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SC/15151

Déclaration publique de la Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés

Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé, à loccasion de lexamen du huitième rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé en République démocratique du Congo, dadresser, sous la forme dune déclaration publique de sa présidente, les messages suivants: 

À toutes les parties au conflit armé en République démocratique du Congo:

·                Condamne vigoureusement toutes les violations et atteintes qui continuent dêtre commises sur la personne denfants en République démocratique du Congo, en particulier le nombre élevé de violations dans le Nord-Kivu et lIturi confirmées par le Secrétaire général; préoccupé par limpact négatif des difficultés causées par la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) sur les enfants, prie instamment toutes les parties au conflit de prévenir et faire cesser immédiatement toutes les violations et les atteintes concernant le recrutement et lutilisation denfants, les enlèvements, les meurtres et atteintes à lintégrité physique, les viols et autres formes de violence sexuelle, les attaques contre des écoles et des hôpitaux et le refus daccès humanitaire, et de sacquitter des obligations que leur impose le droit international applicable; note avec inquiétude que léquipe spéciale de pays na pas pu sacquitter pleinement de son travail de confirmation des violations du fait des conditions de sécurité instables, des activités des groupes armés et des opérations militaires, de l’« état de siège » déclaré dans les provinces du Nord-Kivu et de lIturi, et des menaces pour la santé publique, notamment lépidémie dEbola dans le Nord-Kivu; 

·                Demande à toutes les parties au conflit de poursuivre lapplication des conclusions précédentes du Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés en République démocratique du Congo (S/2020/1030); 

·                Souligne quil importe de réprimer toutes les violations et atteintes commises contre des enfants en temps de conflit armé et que tous les auteurs doivent être rapidement traduits en justice et être amenés à répondre de leurs actes sans retard, notamment grâce à la conduite denquêtes et de poursuites judiciaires systématiques et menées dans un délai raisonnable, donnant lieu, le cas échéant, à des poursuites et des condamnations, et note que certains des actes susmentionnés, notamment le recrutement et lutilisation denfants par les forces armées nationales ou par des groupes armés non étatiques, sont interdits et constituent des crimes au regard de la loi no 09/001 portant protection de lenfant, promulguée par le Gouvernement de la République démocratique du Congo le 10 janvier 2009 et note que les recrutements et lutilisation denfants sont principalement le fait des groupes armés; se félicite des efforts déployés actuellement par le Gouvernement pour que les auteurs des six formes de violations graves contre des enfants en République démocratique du Congo répondent de leurs actes, et souligne en outre quil faut veiller à ce que toutes les personnes rescapées aient accès à la justice et offrir des recours à ces victimes, notamment les services médicaux et les services daide dont elles ont besoin; 

·                Note en outre que, le 19 avril 2004, le Gouvernement de la République démocratique du Congo a saisi le Procureur de la Cour pénale internationale de la question de la situation en République démocratique du Congo et que certains des actes mentionnés au paragraphe 4 a) des conclusions formulées peuvent constituer des crimes au regard du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel la République démocratique du Congo est partie; 

·                Insiste sur le fait que, lors de la planification et de la mise en œuvre des mesures en faveur des enfants dans les situations de conflit armé, lintérêt supérieur de lenfant doit être une considération primordiale et les vulnérabilités et les besoins particuliers des filles et des garçons, y compris des enfants ayant un handicap et des enfants déplacés de force, doivent être dûment pris en compte; 

·                Condamne le recrutement et lutilisation dun nombre élevé denfants et se déclare préoccupé par le fait que, malgré une diminution du recrutement et de lutilisation par rapport à la période précédente, un nombre élevé de groupes armés sen sont rendus responsables; note que les enfants ont été utilisés activement dans les combats ainsi que pour assurer des tâches auxiliaires; demande instamment à toutes les parties au conflit de libérer immédiatement et sans conditions préalables tous les enfants qui leur sont associés, de remettre tous les enfants se trouvant dans leurs rangs aux acteurs civils de la protection de lenfance en vue de leur pleine réintégration dans le cadre de programmes de réintégration familiale et communautaire, et de mettre fin et de prévenir tout nouveau recrutement et toute nouvelle utilisation denfants, notamment de ne pas recruter à nouveau des enfants ayant été libérés, conformément aux obligations que leur impose le droit international, y compris, le cas échéant, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de lenfant, concernant limplication denfants dans les conflits armés; 

·                Exprime sa profonde préoccupation devant les meurtres denfants et les atteintes à leur intégrité physique, en particulier laugmentation des occurrences de ce type de violation au cours de la dernière période considérée, notamment suite à des hostilités entre les parties, des opérations militaires, des attaques contre les populations civiles, des engins explosifs, y compris des restes explosifs de guerre et des engins explosifs improvisés, et dans le contexte de la violence intercommunautaire, et exhorte toutes les parties à respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire, en particulier les principes de discrimination et de proportionnalité et lobligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter ou, en tout état de cause, réduire autant que faire se peut les dommages causés aux civils ou aux biens de caractère civil, et prend note de la Convention sur linterdiction de lemploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction; 

·                Exprime sa profonde inquiétude face à la persistance des viols et autres formes de violence sexuelle contre les enfants perpétrés par les groupes armés et les forces de sécurité gouvernementales; note que ces actes comprennent le viol collectif, lesclavage sexuel et le mariage forcé; exhorte toutes les parties au conflit armé à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et autres formes de violence sexuelle commis sur la personne denfants par des membres de leurs forces ou groupes respectifs; souligne quil importe damener les responsables de violences sexuelles ou fondées sur le genre commises contre des enfants à répondre de leurs actes; note avec préoccupation que lampleur de la violence sexuelle contre les enfants est sous-estimée, de crainte de représailles de la part des auteurs de ces actes qui vivent parfois au sein de la communauté ou à proximité, de la stigmatisation qui les entoure, du rejet des victimes par les familles et les communautés, de la persistance de limpunité généralisée et du manque de services médicaux et de soutien adéquats pour les personnes rescapées; souligne quil importe de fournir aux rescapés de violences sexuelles des services spécialisés intégrés, sans distinction, dans le domaine de la santé mentale et du soutien psychosocial et dans celui de la santé, y compris la santé sexuelle et procréative, ainsi quune assistance et des services juridiques et une aide à la subsistance; 

·                Condamne les attaques dirigées contre les écoles et les hôpitaux, y compris la destruction des infrastructures et installations connexes et les attaques contre leur personnel; préoccupé par le fait que ce type dattaques a considérablement augmenté par rapport à la période précédente; demande instamment à toutes les parties au conflit armé de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter le caractère civil des écoles et des hôpitaux et de leur personnel, et de prévenir et de faire cesser immédiatement les attaques ou menaces dattaques contre ces établissements et leur personnel, ainsi que lutilisation décoles à des fins militaires, en sappuyant sur la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, signée par le Gouvernement de la République démocratique du Congo en juillet 2016; 

·                Condamne les cas denlèvement denfants, dont lécrasante majorité a été commise par des groupes armés, notamment à des fins de recrutement et dutilisation, de viol et dautres formes de violence sexuelle, ou contre rançon; note quil existe des cas denfants enlevés dans les pays voisins et faisant lobjet dun trafic vers la République démocratique du Congo, et note une sensible augmentation des cas dans les provinces de lIturi et du Sud-Kivu pendant la période considérée; demande instamment à toutes les parties concernées de libérer immédiatement et sans conditions préalables tous les enfants enlevés, afin de les confier aux acteurs civils compétents en matière de protection de lenfance; 

·                Se déclare gravement préoccupé par les refus daccès humanitaire, notamment les attaques visant des membres du personnel humanitaire et des infrastructures humanitaires, note que les groupes armés en sont responsables dans la majorité des cas, et demande à toutes les parties au conflit dautoriser et de faciliter, dans le respect du droit international, y compris le droit international humanitaire, un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave, et rappelle également les principes directeurs des Nations Unies concernant laide humanitaire que lAssemblée générale a adoptés dans sa résolution 46/182 ainsi que les principes dhumanité, de neutralité, dimpartialité et dindépendance qui encadrent laction humanitaire, afin de faire respecter la nature exclusivement humanitaire et limpartialité de laide humanitaire et de faire respecter le travail de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires sans discrimination; 

·                Demande instamment aux personnes qui prennent ou prendront part aux pourparlers et aux accords de paix de veiller à ce que des dispositions relatives à la protection de lenfance, y compris la libération et la réintégration des enfants, aux droits et au bienêtre des enfants et à lapprentissage de lautonomie, y soient intégrées, selon quil conviendra, avec le soutien de lOrganisation des Nations Unies et en sappuyant sur le Guide pratique à lintention des médiateurs pour la protection des enfants dans les situations de conflit armé. 

Au Gouvernement de la République démocratique du Congo: 

·                Se félicite de lattachement constant du Gouvernement de la République démocratique du Congo à la consolidation des gains obtenus à la suite de la signature du plan daction visant à faire cesser et à empêcher le recrutement et lutilisation denfants, la violence sexuelle contre les enfants et les autres quatre types de violations graves commises contre les enfants, afin dempêcher de manière durable le recrutement et lutilisation denfants par les forces armées et les forces de sécurité, notamment par linstitutionnalisation des mesures et mécanismes y relatifs; se félicite du soutien apporté par des acteurs nationaux et internationaux en vue de renforcer la capacité des FARDC de prévenir les six formes de violations graves commises contre des enfants et dy mettre fin; exhorte le Gouvernement à accélérer lapplication de tous les volets du plan daction, en particulier ceux qui ont trait aux violences sexuelles contre les enfants, étant donné que, même si les groupes armés étaient les principaux auteurs de ces violations, les FARDC et les autres forces de sécurité continuent de porter une importante responsabilité; constate à cet égard que certains responsables des six violations graves contre les enfants, en particulier le recrutement et lutilisation denfants et les violences sexuelles contre eux, font lobjet de poursuites judiciaires et note que les poursuites engagées concernent aussi des membres des forces de sécurité gouvernementales; 

·                Est préoccupé par le fait que des enfants continuent dêtre privés de liberté à cause de leur association présumée avec des groupes armés, souligne quil importe de confier immédiatement les enfants anciennement associés à des groupes armés aux acteurs de la protection de lenfance afin de faciliter leur retour et leur pleine intégration; souligne que les enfants associés ou prétendument associés à des groupes armés, y compris ceux arrêtés au cours dopérations militaires, devraient être traités avant tout comme des victimes; prie instamment à cet égard le Gouvernement de respecter les obligations que lui impose la Convention relative aux droits de lenfant, en particulier celle de ne recourir à larrestation, à la détention et à lemprisonnement denfants quen dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible, conformément au droit international, et demande au Gouvernement de voir dans la réintégration des enfants dans le cadre de programmes de réintégration familiale et communautaire une priorité, conformément aux Principes directeurs relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés (Principes de Paris), quil a approuvés et lui demande que des mesures pouvant se substituer à laction en justice soient envisagées; 

·                Rappelle que le Gouvernement de la République démocratique du Congo a adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et aux Lignes directrices pour la protection des écoles et des universités contre lutilisation militaire durant les conflits armés et appelle de ses vœux leur mise en œuvre rapide; 

·                Souligne quil importe doffrir des possibilités de réintégration durable à long terme aux enfants touchés par le conflit armé, grâce à des programmes de réintégration et de réinsertion familiale et communautaire qui tiennent compte des questions de genre, en prévoyant un accès aux soins de santé, aux soins de santé mentale et au soutien psychosocial et des programmes déducation, ainsi que de sensibiliser les populations, en travaillant avec elles, en vue de prévenir la stigmatisation de ces enfants et de faciliter leur retour. 

Aux groupes armés, dont Nyatura, les Maï-Maï Mazembe, CODECO, les ADF, les MaïMaï Apa Na Pale, Nduma défense du Congo-Rénové (NDC-R), Raïa Mutomboki, lesForces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR-FOCA) et le M23 

·                Exprime sa profonde inquiétude quant à la présence continue et aux activités déstabilisatrices en cours en République démocratique du Congo dun grand nombre de groupes armés et à leur impact néfaste sur les enfants; 

·                Demande à tous les groupes armés non étatiques de sengager publiquement à faire cesser toutes les violations et atteintes commises contre des enfants et à en prévenir la perpétration, et aux groupes inscrits sur la liste figurant à lannexe I du rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés délaborer, dadopter et dexécuter rapidement des plans daction en la matière, conformément aux résolutions 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011), 2068 (2012), 2143 (2014), 2225 (2015) et 2427 (2018) du Conseil de sécurité; se félicite à cet égard du travail de liaison effectué par léquipe spéciale de surveillance et dinformation auprès des commandants des groupes armés, qui a entraîné la libération de centaines denfants; félicite le Gouvernement de la République démocratique du Congo davoir soutenu cette communication; approuve la signature dune nouvelle déclaration unilatérale et dune feuille de route par 12 commandants de groupes et factions armés qui sengagent à prévenir et faire cesser le recrutement et lutilisation denfants et dautres formes de violations graves commises contre les enfants parmi les six recensées; 

·                Rappelle à cet égard que plusieurs de ces groupes armés non étatiques figurent depuis au moins cinq années consécutives dans lannexe I du rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés, notamment les ADF, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), les Forces combattantes abacunguzi, la Force de résistance patriotique de lIturi (FRPI), Nduma défense du Congo-Rénové, Nyatura, Raïa Mutomboki, Maï-Maï Simba et lArmée de résistance du Seigneur; 

·                Rappelle que, par sa résolution 2528 (2020), le Conseil de sécurité a reconduit jusquau 1er juillet 2021 les mesures énoncées aux paragraphes 1 à 6 de la résolution 2293 (2016); et réaffirme que les mesures décrites au paragraphe 5 de la résolution 2293 (2016) sappliquent aux personnes et entités que le Comité du Conseil de sécurité créé en application de la résolution 1533 (2004) concernant la République démocratique du Congo aura désignées à raison des actes définis au paragraphe 7 de cette même résolution ainsi quau paragraphe 3 de la résolution 2360 (2017), ycompris aux personnes ou entités qui opèrent en République démocratique du Congo, et qui: 

·                recrutent ou utilisent des enfants dans le cadre du conflit armé, en violation du droit international; 

·                préparent, donnent lordre de commettre ou commettent des actes qui constituent des violations des droits de lhomme ou des atteintes à ces droits ou des violations du droit international humanitaire, selon le cas, notamment des actes dirigés contre des civils, y compris des meurtres et mutilations, des viols et dautres violences sexuelles, des enlèvements, des déplacements forcés et des attaques contre des écoles et des hôpitaux; 

·                empêchent laccès à laide humanitaire ou sa distribution en République démocratique du Congo; 

·                Rappelle que le Groupe de travail est disposé à communiquer au Comité les informations voulues pour laider à prendre des mesures ciblées contre les auteurs de violations répétées. 

Aux notables locaux et aux chefs religieux: 

·                Souligne le rôle important que jouent les notables locaux et les chefs religieux dans le renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé; 

·                Exhorte les notables locaux et les chefs religieux à condamner publiquement les violations et les atteintes commises sur la personne denfants, en particulier le recrutement et lutilisation denfants, les meurtres denfants et les atteintes à leur intégrité physique, les viols et les autres formes de violence sexuelle, les enlèvements, les attaques et les menaces dattaques dirigées contre des établissements scolaires et hospitaliers, tout en continuant de militer pour les faire cesser et les prévenir, et à se concerter avec le Gouvernement, lOrganisation des Nations Unies et les autres parties prenantes compétentes pour appuyer la libération et la réintégration, dans leurs communautés respectives, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par une campagne de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.