ECOSOC: le forum politique de haut niveau débat de l’importance d’une éducation de qualité pour la réalisation des ODD
La deuxième journée du forum politique de haut niveau 2022 du Conseil économique et social (ECOSOC) s’est notamment articulée aujourd’hui autour de deux tables rondes portant respectivement, le matin, sur l’importance de l’éducation de qualité pour la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et, l’après-midi, sur l’accès aux vaccins pour permettre aux pays africains, pays enclavés et pays les moins avancés (PMA) de mieux reconstruire après la pandémie.
Entre les deux, un bref échange sur le thème « Agir au niveau local » a mis en exergue le rôle crucial des autorités locales, notamment des villes, dans la réalisation du Programme 2030 avant de se conclure par deux sondages menés en temps réel auprès des délégations qui ont notamment révélé que 71% d’entre elles estiment que les ODD ne sont pas assez connus par les habitants de leurs pays.
Animatrice de la première table ronde, la Directrice générale adjointe de l’Organisation des Nations Unies pour la science, l’éducation et la culture (UNESCO), Mme Stefania Giannini, a souligné que l’éducation est la clef d’un avenir durable et a jugé urgent d’investir dans des systèmes éducatifs résilients pour réaliser les ODD et faire face aux crises multiples.
Alertant que des millions d’enfants ne fréquentent plus l’école, le Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Sommet sur la transformation de l’éducation a déploré la persistance de fossés en matière de financement dans l’éducation, relevant notamment que les pays riches investissent 8 500 dollars par an et par élève, comparé à 1 000 dollars pour les pays à moyen revenu, 250 dollars pour les pays à bas revenu et moins de 5 dollars pour les pays les plus pauvres.
Après avoir prévenu que cet écart « perpétue les inégalités » et rappelé que les investissements dans l’éducation sont les investissements les plus rentables, M. Leonardo Garnie a expliqué que le Sommet sur la transformation de l’éducation qui se déroulera en septembre vise à mobiliser l’ambition politique, l’action, les solutions et la solidarité pour transformer l’éducation, récupérer les pertes d’apprentissage liées à la pandémie et réinventer les systèmes éducatifs.
On ne peut pas accepter que la génération COVID-19 soit une génération perdue, s’est alarmée la Suisse, tandis que Mme Haoyi Chen, de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a expliqué que la réduction par deux du temps scolaire de 147 millions d’élèves au cours des deux dernières années de la pandémie se traduira à l’échelle d’une vie entière, pour cette génération d’enfants, par une perte cumulée de 17 000 milliards de dollars de revenus.
Illustrant l’ampleur des investissements nécessaires, elle a précisé qu’un quart des écoles primaires dans le monde n’avaient pas accès à des services de première nécessité́ tels que l’électricité́, l’eau potable et des installations d’assainissement de base et que 50% n’avaient aucun accès à des technologies d’information et de la communication. Les délégations étaient également saisies d’une note montrant que la pandémie a causé la fermeture provisoire de 90% des écoles du monde, privant 1,6 milliard d’enfants d’éducation, dont 369 millions des repas des cantines scolaires essentiels à leurs besoins alimentaires.
S’agissant de l’aide vaccinale, la Ministre de la santé du Malawi, qui s’exprimait nom du Groupe des pays les moins avancés, a appelé au renforcement du Mécanisme COVAX, alors que le taux de vaccination est de 2% en Afrique contre 47% dans les pays développés. Elle s’est également réjouie des accords conclus par le Sénégal et le Rwanda avec BioNTech pour la production locale de vaccins, souhaitant que des solutions soit apportées à l’Afrique pour qu’elle fasse de ces crises multiples « des chances de transformation ».
Les vaccins doivent être reconnus comme des biens publics mondiaux, a souligné l’Érythrée au nom du Groupe des États d’Afrique, une position défendue par de nombreuses délégations qui ont condamné le nationalisme vaccinal comme une « claire violation des droits humains » et appelé à l’annulation des droits de propriété intellectuelle pour les vaccins et les médicaments.
Le forum politique de haut niveau de l’ECOSOC se poursuivra demain, jeudi 7 juillet, à partir de 9 heures.
FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
Reconstruire en mieux après la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), tout en avançant sur la voie d’une mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 (résolution 75/290 B de l’Assemblée générale)
Table ronde 1
Cette table intitulée « L’ODD 4 et les liens avec les autres ODD: une éducation de qualité » a été l’occasion d’examiner les progrès et les défis qu’il reste à relever pour renforcer l’accès à une éducation de qualité et à l’apprentissage tout au long de la vie dans la perspective du Sommet sur la transformation de l’éducation qui aura lieu en septembre 2022.
Alertant que des millions d’enfants ne fréquentent plus l’école et que nombre de ceux qui sont scolarisés ne maîtrisent pas les rudiments de base, M. LEONARDO GARNIER, Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Sommet sur la transformation de l’éducation, a indiqué que l’objectif du Sommet sur la transformation de l’éducation est de galvaniser les engagements socioéconomiques afin de réellement garantir une éducation de qualité pour toutes et tous comme convenu par l’ODD 4. Le Sommet vise à lancer un mouvement pour la transformation de l’éducation, afin d’en faire un processus de découverte et d’épanouissement des étudiants et des élèves au sens le plus noble du terme. Nous devons renforcer les capacités des élèves à acquérir les bases essentielles, à faire preuve de pensée critique, et à se montrer capable d’établir une distinction entre les informations véridiques et les fausses informations, a-t-il indiqué.
Il a souligné que l’éducation joue un rôle essentiel dans le développement de nos capacités d’apprentissage et de vivre ensemble. L’éducation doit aussi donner à chaque personne, jeune ou moins jeune, l’ambition de vivre ses rêves et la capacité de les transformer en réalité et de participer à la création du monde dans lequel elle souhaite vivre. Mais pour que l’éducation arrive à ce niveau, il faut transformer les écoles pour en faire des lieux inclusifs et stimulants où toutes filles et les tous les garçons sont acceptés sans discrimination aucune, sans moqueries, sans abus ou agression.
De leur côté, a-t-il ajouté, les enseignants et les professionnels de l’éducation doivent stimuler la curiosité et le questionnement, ne pas se contenter de transmettre des contenus mais encourager l’apprentissage autonome, ce qui exige qu’ils soient bien formés, disposent de ressources adéquates et qu’ils soient rémunérés à la hauteur de leurs responsabilités. M. Garnier a également noté que la révolution numérique dans l’enseignement peut devenir l’un des outils les plus puissants pour transformer la manière dont les enseignants enseignent et les apprenants apprennent. Elle permet de démocratiser l’éducation, a-t-il affirmé.
Le Conseiller spécial a ensuite appelé à investir dans une éducation de qualité, déplorant la persistance de fossés en matière de financement. Il a notamment relevé que les pays riches investissent 8 500 dollars par an et par élève, comparé à 1 000 dollars pour les pays à moyen revenu, 250 dollars pour les pays à bas revenu et moins de 5 dollars pour les pays les plus pauvres. Cet écart ne fait que perpétuer les inégalités. Pourtant, nous savons que les investissements dans l’éducation sont plus rentables que tout autre investissement –alors pourquoi ne le faisons-nous pas? a-t-il lancé.
Mme HAOYI CHEN, Division de la statistique du Département des affaires économiques et sociales, a déclaré que la pandémie de COVID-19 a déclenché une crise mondiale dans l’éducation. Ces deux dernières années, la durée des cours dispensés en milieu scolaire à 147 millions d’enfants a été réduite de moitié. À l’échelle d’une vie entière, cette génération d’enfants pourrait perdre un montant cumulé de 17 000 milliards de dollars de revenus. Les disparités en matière de fréquentation et de résultats scolaires persistent, et tous les établissements scolaires n’ont pas accès aux infrastructures de base. En 2020, à l’échelle mondiale, un quart des établissements primaires, environ, n’avait pas accès à des services de première nécessité tels que l’électricité, l’eau potable et des installations d’assainissement de base. Les chiffres sont encore inférieurs pour ce qui est des outils TIC ou des infrastructures adaptées au handicap, puisque seuls quelque 50% des établissements primaires en sont dotés. En outre, depuis le début de la pandémie, les établissements scolaires situés dans des zones relativement défavorisées disposent de moins de moyens pour assurer la sécurité des enfants et du personnel. Mme Chen a aussi parlé de la situation en Ukraine où l’éducation se poursuit en dépit de la destruction des infrastructures scolaires. Les classes reprennent à nouveau en grand nombre et environ la moitié des écoles ont pris des mesures considérables pour assurer l’accès à l’eau, l’assainissement et aux services d’hygiène, ainsi qu’à des services de santé mentale et de soutien psychologique.
Mme JOY-MARIE KING, Directrice du commerce extérieur au Ministère des affaires étrangères et de l’immigration, Antigua-et-Barbuda, a indiqué que la priorité de son gouvernement est de créer un système pédagogique qui développe les capacités de réflexion critique et d’innovation afin de permettre aux jeunes de tirer pleinement parti de l’économie des savoirs du XXIe siècle. Le programme scolaire met l’accent sur les sciences, les technologies, l’ingénierie, les arts et les mathématiques, tandis que les services pédagogiques sont réglementés par la loi sur l’éducation de 2008. Pendant la COVID-19, il s’agissait notamment mais pas exclusivement de fournir des uniformes et des repas chauds aux élèves les plus vulnérables. Le Gouvernement a aussi fourni des appareils technologiques pour appuyer l’apprentissage numérique. Les formations techniques et professionnelles jouent également un rôle essentiel dans le secteur de l’éducation avec des cours de gestion, de formation agricole entre autres.
Mme NATIA TSIKARADZE, Coordinatrice nationale des ODD de Géorgie, a déclaré que le Gouvernement accorde une attention particulière à la qualité et à l’accessibilité de l’éducation. En plus de la réforme de l’éducation générale, l’enseignement supérieur est axé sur l’amélioration des compétences nécessaires pour entrer sur le marché du travail. Pendant la COVID-19, le pays a rapidement adopté l’éducation à distance y compris pour les étudiants minoritaires et les enfants handicapés. Le Sommet sur la transformation de l’éducation de septembre devra appuyer un mouvement mondial pour la transformation de l’éducation, et la communauté internationale doit se fixer pour priorité d’aider les enfants et les jeunes à rattraper les retards accumulés pendant la pandémie.
Débat interactif avec les panélistes
L’éducation est la clef pour un avenir durable de l’humanité. Comment dès lors accélérer la réalisation de l’ODD 4 et quels sont les risques de recul? a lancé la Modératrice, Mme STEFANIA GIANNINI, Directrice générale adjointe de l’Organisation des Nations Unies pour la science, l’éducation et la culture (UNESCO).
Rappelant que l’éducation est un élément essential pour accélérer la réalisation de tous les autres ODD, M. OMAR ABDI, Directeur exécutif adjoint pour les programmes du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a demandé aux gouvernements « d’atteindre chaque enfant et le garder à l’école », d’enseigner les fondamentaux, d’appuyer le bien-être physique et social de chaque enfant et d’augmenter les investissements dans l’éducation. De son côté, Mme SUSAN HOPGOOD, Présidente de l’ONG Education International, a appelé à élaborer un nouveau pacte sur l’éducation visant à payer correctement les enseignants, établir un cadre de travail décent, et investir dans la formation des enseignants qui, a-t-elle ajouté, doivent être inclus dans le processus de décision. Mme SHEAM SATKURU, Directrice exécutive de l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT), a plaidé pour davantage de collaboration intersectorielle dans le domaine des forêts. Cela aura un impact sur les politiques nationales non seulement en matière d’éducation mais aussi environnementales et économiques.
Pour une famille pauvre, l’éducation c’est choisir entre aller à l’école ou manger et survivre, a observé Mme VICTORIA HUALLPA MAMANI, membre de ATD Quart Monde, El Alto, Bolivie, qui a par ailleurs appelé au renforcement des capacités des enseignants qui travaillent avec des élèves en difficultés. Les enseignants doivent aider ces enfants à avoir confiance en eux-mêmes quel que soit leur statut social. Mme MADELEINE ZUNIGA, Vice-Présidente et fondatrice de Foro Educativo, Perou, a ensuite dénoncé l’exclusion des enfants autochtones des systèmes éducatifs et a prié les États de financer la formation des enseignants.
Il n’y a pas de développement sans éducation et il n’y a pas de paix sans éducation civique, a souligné M. DAVID MOININA SENGEH, Ministre de l’éducation de base de Sierra Leone, qui a indiqué qu’après la pandémie de COVID-19, 22% du budget de l’État a été alloué à l’éducation. Le mot clef est « investissement », a martelé le Ministre demandant aussi l’inclusion des groupes marginalisés y compris les filles enceintes. De son côté, Mme LI ANDERSSON, Ministre de l’éducation de la Finlande, a appelé les gouvernements à investir dans la formation et l’encadrement des enseignants. Elle a également fait savoir que la Finlande a créé la coalition mondiale de repas scolaire visant à offrir chaque jour un repas sain aux élèves. Mme SAHONDRARIMALALA MARIE MICHELLE, Ministre de l’éducation de Madagascar, a indiqué que 20% du budget de l’État est consacré à l’éducation et que l’État prend en charge les impôts des écoles privées. La numérisation de l’éducation est en cours de même que la réforme du cycle d’apprentissage et du calendrier scolaire, la création d’une année préparatoire avant la maternelle, la prise en compte des spécificités régionales et la diversification de l’apprentissage.
Débat avec les États Membres
Préoccupée par l’impact de la guerre en Ukraine sur l’éducation, la Roumanie a fait savoir qu’elle a pris en charge l’éducation des jeunes ukrainiens en Roumanie. L’Ukraine a d’ailleurs indiqué que depuis le 24 février 2022, l’agresseur russe a bombardé plus de 2 000 écoles dont 200 qui ont été complètement détruites. Cette nouvelle réalité contraint à revoir le sens de l’éducation et de bâtir un système éducatif résilient pour le relèvement après la guerre.
Le Bangladesh a espéré que le Sommet sur la transformation de l’éducation permette de trouver des moyens pour réduire le coût de l’éducation y compris par l’apprentissage en ligne. La délégation a également demandé la prise en charge de l’éducation des enfants migrants. La Zambie a indiqué qu’outre la prise en charge du retour à l’école de tous les enfants après la pandémie, elle se prépare aux futures crises en appuyant la numérisation de l’éducation. La Norvège a, pour sa part, indiqué qu’elle organisera en janvier 2023 une conférence internationale sur les enfants victimes des changements climatiques. Le Mexique a dit « non » à la marchandisation de la connaissance. L’Union européenne a parlé de sa nouvelle stratégie School Education Gateway qui investit dans l’éducation numérique, les enseignants, l’équité et la formation professionnelle. Elle vise aussi à faciliter la mobilité en Afrique et entre l’Afrique et l’Europe.
L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a rappelé qu’elle appuie la formation professionnelle dans le domaine de l’énergie nucléaire, ainsi que les partenaires visant à acquérir des compétences pour la formation nucléaire. La République tchèque a appelé à changer la perception des enseignants dans la société et à promouvoir une éducation inclusive à l’école primaire pour les enfants roms. La Chine a encouragé les pays à préparer les étudiants à leur avenir professionnel, précisant soutenir la transformation numérique, l’éducation verte, et l’apprentissage tout au long de la vie. L’Espagne a informé que 6,3% de son aide internationale est consacrée à l’éducation et au renforcement de la formation technique, tandis que la Suède a indiqué avoir établi avec des municipalités des partenariats sur la démocratie et l’éducation pour renforcer la connaissance.
À son tour, M. JOSÉ MAURICIO PINEDA, Ministre par intérim de l’éducation d’El Salvador, a informé que son gouvernement consacre 5,3% du PIB à l’éducation y compris la prise en charge de la petite enfance, l’apprentissage continu, les échanges entre les pays. Le Botswana a insisté sur l’importance de ne laisser personne en dehors du système éducatif en misant notamment sur la technologie numérique. La Suisse a estimé que plus de 420 millions de personnes auraient pu sortir de la pauvreté si elles avaient eu accès à l’éducation. Préoccupée par les conséquences de la pandémie sur les filles, elle a fait savoir qu’elle convoquera en 2023 une conférence intitulée Education Cannot Wait. On ne peut pas accepter que la génération COVID-19 soit une génération perdue, a déclaré la délégation.
Le Malawi a dit que pour faire face aux problèmes de l’enseignement informel, ainsi qu’au manque de formation des enseignants, et d’accès à l’enseignement supérieur, le Gouvernement parie sur le financement innovant, le partenariat public-privé, la numérisation, l’apprentissage à distance, ainsi que l’accès aux prêts pour permettre aux pauvres d’accéder à l’enseignement supérieur. L’Iran a dénoncé les sanctions internationales dont est frappé son pays l’empêchant de prendre en charge les 500 000 enfants réfugiés qui sont inscrits dans les écoles iraniennes. Après la pandémie, le Viet Nam est passé à l’éducation en ligne pour aider les étudiants dans les zones reculées. L’ODD 4 sera atteint en 2030, a assuré la délégation. Après la pandémie, l’Azerbaïdjan a embauché plus d’un million d’enseignants et pris en charge les frais de scolarité de tous les élèves en vue de se préparer aux crises futures. Le Népal vise, pour sa part, à combler le fossé numérique.
Table ronde 2
Cette discussion interactive qui avait pour thème « Agir au niveau local » a permis de faire le point sur le rôle crucial joué par les autorités locales, en particulier les villes dans la réalisation du Programme 2030.
Insistant sur l’importance de l’action en faveur des jeunes, M. MUSTAFA UZBAS, maire adjoint de Konya, Türkiye, a indiqué que sa municipalité a donné près de 40 000 vélos aux jeunes de la ville. Il a aussi mentionné l’ouverture de bibliothèques et fait savoir que les personnes âgées ont un accès gratuit aux transports. De son côté, Mme ROSE KEFFAS, du Bureau du Conseiller spécial à la présidence du Nigéria, a insisté sur l’importance des examens locaux volontaires, de la collecte des données et de l’élaboration des programmes au profit des plus vulnérables. Les communautés locales ont été étroitement associées à la création desdits programmes, a-t-elle assuré, tandis que M. VILLE TAAJAMAA, point focal pour les ODD de la ville d’Espoo, Finlande, a souligné l’importance d’associer les jeunes à la gouvernance locale. Enfin, M. ASHOK KUMAN BYANJU, maire de Dhulikel, Népal, a indiqué que sa ville a mené à bien son examen volontaire local, avec un accent mis sur l’ODD 4 et l’ODD 6. La quasi-totalité de nos programmes est conforme aux ODD, s’est-il félicité, en mentionnant le programme d’approvisionnement en eau potable et les efforts de lutte contre la pauvreté. L’éducation est aussi la priorité, de même que le développement des microentreprises. Il a aussi insisté sur l’importance de la coopération et de la volonté politique pour réaliser le développement durable.
Au cours du débat interactif, les délégations ont décliné leur action pour réaliser les ODD au niveau local, à commencer par la Jamaïque qui a insisté sur l’importance de sensibiliser la population à cet enjeu. L’action locale doit être conforme aux priorités nationales, a déclaré la déléguée jamaïcaine. Le Guatemala a détaillé les efforts locaux pour réaliser l’ODD 11, avec notamment un meilleur accès à l’eau et à l’assainissement. La déléguée de la France a mentionné les efforts déployés par la ville d’Évian afin d’être plus durable, solidaire, inclusive, responsable et résiliente. Parmi les actions entreprises, elle a mentionné la gratuité des protections hygiéniques pour les femmes et la rénovation des bâtiments publics afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. La République tchèque et la Norvège ont rappelé que tous les acteurs, nationaux comme locaux, doivent concourir à la réalisation des ODD, tandis que le grand groupe des enfants et des jeunes a plaidé pour un partenariat renforcé avec la société civile.
En conclusion de ce dialogue, deux sondages ont été menés en temps réel auprès des délégations qui ont été 41% à estimer que la coordination entre les autorités locales et nationales pour la réalisation des ODD peut encore être améliorée, 28% la jugeant satisfaisante. Enfin, 71% des délégations ont estimé que les ODD sont connus de trop peu d’habitants de leurs pays.
La couverture de la première partie de cette table ronde a été entravée par un problème technique.
Table ronde 3
En ouvrant, en tant que modératrice, cette troisième table ronde du jour, intitulée « Pays africains, pays les moins avancés et pays en développement sans littoral: garantir l’égalité d’accès aux vaccins et aux ressources dans les pays les plus pauvres », Mme RABAB FATIMA, Représentante permanente du Bangladesh et Coprésidente du Comité préparatoire de la cinquième Conférence sur les pays les moins avancés, a estimé que des actions urgentes sont nécessaires pour aider ces pays à surmonter les crises qui les accablent, en particulier la pandémie de COVID- 19. Elle a relevé à cet égard que le Programme d’action de Doha pour les PMA, adopté en mars dernier, s’est fixé des cibles précises en matière de vaccination, alors que les pays les plus vulnérables affichent des taux extrêmement faibles, très éloignés de l’objectif de 70% préconisé par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Les partenaires internationaux doivent y contribuer, tout comme ils doivent investir dans les efforts de reprise de ces pays, notamment dans leur accès aux technologies, a-t-elle plaidé, ajoutant que la Conférence de Doha sur les PMA, prévue en mars prochain, sera l’occasion de confirmer les engagements pris dans ce sens.
La parole a ensuite été donnée à M. TAFFERE TESFACHEW, Directeur général par intérim de la Banque de technologie des Nations Unies pour les pays les moins avancés pays et membre du Comité de la planification du développement (CPD), qui a mis l’accent sur l’importance des innovations technologiques, qu’il s’agisse du déploiement des vaccins ou du développement du numérique, pour la relance des PMA. Hélas, a-t-il déploré, la communauté internationale a manqué en 2020 la cible 9.c qui visait à accroître nettement l’accès aux technologies de l’information et de la communication et à faire en sorte que tous les habitants des PMA aient accès à Internet à un coût abordable. Nous devons sans plus attendre agir pour y parvenir d’ici à 2030, ce qui suppose des investissements, a-t-il plaidé, avant de rappeler que plus de 60% de la population de ces pays a moins de 25 ans et doit avoir accès à des compétences numériques pour sortir de la pauvreté. Il a également salué la création de la Banque de technologie pour les PMA, prévue dans le Programme d’action d’Istanbul et inaugurée en 2018 en Türkiye, y voyant un moyen d’améliorer la base de recherche scientifique et d’innovation de ces pays et de mieux préparer leur jeunesse aux futures crises.
Sur cette même ligne, M. FARID FEZOUA, Directeur monde pour la santé et la formation à l’International Finance Corporation, a loué la mise sur pied de nouveaux partenariats avec les PMA pour renforcer leurs capacités au niveau local. Il a ainsi cité en exemple les projets montés avec l’Institut Pasteur de Dakar, désormais en mesure de fabriquer toutes sortes de vaccins, et la construction au Rwanda et au Sénégal de sites de production de vaccins à ARN messager par la firme BioNTech. La prestation de services de santé étant le « talon d’Achille » de ces pays fragiles, il est essentiel de la renforcer. Mais il faut aussi faire levier et attirer des investissements privés pour parvenir à une plus grande autonomie vaccinale dans les PMA, a-t-il indiqué, non sans rappeler que l’Afrique ne compte que 350 fabricants de médicaments pour une population de 2 milliards d’individus.
À sa suite, Mme PREETI SINHA, Secrétaire exécutive du Fonds d’équipement des Nations Unies (FENU), a précisé que la mission de son agence consiste à « catalyser les finances ». Dans le cadre du Programme d’action de Doha, nous proposons un système de financement dédié aux PMA, avec par exemple des prêts pour l’édification d’infrastructures numériques. En effet, a-t-elle expliqué, ces pays sont confrontés à un manque d’accès aux capitaux et les banques locales ne leur viennent pas en aide. Nous sommes donc le « chaînon manquant » pour l’accès aux crédits. Les programmes d’action successifs pour les PMA ont permis de créer des banques d’investissement, mais il faudrait aussi un organisme qui garantisse les risques, a jugé la responsable onusienne, avant d’appeler les bailleurs à fournir des fonds garantis. Elle s’est également félicitée du lancement d’obligations vertes pour lesquelles, a-t-elle dit, il existe un vaste marché. Enfin, elle a soutenu à son tour la production locale de vaccins, estimant qu’il convient d’aider les pays à se doter des capacités idoines par le biais d’un mécanisme international.
Lui emboîtant le pas, M. MIHIR KANADE, membre pour la région Asie-Pacifique du Mécanisme d’experts sur le droit au développement et Directeur académique de l’Université pour la paix, a insisté sur le fait que le Programme 2030 a fait de l’ODD 17 le moyen de mise en œuvre des 16 autres ODD par le biais de partenariats mondiaux. Les États doivent donc exercer leur devoir de coopération, en particulier dans la mise à disposition de vaccins pour tous, a-t-il martelé, déplorant que de nombreux pays aient préféré traiter directement avec des producteurs de vaccins, au détriment d’initiatives comme le Mécanisme COVAX, tout en bloquant les droits de propriété intellectuelle sur ces produits vitaux. Le résultat en est que plus de 80% de la population africaine n’est pas vaccinée, a-t-il tonné, avant de rappeler que « la coopération internationale est une obligation juridique, pas un simple appel à la générosité ». Dénonçant cette « violation des droits humains et de l’obligation de coopération », il a souhaité que le cadre normatif international soit désormais fondé sur la solidarité en tant que « devoir » pour mieux appréhender les crises à venir.
Il est nécessaire d’assurer la reddition de comptes sur la sécurité sanitaire mondiale, a renchéri Mme UGOJI ADANMA EZE, Directrice générale et fondatrice de la Aja Eze Foundation, pour qui la clef est la transparence. Il importe également, d’après elle, d’accroître les financements internationaux pour combler les lacunes identifiées. De même, les vaccins devraient être un droit humain pour tous, a-t-elle poursuivi, appelant à ce que la « diplomatie vaccinale » dont nous avons été témoins ces dernières années ne se reproduise pas. Pour avancer, a-t-elle soutenu, nous devons prendre conscience que nous vivons dans un « village mondial » et qu’il est l’heure d’agir contre la survenance de maladies dans le cadre de projets communs.
Au nom du Groupe des pays les moins avancés, Mme KHUMBIZE KANDODO CHIPONDA, Ministre de la santé du Malawi, a considéré que le Programme d’action de Doha pour les PMA donne la possibilité à ces pays de s’attaquer aux disparités socioéconomiques et d’accroître leur résilience de manière durable. Soulignant, elle aussi, le caractère essentiel de la distribution équitable des vaccins, elle a salué l’action du Mécanisme COVAX, tout en appelant à un renforcement de ces efforts, alors que le taux de vaccination est de 2% en Afrique contre 47% dans les pays développés. Elle s’est également réjouie des accords conclus par le Sénégal et le Rwanda avec BioNTech pour la production locale de vaccins, souhaitant que des solutions soient apportées à l’Afrique pour qu’elle fasse de ces crises multiples « des chances de transformation ».
Nous ne pouvons pas reconstruire en mieux après la pandémie si nous n’incluons pas toutes les personnes handicapées dans le processus, a pour sa part averti Mme PAMELA MOLINA, Directrice exécutive de la Fédération mondiale des mal entendants et représentante du groupe des personnes handicapées. Elle a rappelé à cet égard que les restrictions contre la COVID-19 ont touché de manière disproportionnée la vie et les moyens de subsistance des personnes handicapées, notamment les femmes, les mal entendants et les mal voyants, les migrants, les non binaires, les personnes d’ascendance africaine et les personnes autochtones. L’exclusion a particulièrement frappé les personnes handicapées qui travaillaient dans le secteur informel ou qui ne pouvaient pas adopter les nouvelles conditions de travail, comme le télétravail ou la distanciation physique sur le lieu de travail, a-t-elle noté, avant d’appeler à ne plus laisser quiconque de côté dans les plans de relance.
Plus axée sur les femmes et les filles, Mme FATIME ZARA HAROUN, Présidente du Parlement des jeunes filles leaders du Tchad et représentante du programme Super Banats, s’est présentée comme la porte-parole des filles victimes de violences dans son pays. Elle a expliqué que son « Parlement », créé en 2017 à la faveur d’une bourse, vise à défendre les droits des filles et des femmes en luttant contre les maux qui minent leur épanouissement. Grâce à cette initiative, elle a pu intégrer le programme « Super Banats », « filles modèles » en arabe local tchadien, qui, avec l’appui de l’UNICEF, s’emploie à sensibiliser les communautés à la santé sexuelle et reproductive ainsi qu’à la prévention des violences faites aux adolescentes et aux filles, qu’il s’agisse de viols, de mauvais traitements, de mariage d’enfants, de grossesses précoces ou d’infections sexuellement transmissibles. Elle a demandé l’aide des États, des ONG et du système des Nations Unies « pour matérialiser nos droits, tant à la santé qu’à l’éducation ».
Dialogue interactif
Au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Érythrée a encouragé les États Membres à faire preuve de solidarité avec son continent et à adopter une approche coordonnée pour renforcer les chaînes d’approvisionnement et forger des partenariats solides. Elle a aussi souhaité que des solutions soient trouvées pour que les vaccins soient reconnus comme des biens publics mondiaux, une position également défendue par le Mécanisme de coordination régionale de l’Asie-Pacifique, le Kenya, le Cameroun, la Chine et le Népal, lequel a condamné le nationalisme vaccinal comme une « claire violation des droits humains » et appelé à l’annulation des droits de propriété intellectuelle pour les vaccins et les médicaments. Ces droits ne doivent pas être un obstacle à la production de vaccins, a ajouté l’Espagne, qui a rappelé être l’un des premiers pays à avoir cédé des licences.
Il faut faciliter l’accès de tous les pays aux technologies existantes, c’est une des clefs de la reprise dans les PMA et les pays africains, a abondé la Finlande, selon laquelle des partenariats doivent être trouvés dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour renforcer la production locale de vaccins. Il faut également profiter de cette crise pour réformer les systèmes de financements, a soutenu la Norvège, en soulignant sa contribution à l’Accélérateur ACT, tandis que la Belgique appelait à renforcer la résilience des systèmes de santé africains.
L’Union européenne a noté que le récent Sommet UE-UA a permis de réaffirmer les partenariats entre les deux organisations, notamment sur le développement numérique. Elle a rappelé son engagement à hauteur de 100 milliards d’euros pour soutenir les efforts de reprise de l’Afrique alignés sur le Programme 2030 et l’Agenda 2063 de l’UA. Elle a aussi réitéré sa solidarité en matière vaccinale, précisant que, pour chaque dose administrée en Europe, une dose est envoyée en Afrique. Tout en préconisant une priorisation des financements concessionnels en faveur des PMA, la France a annoncé qu’elle donnerait 120 millions de doses de vaccin aux pays fragiles, essentiellement par le biais du Mécanisme COVAX. Elle a, d’autre part, accusé Moscou de plonger ces pays dans une crise alimentaire, financière et énergétique en raison de son agression de l’Ukraine. Une « déclaration de propagande » a répondu la Fédération de Russie, selon laquelle les sanctions imposées par des pays tels que la France empêchent l’exportation de céréales et d’engrais vers ceux qui en ont besoin. La situation en Ukraine fait payer un lourd tribut à l’Afrique et aux pays vulnérables, a averti l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), qui a réclamé que les importations de produits alimentaires puissent reprendre de toute urgence.
Au nom des pays en développement sans littoral, la Mongolie a estimé que la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour faciliter l’accès des vaccins aux pays pauvres et enclavés. A l’instar du Paraguay, elle a également sollicité une aide technique et commerciale, une assistance en matière de connectivité, d’allègement de la dette, de transition énergétique, plaidant pour que l’on tienne compte de la vulnérabilité des pays à situation particulière et que les partenaires consacrent toutes les ressources possibles, y compris l’aide publique au développement (APD), à des projets de coopération.
Le Portugal a justement rappelé que 60% de son APD est allouée aux PMA. Il s’est également engagé à fournir à ces pays vulnérables une assistance technique et des modules de formation afin de les aider à préparer leur reclassement, dans le droit fil du Programme d’action de Doha. Le Danemark a, lui, appelé les partenaires des PMA à honorer leurs engagements en matière de financements, indiquant que son APD représente 7% de sa richesse nationale. Une position saluée par l’Éthiopie, qui a plaidé pour des investissements sur le long terme, en particulier pour les pays d’Afrique subsaharienne.
Enfin, relevant qu’elle préside avec la Belgique le Groupe des Amis des PMA à New York, la Türkiye a déclaré avoir augmenté son APD qui représente désormais 1,74% de son PIB. Elle s’est également enorgueillie de fournir des médicaments à 160 pays et d’accueillir sur son sol la Banque de technologie pour les PMA, dont le bon fonctionnement est essentiel pour le Programme d’action de Doha.