empêcher et résoudre les situations de conflit prolongé. Il a d’autre part indiqué que, dans l’attente de solutions durables, son pays vient de mettre en place un mécanisme national de sélection pour les personnes fuyant les persécutions et compte sur le soutien et l’expertise du HCR pour l’affiner. Enfin, après avoir salué la coopération avec d’autres pays et partenaires pour faciliter la réinstallation, il a invité tous les États Membres à garantir aux apatrides l’accès à des documents d’identité légaux et aux services publics essentiels.
Mme SYLVIA PAOLA MENDOZA ELGUEA (Mexique) a rappelé la longue tradition mexicaine d’accueil des réfugiés. Elle a toutefois constaté que certaines mesures prises par d’autres pays de destination traditionnels ont progressivement fait du Mexique une destination finale pour de nombreuses personnes qui fuient leur patrie pour diverses raisons. Malheureusement, en raison de leur condition vulnérable, ces personnes deviennent également victimes de la criminalité au Mexique, a-t-elle déploré. La représentante a cependant indiqué que son pays poursuit son assistance aux réfugiés de la frontière sud et s’emploie à améliorer ses accords bilatéraux avec les États-Unis pour convenir de « routes sûres » pour les demandeurs d’asile. Pour gérer efficacement les flux de réfugiés, une approche mondiale est nécessaire, selon elle, non seulement pour relever le défi une fois qu’il se présente, mais aussi pour s’attaquer aux causes structurelles.
Parmi les mesures prises par le Mexique pour faire face aux causes structurelles de la migration et aux mouvements de réfugiés, la représentante a cité un ensemble de programmes sociaux et la participation du pays à l’agence latino-américaine et caribéenne des médicaments. Selon elle, la coopération du Mexique avec tous les acteurs concernés permet de sauvegarder les droits humains de tous les réfugiés et de parvenir à leur pleine intégration dans la société. Elle a toutefois estimé que l’aide humanitaire destinée à répondre aux besoins des réfugiés et des pays d’accueil et de transit reste insuffisante pour s’attaquer aux causes structurelles et sous-jacentes du phénomène. Face à l’augmentation actuelle et future des mouvements de personnes, il est nécessaire de renforcer les capacités des institutions pour étendre la protection internationale et d’encourager une plus grande implication des acteurs du développement pour parvenir à des solutions durables, a-t-elle plaidé, souhaitant en conclusion que le prochain Forum mondial sur les réfugiés soit l’occasion de réaffirmer les responsabilités partagées.
M. ROBERT RAE (Canada) a axé son allocution sur les 110 millions de réfugiés déplacés, qui représentent « bien plus qu’une statistique ». Il a appelé à des investissements pour atténuer les causes de ce phénomène, et ce, dans un contexte de déficit de financement humanitaire qui complique le travail d’instances comme le HCR. Les pays à revenu faible ou intermédiaire ont reçu la majorité de la population déplacée dans le monde, a relevé le délégué, appelant à faire tout pour renforcer la résilience des communautés concernées. Nos solutions doivent inclure les réfugiés eux-mêmes, a-t-il ajouté, notant que le programme pour la mobilité économique a permis de bénéficier des compétences des réfugiés.
M. MUHAMMAD USMAN IQBAL JADOON (Pakistan) a indiqué que son pays accueille des réfugiés afghans depuis quatre décennies, précisant que certains ont reçu une carte d’identité et disposent de moyens de subsistance sur un pied d’égalité avec les Pakistanais. Aucun réfugié afghan n’est menacé ou ne risque le rappariement contre sa volonté, a-t-il assuré.
Après avoir fait part de son attachement aux objectifs du Pacte mondiale, le représentant a appelé à impliquer de nouveaux partenaires pour renforcer les financements. De même, il a demandé au HCR d’être sensible aux exigences des pays hôtes, en intégrant les besoins et circonstances locaux. Il a également appelé à reconcevoir les instruments de financement du développement afin de ne pas aggraver le « fardeau » des pays en développement. Les pays développés devraient ouvrir la voie à une immigration légale pour ceux qui font face à des catastrophes humanitaires, a-t-il estimé. Enfin face au manque de ressources, il a souligné que le rapatriement volontaire constitue une solution avec la réinsertion, appelant à introduire des programmes dans ce sens.
M. IGOR PILIPENKO (Bélarus) a indiqué que son pays se mobilise pour assurer une assistance aux réfugiés avec le HCR. Il a souligné que le règlement des problèmes humanitaires des réfugiés ne peut se faire sans coopération entre les pays d’origine, de transit et d’accueil. Il a indiqué que les tentatives de certains États de bloquer la coopération dans ce domaine sont contre-productives, avant de mettre en cause le « durcissement infondé » de la législation de certains pays qui conduit à la discrimination des réfugiés sur la base de la race et de l’ethnie. Il a appelé le HCR à s’élever contre ces pratiques et à se pencher sur les répercussions des mesures coercitives unilatérales.
Mme MORUKE (Afrique du Sud) s’est dite préoccupée de voir le continent africain représenter à lui seul quelque 31 millions de personnes déplacées. Les efforts régionaux, tels ceux entrepris par l’Union africaine (UA) seraient vains sans la compréhension du lien entre le développement et la paix, a-t-elle estimé. L’Afrique du Sud a ainsi lancé une autorité de gestion des frontières pour lutter contre la traite des êtres humains afin de porter l’assistance internationale aux personnes qui en ont besoin, a-t-elle rapporté.
M. ZUMILLA (Malaisie) s’est dit choqué par l’escalade du conflit à Gaza, à la suite des « derniers actes d’agression d’Israël, combinés à l’intensification de ses actes d’apartheid » dans le Territoire palestinien occupé, entraînant le déplacement massif de Palestiniens, en particulier de femmes et d’enfants.
Le représentant a ensuite indiqué que la Malaisie compte environ 200 000 demandeurs d’asile et réfugiés enregistrés, la plupart des Rohingya du Myanmar dont l’exode a été intensifié par le coup d’État militaire il y a plus de deux ans. À la mesure de ses moyens, la Malaisie continue de fournir une assistance humanitaire aux demandeurs d’asile et aux réfugiés. Les détenteurs de la carte du HCR continuent d’avoir accès aux établissements de santé publique à un tarif préférentiel par rapport aux expatriés, a exemplifié le représentant. Cependant, l’afflux continu de demandeurs d’asile et de réfugiés, exacerbé par l’escalade des conflits, accroît la pression sur les ressources nationales des pays d’accueil, a-t-il toutefois déploré. Le délégué a donc demandé aux signataires de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés de respecter et d’honorer leur obligation juridique internationale, jugeant fondamental de garantir une répartition juste et équitable des responsabilités et des charges pour préserver et défendre les droits des réfugiés.
Mme NATHALIA SÁNCHEZ GARCÍA (Colombie) a appelé à une reprise urgente du dialogue entre Israël et la Palestine afin d’initier un processus de paix qui conduira à une coexistence pacifique, exhortant en outre à une cessation immédiate des hostilités, pour garantir un accès humanitaire à la bande de Gaza et aux autres territoires touchés par le conflit.
Elle a salué les efforts du HCR en Colombie, insistant sur l’importance de la coordination entre les pays qui reçoivent des flux migratoires, les communautés d’accueil, les agences multilatérales et le soutien de la coopération internationale. Rappelant enfin que la Colombie co-parraine le deuxième Forum mondial sur les réfugiés, elle a espéré que les engagements pris à cette occasion mettent en exergue le triple lien entre l’humanitaire, la paix et le développement.
Mme FATEMEH ARAB BAFRANI (République islamique d’Iran) est revenue sur les efforts déployés par son pays en faveur des réfugiés au niveau national, conformément au respect de l’Iran pour la dignité humaine. Pour autant, le fait qu’un pays en développement accueille des réfugiés ne devrait pas aller de soi, a nuancé la déléguée, d’autant plus que l’Iran subit l’effet de sanctions et de mesures coercitives unilatérales « illégales et inhumaines ». Si face aux coûts imputés à la gestion des réfugiés, l’assistance internationale n’est pas élargie « il faudra revoir nos politiques en matière de réfugiés », a prévenu la déléguée. Elle a souligné que la seule solution durable aux problèmes des réfugiés est leur retour volontaire.
M. OUMAROU GANOU (Burkina Faso) a rapporté que les réfugiés et demandeurs d’asile étaient estimés à plus de 36 000 dans son pays en juin 2023. Confronté depuis 2015 à une crise sécuritaire, ayant entraîné des déplacements massifs de populations, le Burkina Faso entreprend de nombreuses actions en vue de répondre aux besoins de toutes ces personnes, avec l’appui de tous les partenaires, notamment le HCR, a poursuivi le représentant. Il a notamment évoqué la délivrance de documents d’état civil et d’identification aux personnes qui ont tout perdu dans leur déplacement forcé, ainsi que le renforcement du dispositif juridique à travers la révision du Code de la personne et de la famille. Pour renforcer la résilience des plus vulnérables, le pays s’est également doté d’une stratégie nationale de relèvement des personnes déplacées internes et des communautés d’accueil assortie d’un plan d’action opérationnel triennal (2023-2025) évalué à environ 1 630 millions de dollars, a ajouté le représentant, précisant toutefois qu’environ 485 millions sont encore à trouver.
M. SURKOV (Fédération de Russie) a salué le travail efficace qu’effectue le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en tant que principale structure internationale chargée de résoudre les problèmes dans le domaine de la migration forcée. Il a assuré que son pays s’engage à respecter ses obligations internationales concernant les réfugiés, les demandeurs d’asile, les personnes déplacées à l’intérieur du pays et les apatrides. À l’approche du Forum mondial sur les réfugiés, organisé en décembre, il a toutefois estimé que l’approche du HCR à l’égard des changements climatiques va au-delà de son mandat et outrepasse les dispositions de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés. Sans remettre en question l’impact des catastrophes naturelles sur les déplacements de population, il s’est dit convaincu que cette question ne relève pas de la compétence du Bureau du HCR et peut être examinée par d’autres plateformes internationales faisant autorité au sein de l’ONU, notamment dans le cadre de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.
Par ailleurs, prenant note des efforts déployés par le HCR pour résoudre les problèmes des personnes déplacées et des réfugiés ukrainiens, le représentant s’est opposé à toute tentative de politisation de ce dossier. Estimant à cet égard que la crise migratoire ukrainienne est « loin d’être terminée », il a rappelé qu’après le « coup d’État » de 2014 en Ukraine, des centaines de milliers de résidents russophones du sud-est du pays se sont réfugiés en Russie pour fuir les persécutions du « régime de Kiev ». De plus, rien que depuis février 2022, plus de 5 millions de personnes ont été contraintes de quitter les régions de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporizhzhia pour s’installer en Russie, a-t-il ajouté, assurant que son pays leur fournit une assistance complète et des prestations sociales. Selon lui, la crise migratoire ukrainienne en Europe a démontré qu’avec de la volonté politique, il est possible d’assurer une protection à d’importants flux de réfugiés. Il a cependant regretté que les pays occidentaux ne fassent pas preuve de la même volonté politique lorsqu’il s’agit des réfugiés en provenance d’autres régions du monde, évoquant la situation « tragique » en Méditerranée.
Le représentant a ensuite attiré l’attention sur les efforts visant à faciliter le retour volontaire des réfugiés syriens. Alors que, selon le HCR, un peu plus de 50 000 Syriens sont rentrés dans leur pays en 2022, soit près de 15 000 de plus que l’année dernière, il s’est félicité que ce nombre augmente d’année en année, bien que le HCR n’ait ni encouragé ni facilité ces retours. Se disant convaincu que si une telle assistance était fournie, le processus de rapatriement vers la Syrie prendrait une ampleur bien plus grande, il a invité la communauté mondiale à adopter une approche non politisée pour résoudre ce problème sans créer d’obstacles artificiels. Hélas, a-t-il ajouté, la politisation des activités du HCR devient de plus en plus évidente et cause un préjudice important à la composante humanitaire de l’ONU. Il a ainsi relevé qu’en raison des « restrictions illégales » qui ont été imposées à son pays l’an dernier, la contribution volontaire russe au HCR a été bloquée par les banques occidentales et n’est pas arrivée à son destinataire, privant des personnes de l’aide dont elles ont besoin. Le délégué a regretté que cette affaire n’apparaisse sous aucune forme dans la section du rapport consacrée aux contributions au budget du HCR.
Mme KATHERINE ANAS AHMAD AL-HALIQUE (Jordanie) a rappelé que son pays est celui qui accueille le plus de réfugiés au monde. Essentiellement palestiniennes et syriennes, ces personnes bénéficient de services de base tels que l’accès aux soins de santé et l’éducation. La Jordanie est un modèle en la matière et est prête à partager son expérience, a affirmé la déléguée. Elle a toutefois ajouté que son pays fait face à un manque de ressources disponibles pour gérer cette situation, laquelle est encore aggravée par le sous-financement de l’UNRWA. Estimant en outre que la crise des réfugiés syriens ne fait que s’exacerber, elle a mis en garde contre les retombées de cette situation, avant d’appeler à une solution politique qui permettrait le retour sûr et volontaire des Syriens chez eux. RAS
M. SHAMAN (Arabie saoudite) s’est dit inquiet de l’augmentation alarmante du nombre de réfugiés dans le monde. Face à cette crise mondiale, il a appelé à une conjugaison des efforts humanitaires. Relevant que 40% des réfugiés et des personnes déplacées sont des enfants, il s’est félicité de la coopération entre l’UNICEF et le HCR. Le représentant a ensuite appelé les bailleurs de fonds et les organisations internationales à mettre en place des projets d’aide humanitaire et de secours. Rappelant que l’Arabie saoudite est un des principaux partenaires du HCR, il a fait état d’une contribution à l’agence onusienne de 10 milliards de dollars au cours des 10 dernières années, notamment pour soutenir les efforts au Yémen, au Liban, en Somalie, en Jordanie et au Bangladesh. Au-delà des ressources financières allouées, des mesures de renforcement de capacités et des échanges d’informations et d’expérience sont fournies pour secourir les réfugiés sans discrimination, a-t-il ajouté.
Après avoir assuré que l’Arabie saoudite appuie ses politiques sur des valeurs de modération et de responsabilité, il a rappelé que le royaume fait partie des pays accueillant le plus de réfugiés, lesquels sont intégrés à la société et bénéficient de services de santé et d’éducation. Enfin, s’agissant de la situation en Palestine, il a opposé un refus catégorique au déplacement forcé de populations et a condamné la prise pour cible de civils sans défense, appelant la communauté internationale à fournir une aide humanitaire d’urgence à la population de Gaza.