Assemblée générale: un an après son adoption, la résolution sur l'organisation d'un débat en cas de veto au Conseil de sécurité « a changé les règles du jeu »
Entrée en vigueur le 22 avril 2022, la résolution (A/RES/76/262) par laquelle l’Assemblée générale s’autorise à organiser systématiquement un débat sur une question bloquée par un veto au Conseil de sécurité a « changé les règles du jeu ». C’est ce qu’a affirmé aujourd’hui le Président de l’Assemblée, M. Csaba Kőrösi, en sonnant l’heure du bilan. Il a prévenu qu’il ne s’agit pas d’opposer un organe à un autre mais bien de fortifier leur unité autour de l’objectif commun qui est de débarrasser le monde du fléau de la guerre.
La résolution, qualifiée d’« historique » par plusieurs délégations, a été adoptée après le lancement de « l’opération militaire spéciale » de la Fédération de Russie en Ukraine, le 23 février, les blocages qui ont suivi au Conseil de sécurité et l’ouverture à la demande de ce dernier, de la onzième Session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale, le 28 février. Avant de passer à l’adoption de textes sur la connectivité interrégionale, le renforcement des examens nationaux volontaires et, à l’issue d’un vote, sur la coopération entre l’ONU et le Conseil de l’Europe, le Président de l’Assemblée générale a dit: nous sommes ici pour discuter de la meilleure manière d’utiliser l’addition à notre grande boîte à outils qu’est la résolution du 22 avril et obtenir des membres du Conseil qu’ils s’unissent autour de solutions viables, dépassent leurs intérêts immédiats et agissent de manière responsable au service de la paix et de la sécurité internationales.
Aussi n’aurons-nous plus à organiser systématiquement ce type de débats, a prédit le Président, en comparant ladite résolution à un masque à oxygène dans un avion. « C’est bien de l’avoir, mais c’est mieux de ne pas à avoir à l’utiliser. » Exprimant un sentiment largement partagé, les pays nordiques ont estimé qu’un an plus tard, la résolution a fourni à l’Assemblée générale un instrument concret pour établir les responsabilités de ceux qui exercent le droit de veto, avec des effets politiques réels sur le modus operandi. Dans ce qui est un changement structurel profond, l’Assemblée peut réaffirmer ses prérogatives et garantir une relation plus responsable et plus transparente avec le Conseil de sécurité. Il faut, ont insisté les pays nordiques, mettre pleinement en œuvre le paragraphe 3 de l’Article 27 de la Charte des Nations Unies qui stipule qu’un État ne peut être « partie, juge et jury » dans un conflit. L’exercice du droit de veto doit en conséquence être limité lorsqu’un membre permanent est directement impliqué dans un conflit dont le Conseil est saisi car on ne peut s’attendre à ce qu’il travaille de manière impartiale, a renchéri l’Ukraine.
Le Pakistan a dit avoir également subi l’exercice abusif de ce droit qui rend impossible, depuis plusieurs décennies, le règlement des questions du Jammu-et-Cachemire mais aussi de la Palestine. Nous ne l’exercerons qu’à des « occasions rares et extraordinaires », ont annoncé les États-Unis dont les propos ont été confirmés par la France. En revanche, l’année dernière, c’est la Fédération de Russie qui a abusé de ce droit pour empêcher le Conseil de réagir à sa guerre illégale et non provoquée contre l’Ukraine, a rappelé le Royaume-Uni. Deux mois plus tard, elle opposait un autre veto à une résolution sur la sécurité climatique et l’aide humanitaire, a dit celui qui n’y a plus recouru depuis plus de 30 ans, à l’instar de la France. Jusqu’à ce jour, il n’est toujours pas possible d’établir, devant le Conseil, l’entière responsabilité du crime d’agression contre l’Ukraine, ont fait observer les pays baltes.
La France s’est réjouie que son initiative, portée également par le Mexique, visant la suspension volontaire et collective du veto en cas d’atrocités de masse, soit soutenue par 106 pays. Ce droit doit lentement tomber en désuétude, a estimé le Liechtenstein, à l’origine, avec d’autres, du Code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT), salué unanimement aujourd’hui. Face aux accès de paralysie du Conseil, il a appelé l’Assemblée générale à se montrer plus active, soulignant qu’elle l’a déjà fait, comme lorsqu’elle a condamné, un an et demi avant le Conseil, le coup d’État militaire au Myanmar.
Toujours aujourd’hui, l’Assemblée générale a encouragé la coopération régionale pour améliorer la connectivité des infrastructures liées au transport, à l’énergie et au numérique. Compte tenu de la nécessité d’impliquer les secteurs public et privé, elle reconnaît, dans sa résolution (A/77/L.59), qu’il faut surmonter les obstacles à l’investissement dans les pays à revenu faible et intermédiaire et le manque de projets durables susceptibles d’être financés. Davantage peut être fait pour instaurer un climat favorable aux affaires et à l’investissement, dit-elle, en encourageant l’utilisation d’outils novateurs tels que les partenariats public-privé, le financement mixte ou encore les structures de titrisation.
Les États-Unis ont salué la résolution, malgré leur réserve sur la mention de leur politique commerciale, alors que le Pakistan a plaidé pour un plan mondial de développement des infrastructures durables et de reconstruction et rappelé sa proposition de créer un mécanisme de financement pérenne pour le développement d’infrastructures durables. L’Assemblée prie, dans une autre résolution (A/77/L.64), les entités des Nations Unies d’appuyer les efforts déployés pour entreprendre des évaluations nationales de la mise en œuvre des objectifs de développement durable et de faciliter l’échange d’expériences et de supports de connaissance issus de ces évaluations.
Elle se félicite, dans ce contexte, de la contribution du Conseil de l’Europe à la mise en œuvre du Programme 2030 et demande de nouveau que la coopération entre ce dernier et l’ONU soit renforcée (A/77/L.65). Cette résolution a été adoptée par 122 voix pour, l’opposition du Bélarus, de la Fédération de Russie, du Nicaragua, de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et de la Syrie, et 18 abstentions, après l’adoption par 81 voix pour, 10 voix contre et 48 abstentions de l’alinéa 9 du préambule qui parle de la guerre en Ukraine.
La Fédération de Russie a rejeté une résolution politisée sortant du cadre habituel et la volonté de transformer le Conseil de l’Europe en un outil antirusse, au service de l’expansionnisme de l’Union européenne. Voter contre la résolution, ce n’est pas appuyer la guerre en Ukraine, a-t-elle rassuré, c’est préserver l’intégrité de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales. Les propos sur une résolution sortant du cadre habituel ont été appuyés par le Venezuela, Cuba et le Mexique. Le Sénégal a réitéré son opposition au concept de « genre » et la Hongrie, à l’invitation à signer ou ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, arguant d’une lutte déjà vigoureuse, au niveau national.
L’Assemblée a prévu une autre séance publique mardi 16 mai à partir de 10 heures pour parler de la zone de paix, de confiance et de coopération en Asie centrale.
EXERCICE DU DROIT DE VETO
Débat sur la question
M. CSABA KŐRÖSI, Président de l’Assemblée générale, a déclaré que l’adoption, il y a un an, de la résolution de l’Assemblée sur l’exercice du droit de veto a été une véritable avancée. Elle a changé la règle du jeu, en ouvrant une nouvelle forme de collaboration entre l’Assemblée et le Conseil, a dit le Président qui a rappelé le rôle complémentaire de ces deux organes. Il a estimé que le débat d’aujourd’hui représente l’occasion de fortifier l’unité plutôt que de semer la division. Si l’Assemblée et le Conseil sont dotés de mandats distincts, ils poursuivent le même objectif qui est de débarrasser le monde du fléau de la guerre, a dit le Président. Pour le monde extérieur, nous ne faisons qu’un. Nous ne nous réunissons pas aujourd’hui pour débattre de la réforme du Conseil ou pour opposer un organe onusien à un autre. Nous sommes ici, a insisté le Président, pour discuter de la meilleure manière d’user de la nouvelle résolution dans notre grande boîte à outil onusienne.
Le Président a interrogé les membres sur ce qu’ils souhaitent. Voulez-vous dupliquer les divisions du Conseil ou voulez-vous une Assemblée qui complète le travail du Conseil, qui soit plus active sur des situations spécifiques, prenne des décisions, formule des recommandations concrètes et les soumette au Conseil? Dans quelle direction souhaitez-vous aller? Le Président a exhorté les délégués à se montrer audacieux et créatifs. Il n’y a pas de mauvaise réponse, il n’y a que de nouvelles idées. L’exercice du droit de veto ayant des répercussions mondiales, il a estimé qu’il ne doit intervenir qu’en dernier ressort. Il a souhaité que les membres du Conseil puissent se réunir autour de solutions viables, dépasser leurs intérêts immédiats et agir de manière responsable au service de la paix. Ainsi, nous n’aurons plus à recourir à ce débat sur le veto, a dit le Président, en comparant la nouvelle résolution à un masque à oxygène dans un avion. C’est bien de l’avoir, mais c’est mieux de ne pas à avoir à l’utiliser. ». Enfin, il a précisé que le verbatim du débat de ce jour sera envoyé au Président du Conseil.
Au nom des pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie), M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a estimé que la résolution A/RES/76/262 a marqué une étape importante dans le renforcement de la transparence et de la cohérence des travaux du Conseil de sécurité et l’amélioration de la collaboration entre les principaux organes de l’ONU. Les trois débats qui se sont tenus sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC), la Syrie et la Fédération de Russie ont été l’occasion de discuter ouvertement de l’exercice du droit de veto. Pour les pays baltes, les abus de plus en plus fréquents de ce droit illustrent à quel point la Fédération de Russie tient le Conseil de sécurité en otage, ce qui rappelle le caractère inévitable d’une réforme dudit Conseil, y compris par l’élargissement de sa composition. L’exercice abusif du droit de veto est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas établir, devant le Conseil de sécurité, l’entière responsabilité du crime d’agression contre l’Ukraine. Le représentant a ainsi rappelé que les pays baltes appuient l’initiative franco-mexicaine visant à interdire l’exercice du droit de veto en cas d’atrocités de masse, y compris le crime d’agression.
Au nom du Bénélux (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg), M. MARK ZELLENRATH (Pays-Bas) a emboîté le pas de son homologue lituanien, en apportant leur soutien à l’initiative franco-mexicaine et à celles conduites par le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT). Il a aussi estimé que, face à l’érosion de la confiance du public dans la capacité du Conseil à maintenir la paix et la sécurité internationales, l’adoption de la résolution A/76/262 a marqué une étape importante vers le renforcement de la transparence des méthodes de travail du Conseil, tout en améliorant le rôle de l’Assemblée générale, les États Membres ayant la possibilité de se prononcer ouvertement sur l’exercice du droit de véto. Le Bénélux, a dit le représentant, est d’avis que l’Assemblée générale a la responsabilité politique de régler les situations bloquées par un veto. Il a rappelé à cet égard la pertinence et la portée de la session extraordinaire d’urgence ouverte après l’invasion de l’Ukraine.
Au nom du Groupe des pays nordiques, M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a estimé qu’un an plus tard, la résolution sur l’exercice du droit de veto au Conseil de sécurité a fourni à l’Assemblée générale un outil concret pour établir les responsabilités de ceux qui l’exercent, avec des effets politiques réels sur notre modus operandi, puisque ce texte a relevé les enjeux liés à cet exercice et offert à l’ensemble des États Membres une plateforme d’action. Ce faisant, la résolution a permis de rééquilibrer les relations entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité. Dans ce qui est un changement structurel profond, l’Assemblée peut réaffirmer ses prérogatives, y compris sur les questions de paix et de sécurité internationales, et garantir une relation plus responsable et plus transparente avec le Conseil de sécurité.
Le représentant a estimé qu’une nouvelle réforme est nécessaire « de toute urgence » pour veiller à ce que le droit de veto soit toujours exercé dans l’esprit de la Charte, sans paralyser l’action du Conseil. Il a exhorté de nouveau les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à adhérer au code de conduite du Groupe ACT et à la déclaration politique sur la suspension du droit de veto en cas d’atrocité de masse, initiée par la France et le Mexique. Il a encouragé toutes les délégations à faire part de leurs points de vue sur d’autres réformes pertinentes visant à limiter davantage la portée et l’exercice du droit de veto. Il faut, a insisté le représentant, mettre pleinement en œuvre le paragraphe 3 de l’Article 27 de la Charte qui, en substance, prévoit qu’un État ne doit pas être autorisé à être « partie, juge et jury ».
Lorsque le droit de veto est invoqué, il affaiblit le plus souvent la crédibilité du Conseil et ne contribue guère à garantir la paix et la sécurité internationales, a résumé le délégué danois. Être convoqué à l’Assemblée générale pour expliquer ses positions introduit un certain degré de responsabilité et donne à tous les États Membres l’occasion de faire entendre leur voix dans l’entreprise commune, qui est d’œuvrer pour la paix et la sécurité sur tous les continents et avec la participation de tous.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein), s’il a salué les membres du Conseil qui ont répondu à l’appel pour expliquer leur veto à chaque occasion qui s’est présentée jusqu’à présent, a dit apprécier encore plus leur décision de renoncer à exercer ce droit. Selon lui, la perspective de devoir rendre des comptes donne déjà des résultats positifs, et il a espéré qu’elle encouragera les auteurs de textes, en particulier les membres élus du Conseil, à proposer des formulations répondant aux attentes de l’ensemble des membres. Le délégué a souligné que cette initiative contribue à rétablir l’équilibre des pouvoirs entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. Sachant qu’il n’est pas réaliste d’espérer une plus grande unité du Conseil dans un avenir proche, il appelé de ses vœux une Assemblée générale active dans le domaine de la paix et de la sécurité afin de garantir le multilatéralisme. Il a rappelé que l’Assemblée avait prouvé sa capacité à intervenir en adoptant des résolutions sur la création du Mécanisme international, impartial et indépendant en Syrie et en condamnant le coup d’État militaire au Myanmar, précédant le Conseil de sécurité de plus de 18 mois. Il a aussi souligné son rôle de premier plan après l’invasion illégale de l’Ukraine, en particulier depuis que le Conseil lui a délégué son autorité dans le cadre de la formule « S’unir pour la paix ». Le représentant a regretté que l’Article 27 (3) de la Charte, garantissant qu’« une partie à un différend s’abstient de voter » dans les décisions prises au titre du Chapitre VI, n’ait pas été appliqué et a invité de nouvelles discussions à ce sujet. « Le veto ne doit plus être une menace permanente et un obstacle potentiel à l’efficacité de notre organisation, mais doit lentement tomber en désuétude grâce à une série de mesures » a-t-il martelé en conclusion.
Mme MARITZA CHAN-VALVERDE (Costa Rica) a relevé qu’avant l’adoption de la résolution sur l’exercice du droit de veto par l’Assemblée générale, un veto pouvait paralyser l’ensemble de l’ONU. « L’impact de cette paralysie politique est dévastateur et les civils du monde entier en paient le prix. » Selon la déléguée, l’initiative du veto a réorienté les relations entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée, en renforçant notamment le rôle de celle-ci dans le soutien de la paix et de la sécurité internationales. « Nous ne devons pas non plus considérer cette initiative comme une solution miracle qui résout toutes les dynamiques entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale », a-t-elle tempéré. La déléguée a rappelé que les nominations à des postes supérieurs ne sont que l’un des domaines qui justifient un réajustement. À cet égard, le Conseil de sécurité continue de dominer le processus de sélection du Secrétaire général, et ses membres permanents continuent de limiter les nominations aux postes de direction à leurs ressortissants. Avec l’initiative du veto, a-t-elle poursuivi, « les États peuvent être à la fois petits et importants ». Les petits États sont les « vrais gardiens » de l’ordre international, contrairement à la mentalité qui veut que « la force fait la loi ». Ladite initiative est une pièce importante du puzzle et marque le début du voyage, a conclu la déléguée.
M. EDUARDO MANUEL DA FONSECA FERNANDES RAMOS (Portugal) a loué l’avancée qu’a été l’adoption de la résolution sur l’exercice du droit de veto. Le Conseil doit être responsable vis-à-vis des États Membres, quand il agit ou quand il n’agit pas, a dit le délégué. Il a estimé que « le veto cessera d’exister quand tous les membres décideront de ne plus y recourir ». Enfin, il a indiqué que le code de conduite défendu par le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT) est en passe de recueillir l’assentiment de plus des deux tiers des membres de l’ONU.
M. MITCH FIFIELD (Australie) a rappelé l’opposition de longue date de son pays à l’exercice du droit de veto au sein du Conseil de sécurité, laquelle remonte à la création même de l’ONU, lorsque le Ministre australien des affaires étrangères de l’époque et Président de l’Assemblée générale, M. Herbert Evatt, avait été l’un des premiers à remettre en question l’équité et l’efficacité d’un tel droit. Pour lui, la résolution adoptée il y a un an renforce la relation complémentaire entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. Le délégué a ensuite condamné l’utilisation du droit de veto par la Russie l’an dernier dans le cadre de son invasion « illégale et immorale » de l’Ukraine, considérant qu’il s’agit d’une violation flagrante de l’Article 27 (3) de la Charte, qui dispose qu’« une partie à un différend s’abstient de voter ». Pour sa part, l’Australie, a-t-il dit, s’efforcera de rechercher des occasions de tirer parti de cette importante initiative; de renforcer le rôle de l’Assemblée générale conformément au mandat que lui confère la Charte des Nations Unies; et d’appeler à de meilleures normes pour encadrer l’utilisation du droit de veto, telles que le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine sur la suspension du droit de veto en cas d’atrocités de masse.
M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a souligné que lors de l’adoption de la résolution 76/262, il y a un an jour pour jour, les États Membres espéraient un renouveau du multilatéralisme. Il a regretté la poursuite de certaines des violations les plus graves du droit international, renforcées par l’« immunité » du droit de veto. Son exercice a entraîné la paralysie du Conseil face aux conflits et aux injustices perpétrés au Myanmar, en Palestine, en Syrie et en Ukraine, a-t-il résumé. Le délégué a regretté maints abus de ce droit pour satisfaire les intérêts de certains pays et de leurs alliés, au détriment de l’intérêt collectif de la communauté internationale. Affirmant que ce droit devrait être réglementé, il a estimé qu’il ne devrait pas être utilisé dans des situations de génocide, de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre. Son pays estime également qu’il devrait être exercé par au moins deux membres permanents et soutenu par trois membres non permanents du Conseil de sécurité, ajoutant qu’il devrait alors être soutenu par un vote à majorité simple à l’Assemblée générale. Le délégué a toutefois rappelé que la Malaisie considérait qu’à long terme, le veto n’avait aucun rôle à jouer dans une architecture multilatérale démocratique moderne, et réitéré son appel à son abolition. Le principe antidémocratique du veto va à l’encontre des principes mêmes sur lequel les Nations Unies ont été construites, a-t-il martelé pour conclure son propos.
M. HARI PRABOWO (Indonésie) a demandé d’aller au-delà de cette initiative sur le veto de l’Assemblée générale pour essayer de résoudre les questions en suspens. Cependant, il a constaté que les questions de la République populaire démocratique de Corée et de la Syrie, qui ont donné lieu au veto au Conseil de sécurité, n’ont toujours pas connu de progrès au sein de cet organe. Selon le délégué, il faut donc se focaliser sur la résolution efficace des problèmes posés et non multiplier les réunions de l’Assemblée générale pour discuter du veto. De plus, a-t-il poursuivi, la résolution de l’Assemblée générale sur le veto devrait servir d’outil pour aller vers un travail plus transparent et plus efficace du Conseil de sécurité. De fait, si l’explication de ceux qui ont exercé le droit de veto est importante, il ne faut pas oublier qu’à terme, il est question de renforcer le travail global des Nations Unies afin de promouvoir davantage de multilatéralisme. Le délégué a également appelé à l’amélioration de l’interaction entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. Une interaction qui contribuera à une plus grande responsabilisation et à la légitimité du Conseil. Il a souligné que la Charte des Nations Unies est claire sur le rôle, le mandat et la compétence des deux organes. Par conséquent, toutes les délibérations au titre de ce point de l’ordre du jour ne doivent pas se substituer au travail et à la responsabilité du Conseil de sécurité.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a notamment rappelé que son pays « connaît bien » les utilisations abusives du droit de veto, car c’est par son exercice qu’il a été rendu impossible selon lui « de régler en temps voulu la question du Jammu-et-Cachemire ». C’est l’exercice abusif de ce droit qui, aujourd’hui encore et ce depuis des décennies, empêche qu’une solution durable soit trouvée en ce qui concerne la question de Palestine, a-t-il renchéri. Pour le délégué pakistanais, la refonte de l’exercice du droit de veto doit être le socle de la réforme du Conseil de sécurité, lequel ne devra plus accueillir de nouveaux membres afin de pourvoir être élargi à d’autres membres issus en premier lieu des groupes de pays en développement. Ainsi, d’après le Pakistan, le Conseil s’exposera-t-il à des risques limités de paralysie et fonctionnera de manière plus ouverte, transparente et efficace au bénéfice de tous les États Membres de l’ONU. Débattre du droit de veto a révélé certaines réalités et ouvert d’autres options, a-t-il aussi estimé, à savoir qu’un exercice négatif de ce droit devrait être atténué par le renforcement du rôle des membres non permanents du Conseil de sécurité via « peut-être » une représentation renforcée.
M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a rappelé le libellé de l’Article 24 de la Charte, qui dispose que le Conseil de sécurité agit au nom de tous les États Membres. Il a estimé que le Conseil a échoué à s’acquitter de son mandat, le droit de veto étant au cœur des difficultés éprouvées. Le délégué a estimé que la résolution de l’Assemblée générale adoptée il y a un an est un élément clef qui contribue à la préservation de la pertinence de l’ONU. Cette résolution a permis une amélioration de la coopération entre l’Assemblée et le Conseil, s’est-il félicité.
M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a estimé que la résolution relative à l’exercice du droit de veto a changé la donne à bien des égards, renforçant le rôle de l’Assemblée générale sans affaiblir celui du Conseil de sécurité. Elle a le potentiel de décourager l’exercice du droit de veto et d’encourager de nouvelles habitudes de dialogue et de coopération au sein du Conseil pour conduire à une plus grande retenue. Simultanément, cette initiative a donné à l’ensemble des États Membres, en particulier aux petits États, l’occasion de faire connaître leur point de vue, a considéré le délégué, avant d’inviter les délégations à soutenir aussi l’initiative franco-mexicaine et le code de conduite proposé par le Groupe ACT concernant l’action du Conseil de sécurité contre les génocides, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. « Nous appelons également tous les membres du Conseil de sécurité, tant les membres permanents que les membres élus, à affirmer leur engagement vis-à-vis de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies, qui stipule qu’une partie à un différend doit s’abstenir de voter au Conseil de sécurité. »
M. FAHAD M. E. H. A. MOHAMMAD (Koweït) a rappelé que son pays faisait partie du premier groupe d’États ayant appuyé l’initiative sur le veto menée par le Liechtenstein. La résolution historique qui en a résulté a renforcé le rôle de l’Assemblée générale et augmenté la transparence et la reddition de comptes de la part du Conseil de sécurité. Dénonçant « l’exercice arbitraire du droit de veto » par certains membres permanents du Conseil comme l’une des raisons de sa paralysie, le délégué a affirmé que le recours au veto devait être limité. Le Koweït, a-t-il précisé, a signé le code de conduite du Groupe ACT selon lequel les membres du Conseil s’engagent à ne pas s’opposer aux projets de résolution concernant le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. Le délégué a ajouté que son pays soutenait également l’initiative franco-mexicaine selon laquelle les membres permanents suspendent volontairement l’exercice du droit de veto en cas de crimes contre l’humanité.
M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a estimé que le débat du jour n’a rien de protocolaire, tant l’exercice du droit de veto touche directement au multilatéralisme. Il a expliqué, s’agissant de la réforme du Conseil de sécurité, que son pays s’oppose à l’élargissement du droit de veto par l’accroissement du nombre de ses membres permanents. « Accorder des privilèges à perpétuité n’aiderait en rien à empêcher ce que l’Organisation, 75 ans après sa création, n’a su éviter, à savoir la commission des pires crimes et atrocités. » Le représentant a suggéré de s’inspirer des démocraties qui se fondent de plus en plus sur le principe de responsabilité et permettent l’expression de doctrines politiques alternatives. C’est cela selon lui que doit refléter un Conseil réformé pour être en phase avec les réalités de notre monde. Le représentant a précisé viser « tous les veto », celui qui peut être exercé lors du processus de sélection du Secrétaire général de l’ONU ou encore pour bloquer l’adoption d’une déclaration présidentielle. C’est en ce sens qu’il a appelé les États Membres à réfléchir aux mécanismes dont ils disposent pour limiter l’exercice de ce droit. Ainsi les a-t-il invités à développer une diplomatie créative inspirée de l’initiative franco-mexicaine, du code de conduite du Groupe ACT ou encore du mouvement Unis pour la paix. Son propre pays préconise la mise en place d’un mécanisme permettant qu’une majorité de 90% des États Membres de l’Assemblée générale puissent révoquer un veto quand il a été utilisé négativement.
M. CORNEL FERUTĂ (Roumanie) a rappelé qu’au cours de l’année 2022, quatre veto ont été opposés, entraînant une souffrance accrue des civils en Ukraine, en Syrie et en République populaire démocratique de Corée. Selon lui, l’initiative sur le veto crée un pont entre les activités du Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, ce qui favorise un sentiment de responsabilité parmi les membres permanents du Conseil. Le délégué a noté que la résolution de l’Assemblée complète des efforts antérieurs tels que la « Déclaration politique sur la suspension du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse », initiée par la France et le Mexique, ainsi que le code de conduite du Groupe ACT. La Roumanie soutient les deux initiatives, a-t-il dit. Le délégué a rappelé que l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies dispose qu’une partie à un différend s’abstient de voter. S’abstenir d’utiliser le droit de veto dans de telles situations éviterait une prise d’otage du Conseil de sécurité comme ce fut le cas après l’invasion russe de l’Ukraine, a-t-il argué. Il ne fait aucun doute que le veto affecte la capacité du Conseil à traiter de certaines des violations les plus graves de la Charte et du droit international.
M. HANS ALMOSLECHNER (Autriche), après avoir salué l’utilité de la résolution A/76/262 et appuyé les initiatives franco-mexicaine et celles conduites par le Groupe ACT pour limiter ou réduire l’exercice du droit de veto en cas de crimes graves, a déclaré: « il n’y a pas place au Conseil de sécurité pour la défense des intérêts nationaux ». Les membres permanents, en premier lieu, doivent exiger et souscrire au respect des buts, principes et normes de la Charte des Nations Unies et du droit international et en dénoncer les violations, a ajouté le représentant. Pour l’Autriche, il est en effet de leur devoir d’assurer un Conseil efficace pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales et de ne pas mettre leur veto à des actions prises contre des violations manifestes du droit international et de la Charte.
M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a salué l’adoption de la résolution 76/262, qui a ouvert un nouveau chapitre s’agissant de la responsabilité du Conseil de sécurité. Il a noté la participation élevée des États Membres aux débats qui se sont tenus à l’Assemblée générale dans le cadre de la résolution précitée. Cette résolution représente selon lui une amélioration significative du fonctionnement de l’ONU. Le délégué a rappelé que le droit de veto n’est pas un privilège mais une lourde responsabilité. Ce droit ne peut être exercé en cas d’atrocités de masse, a-t-il dit, en insistant sur l’importance de l’initiative franco-mexicaine à ce sujet. Il a souligné les six principes de comportement responsable récemment avancés par les États-Unis. Le délégué a appelé à aller plus loin que ces actions qui reposent sur une base volontaire. Nous devons défendre l’intégrité de la Charte et en appliquer scrupuleusement les principes, a-t-il conclu, en soulignant le rôle central de l’Assemblée.
M. SANGJIN KIM (République de Corée) a considéré que les veto opposés en mai dernier à une nouvelle résolution sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ont démontré que l’exercice du droit de veto peut porter atteinte à l’intégrité même du Conseil de sécurité. Ces veto ont été selon lui une contradiction même dans les termes et s’avéraient « autodestructeurs » d’un point de vue institutionnel, dans la mesure où certains membres permanents ont refusé de réagir face à des violations manifestes de multiples résolutions du Conseil qu’ils avaient eux-mêmes négociées et en faveur desquelles ils avaient voté. Parmi celles-ci, la résolution 2397(2017) prévoyait de prendre des mesures en cas de nouveau tir de missile balistique intercontinental par la RPDC. « Les veto ont empêché le Conseil de mettre en œuvre cette décision, l’annulant ainsi virtuellement », a déploré le représentant. Le représentant s’est rappelé que lors de la toute première réunion de l’Assemblée organisée conformément à la résolution 76/262, il avait été expliqué que ces veto étaient censés contribuer à maintenir la stabilité dans la péninsule coréenne et à atténuer la crise humanitaire en RPDC. Au lieu de quoi, la RPDC a profité de l’affaiblissement de la mise en œuvre des sanctions du Conseil de sécurité et du silence de ce dernier, procédant depuis à cinq nouveaux tirs de missiles balistiques intercontinentaux, a constaté le délégué.
Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a rappelé qu’il y a un an, Malte a coparrainé la résolution de l’Assemblée générale sur l’exercice du droit de veto au Conseil de sécurité. L’exercice du droit de veto nous a laissés avec un Conseil incapable d’agir face à certains des défis les plus urgents de notre époque, a-t-elle constaté. Il a aussi sapé l’esprit du multilatéralisme, épine dorsale de la Charte des Nations Unies. L’Assemblée ayant été appelée à débattre des résultats du droit de veto à deux reprises l’année dernière, la déléguée a estimé que la résolution remplit son objectif en donnant à cette instance la possibilité de partager son point de vue sur les questions relatives à la paix et la sécurité internationales. Et cela nous rappelle aussi qu’avec le veto, vient une responsabilité, a-t-elle ajouté. Soyons clairs: convoquer un débat de l’Assemblée générale pour discuter de l’utilisation du veto n’appelle pas un changement dans l’utilisation du veto, a-t-elle fait remarquer. Cette discussion, a-t-elle reconnu, reste entre les mains du processus intergouvernemental dédié à la réforme du Conseil de sécurité. En outre, la déléguée a réitéré son appel au respect de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies qui dispose qu’une partie à un différend doit s’abstenir de voter. Elle a enfin dit soutenir l’initiative franco-mexicaine sur la limitation du droit de veto en cas d’atrocités de masse.
M. ANTONIO M. LAGDAMEO (Philippines) a fait observer qu’en donnant le pouvoir de convocation au Président de l’Assemblée générale, la résolution « historique » réduit le pouvoir des États Membres. Toutefois, a-t-il tempéré, nous pensons que ces réunions peuvent donner des résultats concrets susceptibles d’avoir un impact positif sur le terrain et, à long terme, de renforcer la crédibilité et l’efficacité de l’ONU tout entière. L’exercice du droit de veto est une responsabilité exceptionnelle qui ne doit pas se faire de manière irresponsable. Ce droit doit être exercé judicieusement et ne pas empêcher indûment le Conseil de sécurité de s’acquitter de son mandat principal de maintien de la paix et de la sécurité internationales, a souligné le représentant.
Mme ARLENE BETH TICKNER (Colombie) a souligné la nécessité urgente d’une réforme du Conseil de sécurité et du droit de veto, qui est un mécanisme « antidémocratique ». Le veto est selon elle une grave lacune dans l’examen des situations de génocide et d’atteintes à l’intégrité territoriale de certains États. « Nous ne pouvons accepter que le processus de réforme du Conseil de sécurité étende le droit de veto à de nouveaux membres permanents », a tranché la déléguée. Elle a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine. Elle a également souhaité que l’État qui exerce la présidence du Conseil se retire lorsqu’il est directement concerné par un point à l’ordre du jour du Conseil. Enfin, elle a rappelé le libellé de l’Article 24 de la Charte qui dispose que le Conseil agit au nom de tous les membres de l’Organisation et non individuellement.
M. YASEEN LAGARDIEN (Afrique du Sud) a estimé que l’Assemblée générale doit être en mesure de demander des comptes au Conseil de sécurité, tout en permettant à ce dernier de s’acquitter de son mandat. Lorsque le Conseil se trouve dans l’impasse, la saisine de l’Assemblée générale doit viser à l’en sortir et non à perpétuer les divisions au sein de cet organe, a-t-il estimé. Pour le représentant, il importe de garder à l’esprit que l’Assemblée ne peut formuler aucune recommandation concernant un différend ou une situation examinée par le Conseil de sécurité au cours d’une session ordinaire. Nous devons donc envisager des moyens concrets permettant à l’Assemblée d’apporter une contribution significative. Pourquoi ne pas envisager des résumés des débats par le Président de l’Assemblée générale plutôt que de formuler des recommandations relatives aux questions dont le Conseil est saisi? a suggéré le délégué. Un tel résumé listerait les solutions suggérées par les États Membres pour contribuer à répondre aux besoins des populations affectées par le conflit ayant fait l’objet de l’exercice du droit de veto, a-t-il précisé. Enfin, il a souhaité que l’accent soit mis sur l’accélération de la réforme du Conseil de sécurité lui-même.
M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a estimé que la résolution de l’Assemblée générale sur le droit de veto est un pas dans la bonne direction pour rectifier l’ordre des choses. En effet, les 193 États Membres de l’ONU ne peuvent pas être bloqués par les membres permanents du Conseil de sécurité. Selon le délégué, autonomiser tous les États Membres sur les questions de paix et de sécurité est particulièrement crucial en ces temps sombres au Conseil. Il a condamné la poursuite de l’agression russe contre l’Ukraine, en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et malgré les nombreuses résolutions de l’Assemblée générale réclamant qu’elle cesse. Dans ce contexte, le Conseil reste paralysé par la menace d’un veto russe sur toute mesure de paix constructive. De ce fait, il a été contraint d’abdiquer sa principale responsabilité de maintien de la paix et la sécurité internationales devant ce conflit, a déploré le délégué. « Nous avons besoin d’actions supplémentaires et d’initiatives visant à améliorer le fonctionnement du Conseil lui-même », a-t-il conclu.
M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a affirmé que le droit de veto est anachronique. Compréhensible dans le contexte historique particulier de 1945, son exercice contredit aujourd’hui de manière flagrante l’un des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, celui de l’égalité souveraine des États, a-t-il considéré. Pour le représentant, le droit de veto, en de trop nombreuses occasions, a empêché le Conseil de sécurité de s’acquitter de ses responsabilités vitales dans des situations mettant en danger la paix et la sécurité internationales, empêchant l’ONU « de faire une réelle différence sur le terrain ». Bien que nous ne nous attendions pas à ce que les membres permanents renoncent à ce privilège qui leur est donné par la Charte, nous leur demandons et attendons d’eux qu’ils agissent de manière responsable et qu’ils fournissent une explication complète à l’ensemble des États Membres représentés lorsqu’ils opposent leur veto, a déclaré M. Massari. Il a jugé que les défis mondiaux actuels, que ce soit dans le domaine de la paix et de la sécurité, du développement durable, de l’action climatique ou des droits humains et de l’état de droit, nécessitent une réponse multilatérale forte fondée sur un ordre international se basant sur des règles. Profitons de l’occasion qui nous est offerte aujourd’hui pour réaffirmer notre attachement à un système multilatéral efficace, démocratique et inclusif, dans lequel une prise de décision efficace n’est pas sapée par la poursuite des intérêts politiques de quelques-uns, a conclu M. Massari.
M. PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a rappelé que son pays s’engageait depuis longtemps pour un usage restrictif du veto au Conseil de sécurité et qu’elle avait soutenu la résolution 76/262. Elle a regretté que l’exercice du droit de veto ait empêché le Conseil de s’acquitter de sa responsabilité première envers la paix et la sécurité, notamment en ce qui concerne l’agression militaire russe contre l’Ukraine, l’aide humanitaire transfrontalière pour la Syrie et la non-prolifération nucléaire sur la péninsule coréenne. La déléguée a cependant constaté que la résolution avait permis de renforcer la transparence dans l’exercice droit de veto, notamment par le biais des rapports spéciaux qu’elle instaure. Ladite résolution favorise la recherche de l’unité au sein du Conseil en vue d’éviter à avoir à justifier un veto devant l’Assemblée générale; elle rappelle à tous les États Membres qu’ils peuvent faire le choix d’agir, notamment en adhérant au code de conduite du Groupe ACT qui prévoit de ne pas voter contre des projets de résolution au Conseil visant à mettre fin à un génocide, à des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre. La déléguée a salué la signature de ce code par la majorité des membres de l’Assemblée générale, y compris la France et le Royaume-Uni, et encouragé d’autres États à faire de même.
M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a déclaré que le droit de veto sape la capacité du Conseil de sécurité à s’acquitter de ses responsabilités, avant de plaider pour un Conseil plus inclusif et représentatif. Il a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine. Alors que nous débattons de la réforme du Conseil depuis longtemps, le monde a son avis sur la question: le Conseil n’est pas à la hauteur des tâches qui lui ont été confiées, a tranché le délégué. Il a dénoncé la « paralysie honteuse » du Conseil, avant de juger capitale la résolution 76/262. Le délégué a aussi insisté sur la pertinence des rapports spéciaux que le Conseil doit envoyer à l’Assemblée générale dans ce cadre. Au regard des attentes qui entourent la réforme du veto, plus nous attendons, plus la crédibilité du Conseil est sapée, a-t-il averti.
M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a appelé à un Conseil de sécurité qui reflète davantage les réalités du monde d’aujourd’hui. Il a salué la résolution de l’Assemblée générale sur le droit de veto, coparrainé par près de 80 délégations dont la sienne. Il a rappelé l’indignation de son pays quand la Russie a opposé son veto à deux reprises sur la question ukrainienne, l’an dernier. Il est important que les cinq membres permanents exercent leur droit de veto de manière responsable, a dit le délégué qui a affirmé que son pays le fait avec sérieux et uniquement à des occasions rares et extraordinaires.
M. JAKUB KULHÁNEK (République tchèque) a remarqué que le recours au veto s’est considérablement accru ces dernières années, empêchant le Conseil de sécurité de s’acquitter efficacement de son mandat et de maintenir la paix et la sécurité internationales. Son exercice fréquent est l’une des causes de l’incapacité croissante du Conseil de s’acquitter de ses responsabilités, et, dans ce contexte, nous réaffirmons notre soutien à l’initiative franco-mexicaine sur la limitation de l’exercice du droit de veto en cas d’atrocités de masse, a-t-il dit. En ce premier anniversaire de l’adoption de la résolution A/76/262, le représentant a noté que la Russie poursuit son agression contre l’Ukraine, causant des pertes massives en vies humaines, ciblant délibérément des infrastructures vitales, des sites industriels, des hôpitaux et des écoles. Il a dit que la Tchéquie continue de condamner dans les termes les plus fermes cette agression russe non provoquée et demande instamment à la Russie de retirer sans condition toutes ses troupes et forces armées de l’ensemble du territoire ukrainien. Par ailleurs, il a fait remarquer que l’exercice abusif du droit de veto, en empêchant le renvoi d’affaires à la CPI, rend impossible la reddition de comptes pour les crimes les plus graves et contribue ainsi à ce que perdure l’impunité de leurs auteurs.
M. BOSTJAN MALOVRH (Slovénie) a affirmé qu’au moment de l’adoption de la résolution issue de l’initiative sur le droit de veto, beaucoup d’États Membres espéraient que ce mécanisme n’aurait pas besoin d’être utilisé souvent et qu’il contribuerait à limiter l’exercice du droit de veto. Il a regretté que lors de l’année écoulée, quatre veto avaient été déposés, bloquant trois initiatives au Conseil de sécurité. Il a rappelé que l’Assemblée générale s’était réunie pour discuter de ces situations, deux fois lors de la session plénière ordinaire et une fois lors de la onzième session extraordinaire d’urgence. Soulignant que le nombre d’intervenants dans ces débats parlait de lui-même, le délégué s’est félicité des résultats obtenus, notamment en ce qui concerne la reddition de comptes au sein du Conseil de sécurité et le renforcement du multilatéralisme. Il a indiqué que son pays, en tant que membre du Groupe ACT, soutenait les efforts visant à limiter l’exercice du droit de veto quand le Conseil étudiait une résolution visant à mettre fin à un génocide, des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre, de même que l’initiative franco-mexicaine sur la suspension du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse. Il a encouragé les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à se joindre à ces initiatives importantes.
Mme SHINO MITSUKO (Japon) a affirmé que le veto est une prérogative si puissante qu’un membre permanent du Conseil doit l’exercer dans le seul but de maintenir la paix et la sécurité internationales. À cet égard, elle s’est félicitée de l’engagement de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis de s’abstenir volontairement de recourir au droit de veto, sauf dans des circonstances rares et extraordinaires, tout en espérant que les autres membres permanents se joindront à eux. La déléguée a donc salué le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine sur la suspension du droit de veto en cas d’atrocités de masse. Alors que nous célébrons le premier anniversaire de l’adoption d’une résolution « historique », la représentante a estimé qu’une véritable réforme du Conseil de sécurité s’impose, exigeant un élargissement des catégories des membres permanents et non permanents.
Le droit de veto, a martelé M. JORGE VIDAL (Chili), n’est pas un privilège. C’est un droit qui doit être exercé de manière responsable, en gardant à l’esprit les buts et principes de la Charte des Nations Unies. Il a noté que la résolution de l’Assemblée est de nature à améliorer la communication entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale et souligné que ce texte ne fait pas partie du processus de réforme du Conseil de sécurité. Il faut, a-t-il estimé, penser le veto dans le cadre d’une réforme globale du système des Nations Unies. En attendant, il a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine.
M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a tranché: le veto est un outil inefficace pour le fonctionnement du Conseil de sécurité, qui ne peut maintenir la paix et la sécurité internationales lorsque l’un de ses cinq membres permanents exercent son droit de veto. Tout en réaffirmant son plein soutien au mécanisme défini dans la résolution 76/262, il a considéré que son existence ne doit pas reléguer au second rang les négociations intergouvernementales en cours sur une réforme globale du Conseil. Or, tout au long de ce processus de réforme, nous avons constaté que certains cherchent à s’orienter vers une réforme qui, au lieu de remédier aux maux du fonctionnement du Conseil de sécurité, ne fait que les aggraver, s’est alarmé le représentant. L’Argentine, a-t-il dit, ne peut accepter les propositions qui visent à étendre le droit de veto aux nouveaux membres. Il va sans dire qu’un Conseil ainsi réformé sera inefficace, l’un de ses principaux problèmes étant précisément son inaction face à certaines crises, conséquence de l’exercice du droit de veto. « L’efficacité et le droit de veto s’excluent mutuellement ». Le délégué a ensuite fait part de son soutien à la proposition de réforme défendue par l’Union pour le consensus (UPC), « la plus rationnelle et la plus juste », qui vise à accroître le nombre de non permanents tout en cherchant à limiter l’exercice du droit de veto.
M. YURI ARIEL GALA LÓPEZ (Cuba) a dénoncé la tendance croissante du Conseil de sécurité à usurper les prérogatives de l’Assemblée générale en matière de paix et de la sécurité internationales, alors qu’elle est « l’organe le plus démocratique et le plus représentatif du système des Nations Unies ». Il a cependant contesté le paragraphe 4 de la nouvelle résolution, inscrivant la question de l’exercice du droit de veto comme point permanent à l’ordre du jour de l’Assemblée générale. Cela, s’est-il expliqué, ne peut qu’isoler cette question des négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité. Dans ce cas, la réforme globale du Conseil serait irréalisable puisque les cinq questions principales identifiées, dont celle du veto, forment un tout indissociable. Le représentant a aussi jugé insuffisant de limiter les rapports spéciaux du Conseil de sécurité au cas où le droit de veto a été exercé car c’est une approche clairement restrictive de ce que la Charte dit, à savoir « chaque fois que cela est nécessaire ». En conclusion, il a estimé que le mandat de la résolution 76/262 ne remplace pas les dispositions des articles 8(b) et 9(b) du règlement intérieur de l’Assemblée générale, relatifs à la convocation de sessions extraordinaires d’urgence.
Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a estimé que le veto n’est pas un privilège. « Le veto ne peut viser à paralyser le Conseil de sécurité dans l’accomplissement de son mandat de maintien de la paix et la sécurité internationales. » Il implique des devoirs et une responsabilité particulière pour les membres permanents. Dans cet esprit de responsabilité, la France n’a utilisé le veto que 18 fois depuis 1945 et elle n’y a pas eu recours depuis plus de 30 ans, a rappelé la déléguée. Depuis 2013, la France a proposé que les cinq membres permanents du Conseil suspendent volontairement et collectivement l’usage du veto en cas d’atrocités de masse. Cette démarche volontaire n’exige pas une révision de la Charte mais un engagement politique des membres permanents, a-t-elle expliqué. Aujourd’hui, cette initiative portée conjointement avec le Mexique est soutenue par 106 pays. La déléguée a appelé tous les États Membres qui ne l’ont pas fait à la soutenir, en particulier les autres membres permanents du Conseil de sécurité. Nous avons à cet égard noté avec intérêt l’engagement des États-Unis à restreindre leur usage du veto à des situations rares et exceptionnelles, et souhaitons conjuguer nos efforts en vue d’un usage responsable du veto, a-t-elle déclaré. Pour renforcer notre système de sécurité collective, a-t-elle ajouté, nous devons plus largement réformer le Conseil de sécurité: la France soutient son élargissement dans ses deux catégories de membres et souhaite qu’une négociation s’engage désormais sur la base d’un texte.
Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie) a affirmé qu’un an après son adoption, on peut constater l’impact positif de la résolution demandant que les membres permanents du Conseil qui ont exercé leur droit de veto viennent expliquer leur décision devant l’Assemblée générale. Tout d’abord, la transparence et la responsabilité se sont accrues et la résolution a également eu un certain pouvoir préventif: sans avoir éliminé le recours au veto, elle a augmenté son coût politique, a estimé la représentante. Le texte a également renforcé le rôle de l’Assemblée générale dans les questions relatives à la paix et à la sécurité internationales, a-t-elle encore relevé. Compte tenu du contexte géopolitique actuel, qui est extrêmement difficile, il est probable que le Conseil de sécurité continue d’être empêché d’assumer efficacement son rôle en raison de l’exercice abusif du droit de veto. Dans de tels cas, il est nécessaire que l’Assemblée dispose d’un moyen d’agir et d’obtenir des résultats, car lorsque le Conseil de sécurité n’agit pas, ce n’est pas seulement un échec pour lui, mais un échec des Nations Unies dans leur ensemble, a estimé la déléguée.
Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a affirmé que le droit de veto est l’élément le plus antidémocratique de l’ONU, son pays s’opposant à son exercice depuis sa création en 1945. Notre position selon laquelle le veto ne devrait jamais être utilisé reste inchangée, a-t-elle appuyé, saluant les effets positifs qu’a entraînés en un an à peine l’adoption de la résolution A/76/262. En effet, les deux fois où la résolution a été activée, le débat qui a suivi à l’Assemblée générale a tourné à la démonstration en faveur d’un multilatéralisme fort et inclusif, s’est-elle félicitée. Après avoir rappelé la participation active de son pays aux travaux du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence, elle a formé le souhait que, dans un an, l’Assemblée générale se réunisse pour fêter cette fois le non-exercice du droit de veto au cours de l’année écoulée.
M. ROBERT CHATRNUCH (Slovaquie) a rappelé que le droit de veto n’est pas un privilège mais une lourde responsabilité, celle d’agir dans l’intérêt de la paix et de la sécurité dans le monde. L’exercice abusif de ce droit, comme le fait la Fédération de Russie qui est un État agresseur, est inacceptable, a déclaré le délégué. Il a estimé que la résolution 76/262 n’a en rien sapé la responsabilité essentielle du Conseil qui est le maintien de la paix et de la sécurité internationales. « Au contraire, elle a créé une pression supplémentaire pour la conduite de négociations entre les membres du Conseil. » Il a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine. Enfin, tout en saluant la résolution précitée, il a souligné la nécessité absolue d’une percée dans les négociations afin de remédier de manière systémique à la difficulté posée par le veto.
M. JUAN ANTONIO BENARD ESTRADA (Guatemala) a estimé que la réalité des différents conflits et l’exercice ou l’abus du droit de veto motivé par des intérêts politiques ou idéologiques démontrent clairement la nécessité d’un changement structurel au sein de l’Organisation, en particulier au Conseil de sécurité. Aussi s’est-il félicité de la pleine mise en œuvre de la nouvelle résolution. Il est également nécessaire que les États Membres redoublent d’efforts pour mener à bien des discussions approfondies sur la réforme du Conseil de sécurité, y compris, entre autres, la question de la mise en œuvre de mesures visant à prévenir l’exercice irresponsable du droit de veto ou à en atténuer les effets. Le Guatemala, a rappelé son délégué, a soutenu, dans le cadre des négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité, que le droit de veto ne devrait pas être utilisé en cas d’atrocités de masse ou de crimes contre l’humanité et qu’il est nécessaire que les méthodes de travail dudit Conseil soient plus transparentes et plus ouvertes.
M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a rappelé que son pays a parrainé la résolution « historique » 76/262. Il a demandé à la présidence du Conseil de sécurité de tenir compte du paragraphe 3 du dispositif de la résolution de l’Assemblée générale selon lequel le Conseil doit soumettre un rapport spécial à l’Assemblée en cas de recours au veto, regrettant que cela n’ait pas toujours été le cas. Le délégué a rappelé que le droit de veto avait été exercé trois fois en mai, juillet et septembre 2022, bloquant l’action sur des questions d’importance vitale: la paix et la sécurité en Ukraine, la situation au Moyen-Orient et la non-prolifération nucléaire en République populaire démocratique de Corée. Il a déploré l’abus par la Fédération de Russie de son droit de veto en vue de promouvoir ses propres intérêts dans le cadre de sa guerre d’agression en Ukraine, et la violation de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies en vertu duquel « une partie à un différend s’abstient de voter ». Constatant que les négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité montrent qu’un nombre croissant d’États s’opposent au droit de veto, considéré par certains comme un « vestige du colonialisme », le délégué a toutefois reconnu que son abolition n’était pas à l’ordre du jour. Il a appelé à aller au-delà de la résolution 76/262 en limitant le recours au veto à des « cas rares et exceptionnels », comme l’ont proposé les États-Unis en août 2022. À cette fin, il a souligné le besoin de critères clairs et transparents pour l’exercice de ce droit, soutenant l’initiative franco-mexicaine sur la limitation du droit de veto en cas d’atrocités de masse, ainsi que le code de conduite du Groupe ACT.
Mme THILMEEZA HUSSAIN (Maldives) a estimé que lorsque le Conseil de sécurité ne peut agir, l’Assemblée générale doit le faire. L’Assemblée, qui est l’organe le plus inclusif et représentatif des Nations Unies, devrait s’efforcer d’assurer la transparence et la responsabilité, et insister pour que les États Membres expliquent et persuadent au lieu de bloquer l’action avec le veto. C’est pour cela que les Maldives se sont jointes à plus de 80 pays pour coparrainer la résolution de l’Assemblée sur l’exercice du droit de veto. « Nous croyons fermement que le pouvoir du veto s’accompagne d’une responsabilité extraordinaire. » C’est donc le rôle de l’Assemblée de veiller à ce que cette responsabilité soit utilisée à bon escient, a insisté la représentante. Selon elle, « la surutilisation du veto paralyse l’ONU à un moment où nous devons plus que jamais aller vers le multilatéralisme ». Elle a encouragé les idées visant à renforcer l’Assemblée générale et l’ONU dans son ensemble.
M. PHILIP REED (Royaume-Uni) a déclaré que les membres fondateurs de l’ONU ont juré de préserver les générations qui leur ont succédé du fléau de la guerre, conférant pour ce faire la responsabilité première du maintien de la paix et la sécurité internationales au Conseil de sécurité. C’est à cette fin que les membres permanents du Conseil ont obtenu un droit de veto, a-t-il dit. Il a souligné que le droit de veto représente une lourde responsabilité, que l’on exerce pour éviter et résoudre les conflits, déplorant que tous les membres permanents ne conçoivent pas les choses ainsi. En février de l’année dernière, la Russie a exercé son droit de veto précisément pour empêcher le Conseil de réagir à sa guerre illégale et non provoquée contre l’Ukraine, a rappelé le représentant. Deux mois seulement plus tard, a-t-il poursuivi, la Russie opposait son veto à l’adoption d’une résolution qui aurait permis au Conseil de prendre des mesures historiques en matière de sécurité climatique, le texte bénéficiant du plus grand nombre de coauteurs jamais enregistré. Le droit de veto aurait-il donc été créé pour empêcher l’acheminement de l’aide humanitaire aux personnes qui en ont désespérément besoin ou le renforcement de la sécurité climatique, s’est indigné le délégué britannique qui a rappelé que son pays n’a pas exercé son droit de veto depuis 1989. Il s’est ensuite engagé à ne jamais voter contre un projet de résolution crédible visant à prévenir ou à mettre fin à des atrocités de masse, faisant valoir que son pays est signataire du code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence. Nous encourageons tous les États Membres, y compris les autres membres permanents du Conseil, à appuyer cette initiative, a-t-il ajouté.
M. ARTAN SPASSE (Albanie) a estimé que la résolution 76/262 a permis de mieux établir les responsabilités en ce qui concerne le processus de décision des membres permanents du Conseil de sécurité. Il a également encouragé le dialogue entre les États Membres sur des questions qui relevaient du domaine exclusif desdits membres permanents. Cette résolution joue également un « rôle dissuasif » en venant accroître la pression sur les membres dotés du droit de veto, limitant leur capacité à l’exercer, a poursuivi le délégué. Enfin, il a indiqué que son pays fait partie du Groupe ACT et appuie l’initiative franco-mexicaine, avant de souhaiter un rôle renforcé de l’Assemblée sur les questions de paix et de sécurité internationales.
M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a appelé à trouver des solutions pour renforcer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Cela ne signifie pas forcément que le veto ne peut pas être utilisé, a-t-il fait valoir, tout en regrettant que l’exercice de ce droit ait souvent eu un impact sur l’équilibre des pouvoirs au niveau international et sur la capacité à prévenir les abus de pouvoir et les décisions arbitraires d’un ou plusieurs pays. Pour le représentant, le problème du veto réside dans les motivations politiques de son exercice. Il a évoqué les multiples veto des États-Unis et de leurs alliés sur les projets de résolution visant à mettre un terme à l’occupation israélienne des territoires arabes occupés, allant à l’encontre des principes de la Charte de l’ONU et sapant la légitimité même du Conseil de sécurité. Il a rappelé que le veto a été utilisé pour la première fois en 1946 par la Russie sur un projet de résolution concernant l’indépendance de la Syrie et présenté par la France et le Royaume-Uni qui voulaient prolonger le mandat de leurs troupes en Syrie. Selon le représentant, il existe de nombreux cas de figure dans lesquels le veto a été utilisé par la Russie et la Chine avec une « grande sagesse ». Il a reproché à certains membres permanents d’agir comme si le Conseil était « une entreprise dont ils seraient les membres du Conseil d’administration ». Le représentant a précisé que la résolution 76/262 ne doit pas être interprétée comme ayant pour objectif de modifier l’équilibre délicat qui existe entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, et qu’elle ne vise pas de saper la légitimité des résolutions du Conseil, mais plutôt à pousser ses membres à redoubler d’efforts pour parvenir à un terrain d’entente pour la paix et la sécurité internationales et pour rendre ses méthodes de travail plus transparentes. L’objectif n’est pas de faire de l’Assemblée une plateforme pour cibler un pays ou exacerber la polarisation, a-t-il martelé avant d’exprimer sa surprise face aux tentatives de certains d’élargir le mandat de l’Assemblée au détriment de celui du Conseil.
Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a estimé que chaque jour qui passe montre que l’exercice effectif du droit de veto, et les abus qui en découlent, remettent en question son utilité même. Face à un Conseil de sécurité qui souffre d’une profonde polarisation, elle a estimé qu’il fallait permettre à l’Assemblée générale de contribuer à la recherche de solutions réalistes et équitables. La déléguée a affirmé que son pays soutenait la pleine mise en œuvre du code de conduite du Groupe ACT, qui appelle tous les membres du Conseil, élus et permanents, à ne pas voter contre tout projet de résolution visant à prévenir ou à faire cesser des atrocités de masse. La République dominicaine prend également en compte l’initiative franco-mexicaine visant à ce que les membres du Conseil s’abstiennent volontairement d’exercer leur droit de veto dans de telles situations. Favorable à d’autres propositions allant dans le sens d’une limitation de l’exercice de ce droit, la déléguée a évoqué la possibilité pour l’Assemblée générale d’infirmer un veto du Conseil ou la nécessité d’avoir plus d’une voix pour pouvoir exercer le droit de veto.
M. PRATIK MATHUR (Inde) a contesté le privilège du veto qui ne fait que perpétuer l’état d’esprit de la Seconde Guerre mondiale, à savoir que le vainqueur remporte le butin. Si l’on veut traiter sur un pied d’égalité tous les États, les nouveaux membres permanents d’un Conseil réformé doivent également jouir du droit de veto. Le représentant a dit ne voir aucun risque pour l’efficacité d’un Conseil élargi. Il a aussi estimé que l’Article 27(3) de la Charte doit mener à une définition objective de l’expression « partie à un différend ». Il nous faut une compréhension claire du concept car jusqu’ici l’exercice du droit de veto est motivé par des considérations politiques et pas par une obligation morale.
Mme RAWA ZOGHBI (Liban)a reconnu que le veto a souvent été la première cible des critiques adressées au Conseil de sécurité, dans la mesure où le recours au veto ou la menace d’y recourir ont été un obstacle au maintien de la paix et de la sécurité. Le Liban a donc coparrainé la résolution 76/262 adoptée par consensus il y a un an. La représentante a été d’avis que le mécanisme établi par cette résolution représente un pas important vers le renforcement de la responsabilité et de la transparence du Conseil de sécurité. Il renforce également le rôle et l’autorité de l’Assemblée générale, l’organe le plus universel de l’ONU. Dans le même esprit, le Liban soutient l’initiative franco-mexicaine sur la limitation de l’exercice du droit de veto en cas de crimes de masse, ainsi que le code de conduite du Groupe ACT. Tout en soulignant la pertinence de l’initiative de l’Assemblée, la représentante s’est dite consciente qu’elle ne mettra pas fin à l’inaction et qu’elle ne suffira pas à faire cesser les conflits et les violations quotidiennes du droit international. Il faut faire davantage pour inciter le Conseil à agir de manière plus efficace et plus responsable, a-t-elle insisté, d’où l’urgence d’une réforme globale de cet organe. Par les temps qui courent, il est grand temps d’œuvrer à un multilatéralisme plus efficace.
M. JASSIM SAYAR A. J. AL-MAAWDA (Qatar) a rappelé que lors de l’adoption de la résolution 76/262, les États Membres avaient réaffirmé que celle-ci ne visait pas à empiéter sur le mandat ou les prérogatives du Conseil de sécurité. En effet, a-t-il expliqué, la question du veto est traitée uniquement dans le cadre de l’Assemblée générale conformément au mandat conféré par la Charte. Cette résolution ne sape pas les négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil et ne préjuge pas de leurs résultats, a précisé le délégué. Par ailleurs, le Qatar adhère à l’initiative franco-mexicaine sur l’encadrement de l’exercice du droit veto en cas d’atrocités de masse, ainsi qu’au code de conduite du Groupe ACT. En conclusion, le délégué a réitéré l’engagement de son pays envers le multilatéralisme et réaffirmé le rôle central de l’Assemblée.
Mme SYROTA (Ukraine) a déclaré que la question du droit de veto a toujours été d’une importance particulière pour l’Ukraine et les autres États Membres qui défendent la Charte des Nations Unies et ses principes. Or la paralysie délibérée du Conseil de sécurité par la Russie dans le cadre de sa stratégie agressive envers son pays a rendu cette question encore plus épineuse et urgente. La représentante a noté que tous les projets de résolution que le Conseil de sécurité de l’ONU a tenté d’adopter en réponse à l’agression russe, ont été bloqués dès 2014, en raison de l’exercice abusif du droit de veto « par le pays qui occupait le siège de l’URSS au Conseil de sécurité ». Parce que seule la main levée du représentant russe contre un projet de résolution sur l’Ukraine empêche le Conseil d’exercer sa responsabilité première, nous soutenons la résolution A/76/262 et sommes un fervent partisan des initiatives visant à limiter l’exercice du droit de veto, notamment le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine. La représentante s’est en outre dite convaincue que ce droit devrait être restreint lorsqu’un membre permanent est directement impliqué dans un conflit dont le Conseil est saisi. Dans un tel contexte, on ne peut s’attendre à ce qu’il exerce ses droits et privilèges de manière impartiale, a-t-elle conclu.
M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a déclaré que l’agression russe de l’Ukraine est la preuve patente de l’incapacité du Conseil à s’acquitter de son mandat, en dénonçant l’exercice abusif du droit de veto par un membre permanent. Et avant l’Ukraine, il y a eu la Géorgie, a-t-il rappelé, indiquant qu’en 2008, « nous avons ressenti dans notre chair à quoi ressemble une incapacité du Conseil à agir ». Il a demandé une réforme urgente du Conseil et du droit de veto. En attendant de réels progrès dans ce domaine, nos efforts doivent viser à une revitalisation du rôle de l’Assemblée dans les cas de menaces à la paix et d’actes d’agression, sans préjudice du rôle du Conseil s’agissant du maintien de la paix, a estimé le délégué.
M. SIARHEI MAKAREVICH (Bélarus) a apporté son soutien au processus de négociations intergouvernementales en cours, dans le cadre duquel une réforme du Conseil de sécurité est à l’examen. Modifier de manière arbitraire les modalités convenues pour les négociations intergouvernementales aurait des conséquences particulièrement néfastes pour cette réforme, autant que pour l’intégrité du système des Nations Unies, a-t-il prévenu. Il a estimé que le mécanisme du droit de veto, qui est consacré dans la Charte des Nations Unies, est un instrument essentiel permettant de parvenir à des solutions équilibrées dont dépendent la paix et la sécurité internationales. Néanmoins, nous estimons qu’étant donné l’étape embryonnaire à laquelle se trouvent les négociations, il est prématuré de parler d’échanges directs sur la base d’un texte. Tout vient à point à qui sait attendre, a-t-il ajouté, en exhortant tous les États Membres à la patience.
M. MICHAEL KIBOINO (Kenya) a rappelé que son pays faisait partie des premiers à avoir soutenu l’initiative sur le veto. Il a salué la résolution 76/262 comme un pas significatif améliorant l’efficacité du travail des Nations Unies en renforçant le rôle de l’Assemblée générale sur les questions de paix et de sécurité. Bien que l’exercice du droit de veto n’ait pas diminué, la résolution 76/262 a rendu son recours plus couteux en imposant un droit de regard de l’Assemblée générale, a-t-il estimé. Le délégué a toutefois noté que l’organe n’avait pas le pouvoir de contraindre les États Membres à agir et que l’efficacité de la résolution reposait donc sur leur volonté de la mettre en œuvre. De même, le représentant a relevé que la résolution ne dispensait pas d’une réforme du Conseil de sécurité pour le rendre plus représentatif du monde actuel, rappelant au passage son appui à la position africaine commune issue du consensus d’Ezulwini.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a reconnu la pertinence de la résolution 76/262. Néanmoins, ne perdons pas de vue que celle-ci ne sera jamais une réponse adaptée à la nécessité de la réforme du Conseil du sécurité, a dit le délégué, en pointant le manque de légitimité de ce dernier. Il est important, a-t-il souligné, que le Conseil compte des membres permanents d’Afrique et d’Amérique latine. Il a appuyé le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine. Résoudre les difficultés posées par le droit de veto ne permettra de pas remédier au manque de représentativité du Conseil, a insisté le délégué. Enfin, il a appelé à ne pas modifier l’équilibre délicat entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité.