Réforme du Conseil de sécurité: l’Assemblée générale examine un processus « lent » en espérant à terme une meilleure représentativité, en particulier de l’Afrique
Alors que le processus de négociations intergouvernementales relatif à la réforme du Conseil de sécurité se poursuit depuis 15 ans, plusieurs délégations se sont demandées, aujourd’hui à l’Assemblée générale, combien d’années il faudrait encore pour résorber les divergences entre États Membres. À l’occasion de ce débat, repris hier, les orateurs ont reconnu des progrès qui rendent ce processus plus ouvert, avec la diffusion sur le Web des négociations et le nouveau site Internet qui y est consacré, mais beaucoup se sont impatientés de voir cette réforme peu avancée alors qu’elle est discutée depuis 44 ans à l’Assemblée générale.
« Même si ce processus est lent, il permet de progresser vers un compromis », a toutefois rassuré le Bélarus, tandis que le Panama a tranché: « Le mieux est l’ennemi du bien, il faut maintenant joindre le geste à la parole ». Le Guyana a d’ailleurs remarqué que cette réforme est un sujet qui suscite « le plus de discussions et le moins d’actions ». Il a toutefois redit son soutien à la réforme qui doit aboutir à un Conseil de sécurité fonctionnant selon les principes d’égalité et de représentation.
Il devient impossible d’exclure les voix de régions et de continents entiers de délibérations qui impactent pourtant leur avenir, a averti le Guyana, en plaidant pour l’élargissement des deux catégories de membres et pour l’adjonction d’un siège rotatif pour les petits États insulaires en développement. Il a aussi exprimé son soutien au consensus d’Elwuzini qui concerne la représentation du continent africain.
À ce sujet, rappelant la position commune de l’Afrique, l’Angola, le Nigéria et l’Éthiopie ont fait remarquer qu’il s’agit du seul continent non doté d’un siège permanent. Après avoir qualifié cette situation d’injustice historique inacceptable, ils ont exigé que deux sièges permanents et cinq sièges non permanents soient octroyés à l’Afrique au Conseil de sécurité. La Fédération de Russie a, elle aussi, demandé de réparer cette injustice faite à l’Afrique, estimant que la représentation actuelle ne correspond en rien à sa place sur la scène internationale.
En plus de la question de la représentation géographique, celle du droit de veto a suscité de sérieuses préoccupations. Ainsi, considérant que le Conseil de sécurité ne s’acquitte pas pleinement de sa responsabilité en matière de sécurité internationale, la République populaire démocratique de Corée a mis en cause le droit de veto des États-Unis, qui a bloqué récemment un projet de résolution sur la pause humanitaire dans la bande de Gaza, au seul motif que le texte ne reconnaissait pas le droit d’Israël à la légitime défense. De manière connexe, la République arabe syrienne a mis en garde contre des précédents dangereux qui menacent la stabilité internationale, comme les notions de « légitime défense préventive » ou de légitime défense face à des forces non étatiques, renvoyant à la situation actuelle au Moyen-Orient.
Il ne devrait pas y avoir de droit de veto si l’on soupçonne celui qui l’utilise d’avoir agi contre le droit international, a renchéri l’Estonie, après avoir évoqué la situation en Ukraine. Cette dernière a affirmé son soutien ferme à toutes les initiatives visant à limiter le recours au veto. De son côté, Cuba a réitéré son opposition à l’existence même du droit de veto, tandis qu’El Salvador l’a jugé anachronique.
La Fédération de Russie a, elle, rejeté les propositions qui empiéteraient sur les prérogatives des membres permanents actuels, dont le droit de veto. Elle a justifié ce droit en arguant qu’il incite les membres à rechercher des solutions équilibrées. Reconnaissant le recours croissant au droit de veto ces dernières années, elle a accusé les membres occidentaux d’utiliser « leur propre majorité confortable » au Conseil pour mettre leurs adversaires dans une position inconfortable, y voyant un « veto caché » de « l’Occident collectif ». La Russie a par ailleurs considéré que l’Inde et le Brésil sont des candidats dignes de disposer d’un siège permanent au Conseil, à condition que la catégorie des membres non permanents soit également élargie.
De son côté, l’Espagne a rappelé que le Groupe « Unis pour le consensus » propose une réforme qui profiterait non pas à un petit nombre d’États, mais, au contraire, au plus grand nombre d’États Membres afin qu’ils puissent siéger au Conseil, tandis que d’autres pourraient y siéger pour des mandats plus longs ou successifs, ce qui renforcerait le poids des membres élus.
Pour relever les défis mondiaux posés à la communauté internationale, et dans certains cas palier l’inaction du Conseil de sécurité, toutes les délégations ont souligné la nécessité de parvenir à des progrès dans le cadre du processus de négociations intergouvernementales. Ce dernier a été jugé comme le seul mécanisme habilité à mener les négociations sur la réforme du Conseil de sécurité.
L’Assemblée générale reprendra ses travaux lundi 20 novembre, à partir de 10 heures.
QUESTION DE LA REPRÉSENTATION ÉQUITABLE AU CONSEIL DE SÉCURITÉ ET DE L’AUGMENTATION DU NOMBRE DE SES MEMBRES ET AUTRES QUESTIONS CONNEXES AYANT TRAIT AU CONSEIL DE SÉCURITÉ
Suite du débat sur la question
M. SONG KIM (République populaire démocratique de Corée (RPDC)) a jugé nécessaire de réformer les fonctions et le rôle du Conseil de sécurité face à l’évolution rapide de la situation politique internationale. En outre, il a estimé indispensable que le Conseil rejette toute attitude autoritaire et la pratique du « deux poids, deux mesures ». De plus, il a estimé que le Conseil de sécurité ne s’acquitte actuellement pas pleinement de sa responsabilité en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Mentionnant le veto des États-Unis au projet de résolution sur la pause humanitaire dans la bande de Gaza, il a jugé injuste le motif invoqué par la délégation américaine qui était l’absence de mention du « droit à la légitime défense » d’Israël. Il a mis en parallèle le fait que les États-Unis protègent et soutiennent activement le Gouvernement israélien quand, dans le même temps, ils qualifient les activités de développement spatial de la RPDC de menace à la paix et à la sécurité internationales.
Le délégué a souligné l’importance de réformer le Conseil de sécurité sur la base du principe de la pleine représentation des pays en développement. Il a dénoncé le fait que le Conseil ait été transformé en un instrument politique de forces spécifiques et qu’il ait été complètement paralysé dans sa fonction. À cet égard, il a réitéré que le processus de négociations intergouvernementales constitue la seule plateforme légitime pour traiter du sujet avant d’insister sur l’importance d’obtenir un consensus par le biais de consultations entre tous les États Membres. À ce stade, il a jugé raisonnable d’élargir d’abord le nombre de membres non permanents, réaffirmant ensuite que le Japon n’a pas sa place au sein du Conseil de sécurité « en raison des crimes contre l’humanité dont il s’est rendu coupable, notamment en Corée ».
M. TITHIARUN MAO (Cambodge) a recommandé aux États Membres d’examiner en profondeur les principes et objectifs de la réforme du Conseil afin de susciter des convergences et de combler les divergences dans les propositions présentées. La justice et l’équité doivent être au premier plan des efforts collectifs, a-t-il préconisé, avertissant contre toute tentative d’imposer une négociation basée sur un texte sans obtenir au préalable un consensus.
Une telle approche serait contre-productive et nuirait au processus de négociation, a-t-il prévenu. Plaidant en faveur d’une réforme du Conseil de sécurité qui soit conforme aux aspirations collectives des pays en développement, le représentant a défendu l’élargissement du nombre de sièges permanents et non permanents sur la base d’une représentation géographique équitable qui reflète les réalités actuelles. Enfin, il a souligné que le processus de négociations intergouvernementales devrait être le seul mécanisme principal habilité à mener les négociations sur la réforme du Conseil de sécurité.
M. RIYAD KHADDOUR (République arabe syrienne) a appuyé l’urgence de réforme non seulement du Conseil de sécurité mais aussi des institutions juridiques internationales, dans un contexte de crises, de conflits meurtriers et de crimes sans précédent. Le représentant a dénoncé le fait que, depuis le début de ce millénaire, l’on assiste à de nouvelles interprétations qui s’éloignent des buts et principes de la Charte de Nations Unies, et sont consternantes pour les peuples du monde qui considèrent désormais que les institutions juridiques mondiales se rendent complices des grandes puissances et soutiennent la destruction et la dépossession des peuples.
À titre d’exemples, le représentant a cité la situation en Iraq, en Afghanistan, en Libye, au Soudan, ainsi que les exactions constantes depuis plus de 75 ans contre le peuple, l’occupation israélienne des territoires arabes en Palestine et au Golan, et le report sine die de la mise en œuvre des résolutions du Conseil. Il a mis en garde contre des précédents dangereux qui menacent la stabilité internationale, comme les notions de « légitime défense préventive », guerre préventive, guerre contre le terrorisme, ainsi que la légitime défense face à des forces non étatiques, et a renvoyé à la situation ignominieuse dans la bande de Gaza.
Pour toutes ces raisons, la République arabe syrienne est disposée à participer activement au processus intergouvernemental de réforme, afin de parvenir à un Conseil plus démocratique, plus représentatif et plus efficace sur la base du plan en cinq points et loin de toute politisation et intimidation.
M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba) a jugé essentiel de traiter le processus de réforme du Conseil de sécurité dans le cadre de négociations intergouvernementales détaillées pour parvenir à un consensus aussi large que possible. Cuba, a‑t‑il dit, est favorable à une réforme holistique du Conseil de sécurité, ce qui suppose, entre autres initiatives, des négociations transparentes au sein de l’organe, la mise à jour de son règlement provisoire et l’augmentation du nombre de ses membres dans les deux catégories en vue de permettre aux pays en développement d’y être mieux représentés, en particulier les pays d’Afrique et de l’Amérique latine et des Caraïbes. Après avoir réitéré l’opposition de son pays à l’existence même du droit de veto, le représentant a appelé, en cas d’élargissement du Conseil, à veiller à ne pas créer de nouvelles sous-catégories de membres et à préserver les mêmes droits et prérogatives pour tous. Pour parvenir au consensus sur ces questions, il convient, selon lui, de promouvoir des interactions intenses entre les États Membres et les différents groupes, l’objectif étant d’aboutir à des résultats concrets dans le cadre du processus de réforme.
M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a souligné l’urgence d’une réforme du Conseil de sécurité au regard du traitement réservé par l’organe à l’invasion russe contre l’Ukraine. Depuis que cette invasion a débuté, a‑t‑il constaté, le Conseil s’est régulièrement saisi de la question mais sans succès, en raison du comportement irresponsable de l’agresseur, qui occupe un siège permanent. Le Conseil a ainsi été pris en otage par la Fédération de Russie, ce qui nuit gravement à sa crédibilité, a déploré le représentant. À ses yeux, il est absolument inapproprié qu’un pays occupant un siège permanent ait le privilège d’exercer un droit de veto lors de l’examen de situations dans lesquelles il est directement impliqué en tant que partie au conflit, qui plus est en tant qu’instigateur du conflit. Il a donc fermement appuyé toutes les initiatives visant à limiter le recours au veto.
Le représentant a invité les États Membres à se concentrer sur cette question lors du prochain cycle de négociations intergouvernementales et à discuter de différentes idées originales, dont celle qui consisterait à doter l’Assemblée générale d’un véritable pouvoir pour surmonter le veto. Dans ce cadre, si les deux tiers des votes reflètent la volonté des nations de toutes les régions, le veto devrait être effectivement surmonté et la résolution correspondante de l’Assemblée générale devrait être juridiquement contraignante pour tous les États Membres, a‑t‑il plaidé. Enfin, jugeant injuste que des milliards de personnes dans le monde n’aient pas de représentant permanent au Conseil, il a souhaité que l’Union africaine bénéficie de ce statut.
Mme MARKOVA CONCEPCIÓN JARAMILLO (Panama) a noté les progrès significatifs obtenus pour augmenter la transparence des négociations, notamment en améliorant l’accès aux négociations à travers leur diffusion en ligne et la création d’un site Internet. Néanmoins, aujourd’hui plus que jamais, nous sommes confrontés à des menaces, a noté la représentante, jugeant urgent que le Conseil s’adapte à la nouvelle réalité et renforce la capacité des Nations Unies à répondre aux défis du XXIe siècle. Après avoir soutenu l’augmentation du nombre de membres du Conseil (entre 20 et 27), elle s’est dite prête à soutenir l’augmentation du nombre de membres non permanents, appelant à une répartition juste entre les différents groupes régionaux. Les membres non permanents doivent pouvoir être élus pour une période plus longue, a-t-elle souhaité, envisageant une période allant jusqu’à cinq ans et prônant la possibilité d’un deuxième mandat consécutif. Cela permettrait d’assurer une continuité et de permettre de concrétiser les actions menées, a expliqué la représentante.
Concernant la représentativité, le paragraphe 1 de l’Article 24 de la Charte des Nations Unies est claire, a estimé la représentante, en soulignant que les membres du Conseil de sécurité agissent au nom de tous les pays. Elle a toutefois dit être en faveur d’actions qui permettent à l’Afrique d’augmenter sa présence au sein du Conseil. Pour elle, le Conseil de sécurité est actuellement inefficace alors que sa principale fonction est de jouer un rôle essentiel dans la prise de décision pour assurer la stabilité mondiale. Souvent, en raison de l’utilisation sans discrimination du veto, le Conseil est paralysé, s’est désolée la représentante, en soutenant la proposition visant à limiter son usage disproportionné. Enfin, rappelant que le processus de négociations dure depuis 14 ans, elle a appelé à y réfléchir. « Combien d’années nous faudra-t-il pour résorber nos divergences! », s’est impatientée la représentante. « Le mieux est l’ennemi du bien, nous devons joindre le geste à la parole », a-t-elle conclu.
M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) s’est prononcé pour une réforme urgente du Conseil de sécurité, exhortant à plus de pragmatisme dans ce processus qui, selon lui, doit être détaché de tout intérêt particulier et éviter toute fragmentation entre les groupes. Observant que de nombreuses délégations appuient l’idée d’une réforme du Conseil en raison de son inaction sur certaines questions centrales inscrites à l’agenda international, il a appelé à ne pas se fourvoyer. En effet, a-t-il fait valoir, aucune forme institutionnelle d’un Conseil de sécurité réformé ne sera suffisante pour parvenir à la paix et à la sécurité si ses membres, ainsi que les autres membres de l’ONU, n’honorent pas leurs mandats en vertu de la Charte des Nations Unies et du droit international.
Le représentant a ajouté que son pays, membre élu du Conseil, a pu observer de près et même participer à l’élaboration et à l’adoption de dispositions pertinentes pour la paix et la sécurité. À ses yeux, le Conseil doit pouvoir agir sur toutes les questions les plus urgentes, comme il l’a fait hier au sujet de la situation humanitaire à Gaza. Mais, il doit aussi pouvoir agir plus rapidement, ce qui ne peut se faire qu’avec « moins de membres permanents » et « moins de droits de veto ». L’Équateur, a-t-il précisé, soutient l’élargissement de la catégorie des membres non permanents pour promouvoir la diversité des initiatives et permettre une plus grande rotation et participation des pays intéressés. Indiquant que sa région compte des candidats pour les 32 prochaines années, il a insisté sur la nécessité d’une réforme qui reflète la réalité du monde contemporain. Il a enfin réitéré le soutien de son pays à l’initiative franco-mexicaine de non-utilisation du droit de veto en cas d’atrocités de masse, ainsi qu’au Code de conduite élaboré par le Groupe ACT.
M. CARLOS EFRAÍN SEGURA ARAGÓN (El Salvador) a rappelé que le Conseil de sécurité agit au nom des États Membres qui attendent qu’il agisse rapidement et de façon efficace au nom de l’ONU pour prévenir les menaces pesant sur la paix et pour répondre à celles qui l’ébranlent. Dans le contexte actuel, et face à l’incapacité du Conseil de sécurité à s’acquitter de ses responsabilités, le représentant a rappelé l’importance d’une réforme structurelle sans laquelle la légitimité de cet organe sera mise à mal. Il faut, a-t-il précisé, que le Conseil devienne plus légitime, plus efficace, plus transparent et plus représentatif. Cela passe par l’élargissement du nombre des membres élus et par la représentation des régions qui y ont été traditionnellement sous-représentées. Le droit de veto est, selon lui, totalement anachronique et il faut impérativement éviter d’y avoir recours tant qu’il existe. Notant que le processus de négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité existe maintenant depuis plus de 10 ans, il a regretté qu’il n’ait pas encore mené aux résultats de fond escomptés. À l’avenir, il faudra dégager un consensus le plus large possible et réduire les divergences entre les positions de États Membres sur les cinq thématiques de ce processus, à travers un dialogue approfondi, a-t-il recommandé.
M. MATEUS PEDRO LUEMBA (Angola) a estimé que la problématique de l’augmentation du nombre de membres du Conseil de sécurité est examinée par l’Assemblée générale depuis bien trop longtemps. En effet, 15 ans après l’adoption de la décision 62/557, les résultats des différentes sessions du processus de négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité restent très en deçà des attentes des États Membres, a déploré le représentant. « Pourtant, plus les conclusions de ces délibérations sont repoussées, plus la solution devient incertaine, vu que le paysage géopolitique mondial évolue à une vitesse inédite. » Dans ce cadre, de l’avis du délégué, le processus de négociations intergouvernementales est la seule plateforme viable pour rapprocher les différentes positions, en vue d’un résultat équilibré et acceptable. Selon le représentant, ces dernières années ont révélé l’incapacité du Conseil de sécurité à se montrer à la hauteur de ses responsabilités. C’est pourquoi sa réforme est urgente, les États Membres étant d’ailleurs unanimes à cet égard, a-t-il relevé.
Cette réforme implique notamment que le Conseil de sécurité soit plus représentatif, a poursuivi le délégué en notant à ce titre que l’Afrique demeure le seul continent non doté d’un siège permanent. Une injustice historique inacceptable, qui doit être corrigée, a-t-il réclamé en rappelant la position commune de l’Afrique, découlant du consensus d’Ezulwini et de la Déclaration de Syrte, qui demande deux sièges permanents et cinq sièges non permanents pour ce continent. Enfin, le délégué a appuyé l’appel à lancer un processus de négociations officiel basé sur des textes.
Mme CAROLYN RODRIGUES-BIRKETT (Guyana) a estimé que ce sujet suscite le plus de discussions et le moins d’actions. Face aux défis multidimensionnels existants, elle a souligné la nécessité de mobiliser la volonté politique nécessaire pour agir. Elle a noté que les changements climatiques, les nouvelles pandémies et le terrorisme mondial provoquent une augmentation des flux de réfugiés, des activités terroristes, du crime organisé et du trafic d’armes qui ajoutent de nouvelles dimensions au travail du Conseil. Se penchant également sur le manque de respect inquiétant et croissant pour l’état de droit, elle a regretté que les défis évoqués menacent l’autorité du Conseil, sa crédibilité et ses décisions. En outre, faisant état d’un constat commun concernant des règles de décision inéquitables et une composition anachronique, elle a jugé que cette configuration favorise la paralysie du Conseil. Lorsque la géopolitique et l’intérêt personnel ne sont pas isolés de l’activité générale du Conseil, sa réaction rapide et décisive s’en trouve affectée, a insisté la représentante.
Elle a donc plaidé en faveur d’un Conseil de sécurité fonctionnant selon les principes d’égalité et de représentation, jugeant qu’il n’est plus possible d’exclure les voix des populations de régions et de continents entiers de délibérations impactant leur avenir. Elle a appelé à passer de l’appel au changement et à la réforme, à la volonté politique et à la priorité accordée au processus intergouvernemental, en se concentrant sur l’obtention de résultats concrets. La représentante a fait savoir que le Guyana est prêt à jouer son rôle. En outre, soutenant l’appel à une réforme urgente et globale du Conseil de sécurité, elle a appelé de ses vœux un l’élargissement des deux catégories de membres et d’un siège rotatif au Conseil pour les petits États insulaires en développement (PEID). Elle a également apporté son soutien au consensus d’Ezulwini.
M. PHETVANXAY KHOUSAKOUN (République démocratique populaire lao) a insisté sur l’urgence de réformer le Conseil de sécurité au regard du paysage géopolitique actuel. Il a réaffirmé le soutien sans faille de son pays à la réforme du Conseil à travers le processus de négociations intergouvernementales. Ce processus doit être piloté de manière transparente, inclusive et équilibrée, a soutenu le représentant. Selon lui, toutes les positions et propositions des États Membres doivent être soigneusement examinées, guidées par les décisions pertinentes de l’Assemblée générale, en vue de parvenir à un consensus. Pour aller de l’avant, a‑t‑il préconisé, le processus de réforme doit garantir l’augmentation du nombre de membres permanents et non permanents du Conseil, en tenant compte des intérêts de tous les États Membres et en garantissant une représentation géographique équitable.
Pour Mme SHARIFA YOUSEF A. S. ALNESF (Qatar), la réforme du Conseil de sécurité est un défi de taille et son processus de réforme revêt un caractère urgent à la lumière des crises dans le monde, en particulier celle en cours à Gaza avec ses possibles répercussions sur la paix et la sécurité régionales et mondiales. La déléguée a appelé à respecter les liens qui existent entre les cinq thématiques du processus de négociations intergouvernementales et le principe de l’égalité souveraine de tous les États. Toute réforme du Conseil de sécurité doit s’accompagner d’une amélioration de ses méthodes de travail et de son mécanisme de prise de décision, a-t-elle recommandé, avant d’ajouter que la question du droit de veto est centrale à ce processus de réforme. En guise de conclusion, elle a appelé à s’appuyer sur les points de convergence pour aller de l’avant dans le processus de négociations intergouvernementales en vue de garantir un Conseil plus transparent et plus responsable. Un Conseil qui soit capable de prendre des décisions en temps opportun et dans lequel toutes les régions du monde sont équitablement représentées, notamment la région arabe, a conclu la représentante.
M. REIN TAMMSAAR (Estonie) a regretté l’absence de progrès significatifs sur la réforme du Conseil de sécurité, avant d’appeler à adapter les structures et les méthodes de travail de l’organe en charge de la paix et de la sécurité internationales. Pour le représentant, la question centrale en termes d’efficacité tourne autour de l’utilisation du droit de veto. L’Assemblée générale devrait être en mesure de surmonter collectivement le veto du Conseil de sécurité si le Conseil lui-même ne peut pas faire respecter le droit international et les principes de la Charte des Nations Unies, a-t-il plaidé. De plus, il ne devrait pas y avoir de droit de veto si l’on soupçonne celui qui l’utilise d’avoir agi contre le droit international, a poursuivi le délégué, réaffirmant le soutien de son pays à l’initiative franco-mexicaine sur la limitation du droit de veto et au Code de conduite relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, élaboré par le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT).
Le représentant a, d’autre part, rappelé que la Charte des Nations Unies stipule au paragraphe 3 de son Article 27 « qu’une partie à un différend s’abstient de voter » au Conseil. Quant à la composition future du Conseil, il s’est prononcé pour une répartition équitable entre les continents et les régions, ajoutant que tous les États devraient avoir une chance d’être représentés, quelle que soit leur taille.
Mme ANA JIMENEZ DE LA HOZ (Espagne) a mis l’accent sur l’urgence d’une réforme visant à un Conseil plus équitable, plus démocratique, plus représentatif et plus transparent. Elle a misé sur le format des négociations intergouvernementales qui reste, selon elle, « le plus approprié » pour réaliser des progrès. Elle a conseillé aux États d’être réalistes et solidaires, et de viser des résultats raisonnablement satisfaisants pour tous. C’est précisément ce que propose le Groupe « Unis pour le consensus » qui ne soumet pas une réforme qui profiterait à un ou à quelques États Membres mais, au contraire, qu’un plus grand nombre d’États Membres puissent siéger au Conseil, tandis que d’autres pourraient y siéger pour des mandats plus longs ou successifs, ce qui renforcerait le poids des membres élus. Elle a également rappelé que cette proposition contient un modèle de réforme qui améliore la représentation des États issus de régions et de groupes actuellement sous-représentés.
Soulignant qu’il convient que le futur Conseil réponde à la réalité du monde d’aujourd’hui et relève les défis mondiaux posés à la communauté internationale, la déléguée a assuré que son pays, en tant que membre du Groupe « Unis pour le consensus », contribuera activement aux prochaines négociations intergouvernementales pour faire avancer cette réforme et alimenter d’autres processus en cours, comme celui des négociations autour d’un pacte de l’avenir.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a réaffirmé la nécessité de donner à cet organe un caractère plus représentatif des pays en développement d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, préconisant de corriger une « injustice historique » faite à l’Afrique, dont la représentation actuelle ne correspond en rien à sa place sur la scène internationale. En outre, il a considéré que l’Inde et le Brésil sont des candidats dignes de disposer d’un siège permanent au Conseil, mais seulement si la catégorie des membres non permanents est elle aussi élargie. Se limiter à un élargissement de la seule catégorie des membres non permanents serait également acceptable, a‑t‑il déclaré, précisant que l’élargissement ne devrait pas nuire à l’efficacité du Conseil et que le nombre de membres ne devrait pas dépasser une « petite vingtaine ». Poursuivant, le délégué a rejeté les propositions qui empièteraient sur les prérogatives des membres permanents actuels, y compris le droit de veto. Il a estimé que ce dernier incite les membres à rechercher des solutions équilibrées. Il a aussi rappelé que son usage, ou la menace de son usage, avait plus d’une fois évité à l’ONU de se lancer dans des « aventures discutables ».
Tout le monde a pu le constater récemment lorsque les États-Unis et leurs « satellites » ont essayé de faire passer en force une résolution soutenant les actions d’Israël à Gaza, a pris pour exemple le représentant en faisant valoir que « seuls les veto de la Russie et de la Chine ont épargné au monde ce scénario honteux ». Reconnaissant que le recours au droit de veto s’est accru ces dernières années, il a expliqué cette situation comme la conséquence de la volonté des membres occidentaux de mettre leurs adversaires dans une position inconfortable, en utilisant leur propre majorité confortable au Conseil de sécurité. Un tel « veto caché » de la part de « l’Occident collectif » devrait également être pris en compte, a‑t‑il argué.
Le représentant a ensuite affirmé qu’il n’était pas possible de progresser en imposant des documents de négociation aux États Membres. Il a estimé que la plateforme des négociations intergouvernementales revêt une légitimité « unique et universelle ». S’en écarter serait contre-productif et pourrait « nous faire revenir des années en arrière », a‑t‑il averti.
M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a souscrit à la déclaration faite au nom du Groupe des États arabes. Plus que jamais, a-t-il dit, le monde a besoin d’une véritable réforme du Conseil de sécurité pour qu’il devienne plus représentatif de la réalité actuelle et plus efficace. Il a salué, à cet égard, les progrès accomplis pour identifier des points de convergence et résorber les divergences dans le cadre du processus de négociations intergouvernementales. Cela montre, selon lui, que la plupart des États sont d’accord sur un certain nombre de points et qu’il faut intensifier le dialogue pour rapprocher les points de vue et parvenir à un large consensus sur cette réforme. Après avoir constaté les échecs successifs du Conseil à s’acquitter de son mandat, le dernier en date étant sa réaction trop tardive face à la situation à Gaza, le représentant a argué que l’objectif ultime de la réforme est de parvenir à un Conseil plus efficace, plus représentatif et plus crédible. Soulignant l’importance du processus de négociations intergouvernementales et de ses cinq piliers pour progresser dans ce sens, il a appelé tous les pays à soutenir les efforts engagés.
M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie) a jugé « plus urgente que jamais » la réforme structurelle du Conseil de sécurité, qui doit devenir plus souple et plus efficace. Il en va de la vie de millions de personnes, a estimé le délégué. Il s’est ensuite félicité de mesures allant dans le bon sens, comme la création d’un site Internet mettant à disposition les documents relatifs à la révision du document-cadre. Ce type d’outils permettra de mieux comprendre les positions des uns et des autres et donc de parvenir à un terrain d’entente, a espéré le représentant. Avant de résorber les différences entre délégations, il faut mettre en avant leurs différentes visions, a‑t‑il expliqué, pour pouvoir établir des passerelles entre les délégations. Mais comme cette réforme est complexe, elle nécessite autant de clarté que possible, a‑t‑il mis en garde, appelant à la formulation de propositions cohérentes. « En nous mettant d’accord sur un minimum de principes, nous serons ensuite à mêmes de discuter de sujets plus complexes comme le nombre de membres permanents ou non permanents du Conseil de sécurité. »
Au volet des solutions, et abordant la question du veto, le délégué a invoqué la Charte des Nations Unies, selon laquelle tous les États sont sur un pied d’égalité. Conséquemment, le droit de veto devrait être réduit, sinon totalement éliminé, a‑t‑il plaidé. Il a aussi recommandé de renforcer l’Assemblée générale, car elle est l’organe le plus universel. Quant aux méthodes de travail du Conseil de sécurité, il a souhaité qu’elles deviennent plus démocratiques et transparentes afin que tous les États aient accès aux informations et documents requis.
M. LAMUWA (Nigéria) a préconisé de faire fond sur les progrès accomplis jusqu’à présent pour restaurer la confiance dans le processus de réforme du Conseil, alors que l’organe se montre incapable « d’honorer » son mandat pour prévenir les conflits et faire cesser les guerres. Selon lui, la guerre en Ukraine et la situation au Moyen-Orient illustrent la nécessité de transformer le système multilatéral et de le rendre plus transparent. Le représentant a exprimé la détermination de son pays à participer à ces efforts pour garantir une « bonne réforme », inspirée par les principes de la Charte des Nations Unies et le respect de la démocratie et de l’inclusion. Appelant à plus de clarté s’agissant des points de convergence et de divergence, il a appelé à garantir la participation de tous les pays souverains et de tous les groupes dans l’ensemble du système de l’ONU. Enfin, après avoir réitéré l’appel de son pays en faveur d’une représentation juste et équitable de l’Afrique, « continent trop longtemps marginalisé », il s’est prononcé pour l’abolition du droit de veto, recommandant toutefois, dans le cas où il serait maintenu, d’en faire bénéficier tous les nouveaux membres permanents du Conseil réformé.
M. SIARHEI MAKAREVICH (Bélarus) a constaté que les discussions antérieures ont montré qu’il est difficile de trouver des compromis sur la réforme du Conseil de sécurité. Pour aller de l’avant, il a appelé à s’appuyer sur un dialogue fondé sur le consensus et à tenir compte des points de vue de tous les États Membres. Il faut adapter la configuration du Conseil à la réalité du monde actuel, a-t-il souhaité, en défendant l’approche actuel d’un examen progressif des axes définis pour cette réforme « qui sont profondément liés et ne sauraient être dissociés ». Il a donc appelé à conserver le format des négociations intergouvernementales actuelles qui a été défini par l’Assemblée générale. Même si ce processus est lent, il permet d’avancer vers un compromis, a-t-il fait valoir, avant de mettre en garde contre les risques de toute tentative parallèle. Le Bélarus est attaché à une plus grande représentativité du monde en développement au sein du Conseil de sécurité, a-t-il annoncé, notamment en ajoutant des représentants de l’Europe de l’Est. Par ailleurs, le représentant n’est pas favorable à des négociations sur la base d’un texte à ce stade, car une telle approche risquerait d’exacerber les désaccords.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a qualifié le Conseil de sécurité de non représentatif, non démocratique, divisé, indécis, ajoutant qu’il est incapable de s’acquitter efficacement de son mandat essentiel. Une réalité démontrée par les crises actuelles, y compris l’aggravation de la situation au Moyen-Orient, a‑t‑il noté. Regrettant la lenteur des progrès réalisés sur les cinq thématiques des négociations intergouvernementales, le représentant a appelé à prendre des mesures décisives pour rétablir la confiance, non seulement dans le système multilatéral au sens large, mais aussi dans le Conseil de sécurité. À ce titre, il a déploré que l’Afrique demeure la seule région non représentée dans la catégorie des membres permanents du Conseil, et reste en outre sous-représentée dans la catégorie des membres non permanents. « C’est là une condamnation du système multilatéral. »
À l’aune de cette injustice, le délégué a défendu la Position commune africaine, celle du consensus d’Ezulwini et de la Déclaration de Syrte. Cette proposition est modeste et réalisable, a‑t‑il estimé. En outre, il a fait valoir que cette demande de l’Afrique de deux sièges permanents, avec leurs prérogatives, y compris le droit de veto, s’il est conservé, ainsi que deux sièges non permanents supplémentaires, permettrait d’assurer une représentation sur un pied d’égalité dans la prise de décision sur les questions de paix et de sécurité internationales, en particulier celles qui concernent les peuples d’Afrique.
M. SEMALIGN KEBEDE ANULO (Éthiopie) a souligné l’urgence d’un Conseil de sécurité réformé pour répondre efficacement aux défis contemporains en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. C’est dans ce contexte que l’Éthiopie a participé activement au processus de négociations intergouvernementales, car elle est convaincue que la tâche de la réforme du Conseil de sécurité est « réalisable et à portée de main », a-t-il déclaré. Déplorant, cependant, que l’Afrique reste le seul grand continent sans représentation dans la catégorie permanente et sous-représentée dans la catégorie non permanente, le représentant a exhorté à réparer de toute urgence cette « injustice historique ». Il a donc appelé à ce que la représentation de l’Afrique reçoive la priorité nécessaire, tout en se disant encouragé par le soutien en ce sens manifesté de plus en plus par les États Membres. Comme le stipule clairement le consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte, « l’Afrique décidera des modalités selon lesquelles elle déterminera sa représentation », a-t-il conclu.
Droits de réponse
Exerçant son droit de réponse, le représentant du Japon a réfuté les déclarations « d’un État Membre ». Il a ajouté que, comme le montrent clairement les différents procès-verbaux, son pays a toujours contribué positivement à la communauté des Nations Unies et continuera à le faire.
En réponse à cette intervention, le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a accusé le Japon d’être un pays « criminel de guerre », estimant qu’il ne devrait pas avoir la possibilité de siéger en tant que membre permanent au Conseil de sécurité. « Son nom est marqué du sceau de la honte », a renchéri le représentant, qui a également reproché au Japon d’être l’un des derniers pays à nier ses crimes du passé. En outre, il a dénoncé le déversement par le Japon d’eaux contaminées dans la mer en dépit des multiples appels de la communauté internationale. Si le Japon devait devenir un membre permanent du Conseil de sécurité, il ne ferait que poursuivre ce comportement, a mis en garde le représentant. Il a par ailleurs réagi à l’intervention, hier, de la République de Corée, invitant ce pays à mettre fin à sa désinformation.
Exerçant à nouveau son droit de réponse, le représentant du Japon a regretté que la RPDC ait choisi de soulever une question sans lien avec le débat du jour. Il a ensuite réfuté les accusations de la RPDC selon lesquelles la centrale nucléaire japonaise de Fukushima Daiichi aurait rejeté dans la mer des eaux contaminées qui porteraient atteinte à la santé humaine et à l’écosystème marin. À cet égard, il a fait mention d’un rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) qui prouve, selon lui, que les eaux rejetées par la centrale sont en conformité avec les normes de sécurité internationales et que leur effet radiologique est négligeable.