En cours au Siège de l'ONU

Dixième Conférence d’examen du TNP,
1re et 2e séances – matin & après-midi       
CD/3845

La dixième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération s’ouvre dans un monde « à une erreur de calcul de l’anéantissement nucléaire »

La dixième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), adopté il y a 52 ans et fort de 191 États signataires, a démarré ses travaux ce matin.  Deux ans après un premier report de cette dixième édition en raison de la pandémie de COVID-19, les États, qui étaient largement représentés au niveau ministériel, ont exprimé la nécessité, y compris au cours des travaux de la Conférence qui dureront jusqu’au vendredi 26 août, de restaurer l’intégrité d’un outil vital de sécurité collective dans un contexte tendu par la crise en Ukraine, la mise à mal de l’Accord sur le nucléaire iranien et la poursuite de ses programmes de missiles balistiques par la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  La nécessité de mettre en œuvre de manière équilibrée les trois piliers du TNP -le désarmement nucléaire, la non-prolifération et l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire- « qui se renforcent mutuellement », a été rappelée par le Président de la Conférence, l’Ambassadeur argentin Gustavo Zlauvinen.  L’efficacité des zones exemptes d’armes nucléaires pour renforcer la confiance au plan régional a également été soulignée.

À l’ouverture de la Conférence, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a déploré qu’à la périlleuse conjonction des crises climatique, sanitaire et économique, les États dotés de l’arme nucléaire répondent par la recherche d’une « fausse sécurité en stockant et en dépensant des centaines de milliards de dollars pour des armes apocalyptiques qui n’ont pas leur place sur notre planète ».  Pour éviter toute escalade nucléaire, il a répété que « seule l’élimination des armes nucléaires peut garantir qu’elles ne seront jamais utilisées » et d’avancer sur la voie d’un monde débarrassé de ces armes, ce qui est l’objectif historiquement le plus ancien de l’Organisation.  Le Royaume-Uni a réagi en indiquant que la publication, aujourd’hui, d’une déclaration ministérielle conjointe avec la France et les États-Unis réaffirmait leurs engagements pris en janvier -avec les autres États dotés d’armes nucléaires-, « de tout mettre en œuvre pour empêcher une guerre nucléaire ». 

« L’humanité n’est qu’à un malentendu, à une erreur de calcul, de l’anéantissement nucléaire. »  À la gravité de cet avertissement du Secrétaire général ont succédé ceux du Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) au sujet des dangers les plus imminents posés par la « guerre en Ukraine ».  M. Rafael Grossi a en effet estimé que l’occupation russe en cours de la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijia pourrait, tant elle viole brutalement les normes de sûreté et de sécurité nucléaires de l’AIEA, dégénérer en une tragédie nucléaire qui aggraverait la catastrophe qui s’abat déjà sur l’Ukraine et causerait la faim et l’insécurité bien au-delà de ses frontières.  Son inquiétude a été partagée notamment par l’Union européenne.  M. Grossi a également affirmé que l’AIEA était prête à se rendre sur ce site à tout moment. 

Des avertissements, mais aussi des appels à l’action et à la raison, en l’occurrence ceux du Vice-Ministre ukrainien des affaires étrangères, du Premier Ministre japonais et du Secrétaire d’État des États-Unis.  Le responsable ukrainien, dont la présence à New York a été saluée par des applaudissements, a martelé que des actions communes conjointes sont nécessaires pour prévenir un désastre nucléaire mondial.  À cet effet, il a lancé un appel à la fermeture de l’espace aérien au-dessus des centrales nucléaires ukrainiennes.  M. Kishida a, de son côté, déclaré que « nous ne devrions jamais tolérer la menace de l’utilisation d’armes nucléaires, comme celle proférée récemment par la Russie, et encore moins l’utilisation d’armes nucléaires », ajoutant qu’il est impératif de veiller à ce que « Nagasaki reste le dernier endroit à avoir subi un bombardement atomique ».  Face aux atteintes au régime de non-prolifération du TNP de la Russie, qui s’ajoutent à celles de la RPDC et de l’Iran, M. Anthony Blinken a, quant à lui, assuré que les États-Unis font tout pour atténuer les tensions, comme l’attestent leur décision de ne pas relever leur niveau d’alerte à la menace nucléaire et leurs efforts pour relancer le Traité New START. 

Par ailleurs, les États arabes, par la voix de la Jordanie, et le Kazakhstan, au nom des États parties au Traité sur une zone exempte d’armes nucléaires en Asie centrale, se sont livrés à un plaidoyer en faveur de ces zones, considérés par beaucoup, dans l’attente de l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), comme des mesures efficaces de confiance et de non-prolifération au plan régional.  « Le Groupe arabe tient à souligner que la création d’une telle zone au Moyen-Orient constitue une responsabilité collective, la résolution de la Conférence d’examen de 1995 sur le Moyen-Orient restant d’actualité à cet égard », a par exemple déclaré le Vice-Premier Ministre jordanien.  Il a déploré le refus d’Israël de participer au processus de négociation en cours à l’ONU et réitéré l’appel du Groupe arabe à la tenue d’une conférence des Nations Unies sur l’application de la résolution de 1995. 

De son côté, le Vice-Ministre du Kazakhstan a attiré l’attention sur l’importance de la réhabilitation environnementale des territoires touchés par les déchets radioactifs, exhortant les organisations internationales spécialisées dans le domaine du nettoyage et de l’élimination des contaminants radioactifs à apporter une assistance pérenne et appropriée aux États d’Asie centrale.  Le Vice-Ministre a en outre appelé au renforcement de la coopération entre les zones exemptes d’armes nucléaires pour leur permettre de contribuer à l’avènement d’un monde libéré de telles armes.  « Les États d’Asie centrale travailleraient activement en ce sens pendant la Conférence et l’élaboration de son document final », a-t-il dit. 

Le principal document de base de la dixième Conférence d’examen du TNP est le rapport final du Comité préparatoire de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020.  Ce document a été présenté ce matin par le Président par intérim de la Conférence, qui a également procédé à l’élection des présidents et vice-présidents des principaux comités de l’instance avant de passer la main à M. Zlauvinen. 

La Conférence poursuivra son débat général, demain, mardi 2 août, à 10 heures. 

DIXIÈME CONFÉRENCE DES PARTIES CHARGÉE D’EXAMINER LE TRAITÉ SUR LA NON-PROLIFÉRATION DES ARMES NUCLÉAIRES

Déclarations d’ouverture

M. SYED MD HASRIN SYED HUSSIN, Président par intérim de la dixième Conférence d’examen, ouvrant la Conférence, a rappelé que le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui est entré en vigueur il y a 52 ans, a joué un rôle crucial dans la non-prolifération nucléaire, le désarmement nucléaire et les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire.  Tout au long du dernier demi-siècle, le TNP a été un pilier essentiel de la paix et de la sécurité internationales et un rempart contre les dangers des armes nucléaires, a-t-il aussi déclaré.  Pour M. Hussin, la Conférence d’examen offre à toutes les parties au TNP une occasion importante de réaffirmer leur attachement au Traité et à la pleine mise en œuvre de toutes ses dispositions, ainsi qu’aux engagements pris lors des conférences d’examen précédentes « pour notamment préserver l’intégrité du Traité » et veiller à ce qu’il demeure la pierre angulaire du régime mondial de non-prolifération nucléaire.  Il a ensuite présenté le rapport du Comité préparatoire de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020, et procédé à l’élection du Président de la Conférence, M. Gustavo Zlauvinen, de l’Argentine. 

M. GUSTAVO ZLAUVINEN (Argentine), Président de la dixième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération (TNP), a constaté qu’après plus de deux ans d’attente, « nous sommes enfin là, sur la ligne de départ: l’ouverture de la dixième Conférence d’examen ».  En raison de la pandémie de COVID-19, cette conférence a été reportée à quatre reprises, a-t-il rappelé, avant de se féliciter de l’obstination des États parties pour faire en sorte qu’elle ait lieu.  Cela démontre, selon lui, le statut reconnu du TNP en tant que forum de négociation multilatéral prééminent sur les armes nucléaires et son rôle en tant que pilier de la paix et de la sécurité internationales.  Nous avons quatre semaines pour atteindre notre objectif: un résultat consensuel qui renforce la mise en œuvre des trois piliers du Traité, à savoir le désarmement nucléaire, la non-prolifération et les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire, a souligné le Président.  « Comme je l’ai toujours dit, l’équilibre dans la mise en œuvre de ces piliers est essentiel, car ils se renforcent mutuellement.  C’est le “grand compromis” au cœur de ce traité. » 

Mais il faut être honnête et reconnaître que le monde a beaucoup changé depuis la dernière Conférence d’examen, et à certains égards de manière « radicale », a déclaré M. Zlauvinen.  Les États parties devront négocier dans un environnement international beaucoup plus complexe et évolutif.  Les pressions externes liées, entre autres, au changement brutal de l’environnement sécuritaire mondial et au progrès technologique, ont un impact sur la substance du Traité et sur notre travail. 

En ce qui concerne les priorités relatives au respect du Traité, la mise en œuvre effective des obligations et engagements fondamentaux est essentielle pour préserver le processus.  Les tendances négatives qui compromettent la crédibilité de progrès substantiels dans ce domaine reflètent le fait que la menace posée par les armes nucléaires n’a pas diminué depuis leur première utilisation en 1945, a expliqué le Président, qui a rappelé qu’il existe un large consensus sur la nécessité de renforcer le régime de non-prolifération en mettant l’accent sur les perspectives régionales. 

M. Zlauvinen a clairement indiqué que les questions de fond du Traité sont la prérogative exclusive des États parties.  Son rôle de président consiste à faciliter leurs efforts et de les aider dans leurs négociations en vue d’un résultat significatif qui, quel que soit son format, réaffirme l’importance, la crédibilité et la vitalité du TNP.  Le Président a, en conclusion, souligné la responsabilité historique qui incombe à tous les États parties pour atteindre cet objectif. 

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a estimé dans ses remarques d’ouverture que, même si cette conférence a été longtemps retardée, son importance et son urgence restent intactes.  Elle arrive à un moment critique pour notre paix et notre sécurité collectives.  La crise climatique, les inégalités flagrantes, les conflits et les violations des droits humains, ainsi que la dévastation personnelle et économique causée par la pandémie de COVID-19, ont mis notre monde sous encore plus de pression et cela, à une époque de danger nucléaire sans pareil depuis le pic de la guerre froide. 

La période initiale de l’après-guerre froide avait inauguré un nouvel espoir de paix, un espoir trouvé dans des réductions massives d’arsenaux, dans des régions entières se déclarant exemptes d’armes nucléaires, et dans l’enracinement de normes contre l’utilisation, la prolifération et les essais d’armes nucléaires, a rappelé le Secrétaire général.  Mais à mesure que les années passent, ces fruits d’espoir se flétrissent.  L’humanité est en passe d’oublier les leçons tirées d’Hiroshima et de Nagasaki alors même que les tensions géopolitiques atteignent de nouveaux sommets, que la concurrence prend le pas sur la coopération et la collaboration, que la méfiance a remplacé le dialogue et que la désunion a remplacé le désarmement, s’est inquiété M. Guterres.

Les États recherchent une fausse sécurité en stockant et en dépensant des centaines de milliards de dollars pour des armes apocalyptiques qui n’ont pas leur place sur notre planète, a poursuivi le Secrétaire général.  Près de 13 000 armes nucléaires sont actuellement détenues dans des arsenaux à travers le monde, a-t-il rappelé.  Tout cela à un moment où les risques de prolifération s’accroissent et où les garde-fous pour prévenir l’escalade s’affaiblissent, où les crises à connotation nucléaire couvent du Moyen-Orient à la péninsule coréenne en passant par l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Les nuages qui se sont dissipés après la fin de la guerre froide se rassemblent à nouveau, s’est alarmé le Secrétaire général, qui a estimé que nous avons été extraordinairement chanceux jusqu’à présent.  « Mais la chance n’est pas une stratégie » et ce n’est pas non plus un bouclier contre les tensions géopolitiques débouchant sur un conflit nucléaire, a mis en garde M. Guterres pour qui, aujourd’hui, l’humanité n’est qu’à un malentendu, à une erreur de calcul, de l’anéantissement nucléaire.  Plus que jamais nous avons besoin du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, a-t-il martelé, et c’est pourquoi cette conférence d’examen est si importante.  C’est l’occasion d’élaborer les mesures qui permettront d’éviter certaines catastrophes et de mettre l’humanité sur une nouvelle voie vers un monde exempt d’armes nucléaires.

Le Secrétaire général a identifié cinq domaines d’action.  D’abord, il faut de toute urgence renforcer et réaffirmer la norme, vieille aujourd’hui de 77 ans, contre l’utilisation des armes nucléaires.  Cela suppose un engagement ferme de tous les États parties et cela signifie trouver des mesures pratiques qui réduiront le risque de guerre nucléaire et nous remettront sur la voie du désarmement.  Pour y arriver, il va falloir renforcer toutes les voies de dialogue et de transparence car la paix ne peut s’installer en l’absence de confiance et de respect mutuel.  En deuxième lieu, seule l’élimination des armes nucléaires peut garantir qu’elles ne seront jamais utilisées.  Il faut travailler sans relâche vers cet objectif, a souhaité le Secrétaire général, qui a appelé à la prise de nouveaux engagements pour réduire le nombre de tous les types d’armes nucléaires.  Cela signifie aussi redynamiser et doter pleinement de ressources tous les accords et cadres multilatéraux sur le désarmement et la non-prolifération, y compris l’important travail de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Troisièmement, il faut s’attaquer aux tensions qui couvent au Moyen-Orient et en Asie, a poursuivi M. Guterres.  La persistance des conflits, conjuguée à la menace des armes nucléaires, rapproche ces régions de la catastrophe, a-t-il constaté, en appelant à redoubler d’efforts en faveur du dialogue et de la négociation pour apaiser les tensions et tisser de nouveaux liens de confiance « dans des régions qui en ont connu trop peu ».  Le Secrétaire général a ensuite appelé à promouvoir l’usage pacifique des technologies nucléaires –notamment à des fins médicales et autres– pour accélérer la réalisation des objectifs de développement durable.  En dernier lieu, il a insisté sur l’importance de la mise en œuvre de tous les engagements restants pris dans le Traité, et a appelé à veiller à ce que le texte demeure à jour et adapté à ces temps difficiles.

Si nous sommes tous réunis ici aujourd’hui, c’est parce que nous avons foi dans l’objet et le but du Traité, a fait observer le Secrétaire général.  Mais, si l’on veut assurer la pérennité du texte dans l’avenir, il nous faut dépasser le statu quo.  Il faut un engagement renouvelé ainsi que des négociations véritables et de bonne foi.  Et il faut que toutes les parties soient à l’écoute, consentent à des compromis et gardent en permanence à l’esprit les enseignements du passé mais aussi la fragilité de l’avenir, a insisté M. Guterres.  Le Secrétaire général a conclu en rappelant aux États parties que les générations futures comptent sur leur engagement pour éviter l’abîme: « Il nous incombe à tous de laisser le monde dans un meilleur état, plus sûr, que celui dans lequel nous l’avons trouvé. »

M. RAFAEL MARIANO GROSSI, Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a d’abord rappelé que l’Agence est le lieu où « 175 États Membres s’associent à des scientifiques, des inspecteurs, des diplomates, des médecins, des ingénieurs et bien d’autres experts pour faire vivre chaque jour le TNP ».  Il a ajouté que, sans cette coopération, l’importante contribution de la science et de la technologie nucléaires dans la réalisation des Objectifs de développement durable des Nations Unies, le système international de garanties robuste qui est parvenu à freiner la prolifération nucléaire ainsi que la multitude d’améliorations apportée à la sûreté et la sécurité dans ce domaine « n’existeraient tout simplement pas ».  Après avoir indiqué l’assistance technologique que l’AIEA fournit aux pays en développement pour qu’ils puissent exercer leur droit aux utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire, M. Grossi a insisté sur le fait qu’en matière nucléaire, « tout commence et finit par le respect de principes de sûreté et de sécurité ».  Notant que les catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima Daiichi ont provoqué la mise au point de fonctionnements radicalement nouveaux des centrales, il a assuré qu’aujourd’hui le nucléaire « est plus sûr qu’il ne l’a jamais été ». 

Or, pour le Directeur général de l’AIEA, la guerre en Ukraine met soudainement à l’épreuve ces progrès.  En effet, a-t-il dit, l’occupation de sites, qu’il s’agisse de la zone d’exclusion de Tchernobyl ou celle en cours de la centrale nucléaire de Zaporijia, menace directement les installations et leurs habitants.  M. Grossi a ainsi rappelé que le Conseil des gouverneurs de l’AIEA était gravement préoccupé par le fait que l’agression de la Fédération de Russie empêche l’AIEA de mener pleinement et en toute sécurité des activités de vérification du respect des garanties dans les installations nucléaires ukrainiennes conformément au TNP et à l’accord de garanties de l’Ukraine.  Des vies et des moyens de subsistance sont mis en danger parce que les normes de sûreté et de sécurité nucléaires de l’AIEA sont violées, a-t-il affirmé, ajoutant qu’à la centrale nucléaire de Zaporijia, la situation devient chaque jour plus périlleuse.  Les habitants de Zaporijia et au-delà « comptent sur nous tous pour empêcher que la guerre ne provoque une tragédie nucléaire qui aggraverait encore la catastrophe qui s’abat déjà sur l’Ukraine et qui causerait la faim et l’insécurité au-delà de ses frontières », a ajouté M. Grossi, qui a affirmé que l’AIEA était prête à se rendre sur ce site à tout moment. 

M. Grossi a ensuite axé son propos sur l’Iran, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et le droit aux utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire.  Sur l’Iran, il a indiqué qu’alors que les négociations diplomatiques sur le programme nucléaire iranien se poursuivent, l’AIEA campe sur ses positions.  « Pour donner au monde des assurances crédibles que le programme nucléaire de l’Iran est mené exclusivement à des fins pacifiques, les autorités iraniennes doivent accorder aux inspecteurs de l’AIEA un accès proportionné et leur fournir les informations demandées », a-t-il insisté.  Pour M. Grossi, l’absence de progrès dans la vérification de la nature pacifique du programme nucléaire iranien aura des conséquences sur le paysage de la sécurité régionale.  La situation dans la péninsule coréenne est également très préoccupante, a-t-il ajouté, assurant que l’AIEA, qui ne s’est pas rendue dans le pays depuis 13 ans, sera prête à revenir en RPDC dès qu’un accord politique le lui permettra. 

Enfin, M. Grossi a rappelé que l’AIEA restait « le véhicule par lequel nous réalisons les objectifs du TNP de diffuser les bénéfices de l’atome tout en empêchant la prolifération des armes nucléaires ».  Le Traité nous permet d’utiliser l’énergie et les matières nucléaires pour sauver des vies et améliorer le bien-être des personnes, a-t-il rappelé, concluant son intervention en assurant les États que l’AIEA les aiderait à protéger ce traité « vital pour la paix et le développement ». 

Débat général

M. JOSAIA BAINIMARAMA, Premier Ministre des Fidji et Président du Forum des îles du Pacifique, a rappelé que le Traité pour une zone exempte d’armes nucléaires dans le Pacifique Sud, ou Traité de Rarotonga, est entré en vigueur il y a 36 ans.  La région est toujours affectée par les conséquences des essais nucléaires, a-t-il ajouté, en citant les cas élevés de cancers et d’habitats contaminés.  Il a rappelé que le Traité de Rarotonga a été le premier à inclure une disposition sur les déchets radioactifs.  Il a souhaité que Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) entre en vigueur et a exhorté les États qui ne l’ont pas encore ratifié à le faire.  Il a salué l’intention des États-Unis de ratifier tous les protocoles au Traité de Rarotonga et encouragé ce pays à prendre les mesures nécessaires en ce sens.  Le Premier Ministre a appelé à respecter les obligations découlant du TNP en ce qui concerne la sécurité nucléaire afin notamment d’atténuer le danger posé par les déchets radioactifs pour les océans.  Le Traité de Rarotonga est le symbole de l’opposition de longue date de notre région aux armes nucléaires, a conclu le Premier Ministre, en souhaitant que la Conférence aboutisse à un résultat crédible et ambitieux.

M. FUMIO KISHIDA, Premier Ministre du Japon, a rappelé que la division au sein de la communauté internationale sur les questions de désarmement n’a fait que s’accentuer.  « En particulier, la menace par la Fédération de Russie d’utiliser ses armes nucléaires dans le cadre de son agression contre l’Ukraine a contribué à l’inquiétude mondiale qu’une autre catastrophe est une possibilité réelle », a-t-il indiqué.  Si le chemin vers un monde sans armes nucléaires est devenu encore plus difficile, l’abandon n’est cependant pas une option.  

En tant que Premier Ministre originaire d’Hiroshima, M. Kishida a appelé à prendre toutes les mesures réalistes pour parvenir à un monde sans armes nucléaires, ajoutant que le point de départ de cette entreprise est le TNP.  En tant que première étape d’une feuille de route réaliste, nous travaillerons sur le « Plan d’action d’Hiroshima » qui s’enracine dans cinq actions, tout en faisant simultanément des efforts pour réduire les risques nucléaires, a précisé le Chef de Gouvernement, qui a précisé ensuite les différentes actions

D’abord, nous ne devrions jamais tolérer la menace de l’utilisation d’armes nucléaires, comme celle proférée récemment par la Russie, et encore moins l’utilisation d’armes nucléaires, a affirmé M. Kishida, pour qui « nous devons veiller à ce que Nagasaki reste le dernier endroit à subir un bombardement atomique ». 

La deuxième action consiste à renforcer la transparence, que les États dotés d’armes nucléaires doivent améliorer.  En particulier, M. Kishida a demandé à tous ceux dotés d’armes nucléaires de divulguer des informations sur l’état de la production de matières fissiles, une étape importante pour créer une dynamique en vue de l’ouverture de négociations sur un traité sur les matières fissiles. 

Il faut ensuite maintenir la tendance à la baisse du stock nucléaire mondial.  « Bien que leur nombre ait considérablement diminué depuis l’apogée de la guerre froide, il existe encore plus de 10 000 de ces armes à travers le monde », a rappelé le Premier Ministre.  Dans cette optique, le Japon soutient le dialogue mené entre les États-Unis et la Russie en vue d’une nouvelle réduction de leurs arsenaux et encourage les États-Unis et la Chine à s’engager dans un dialogue bilatéral sur le contrôle des armes nucléaires et le désarmement.  En outre, il faudrait insuffler une nouvelle vie aux discussions sur l’entrée en vigueur du TICE et la rédaction d’un traité interdisant la production de matières fissiles.  « Afin de créer une dynamique pour faciliter l’entrée en vigueur du TICE, je convoquerai une réunion des Amis du TICE au niveau des dirigeants pendant l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre », a annoncé le Premier Ministre. 

La quatrième action consiste à garantir la non-prolifération nucléaire et à promouvoir les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire sur cette base.  Bien que la possibilité d’un nouvel essai nucléaire suscite des inquiétudes, le Japon s’attaquera aux problèmes nucléaires et de missiles de la « Corée du Nord » en coordination avec la communauté internationale.  Pour lui, le retour au respect de l’accord sur le nucléaire iranien reste également à réaliser.  Par ailleurs, en s’appuyant sur les enseignements tirés de l’accident de 2011, le Japon continuera à reconstruire les zones touchées et à relever les différents défis liés au démantèlement de la centrale nucléaire de Fukushima.  En étroite coopération avec la communauté internationale, y compris l’AIEA, le Japon continuera à faire progresser ses efforts de manière transparente, conformément aux normes de sécurité nationales et internationales. 

Pour la cinquième action, le Japon favorisera une compréhension exacte des réalités de l’utilisation des armes nucléaires en encourageant les visites à Hiroshima et Nagasaki de dirigeants internationaux, entre autres. 

M. Kishida a terminé son intervention par une série d’annonces.  Le Japon, a-t-il indiqué, versera une contribution de 10 millions de dollars à l’ONU afin de créer un Fonds des jeunes leaders pour un monde sans armes nucléaires.  Il organisera également la première réunion du nouveau « Groupe international de personnes éminentes » le 23 novembre à Hiroshima, qui bénéficiera de la participation d’anciens et d’actuels dirigeants politiques du monde entier.  Enfin, en 2023, le Japon accueillera à Hiroshima le sommet du G7, au cours duquel le Premier Ministre a l’intention de démontrer l’engagement ferme de son pays à ce que ne se reproduise jamais la catastrophe des bombardements atomiques. 

M. AYMAN SAFADI, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Jordanie, qui s’exprimait au nom du Groupe arabe, a insisté sur la nécessité d’œuvrer à une meilleure application du TNP et de veiller à lutter contre les transferts de technologies nucléaires à des fins non pacifiques.  C’est ainsi que le régime actuel de l’AIEA de garanties généralisées pourra rester la pierre angulaire afin d’atteindre les objectifs du TNP, a-t-il fait valoir.  L’AIEA est la seule agence dotée du mandat de vérifier les incidents nucléaires, a-t-il également rappelé, en soulignant que le respect par tous les États arabes du TNP est tributaire de ces accords de garanties généralisées. 

M. Safadi a également estimé qu’il faut trouver un équilibre entre les trois piliers du Traité.  Le TNP a pu être conclu dans le cadre d’un marché qui engageait les puissances nucléaires à se débarrasser de leurs arsenaux nucléaires et les autres États à ne pas s’en procurer, a-t-il rappelé.  Or, force est de constater que les puissances nucléaires n’ont pas respecté cet engagement.  Par conséquent, les autres États demandent des garanties quant à la non-utilisation de ces armes nucléaires à leur encontre. 

Le régime de non-prolifération nucléaire se heurte à de nouveaux écueils, a constaté M. Safadi en faisant référence notamment au TICE.  De plus, le non-respect par Israël du TNP signifie qu’il ne peut y avoir d’universalité dans l’application des visites et des vérifications.  Les États parties, et surtout ceux qui sont dotés de l’arme nucléaire, doivent s’engager à empêcher que ces armes puissent parvenir aux États non parties, en particulier à Israël, aussi longtemps que cet État ne souscrira pas au TNP et ne soumettra pas ses installations au système de garanties généralisées de l’AIEA.  L’Agence doit quant à elle s’acquitter de son mandat en toute neutralité, en particulier pour ce qui est des pays qui font l’objet de suspicions.  Il faut œuvrer pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, assortie d’un système de vérification comparable aux systèmes existants tout en reconnaissant qu’il est prioritaire que les garanties généralisées soient appliquées au Moyen-Orient. 

Le concert des nations est convenu de créer des zones exemptes d’armes nucléaires par le monde et le Groupe arabe tient à souligner que la création d’une telle zone au Moyen-Orient constitue une responsabilité collective, la résolution de 1995 sur le Moyen-Orient restant d’actualité à cet égard.  Le Vice-Premier Ministre a rejeté les allégations selon lesquelles des enceintes multilatérales ne seraient pas idoines pour mettre en œuvre cette résolution de 1995.  Le Ministre a ensuite invoqué la décision 73/546 de l’Assemblée générale, qui portait sur la convocation d’une conférence de négociation de la zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, en rappelant qu’entre-temps, il y eu deux sessions de la Conférence, celle de 2019 sous présidence jordanienne et celle de 2021 sous la présidence du Koweït, avec la participation de tous les États concernés, sauf Israël.  Le Groupe arabe demande une conférence des Nations Unies sur l’application de la résolution de 1995.

M. Safadi a réitéré l’importance que revêtent les programmes d’assistance technique sous la houlette de l’AIEA ainsi que de la coopération avec l’AIEA et d’autres accords planétaires sur la sécurité nucléaire.  Le Vice-Premier Ministre a appelé les pays qui ont des centrales électriques nucléaires à coopérer avec l’AIEA.

S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, le Vice-Premier Ministre jordanien a souligné l’importance de créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, y compris pour empêcher « l’émergence de nouvelles puissances nucléaires dans la région ».  Il a ajouté que son pays est le seul État arabe à faire partie du groupe de Stockholm, lequel livre depuis des années un plaidoyer actif sur l’urgence de réduire concrètement les arsenaux et le risque nucléaires.  Par ailleurs, il a jugé que la persistance des crises palestinienne, syrienne et libyenne est propice à la prolifération d’armes de destruction massive et à une course continue aux armements de ce type. 

Mme TANJA FAJON, Vice-Première Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, a condamné l’agression de la Russie contre l’Ukraine, avant de dénoncer les violations flagrantes du Mémorandum de Budapest et les actes insensés commis contre les installations nucléaires de l’Ukraine.  Les défis sécuritaires actuels exigent une application renforcée, et non pas affaiblie, du droit international.  Il est temps d’affirmer de manière collective que le TNP est la pierre angulaire du désarmement, de la non-prolifération et de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, a déclaré la Ministre. 

Mme Fajon a rappelé que son pays, candidat à un siège de membre non-permanent du Conseil de sécurité en 2024-2025, est doté d’un programme nucléaire civil et prêt à aider d’autres pays à bénéficier de cette énergie nucléaire à des fins pacifiques.  La Ministre a souligné la nécessité d’une universalisation de l’accord de garanties généralisées (AGG), avant d’exhorter la RPDC à prendre des mesures concrètes en vue de la dénucléarisation de la péninsule coréenne.  « La tâche devant nous peut paraître insurmontable mais nous ne devons pas abandonner », a-t-elle conclu. 

M. JEPPE KOFOD, Ministre des affaires étrangères du Danemark, qui s’exprimait au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège, Suède), a condamné l’agression de la Russie contre l’Ukraine ainsi que les menaces du Président Vladimir Putin d’utiliser des armes nucléaires, menaces qu’il a considérées comme ayant un impact négatif significatif sur l’architecture de non-prolifération, de désarmement nucléaire et de la maîtrise des armements.  Il faut pourtant préserver cette architecture, a exhorté le Ministre, qui a promu une mise en œuvre complète, équilibrée et totale du Plan d’action de la Conférence d’examen de 2010.  Les pays nordiques ont encouragé la mise en œuvre du TNP, notamment par le biais de l’Initiative de Stockholm sur le désarmement nucléaire, a-t-il rappelé. 

Le document de travail « Stepping Stones » peut aussi aider à faire progresser le désarmement nucléaire, renforcer la confiance et jeter les bases de mesures supplémentaires.  Les pays nordiques appuient également le document de travail de l’initiative sur la réduction des risques nucléaires et exhortent la Conférence à examiner les recommandations, qui comprennent un processus complet de suivi dans le cadre du TNP.  La Conférence devrait appuyer les efforts de vérification du désarmement nucléaire.  Les travaux de l’initiative pour la création d’un environnement en vue du désarmement nucléaire ont également montré qu’ils étaient utiles de fournir un cadre propice à l’échange de vues, a estimé le délégué. 

Selon le Ministre, avant l’agression russe contre l’Ukraine, des développements positifs avaient eu lieu, notamment la prolongation de cinq ans du Traité New START, le dialogue de stabilité stratégique entre les États-Unis et la Russie, la réaffirmation de la Déclaration du Sommet de Reykjavik de 1986 et la Déclaration des cinq États dotés d’armes nucléaires (P5) de janvier dernier, après la réunion de Paris.  Les pays nordiques attachent la plus haute importance au Traité New START et appellent à rechercher de nouvelles réductions.  Un futur accord devrait éventuellement inclure toutes les catégories d’armes nucléaires. 

Le Ministre a également appelé la Chine à s’engager activement dans des processus de contrôle des armements en tant qu’État doté d’armes nucléaires responsable.  Les pays nordiques appuient un document de travail reconnaissant le lien étroit entre le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et le TNP et soutiennent les négociations et la conclusion immédiates d’un traité sur l’arrêt de la production de matières fissiles.  Après s’être dit préoccupé par les programmes d’armes nucléaires et de missiles balistiques de la RPDC, le Ministre a également dit soutenir les efforts visant à préserver le Plan d’action global commun.  Le rôle de la société civile, l’égalité des sexes, l’autonomisation et la pleine inclusion des femmes et des jeunes, en tant que leaders de demain, devraient également être à l’ordre du jour de la Conférence, a-t-il ajouté. 

M. ANTHONY BLINKEN, Secrétaire d’État des États-Unis, a estimé que le TNP avait rendu le monde plus sûr, tout en reconnaissant les pressions exercées par plusieurs pays sur le régime de non-prolifération, dont la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et la République islamique d’Iran.  Il a également dénoncé la Fédération de Russie pour ses agissements belliqueux en Ukraine, où elle a agité la menace de l’arme nucléaire, en violation des garanties « vitales » données à son voisin lorsque Kyïv a renoncé à son propre arsenal.  En outre, s’est indigné le Secrétaire d’État, la Russie a menacé la centrale nucléaire de Zaporijia, alors qu’elle sait fort bien qu’elle doit se garder de telles déclarations, susceptibles de provoquer un nouvel incident nucléaire dans la région.  M. Blinken a assuré que les États-Unis ont tout mis en œuvre pour atténuer et faire baisser les tensions, en décidant de ne pas relever leur niveau d’alerte à la menace nucléaire.

Le Chef de la diplomatie américaine a ensuite souligné la contribution du Président Biden à la relance du Traité New START, le Président des États-Unis s’étant déclaré résolu à continuer de travailler avec la Russie si elle est prête à respecter ses engagements en vertu de cet instrument.  Lors de cette Conférence d’examen du TNP, Washington espère progresser dans la mise en œuvre de ses trois piliers –à savoir le désarmement nucléaire, la non-prolifération et les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire–, et œuvrera pour que cette édition soit couronnée de succès, a souligné M. Blinken. 

Il faut maintenant que tous les États parties s’acquittent de leurs obligations, ratifient les traités et protocoles facultatifs existants dans le domaine du désarmement nucléaire, a poursuivi M. Blinken.  Et si un État viole le TNP, tous les autres États parties doivent agir « comme un seul homme » pour lui faire entendre raison.  Favorables à l’entrée en vigueur du TICE, les États-Unis considèrent aussi qu’il est plus que temps de finaliser les négociations pour aboutir à un traité d’interdiction des matières fissiles, « qui n’a que trop tardé ». 

Le Secrétaire d’État a souligné que l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques doit se poursuivre, à la lumière de ses applications multiples et de ses faibles émissions.  Lors du Sommet du G7, Washington a ainsi promis 40 milliards de dollars à la Roumanie pour qu’elle développe une centrale nucléaire « à émissions zéro ».  M. Blinken s’est, en conclusion, enorgueilli de l’accord conclu avec l’Australie, qui permettra aux États-Unis de développer des sous-marins à propulsion nucléaire.

M. SANTIAGO CAFIERO, Ministre des affaires étrangères, du commerce international et du culte de l’Argentine, s’est dit conscient du fait que cette conférence d’examen se tient dans un contexte extrêmement difficile en termes de sécurité internationale, avant de mettre en exergue le défi que représentent l’examen d’un traité fondamental comme le TNP et l’établissement d’un consensus de fond au cours des prochaines semaines de travail.  L’Argentine, a affirmé le Ministre, s’est engagée à continuer d’œuvrer en faveur des objectifs et buts fondateurs du Traité et de poursuivre la réalisation efficace et équilibrée de ses trois piliers, à savoir le désarmement, la non-prolifération et les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire. 

L’Argentine croit en la nécessité d’un plus grand engagement de la part des États dotés d’armes nucléaires afin d’avancer dans des mesures concrètes vers le désarmement nucléaire, a souligné le Ministre, pour qui cela suppose un engagement de leur part avec les États qui ne possèdent pas d’armes nucléaires.  Les instruments juridiques sur lesquels repose l’interdiction des armes de destruction massive établissent précisément qu’il faut un engagement ferme à ne pas développer de nouveaux instruments de terreur et de destruction, étant entendu que ceux qui possèdent ces armes procéderont à leur destruction progressive.  Pour cette raison, en tant que membre de l’Initiative de Stockholm, l’Argentine réaffirme son soutien traditionnel aux différents plans visant à progresser vers un désarmement nucléaire complet, de manière vérifiable, transparente et irréversible. 

La mise en œuvre effective du TNP exige ainsi l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires et la négociation d’un traité interdisant la production de matières fissiles et réduisant le risque nucléaire, a poursuivi le Ministre.  Tant que les armes nucléaires n’auront pas été éliminées de manière complète, transparente et irréversible, les États non dotés d’armes nucléaires doivent en effet avoir l’assurance qu’ils ne seront pas exposés à leur menace ou leur utilisation.  Une mesure concrète consisterait à avancer sur la question du retrait des déclarations interprétatives aux Protocoles d’accord sur les zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN).  Pour l’Argentine, cette question est particulièrement importante, du fait de la présence militaire « prolongée et injustifiée du Royaume-Uni dans l’Atlantique Sud, qui complète l’usurpation des terres et des mers entourant notre pays, y compris par la présence de sous-marins capables de transporter des armes nucléaires dans cette région dénucléarisée », a fait valoir le Ministre.  Cela inquiète autant l’Argentine que toute la région, a-t-il expliqué en appelant à préserver le Traité de Tlatelolco et à mettre pleinement en œuvre ses dispositions, ce qui signifie notamment de préserver la première ZEAN au monde dans une zone densément peuplée telle que la région de l’Amérique latine et des Caraïbes. 

Après avoir exprimé ses préoccupations à la suite des tirs de missiles de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et l’avoir exhortée à renoncer à son programme nucléaire, le Ministre a réaffirmé une fois de plus l’appui de l’Argentine au Plan d’action global commun et au rôle crucial joué par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), rappelant au passage que l’Agence est actuellement dirigée par un diplomate argentin, M. Rafael Grossi.  Il a appelé les parties concernées à poursuivre sur la voie de la négociation en faisant valoir les mérites du système de garanties de l’AIEA et de son travail crucial pour promouvoir les utilisations pacifiques de l’énergie et de la technologie nucléaires.  Il est nécessaire de continuer à soutenir l’Agence et sa centralité au regard des engagements établis à l’article III du TNP, a affirmé le Ministre en martelant que la sécurité nucléaire, technologique et physique ainsi que l’application des garanties sont d’une importance cruciale.  Avant de conclure, il a rappelé que l’Argentine a commémoré le soixante-douzième   anniversaire de son programme nucléaire à des fins exclusivement pacifiques, qui se fonde sur la conviction que cette activité contribue au bien-être global du peuple argentin.  Elle a aujourd’hui un profil unique de pays en développement fournisseur responsable de technologie nucléaire à plusieurs pays sur tous les continents, conformément aux directives convenues au sein du Groupe des pays fournisseurs nucléaires.

M. ABUL KALAM ABDUL MOMEN, Ministre des affaires étrangères du Bangladesh, a estimé que la garantie de la paix et de la sécurité internationales réside dans l’élimination totale des armes nucléaires.  La communauté internationale doit s’unir contre la détention perpétuelle d’armes nucléaires par une poignée d’États au mépris total de la sûreté et de la sécurité de l’humanité.  Le Ministre a exhorté ces États à éliminer leurs armes nucléaires.  Il a appelé les États qui n’ont pas encore adhéré au Traité sur la non-prolifération (TNP) à le faire dès que possible afin de parvenir à son application universelle.  Il a aussi appelé à un investissement et à une coopération internationale accrus dans la recherche sur la technologie nucléaire et à explorer les possibilités de son utilisation pacifique au profit de l’humanité. 

En attendant l’élimination totale des armes nucléaires, le Ministre a demandé aux États dotés de ces armes de s’abstenir en toutes circonstances de les utiliser ou de menacer de les utiliser.  Il a souligné la nécessité d’intensifier les efforts en vue de l’entrée en vigueur rapide du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et de l’ouverture de négociations sur le traité sur l’arrêt du trafic de matières fissiles.  Dénonçant l’impasse de la Conférence du désarmement à Genève, il a également réaffirmé l’importance cruciale des zones exemptes d’armes nucléaires pour le régime du TNP.  Enfin, il a exhorté les États à cesser les investissements insensés dans les armes nucléaires destructrices et à réorienter ces ressources vers la promotion de la santé, la lutte contre les changements climatiques, la réalisation des objectifs de développement durable et la promotion de la paix et de la stabilité. 

Mme HADJA LAHBIB, Ministre des affaires étrangères, des affaires européennes et du commerce extérieur de la Belgique, a relevé que la guerre non provoquée, injustifiée et contraire au droit international qui a été déclenchée par la Russie contre l’Ukraine nous confronte malheureusement de nouveau à une menace nucléaire potentielle.  Lorsque l’on examine la détérioration des relations entre les puissances mondiales et l’augmentation de l’importance des armes nucléaires dans le discours public, le défi formidable auquel est confrontée cette conférence apparaît clairement, a-t-elle souligné.  D’un côté, les grands dossiers de prolifération restent en suspens et de l’autre, certains traités sur le contrôle des armements se sont effondrés. 

Les problèmes de mise en œuvre et de vérification ont sapé la confiance dans la durabilité des accords juridiques, a poursuivi Mme Lahbib, et un fossé s’est creusé au sein de la communauté sur la voie du désarmement nucléaire.  Ce sombre tableau devrait éclairer notre débat, a-t-elle estimé, mais pas affaiblir notre détermination.  Il faut considérer ce qui est en jeu et reconnaître que le TNP est un rempart contre la prolifération nucléaire.  Nos engagements passés ne sont pas devenus obsolètes, a martelé la Ministre, estimant que le plan d’action de 2010 offre toujours une base solide pour progresser sur les trois piliers du TNP.  Il faut maintenant discuter de sa mise en œuvre et convenir de mesures concrètes pour réaliser les nobles objectifs du Traité, a-t-elle souhaité. 

La Belgique est profondément préoccupée par l’expansion alarmante du programme nucléaire iranien, tant en termes de matières fissiles que de savoir-faire.  L’Iran doit se conformer à ses obligations internationales et permettre à l’AIEA de mener ses activités de vérification sans entrave, a estimé la Ministre.  Le dossier iranien montre, selon elle, l’importance du protocole additionnel: « il est notre garantie d’un contrôle effectif du programme nucléaire au-delà de toute date d’expiration du Plan d’action global commun ». 

Cette observation dépasse le cas de l’Iran, a fait valoir la Ministre en appelant à redoubler d’efforts pour l’universalisation de ce protocole additionnel, car l’expérience a démontré qu’un accord de garanties à lui seul ne suffit pas pour détecter les programmes secrets.  La « Corée du Nord » continue de bafouer les règles internationales, a-t-elle relevé à cet égard en regrettant que l’apaisement ne soit pas une option.  La pression internationale sur le régime doit donc être maintenue, notamment par l’application stricte des sanctions par tous les États sans exception.  Selon Mme Lahbib, nous ne pouvons pas nous satisfaire du rythme actuel du désarmement nucléaire et les États dotés doivent prendre des mesures supplémentaires. 

Regrettant que la Chine soit le seul État doté qui augmente rapidement son stock d’armes nucléaires, la Ministre a également constaté que d’autres États modernisent leurs arsenaux ou introduisent de nouveaux vecteurs potentiellement déstabilisants.  Des réductions réelles des stocks de tous les types d’armes nucléaires devraient être combinées avec des mesures politiques visant à réduire le risque d’attaques accidentelles ou non autorisées, a-t-elle poursuivi. 

Dans ce contexte, la Belgique soutient le document de travail de l’Initiative de Stockholm sur la réduction des risques nucléaires.  Cependant, si la réduction des risques répond à un besoin existentiel, elle ne peut pas se substituer aux progrès tangibles en matière de désarmement, a-t-elle mis en garde arguant que le désarmement sans contrôle conduit au désarmement sans confiance.  La vérification du désarmement nucléaire nécessite la mise en place de nouvelles techniques et procédures, a-t-elle ajouté rappelant que plusieurs initiatives sont dédiées à cette tâche et que la Belgique contribue activement aux efforts de l’une d’entre elles, à savoir le Partenariat international pour la vérification du désarmement nucléaire, qui s’est réuni à Bruxelles en juin dernier.

M. PHILIP TWYFORD, Ministre du désarmement et du contrôle des armes de la Nouvelle-Zélande, a constaté que les doctrines militaires des États dotés de l’arme nucléaire continuent de refléter une dépendance non diminuée de ceux-ci à l’égard de ces armes.  Sur ce point, il a ajouté que les experts sont formels: le risque d’utilisation d’armes nucléaires a considérablement augmenté au cours de la décennie écoulée, un risque accru « par les rhétoriques menaçantes et les opérations militaires dangereuses ».  Nous avons vu cela tout récemment, a-t-il encore dit, au cours de l’invasion illégale et non provoquée de l’Ukraine par la Russie, une invasion « qui a eu pour effet immédiat de briser la valeur des garanties négatives de sécurité données aux États non dotés ». 

La Nouvelle-Zélande condamne les actions de la Russie dans les termes les plus forts possibles.  M. Twyford a souhaité que la communauté internationale prépare dès à présent l’après-invasion de l’Ukraine en réaffirmant, notamment au cours de la Conférence, son engagement total envers les institutions internationales, les enceintes multilatérale et le désarmement nucléaire, cela pour éviter une intensification de la course aux armements et le développement d’un monde davantage polarisé.  Pour le Ministre, la Conférence sera couronnée de succès si un accord est trouvé qui rétablisse la confiance de tous quant à l’intention affichée des États dotés d’armes nucléaires de remplir leurs obligations et engagements en matière de désarmement vérifié. 

Mme ANNALENA BAERBOCK, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a souligné l’avenir incertain qui entoure le TNP, avant de rappeler que celui-ci n’est pas qu’une « simple feuille de papier » mais symbolise l’un des engagements les plus fondamentaux de l’humanité: un monde débarrassé de l’arme nucléaire.  « Si nous pouvions nous rapprocher d’un centimètre de cet objectif pendant les prochaines semaines, alors nos efforts n’auraient pas été vains », a-t-elle ajouté. 

La Ministre a appelé à réaffirmer les principes fondamentaux du TNP, une action d’autant plus importante que nous faisons face aux attaques répétées de la Russie contre un ordre international fondé sur des règles, a-t-elle affirmé.  Elle a appelé les États dotés de l’arme nucléaire à prendre des mesures crédibles de désarmement.  « Aujourd’hui, la Russie fait le contraire et la Chine renforce son arsenal », a déploré la Ministre, avant d’appeler au dialogue. 

Mme Baerbock a également exhorté l’Iran à préserver le Plan d’action global commun, en rappelant qu’aucun État non-nucléaire n’avait besoin d’un uranium enrichi à 60%.  Elle a appelé la Conférence d’examen à se montrer unie face à la plus grave violation du TNP, celle posée par le programme nucléaire de la RPDC.  Enfin, Mme Baerbock a souligné l’importance de dépasser toute « polarisation » et de conférer un poids égal aux vues des pays du Nord et des pays du Sud au sein de « la communauté du TNP ».

M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, a reconnu qu’en raison du « conflit militaire en Ukraine », la réalisation des objectifs de la non-prolifération, ainsi que la sauvegarde du TNP lui-même, sont plus importants que jamais.  En tant que pays voisin de l’Ukraine, la Hongrie est d’avis que toutes les voies possibles vers la paix et un règlement négocié du conflit doivent être explorées de toute urgence, cela compte tenu de la nécessité impérieuse d’éviter tout escalade nucléaire.  Il a rappelé qu’en tant que pays d’Europe centrale, la Hongrie était bien placée pour savoir que cette région subissait fortement les conséquences des tensions Est-Ouest.

Par ailleurs, le Ministre a réitéré l’engagement de son pays d’honorer ses obligations au titre des trois piliers du TNP: le désarmement nucléaire, la non-prolifération et l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Sur ce dernier point, il a expliqué que l’énergie nucléaire reste un élément clef du mix énergétique hongrois pour répondre durablement à la demande croissante d’électricité abordable.  Les nouveaux blocs de la centrale nucléaire de Paks, construits en coopération avec plusieurs entreprises de plusieurs pays et basés sur une conception russe, seront encore plus importants dans les circonstances actuelles d’un marché de l’énergie extrêmement instable, a-t-il aussi dit.  Il a conclu en soulignant que la Hongrie appuie pleinement le travail accompli par l’AIEA pour promouvoir les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire « d’une manière sûre et sécurisée ».

Mme ANN CHRISTIN LINDE, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a dénoncé l’agression russe en Ukraine, avant de se dire vivement préoccupée par l’expansion et la modernisation des arsenaux nationaux.  Elle s’est alarmée des activités nucléaires de l’Iran et du programme nucléaire et balistique de la RPDC.  Elle a rappelé l’Initiative de Stockholm pour le désarmement nucléaire lancé par son pays et 15 autres États non nucléaires en 2019 en vue de la mobilisation d’un soutien politique pour des progrès concrets en matière de désarmement.  Elle a indiqué que 22 propositions avaient été avancées dans le cadre de cette initiative, telles que la réduction du rôle des armes nucléaires dans les doctrines de défense, le renforcement des garanties négatives de sécurité ou encore l’entrée en vigueur du TICE. 

Insistant sur le rôle crucial joué par l’AIEA, la Ministre a appelé à la doter des meilleurs outils d’inspection possibles.  La Suède, qui mène une politique étrangère féministe, est convaincue que l’intégration de la question du genre dans tous les processus de décision en matière de non-prolifération est cruciale, comme l’est l’engagement des générations les plus jeunes, a conclu Mme Linde.

M. AKAN RAKHMETULLIN, Vice-Ministre des affaires étrangère du Kazakhstan, au nom des États parties au Traité de Semipalatinsk sur une zone exempte d’armes nucléaires en Asie centrale, à savoir le Kirghizistan, le Tadjikistan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan et le Kazakhstan, a déclaré que, depuis 15 ans, ces pays respectent l’engagement pris d’interdire la production, l’acquisition et le déploiement d’armes nucléaires et de leurs composants ou d’autres dispositifs nucléaires explosifs sur leur territoire.  Soulignant que la zone exempte d’armes nucléaires d’Asie centrale se situe dans une région enclavée entre deux puissances nucléaires et couvre l’ancien site d’essais nucléaires de Semipalatinsk, il a attiré l’attention sur l’importance de la réhabilitation environnementale des territoires touchés par les déchets radioactifs.  Nous exhortons tous les gouvernements et les organisations internationales spécialisées dans le domaine du nettoyage et de l’élimination des contaminants radioactifs à apporter une assistance pérenne et appropriée aux États d’Asie centrale pour l’évaluation radiologique et l’assainissement des anciens sites d’essais ainsi que des usines d’extraction d’uranium, a-t-il ajouté.  Le représentant a en outre appelé au renforcement de la coopération entre les zones exemptes d’armes nucléaires, qui sont un instrument avéré de non-prolifération, pour leur permettre de contribuer plus en avant encore à l’avènement d’un monde exempt de telles armes.  À cet égard, il a annoncé que les États d’Asie centrale travailleraient activement en ce sens pendant la Conférence d’examen et l’élaboration de son document final. 

M. IULIAN FOTA, Secrétaire d’État aux affaires stratégiques de Roumanie, a dit que la Conférence se déroule dans un environnement de sécurité fondamentalement modifié, marqué par l’agression militaire illégale de la Russie contre l’Ukraine, qui sape les trois piliers du régime du TNP.  La Russie a violé de manière flagrante le Mémorandum de Budapest de 1994.  En outre, les attaques aveugles de l’armée russe sur et autour des installations nucléaires ukrainiennes ont accru le risque d’accident nucléaire, avec des conséquences potentiellement graves pour la santé humaine et l’environnement.  M. Fota a demandé que la Russie retire immédiatement son personnel militaire de la centrale nucléaire de Zaporijia afin que les autorités ukrainiennes puissent reprendre leurs responsabilités souveraines et que le personnel technique puisse exercer ses fonctions sans pression ni ingérence.  La Roumanie, a ajouté le Secrétaire d’État, appuie l’aide de l’AIEA à l’Ukraine dans le domaine de la sûreté et de la sécurité nucléaires et à assurer la mise en œuvre des garanties. 

Rappelant les contributions de son pays à la mise en œuvre du Traité, M. Fota a cité notamment la tenue de la Conférence internationale de haut niveau sur la sécurité nucléaire à Vienne en 2021.  La Déclaration ministérielle issue de la Conférence a offert aux États membres de l’AIEA l’occasion de réaffirmer les objectifs communs de non-prolifération nucléaire, de désarmement nucléaire et d’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.  La Roumanie préconise un processus progressif et pragmatique de désarmement nucléaire, fondé sur une approche progressive, garantissant une sécurité non diminuée pour toutes les parties, a indiqué le Secrétaire d’État.  Il a souligné la nécessité de préserver et de faire progresser les processus de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération. 

M. Fota a appelé la Chine à respecter ses engagements internationaux au titre du TNP et à se joindre aux négociations de bonne foi avec les États-Unis et la Russie sur les limitations des armes nucléaires et sur les mesures visant à réduire les risques et à renforcer la confiance.  Les Parties au TNP ne peuvent ignorer les défis en matière de prolifération tels que ceux de la RPDC, de la Syrie et de l’Iran, a-t-il ajouté.  En outre, le changement du statut non nucléaire du Bélarus est une autre évolution inquiétante. 

M. RUSLAN BOLBOCEAN, Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères et de l’intégration européenne de la République de Moldova, a regretté que la réunion d’aujourd’hui se tienne à un moment très difficile de l’histoire moderne, condamnant plus particulièrement « l’agression militaire non provoquée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine » et réaffirmant le plein soutien de son pays à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues.  Les activités militaires dans et autour des sites nucléaires ukrainiens, y compris la zone d’exclusion de Tchernobyl et la centrale nucléaire de Zaporijia, ont suscité de vives inquiétudes dès les premiers jours de la guerre et continuent de poser un grand risque pour l’ensemble du continent, a-t-il rappelé.  À cet égard, le représentant a réaffirmé la centralité du TNP dans le régime mondial de non-prolifération nucléaire en appelant à son universalisation, afin de poursuivre la non-prolifération et le désarmement nucléaires conformément à l’article VI du Traité, de bonne foi et dans un système international fondé sur des règles.

Au niveau national, la République de Moldova prend toutes les mesures nécessaires pour empêcher d’éventuels transferts à travers son territoire de tous composants, matières et technologies liés aux armes de destruction massive, a assuré le représentant.  L’engagement et la coopération actifs avec d’autres pays et organisations internationales et régionales compétentes offrent la possibilité d’utiliser et d’appliquer l’expertise et les meilleures pratiques dans ce domaine, a-t-il fait valoir, et contribuent efficacement à la prévention et à la lutte contre le trafic illicite de matières radiologiques et nucléaires. 

Réitérant en outre la nécessité urgente de mettre pleinement en œuvre la résolution de 1995 sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et de toutes autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, le représentant a encouragé les pays de la région à poursuivre leur dialogue à cet égard.  S’adressant ensuite à la République populaire démocratique de Corée, il lui a demandé d’abandonner toutes les armes et programmes nucléaires existants, de revenir le plus rapidement possible au TNP et d’adhérer à son accord de garanties avec l’AIEA en vue de parvenir à la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la péninsule coréenne de manière pacifique.

Le représentant a apporté le ferme soutien de la Moldova à l’Initiative de Stockholm pour le désarmement nucléaire, qui stipule que « la pleine application du TNP, y compris l’élimination complète des armes nucléaires, demeure le meilleur moyen d’éliminer les risques nucléaires » et que la Conférence d’examen devrait prendre des mesures pratiques en vue d’une réduction des risques nucléaires dans le cadre d’efforts plus larges de désarmement, notamment en appelant à des dialogues réguliers, approfondis et structurés entre les États dotés d’armes nucléaires et tous les États parties sur des mesures spécifiques de réduction des risques.

M. SANG WOOK HAM, Vice-Ministre des affaires multilatérales et mondiales au Ministère des affaires étrangères de la République de Corée, a remarqué qu’au moment où la crédibilité et la pertinence du TNP sont remises en question, nous sommes témoins d’une rhétorique nucléaire dangereuse et irresponsable et de menaces d’utiliser des armes nucléaires.  Les inquiétudes augmentent à mesure que la transparence diminue en ce qui concerne les stocks, la posture et les opérations nucléaires, et les fossés se sont creusés dans l’évaluation des progrès en matière de désarmement nucléaire, s’est-il alarmé

Le Vice-Ministre a émis l’espoir que cette conférence d’examen se concentrera sur la réaffirmation des engagements communs et l’identification d’actions concrètes pour faire avancer les trois piliers du TNP.  Tout d’abord, il a observé que l’environnement de sécurité compliqué actuel exige des efforts sincères de la part des États dotés pour réduire les risques nucléaires et réaliser des progrès en matière de désarmement nucléaire.  Les P5, en particulier, devraient assumer leurs responsabilités en vertu de l’article VI du Traité.  La déclaration des dirigeants du P5 de janvier 2022 a réaffirmé qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée, a rappelé M. Ham, ajoutant qu’elle a également clairement exprimé l’intention de s’engager dans des efforts bilatéraux et multilatéraux visant à renforcer la stabilité et à accroître la compréhension et la confiance mutuelles.  Cette volonté affichée doit maintenant se traduire par des actions concrètes.  Le Vice-Ministre a donc invité tous les États dotés à considérer l’approche ambitieuse mais réaliste des « étapes » préconisées par l’Initiative de Stockholm.

En outre, la République de Corée exhorte les États parties qui n’ont pas encore adopté les accords de garanties généralisées et le protocole additionnel de l’AIEA à les conclure et à les mettre en vigueur sans délai.  En tant que fervent partisan du Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien, le Vice-Ministre a encouragé toutes les parties concernées à reprendre un véritable dialogue dès que possible et à retrouver le chemin du plein respect de cet accord historique.  Il a réaffirmé l’appui de son pays à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. 

M. Ham a également fait valoir que la RPDC reste une autre question prioritaire de non-prolifération.  Tout en développant sans relâche des programmes nucléaires et de missiles, la RPDC a lancé des missiles balistiques à une fréquence sans précédent, 31 cette année seulement, en violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, a rappelé le Vice-Ministre.  En outre, la RPDC est jugée techniquement prête pour un nouvel essai nucléaire, qui serait son septième, a-t-il précisé.  Notant que la RPDC est le seul pays qui a abusé du régime du TNP et développé ouvertement des armes nucléaires, il a estimé que la manière avec laquelle la communauté internationale répondra aux défis nucléaires de la RPDC dans le cadre du TNP servira non seulement de message à la RPDC, mais sera un test décisif sur la viabilité du régime du TNP lui-même.  Il a exhorté la RPDC à cesser toutes sortes de provocations, à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité, à se conformer pleinement au TNP dans les plus brefs délais et à se dénucléariser de manière complète, vérifiable et irréversible.  Dans le même temps, le Vice-Ministre a affirmé que la porte du dialogue reste toujours ouverte.

M. AKAN RAKHMETULLIN, Vice-Ministre des affaires étrangère du Kazakhstan, reprenant la parole en sa capacité nationale, a notamment affirmé que le dialogue et la coopération entre États dotés d’armes nucléaires sont plus importants que jamais pour réduire les tensions et les risques d’escalade nucléaire.  Nous demandons instamment aux États dotés d’examiner positivement les mesures concrètes proposées par l’Initiative de Stockholm pour faire progresser le désarmement nucléaire et garantir que, dans l’intérêt de l’humanité, les armes nucléaires ne seront plus jamais utilisées, a-t-il plaidé.  Le représentant a également assuré que son pays, qui présidera la troisième réunion des États parties au Traité d’interdiction des armes nucléaires, continuera de s’employer sans relâche « pour réaliser nos aspirations de longue date à un monde exempt d’armes nucléaires ». 

M. TIM AYRES, Ministre adjoint du commerce de l’Australie, a appelé tous les participants de cette conférence à œuvrer pour éliminer les armes nucléaires, en soulignant la détérioration de l’environnement sécuritaire mondial.  Il a condamné « l’agression insensée » de la Russie en Ukraine, avant de se dire préoccupé par les activités de la RPDC et de l’Iran.  Il a indiqué que son pays, lors de cette conférence, va, comme il est de tradition pour l’Australie, défendre des mesures réalistes et pratiques permettant de se rapprocher des objectifs.  Il a appuyé le travail de l’AIEA afin que tous les États puissent bénéficier des apports de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. 

En septembre dernier, l’Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni ont entamé des efforts trilatéraux en vue de l’acquisition par l’Australie de sous-marins à propulsion nucléaire, comme prévu dans le TNP, a poursuivi le représentant.  Les trois partenaires sont engagés en faveur du renforcement du régime de non-prolifération, a-t-il dit.  L’Australie agit dans la transparence, en étroite coopération avec l’AIEA, et fournit des éléments d’information actualisés au cours de cette période de consultation de 18 mois, a-t-il assuré.  Enfin, il a reconnu que les conséquences des essais nucléaires ont été subies de manière disproportionnée par les peuples autochtones.

M. CARLOS D. SORRETA, Sous-Secrétaire aux affaires étrangères pour les affaires multilatérales et les relations économiques internationales des Philippines, a dit « avoir vu » ces dernières années, dans sa région, des défis à la non-prolifération nucléaire, sous la forme d’une modernisation des arsenaux nucléaires, d’une absence de mécanismes de dialogue stratégique fonctionnels et du refus de répondre à l’appel de la communauté internationale pour une plus grande transparence dans le respect des engagements en matière de désarmement nucléaire.  Ces défis constituent un test pour cette conférence et pour la crédibilité du système multilatéral.  Nous devons réussir ce test et démontrer que le système reste pertinent et fonctionne, et que nous pouvons surmonter nos différences, a exhorté le Sous-Secrétaire d’État.  Il a souhaité que cette conférence envoie un message politique clair et fort affirmant notre engagement collectif en faveur de l’élimination des armes nucléaires et de la mise en œuvre du TNP dans l’ensemble de ses trois piliers, afin que le monde puisse vivre dans la paix. 

Selon le Sous-Secrétaire d’État, la responsabilité de débarrasser le monde des armes nucléaires incombe aux États dotés d’armes nucléaires, qui doivent réduire et éliminer tous ces types d’armes de manière transparente et réduire leur rôle dans leurs doctrines ou politiques militaires et de sécurité.  Il les a exhortés à s’engager dans un dialogue constructif pour parvenir à de nouveaux accords bilatéraux ou trilatéraux.  Il a aussi appuyé les efforts visant à réduire les risques nucléaires en tant que mesure intermédiaire tout en travaillant à l’élimination totale des armes nucléaires. 

Les États dotés d’armes nucléaires doivent, sans délai, prendre des garanties de sécurité négatives efficaces, universelles, inconditionnelles, non discriminatoires, irrévocables et juridiquement contraignantes à l’égard des États non dotés d’armes nucléaires, a insisté M. Soretta, qui a regretté la décision de certains États dotés d’améliorer le rôle des forces nucléaires dans leurs doctrines de sécurité, le manque de transparence et le bon fonctionnement des mécanismes de dialogue entre eux, et les risques persistants d’instabilité dans l’environnement géopolitique, y compris dans la région Asie et Pacifique.  Cela exige que les États dotés d’armes nucléaires émettent des assurances, sans conditions.  Le Sous-Secrétaire d’État a demandé des discussions urgentes sur cette question pendant cette dixième Conférence d’examen.  Il a enfin exhorté les États dotés à adhérer dès que possible à tous les traités créant des zones exemptes d’armes nucléaires, y compris le Traité de Bangkok et ses protocoles. 

Mme HILDEGARDE NAUGHTON, Ministre déléguée au Ministère de l’environnement, du climat et des communications et au Ministère des transports de l’Irlande, a déclaré que la poursuite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la « rhétorique nucléaire » de cette dernière et ses actions militaires menées à proximité d’installations nucléaires civiles menaçaient les piliers du TNP.  C’est pourquoi, elle a réitéré l’appui de son pays à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. 

Je rappelle qu’en janvier dernier, les cinq États dotés d’armes nucléaires, dont la Russie, ont déclaré « qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée », a ajouté la Ministre, regrettant vivement que les actions de la Russie en Ukraine aient remis en question un tel engagement.  Selon Mme Naughton, il est plus que jamais urgent que les États reconnaissent l’absence de progrès concrets en matière de désarmement nucléaire depuis la dernière Conférence d’examen.  L’article VI du TNP fournit le cadre pour parvenir à un monde sans armes nucléaires et les États parties doivent honorer « enfin » leurs engagements à son égard.  Ils doivent prendre des actions immédiates pour, dans le contexte actuel de renforcement du rôle des armes nucléaires dans les doctrines nationales de sécurité, réduire les risques nucléaires, un préalable pour l’application de mesures pratiques d’élimination des armes nucléaires.  Des recommandations spécifiques sont énoncées en ce sens dans nos documents de travail pendant le cycle d’examen, appuyons-nous dessus, a-t-elle enjoint. 

Par ailleurs, Mme Naughton a souhaité que la compatibilité du TNP et du Traité d’interdiction des armes nucléaires soit soulignée dans le document final dans la partie relatives aux conséquences humanitaires d’une explosion nucléaire.  Elle a également estimé que seule la pleine mise en œuvre du Plan d’action global commun concernant le programme nucléaire iranien permettrait de s’assurer de la nature pacifique des activités nucléaires de ce pays et que la dénucléarisation de la péninsule coréenne exige le retour de la République populaire démocratique de Corée au sein du régime de non-prolifération du Traité. 

M. LASHA DARSALIA, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Géorgie, a condamné l’agression non provoquée et injustifiée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, qui foule au pied l’esprit du Mémorandum de Budapest de 1994.  Il a dit être préoccupé par l’occupation illégale par la Russie de la plus grande centrale nucléaire d’Europe à Zaporijia exhortant la Russie à se retirer immédiatement de la centrale nucléaire afin que les autorités ukrainiennes puissent reprendre leurs responsabilités souveraines et que le personnel technique puisse exercer ses fonctions sans pression et ingérence extérieures.  Le Vice-Ministre a réitéré que le système de garanties de l’AIEA reste l’élément fondamental du régime de non-prolifération nucléaire et joue un rôle indispensable dans la mise en œuvre du Traité.  Selon lui, l’absence de mécanismes de contrôle dans les territoires occupés de la Géorgie et de l’Ukraine crée un terrain fertile pour toutes sortes d’activités illégales, y compris la contrebande d’armes de destruction massive et de matériel connexe.  Les deux régions de Géorgie occupées par la Russie représentent un défi sur le plan de la sécurité, a-t-il alerté en assurant que le Gouvernement géorgien a documenté les tentatives de contrebande de matières nucléaires et radioactives via la Géorgie.  Il a indiqué que grâce aux mesures efficaces prises par les forces de l’ordre géorgiennes, ces activités illégales ont été empêchées.  Il a conclu en recommandant à chaque État de garder comme priorité l’universalisation et l’entrée en vigueur rapide du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires.

M. KIM NGOC HA, Vice-Ministre des affaires étrangères du Viet Nam, a notamment appelé les États à agir de manière équilibrée dans le cadre des trois piliers du TNP, la première exigence de la communauté internationale restant de convaincre les États dotés de l’arme nucléaire de renoncer à leurs arsenaux.  Il a réaffirmé le soutien de son pays aux zones exemptes d’armes nucléaires ainsi qu’à l’exercice du droit inaliénable des parties au TNP aux usages pacifiques de l’énergie nucléaire.  L’an dernier, les États-Unis à eux seuls ont dépensé l’équivalent de quatre fois le budget du développement des Nations Unies au perfectionnement de leurs armes nucléaires, a-t-il pointé, appelant la communauté internationale à œuvrer à la paix en honorant leurs obligations au titre du TNP et du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Mme DINARA KEMELOVA, Vice-Ministre des affaires étrangères du Kirghizistan, a dit que le TNP est la pierre angulaire du régime de non-prolifération, avant de souligner l’importance des zones exemptes d’armes nucléaires.  Elle a rappelé que son pays est président en exercice du traité établissant une telle zone en Asie centrale.  La Vice-Ministre a indiqué qu’il y a deux semaines, les chefs d’État des pays d’Asie centrale ont signé un traité sur l’amitié, les relations de bon voisinage et la coopération pour le développement de l’Asie centrale, par lequel ils se sont engagés à renforcer leur coopération dans le domaine de la non-prolifération.  Elle a souligné l’importance de sensibiliser le grand public aux enjeux du désarmement et de la non-prolifération, signalant à cet égard l’intention de son pays de présenter devant l’Assemblée générale un projet de résolution sur ce sujet.  Enfin, Mme Kemelova a indiqué que son pays, s’il est élu membre non permanent du Conseil pour les années 2027-2028, fera de cette question l’une des priorités de son mandat.  « Nous appuyons la sauvegarde du caractère unique du TNP, plateforme inclusive pour un dialogue interétatique entre égaux. »

Mme ANGELES MORENO BAU, Vice-Ministre des affaires étrangères et internationales de l’Espagne, a souligné que la sécurité collective est aujourd’hui menacée en regrettant que les liens entre les puissances sont déstabilisés sur fond d’une nouvelle course aux armements.  À ses yeux, le TNP, depuis 50 ans, est fondamental et il ne faut surtout pas revenir en arrière.  C’est ce que fait l’Espagne dans le cadre de l’Initiative de Stockholm, a-t-elle expliqué, avant d’appeler la communauté internationale à rétablir les rapports de confiance, à renouer le dialogue pour le désarmement et à travailler sur les questions des garanties de sécurité de l’AIEA, du TICE et de sa ratification par tous et des négociations qui permettront d’adopter au plus vite le traité sur les matières fissiles.  Elle a souligné le rôle crucial de l’AIEA avant de soutenir aussi la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient en espérant que l’ensemble des acteurs pertinents pourront participer à la prochaine conférence sur cette question. 

La Ministre a ensuite appelé la RPDC à cesser ses provocations et à s’engager sur la voie d’une dénucléarisation totale et vérifiable de la péninsule coréenne.  L’Espagne défend toutefois le droit de tous les pays à l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Mme Moreno Bau a également encouragé l’AIEA à relancer les bourses Marie Curie afin de permettre aux femmes de pleinement participer au désarmement nucléaire.

M. MYKOLA TOCHYTSKYI, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a déclaré que l’ouverture de cette conférence coïncide avec la cent-cinquante-neuvième journée de l’agression à grande échelle lancée par une puissance nucléaire contre un État non doté.  En sus des destructions des infrastructures civiles, la Russie menace de recourir à des armes nucléaires.  C’est le contexte dans lequel se déroule cette conférence d’examen du TNP, a rappelé le Ministre, pour qui, depuis 2014, la question de l’efficacité et de l’intégrité du TNP est devenue bien plus complexe et encore plus dramatique du fait de l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine.  Cette agression a provoqué un déséquilibre dangereux dans le système sécuritaire international existant et sape l’efficacité et la fiabilité du régime de non-prolifération.  En occupant la Crimée, la Russie a violé le Mémorandum de Budapest, a ajouté le Ministre. 

La Russie a ainsi montré que ses obligations juridiques de puissance dotée de l’arme nucléaire de respecter l’indépendance et la souveraineté d’un État non-nucléaire et de s’abstenir de menacer ou de recourir à la force contre l’intégrité territoriale d’un pays ne valent rien.  Nous aurions dû arrêter l’attaque de la Russie à ce moment-là mais nous ne l’avons pas fait, a-t-il regretté.  Ce manque de vigilance et cette incapacité à agir de manière résolue a entraîné la violation par la Russie du préambule du TNP et des trois piliers du Traité, a-t-il accusé.  En outre, la Russie a développé de manière injustifiée ses capacités de frappe et menace ouvertement le monde avec de nouveaux armements.  Par ailleurs, la Russie a élargi de facto l’aire géographique de déploiement des armes nucléaires après l’occupation de la Crimée.  Elle a lancé des missiles capables de porter des têtes nucléaires sur les villes ukrainiennes depuis le territoire du Bélarus, qui est un État non doté. 

Pour la première fois de l’histoire, des installations nucléaires civiles ont été transformées en objectifs militaires et utilisés par l’armée russe pour porter atteinte aux dispositions du TNP, a accusé le Vice-Ministre.  Des actions communes conjointes sont nécessaires pour prévenir un désastre nucléaire mondial, a-t-il estimé, demandant de fermer le ciel au-dessus des centrales nucléaires en Ukraine. 

Pour le Ministre, la communauté internationale est piégée et nul ne peut aujourd’hui prédire l’avenir de TNP.  Le futur du Traité est également remis en cause par une question qui n’a pas été résolue, à savoir le programme de missile et nucléaire de la République démocratique populaire de Corée et aggravé par la question du Plan d’action global commun.  La question des garanties de sécurité négatives devrait être considérée comme prioritaire, a-t-il ajouté, avant de souhaiter l’établissement de nouvelles zones exemptes d’armes nucléaires, notamment dans notre région et la poursuite du renforcement du système de garanties. 

M. GRAHAM STUART, Ministre d’État au Bureau des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement du Royaume-Uni, a réaffirmé « l’engagement sans équivoque du Royaume-Uni de parvenir à l’élimination totale de notre arsenal nucléaire, aux côtés des autres États dotés d’armes nucléaires ».  Il a rappelé que, depuis la guerre froide, le Royaume-Uni a considérablement réduit le nombre de ses armes nucléaires, tout en désactivant les têtes nucléaires restantes.  Nous sommes le seul État doté d’armes nucléaires à avoir réduit sa capacité de dissuasion à un seul système d’armes, a-t-il ajouté.  M. Stuart a également assuré que son pays continuerait de jouer un rôle de premier plan dans le désarmement en demeurant à la pointe de l’innovation en matière de vérification, en défendant la transparence et en contribuant à la réduction des risques. 

Évoquant ensuite les tensions sécuritaires internationales, M. Stuart a considéré que les actions et la rhétorique irresponsables de la Russie soulèvent des questions légitimes sur son attachement au droit international et sur le respect de ses obligations, y compris celles qui découlent du TNP.  Le Ministre, qui s’est dit profondément préoccupé par le fait que l’Iran et la RPDC continuent d’intensifier leurs programmes nucléaires malgré les appels au dialogue et à la diplomatie, a indiqué que la publication, aujourd’hui, d’une déclaration ministérielle conjointe avec la France et les États-Unis réaffirmait leurs engagements pris en janvier, avec les autres États dotés d’armes nucléaires, de tout mettre en œuvre pour empêcher une guerre nucléaire.  Selon lui, une grande partie du succès du TNP réside dans la réduction de la course aux armements nucléaires par le biais de l’application du régime de garanties de l’AIEA.  Le Royaume-Uni continuera de défendre ce régime et l’Agence tout en s’efforçant d’améliorer la sécurité nucléaire en ratifiant les principales conventions, a-t-il promis. 

M. EIVIND VAD PETERSSON, Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Norvège, a rappelé que le TNP est la pierre de touche du régime de non-prolifération, avant de dénoncer l’agression russe contre l’Ukraine et la rhétorique nucléaire « insensée » de la Russie.  Il s’est aussi dit préoccupé par les activités de la RPDC et de l’Iran.  Tous les États dotés de l’arme nucléaire doivent s’acquitter de leurs engagements, a-t-il dit, en rappelant l’irréversibilité du désarmement.  Il a rappelé l’Initiative de Stockholm pour le désarmement nucléaire et invité tous les États à la rejoindre.  Il a demandé l’entrée en vigueur du TICE, avant de souligner le rôle crucial de l’AIEA.  Enfin, il a souhaité une sensibilisation accrue des jeunes aux enjeux du désarmement.

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan), au nom du Groupe des États du Mouvement des pays non alignés parties au TNP, a estimé que cette conférence d’examen était l’occasion d’évaluer la mise en œuvre des engagements pris et d’identifier les domaines dans lesquels de nouveaux progrès devraient être recherchés pour assurer la mise en œuvre intégrale, efficace et équilibrée du Traité.  Le Groupe souligne que les problèmes de prolifération sont mieux traités par des accords multilatéraux et universels et non de manière discriminatoire.  Il est urgent de négocier et de conclure une convention générale sur les armes nucléaires, contenant également un programme progressif d’élimination complète des armes nucléaires dans un délai déterminé.  Le représentant s’est dit préoccupé du dernier examen de la doctrine nucléaire des États-Unis et du Royaume-Uni.  Le Groupe demande instamment qu’il soit immédiatement mis fin à cette tendance qui est en fait une nouvelle course aux armements nucléaires et donc une violation flagrante de l’article VI du Traité. 

Dans l’attente de l’élimination totale des armes nucléaires, le Groupe demande que tous les États dotés d’armes nucléaires discutent rapidement des garanties de sécurité effectives et juridiquement contraignantes pour tous les États non dotés contre l’emploi ou la menace d’emploi d’armes nucléaires, en toute circonstance.  Confiant dans l’impartialité et le professionnalisme de l’AIEA, le représentant a rejeté toute tentative de politiser le travail de l’Agence et appelé tous les États qui ne sont pas parties au Traité à y adhérer et à placer toutes leurs installations et activités nucléaires sous des garanties intégrales de l’AIEA.  Tous les États parties au Traité doivent s’abstenir de transférer des technologies et des matières nucléaires à des États non parties, a ajouté le représentant, qui a regretté l’échec de la neuvième Conférence d’examen du TNP, qui n’avait pas réussi à parvenir à un consensus sur un document final. 

Cette dixième conférence d’examen doit réaffirmer l’importance des engagements pris lors des conférences d’examen de 1995, 2000 et 2010 sur le désarmement nucléaire, la non-prolifération nucléaire et les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire et devrait également appeler à leur pleine réalisation, a affirmé le représentant. 

Le Groupe réaffirme le rôle important des zones exemptes d’armes nucléaires y compris au Moyen-Orient.  En attendant la création de cette dernière, le Groupe exige qu’Israël adhère au TNP sans condition préalable et sans plus tarder, et soumette rapidement toutes ses installations nucléaires à des garanties intégrales de l’AIEA.  Le Groupe a soumis neuf documents de travail à cette conférence d’examen, a enfin annoncé le représentant. 

Mme VAN DEELEN, de l’Union européenne, a déclaré que l’occupation russe en cours de la centrale nucléaire de Zaporijia porte gravement atteinte au TNP.  Pour répondre à cette fragilisation flagrante du Traité, elle a jugé de la plus haute importance que tous les États parties au TNP réitèrent leur soutien sans équivoque au Traité en tant que pierre angulaire du régime mondial de non-prolifération nucléaire, « fondement essentiel de la poursuite du désarmement nucléaire conformément à son article VI ».  Nous sommes fermement convaincus qu’une approche multilatérale et fondée sur des traités constitue le meilleur moyen de maintenir et de renforcer la paix et la sécurité internationales, a-t-elle insisté.  D’autre part, elle a souligné que l’UE soutient les efforts diplomatiques intensifs en cours au sein de la Commission mixte du Plan d’action global commun et les contacts du Haut Représentant de l’UE en tant que coordinateur de la Commission mixte avec tous les partenaires concernés, à commencer par la partie iranienne.  Après avoir exhorté la République populaire démocratique de Corée à engager des discussions constructives visant à reprendre la dénucléarisation « complète, vérifiable et irréversible » de la péninsule coréenne, elle a réaffirmé le soutien de l’UE au droit des parties au TNP aux usages pacifiques de l’énergie nucléaire.  Enfin, elle a appelé à une participation égale des femmes et des hommes dans le domaine du désarmement, de la non-prolifération et de la maîtrise des armements.

M. SOVANN KE (Cambodge), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a estimé que le report de la Conférence en raison de la pandémie était nécessaire.  Il a rappelé que l’ASEAN a présenté pour cette conférence un mémorandum relatif au Traité de Bangkok sur l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud-Est.  L’ASEAN est convaincue que l’élimination des armes nucléaires est la seule option. 

Le représentant a espéré que la Conférence aboutira à une feuille de route claire et équilibrée.  Il a dénoncé la poursuite d’essais nucléaires et demandé l’universalisation du TICE.  Il a demandé la pleine application de l’article VI du TNP.  L’ASEAN a toujours été à l’avant-garde des efforts de non-prolifération, a-t-il rappelé, avant de demander la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Enfin, il a réaffirmé le droit inaliénable des pays à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte), qui s’exprimait au nom de la Coalition pour un nouvel ordre du jour (NAC) qui comprend le Brésil, l’Irlande, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, l’Afrique du Sud et l’Égypte, a rappelé que le monde avait radicalement changé depuis la dernière conférence d’examen du TNP et a insisté sur l’importance d’un résultat constructif et significatif cette année.  La réalité est que les États dotés d’armes nucléaires et les États bénéficiant de garanties de sécurité nucléaire élargies ont accru l’importance des armes nucléaires dans leurs doctrines, politiques et postures en matière de sécurité et de nucléaire.  Ce sont là des tendances inquiétantes, en contradiction avec la réalisation de l’objectif d’un monde exempt d’armes nucléaires. 

Les pays du NAC sont alarmés et consternés par les menaces d’utilisation des armes nucléaires et la rhétorique nucléaire de plus en plus véhémente.  Ils soulignent que toute utilisation ou menace d’utilisation d’armes nucléaires constitue une violation du droit international, y compris de la Charte des Nations Unies, et condamnent sans équivoque toute menace nucléaire, qu’elle soit explicite ou implicite et quelles que soient les circonstances.  La NAC est profondément préoccupée par la dimension nucléaire des récentes tensions internationales, y compris le conflit en Ukraine, a poursuivi le représentant, qui a exhorté tous les États parties au TNP à redoubler d’efforts pour mettre pleinement en œuvre l’obligation de son article VI et les actions et engagements convenus lors des conférences d’examen du TNP. 

Le TNP doit continuer d’être éclairé par la reconnaissance des conséquences humanitaires, sanitaires et environnementales mondialement dévastatrices et de l’impact économique de toute explosion nucléaire, a insisté le représentant.  Il a jugé profondément troublant de noter que, depuis la dernière Conférence d’examen en 2015, les États dotés avaient été réticents à progresser sur ces engagements et, dans certains cas, avaient remis en question leur validité.  Au lieu de cela, et contrairement aux engagements antérieurs, ils ont accru leur confiance en la dissuasion nucléaire dans leurs doctrines sécuritaires et militaires, étendu leurs arsenaux, annulé les réductions précédemment prévues et développé de nouveaux types d’armes nucléaires et leurs vecteurs, ce qui augmente considérablement le risque d’erreur de calcul et d’escalade. 

Il faut mettre fin aux tendances à accorder une place prépondérante à la dissuasion nucléaire dans les doctrines stratégiques, a plaidé le représentant, qui a noté qu’elles affaiblissent les arguments en faveur de mesures de non-prolifération renforcées et pourrait avoir l’effet inverse d’encourager la prolifération nucléaire.  Sept mois après que le États dotés du P5 eurent réaffirmé qu’« une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée », il n’est pas clair si tous les cinq se tiennent à cette déclaration, a-t-il regretté.  Comme l’a noté la NAC en janvier 2022, les mots doivent être suivis d’actions concrètes dans les termes de réductions tangibles et irréversibles des armes nucléaires.

Tout au long de chaque cycle d’examen du TNP et dans la résolution annuelle de l’Assemblée générale des Nations Unies, la NAC a toujours demandé et proposé des mesures pour accélérer la mise en œuvre des obligations et des engagements des États parties en matière de désarmement nucléaire, y compris le Traité d’interdiction des essais nucléaires, un traité d’interdiction des matières fissiles, la création de nouvelles zones exemptes d’armes nucléaires, en particulier au Moyen-Orient, et l’entrée en vigueur des protocoles juridiquement contraignants aux traités de zone existants ainsi que la révision de toute réserve connexe, la transparence et la vérification du désarmement nucléaire, entre autres, a tenu à rappeler le représentant.

Droits de réponse

Le représentant du Royaume-Uni a regretté la mention faite par l’Argentine d’armes nucléaires britanniques mobilisées pendant la « Guerre des Falkland ».  Aucune arme de ce type n’est entrée dans les eaux territoriales des îles Falkland, a-t-il assuré. 

La représentante de l’Argentine a rejeté le droit de réponse britannique, en soulignant que la question des zones maritimes continue de se poser sur la base d’un différend de souveraineté entre son pays et le Royaume-Uni, reconnu par les Nations Unies.  Où est passée la trentaine d’armes nucléaires britanniques dépêchées dans nos zones maritimes dans les années 1980 ? a demandé la représentante argentine. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.