Conseil de sécurité: le Représentant spécial du Secrétaire général encouragé par la politique de « paix totale » préconisée par le Président de la Colombie
Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, M. Carlos Ruiz Massieu, a déclaré cet après-midi devant les membres du Conseil de sécurité, dont trois ministres, qu’il était « encouragé » par les développements récents survenus en Colombie et par l’approche du nouveau Gouvernement qui donne la priorité à la mise en œuvre de l’Accord de paix final et au dialogue comme principal moyen de résoudre le conflit social et armé.
Dès les premières semaines, les débuts de la nouvelle Administration du Président Gustavo Petro ont été marqués par des développements « positifs »: le Congrès a débattu de réformes clefs, notamment le projet de loi portant création de la juridiction agraire et la proposition de réforme politique. Il a également avancé sur l’élaboration de la loi qui encadre la politique de « paix totale » du Président et a ratifié l’Accord d’Escazú.
Pour la première fois aussi, deux organes « essentiels » pour la résolution des défis urgents auxquels le pays est confronté, à savoir la Commission de suivi, de promotion et de vérification de la mise en œuvre de l’Accord de paix final et la Commission nationale des garanties de sécurité, se sont réunis. En outre, le Gouvernement a signé un accord avec la fédération des éleveurs et, la semaine dernière, il a décidé avec l’Armée de libération nationale (ELN) de reprendre les pourparlers de paix.
Alors que la Colombie vit un « moment d’attentes renouvelées », cette politique « audacieuse » de « paix totale » est une opportunité, qui nécessitera non seulement un dialogue continu et constructif entre les parties, mais aussi l’appui décisif du Conseil de sécurité, a expliqué le Représentant spécial.
Sans dissensions majeures, les membres du Conseil ont salué le chemin parcouru par la Colombie depuis 2016 et des « évolutions qui nourrissent les espoirs », même s’ils ont déploré un niveau de violence « préoccupant », notamment à l’encontre des anciens combattants et des défenseurs des droits humains issus des communautés ethniques et autochtones.
Les communautés afro-colombiennes et autochtones de la côte pacifique et de San Juan sont en effet menacées par un « processus d’extinction physique et culturelle », du fait des actions des groupes armés et des projets étrangers d’extraction minière, a témoigné la Représentante du Conseil général de la communauté de San Juan, Mme Elizabeth Moreno.
Dans ce contexte, et alors que le processus de paix « prend racine », le Brésil, la France et le Royaume-Uni ont demandé au Gouvernement colombien de prendre rapidement des initiatives supplémentaires en matière de sécurité, notamment pour renforcer la présence de l’État dans les zones historiquement négligées par l’Accord de paix. Justice doit en être rendue aux peuples « traditionnels », ont abondé les États-Unis. Dans cet esprit, le Ministre des affaires étrangères du Gabon, M. Michaël Moussa Adamo, s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a expliqué pourquoi l’attention de leurs pays se concentre sur les Afro-Colombiens et la communauté autochtone: ce sont eux qui ont le plus souffert historiquement.
À côté de la réponse militaire, il faudra une approche plus politique d’autant que la « paix totale » promise par le Président est « compliquée » et va exiger du temps, comme l’a souligné la Ministre des affaires étrangères de la Norvège, Mme Anniken Huitfeldt, dont le pays est l’un des garants de l’Accord de paix. Le dialogue est un bon moyen de régler les divergences, a renchéri la Chine.
Prenant à son tour la parole, le Ministre des affaires étrangères de la Colombie, M. Ávaro Leyva Durán, s’est voulu rassurant: « Nous avons mis les choses en marche ». La Colombie en a assez de la violence provoquée par « ce maudit trafic des drogues », a-t-il lancé en appelant de ses vœux un réexamen complet de la stratégie nationale à cet égard. Le Ministre a cité les grandes priorités de son gouvernement pour construire une paix durable « avec et pour les Colombiens ».
Le Conseil de sécurité abordera, le 27 octobre prochain, la question du renouvellement du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, qui, selon le Président de la Commission de consolidation de la paix, M. Muhammad Abdul Muhith, apporte un « soutien inestimable et complémentaire » au processus de paix.
LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53)
Déclarations
M. CARLOS RUIZ MASSIEU, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, présentant le rapport du Secrétaire général qui couvre la période allant du 28 juin au 26 septembre 2022, a déclaré que la Colombie vit un « moment d’attentes renouvelées ». La politique audacieuse de « paix totale » avancée par le Président Gustavo Petro est ancrée dans la mise en œuvre complète de l’Accord final avec les anciennes Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP). M. Ruiz Massieu s’est dit « encouragé » par le fait que l’approche du nouveau Gouvernement donne la priorité au dialogue comme principal moyen de résoudre le conflit social et armé. Cette politique concentre les stratégies de sécurité sur la protection des communautés vulnérables et reconnaît l’interdépendance entre les solutions durables à la violence et le dépassement des inégalités historiques, en particulier dans les zones rurales et pauvres. La recherche de la « paix totale » est donc une opportunité pour continuer à construire sur ces bases, a-t-il dit.
Le Représentant spécial a jugé « positif » qu’au cours de ces premières semaines, le Congrès ait débattu de réformes clefs, notamment le projet de loi portant création de la juridiction agraire et la proposition de réforme politique. De même, cette semaine, le Congrès a avancé sur l’élaboration de la loi qui donne un cadre juridique à la politique de « paix totale ». Il a aussi ratifié l’Accord régional sur l’accès à l’information, la participation publique et l’accès à la justice à propos des questions environnementales en Amérique latine et dans les Caraïbes (Accord d’Escazú). Le Gouvernement et la Fédération des éleveurs ont en outre récemment signé un accord important pour l’achat de terres à répartir entre les paysans par le biais des mécanismes établis par l’Accord final. La mise en œuvre de cet accord donnera une impulsion sans précédent à la réforme agraire, s’attaquant à l’une des causes structurelles du conflit, s’est félicité M. Ruiz Massieu.
Le diplomate a estimé que la concrétisation des promesses de l’Accord final nécessite un dialogue « continu et constructif » entre les parties et avec la société civile, y compris les organisations féminines et ethniques. Il s’est dit « sincèrement » convaincu que la pleine utilisation de la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’application de l’Accord final et de la Commission nationale des garanties de sécurité sera essentielle pour aider à résoudre les nombreux défis urgents auxquels est confrontée la mise en œuvre de la paix. Ces commissions se sont d’ailleurs récemment réunies pour la première fois, sous la nouvelle administration de Gustavo Petro. Mais il importe, a poursuivi M. Ruiz Massieu, que le Gouvernement nomme un nouveau directeur de l’Agence pour la réintégration, qui continue d’appuyer plus de 13 000 anciens combattants. Cela contribuerait à donner une « certitude » aux ex-combattants ainsi qu’une continuité dans leur dialogue avec le Gouvernement afin de consolider le processus.
Le Représentant spécial a en outre jugé « encourageante » la décision annoncée la semaine dernière par le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN) de reprendre les pourparlers de paix. Avec la volonté des parties et le soutien de la société colombienne et de la communauté internationale, il sera possible de mettre fin à un conflit qui dure depuis des décennies et dont la résolution est « essentielle » pour élargir le champ de la paix dans le pays, a-t-il estimé. Concluant, M. Ruiz Massieu a dit que l’appui du Conseil de sécurité a été « décisif » pour obtenir des résultats importants et surmonter d’innombrables obstacles. Compte tenu de ce nouveau scénario d’opportunités renouvelées pour la paix, cet engagement ferme et unanime envers la Colombie continuera d’être d’une importance vitale.
M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH, Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP), a expliqué que la CPP, à la demande du Gouvernement colombien, avait ces dernières années cherché à mobiliser un soutien aux efforts de la Colombie pour construire la paix après la ratification de l’Accord de paix final en 2016. Pour la CCP, la Colombie est un « exemple réussi de rétablissement de la paix sans exclusive ». Elle exprime sa reconnaissance pour le fort engagement du Gouvernement colombien dans le travail de la CCP en vue de partager ses expériences avec les pays et régions touchés par des conflits.
Le Président a félicité le Président Petro et son gouvernement pour leur engagement en faveur de la mise en œuvre complète de l’Accord de paix final et estimé que les progrès réalisés dans les principaux chapitre de l’Accord aideront à « consolider la paix, à réduire l’écart de développement dans les zones rurales de la Colombie, à contribuer à la réconciliation fondée sur une compréhension commune du passé, à garantir la justice et les droits des victimes et à permettre aux nombreux Colombiens qui ont perdu des êtres chers de tourner la page ». La Commission félicite aussi le Gouvernement pour son engagement à réduire les inégalités, à « gouverner avec et pour les femmes », avec la formation d’un Gouvernement paritaire et l’annonce de la création d’un ministère de l’égalité, à assurer une tolérance zéro pour la corruption et à organiser des dialogues régionaux.
La CCP se félicite aussi du « soutien inestimable et complémentaire » apporté par la Mission de vérification et l’équipe de pays des Nations Unies à la consolidation de la paix en Colombie, ainsi que de la « contribution catalytique » du Fonds de consolidation de la paix. Elle salue l’engagement constant de la société civile en Colombie. Elle se félicite de la récente décision du Gouvernement colombien et de l’Armée de libération nationale (ELN) de reprendre les dialogues de paix et exhorte les Nations Unies et les partenaires internationaux et régionaux à apporter « leur soutien le plus total au processus et à la mise en œuvre des accords ». Il a assuré que la CCP continuerait d’accompagner la Colombie dans ses efforts de consolidation de la paix et a appelé les partenaires à accroître leurs efforts pour soutenir le pays dans cette entreprise.
Mme ELIZABETH MORENO, Représentante du Conseil général de la communauté de San Juan (ACADESAN), a parlé au nom des communautés noires autochtones de la côte pacifique, menacées par un processus d’extinction physique et culturelle en raison de la violation systématique de leurs droits économiques, socioculturels et environnementaux, ainsi que par le conflit armé. Les communautés autochtones de San Juan font face à un pillage territorial du fait de projets étrangers et d’extractions minières, a-t-elle accusé. Elle a exhorté les groupes armés à laisser les populations autochtones hors de tout conflit et demandé des accords pour mettre un terme à la violence sur le territoire.
Mme Moreno a pointé les deux photos affichées derrière elle qui représentent deux jeunes autochtones, de 10 et 12 ans, morts dans le cadre des violences. Elle a témoigné de la souffrance des femmes, victimes de violences, y compris de violences sexuelles, et en tant que mères de victimes du conflit. L’oratrice a plaidé pour que le statut de son peuple fasse partie de la solution humanitaire. L’accession de Francia Márquez à la Vice-Présidence de la Colombie constitue un espoir pour les populations autochtones, a-t-elle souligné. Elle a souhaité que, sous ce gouvernement, les peuples autochtones puissent être libres et revenir sur leurs territoires. Enfin, Mme Moreno a plaidé en faveur de missions humanitaires plus fréquentes et d’un cessez-le-feu multilatéral.
M. MICHAËL MOUSSA ADAMO, Ministre des affaires étrangères du Gabon, s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a expliqué pourquoi l’attention de leurs pays se concentre sur les Afro-Colombiens et la communauté autochtone: ce sont eux qui ont le plus souffert historiquement. « Toutes les personnes d’ascendance africaine dont les ancêtres ont quitté nos côtes sous la contrainte ou à la recherche d’opportunités sont nos proches », a déclaré le Ministre. Évoquant l’Accord de paix final, il a rendu hommage aux « survivants » qui ont beaucoup souffert mais qui sont toujours prêts à offrir leur pardon au nom de la paix. Il a toutefois jugé essentiel que l’Accord final mette en œuvre les dispositions du chapitre ethnique, s’alarmant du faible niveau de respect pour ce chapitre.
M. Moussa Adamo a dénoncé les meurtres de défenseurs des droits de l’homme, en particulier ceux issus des communautés ethniques et indigènes. Il a appelé à la protection des personnes vulnérables, femmes autochtones et afro-colombiennes en particulier, et s’est également inquiété des violences commises contre les représentants de l’ordre et des autorités, relevant notamment l’attaque dans le département de Huila où sept policiers ont été tués. Le Ministre a estimé que l’Accord final passera par l’incorporation de groupes qui n’y sont pas parties, encourageant ainsi le dialogue entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN) et autres groupes armés. Il s’est ensuite réjoui des mesures prises par Bogota en vue de normaliser les relations avec le Venezuela. Le Ministre a soutenu le renouvellement du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies pour une année supplémentaire, notant que le soutien apporté par la communauté internationale au Gouvernement colombien allait de pair avec la réalisation des objectifs de développement durable. Enfin, il a salué le Kenya dont les efforts pour renforcer les liens entre l’Afrique et sa diaspora dans les travaux du Conseil ont conduit un plus grand nombre de délégations à s’intéresser à cette cause.
Mme ANNIKEN HUITFELDT, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a, en tant qu’ancienne Ministre de l’égalité, rendu hommage à la Colombie pour les jalons posés en faveur d’une inclusion accrue, notant que la parité au sein du Gouvernement est le signe que celui-ci prend l’égalité au sérieux. La représentation des femmes au Congrès est tout aussi encourageante, un membre sur trois étant désormais une femme. La Ministre a relevé que le nouveau Gouvernement et les représentants des anciennes FARC-EP avaient renouvelé leur engagement inconditionnel en faveur de l’Accord de paix de la Havane, et encouragé à d’autres voies de dialogue bilatéral, cruciales pour une pleine mise en œuvre de l’Accord de paix final. Rappelant que la Norvège fait partie des pays garants dudit Accord, elle a réitéré son plein engagement dans le processus de paix entamé en 2016 et fait savoir qu’il avait été demandé à la Norvège de persévérer dans les négociations avec l’Armée de libération nationale (ELN). Tout en reconnaissant que la « paix totale » comme l’a promis le Président Petro est à la fois compliquée, qu’elle va exiger du temps et plusieurs approches, Mme Huitfeldt a assuré que son pays reste disposé à assister les efforts tendant à la promotion du dialogue et du désarmement d’autres groupes armés, le cas échéant.
Saluant également la convocation de la Commission nationale des garanties de sécurités, la Ministre a souligné que celle-ci avait le potentiel de traiter des causes profondes de la violence, ce qui améliorera les conditions sécuritaires des défenseurs des droits de l’homme, plus particulièrement celles des femmes et des anciens combattants. Plus de 340 anciens combattants des FARC sont morts depuis 2016, a-t-elle rappelé, ajoutant que cela ne saurait continuer. Dans ce contexte, elle a fait écho au Secrétaire général qui exhorte à la pleine mise en œuvre du Programme global pour la sauvegarde des femmes leaders et des défenseuses des droits de la personne. Mme Huitfeldt a aussi appelé toutes les parties à honorer leurs obligations au regard du droit international et à appliquer les recommandations du Président du Groupe de travail du Conseil sur les enfants et les conflits armés en Colombie. Les membres du Conseil doivent se mettre d’accord sur un renouvellement du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies pour qu’elle puisse poursuivre son appui à la paix et la stabilité en Colombie, a-t-elle conclu.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) s’est félicité à son tour de la reprise du dialogue avec les FARC-EP et de la volonté du Président de dialoguer avec d’autres groupes. L’application intégrale de l’accord de paix présente aussi une occasion de redresser les injustices historiques contre des pans de la population. Il a salué les efforts consentis par les autorités locales, la société civile et les peuples autochtones pour renforcer les chances de paix. Il a relevé que la Colombie fait montre de volonté pour le remplacement de cultures illicites, ce qui va dans le sens de l’engagement du Président Petro concernant les politiques relatives aux problèmes de la drogue, et a appelé la communauté internationale à se mobiliser pour résoudre le problème international des drogues. Il a salué la création d’un ministère de l’égalité, jugeant absolument essentiel l’intégration des femmes dans le développement mais également des peuples autochtones et premières nations. Il s’est prononcé en faveur du renouvellement du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie.
M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est félicité de l’engagement du nouveau Gouvernement à mettre en œuvre l’Accord de paix, ainsi que la place qu’il accorde aux réformes rurales vitales, y compris l’intention d’accélérer l’octroi de titres de propriété et l’achat de terres. Il s’est dit profondément préoccupé par les menaces et les violences auxquelles sont confrontés les anciens combattants et les défenseurs des droits humains. Des initiatives supplémentaires en matière de sécurité sont urgemment nécessaires, a-t-il estimé. Le représentant a plaidé en faveur d’une approche multidimensionnelle pour lutter contre la violence et assurer la sécurité humaine. Il s’est, à cet égard, félicité des progrès réalisés en vue de la reprise des pourparlers avec l’Armée de libération nationale (ELN). Il a, enfin, salué l’engagement de la Colombie à renforcer la coopération internationale pour la lutte contre le narcotrafic.
M. FERGAL MYTHEN (Irlande) s’est félicité qu’au milieu des changements importants que connaît la Colombie, le processus de paix soit resté « inébranlable » et y a vu « un exemple brillant de construction de la paix inclusive et d’un accord de paix global ». Apportant son soutien à tous ceux qui construisent une paix durable et viable en Colombie, le représentant s’est félicité de l’engagement du nouveau Gouvernement à intensifier la mise en œuvre de l’accord.
M. Mythen a rappelé que la réalisation véritable du potentiel de l’accord ne serait obtenue que par sa mise en œuvre complète, ce qui supposera d’accorder une priorité plus importante à la réforme rurale et à l’ethnicité, ainsi qu’aux questions de genre. Rappelant que la paix était indispensable à la Colombie, le représentant a salué l’annonce du rétablissement des pourparlers de paix entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN), et les efforts en cours pour un cessez-le-feu avec d’autres groupes armés.
Par ailleurs, l’Irlande réitère son soutien au système colombien de justice transitionnelle et se félicite que l’engagement envers les victimes et les survivants ait été démontré. Le représentant a jugé « bienvenu » l’engagement du Président Petro à mettre en œuvre l’intégralité des recommandations du rapport final de la Commission de la vérité. Ces processus, individuellement et collectivement, auront un impact transformateur sur la vie des victimes et des survivants et pour une véritable réconciliation pour tous les Colombiens, a estimé M. Mythen.
Le représentant a en revanche condamné le niveau de la violence en Colombie, « une tache profonde sur la tapisserie de la paix » dans le pays, qu’il s’agisse de la mort récente de 20 policiers aux mains de groupes armés illégaux ou les assassinats d’indigènes et d’Afro-Colombiens, d’enfants, d’anciens combattants et de défenseurs des droits de l’homme. La protection de tous ceux qui travaillent pour la paix est une condition essentielle pour un avenir pacifique, stable et égalitaire, a-t-il déclaré. Il a également encouragé une mise en œuvre complète et rapide du Programme global de garanties pour les femmes dirigeantes et les défenseurs des droits de l’homme.
« Le sol pour une paix durable est fertile en Colombie. Nous devons l’entretenir. Avec l’engagement continu du Gouvernement et du peuple colombiens, et avec le soutien de ce Conseil, la récolte peut être abondante », a conclu le représentant.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a salué l’élan vers la paix du nouveau Gouvernement, dont les récentes mesures appellent à l’optimisme et à la mise en œuvre pleine et entière de l’Accord de paix. Cette approche, a-t-il indiqué, diffère fondamentalement de celle de l’administration précédente. Il a exhorté à la participation de l’ensemble des acteurs, y compris l’Armée de libération nationale (ELN), se réjouissant sur ce point des négociations en vue de la cessation complète des hostilités. Il a dit être convaincu que la normalisation des relations entre la Colombie et le Venezuela pourront contribuer au règlement de la situation migratoire dans la région ainsi qu’à la lutte contre la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues. Le délégué s’est dit disposé à appuyer la prorogation du mandat de la Mission de vérification en Colombie, notant néanmoins que la mise en œuvre de l’Accord de paix final dépasse actuellement son mandat.
Mme ISIS JARAUD DARNAUT (France), évoquant les évolutions qui nourrissent ses espoirs, a jugé « encourageantes » la reprise des négociations avec l’Armée de libération nationale (ELN), de même que la disponibilité d’autres groupes armés à engager le dialogue. La France soutient l’appel au cessez-le-feu lancé par le Président Petro à destination de tous les groupes armés, a-t-elle ajouté. Mais, elle demeure très préoccupée par le niveau de violence qui touche de nombreuses régions en Colombie. Si la méthode proposée par les autorités au niveau local est prometteuse, celle-ci doit s’accompagner d’un renforcement de la présence de l’État dans les zones historiquement négligées par l’Accord de paix, a prévenu la représentante. Pour elle, en effet, la paix ne peut se concrétiser que via l’offre d’opportunités à celles et ceux qui ont souffert du conflit. Au titre des avancées, Mme Jaraud Darnault a salué les progrès réalisés par la Juridiction spéciale pour la paix. Évoquant le chemin parcouru par la Colombie, depuis 2016, elle a rappelé qu’il s’agit d’un accord « historique ».
M. ARIAN SPASSE (Albanie) a déclaré que « la paix ne tombe jamais du ciel ». Elle est le fruit du labeur de dirigeants courageux et visionnaires. Le processus électoral pacifique est une « réalisation de taille », preuve que le peuple colombien a fait le choix de la paix, a-t-il ajouté. Reconnaissant cependant qu’il reste beaucoup à faire pour ramener la sécurité dans les zones touchées par le conflit, le délégué a incité le nouveau Gouvernement au dialogue et à la coopération à tous les niveaux, notamment pour garantir l’inclusion, dans le respect de l’état de droit. Pour ce faire, il est indispensable que le Gouvernement réforme le système judiciaire et le secteur agricole et veille à la réintégration de tous les anciens combattants. La reprise des relations diplomatiques et l’ouverture de la frontière avec le Venezuela sont de nouveaux événements porteurs d’espoir, a conclu le délégué.
M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) s’est félicité de la transition pacifique du pouvoir en Colombie, qui illustre la mise en œuvre de l’Accord de paix. La plus grande inclusion des genres ainsi que la représentation autochtone au sein du Gouvernement et du Parlement sont des éléments positifs, a-t-il indiqué. Il a ajouté que la mise en œuvre complète des éléments connexes de l’Accord constitue une opportunité pour le nouveau Gouvernement de s’attaquer aux inégalités et aux facteurs sous-jacents de la violence persistante en Colombie. Il a remarqué que la réalisation des accords de paix prendra du temps et que des entraves à leur mise en œuvre persistent. Les autorités colombiennes ont progressé pour examiner les problèmes de sécurité, de logement et de garanties foncières, a-t-il souligné. Le délégué a également salué l’initiative visant à faire participer l’ELN aux négociations. Les réformes menées par le Gouvernement sont également encourageantes et contribueront à la paix, a-t-il ajouté, soulignant également la nécessité de s’attaquer au trafic de drogue. Il s’est également félicité des efforts de la Colombie pour améliorer ses relations avec le Venezuela.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a apprécié que le Gouvernement du Président Petro ait manifesté, depuis sa campagne électorale, son engagement à pleinement mettre en œuvre l’Accord de paix. Il a relevé que le Président Petro a manifesté son intention de parvenir à une paix totale en commençant à prendre des mesures en ce sens. Le représentant brésilien a ainsi noté avec satisfaction la réactivation de la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’application de l’Accord final, ainsi que l’avancée du dialogue avec l’Armée de libération nationale (ELN). Face toutefois aux violences qui persistent, le représentant a plaidé pour que l’État colombien puisse déployer ses capacités sur tout le territoire. Il a aussi recommandé d’améliorer les politiques sociales dans les régions historiquement négligées, qui furent affectées par des décennies de conflit. Il a assuré que le Gouvernement brésilien est disposé à soutenir des initiatives visant à promouvoir le développement économique et social de ces communautés.
Concernant le renouvellement du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, le délégué a rappelé que la Colombie est un cas particulier inscrit à l’ordre du jour du Conseil de sécurité de sa propre initiative, insistant sur le rôle subsidiaire du Conseil dans ce processus. Il a estimé que les stratégies plus larges de développement et de sécurité sont les prérogatives uniques de l’État colombien. Il a aussi réaffirmé que si le Conseil est important pour la Colombie, la Colombie est également importante pour le Conseil. Il a conclu en félicitant le Gouvernement et le peuple colombiens pour leurs efforts inlassables visant à trouver et à consolider une voie de paix et de prospérité pour tous, et en saluant la volonté politique de faire le nécessaire pour contrôler la violence et apporter le développement dans les campagnes et les zones qui, historiquement, manquaient du soutien de l’État. Il a dit avoir confiance dans la volonté et l’ingéniosité du peuple colombien pour continuer à aller de l’avant, malgré les difficultés.
M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est félicité du rôle primordial que continue à jouer la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie. Le 3 octobre dernier, a-t-il informé, le Secrétaire d’État américain, M. Anthony Blinken, s’est rendu à Bogota pour la signature d’un accord relatif au chapitre de l’Accord de paix final consacré aux questions ethniques. Le délégué a souligné l’importance de rendre justice aux peuples « traditionnels » du pays. Il a jugé essentiel de préserver les acquis engrangés depuis la signature de l’Accord de paix de 2016, tout en déplorant les massacres et violences perpétrés contre les peuples autochtones du département de Putumayo par des cartels de la drogue ou par des groupes terroristes. De même, un nombre élevé d’anciens combattants ont été tués, en juillet dernier, y compris des femmes. Le délégué a souhaité que les trafiquants de stupéfiants soient traduits devant la justice.
M. GENG SHUANG (Chine) a dit appuyer le Gouvernement dans ses efforts de promotion de la paix et du développement social et économique. Le dialogue est un bon moyen de régler les divergences, a ajouté le représentant, disant espérer que toutes les parties, avec l’appui des Nations Unies et des parrains de l’Accord de paix aideront à parvenir à cet objectif. Il a espéré aussi que les autres groupes n’ayant pas signé cet accord le rejoindront. Alors que le processus de paix prend racine en Colombie, elle ne pourra s’établir durablement sans l’appui des Nations Unies, a-t-il constaté. Pour cette raison, la Chine appuie le renouvellement du mandat de la Mission et appelle tous les États à apporter à la Colombie toute aide voulue.
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a indiqué qu’en temps de crise et de tumulte sur la planète, le pouvoir du dialogue se révèle indispensable, comme on le constate à travers les efforts du Président Petro en Colombie. Plusieurs initiatives ont été lancées pour promouvoir la coexistence entre les populations qui se sont avérées très utiles pour réduire les attaques contre les dirigeants locaux. La déléguée s’est félicitée des plans d’action de réinsertion des anciens combattants mis en œuvre dans plusieurs régions, ce qui permettra d’avancer vers un avenir pacifique. Elle a salué par ailleurs le fait que l’accent soit mis sur les affaires traitées par la nouvelle Juridiction spéciale pour la paix.
M. ÁLVARO LEYVA DURÁN, Ministre des affaires étrangères de la Colombie, a salué le dernier rapport du Secrétaire général qui reflète les étapes franchies dans la mise en œuvre du processus de paix et l’évolution de la situation depuis que Gustavo Petro et Francia Márquez ont prêté serment en tant que Président et Vice-Présidente de la Colombie, respectivement, le 7 août dernier. Parmi les grandes priorités du nouveau Gouvernement, le Ministre a cité l’engagement en faveur de la construction d’une paix durable, avec et pour les Colombiens; l’appui à la participation égale des femmes; la tolérance zéro pour la corruption; et les dialogues régionaux de sorte que les autorités locales et les communautés contribuent à la définition des politiques. La Colombie s’est aussi engagée en faveur d’une transition vers une énergie propre et de la protection de l’Amazonie colombienne et son fleuve, tout en continuant à lutter contre les drogues et l’impunité. La réforme agraire est aussi l’une des grandes priorités du Gouvernement, a poursuivi M. Leyva Durán, ce qu’il a prouvé par la consolidation du cadastre polyvalent et l’achat de 3 millions d’hectares dépossédés.
« Nous avons mis les choses en marche », s’est félicité le Ministre, expliquant aussi que, dorénavant, les campagnes électorales seraient financées par les pouvoirs publics. Il a également mis en exergue l’inclusion citoyenne, les garanties de réconciliation, de cohésion et tolérance, et la non-discrimination. Il y a beaucoup à dire sur les drogues, a poursuivi M. Leyva Durán, en appelant de ses vœux un réexamen complet de la stratégie nationale, déjà amorcée, et internationale. « La Colombie en a assez de la violence provoquée par ce maudit trafic des drogues », a-t-il lancé, rappelant comment le Président Petro avait témoigné de cette situation devant l’Assemblée générale en septembre en déclarant « je viens d’un pays ensanglanté ». M. Leyva Durán a signalé qu’hier il avait tenu une réunion avec le Secrétaire général et d’autres hauts fonctionnaires pour convoquer une conférence sur la problématique des pays consommateurs de drogue. Il a demandé qu’une proposition officielle soit présentée à cet effet. Le Ministre colombien a ensuite consacré son allocution aux différentes mesures prises et envisagées en faveur des peuples premiers et autochtones, pour réparer une injustice historique à leur endroit. Les dialogues avec l’Armée de libération nationale (ELN) ont repris et des contacts ont été établis avec d’autres groupes qui restent en marge de l’Accord de paix final. Le Gouvernement travaille d’autre part sur les questions des réparations aux victimes. En conclusion, M. Leyva Durán a exhorté les membres du Conseil à agir à l’unisson et veiller à « ne pas permettre qu’on nous détruise la planète ».