Le Comité des ONG suspend sa session et rejette les demandes d’admission au statut consultatif spécial pour 33 ONG, dont 9 après des votes à la demande des États-Unis
Le Comité des ONG a suspendu ce matin les travaux de sa reprise de session entamée le 29 août dernier, recommandant au Conseil économique et social (ECOSOC) d’accorder le statut consultatif spécial à 170 organisations de la société civile après avoir examiné un total de 564 demandes et 317 rapports quadriennaux. Parmi les 33 ONG recalées aujourd’hui, figurent neuf dont les dossiers pourraient être clos si l’ECOSOC suivait les recommandations du Comité qui a statué sur ces cas après des mises aux voix.
La délégation des États-Unis qui a demandé ces votes a expliqué que chacune des neuf ONG avait été consultée par ses soins. Elles ont en effet donné leur aval pour cette procédure de quitte ou double, puisqu’un vote négatif équivaut à la clôture pure et simple de la demande de l’ONG ayant fait l’objet d’une décision par un scrutin. Il s’agit de: Gulf Centre for Human Rights (GCHR) Limited (Irlande); International Dalit Solidarity Network (Danemark); Center for Human Rights (Danemark); Coptic Solidarity (États-Unis); Arab-European Center of Human Rights and International Law (AECHRIL) (Norvège); The Andrey Rylkov Foundation for Health and Social Justice (Fédération de Russie); The Union of Non-governmental Associations “The International Non-governmental Organization "The World Union of Cossack Atamans" (Kazakhstan); Interregional non-governmental human rights organization "Man and Law" (Fédération de Russie); et World Without Genocide (États-Unis).
Pour toutes ces ONG, le Comité des ONG va recommander à l’ECOSOC de rejeter leur demande d’admission au statut consultatif spécial. Ensuite, ces dossiers seront définitivement clos. Les États-Unis ont dit leur déception de voir que les demandes de ces « ONG crédibles », qui font un travail sérieux, aient été rejetées. La délégation a rappelé que ces ONG ont vu leur demande reportée depuis quatre ans au moins, avant de dénoncer la politisation du travail du Comité des ONG.
Cuba a expliqué que son vote négatif ne porte pas sur la qualité du travail des ONG, mais davantage sur le rejet de la procédure entreprise pour leur octroyer le statut par le biais d’un « processus sélectif » imposée par la délégation américaine. De plus, Cuba a souligné que d’autres ONG ont vu leur demande également rejetée par les États-Unis depuis plusieurs sessions du Comité. Le Pakistan a indiqué que la pratique du Comité des ONG est la prise de décision par consensus, alors que pour la Fédération de Russie, l’initiative américaine est une autre manifestation de la politique du « deux poids deux mesures », puisque la liste proposée ne comprend d’autres ONG qui se trouvent dans la même situation que décrie les États-Unis.
Les États-Unis ont réagi en expliquant que les neuf ONG présentées pour la mise aux voix ne sont pas les seules respectant les critères. Il s’agissait, a dit la délégation, de braquer les projecteurs sur ces organisations particulières afin de dénoncer une situation injuste. La Chine a aussi expliqué son vote, appelant à ne pas politiser le travail du Comité. Pour elle, les délégations se doivent de respecter les procédures en vigueur. Selon l’Inde, s’il faut évoquer les critères objectifs d’examen des demandes d’ONG, alors lesdits critères doivent émaner de l’ensemble du Comité et non d’une délégation.
Par ailleurs, le Comité des ONG a également recommandé à l’ECOSOC la clôture, sans préjudice, de 60 candidatures d’ONG qui n’ont pas répondu aux trois derniers rappels à la date du 7 septembre 2022. Le Comité a aussi approuvé son ordre du jour provisoire et la documentation de la session de 2023 (E/C.2/2022/L.1). Ainsi, pour l’an prochain, la session ordinaire aura lieu du 23 janvier au 1er février et le 13 février. La reprise de session est quant à elle prévue du 15 au 23 mai et le 5 juin.
Les 19 membres du Comité des ONG se réuniront de nouveau le 15 septembre, à 10 heures, afin d’examiner le rapport de session que va préparer sa vice-présidente, Mme Mine Ozgul Bilman (Türkiye).
Report de l’examen des demandes de statut consultatif spécial
Adyan Association (Liban) a été priée par Israël de fournir une liste exhaustive de ses financiers. L’Inde a souhaité avoir des détails sur certains partenaires et certaines activités de Arab Media Union (Égypte). Asia Pacific Transgender Network (Thaïlande) a été conviée par la Fédération de Russie de préciser le statut qui lui a permis de prendre part aux travaux du Conseil des droits de l’homme. Le Nicaragua a demandé à l’Association de l’Alliance Nationale des Chourafa Naciryiene et leurs cousins, chargés des affaires de la Zaouia Naciria (Maroc) de fournir la liste de ses partenaires des cinq dernières années. Les États-Unis ont souhaité voir une liste détaillée des fonds reçus par l’ONG Habilian Association (Iran).
La Chine a dit attendre des précisions sur la date de lancement du rapport de l’étude sur les droits socioéconomiques qu’a menée l’Instance démocratique pour la citoyenneté et les droits de l’homme (Maroc). Le Nicaragua a pour sa part voulu savoir si International Anti Terrorism Movement (Inde) avait pris part à un évènement prévu à New York en 2019 comme cela était mentionné dans son plan d’action. La Fédération de Russie a demandé si la coopération entre L’Ange Gardien (Bénin) et ses partenaires implique un soutien financier de ces derniers. La même délégation a demandé à Solidariteit/Solidarity (Afrique du Sud) de préciser la nature des études qu’elle prétend avoir menées. À l’endroit de The Voice Society (Pakistan), le Pakistan a demandé qu’elles sont les lois nationales discriminatoires qu’elle dit vouloir faire modifier.
Par la suite, le Pakistan a demandé à Zam Zam Foundation (Sri Lanka) de préciser si elle mène des activités à but lucratif. La Chine a souhaité recevoir la liste des institutions de recherche partenaires et les états financiers de l’organisation Action League for Palestinians of Syria LTD (Royaume-Uni). À C.A.R.E Scandinavia - Citizens Against Radicalism & Extremism (Danemark), Israël a demandé des détails sur son travail en faveur des réfugiés palestiniens au Liban et ailleurs. La Grèce a souhaité savoir comment Eduactive Società Cooperativa promeut la participation active des femmes dans la société. European Foundation for South Asian Studies (Pays-Bas) a été invitée par la Chine à apporter des détails sur sa coopération avec d’autres partenaires, notamment les mémorandums d’entente.
Israël a ensuite demandé à Forum of European Muslim Youth and Student Organisations (Belgique) de fournir des détails sur ses fonds. La même délégation a souhaité savoir quelles sont les ONG qui financent Fundació Josep Irla (Espagne). À Gulf Centre for Human Rights (GCHR) Limited (Irlande), Bahreïn a demandé la liste des organisations qui ont reçu des subventions de sa part au cours des cinq dernières années. Les États-Unis ont réagi en notant que cette ONG a déposé sa demande depuis 2016 et se voit poser sans cesse les mêmes questions. La délégation a, de ce fait, demandé une mise aux voix de la demande, conformément à l’article 59 du règlement intérieur de l’ECOSOC. Après le vote, le Comité a rejeté la demande de l’ONG, puisque 10 membres ont voté contre, cinq pour et deux ont préféré s’abstenir. Le Comité des ONG entend donc recommander à l’ECOSOC de clore le dossier de l’organisation.
Ensuite, l’Inde a demandé à International Dalit Solidarity Network (Danemark) quelles étaient les procédures de sélection des ambassadeurs de l’ONG et le rôle de ces derniers. Les États-Unis ont alors affirmé que cette ONG est un exemple de ce qui ne fonctionne pas au Comité des ONG, puisque leur demande traîne devant le Comité depuis 2008. La délégation a de nouveau demandé un vote pour tabler sur le sort de cette ONG. À cette requête, l’Inde a répondu que la procédure d’examen des demandes des ONG doit être menée en bonne diligence et a appelé les membres du Comité à voter contre. Ce qui fut fait puisque 10 membres ont suivi cette recommandation, cinq ont voté en faveur de la candidature de l’ONG et deux autres ont choisi de s’abstenir. Le Comité enverra également une recommandation à l’ECOSOC pour clore le dossier de cette ONG. Les États-Unis ont ensuite déploré la politisation du travail du Comité, rappelant que l’organisation attend depuis 15 ans et estimant qu’elle a été prise pour cible du fait du travail qu’elle effectue. C’est une mauvaise utilisation de notre autorité en tant que membre du Comité, a-t-elle argué. Le Pakistan a pour sa part expliqué qu’il souhaite que les décisions soient prises par consensus.
À l’endroit de l’ONG International Human Rights Commission La Commission Internationale des Droits de l’homme Mezinárodní komise pro lidská práva - nadační fond, ve zkrácené formě IHRC - nadační fond (Tchéquie), l’Estonie veut comprendre comment elle peut prétendre avoir des représentations diplomatiques alors qu’elle est une ONG. Cuba a souhaité avoir des détails sur la contribution aux travaux des Nations Unies de L’Institut européen de droit international et les relations internationales (IEDI) (France). Panhellenic Union of Cappadocian Associations (Grèce) a été invitée par la Türkiye à préciser les procédures de choix des membres de son Conseil d’administration. SAM pour les droits et les libertés (Suisse) doit expliquer au Pakistan pourquoi le Conseil d’administration compte deux membres au lieu des trois prévus par le statut.
The Conflict and Environment Observatory (Royaume-Uni) devra fournir, à la demande de la Chine, la liste des conférences onusiennes auxquelles elle a pris part en 2020 et 2021. Israël a souhaité avoir plus de détails sur les dons du secteur privé en direction de l’ONG US Council of Muslim Organizations (États-Unis). Ukrainian Think Tanks Liaison Office in Brussels (Belgique) a été invitée par la Fédération de Russie à fournir plus de détails sur sa coopération avec les gouvernements.
Les États-Unis ont souhaité ensuite demander une mise aux voix pour certaines ONG dont les demandes sont en souffrance depuis de nombreuses années. La délégation a précisé que les ONG en question ont été consultées et ont donné leur aval pour cette initiative.
Dans le cadre des mises aux voix qui ont suivi, 10 membres du Comité ont voté contre, cinq ont voté pour et deux ont préféré s’abstenir pour les demandes des ONG suivantes: Center for Human Rights (Danemark), Coptic Solidarity (États-Unis), Arab-European Center of Human Rights and International Law (AECHRIL) (Norvège), The Andrey Rylkov Foundation for Health and Social Justice (Fédération de Russie), The Union of Non-governmental Associations "The International Non-governmental Organization "The World Union of Cossack Atamans" (Kazakhstan), et Interregional non-governmental human rights organization "Man and Law" (Fédération de Russie). Quant à World Without Genocide (États-Unis), c’est 11 membres du Comité qui ont rejeté sa demande, alors que cinq ont voté en faveur et une délégation s’est abstenue. Le Comité des ONG va donc recommander à l’ECOSOC de rejeter les demandes de ces ONG dont les dossiers de candidatures seront clos.
Après les votes, les États-Unis ont dit leur déception de voir que les demandes de ces « ONG crédibles » qui font un travail sérieux aient été rejetées. La délégation a rappelé que ces ONG ont vu leur demande reportée depuis quatre ans au moins. Elle a aussi relevé qu’il y a plus d’ONG du Nord que du Sud dont les demandes sont reportées. Prenant ensuite la parole, le Mexique a estimé que ces ONG remplissaient les conditions de recommandation de l’octroi du statut consultatif spécial.
Cuba a expliqué que son vote négatif ne porte pas sur la qualité du travail des ONG, mais davantage sur le rejet de la procédure entreprise pour leur octroyer le statut par le biais d’un « processus sélectif » imposée par la délégation américaine. Cet exercice sélectif n’obéit qu’aux intérêts de ladite délégation qui veut remettre en cause la composition du Comité des ONG, a dénoncé Cuba qui a constaté que le résultat était clair, puisque les deux tiers des membres du Comité ont rejeté l’initiative américaine. De plus, Cuba a souligné que d’autres ONG ont vu leur demande également rejetée par les États-Unis depuis bien longtemps.
Le Pakistan a indiqué que le Comité des ONG privilégie la prise de décision par consensus, soulignant aussi que les délégations peuvent poser des questions aux ONG pour mieux comprendre le bien-fondé de leur demande. Bahreïn a également indiqué avoir voté contre pour respecter les procédures du Comité, tandis que la Fédération de Russie a vu dans l’initiative américaine une autre manifestation de sa politique du « deux poids deux mesures ». La délégation russe a mentionné à titre illustratif une ONG qui se voit recalée depuis sept ans du fait des questions répétitives de la délégation des États-Unis.
La Chine a aussi expliqué son vote, appelant à ne pas politiser le travail du Comité et à respecter les procédures en vigueur. Selon l’Inde, s’il faut évoquer les critères objectifs d’examen des demandes d’ONG, alors lesdits critères doivent émaner de l’ensemble du Comité et non d’une délégation. Ces mises aux voix ne sont donc pas la bonne approche à suivre a-t-elle déploré.
Les États-Unis ont expliqué que les neuf ONG présentées pour la mise aux voix ne sont pas les seules respectant les critères. Il s’agissait, a dit la délégation, de braquer les projecteurs sur ces organisations particulières afin de dénoncer une situation injuste. Pour la délégation américaine, le Comité ne respecte pas toujours les directives de l’ECOSOC, la preuve étant qu’en juillet dernier, l’ECOSOC a dû revenir sur des décisions du Comité des ONG. Cuba a jugé « amusant » que la délégation américaine s’arroge le droit de décider de ce qui est crédible ou pas.