En cours au Siège de l'ONU

8992e séance – matin
CS/14828

Conseil de sécurité: la présidence polonaise de l’OSCE fait part de ses efforts pour contribuer à un règlement pacifique du conflit en Ukraine

Le Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), M. Zbigniew Rau, a souligné ce matin devant les membres du Conseil de sécurité la nécessité d’une coopération étroite avec l’ONU au moment où les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et le droit international sont violés de manière flagrante au cœur même de l’Europe.   M. Rau, qui est Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a appelé à tout faire pour mettre fin à l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine et à rechercher un compromis entre les parties au conflit.  Les membres de l’OSCE, « qui s’étendent de Vancouver à Vladivostok », visent le même objectif, « régler pacifiquement les différends », a salué la Secrétaire générale adjointe Rosemary DiCarlo. 

L’OSCE n’est ni un ennemi ni une menace pour la Russie ou son peuple, a clarifié son Président en exercice.  Il a rappelé que la Russie s’était vu offrir un forum pour discuter de toutes ses préoccupations sécuritaires ainsi qu’un éventail complet d’options pour s’engager à les résoudre pacifiquement.  Il a regretté que cela ne l’ait pas empêchée de renforcer sa présence militaire aux frontières ukrainiennes, puis de lancer, le 24 février, une « agression à grande échelle non provoquée, injustifiée et préméditée de l’Ukraine ».  M. Rau a jugé que les tentatives « perverses » de la Russie de justifier cette « opération militaire » sont « un affront à la Charte des Nations Unies et à l’Acte final d’Helsinki ».  

L’échec de l’opération a mené le Kremlin à cibler la population civile et les infrastructures dans le but de briser l’esprit du peuple ukrainien, a accusé M. Rau qui a assimilé ces attaques à « du terrorisme d’État ».   Les écoles, les hôpitaux et les crèches sont délibérément la cible d’armes interdites au niveau international, « comme si les Conventions de Genève et le droit humanitaire n’avaient jamais existé », a-t-il déploré.  Il a prévenu que la communauté internationale dispose d’instruments pour tenir pour responsables ceux qui commettent des crimes de guerre et leurs complices. 

Après avoir demandé au Bélarus de ne pas participer à l’entreprise cruelle de la Russie, M. Rau a rappelé que 141 États Membres des Nations Unies ont demandé à M. Putin d’arrêter cette guerre et d’honorer ses obligations et engagements internationaux.   La porte de la diplomatie est toujours ouverte, a-t-il souligné en demandant à la Russie de s’engager dans le dialogue pour rechercher une solution pacifique à la crise.  

Soulignant l’objectif primordial de règlement pacifique des différends de l’OSCE, Mme Rosemary DiCarlo, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a appelé catégoriquement à « ne permettre aucune remise en cause de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues ».  Elle a assuré que l’ONU est engagée avec des partenaires clefs comme l’OSCE en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et d’une solution diplomatique durable. 

Mme DiCarlo a cependant regretté que les processus dirigés par l’OSCE et soutenus par la communauté internationale soient « ouvertement remis en question par les parties qui y prennent part ».  Elle a demandé à celles-ci de s’engager à nouveau envers les principes de l’Acte final d’Helsinki, de la Charte de Paris et d’autres accords historiques qui constituent le fondement de l’architecture de sécurité européenne.   À cet égard, elle a pris note des efforts déployés par le Président en exercice pour lancer un « Dialogue renouvelé de l’OSCE sur la sécurité européenne ». 

La Fédération de Russie a pourtant estimé que « la présidence polonaise de l’OSCE a échoué dans sa mission ».   Elle a aussi questionné le rôle de médiation de la Secrétaire générale adjointe et a accusé l’ONU de soutenir une partie au conflit.   Le délégué russe a mis sur le compte de l’Ukraine l’aggravation de la crise « qui a forcé la Russie à envoyer une opération militaire spéciale dans ce pays ».  

« Kiev a saboté ses propres obligations et a tout fait pour détruire les accords de Minsk », a asséné la délégation russe qui a aussi pointé du doigt l’Occident parmi les saboteurs de ces accords et accusé l’OTAN d’avoir « gonflé » l’Ukraine en lui envoyant des armes modernes, des instructeurs militaires et en contribuant à la militarisation de la région.  

Le Kenya, le Brésil et le Mexique, notamment, ont salué l’engagement de l’OSCE pour mettre fin au conflit en Ukraine.  Mais « comment traduire les principes d’Helsinki dans le contexte sécuritaire post guerre froide », s’est interrogé le Gabon.  D’autant que les textes fondateurs de l’OSCE -l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris- sont violés « de façon flagrante » par la Russie, a dénoncé la France en accusant la Russie d’avoir « menti ».  La Chine a espéré voir appliquer le principe de sécurité indivisible de l’Acte final d’Helsinki sans oublier de prendre en considération les préoccupations sécuritaires des autres États. 

Après avoir dénoncé les « horribles dévastations contre un autre État Membre de l’ONU » et appelé la Russie à immédiatement cesser toutes les hostilités, à retirer ses forces d’Ukraine et à emprunter la voie de la diplomatie, les États-Unis ont salué le lancement du Mécanisme de Moscou de l’OSCE en vue de créer une mission d’experts chargée de récolter les preuves des violations des droits de l’homme, du droit international humanitaire et des éventuels crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par les forces russes sur le territoire de l’Ukraine.  Cette dernière a abondé en souhaitant que l’OSCE contribue à la mise en œuvre de la résolution ES/11-1 « Agressions contre l’Ukraine », adoptée le 2 mars par l’Assemblée générale réunie en session d’urgence.  En dernier lieu, l’Ukraine a plaidé pour la survie de l’ONU et de l’OSCE et pour la « députinisation » de la Russie.  

La plupart des délégations ont rendu hommage au journaliste Brent Renaud tué par les forces russes à Irpin ainsi qu’à Maryna Fenina, une employée ukrainienne de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE tuée dans le bombardement russe de Kharkiv le 1er mars.   Une Mission spéciale en Ukraine qui a dû suspendre ses opérations du fait de la dégradation de la situation sécuritaire sur le terrain, a regretté le Ghana. 

Centrée de fait sur la situation en Ukraine, la réunion a aussi permis aux délégations de saluer le rôle clef et les actions de l’OSCE concernant le Haut-Karabakh, la Géorgie, le Kosovo et la Bosnie-Herzégovine. 

EXPOSÉ DU PRÉSIDENT EN EXERCICE DE L’ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE

Déclarations

M. ZBIGNIEW RAU, Ministre des affaires étrangères de la Pologne et Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a souligné la nécessité d’une coopération étroite au moment où les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et le droit international sont violés de manière flagrante au cœur même de l’Europe.  Il a appelé à faire tous les efforts possibles pour mettre fin à l’agression militaire de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  L’OSCE a été conçue comme une plateforme pour désamorcer les tensions, faciliter le dialogue, réduire le risque d’escalade militaire et prévenir les conflits, a-t-il rappelé en expliquant que l’objectif de la présidence polonaise de l’OSCE est de rechercher un compromis et de faciliter le dialogue entre les parties au conflit. 

M. Rau a rappelé qu’il a pris ses fonctions dans le contexte des tensions croissantes découlant des demandes unilatérales de garanties de sécurité de Moscou, dont la prémisse de base était fondamentalement erronée selon lui.  Il a assuré que la communauté transatlantique n’est ni un ennemi ni une menace pour la Russie ou son peuple.  Au contraire, l’Occident a toujours cherché à établir un cadre efficace de coopération avec Moscou offrant à la Russie un forum pour discuter au sein de l’OSCE de toutes ses préoccupations liées à la sécurité européenne, a-t-il rappelé.  Il a indiqué que l’OSCE était prête à envisager de bonne foi de nouvelles voies de coopération à condition qu’elles contribuent à la stabilité et à la sécurité dans l’espace de l’OSCE.  « La Russie disposait d’un éventail complet d’options pour s’engager pacifiquement et diplomatiquement afin de répondre à ses préoccupations. »

Toutefois, a regretté M. Rau, la Russie ne faisait que gagner du temps continuant à renforcer sa présence militaire aux frontières ukrainiennes et semant ainsi le doute sur les intentions réelles de Moscou.  Il a rappelé que, dans la matinée du 24 février, le pire des scénarios est devenu réalité avec l’agression à grande échelle non provoquée, injustifiée et préméditée « qui a brisé nos convictions que l’horreur de la guerre en Europe appartenait au passé ».  Le Président en exercice de l’OSCE a jugé que les tentatives « perverses » de la Russie de justifier « l’opération militaire » contre un pays souverain et pacifique sont « un affront à la Charte des Nations Unies et à l’Acte final d’Helsinki ».  Pour lui, cette opération, « mal préparée et mal exécutée », s’est avérée être un échec stratégique et tactique conduisant le Kremlin à cibler la population civile et les infrastructures dans le but de briser l’esprit du peuple ukrainien. 

« C’est déplorable et honteux et cela équivaut à du terrorisme d’État ».  M. Rau a déploré que les écoles, les hôpitaux et les crèches soient délibérément la cible d’armes interdites au niveau international, « comme si les Conventions de Genève et le droit humanitaire n’avaient jamais existé ». 

Il a prévenu que la communauté internationale dispose d’instruments et de moyens pour tenir pour responsables ceux qui commettent et sont complices de crimes de guerre.   Alors qu’il est accusé de « manquer d’impartialité » par des responsables russes, le Président en exercice de l’OSCE a dit que l’impartialité s’arrête là où commence la violation flagrante du droit international et du droit international humanitaire.  Dans des moments comme ceux-ci, notre devoir moral est de maintenir la décence et l’intégrité, a-t-il ajouté.  « Nous serons jugés sur la façon dont nous répondrons à ces horreurs. »  Nous ne pouvons pas rester indifférents, a-t-il expliqué citant Elie Wiesel qui a écrit que: « ... l’indifférence est toujours l’amie de l’ennemi, car elle profite à l’agresseur -jamais à sa victime, dont la douleur est amplifiée lorsqu’il ou elle se sent oubliée.  Le prisonnier politique dans sa cellule, les enfants affamés, le réfugié sans abri- ne pas répondre à leur détresse, ne pas soulager leur solitude en leur offrant une étincelle d’espoir, c’est les exiler de la mémoire humaine.  Et en niant leur humanité, nous trahissons la nôtre ». 

Réitérant que c’est la Russie, soutenue par le régime du Bélarus, qui a agi en dehors des limites du droit international, M. Rau a déclaré que ce sont les dirigeants russes qui provoquent l’isolement croissant du pays et du peuple russe.  « Il est difficile d’ignorer les 141 États Membres qui ont demandé à M. Putin d’arrêter cette guerre. »  Minsk a été averti de ne pas participer à cette entreprise cruelle, a-t-il rappelé en appelant la Russie à honorer ses obligations et engagements internationaux.  Pour le Président en exercice de l’OSCE, toute solution politique durable doit respecter pleinement la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’Ukraine.  La porte de la diplomatie est toujours ouverte, a indiqué M. Rau invitant la Russie à engager un dialogue constructif et substantiel pour rechercher une solution pacifique à la crise actuelle. 

Il a ajouté que l’agression de la Russie menace l’existence même de l’OSCE et soulève des questions non seulement sur l’avenir de l’Organisation, mais aussi sur la stabilité de l’ordre fondé sur des règles.  Quelle efficacité pouvons-nous avoir si l’une des principales parties prenantes justifie à plusieurs reprises le recours à la force pour obtenir des concessions territoriales et politiques? a demandé M. Rau rappelant que l’OSCE est ancrée dans le contexte de la diplomatie multilatérale.  Compte tenu de son caractère inclusif, l’OSCE est la bonne plateforme pour le dialogue et le règlement pacifique des conflits, a plaidé son Président. 

Toutefois, il a demandé si l’OSCE sera en mesure de réaliser des progrès sur les conflits régionaux et prolongés, lorsque la confiance a été brisée.  L’évolution de la situation sur le terrain déterminera probablement la portée et le caractère de l’engagement futur de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine, a indiqué M. Rau espérant que le personnel de la Mission ainsi que l’équipe du Coordonnateur du projet de l’OSCE en Ukraine seront en mesure de poursuivre leur importante mission.  La présidence polonaise de l’OSCE souhaite accroître son efficacité à condition qu’il y ait un intérêt et un soutien plus larges de la part de la majorité des parties prenantes, a annoncé M. Rau. 

Appelant les parties aux conflits à respecter le droit humanitaire et à s’abstenir de toute activité dirigée contre la population civile et les infrastructures, M. Rau a assuré que l’OSCE est prête à coopérer étroitement avec les agences humanitaires des Nations Unies pour faciliter et fournir l’assistance nécessaire y compris la création de voies d’évacuation efficaces pour la population civile.  Il faut en outre rapidement agir lorsqu’il existe des récits fiables d’abus du droit humanitaire, a-t-il reconnu. 

Les événements dramatiques en Ukraine nous ont ouvert les yeux sur la nécessité d’un engagement renouvelé envers les principes et engagements de l’OSCE qui est appelée à évoluer à la suite de l’expérience actuelle, a conclu M. Rau.  « La communauté internationale, l’ONU ainsi que l’OSCE doivent renforcer leurs efforts pour rétablir la paix et revenir à nos principes et à nos valeurs à savoir l’intégrité du droit international et la stabilité de l’ordre mondial. » 

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a déclaré que le conflit tragique en Ukraine, qui s’est encore aggravé au cours du week-end, illustre de manière éclatante l’importance des mécanismes pour maintenir et renforcer la paix et la sécurité européennes et internationales.  « Née de la guerre froide », l’OSCE a été au centre des efforts visant à rassembler ses membres, « qui s’étendent de Vancouver à Vladivostok », autour d’un objectif primordial: régler pacifiquement les différends.  Conformément au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, l’OSCE complémente l’action de l’ONU, notamment pour résoudre les conflits dans la région. 

En 1993, l’ONU et l’OSCE ont établi un accord-cadre de coopération et leur engagement commun en faveur de la diplomatie préventive, de la médiation, de la consolidation de la paix et du programme sur les femmes et la paix et la sécurité a été réaffirmé par la déclaration conjointe entre le Secrétaire général et la Présidente en exercice en 2019.  En ce qui concerne l’Ukraine, l’ONU a toujours soutenu le travail de l’OSCE, en particulier sa Mission spéciale d’observation et le Groupe de contact trilatéral dirigé par l’OSCE, a rappelé la haute fonctionnaire.  La guerre en cours dans ce pays est à son avis la mise à l’épreuve la plus sérieuse à laquelle l’OSCE et les cadres régionaux connexes ont été confrontés depuis leur création, « l’invasion russe [ayant] profondément ébranlé les fondements de l’architecture de sécurité européenne ». 

Mme DiCarlo a rappelé avoir dit, il y a trois jours dans cette même salle, que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) a reçu des informations crédibles selon lesquelles les forces russes se servent d’armes à sous-munitions, y compris dans des zones peuplées.  Les attaques aveugles, y compris celles utilisant ce type d’armes, sont interdites par le droit international humanitaire, a-t-elle souligné.  La Secrétaire générale adjointe s’est ensuite dite profondément troublée par les informations selon lesquelles des fonctionnaires municipaux ukrainiens dans les régions du pays contrôlées par la Russie ont été enlevés.  « Des informations font également état de civils, dont des journalistes, pris pour cible, manifestement par les forces russes », s’est-elle alarmée. 

Nous ne devons permettre aucune remise en cause de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, a affirmé Mme DiCarlo, en précisant que l’ONU continue d’intensifier non seulement son soutien humanitaire au peuple ukrainien, mais aussi son engagement avec des partenaires clefs comme l’OSCE en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et d’une solution diplomatique durable.  Mais l’ONU reste préoccupée par le démantèlement des mesures de confiance de longue date, des traités relatifs aux armements et d’autres cadres qui ont été conçus et convenus pour renforcer la sécurité régionale, dont les mécanismes de médiation régionaux. 

Les processus dirigés par l’OSCE et soutenus par la communauté internationale sont désormais « ouvertement remis en question par les parties qui y prennent part », a-t-elle déploré.  Dans ce contexte, a ajouté la Secrétaire générale adjointe, il est plus important que jamais que toutes les parties s’engagent à nouveau envers les principes de l’Acte final d’Helsinki, de la Charte de Paris et d’autres accords historiques qui constituent le fondement de l’architecture de sécurité européenne.  À cet égard, elle a pris note des efforts déployés par le Président en exercice polonais sous la direction du Ministre Zbigniew Rau pour lancer un « Dialogue renouvelé de l’OSCE sur la sécurité européenne ».  Elle a prévenu que la façon dont l’OSCE et d’autres acteurs régionaux choisiront d’assurer l’avenir de la coopération européenne en matière de sécurité aura un impact au-delà de l’Europe.  Les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, et ceux potentiellement à venir, exigent que l’ONU et l’OSCE travaillent encore plus étroitement ensemble, a conclu Mme DiCarlo. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a réitéré sa condamnation de l’agression militaire contre l’Ukraine qui est une violation grave du droit international.  Elle a exigé que la Russie retire immédiatement ses forces du territoire ukrainien et mette un terme à ses menaces et actions militaires.  Elle a fait remarquer que la guerre menée par la Russie en milieu urbain et l’usage d’armes lourdes occasionnent des souffrances terribles pour les civils, rappelant l’obligation de la Russie de protéger les civils.  Nous sommes révoltés par le non-respect du droit international humanitaire et l’aggravation de la crise humanitaire, a dit la déléguée, en accusant la Russie d’être la seule responsable de cette situation. Elle a par ailleurs salué l’accueil des réfugiés ukrainiens par la Pologne. 

Mme Juul a ensuite appuyé les efforts de réconciliation et de prévention des conflits menés par l’OSCE au sud du Caucase, en République de Moldova, dans les Balkans occidentaux et en Asie centrale.  Les missions, les institutions autonomes et le Secrétariat de l’OSCE doivent continuer d’être appuyés, a-t-elle dit.  Enfin, la déléguée a insisté sur le rôle crucial de l’OSCE à la lumière du climat d’instabilité qui règne en Europe. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a salué l’engagement de l’OSCE pour mettre fin à tous les conflits en Europe, y compris celui d’Ukraine.  Il a invité les membres de l’OSCE à se réengager en faveur de la stabilité.  Pour ce faire, a-t-il recommandé, il faut poursuivre la prise et le respect des mesures de confiance entre les membres. Il a insisté sur un dialogue direct entre l’Ukraine et la Fédération de Russie.  Il a ensuite regretté que la Mission spéciale de l’OSCE en Ukraine ait dû suspendre ses opérations du fait de la dégradation de la situation sécuritaire sur le terrain.  Le représentant a conclu son intervention en affirmant que son pays appuie le renforcement de la coopération entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a rendu hommage à Maryna Fenina, une employée ukrainienne de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE tuée dans le bombardement russe de Kharkiv le 1er mars alors qu’elle devait recevoir des médicaments pour les membres de sa famille.  Elle a fait remarquer que la réunion d’aujourd’hui se déroule au milieu de l’invasion non provoquée de l’Ukraine par la Russie qui est un membre de l’OSCE, accusant donc celle-ci de fouler au pied les règles en faisant la guerre contre un autre membre.  La guerre du Président Putin viole les principes fondamentaux de l’OSCE et de l'ONU, a tranché la représentante en prévenant que cette guerre est « une menace pour nous tous et pour les systèmes que nous avons construits ensemble pour préserver la paix ».  C’est aussi une menace pour la stabilité de l’économie mondiale et pour des millions de personnes en Europe, en Afrique et en Asie qui dépendent de la production agricole des vastes terres agricoles de l’Ukraine, a-t-elle prévenu. 

Saluant les efforts de l’OSCE pour avoir tenté d’éviter cette catastrophe, Mme Woodward a rappelé que la Russie a refusé l’offre de soulever sa préoccupation en matière de sécurité dans le cadre du Dialogue européen renouvelé sur la sécurité de l’OSCE.  Pour sa part, l’Ukraine a invoqué le mécanisme de réduction des risques du Document de Vienne de l’OSCE pour désamorcer la situation.  La Russie a refusé de s’engager, a regretté la représentante.  Elle a annoncé que l’OSCE travaille depuis des années pour soutenir la mise en œuvre des accords de Minsk.  Enfin, notant que la Russie est accusée des crimes de guerre les plus graves pour avoir bombardé des écoles, des hôpitaux et des maisons et en ciblant les familles qui tentaient de se mettre en sécurité, la déléguée a demandé un accès pour la mission d’établissement des faits de l’OSCE afin qu’elle puisse recueillir des preuves. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé qu’il y a un mois, ce Conseil se réunissait à l’initiative de la Russie pour discuter de la mise en œuvre des accords de Minsk avec la participation de représentants de l’OSCE.  Lors de cette réunion, le Vice-Ministre russe affirmait que la Russie n’avait pas l’intention d’attaquer l’Ukraine et appelait à la mise en œuvre de ces accords.  M. de Rivière a aussi rappelé qu’avec son homologue allemand, ils rendaient compte des efforts de Paris et Berlin pour progresser dans la mise en œuvre de la résolution 2202 du Conseil de sécurité.  En février, la présidence polonaise en exercice de l’OSCE proposait de mettre en place un dialogue renouvelé sur la sécurité européenne, afin de répondre notamment aux préoccupations sécuritaires exprimées par la Russie au cours des derniers mois. 

« La réalité est cruelle aujourd’hui: la Russie a menti », a tranché le représentant en accusant ce pays d’avoir violé, « de façon flagrante », la Charte des Nations Unies et les textes fondateurs de l’OSCE, l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris, sur lesquels repose la stabilité de l’Europe.  Il a dit que la Russie a trahi tous ses engagements en faveur de la mise en œuvre des accords de Minsk, signés par Moscou comme par l’OSCE et endossés par une résolution du Conseil de sécurité.  Le représentant de la France a jugé que si l’agression russe, soutenue par le Bélarus, est dévastatrice pour l’Ukraine et les Ukrainiens, ses conséquences sont encore plus vastes car elle menace aussi le multilatéralisme et le droit international, ainsi que les institutions qui en sont les garantes, notamment l’ONU et l’OSCE.  La Russie, a-t-il ajouté, porte ainsi directement atteinte aux intérêts de tous les États qui se mobilisent au sein de ces deux organisations pour rechercher des solutions négociées face aux crises et aux défis qu’ils rencontrent. 

Le délégué a donc demandé « une nouvelle fois » à la Russie de cesser immédiatement les hostilités en Ukraine, de retirer ses troupes de l’ensemble du territoire ukrainien et de respecter le droit international humanitaire et les droits de l’homme. 

Par ailleurs, la France, a-t-il dit, « à la fois en sa qualité de coprésidente du Groupe de Minsk de l’OSCE et de présidente du conseil de l’Union européenne », reste pleinement mobilisée pour contribuer au dialogue entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.  Les réunions qui se sont tenues en février et en décembre entre le Président azerbaïdjanais et le Premier Ministre arménien ont permis de définir des orientations en ce sens, a-t-il noté.  Revenant à la situation en Ukraine, le représentant a déclaré que son pays est déterminé « à ne pas laisser la Russie entraîner dans sa chute les organisations multilatérales de sécurité collective ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a fait remarquer que la communauté internationale, y compris l’OSCE, n’a ménagé aucun effort pour trouver une solution pacifique en Ukraine.  La réalité montre que ces efforts étaient voués à l’échec parce l’invasion de l’Ukraine était préméditée, c’était un projet qui devait être exécuté à tout prix, a relevé le délégué.  « C’était l’obsession du Kremlin. »  Il a estimé que la très grande divergence entre la Russie et l’ordre sécuritaire européen existant, qui repose sur le droit, est structurelle.  « Alors que l’on nous sert ici toutes sortes de fantasmes qui fondent comme neige au soleil, les véritables préoccupations sont bien ces principes démocratiques sur lesquels ce système est basé. »  Il a estimé que, selon le concept sécuritaire au sens large de l’OSCE, il y a un continuum entre répression intérieure et agression extérieure.  « La démocratie, les droits humains et l’état de droit sont des éléments clefs pour la sécurité entre États. »

M. Hoxha a appuyé l’initiative consistant à invoquer le Mécanisme de Moscou de l’OSCE pour établir des faits de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Il a espéré que les sanctions prises contre la Russie permettront au peuple russe de voir la réalité et de comprendre pourquoi le monde entier qualifie la Russie « d’agresseur ».  Enfin, il a rappelé que la situation en Ukraine est un défi majeur pour la sécurité européenne, y compris l’OSCE.  « Un homme a commencé cette guerre, il peut l’arrêter s’il le veut », a conclu le délégué. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a relevé que le conflit en Ukraine, avec son lot de souffrances humaines, de déplacements forcés, d’urgences humanitaires et de risques systémiques, est un défi extraordinaire pour l'ONU et l’OSCE dans leur mission conjointe de garantir la paix et la sécurité en Europe.  Il a appelé toutes les parties à respecter pleinement le droit international humanitaire et à adopter des mesures pour protéger les civils, notamment en garantissant un accès humanitaire immédiat, complet, sûr et sans entrave. Le représentant a noté que le conflit aura également un impact significatif sur les matières premières et les prix de l’énergie, des effets qui pourraient être encore aggravés par l’application de sanctions unilatérales. Il a souligné que les pays en développement risquent de supporter un fardeau disproportionné de tels chocs négatifs.  Il n’y a pas d'alternative aux pourparlers diplomatiques, a poursuivi le délégué, souhaitant que les préoccupations sécuritaires de toutes les parties soient traitées par des négociations sérieuses. Dans ce contexte, l’OSCE a un rôle clé à jouer pour soutenir les efforts internationaux visant à mettre fin à la crise actuelle, a-t-il estimé en soulignant aussi l’expertise « précieuse » de l’OSCE pour surveiller un cessez-le-feu avec un désengagement complet des troupes et du matériel militaire sur le territoire. 

Outre le conflit en Ukraine, le délégué a mentionné la crise en cours en Géorgie, ainsi que le différend entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan sur la région du Haut-Karabakh.  En ce qui concerne la situation en Géorgie, il a félicité l’OSCE pour son plein soutien aux discussions de Genève.  Ce processus de dialogue, coprésidé par l’OSCE, l’ONU et l’UE, est un exemple important de coopération ONU-OSCE dans le règlement des conflits, a-t-il souligné.  Il a également salué le travail de l’OSCE pour faire progresser le programme pour les femmes, et la paix et la sécurité, notamment l’implication des femmes dans toutes les étapes des processus de paix. 

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a déclaré que le temps est grave pour la sécurité européenne et internationale à la suite de l’agression de la Russie contre l’Ukraine.  Il a dénoncé la mort du journaliste Brent Renaud tué par les forces russes alors qu’il couvrait des réfugiés quittant un poste de contrôle à Irpin.  « Sa mort montre que la Russie ira jusqu’au bout pour faire taire les informations qui remettent en question sa propagande. »  Le représentant a souligné l’importance de préserver la sécurité des journalistes avant de dénombrer 13 000 morts et des dizaines de milliers de blessés depuis l’invasion et l’occupation de la Crimée par la Russie et le lancement de l’agression russe dans l’est de l’Ukraine.  Le représentant a ainsi dénoncé les « horribles dévastations contre un autre État Membre de l’ONU », qui ont entraîné également le déplacement de plus de 2,5 millions de personnes.  La Russie doit immédiatement cesser toutes les hostilités, retirer ses forces d’Ukraine et emprunter la voie de la diplomatie, a ordonné le délégué.  Selon lui, la coopération entre l’ONU et l’OSCE reste plus essentielle que jamais.  Il a dénoncé dans la foulée la Russie et le Bélarus de continuer de violer les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et de l’Acte final d’Helsinki. 

Le délégué américain a accusé la Russie de faire de la désinformation et de détourner l’attention du Conseil de son agression réitérant qu’elle mène « une guerre de choix » brutale, préméditée et non provoquée contre l’Ukraine avec le soutien du « régime de Loukachenko ».  La Russie ne veut pas que son peuple apprenne la vérité épouvantable sur les morts et les destructions insensées qu’elle cause en Ukraine, a-t-il analysé en remarquant qu’elle a forcé les médias indépendants nationaux et étrangers à suspendre leurs activités en Russie ou à fermer définitivement et bloquer l’accès aux sites d’information indépendants et aux réseaux sociaux. 

Le représentant des États-Unis a dit que les rapports impartiaux de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE ont permis de comprendre la situation en matière de sécurité sur le terrain.  Il a présenté ses condoléances pour la perte de Maryna Fenina, membre du personnel de la Mission qui a été tuée le 1er mars par les bombardements russes à Kharkiv.  Le représentant s’est réjoui du lancement du Mécanisme de Moscou de l’OSCE en vue de créer une mission d’experts chargée de récolter les preuves des violations des droits de l’homme, du droit international humanitaire et des éventuels crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par les forces russes sur le territoire de l’Ukraine. 

Enfin, le représentant a regretté le rejet par la Russie de l’invocation par l’Ukraine du mécanisme de réduction des risques du Document de Vienne ainsi que le refus du Bélarus de répondre aux États baltes invoquant le même mécanisme.  Avant de conclure, il a rappelé les autres priorités de l’OSCE comme l’occupation par la Russie de certaines parties de la Géorgie, ainsi que la présence de ses forces en Moldavie et en Géorgie.  Il a exhorté l’Arménie et l’Azerbaïdjan à poursuivre leur engagement diplomatique afin de trouver des solutions globales à toutes les questions en suspens liées au conflit du Haut-Karabakh. 

M. JUAN RAMON DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a dit partager la priorité identifiée par la présidence polonaise en exercice de l’OSCE, à savoir le maintien d’une approche de la sécurité axée sur les personnes.  Il a fait remarquer que dans tout conflit armé, et celui en Ukraine ne fait pas exception, la population civile est généralement la plus touchée.  Il a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure de se prononcer sur ce qu’il a qualifié de violation de la paix et de la sécurité internationales.  Tout en reconnaissant le rôle essentiel joué jusqu’à présent par la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine, le représentant a pris acte de la décision du Conseil spécial permanent de l’OSCE de demander à la Mission de réorienter temporairement ses fonctions pour soutenir les tâches urgentes d’assistance humanitaire.  Il est donc essentiel, pour le délégué, que cette Mission spéciale ait un accès complet et sécurisé au terrain afin de pouvoir remplir son mandat et les tâches sensibles qui lui sont assignées. 

M. de la Fuente Ramírez a souhaité que, dans un avenir proche, l’OSCE reprenne également ses fonctions dans le cadre du Groupe de contact trilatéral. Car c’est là, « dans le dialogue politique », que des alternatives peuvent être trouvées pour surmonter la crise, a-t-il estimé.  Depuis sa création, a conclu le représentant, l’OSCE a joué un rôle clef dans l’instauration de la confiance, la prévention des conflits et la gestion des crises par la diplomatie, que ce soit en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo ou dans le cadre du conflit du Haut-Karabakh. 

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a prévenu que si le conflit armé en Ukraine ne cesse pas, les conséquences seront catastrophiques pour l’Europe mais aussi pour le monde, en particulier les économies fragiles du Sud.  Il a jugé capital de redéfinir une architecture européenne qui soit fermement basée sur les principes fondamentaux que sont le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États et le règlement pacifique des différends.  Le délégué a demandé une cessation immédiate des hostilités en Ukraine et le retour à la diplomatie pour trouver une solution politique.  Au Kosovo, a-t-il poursuivi, il est de la responsabilité de toutes les parties, y compris l’OSCE, d’instaurer un environnement propice à une stabilité sur le long terme.  Il a ensuite exhorté les autorités de Bosnie-Herzégovine à se conformer pleinement à l’Accord-cadre global, avant d’appuyer les efforts pour un règlement durable de la situation au Haut-Karabakh.  « Un dialogue véritable doit être toujours la première option pour résoudre les conflits. » 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a rappelé que depuis bientôt 50 ans d’existence, l’OSCE a dû faire face à de nombreuses crises qui ont, sinon ébranlé ses fondements, du moins questionné ses principes directeurs.  Un des questionnements qui se pose avec acuité est de savoir « comment traduire les principes convenus à Helsinki dans le contexte sécuritaire post guerre froide ».  Il s’est interrogé sur le potentiel de prévention des conflits de l’OSCE alors que nous assistons, avec une certaine inquiétude, à la montée des nationalismes en Europe, aux tensions sécessionnistes dans le sud-est de l’Europe, à des crises multiples en Asie centrale ou encore à de nombreuses menaces sécuritaires découlant de la montée du terrorisme.  Il a noté que les derniers événements, marqués par la guerre en Ukraine, interpellent l’OSCE dans sa capacité à jouer son rôle de pont entre l’Est et l’Ouest qui est de son ressort territorial, ainsi que sa capacité à mettre en marche ses mécanismes de prévention des conflits pour prévenir tout conflit armé dans sa circonscription. 

Le représentant du Gabon a affirmé que son pays n’a pas d’expérience de la guerre et n’a jamais pris part à un conflit armé.  C’est peut-être pour cette raison, a-t-il expliqué, que le Gabon a toujours préféré le dialogue à la rupture et qu’il a toujours privilégié les solutions politiques à l’usage de la force.  Il a terminé son propos en appelant chacun des membres du Conseil et au-delà, chaque membre de la communauté internationale, à se réapproprier et se réconcilier avec l’engagement commun d’assurer la paix et la sécurité internationales pour les peuples du monde. 

M. JUN ZHANG (Chine) a reconnu le travail remarquable qu’a fait l’OSCE depuis de nombreuses années notamment en matière de sécurité.  La crise en Ukraine nous a poussé à nous concentrer sur la sécurité commune et à trouver de nouvelles avenues en se basant sur l’histoire, a lancé le représentant soulignant la nécessité du dialogue et de la coopération.  Plus les risques sont nombreux, plus il faut encourager la coopération et la confiance, a-t-il plaidé en espérant que les divergences entre les États ne deviennent pas un motif de confrontation.  Rappelant le principe de sécurité indivisible de l’Acte final d’Helsinki, il a appelé à l’appliquer afin de résoudre le conflit en Ukraine tout en prenant en considération les préoccupations sécuritaires des autres États. 

La position de la Chine sur l’Ukraine est claire, a insisté le représentant,  à savoir la nécessité de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les États assortie de l’importance de prendre en considération les préoccupations de sécurité des autres États.  Le représentant a appelé au dialogue et aux négociations.  La communauté internationale doit encourager les pourparlers en cours entre l’Ukraine et la Russie et rassembler les conditions nécessaires, a-t-il demandé en appelant les parties à la plus grande retenue et à garantir la sécurité des civils et la création de couloirs humanitaires sûrs.  Les sanctions censées résoudre ce conflit vont créer de nouveaux problèmes et entraîner des conséquences sur les chaînes d’approvisionnement mondial y compris pour les pays en développement, a prévenu le représentant pour terminer, en appelant à la désescalade des tensions. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a estimé que les activités de l’OSCE revêtent une importance renouvelée au moment où se déroule « un nouvel épisode tragique de la longue et souvent violente histoire de l’Europe ».  La Fédération de Russie, a-t-elle exigé, doit cesser immédiatement les hostilités, retirer sans condition ses troupes de l’ensemble du territoire ukrainien et s’abstenir de toute nouvelle menace ou de l’usage de la force de quelque nature que ce soit contre l’Ukraine ou tout autre État membre de l’OSCE.  Mme Byrne Nason a rappelé que depuis 2014, la Mission spéciale d’observation en Ukraine a fait une différence significative dans la vie des personnes vivant le long de la ligne de contact dans l’est de l’Ukraine.  Elle a souligné que la mission a négocié des cessez-le-feu locaux permettant des travaux de réparation sur des infrastructures civiles essentielles donnant à des millions de personnes dans l’est de l’Ukraine l’accès aux services fondamentaux.  C’était une voix indispensable et impartiale, ainsi que les yeux et les oreilles des États participants sur le terrain, a-t-elle noté. 

Par ailleurs, la représentante a dit qu’elle continue de soutenir les efforts renouvelés en vue d’un règlement négocié, global et durable du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, en particulier sur le statut à long terme du Haut-Karabakh, considérant que le Groupe de Minsk de l’OSCE reste le format approprié pour réaliser cet objectif.  L’Irlande, a dit Mme Byrne Nason, soutient fermement l’intention de la présidence polonaise de maintenir la prévention et le règlement des conflits au premier rang des priorités de l’OSCE, y compris en Géorgie et en République de Moldova.  La représentante a enfin salué l’accent mis par la Pologne sur la réponse aux menaces nouvelles et émergentes pour la paix et la sécurité régionales, telles que l’extrémisme violent et les attaques dans le cyberespace, ainsi que les défis auxquels nous pourrions être confrontés dans un environnement post-COVID-19, grâce à un multilatéralisme efficace. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a rappelé que l’OSCE a été l’une des premières organisations régionales à condamner l’attaque terroriste perpétrée contre le Parlement indien en 2001.  Il a invité l’OSCE à rester attentive aux nouvelles menaces terroristes et à se pencher sur le plan antiterroriste en huit points élaboré par son pays en 2021.  Il a de nouveau appelé à la cessation des hostilités en Ukraine, où le bilan ne cesse de s’alourdir.  Il a mentionné l’opération Ganga conduite par son pays qui a permis l’évacuation d’Ukraine de plus de 22 500 ressortissants indiens. Le délégué a demandé des négociations pour mettre un terme aux hostilités, en ajoutant que son pays est en contact avec la Russie et l’Ukraine.  Il a souligné la nécessité de respecter la Charte de l’ONU, le droit international et la souveraineté et l’intégrité territoriale des États.  Il a appuyé les efforts pour un règlement durable de la situation au Haut-Karabakh et exhorté les parties à mettre en œuvre l’accord qui a été trouvé.  Enfin, il a remercié la Pologne pour l’aide apportée lors du rapatriement des ressortissants indiens d’Ukraine. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit n’avoir pas été surpris du discours du Président de l’OSCE.  Il a, en revanche, dit son étonnement face au discours de la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix.  Il a rappelé que vendredi dernier devant le Conseil de sécurité, Mme Rosemary DiCarlo a accusé la Fédération de Russie d’avoir bombardé des cibles civiles en citant des sources sûres.  Devant de telles affirmations, le représentant russe s’est demandé s’il devait la considérer comme une fonctionnaire onusienne ou comme la représentante d’un État Membre.  De même, si l’ONU a fait le choix de soutenir une partie au conflit, il s’est interrogé sur le rôle de médiation de l’Organisation.  Il a fait remarquer que le Secrétaire général n’a rien dit au sujet des frappes ukrainiennes au centre de Donetsk, qui ont fait 35 morts.  Il n’a pas non plus fait cas des populations du Donbass qui souffrent depuis huit ans, a-t-il déploré en regrettant que l’OSCE ait également fermé les yeux sur ces atrocités.  S’adressant ensuite à la délégation américaine, M. Nebenzia a demandé si elle savait qui était la cause des 13 000 morts du Donbass.  Déplorant le décès du citoyen américain Brent Renaud, il a affirmé que ce dernier menait des activités de cinéaste et non de journalisme, comme l’a confirmé le New York Times, et qu’il se trouvait dans une zone sous le contrôle de Kiev. 

M. Nebenzia a dit ne se faire aucune illusion sur la réunion d’aujourd'hui et a affirmé qu’elle n’est en aucun cas consacrée à l’interaction entre l’ONU et l’OSCE.  Il a noté que cette interaction a fortement diminué ces dernières années en raison de tentatives d’un « club d’États » de remplacer le fonctionnement de la Charte des Nations Unies et l’«ordre basé sur des règles ».  Pour lui, la plateforme de l’OSCE en est devenue l’exemple le plus clair.  Il a accusé l’OSCE d’avoir focalisé son attention ces derniers temps sur les pays situés à l’est de Vienne.  Il a rappelé que lorsque le Président actuel de l’organisation, M. Rau, s’est rendu à Moscou le 15 février, il y a eu de longues discussions avec les officiels russes à qui il a parlé de l’importance d’une approche proactive et positive, ainsi que de la recherche de solutions et du rejet des accusations mutuelles. 

« La présidence polonaise de l’OSCE a échoué dans sa mission, alors que nous sommes seulement à la mi-mars. »  Déjà le 5 mars, à la suite de négociations avec le Secrétaire d’État américain Anthony Blinken, M. Rau a pris la parole en tant que Président de l’OSCE contre l’un des États membres de sa propre organisation, a noté M. Nebenzia.  La présidence en exercice, a-t-il rappelé, doit s’atteler à résoudre les conflits entre les États participants, à rapprocher leurs positions, mais pas à enflammer encore plus la situation ou à « mener une campagne antirusse à l’OSCE ».  Le délégué a expliqué que c’est l’aggravation de la crise en Ukraine qui a forcé la Fédération de Russie à invoquer l’Article 51 de la Charte des Nations Unies et à envoyer une opération militaire spéciale en Ukraine.  « Par la faute de nos collègues occidentaux, l’OSCE n’a pas encore su faire face à la décision la plus importante: parvenir à une compréhension commune des fondamentaux pour une architecture de sécurité européenne respectueuse du principe d’indivisibilité. »  Le représentant a expliqué que, selon ces fondamentaux, il faut éviter de poser toute action qui améliorerait la sécurité d’un pays au détriment d’un autre.  Il a accusé « le camp de l’Ouest » d’avoir promu le principe selon lequel n’importe quel pays peut choisir des alliances pour soi, même si cela peut se faire au détriment de la sécurité d’autrui.  Selon le délégué, la situation en Ukraine est aussi la faute de la présidence polonaise de l’OSCE.  Il a estimé que l’Organisation aurait dû mettre en route la Mission approuvée par le Conseil permanent de l’OSCE qui entendait assurer la mise en œuvre complète et cohérente des accords de Minsk et assurer un dialogue direct entre Kiev, Donetsk et Louhansk. 

M. Nebenzia a également accusé Kiev d’avoir saboté ses propres obligations et d’avoir tout fait pour détruire les accords de Minsk.  La Fédération de Russie n’avait pourtant cessé d’exhorter l’Ukraine à respecter les aspirations des habitants du Donbass, notamment leur désir légitime de parler leur langue maternelle, de l’enseigner à leurs enfants, d’honorer la mémoire de ceux qui ont libéré leurs terres des nazis, et non ceux qui ont combattu aux côtés des nazis et tué des civils pendant la Grande Guerre patriotique.  Dans le même temps, l’Occident, mené par les États-Unis, au lieu d’obliger l’Ukraine à remplir ses obligations en vertu des accords de Minsk, a saboté les accords de Minsk, a regretté M. Nebenzia en accusant aussi les pays de l’OTAN d’avoir « gonflé » l’Ukraine en lui envoyant des armes modernes, des instructeurs militaires, et d’avoir contribué de toutes les manières possibles à la militarisation de la région.  Il a également accusé Kiev de violation des droits de l’homme par la promulgation de lois discriminatoires sur la langue d’État, l’éducation et les peuples, lesquelles ciblent principalement la langue russe et plusieurs millions de russophones. 

Le représentant a affirmé que les documents obtenus par l’armée russe ont permis de constater que si la Fédération de Russie n’avait pas lancé ses opérations en Ukraine, l’armée ukrainienne aurait attaqué les républiques populaires de Donetsk et de Louhansk.  « Ce n’est pas une guerre, comme beaucoup essaient de le faire croire », a-t-il souligné, arguant que c’est plutôt « une opération spéciale »  au cours de laquelle la Fédération de Russie s’attèle, avec haute précision, à désactiver les infrastructures militaires qui servaient auparavant à la militarisation de l’Ukraine, et d’une manière ou d’une autre ont été impliquées dans l’initiative du « régime de Kiev » pour soutenir une opération punitive brutale contre la population civile du sud-est de l’Ukraine.  Les postes militaires des forces armées ukrainiennes qui ont déposé les armes ne sont pas attaqués, a-t-il assuré. 

Aujourd’hui, une campagne d’information à grande échelle a été lancée contre la Fédération de Russie, a déploré le délégué qui a pris en exemple l’histoire de la maternité détruite à Marioupol. Il a regretté la reproduction du mensonge depuis la tribune du Conseil de sécurité, y voyant une provocation délibérée de ses collègues occidentaux.  Selon lui, la principale et seule menace actuelle pour les civils d’Ukraine provient des formations armées des nationalistes ukrainiens qui ont déclenché une véritable terreur envers leurs concitoyens.  Il a accusé les nationalistes d’avoir placé des chars, de l’artillerie et des lance-roquettes à côté des murs des jardins d’enfants et d’écoles, et d’avoir installé des positions de tir sur les toits des maisons.  Les militaires russes capturés sont soumis à une torture sadique a-t-il aussi dénoncé.  Il a également affirmé qu’un grand nombre de criminels en Ukraine ont été libérés des prisons et armés.  Dans ces conditions, la présidence actuelle de l’OSCE devrait en priorité assurer l’évacuation en toute sécurité des civils des zones de guerre, a—t-il réclamé. Alors que la Fédération de Russie a ouvert des couloirs humanitaires à cette fin, il a accusé Kiev de menacer ceux qui veulent sortir des villes.  

M. Nebenzia a rappelé que le 11 mars, la Fédération de Russie a soulevé au Conseil de sécurité la question de « laboratoires biologiques américains en Ukraine ».  Il a accusé les formations armées ukrainiennes de préparer activement des provocations par l’utilisation de substances vénéneuses pour accuser la Fédération de Russie d’utiliser des armes chimiques.  Enfin, M. Nebenzia a rappelé que d’autres sujets méritent l’attention de l’OSCE, en particulier le règlement pacifique et global du conflit au Haut-Karabakh.  Dans les conditions actuelles, l’OSCE reste presque la seule plateforme où un dialogue paneuropéen est possible, a-t-il noté.  Pensez aux conséquences historiques de vos actions visant à saper les fondations et toute perspective de coopération dans l’intérêt de la sécurité de tous les pays situés sur le continent européen, a-t-il lancé en direction de M. Rau. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a souligné l’importance de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, arguant que celles-ci sont les mieux placées pour trouver un compromis en vue de garantir la paix et la sécurité régionales.  Le représentant a mis l’accent sur la longue histoire de règlement de conflits de l’OSCE et estimé que cette organisation joue aujourd’hui un rôle indispensable au moment où l’Europe se heurte à sa plus grande crise depuis des décennies.  L’OSCE a aussi un rôle à jouer dans la situation humanitaire en Ukraine, a-t-il reconnu appelant à juguler le nombre croissant de population qui fuit.  Le représentant a également déclaré être préoccupé par la détérioration de la crise en Ukraine alors que le pays est le cinquième plus grand fournisseur de blé au monde et au Programme alimentaire mondial (PAM).  Il a terminé en rappelant les autres préoccupations des membres de l’OSCE en Géorgie, en Moldova, dans les Balkans et dans le Haut-Karabakh.  Nous avons besoin d’une diplomatie équilibrée et du rôle de bons offices du Président en exercice de l’OSCE, a-t-il conclu. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a commencé par féliciter le Président en exercice de l’OSCE pour la manière dont il a qualifié « très clairement » les actes de la Russie contre l’Ukraine de « crime d’agression sans provocation ni justification », accusant Moscou, « qui fait mine d’être un acteur clef du maintien de la paix et de la sécurité internationale », de faire exactement le contraire.  Il a également applaudi le Président en exercice pour sa détermination de mettre fin à la guerre sur la base du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Il lui a ensuite demandé de faciliter la remise en liberté de M. Ivan Fedorov, le maire de Melitopol, qui a été arrêté par des soldats russes le 11 mars et qui est aujourd’hui torturé, « car il refuse de collaborer avec l’agresseur ».  M. Kyslytsya a dénoncé le durcissement des « pratiques répressives » russes, y compris à l’encontre de femmes. 

Les troupes russes ne sont pas les bienvenues « nulle part en Ukraine », a-t-il poursuivi, et c’est la raison pour laquelle elles ont abandonné « toute retenue », selon lui.  Il a cité Marioupol comme l’exemple le plus frappant, avec presque 2 200 habitants victimes des bombardements russes, ce qui représente « au moins 11 salles de l’Assemblée générale des Nations Unies ».  Tôt dimanche matin, des roquettes russes ont frappé le centre international de maintien de la paix et de sécurité de Yavoriv, faisant 35 morts et 134 blessés, a encore dénoncé le représentant ukrainien.  Le ministère russe de la défense a tenté de blanchir ce crime en affirmant qu’il visait les « mercenaires étrangers », a-t-il signalé en affirmant que « ce n’est pas vrai, car seuls des citoyens ukrainiens ont été touchés ».  

Pour M. Kyslytsya, la lutte contre l’agression russe doit être une pièce maîtresse des efforts de l’OSCE pour restaurer la sécurité sur le continent européen.  « Nous considérons que l’OSCE doit contribuer à la mise en œuvre de la résolution ES/11-1 « Agressions contre l’Ukraine », adoptée à une écrasante majorité le 2 mars » par l’Assemblée générale. I l a salué l’invocation du mécanisme de Moscou, qui est important pour enregistrer tous les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par la Fédération de Russie dans sa guerre contre l’Ukraine.  Il a également souligné la nécessité d’explorer tous les outils à la disposition de l’OSCE pour documenter les crimes russes et garantir une réaction publique et rapide des représentants spéciaux du Président en exercice et des institutions autonomes de l’OSCE.  

M. Kyslytsya a demandé que le Représentant de l’OSCE pour la liberté des médias prête une attention particulière aux « faux récits » en provenance de Moscou alors que la Russie intensifie sa campagne de propagande et de désinformation.  « Ce qui se passe maintenant ne concerne pas seulement la survie de l’Ukraine. Contrairement à Putin et à ses sbires, l’Ukraine survivra à l’invasion russe.  Il s’agit de la survie de l’ONU et de l’OSCE », a estimé M. Kyslytsya.  Et il s’agit de la « députinisation » de la Russie et de son retour progressif aux principes du droit international dans l’ère post-Putin. 

« Le régime de Putin touche à sa fin », a estimé le représentant.  Mais selon lui, ce régime a infligé de tels dommages à la société russe qu’il faudra des décennies pour ramener ce pays au moins au niveau de démocratie qu’elle avait atteint dans les années 90.  « En fait, il a fallu 15 ans à Moscou pour passer de la signature officielle de l’Acte final d’Helsinki au choix conscient de participer à la construction d’une nouvelle Europe, comme l’envisageait la Charte de Paris de 1990 », a relevé le délégué.  Il a estimé qu’aujourd’hui, l’OSCE devrait jouer un rôle spécial en se préparant à soutenir la Russie post-Putin pour son retour au sein de la famille des nations démocratiques.  « Ce n’est pas une tâche facile, mais nous ne serons pas en mesure de briser le cercle vicieux de la violence sans rétablir le respect par la Russie des principes fondamentaux, inscrits dans l’Acte final d’Helsinki. »  Le représentant a donc appelé le Président de l’OSCE et les institutions autonomes de l’OSCE à commencer à réfléchir aux modalités de travail avec la Russie post-Putin. 

Le Président en exercice de l’OSCE a repris la parole pour noter l’érosion des principes d’Helsinki et exhorter les États parties à honorer leurs engagements.  Il a fait part de sa volonté d’œuvrer au règlement des conflits gelés.  « Ce sera l’objectif de mes visites en République du Moldova, au Caucase du Sud, dans les Balkans occidentaux et en Asie centrale. »  Le non-respect par un État membre des principes de l’OSCE ne peut que saper l’Organisation, a-t-il déclaré.  Il a appuyé la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Géorgie dans ses frontières territorialement reconnues, en indiquant que la situation en Abkhazie et en Ossétie du Sud recevra une attention accrue.  Enfin, il a exhorté l’Arménie et l’Azerbaïdjan à intensifier leur dialogue.

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