Soixante-dix-septième session
27e & 28e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4356

La Troisième Commission appelle à prendre en compte les droits humains délaissés et examine les disparités en termes d’accès à la santé

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a poursuivi, aujourd’hui, ses échanges sur la promotion et la protection des droits de l’homme en dialoguant avec six rapporteurs et experts qui ont appelé à prendre en compte des droits oubliés, tels que les droits des minorités ou les droits culturels des populations locales.  Plusieurs d’entre eux ont également alerté les États Membres sur de nombreuses disparités en matière d’accès à la santé.  La Commission a ensuite poursuivi sa discussion générale sur ce point de l’ordre du jour. 

Premier titulaire de mandat à s’exprimer, le Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités a fait le constat d’un « échec presque complet » de l’intégration des droits des minorités aux Nations Unies.  Parlant d’inaction et de négligence flagrante dans la protection des droits des minorités, M. Fernand de Varennes a tenu à rappeler que ces populations sont aujourd’hui confrontées, à une échelle massive, à des menaces d’exclusion et de discrimination, voire à des appels au génocide.  Dans ce contexte, il a déploré une incapacité à répondre aux allégations extrêmement troublantes soulevées dans les organes de l’ONU au cours de l’année, y compris les allégations de crimes contre l’humanité contre les Ouïghours en Chine. 

Soucieux de répondre à l’absence d’initiatives institutionnelles pour protéger les droits des minorités, le Rapporteur spécial a avancé plusieurs pistes, recommandant notamment la mise en place d’un plan d’action pour intégrer ces droits aux trois piliers de l’ONU, la tenue de réunions dans le cadre du Forum permanent sur les questions relatives aux minorités ou encore une réflexion en vue de l’élaboration d’un traité sur cette question. 

Autres grands absents, cette fois des programmes et discussions sur le développement, les droits culturels ont été défendus par la Rapporteuse spéciale en charge de ce domaine.  Mme Alexandra Xanthaki a déploré que les projets de développement intègrent rarement les valeurs et les visions des populations locales et ce, alors qu’elles devraient être les premières bénéficiaires du processus de développement durable.  Selon la Rapporteuse, le développement culturel doit obtenir sa place en tant que pilier du développement durable aux côtés des piliers social, économique et environnemental.  Elle a donc appelé à inclure les droits culturels dans les discussions sur le développement, mais de façon adaptée aux cultures et philosophies des populations concernées. 

N’oublions pas les droits humains des personnes atteintes d’albinisme, notamment des migrants, réfugiés, demandeurs d’asile ou déplacés, a pour sa part plaidé l’experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes de cette maladie génétique. 

Mme  Muluka-Anne Miti-Drummond a rappelé que ces personnes, considérées comme handicapées en raison de leur déficience visuelle et de leur grande vulnérabilité au cancer de la peau, font souvent face à des traitements cruels, inhumains et dégradants.  Elle a notamment évoqué la situation des personnes atteintes d’albinisme dans les camps de réfugiés, où elles ne bénéficient que rarement de services et de produits de santé essentiels, tels que les écrans solaires et autres services dermatologiques et ophtalmiques. 

Le difficile accès aux soins de santé pour les migrants et les réfugiés a également été pointé par la Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible.  Mme Tlaleng Mofokeng s’est concentrée sur l’impact du racisme sur la dignité humaine, notamment sur le droit à la protection de la santé.  Constatant que les effets du racisme visent particulièrement les Noirs, les personnes d’ascendance africaine, les migrants et les peuples et minorités autochtones, elle a relevé que les migrants et réfugiés n’ont droit qu’aux soins de santé d’urgence, et pas aux soins de santé classiques et préventifs.  Elle a par ailleurs fait état d’une ségrégation résidentielle, puissant facteur prédictif de la santé et du bien-être, les communautés majoritairement composées de personnes d’ascendance africaine étant plus exposées aux toxines environnementales, aux polluants atmosphériques et aux agents cancérigènes.

Mme Mofokeng a en outre noté que, même dans les pays où les indicateurs de progrès globaux sont bons, les données au niveau national masquent souvent les disparités extrêmes entre les groupes de population au sein de ces pays.  Elle a ainsi relevé un impact disproportionné de la pandémie de COVID-19 sur les groupes victimes de racisme et de discrimination.  Cette pandémie a aussi mis en lumière les nombreuses disparités qui existent entre les régions et pays du monde, a observé l’expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale.  M.Obiora Okafor s’est penché sur les inégalités d’accès aux vaccins contre la COVID-19 entre pays du Sud et du Nord, constatant qu’un écart énorme subsiste entre la quantité de vaccins devant être distribués dans le monde et le nombre de ceux qui ont été alloués aux pays du Sud. 

L’expert indépendant a aussi fait état de disparités dans l’acquisition des vaccins.  En effet, a-t-il dit, les États à revenu élevé ont pour la plupart choisi de s’adresser directement aux fabricants, sans passer par le Mécanisme COVAX, tandis que les États principalement du Sud accusaient de longs retards d’approvisionnement.  De fait, M. Okafor a dit craindre que la pleine jouissance de certains droits humains à l’échelle mondiale continue de ne pas se réaliser, en grande partie à cause de la disparité entre régions du monde dotées ou non de vaccins. 

Enfin, les États Membres se sont entretenus avec le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, qui a centré son intervention sur les problèmes d’eau et d’assainissement dont souffrent les communautés rurales.  M. Pedro Arrojo-Agudo s’est notamment déclaré préoccupé par l’accaparement des terres des peuples autochtones par les grands producteurs d’agro-élevage ou les compagnies minières, une situation qui laisse de nombreuses communautés sans eau ni ressources. 

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 21 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

M. FERNAND DE VARENNES, Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités, a indiqué se concentrer sur les recommandations et conclusions du rapport au sujet de la protection des droits des minorités dans les institutions, structures et initiatives de l’ONU.  Trente ans après l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, nous avons affaire à une inaction et à une négligence flagrantes dans la protection des droits des minorités, a-t-il déploré.  Le Rapporteur spécial a donc appelé les Nations Unies et la communauté internationale à faire preuve de leadership dans ce domaine.

Il y a un échec presque complet de l’intégration des droits des minorités aux Nations Unies, a-t-il pointé, et ce, malgré une note d’orientation publiée il y a presque 10 ans par le Secrétaire général de l’époque.  Selon M. de Varennes, les minorités sont aujourd’hui confrontées, à une échelle massive et sans précédent, à des menaces d’exclusion et de discrimination, et même à des appels au génocide et aux crimes contre l’humanité.

Il n’est pas exagéré de dire qu’il y a eu une régression dans le niveau de reconnaissance et de protection des droits de l’homme des minorités, a poursuivi le Rapporteur spécial, dénonçant une incapacité à répondre aux allégations extrêmement troublantes qui ont été soulevées dans les communications adressées aux procédures spéciales et à d’autres organes des Nations unies au cours de l’année.  Il a, par exemple, mentionné le refus de la citoyenneté opposé à des millions de personne en Inde, les restrictions au droit de vote aux États-Unis ou encore les allégations de crimes contre l’humanité contre les Ouïghours et d’autres minorités principalement turques du Xinjiang, en Chine.

En outre, il a regretté l’absence d’initiatives institutionnelles majeures pour la protection des droits des minorités, allant jusqu’à parler de « négligence institutionnelle ».  Parallèlement, il a relevé une augmentation des niveaux de discours de haine, d’incitation à la violence, de désignation de boucs émissaires et de sectarisme conduisant à un monde plus injuste.  Les minorités représentent plus de trois quarts des apatrides dans le monde, a-t-il par ailleurs constaté, relevant que les minorités ne sont pas toujours protégées par l’état de droit.  Pire, les défenseurs des droits humains eux-mêmes sont persécutés, a-t-il dénoncé.  Si nous ne nous attaquons pas aux violations massives des droits de l’homme des minorités, le monde continuera à être confronté à des risques d’instabilité croissants et à une période de rupture de la paix et de la stabilité, a mis en garde le Rapporteur spécial. 

Pour remédier à cette situation, M. de Varennes a recommandé la mise en place d’un plan d’action pour renforcer la protection des droits des minorités et intégrer leurs droits à tous les piliers de l’ONU.  Il est évident, a-t-il conclu, qu’en raison du climat actuel, nous devons mieux protéger les minorités, en particulier dans le cadre du Forum des Nations Unies sur les questions relatives aux minorités.

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Union européenne s’est interrogée sur les moyens de lutter contre les discours de haine en ligne.  Comment veiller à ce que les réseaux sociaux ne soient pas utilisés à mauvais escient pour attiser les conflits ? a voulu savoir la délégation.  Les États-Unis ont souhaité en savoir plus sur les membres des groupes minoritaires qui sont confrontés à des problématiques trans-sectionnelles.  Que peuvent faire les États Membres pour mieux prévenir les conflits ayant trait aux droits des minorités, s’est enquis le Liechtenstein, tandis que la Suisse se demandait s’il est possible de revaloriser la nécessité de protéger les droits des minorités.  Comment renforcer le rôle des femmes des minorités dans la prévention des conflits ethniques et le maintien de la paix, a demandé à son tour la Slovénie.  De son côté, le Cameroun s’est demandé ce qui explique le désintérêt progressif pour les minorités aux Nations Unies, l’Ordre souverain de Malte s’interrogeant plutôt sur les actions concrètes qui peuvent être prises pour mieux intégrer les groupes marginalisés dans les processus de décision.

Le Bélarus a dénoncé une ingérence dans les affaires des États, indiquant comprendre que la Chine cherche à protéger sa souveraineté.  Ce dialogue important avec les minorités doit être mené au niveau national, a insisté la délégation.  Un message repris par la République islamique d’Iran, qui a appelé au respect du principe de non-ingérence, tout en se demandant comment s’attaquer aux discriminations raciales, en particulier contre les musulmans dans l’Union européenne.  La Chine a, elle, noté que les États-Unis n’ont toujours pas de mécanisme de protection juridique pour les minorités et a exprimé sa préoccupation à cet égard.  Les questions des droits humains aux Nations Unies doivent être menées de façon transparente et non politisée, a mis en garde la République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui a déploré des tentatives d’ingérence visant à détruire l’indépendance de certains États.  Affirmant elle aussi soutenir la position de la Chine, la République arabe syrienne est également revenue sur la situation aux États-Unis, demandant au Rapporteur spécial dans quelle mesure il peut agir pour prévenir les discriminations contre les minorités dans ce pays et s’il compte travailler avec l’administration américaine qui se sent supérieure à tous et continue de donner des leçons sur les droits humains.

Pour sa part, la Fédération de Russie a déploré que les minorités nationales soient pratiquement ignorées par les fonctionnaires des Nations Unies, dénonçant également une approche partisane et sélective des droits des minorités.  À cette aune, la délégation a jugé très intéressante la proposition de mettre en place un instrument juridiquement contraignant.  La Pologne a quant à elle dénoncé les discriminations dont est victime la minorité polonaise au Bélarus.  Après des prises de parole de l’Autriche et des Maldives, le Pakistan a sollicité l’avis du Rapporteur spécial sur « l’appel au génocide » contre la communauté musulmane en Inde. Est-il possible d’établir un instrument international qui protège les droits des minorités, a voulu savoir la délégation, s’interrogeant également sur la faisabilité d’un mécanisme de prévention des conflits afin d’agir plus rapidement.  Les déclarations du Pakistan à son égard ont été condamnées par l’Inde, qui a accusé ce pays de « décimer » les minorités.

Dans sa réponse aux délégations, le Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités a donné plusieurs pistes pour rectifier la situation actuelle.  D’abord, il importe selon lui de développer des outils mieux adaptés pour combattre certains défis, y compris les discours de haine.  Ensuite, a-t-il ajouté, il convient de commencer la discussion sur un nouveau traité afin de qualifier la nature des droits des minorités.  L’un des plus grands défis est de préciser clairement quels sont ces droits, a souligné M. de Varennes.  Il a par ailleurs insisté sur le besoin de remettre en place le Plan d’action de 2013 au sein des Nations Unies, qui a été délaissé et oublié.  Enfin, il est revenu sur la question du forum permanent pour les minorités, prenant note des interrogations à son sujet.  Rappelant à cet égard qu’un tel forum existe déjà pour les peuples autochtones, il a averti que, tant que les Nations Unies ne donneront pas aux minorités l’attention qu’elles méritent, de plus en plus de cas d’apatridie ciblant les minorités seront enregistrés.  Ce forum permanent est le minimum que nous pourrions faire, a-t-il insisté, citant enfin des cas de bonnes pratiques dans le Tyrol du Sud en Italie, à Singapour, au Canada et en Bolivie.

Mme ALEXANDRA XANTHAKI, Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, a présenté son premier rapport consacré au développement et aux droits culturels.  Elle a noté à cet égard que 150 États ont adopté une Déclaration énumérant l’ensemble des droits culturels qui doivent être pris en compte dans les politiques publiques de développement.  Ces droits, a-t-elle fait valoir, sont indispensables à tout développement si l’on veut qu'il soit durable.  Or la réalité des faits est bien différente, a déploré Mme Xanthaki, dont le rapport confirme que les droits culturels sont les grands absents des priorités, programmes et discussions sur le développement.  Qu’il s’agisse de populations locales aux Bahamas, en Malaisie, au Canada et en Türkiye, du peuple Masaï en Tanzanie ou de migrants latino-américains au Royaume-Uni, la Rapporteuse spéciale dresse le même constat: rarement menés par les communautés, les projets de développement intègrent aussi rarement les valeurs, les philosophies et les visions des populations locales.  Les droits de ces populations sont violés, alors qu’elles devraient être les premières bénéficiaires des processus de développement durable, a-t-elle regretté.  

Le rapport, a poursuivi Mme Xanthaki, rappelle aux États les obligations légales qu’ils ont contractées pour respecter et protéger les droits culturels des individus et des communautés, y compris dans les processus de développement, et répond à des questions concrètes, notamment à celle de savoir comment les droits culturels peuvent servir de base à un développement plus inclusif et plus durable.  La feuille de route proposée est claire: le développement culturel doit obtenir sa place en tant que pilier du développement durable aux côtés des piliers social, économique et environnemental.  

La théorie selon laquelle la culture traverse tous les objectifs et n’aurait donc pas besoin d’être un objectif en particulier a échoué, a constaté la Rapporteuse spéciale, dont le mandat soutient l’inclusion de la culture en tant qu’objectif autonome dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  En attendant, nous devons tous commencer à inclure les droits culturels dans les discussions sur le développement, a préconisé Mme Xanthaki.  Mais de façon adaptée aux cultures et philosophies des populations concernées, a-t-elle ajouté, se disant opposée à une approche unique.  Elle s’est dite consciente que cette approche ciblée remet en question ou conteste le modèle de développement économique défendu par les États, les organisations intergouvernementales et les institutions financières internationales.  

La Rapporteuse spéciale a également observé que le cadre de la coopération internationale au développement est encore très axé sur un modèle économique dominant et ne tient pas compte des valeurs et des modes de vie des populations locales.  Elle a toutefois relevé les prémisses d’un changement dans le fonctionnement des organismes mondiaux d’investissement et de commerce, avec de nouvelles directives et de nouvelles méthodes de travail.  Ce sera l’objet de son prochain rapport à l’Assemblée générale, a-t-elle précisé, affirmant en conclusion que si le développement durable a besoin des droits culturels, « les droits culturels ne peuvent être violés au nom du développement durable ».

Dialogue interactif

Après cette présentation, la Tanzanie a contesté les allégations d’expulsion de populations Masaï dans la région de Ngorongoro, assurant que son gouvernement travaille à l’équilibre entre protection de la nature et préservation des droits humains, et continuera sur cette voie.  À sa suite, l’Union européenne s’est interrogée sur le rôle que peut jouer le secteur de la culture dans les situations de postconflit.  Elle a aussi voulu savoir dans quelle mesure la préservation des droits culturels contribue aux objectifs de développement durable.  Comment pourrait-on mieux lier les industries de la création aux indicateurs et programmes de développement, et en quoi la création d’un forum permanent des minorités permettra un réel exercice de leurs droits culturels dans le monde, s’est pour sa part enquis le Portugal.  Comment peut-on protéger les droits culturels des minorités victimes des conflits armés, a souhaité savoir la Pologne en s’émouvant que l’identité de certaines populations soit effacée de façon intentionnelle lors de conflits armés, notamment en Ukraine.  Elle s’est aussi inquiétée de voir les droits culturels de minorités violés au Bélarus, en particulier ceux de la minorité polonaise.

Que pouvez-vous faire dans le cadre de votre mandat pour protéger les droits culturels menacés par des politiques étatiques, ont demandé les États-Unis, qui se sont aussi inquiétés des menaces que fait peser l’agression russe sur le patrimoine culturel ukrainien, avant de dénoncer la répression des groupes minoritaires en Chine, mais aussi en Afghanistan et au Myanmar.

La Chine a déploré que les États-Unis et d’autres pays occidentaux « abusent de ce dialogue interactif » en évoquant un rapport du HCDH sur la situation des droits humains au Xinjiang.  Celui-ci n’est plus d’actualité et sa légalité est remise en question, a fait valoir la délégation, pour qui ce document n’est qu’un « argument fallacieux pour s’ingérer dans notre politique interne ».  De son côté, Cuba a regretté que ses efforts en termes de droits culturels soient entravés par l’embargo économique et financier imposé depuis plus de 60 ans par les États-Unis, avant d’appeler à une réflexion sur l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les droits culturels.  Le Cameroun s’est, lui, réjoui que le rapport de la Rapporteuse spéciale rappelle l’impossibilité d’imposer des programmes culturels depuis l’extérieur d’un pays sans prendre en compte les besoins des populations locales.  À ce titre, il a souhaité connaître la place octroyée aux droits culturels dans le projet de convention sur le droit au développement en cours d’élaboration. 

L’Algérie a, pour sa part, demandé comment mesurer l’impact de la culture sur la transformation des sociétés en termes de patrimoine immatériel, et éviter que le développement économique continue de faire fi du développement culturel.  Le Nigéria s’est, quant à lui, félicité d’être la patrie de 250 ethnies aux langues multiples et a dénoncé les « nouvelles notions imposées depuis l’étranger à nos cultures ancestrales ».  Il a voulu savoir comment les Nations Unies pourraient lutter contre ce type d’ingérence culturelle.  La Türkiye a ensuite regretté que ses efforts de protection du patrimoine culturel national ne soient pas assez exposés dans le rapport. 

Le Pakistan a constaté que les droits des minorités sont souvent bafoués pour des raisons politiques, citant le sort réservé par « un certain pays de la région » à ses 200 millions de musulmans et à ceux des territoires qu’il occupe.  De quelles options disposons-nous pour protéger les droits des minorités quand ils sont écrasés par une machine étatique au nom du développement économique, a-t-il demandé.  En écho, l’Inde a assuré que le respect des droits culturels est assuré sur son territoire, notamment au Jammu-et-Cachemire, et a condamné la « propagande » de la délégation pakistanaise à ce sujet.  Elle s’est par ailleurs interrogée sur l’impact de la COVID-19 sur les industries de la création.  Enfin, la représente de l’UNESCO est revenue sur le travail de son agence en faveur des droits culturels des peuples autochtones.  Elle s’est interrogée sur les modalités d’une plus profonde collaboration dans ce domaine. 

Répondant à ces questions et remarques, la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels s’est élevée contre la position selon laquelle certaines questions intérieures ne devaient pas faire l’objet d’un examen extérieur.  Le rôle des Nations Unies est de faire un suivi de tous les droits humains, a-t-elle objecté, affirmant que cela permet d’avancer dans le mandat qui est le sien.  La politisation du dialogue ne nous aide pas à accomplir notre travail, a-t-elle encore fait valoir.  Il n’y a toutefois pas d’approche unique, chacun peut et doit exprimer sa vision concernant le développement, a souligné Mme Xanthaki.

Aux délégations qui évoquaient la recherche de nouveaux outils, la Rapporteuse spéciale a dit ne pas en voir la nécessité, arguant qu’il existe déjà des documents juridiquement contraignants forts.  Reste à s’assurer de leur mise en œuvre, a-t-elle relevé, constatant que, « malheureusement, dès que l’on parle de droits culturels, la volonté n’est pas au rendez-vous ».  À ses yeux, ni les États ni les organisations internationales ne se penchent suffisamment sur cette question.  À la question de savoir si un forum permanent sur les minorités pourrait y aider, elle a répondu par l’affirmative, estimant que les minorités se feront ainsi mieux entendre au sein de la structure des Nations Unies. 

Elle s’est ensuite félicitée du travail de l’UNESCO, puis a décrit l’art comme une manière de réinsuffler de la créativité dans nos sociétés, singulièrement dans le contexte postpandémique.  Le secteur culturel est souvent considéré comme un simple bien économique, alors que nous devrions nous enrichir de sa vision alternative des choses, a-t-elle affirmé.  Enfin, après avoir exprimé son appui au rapport du HCDH sur le Xinjiang, elle a exhorté la Tanzanie et la Türkiye à l’inviter et à s’impliquer davantage dans un dialogue constructif.

Mme MULUKA-ANNE MITI-DRUMMOND, experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme, a dit avoir consacré son rapport aux défis en matière de droits de l’homme auxquels sont confrontées les personnes atteintes d’albinisme en déplacement.  Qu’elles soient migrantes, réfugiées, demandeuses d’asile, travailleuses migrantes ou déplacées à l’intérieur de leur pays, ces personnes fuient la stigmatisation et la discrimination, en particulier lorsqu’elles se manifestent par des traitements cruels, inhumains et dégradants, a-t-elle expliqué.  Notant que ces personnes font partie des près de 89,3 millions de personnes déplacées de force, elle a rappelé qu’elles sont également considérées comme des personnes handicapées en raison de leur déficience visuelle et de leur grande vulnérabilité au cancer de la peau.  Elle a regretté à cet égard que les données et les statistiques relatives aux personnes handicapées en déplacement ne soient pas ventilées pour mieux refléter la situation des personnes atteintes d’albinisme.

Selon Mme Miti-Drummond, les personnes atteintes d’albinisme se déplacent souvent vers des zones offrant de meilleurs services pour elles, tels que la santé, l’éducation inclusive et les transports accessibles.  Mais les changements climatiques sont devenus pour ces personnes un autre facteur de déplacement, a-t-elle relevé.  Bien qu’un nombre croissant d’entre elles réussissent à demander l’asile, beaucoup ont encore du mal à faire face au processus administratif, a constaté l’experte indépendante, imputant ce problème au manque de connaissances des autorités sur l’albinisme.  Au cours d’enquêtes sur le terrain, elle a aussi noté que les personnes atteintes d’albinisme dans des camps de réfugiés bénéficient rarement de services et de produits de santé essentiels, tels que les écrans solaires et autres services dermatologiques et ophtalmologiques.  De plus, le manque de soutien psychosocial signifie que de nombreuses personnes ayant subi des traumatismes dans leur pays d’origine n’ont pas accès au soutien dont elles ont besoin, a-t-elle ajouté.

Si la stigmatisation et la discrimination des personnes atteintes d’albinisme sont courantes dans les camps de réfugiés, l’insécurité persistante est également préoccupante, en particulier pour les enfants, les femmes et les filles, s’est inquiétée l’experte indépendante, qui a fait état d’attaques et de brimades à l’intérieur des camps, y compris de la part d’enseignants et d’élèves pour ceux qui ont accès à des écoles.  Même en dehors des camps, ces personnes ont du mal à s’intégrer dans leurs nouvelles communautés et à comprendre comment accéder aux services sociaux et aux prestations auxquels elles ont droit, a-t-elle déploré.  De même, dans les camps de réfugiés comme dans les communautés d’accueil, l’emploi et les moyens d’obtenir une subsistance durable constituent un défi énorme.

Mme Miti-Drummond a cependant mentionné de bonnes pratiques, notamment la référence faite aux personnes atteintes d’albinisme dans le cadre qui guide l’Agence européenne pour l’asile.  La politique du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur l’âge, le genre et la diversité constituent également, à ses yeux, un outil important, tout comme le Plan d’action 2021-2031 de l’Union africaine pour mettre fin aux attaques et autres violations des droits de l’homme contre les personnes atteintes d’albinisme.  Elle a également relevé le « bon travail » de l’Ouganda, qui a récemment adopté un plan d’action national contenant une section sur les réfugiés atteints d’albinisme, et de l’Office français de protection des réfugiés apatrides (OFPRA), qui tient compte de cette spécificité dans l’examen des demandes.

Pour finir, l’experte indépendante a souligné les initiatives en faveur des personnes atteintes d’albinisme en déplacement, prises par des organisations de la société civile en Ouganda, aux États-Unis et en France, saluant également les organisations nationales et internationales, telles que « Standing Voice » et la Fondation Pierre Fabre, qui apportent un soutien humanitaire aux personnes atteintes d’albinisme dans les camps de réfugiés et d’hébergement.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, la Tanzanie a regretté que, dans son rapport, l’experte indépendante s’appuie sur un article paru en 2017. Depuis lors, beaucoup de choses ont changé, a-t-elle assuré, se disant prête à travailler à l’avenir avec elle pour la production d’un document qui reflète la réalité. Le Nigéria s’est pour sa part enorgueilli d’avoir intégré la question de l’albinisme dans tous ses secteurs.  À sa suite, l’Afrique du Sud a souhaité savoir de quelle façon, en l’absence de données ventilées, les États peuvent s’assurer que la situation des personnes atteintes d’albinisme est prise en compte.  Comment approfondir le dialogue avec les parties prenantes concernées, notamment les représentants de la société civile, afin de répondre aux principales préoccupations en matière de droits de l’homme des personnes atteintes d’albinisme, s’est interrogée l’Union européenne?  La Chine a quant à elle, indiqué qu’elle intensifie ses recherches scientifiques sur la maladie rare qu’est l’albinisme.

Répondant aux questions et observations des États Membres, l’experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme a tout d’abord reconnu s’être basée sur un article de 2017 dans ses données sur la Tanzanie. Elle a cependant insisté sur le fait que 10 000 personnes ont été déplacées dans ce pays en raison de leur albinisme, assurant que ce chiffre reste d’actualité. Elle a par ailleurs jugé essentiel d’associer la société civile dans l’élaboration de politiques d’asile et migratoire concernant les personnes atteintes d’albinisme.  Elle a aussi recommandé de renforcer les capacités des fonctionnaires en charge des processus de demande d’asile.

L’experte indépendante a ensuite fait part de sa préoccupation face à l’invisibilité des personnes atteintes d’albinisme, regrettant l’absence de données ventilées les concernant.  Pour y remédier, elle a recommandé de veiller à ce que les recensements soient conduits de façon précise pour garantir une meilleure visibilité.  Trop souvent, a-t-elle fait observer, les estimations sont floues.  Il faut donc, selon elle, une compilation précise des indices humains s’agissant de ce groupe de personnes.  Elle a d’autre part signalé qu’outre la discrimination et la stigmatisation, ces personnes sont victime de la traite et de l’utilisation de parties de leur corps dans le cadre de rituels.

À l’Afrique du Sud, Mme Miti-Drummond a recommandé l’élaboration d’un plan national couvrant les raisons des déplacements, citant en exemple l’expérience de l’Ouganda. 

Pour finir, elle s’est à nouveau déclarée inquiète face aux lacunes en matière de données tenant compte du nombre de personnes en déplacement atteintes d’albinisme.  Sur la base de ses déplacements sur le terrain, et notamment dans les camps de réfugiés, elle a estimé que leur nombre est bien plus élevé que ce qui est évalué, ce qui rend encore plus inacceptable l’invisibilité de ces personnes.

Suite de la discussion générale

M. KIM NAM HYOK (République de Corée) a tout d’abord relevé que l’aide publique au développement de son pays a augmenté de 15% par rapport à l’an dernier.  Il a ensuite déploré la dégradation des droits humains dans plusieurs pays ravagés par le conflit, notamment le Myanmar, l’Afghanistan et l’Ukraine.  Le délégué est également revenu sur la situation des droits humains en République populaire démocratique de Corée (RPDC), marquée par l’insécurité alimentaire et un difficile accès au système de santé, tandis que les rares ressources sont allouées à un programme de missiles balistiques.  L’aide humanitaire doit se poursuivre, a plaidé le représentant, selon lequel la situation en RPDC nécessite un renvoi devant la Cour pénale internationale (CPI).

M. PATRICIA CHAND (Fidji) a rappelé l’importance qu’accorde son pays à la défense des droits des groupes vulnérables, parmi lesquels il a souhaité ajouter les réfugiés climatiques et les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays.  Selon lui, les changements climatiques exacerbent le déclin de la protection des droits de l’homme et des libertés individuelles des individus et des communautés déplacés ou vivant dans des situations de détresse climatique extrême.  Ils sont aussi à l'origine d’une inégalité croissante entre le Nord et le Sud global, a-t-il constaté, formant le vœu que des décisions seront prises à ce sujet lors de la COP27 à Charm al-Cheikh.

M. MUHAMMAD RASHID (Pakistan) a souligné les efforts entrepris par son pays dans la lutte contre la désinformation et sa coopération internationale en la matière, notamment dans le cadre du Groupe des Amis pour la lutte contre la désinformation.  Parmi les dernières manifestations de désinformation dans le monde, il a fustigé la campagne étatique menée par le Gouvernement indien « pour servir ses objectifs stratégiques ».  Citant les données du journal en ligne IFLA, qui a fait état de 9 000 cas de désinformation dans le monde entre janvier et mars 2021, il a accusé l’Inde d’être « la championne des ‘fake news’ sur les réseaux sociaux ».  Le Pakistan en est la cible numéro un, a-t-il dit, ajoutant que New Delhi présente les activistes de paix au Jammu-et-Cachemire comme des terroristes.  Selon le délégué, le Gouvernement indien, mu par un « hindouisme extrémiste », oppresse en outre 200 millions d’Indiens musulmans, ciblés par des appels au génocide.

M. YOSEPH KASSAYE YOSEPH (Éthiopie) a rappelé l’adoption par son pays d’une réforme d’ampleur il y a quatre ans, qui vise à garantir une plus grande transparence de l’action publique pour les droits humains des Éthiopiens, mais aussi des migrants et des réfugiés.  Mais ces efforts sont rendus difficiles par les actions brutales menées par le Front populaire de libération du Tigré (FPLT) dans le nord du pays.  Ce groupe, a-t-il dit, se livre aussi à des assassinats aveugles, à des pillages et à des violences contre les femmes et les filles.  Le représentant s’est par ailleurs inquiété de la politisation des enjeux relatifs aux droits humains, en particulier au niveau du Conseil des droits de l’homme.  Établir une « liste de la honte » d’États souverains est contreproductif, a-t-il estimé, tout comme l’imposition de mesures coercitives unilatérales.

Mme QAMBAR (Bahreïn) a mentionné le plan d’action pour les droits humains 2022-2026 adopté par son pays, avant de s’enorgueillir de la nette hausse de la participation des femmes dans le secteur public.  Après avoir détaillé les aides fournies à la population pendant la pandémie, la déléguée a rappelé que Bahreïn coopère avec les mécanismes du Conseil des droits de l’homme.  Elle a également signalé la tenue prochaine d’élections parlementaires, y voyant une étape importante pour l’établissement de la démocratie dans le pays.

M. CARLOS ERNESTO MORALES DÁVILA (Nicaragua) s’est enorgueilli des mesures prises par son pays pour faire progresser les droits humains, citant entre autres l’accès gratuit à la santé et aux soins primaires.  La stratégie nationale a été saluée et reconnue au niveau international, s’est-il félicité, avant de préciser que l’enveloppe allouée au secteur de la santé a augmenté de 476% entre 2006 et 2020.  Notant par ailleurs que le Nicaragua est aujourd’hui en situation de souveraineté alimentaire, il a assuré que son gouvernement s’emploie à prendre en compte les besoins des populations autochtones et afro-descendantes.  Les effets des changements climatiques sont également couverts par un plan national, a-t-il indiqué, ajoutant que son pays participe à toutes les initiatives climatiques au plan international.  Pour finir, il s’est élevé contre les mesures coercitives unilatérales et leur impact sur la réalisation des objectifs de développement durable. 

Mme LISA A. CARTY (États-Unis) a condamné à son tour la guerre injustifiée menée par la Fédération de Russie en Ukraine, accusant ce pays de se livrer à des crimes de guerre, des déportations forcées et des meurtres de civils.  Elle a d’autre part dénoncé la situation des droits humains en Chine, notamment au Xinjiang, au Tibet et à Hong Kong, estimant que ce dossier met le système des Nations Unies à rude épreuve.  La représentante s’est également alarmée de la situation des droits humains en Syrie, soutenant à cet égard l’appel pour la mise en place d’un nouveau mécanisme des Nations Unies pour clarifier la situation des personnes disparues.  Elle a par ailleurs condamné l’usage de la violence contre des manifestations pacifiques en Iran et appelé à la cessation des violations des droits humains au Venezuela.  Enfin, la déléguée s’est dite préoccupée par les restrictions et les intimidations auxquelles font face les défenseurs des droits humains en Afghanistan, au Myanmar, à Cuba, en République populaire démocratique de Corée et au Soudan du Sud.

Mme FATEMEH ARAB BAFRANI (République islamique d’Iran) a d’abord dénoncé « l’apartheid israélien », qui se poursuit avec le soutien des États-Unis et d’autres pays occidentaux.  Elle a ensuite dénoncé les violations des droits humains aux États Unis, où l’incarcération disproportionnée des personnes issues des minorités prouve selon elle l’inégalité de tous devant la loi.  Washington multiplie en outre les tentatives en vue de déstabiliser des gouvernements souverains via des sanctions « inhumaines », a-t-elle accusé.  Aux États-Unis et au Canada, les droits des musulmans sont bafoués, tandis que les populations autochtones sont surreprésentées dans les prisons, s’est encore alarmée la déléguée.  De son côté, l’Iran s’enrichit de la diversité religieuse de sa société, a-t-elle affirmé, avant de souligner les impacts négatifs des mesures coercitives unilatérales imposées à son pays et à son peuple.  Il faut en finir avec le « deux poids, deux mesures », a-t-elle conclu en rejetant les fausses allégations concernant l’Iran.

Mme ELAINE CRISTINA PEREIRA GOMES (Brésil) a mis en avant les garanties offertes par son pays en matière de droits de la personne, notant par exemple que les dispositions de la Convention sur les droits des personnes handicapées sont inscrites dans la Constitution brésilienne.  Elle a également relevé que le Brésil a amélioré ses bases de données sur cette question en se dotant cette année d’un registre en ligne qui facilite l’accès des personnes handicapées aux aides étatiques.  La liberté de conviction fait aussi partie intégrante du marbre constitutionnel brésilien, a-t-elle ajouté, avant de s’émouvoir de la montée de l’antisémitisme et de la négation de l’Holocauste dans le monde.

M. ALI MABKHOT SALEM BALOBAID (Yémen) a salué le travail du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) dans son pays, plaidant pour une augmentation des contributions à cette agence spécialisée de l’ONU pour qu’elle intensifie son action.  Il a ensuite fait état de rapports montrant que les milices houthistes ne respectent ni les droits humains ni certaines valeurs musulmanes.  De plus, les houthistes s’attaquent aux journalistes internationaux, aux employés des Nations Unies et aux défenseurs des droits de l’homme, a-t-il accusé. 

M. MAGOSAKI KAORU (Japon) s’est dit préoccupé par l’agression russe en Ukraine, qu’il a qualifiée d’inacceptable, ainsi que par la situation au Myanmar, à la suite du coup d’État militaire de 2021.  Après avoir appelé la junte militaire au pouvoir dans ce pays à libérer les prisonniers politiques, il a salué la publication par le HCDH d’un rapport sur la situation des droits humains dans le Xinjiang.  Il a par ailleurs rappelé que les actions irresponsables de la République populaire démocratique de Corée continuent de mettre la population du Japon en danger.  Enfin, s’agissant des droits des femmes, il s’est dit préoccupé de la situation en Iran et a appelé la communauté internationale à davantage œuvrer pour l’égalité des sexes. 

M. REIN TAMMSAAR (Estonie) a regretté que la vie de millions d’Ukrainiens ait été détruite pour toujours lorsque la Russie s’est engagée dans une guerre d’ampleur dans ce pays, semant le désespoir et la destruction.  Faisant état de « traces de crimes de guerre » en Ukraine, il a également estimé que les fosses communes découvertes dans ce pays rappellent les atrocités commises par les régimes nazi et soviétique à l’encontre de civils innocents au cours du XXe siècle.  Le délégué a également accusé la Russie de profiter de la tribune de la Troisième Commission pour justifier son agression xénophobe et non provoquée contre le peuple ukrainien.  Il a par ailleurs accusé le Bélarus de manquements graves en matière des droits de l’homme.

M. KOUADJO MICHEL KOUAKOU (Côte d’Ivoire) a indiqué que son pays a ratifié tous les principaux instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l’homme et s’emploie à s’acquitter de ses obligations conventionnelles.  À cette fin, a-t-il dit, le Gouvernement ivoirien a créé en 2018 le Conseil national des droits de l’homme, organe indépendant qui permet d’évaluer la situation sur le terrain et de procéder au réexamen du cadre législatif.  Le délégué a également rappelé qu’une loi relative à la protection des défenseurs des droits de l’homme a été adoptée en 2014 afin de garantir à ces personnes un environnement sûr et propice à l’exercice de leurs activités.  Il a ajouté que son pays travaille au renforcement des systèmes de prévention, notamment des mécanismes d’alerte précoce.

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

M. OBIORA CHINEDU OKAFOR, expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, a indiqué s’être intéressé à la solidarité mondiale en termes de vaccins, dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  La nature de la réponse mondiale au cours de ces deux dernières années a servi à mettre en lumière des problèmes systémiques préexistants, tels que la grande disparité entre le Nord et le Sud, a-t-il dit, dénonçant à cet égard l’écart énorme qui subsiste entre la quantité de vaccins devant être distribués dans le monde et le nombre de ceux qui ont été fournis ou distribués au pays du Sud, en réponse à la pandémie.

En outre, l’acquisition par certains États de quantités suffisantes de vaccins pour vacciner plusieurs fois leur population a eu des répercussions négatives sur l’accès et l’accessibilité financière dans le monde entier, a-t-il relevé.  L’expert indépendant a fait état de la surfacturation de leurs vaccins par certaines sociétés pharmaceutiques, entre 6 et 24 fois le coût de production.  En comparaison, le Mécanisme COVAX paie en moyenne jusqu’à cinq fois le coût de production des doses de vaccins, a-t-il précisé.  De plus, pour obtenir leurs propres doses, les États à revenu élevé ont pour la plupart choisi de s’adresser directement aux fabricants, sans passer par le Mécanisme.  M. Okafor a donc déploré que plusieurs États, principalement du Sud, n’aient eu d’autres choix que d’attendre que le Mécanisme COVAX leur fournisse des doses de vaccin, ce qui s’est traduit par de longs retards d’approvisionnement.

L’expert indépendant a d’autre part indiqué qu’en raison du coût global élevé des vaccins contre la COVID-19, les États pauvres ont dû détourner des ressources nationales d’autres lignes budgétaires très importantes pour répondre à la pandémie, et particulièrement au besoin urgent de vaccination de leur population.  Pour beaucoup trop d’États du Sud, a-t-il constaté, ce sont des ressources prévues pour des besoins socioéconomiques essentiels qui ont été détournées.  Dénonçant en outre le nationalisme vaccinal de certains pays, il a estimé que de nombreux États riches, qui ont contribué financièrement au Mécanisme COVAX, ont également sapé son efficacité.  Parmi les autres facteurs qui ont limité l’accès aux vaccins, M. Okafor a mentionné les problèmes administratifs ou encore les perturbations logistiques.  Selon lui, la pleine jouissance de certains droits humains à l’échelle mondiale continuera à ne pas être réalisée, en grande partie à cause de la disparité entre régions du monde dotées ou non de vaccins.  Enfin, il a estimé que la désinformation et mésinformation sur la COVID-19 ont considérablement entravé la lutte contre la pandémie.

Dialogue interactif

Au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a promis l’aide du Mouvement aux pays qui en font la demande en cas de pandémie ou autres catastrophes.  Il a également dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui privent les populations des moyens de subsistance, à l’instar de Cuba qui a enjoint les États-Unis à lever leur blocus à son encontre.  Quelle est l’analyse de M. Okafor sur les conséquences du blocus et sur les actions de certains pays contre la coopération Sud-Sud? a demandé la délégation cubaine.  Le Venezuela, l’Algérie, la République islamique d’Iran, le Cameroun et la Chine ont demandé de faire les vaccins un « bien public universel », avant d’appeler à contrer les mesures coercitives unilatérales qui privent certains pays non seulement de vaccins mais aussi d’autres médicaments pour la santé publique.  Le Venezuela a exigé plus de transparence sur les prix des médicaments.  Comment appliquer les « aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce » (ADPIC), s’est pour sa part interrogée l’Algérie?  Le Costa Rica a, lui, souhaité savoir quelles démarches sont entreprises pour atteindre l’objectif de 70% de vaccination de la population mondiale.  Quelles doivent-être les mesures à prendre pour se préparer aux prochaines pandémies, s’est-il encore enquis?

En réponse aux délégations, l’expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale s’est réjoui que tous les intervenants se soient dits favorables à la solidarité vaccinale.  Il les a invités à se préparer à la prochaine pandémie car, a-t-il dit, l’apparition des maladies ne ralentit pas au fil des ans.  De plus, les virus font fi des frontières, quel que soit le niveau de vaccination, comme l’a montré le variant Omicron.  S’agissant des mesures coercitives unilatérales, il a reconnu leurs effets négatifs tout en constatant qu’ils sont ressentis différemment selon les pays et les régions.  Pour ce qui est des ADPIC, M. Okafor a souligné l’importance de sortir d’une conception « en vase clos » et de renforcer les cadres existants pour qu’ils soient plus efficaces.  En réponse à la question du Venezuela sur la transparence des prix des médicaments, l’Expert indépendant a appelé à améliorer la coopération avec les producteurs de vaccins.  Quant à l’accès aux vaccins, il a encouragé les productions locales sur la base de la coopération Sud-Sud et l’assouplissement des règles des droits de propriété intellectuelle.  Il a enfin insisté sur l’importance de se préparer pour éviter la répétition de la pandémie, rappelant à cet égard que des négociations sont en cours pour élaborer un traité international sur les pandémies.

Mme TLALENG MOFOKENG, Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a jugé important, en tant que femme noire d’Afrique du Sud ayant elle-même connu l’apartheid et continuant de vivre sous le poids écrasant du racisme et de l’héritage du colonialisme, de produire un rapport qui se concentre sur l’impact du racisme sur la dignité humaine, notamment sur le droit à un système de protection de la santé.  Ce rapport, a-t-elle précisé, met en évidence l’impact mondial sur la santé des personnes racialisées, en particulier les effets du racisme et de la discrimination sur les Noirs, les personnes d’ascendance africaine, les migrants et les peuples et minorités autochtones.  Il met aussi l’accent sur la ségrégation résidentielle, qui est un puissant facteur prédictif de la santé et du bien-être.  Par rapport aux quartiers à prédominance blanche, les communautés majoritairement composées de personnes d’ascendance africaine sont plus exposées aux toxines environnementales, aux polluants atmosphériques et aux agents cancérigènes, ce qui contribue à des taux plus élevés de maladies pulmonaires et de poids de naissance plus faibles, a-t-elle fait observer.

Pour la Rapporteuse spéciale, être migrant ou avoir le statut de réfugié est aussi un obstacle à la réalisation du droit à la santé, car, dans certains cas, ces personnes n’ont pas accès aux soins de santé classiques et préventifs, n’ayant droit qu’aux soins de santé d’urgence.  Relevant que ce système est inefficace à long terme, notamment en raison des coûts induits, Mme Mofokeng a indiqué que son rapport identifie les bonnes pratiques en matière de droit à un système de protection de la santé, tout en fournissant des exemples sur la manière de mettre fin au racisme et à la discrimination fondés sur la race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique en ce qui concerne l’accès aux déterminants sous-jacents de la santé.

À ses yeux, l’impact du racisme sur le droit à la santé ne peut être pleinement discerné en raison d’un certain nombre d’autres effets, qui sont difficiles à mesurer en raison de lacunes généralisées dans la collecte de données.  Pour y remédier, la Rapporteuse spéciale a appelé toutes les parties prenantes à redoubler d’efforts pour contribuer à combler cet écart en collectant des données ventilées par race, origine ethnique, sexe, âge, orientation sexuelle, identité de genre, handicap et situation rurale ou urbaine.  

Le rapport fournit aussi des exemples de réparations pour discrimination raciale liée à des violations et abus du droit à la santé, a poursuivi Mme Ofokeng.  Déplorant à ce propos le nombre limité de données sur les réparations pour discrimination raciale liée aux violations et abus du droit à la santé, elle a exhorté les parties prenantes à relever les défis qui empêchent de faire justice aux victimes.  Elle a ensuite présenté brièvement le concept d’« injustice épistémique », ou liée au savoir, qui s’applique de plus en plus dans le contexte des soins de santé.  Même dans les pays où les indicateurs de progrès globaux sont bons, les données au niveau national masquent souvent les disparités extrêmes qui existent entre les groupes de population au sein de ces pays.  Selon elle, ces statistiques illustrent l’intersectionnalité entre la race et le sexe, ainsi que les fortes disparités raciales dans les résultats des naissances.  Pour finir, la Rapporteuse spéciale a tenu à rappeler que les conséquences du racisme et de la discrimination sur la santé sont persistantes et se transmettent d’une génération à l’autre par le biais de la « mémoire biologique » des expériences néfastes du corps.  Le droit à la santé ne peut être réalisé dans un monde raciste, a-t-elle conclu

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, les États-Unis se sont enorgueillis d’être le plus grand bailleur de fond pour la santé mondiale, soulignant qu’en 2022, plus 12 milliards ont été alloués pour des programmes de santé dans le monde.  Le Portugal a voulu savoir comment les institutions financières internationales peuvent adopter une approche des droits humains s’agissant des maladies tropicales négligées.  Quels sont les principaux obstacles à l’accès aux soins de santé pour les personnes issues d’une minorité raciale ou ethnique, a demandé l’Union européenne, tandis que le Brésil s’interrogeait sur les mesures à prendre pour garantir à tous de meilleurs niveaux de santé physique et mentale.

Cuba a invité la Rapporteuse spéciale à analyser les effets des mesures coercitives unilatérales sur le droit à la santé.  À sa suite, l’Égypte a regretté que le rapport de la Rapporteuse spéciale ne mette pas en évidence l’importance de la coopération internationale et des transferts de technologies pour soutenir les pays en voie de développement.  Évoquant la fuite des cerveaux, l’Algérie a, elle, souhaité savoir comment faire en sorte que les pays gardent leurs spécialistes de la santé.

De son côté, la Chine s’est dite très préoccupée par le racisme profondément ancré aux États- Unis, pointant notamment les violations des droits des personnes d’ascendance africaine.  Le racisme est une menace très grave pour les droits humains des minorités dans ce pays, a-t-elle ajouté, avant de relever que les populations hispaniques et afro-américaines y ont trois fois plus de risque que la majorité blanche de tomber malades et de décéder.  Dernier intervenant, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) a souhaité savoir si des programmes de lutte contre le VIH/sida sont empreints de racisme.

Dans sa réponse aux délégations, la Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible est revenue sur la question du financement des maladies tropicales et non contagieuses, indiquant que, ces deux dernières années, les systèmes de santé n’ont pas été assez résistants pour aider à lutter contre d’autres maladies que la COVID-19.  Soulignant par ailleurs le besoin d’informations fiables pour prendre des décisions éclairées, elle a dénoncé la désinformation et la discrimination qui, selon elle, ont entravé l’accès aux solutions.  Mme Mofokeng s’est d’autre part interrogée sur la capacité du monde à reconstruire en mieux après la pandémie, étant donné que les personnes affectées sont toujours des laissés pour compte.  S’agissant des mesures coercitives unilatérales, elle a indiqué que, dans le cadre de son mandat, elle est intervenue de différentes façons durant la pandémie pour évoquer leur impact sur la santé des populations.  Pour finir, la Rapporteuse spéciale a invité les États Membres à lire ses différents rapports, non pas isolément mais comme un tout.  Il y est précisé que la pandémie a eu un impact disproportionné sur les soins de santé physique et mentale et que le racisme détermine les questions de santé, a-t-elle souligné, ajoutant que l’accès à la santé est un droit humain et pas une action caritative.

M. PEDRO ARROJO-AGUDO, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, a présenté un rapport visant à identifier les problèmes d’eau et d’assainissement dont souffrent les communautés rurales et à mettre en évidence les leçons qu’offrent les cultures paysannes traditionnelles.  Il a rappelé que 44 % de la population mondiale demeure rurale, et que la ruralité représente 80 % des 2 milliards de personnes qui n’ont pas d’eau potable.  Dans le même temps, la production paysanne et celle des petits agriculteurs nourrissent 70% de la population mondiale.

En l’absence d’investissements publics dans les infrastructures de base, ces communautés sont souvent approvisionnées en eau non traitée par des sources publiques, a expliqué le Rapporteur.  En outre, la présence d’entreprises minières, hydroélectriques, agricoles et industrielles sur leurs territoires contamine leurs sources hydriques, tandis que le manque d’infrastructures oblige les femmes et les filles à aller chercher de l’eau à des sources éloignées, parfois dans un contexte d’extrême pauvreté, s’est ému le Rapporteur.  Pourtant essentiel à la santé de ces communautés, l’assainissement est aussi entravé par des défis tels que le manque de priorité dans les politiques publiques, l’absence d’information ou les tabous.

La gestion communautaire de l’eau, typique des cultures paysannes, offre pourtant des exemples positifs à suivre, a indiqué le Rapporteur, pour qui les 80 000 aqueducs communautaires d’Amérique latine, qui desservent quelque 70 millions de personnes dans des zones rurales appauvries, constituent une référence.  Cependant, les cultures paysannes sont souvent affaiblies par l’influence croissante de la propriété privée, a-t-il déploré, jugeant nécessaire d’adopter une législation nouvelle et de prendre des engagements budgétaires pour renforcer les systèmes d’eau et d’assainissement des communautés rurales.

Face aux risques croissants qu’entraînent les changements climatiques, il est également urgent de promouvoir des stratégies d’adaptation rurale, a ajouté le Rapporteur, mentionnant l’exemple du Sertao brésilien, ou ASA, un réseau de quelque 700 organisations qui a relevé le défi de construire un million de citernes d'eau de pluie pour 5 millions de personnes, grâce à des financements publics, au travail communautaire et à l'éducation.   

Le Rapporteur spécial s’est également préoccupé de l’accaparement des terres des peuples autochtones par les grands producteurs d’agro-élevage ou compagnies minières, laissant de nombreuses communautés sans eau ni ressources.  De plus, l’opposition des populations à ces projets conduit souvent à la criminalisation, à la répression et même au meurtre de dirigeants communautaires, s’est-il indigné, rapportant que Global Witness a enregistré près de 2 000 cas de ce type au cours de la dernière décennie.  L’obligation des gouvernements de garantir des communautés rurales à l’eau potable et à l’assainissement ne peut être minimisée en arguant de problèmes de pénurie, a-t-il ajouté, s’indignant que les intérêts productifs des plus puissants, dont l’industrie de l’armement, qui eux ne manquent pas d’eau, demeurent toujours privilégiés. 

Dialogue interactif

Donnant le coup d’envoi des échanges, l’Espagne a voulu savoir comment faire figurer le droit à l’eau potable et à l’assainissement lors de la Conférence sur l’eau en 2023, appelant par ailleurs à assurer la participation des femmes aux institutions communautaires de gestion des eaux.  Dans quels domaines allouer des fonds pour garantir l’accès des populations rurales à l’eau? a demandé l’Union Européenne.  Et que peut-on faire pour garantir que les femmes qui vivent en zone rurale se trouvent à la table des décisions? a questionné l’Islande.

Le Brésil a voulu connaître des exemples de pratiques optimales permettant de garantir un meilleur accès à l’eau potable et à l’assainissement en Amérique Latine et dans les Caraïbes.  L’Algérie a appelé à une gestion de l’eau en harmonie avec la nature, suivie des États-Unis qui ont mis en avant leur engagement à relier plus de 2 millions de personnes à l’eau potable et plus de 20 millions à l’assainissement.  De son côté, l’Égypte a rappelé les maigres ressources en eaux auxquelles elle a accès.

La République arabe syrienne a déploré les barrages et centres de traitement des eaux détruits par des terroristes dans le pays, alertant en outre que 3 millions de Syriens n’ont plus accès à l’eau potable et que des barrages sont sur le point de s’effondrer.  La République unie de Tanzanie a ensuite reproché au rapport de mentionner des faits datant de 2012 la concernant, précisant que 75% de la population rurale est approvisionnée en eau. 

Répondant à ces remarques et questions, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement a souligné que l’eau est une question de démocratie et non de profit.  Il a affirmé qu’il incombe à la communauté internationale de trouver une solution pour les 2 milliards d’individus privés d’eau potable et d’assainissement, en privilégiant une nouvelle approche qui considère l’eau comme un bien commun et non comme une marchandise. 

Le Rapporteur a indiqué que certaines femmes passent quatre heures par jour à chercher de l’eau, mais sont souvent marginalisées dans les procès de décisions aquifères.  Cette marginalisation peut être surmontée en incluant les femmes sur un pied d’égalité avec les hommes à tous les niveaux.  Il a également souligné que l’hygiène menstruelle doit être considérée comme partie intégrante du droit à l’assainissement. 

Poursuivant, le Rapporteur a indiqué que les communautés autochtones doivent obtenir de leurs gouvernements des titres fonciers pour jouir pleinement de leurs terres ancestrales.  Notant en outre que certains territoires deviennent inhabitables à cause des changements climatiques, il a appelé à établir des accords internationaux permettant de relocaliser et assister les populations concernées.  Il a également relevé que la promotion de l’eau potable est politiquement plus rentable que l’assainissement des eaux sales, pourtant des plus essentielles.  Le Rapporteur a ensuite estimé que la Conférence mondiale sur l’eau qui se tiendra en mars à New York, devrait être perçue comme le début d’un chemin » vers un monde plus juste en termes d’accès à une eau potable et assainie. 

Suite et fin de la discussion générale

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a fait état de trois priorités nationales en matière de droits humains, la première étant de répondre à la menace des changements climatiques.  Pour ce faire, a-t-il dit, le Gouvernement a formulé une politique de gestion des catastrophes destinée à sauvegarder les droits humains dans le contexte de ces changements, en accordant une attention particulière à la protection des femmes, des enfants, des séniors et des personnes âgées.  La deuxième priorité du pays, a-t-il poursuivi, est de répondre aux besoins des plus vulnérables de la société, notamment aux migrants.  Le Bangladesh, a souligné le délégué, promeut les droits des travailleurs migrants et de leurs familles tout au long du cycle migratoire.  Enfin, la troisième priorité est la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  À cet égard, il a indiqué son pays s’oppose à toutes les formes de racisme et d’intolérance contre les Rohingyas à qui il a ouvert ses frontières.  Le Gouvernement s’efforce de garantir les droits humains de ces personnes, à commencer par leur droit à un retour sûr et digne.

M. DANIEL ZAVALA PORRAS (Costa Rica) s’est dit fermement convaincu que les droits humains restent le seul moyen d’éradiquer la pauvreté, les inégalités, la discrimination et l’exclusion.  Soulignant par ailleurs l’importance du lien entre les droits humains et l’environnement, il a indiqué que son pays soutient l’initiative de Vanuatu, qui vise à demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les obligations en matière de changements climatiques.  Le représentant a également plaidé en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles, avant de saluer l’initiative « UNMute » destinée à accroître la participation des organisations de la société civile aux travaux de l’ONU.  Enfin, après avoir appelé que le Costa Rica ouvre ses portes aux migrants et est devenu le quatrième pays au monde en nombre de réfugiés par habitant, il a rappelé que son pays est candidat à un siège au Conseil des droits de l’homme pour la période 2023-2025. 

Mme HELEN INGA S VON ERNST (Islande) a constaté que de nombreux droits fondamentaux ont été remis en cause.  Pour inverser cette tendance, elle a appelé à combattre la méfiance à l’égard des valeurs de la démocratie, de la liberté et des droits de l’homme et à défendre un système où la dissidence fait partie intégrante du discours public.  Elle a d’autre part indiqué que, soucieux de renforcer la promotion et le respect des droits humains, son gouvernement a décidé de créer en 2023 une institution nationale des droits de l’homme, qui sera pleinement conforme aux Principes de Paris.  La représentante a également appelé à faire progresser l’égalité des sexes, rappelant à cet égard que, depuis 2009, l’Islande se trouve en tête de l’indice d’écart entre les sexes établi par le Forum économique mondial.  Nous allons poursuivre sur cette voie, a-t-elle promis, avant d’indiquer que la prochaine étape sera la budgétisation de l’égalité des sexes. 

M. PRIMASTO (Indonésie) a mis l’accent sur plusieurs priorités de son pays en matière de promotion des droits humains, citant en particulier la protection des communautés vulnérables vivant dans des zones reculées.  Le délégué a également souligné que le Gouvernement indonésien veille à ce que les lois et les politiques soient en mesure de créer une vie harmonieuse pour les différentes communautés religieuses.  Enfin, il a appelé à protéger et préserver les langues ancestrales, en permettant aux enfants de les apprendre et en leur donnant les moyens de le faire.  Avant de conclure, le représentant a estimé que le respect de tous les droits, y compris ceux des minorités, n’est pas seulement une reconnaissance de leurs droits fondamentaux, mais aussi une condition préalable à la stabilité politique et sociale et à la paix.

Mme BILLUR AHMADOVA (Azerbaïdjan) a rappelé l’attachement de son pays à la Charte des Nations Unies et aux instruments juridiques internationaux auxquels il fait partie.  Elle est ensuite revenue sur les réformes en cours sur le front des droits humains, avant de dénoncer les tentatives d’instrumentalisation du passé qui, selon elle, alimentent l’intolérance.  La déléguée a ainsi vivement fustigé la déclaration faite la veille par l’Arménie.  Celle-ci, a-t-elle souligné, continue de nier sa responsabilité dans les nombreux crimes de guerre commis par ses forces et refuse de poursuivre et de punir les auteurs et d’offrir un recours ou une réparation appropriée pour ses violations.  L’Arménie, selon la représentante, n’a jamais respecté ses obligations humanitaires internationales et a commis de nombreux crimes de guerre contre le personnel militaire et les civils d’Azerbaïdjan.  Contrairement à l’Arménie, l’Azerbaïdjan prend ses obligations internationales au sérieux et les plaintes relatives à des crimes commis lors d’opérations militaires font l’objet d’enquêtes par les institutions publiques compétentes, a-t-elle affirmé.  Elle a ajouté que la communauté internationale, y compris les organes compétents des Nations Unies, a exprimé à plusieurs reprises sa vive inquiétude face à la politique étrangère et l’intolérance de l’Arménie, dénonçant en particulier ses discours de haine raciste et ses déclarations discriminatoires. 

Mme JOSEPHINE MOOTE (Kiribati) a déploré l’impact des changements climatiques sur les enfants des petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a aussi dénoncé « l’héritage nucléaire » des enfants de ces îles, dont le lieu de vie a été le site d’explosions atomiques plus puissantes que les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki.  Pour la déléguée, les conflits et la violence trouvent leurs origines dans l’état d’esprit des personnes qui exercent une influence ou un pouvoir sur la vie des autres.  C’est pourquoi, a-t-elle souligné, Kiribati concentre ses efforts sur le fait de cultiver un bon état d’esprit chez ses citoyens, en promouvant le rôle des institutions et des systèmes traditionnels et modernes, y compris les institutions religieuses et les diverses organisations non gouvernementales.

Mme HEBA MOSTAFA MOSTAFA RIZK (Égypte) a assuré que son pays respecte les droits humains, en dépit de la crise mondiale actuelle, qui nuit à ces mêmes droits.  Elle s’est ensuite inquiétée des discours haineux, que l’ère digitale propage avec plus de célérité, avant d’exprimer ses préoccupations au sujet des discriminations dont souffrent les Américains d’origine latino-américaine ou africaine et de qualifier la prison de Guantanamo de « symbole des atteintes massives aux droits humains ».  Pour la représentante, la fragmentation des droits humains conduit au non-respect du multilatéralisme culturel.  À cet égard, elle a dénoncé le fait que nombre de pays soient encore exclus du droit au développement, ce qui représente un recul pour les Nations Unies.  Elle est ensuite revenue sur la préparation de la COP27 qui se tiendra du 7 au 18 novembre à Charm el-Cheikh, précisant que les ONG égyptiennes et africaines y participeront dans une approche libre de toute politisation. 

M. ENIAN LAMCE (Albanie) s’est dit fermement convaincu qu’il faut revoir les systèmes de santé en veillant à bannir toutes les formes de discrimination.  Il a d’autre part indiqué que son pays a mis en place une approche contre les représailles visant les défenseurs des droits de l’homme, en particulier ceux des femmes et des filles.  Il a également appelé à protéger les droits des enfants et des minorités.  Enfin, le délégué a attiré l’attention sur le rapport concernant la situation des droit humains en Serbie du Sud, notamment s’agissant de la minorité albanaise. 

M. ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a dénoncé l’agression de la Russie contre l’Ukraine et la situation des droits humains dans les territoires ukrainiens occupés et illégalement annexés, exprimant son soutien au travail de la Commission d'enquête sur l’Ukraine et de la Mission de surveillance des droits de l’homme en Ukraine.  De même, il a appuyé l’action des mécanismes de lutte contre l’impunité en Syrie, tels que le Mécanisme international, impartial et indépendant et la Commission d'enquête.  Il a ensuite appelé à reconnaître l’impact des changements climatiques sur pratiquement tous les droits de l’homme, avant d’indiquer que, cette année, son pays facilite avec le Brésil la résolution sur le droit à la vie privée à l'ère numérique.  Enfin, il a annoncé que l’Allemagne accueillera le huitième Congrès mondial contre la peine de mort du 15 au 18 novembre à Berlin.

M. KENNEDY GODFREY GASTORN (Tanzanie) a déclaré que pour promouvoir les droits humains, son gouvernement a créé d’une équipe spéciale chargée des droits de l’homme qui recueille l’opinion de la population sur la gouvernance.  La société civile et les partis politiques y sont invités à faire valoir leurs avis sur la question.  Le Gouvernement tanzanien a aussi facilité l’accès à la justice en faisant adopter une loi sur l’aide juridique, a indiqué le représentant.  Cette loi a permis à nombre de femmes et de jeunes d’accéder à la justice, s’est-il félicité.  Enfin, après avoir signalé que plus de 6 000 ONG sont actives dans le pays grâce à l’environnement propice que leur offre la Vision 2025 du Gouvernement, il s’est plu à rappeler que la Présidente de la Tanzanie, Mme Samia Suluhu Hassan, a reçu une récompense pour son action en tant que défenseuse des droits de l’homme. 

Mme ANA PAULA BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) a souligné la nécessité de faire le point sur ce qui a été réalisé jusqu’à présent et sur ce qui reste à faire face à l’escalade des conflits et aux agressions barbares, aux violations persistantes des droits de l’homme et au recul des droits des femmes dans le monde.  Elle a estimé que l’une des réalisations majeures de la communauté internationale en la matière a été la création du Conseil des droits de l’homme (CDH), qui est un organe crédible, capable de réagir en temps réel aux violations des droits de l’homme et aux abus.  La déléguée a par ailleurs attiré l’attention de la Commission sur des questions d’avant-garde telles que les liens entre les droits de l’homme et l’environnement, la santé mentale et la cyberintimidation.  En conclusion, elle a souligné que l’Examen périodique universel (EPU), instrument créé par le CDH, démontre qu’aucun pays n’est à l’abri d’un examen minutieux, qu’aucun pays n’a un bilan parfait en matière de droits de l’homme et que les États doivent apprendre les uns des autres.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse en réaction aux propos de son homologue des États-Unis, le représentant de l’Arabie saoudite a souligné que la liberté d’expression est garantie dans le Royaume saoudien, conformément aux dispositions du droit international des droits de l’homme et conformément à la vision de son pays pour 2030.  Il a invité son homologue américain à se baser à l’avenir sur des sources crédibles.

Le représentant de Cuba a rejeté les déclarations faites par les États-Unis, dénonçant une campagne de déstabilisation financée et fomentée par Washington.  Observant que les États-Unis n’ont ni un mandat moral ni un mandat international pour juger un pays tiers, il a accusé ce pays d’être responsable des violations des droits humains les plus brutales, y compris sur son territoire.  Après avoir rappelé les coups d’État fomentés par Washington en Amérique latine, il a affirmé que les États-Unis sont à l’origine de centaines de milliers de morts dans le monde et se livrent à des exécutions extrajudiciaires, à la torture et à d’autres violations.  Il a également rappelé que 39 personnes sont détenues de manière arbitraire à Guantanamo, avant de déplorer les mesures coercitives unilatérales des États-Unis et leurs effets délétères sur la jouissance des droits humains dans les pays ciblés.  Le délégué a ensuite fait état de plus de 1 000 personnes mortes aux mains de la police américaine en 2021 et de 35 000 tués par balles dans le pays en 2022.  Le pays le plus riche du monde n’a pas résolu le problème du racisme systémique, a-t-il ajouté, jugeant que les États-Unis n’ont « rien à apprendre à Cuba en matière de droits humains ».  Si ces droits préoccupent autant les États-Unis qu’ils le prétendent, ils n’ont qu’à lever le blocus qu’ils imposent à Cuba depuis des décennies, a-t-il conclu. 

Le représentant de la Chine a souhaité répondre aux accusations sans fondement proférées par les États-Unis et d’autres pays contre la Chine pour s’ingérer dans ses affaires intérieures, notamment en ce qui concerne le Xinjiang, où « tous les groupes ethniques sont unis et vivent en harmonie ».  Il a affirmé que la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a dû rendre public son rapport sur sa visite dans la région 15 minutes avant la fin de son mandat, « sous la pression des États-Unis ».  Il a accusé les États-Unis de cibler d’autres pays sans se soucier de leurs propres crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis en Afghanistan, en Iraq et ailleurs, ou contre leurs populations autochtones, et sans tenir compte de leur propre racisme systémique.  Il a condamné leur arrogance et a prédit aux États-Unis et au Royaume-Uni un « hiver glacial ». 

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