En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dix-septième session,
18e séance plénière, Matin
AG/12459

L’Assemblée générale examine le rapport du Mécanisme résiduel des Tribunaux pénaux sur le Rwanda et l’ex-Yougoslavie

La Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, a annoncé, ce matin, à l’Assemblée générale, qu’à l’exception de deux procès, toutes les affaires du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) avaient été réglées.  

« Les prochaines années seront donc marquées par la transition du Mécanisme, qui, après avoir été un tribunal pleinement opérationnel, deviendra une institution véritablement résiduelle », a observé Mme Graciela Gatti Santana qui a dit s’être fixé trois priorités: achever les procès restants, en première instance comme en appel; mettre au point une stratégie globale visant à guider le Mécanisme dans sa transition d’un tribunal opérationnel à une institution véritablement résiduelle; et enfin consolider les réalisations des Tribunaux ad hoc et du Mécanisme et préserver leur précieux héritage.    

À l’instar de nombreuses délégations, l’Australie, qui s’exprimait aussi au nom du Canada et de la Nouvelle-Zélande, s’est félicitée de l’ouverture récente du procès de M. Félicien Kabuga, le financier présumé du génocide au Rwanda.  Rejointe sur ce point par l’Uruguay, elle a souligné que le Mécanisme était un exemple concret de la manière dont la communauté internationale pouvait parvenir à établir des responsabilités pour des crimes graves commis dans des situations de conflit complexes, fût-ce trois décennies après les faits.   

Mme Santana a indiqué qu’après la confirmation par l’accusation du décès de deux fugitifs notoires, accusés d’avoir joué un rôle clef pendant le génocide de 1994 contre les Tutsis, seuls quatre d’entre eux étaient encore en liberté et activement recherchés pour être traduits en justice au Rwanda.  Plusieurs délégations, dont celles du Brésil et de la Tanzanie, ont appelé les États Membres à tout faire pour les poursuivre.  Pour sa part, le Rwanda a indiqué que très peu de pays avaient répondu aux 1 145 actes d’accusation qu’il avait envoyés, déplorant en outre que de nombreux États Membres n’aient pas répondu non plus aux demandes du Mécanisme.  

Abordant la dernière affaire du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) -la procédure d’appel concernant M. Jovica Stanišić et M. Franko Simatović–, la Présidente a indiqué qu’un arrêt était attendu d’ici à la fin du mois de juin prochain.  Elle a déploré le refus persistant de la Serbie d’arrêter et de transférer M. Petar Jojić et M. Vjerica Radeta au Mécanisme, dénonçant une violation de la Charte des Nations Unies.  L’Albanie et le Royaume-Uni ont aussi soulevé cette question, la première estimant qu’il ne pouvait y avoir de réconciliation et de paix durable sans la reconnaissance de la souffrance des victimes et le second que la coopération judiciaire régionale dans les Balkans occidentaux restait insuffisante.  De son côté, la Fédération de Russie a considéré que le TPIY était un échec typique de la juridiction internationale, l’accusant de n’avoir poursuivi ni les pays occidentaux après leur attaque contre la Serbie en 1999 ni les combattants albanais du Kosovo.   

Comme l’Union européenne et le Royaume-Uni, la Présidente s’est inquiétée de la situation de huit personnes qui ont été acquittées ou ont purgé leur peine avant d’être réinstallées au Niger en décembre 2021, conformément à un accord avec l’ONU, déplorant que ces personnes soient menacées d’expulsion et vivent de facto sous assignation à résidence.  Elle a précisé que le Mécanisme avait sollicité en vain le soutien du Conseil de sécurité pour régler cette situation. 

De son côté, le Rwanda s’est inquiété des libérations anticipées de la plupart des personnes reconnues coupables du crime de génocide après avoir purgé seulement les deux tiers de leur peine, certaines se livrant alors à une négation du génocide.  Préoccupé par la montée de ce phénomène, il a appelé l’Assemblée générale à une action urgente contre la négation du génocide et à envisager sa criminalisation.  La France et le Royaume-Uni ont déploré la glorification des criminels de guerre et de la négation du génocide, pointant notamment la présence continue à Belgrade d’une peinture murale de Ratko Mladić, reconnu coupable de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide par le TPIY en 2017. 

Rappelant par ailleurs que le Mécanisme est chargé de la conservation des archives des tribunaux pénaux internationaux, la Tanzanie a recommandé la création par l’ONU d’un musée consacré à sa division d’Arusha, à des fins éducatives et de recherche, souhaitant en outre que le budget du Mécanisme lui permette de s’acquitter de son mandat avec efficacité.  La Présidente a exhorté les États Membres à soutenir sa récente proposition de budget, la qualifiant « d’aussi modeste que possible ».

L’Assemblée générale poursuivra ses travaux demain, jeudi 20 octobre, à partir de 10 heures. 

MÉCANISME INTERNATIONAL APPELÉ À EXERCER LES FONCTIONS RÉSIDUELLES DES TRIBUNAUX PÉNAUX: NOTE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL (A/77/242)

Débat sur la question

S’adressant à l’Assemblée en anglais, en français et en espagnol, Mme GRACIELA GATTI SANTANA, Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, a présenté son dixième rapport annuel.  Elle a annoncé qu’à l’exception d’un appel, toutes les affaires du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) liées aux crimes principaux sont maintenant closes et qu’à l’exception d’un procès, toutes les procédures du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) avaient été réglées.  Elle a indiqué qu’après la confirmation par l’accusation du décès de deux fugitifs notoires, accusés d’avoir joué un rôle clef pendant le génocide de 1994 contre les Tutsis, seuls quatre d’entre eux sont encore en liberté et activement recherchés pour être traduits en justice au Rwanda.  Les prochaines années seront donc marquées par la transition du Mécanisme, qui, après avoir été un tribunal pleinement opérationnel, deviendra une institution véritablement résiduelle, a-t-elle observé.   

La Présidente a rappelé que cette année, le Conseil de sécurité avait examiné les travaux du Mécanisme et voté la résolution 2637 (2022), contenant les orientations de la communauté internationale.  En vue de leur application, elle a annoncé avoir établi les trois priorités suivantes: d’abord achever les procès restants, en première instance comme en appel; ensuite mettre au point une stratégie globale visant à guider le Mécanisme dans sa transition continue d’un tribunal opérationnel à une institution véritablement résiduelle; et enfin consolider les réalisations des Tribunaux ad hoc et du Mécanisme et préserver leur précieux héritage.   

Concernant sa première priorité, elle a indiqué que dans l’affaire contre Félicien Kabuga, les déclarations liminaires des parties avaient été entendues le mois dernier et que l’accusation avait commencé à présenter ses preuves.  Elle a souligné que le procès se tenant à La Haye, mais que les antennes d’Arusha et de Kigali apportent également leur soutien à la procédure grâce à la technologie des salles d’audience du Mécanisme, qui permet la participation de témoins à distance.  Elle y a vu un excellent exemple de l’utilisation efficace de ressources limitées du Mécanisme.  Abordant la dernière affaire du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) -la procédure d’appel concernant M. Jovica Stanišić et M. Franko Simatović-, elle a indiqué qu’un arrêt était attendu d’ici à la fin du mois de juin prochain.   

Évoquant sa deuxième priorité, elle a souligné que des fonctions résiduelles resteraient en place dans des domaines tels que la protection des témoins, le suivi des affaires renvoyées aux juridictions nationales, la préservation des archives et l’assistance aux juridictions nationales.  Elle a aussi rappelé la « responsabilité permanente » du Mécanisme envers les 46 condamnés purgeant leur peine dans 13 États d’exécution, soulignant qu’en tant que Présidente, elle était chargée de se prononcer sur toutes les demandes de grâce, de commutation de peine ou de libération anticipée.   

Passant à sa troisième priorité, elle a souligné que la création des Tribunaux et du Mécanisme marquait une étape importante dans la promotion d’un système multilatéral refusant l’impunité pour les crimes les plus graves.  Elle a toutefois constaté que l’état actuel des affaires mondiales démontrait une fois de plus que la seule existence de tribunaux internationaux ne suffisait pas à garantir la paix et faire progresser l’état de droit.  En l’absence de soutien à long terme des États Membres, la confiance de la communauté internationale dans un système de justice pénale internationale crédible risque d’être compromise, a-t-elle averti.  Mme Santana a félicité les 13 États chargés de l’exécution des peines et lancé un appel aux autres États afin qu’ils acceptent une répartition de la charge, avertissant que sans soutien supplémentaire, le Mécanisme n’avait pas les ressources pour s’acquitter de cette tâche.   

Évoquant les affaires d’outrage, elle a annoncé que le Mécanisme envisageait de les renvoyer aux juridictions nationales, tout en soulignant que le renvoi n’était pas toujours possible, comme l’avait montré un cas concernant la Serbie où les conditions requises n’étaient pas remplies.  Elle a aussi déploré le refus persistant de la Serbie d’arrêter et de transférer Petar Jojić et Vjerica Radeta au Mécanisme, dénonçant une violation de la Charte des Nations Unies.  Elle s’est également inquiétée de la situation de huit personnes qui ont été acquittées ou ont purgé leur peine avant d’être réinstallées au Niger en décembre 2021, conformément à un accord avec l’ONU, déplorant qu’elles soient menacées d’expulsion et qu’elles vivent de facto sous assignation à résidence.  Elle a précisé que le Mécanisme avait sollicité en vain le soutien du Conseil de sécurité pour régler cette situation et en appelait désormais à la bonne foi des États Membres.  Elle les a ensuite exhortés à soutenir sa récente proposition de budget, la qualifiant « d’aussi modeste que possible » et à rester inébranlables dans la lutte contre la négation des crimes du passé, où qu’ils se produisent.

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne, a félicité le Mécanisme pour les progrès dans son travail judiciaire de base et dans l’accomplissement de son mandat d’assurer la responsabilité des atrocités commises pendant les conflits dans l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.  Pour continuer à le faire, il est impératif que le Mécanisme puisse recevoir les ressources financières nécessaires, a-t-elle plaidé.  Elle a encouragé le Bureau du Procureur à continuer d’aider les autorités judiciaires nationales dans la poursuite des crimes internationaux graves, afin de continuer à rendre justice aux victimes.  Nous notons avec préoccupation la situation toujours incertaine des huit personnes se trouvant au Niger et qui ont été acquittées ou libérées, a-t-elle déclaré.  Elle a encouragé le Mécanisme et les États Membres à poursuivre leurs efforts pour trouver une solution permanente pour ces personnes. 

Mme Popan a ensuite affirmé que la négation du génocide, la glorification des criminels de guerre et les tentatives de réécrire l’histoire ou de nier le travail du Mécanisme ne contribuent pas à la justice et n’apportent pas la paix et la sécurité aux victimes.  Sans comprendre et se réconcilier avec le passé, il est difficile de construire l’avenir, a-t-elle indiqué, ajoutant que confronter les horreurs du passé et la justice postconflit aide à composer avec le côté obscur de l’histoire et du nationalisme.  C’est pourquoi une meilleure prise de conscience de l’héritage des anciens Tribunaux et du travail du Mécanisme est essentiel.  À cet égard, l’Union européenne continue de travailler avec le Mécanisme pour l’éducation des communautés affectées et des jeunes générations dans la région de l’ex-Yougoslavie.  Elle a conclu en appelant à continuer de travailler ensemble pour rendre la justice et empêcher l’impunité de s’installer.  Selon la déléguée, ralentir le processus judiciaire signifie ralentir la réconciliation et la consolidation de la paix. 

M. ALEXANDRA HUTCHISON (Australie), au nom des délégations du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a souligné le rôle essentiel joué par le Mécanisme.  Alors que nous sommes toujours les témoins d’atrocités dans le monde, le Mécanisme est un exemple concret de la manière dont la communauté internationale peut parvenir à un établissement des responsabilités pour des crimes graves commis dans des situations de conflit complexes, a dit le délégué.  Il s’est félicité de l’entame du procès de Félicien Kabuga le mois dernier, près de trois décennies après le génocide perpétré contre les Tutsis.  Cela montre que la communauté internationale doit rester engagée en faveur de la justice, peu importe le temps que cela prend, a poursuivi le délégué.  Il a appuyé les efforts visant à appréhender les quatre derniers fugitifs et exhorté tous les États à coopérer avec le Mécanisme à cette fin.  Enfin, le délégué a rappelé que la responsabilité première dans la poursuite des crimes internationaux graves incombe aux États. 

S’exprimant au nom des pays baltes, M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a appelé tous les États à coopérer pleinement avec le Mécanisme et à l’aider à arrêter les fugitifs.  Dénonçant les « actes odieux » de la Russie sur le territoire de l’Ukraine, il a estimé que le Mécanisme rappelait que le Conseil de sécurité doit agir en vue de la reddition de comptes pour les crimes d’atrocité.  Il a salué le fait que le Mécanisme a adapté ses activités au mandat du Conseil de sécurité.  Le représentant a par ailleurs soutenu l’établissement d’un tribunal spécial en vue de juger le « crime d’agression » commis par la Russie contre l’Ukraine. 

M. VICTOR SILVEIRA BRAOIOS (Brésil) a rappelé que malgré son importance, le Mécanisme n’a pas vocation à être une institution permanente.  Pour cette raison, il a félicité les dirigeants du Mécanisme qui ont à l’esprit la nécessité d’échéanciers clairs pour l’achèvement des activités judiciaires.  Pour s’acquitter de ses missions, le Mécanisme a également besoin du soutien de la communauté internationale, a ajouté le délégué qui a appelé à une pleine coopération avec le Mécanisme dans le suivi des questions des fugitifs et de la relocalisation des personnes acquittées ou libérées. 

Le représentant a par ailleurs indiqué que ce sont les États qui sont responsables au premier chef de juger des crimes commis sur leur territoire.  Les tribunaux internationaux sont donc complémentaires aux juridictions nationales et ne doivent agir que lorsque les institutions nationales sont incapables ou non-disposées à juger ces crimes, a-t-il souligné. 

M. ANDREW WEINSTEIN (États-Unis) a félicité le Mécanisme pour avoir atteint les objectifs fixés par le Conseil de sécurité, saluant notamment l’ouverture du procès de Félicien Kabuga, financier présumé du génocide rwandais.  Si le Mécanisme a beaucoup fait pour établir les faits et clarifier ce dossier historique, les autorités nationales doivent poursuivre l’important travail de réconciliation, a-t-il estimé.  Il a affirmé que les pays forts parlent honnêtement du passé afin de s’attaquer de manière significative aux causes profondes des conflits et d’avancer vers un avenir pacifique et stable.  La négation des faits historiques et la célébration de ceux qui ont commis des crimes graves constituent un affront aux victimes et aux témoins et une insulte à l’humanité, a-t-il ajouté.  Il a appelé les États Membres qui pourraient abriter les derniers fugitifs rwandais à coopérer avec le Mécanisme.  Tant que les pays continueront à s’engager dans la « fiction dangereuse » de la négation du génocide, le monde risque de voir se reproduire ces crimes horribles, a-t-il souligné.

Mme PETRONELLAR NYAGURA (Zimbabwe) s’est félicitée de l’assistance et de la coopération fournies par le Bureau du Procureur, l’équipe de suivi, la Belgique, la France, les Pays-Bas, le Rwanda, l’Espagne, le Royaume-Uni et les États-Unis pour retrouver la dépouille de Protais Mpiranya, ce qui a permis de clore l’affaire.  Elle a marqué son étonnement du fait que le rapport du Président du Mécanisme, tout en reconnaissant la coopération des États Membres, indiquent que ces derniers ne coopèrent pas pour faire avancer les enquêtes, rechercher et appréhender les fugitifs.  Elle a exhorté le Président du Mécanisme à reconnaître les efforts inestimables des pays qui ont continué à coopérer pleinement avec le Mécanisme, comme indiqué dans le rapport lui-même.  Le Zimbabwe prend ses obligations internationales au sérieux, et est déterminé à continuer de coopérer avec le Mécanisme, par le biais du Groupe de travail interdépartemental mis en place à cet effet, a-t-elle affirmé.

M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) a salué les progrès considérables enregistrés par le Mécanisme, en citant l’aide apportée aux juridictions nationales et l’arrestation de fugitifs.  Félicien Kabuga devrait être le dernier grand dossier du Mécanisme, a dit le délégué.  Il a insisté sur l’apport du Mécanisme au développement du droit pénal international et dans la lutte contre l’impunité.  C’est un exemple concret de la manière dont la communauté internationale peut parvenir à établir des responsabilités pour des crimes graves, a déclaré le délégué.  Il a rappelé le parcours professionnel de la nouvelle Présidente du Mécanisme, la juge Graciela Gatti Santana, qui fait la fierté de tous les Uruguayens.  En conclusion, le délégué a demandé que le Mécanisme bénéficie des ressources nécessaires à l’accomplissement de ses tâches.

M. SHUNSUKE NAGANO (Japon) s’est inquiété des retards provoqués par le défaut de coopération de certains États et a enjoint tous les États Membres à soutenir le Mécanisme.  Le Japon, a-t-il souligné, est très soucieux de maintenir un ordre international fondé sur le droit et le plus important contributeur à la Cour pénale internationale (CPI).  Rappelant que le Japon deviendra membre du Conseil de sécurité en janvier 2023, le délégué a affirmé son engagement pour garantir que le Mécanisme continuera à jouer un rôle important dans le renforcement de l’état de droit. 

M. JONATHAN SAMUEL HOLLIS (Royaume-Uni) s’est félicité du début du procès de Félicien Kabuga entamé à La Haye en septembre.  Il a rappelé qu’en début de cette année, le Mécanisme a confirmé le décès de deux fugitifs, Protais Mpiranya et Phineas Munyarugarama, jugeant regrettable que ces personnes n’aient jamais été confrontées à la justice.  Il a estimé que la fin du procès de Jovica Stanišić et Franko Simatović, reconnus coupables de violations des lois ou coutumes de la guerre et crimes contre l’humanité, marquera un chapitre important dans l’histoire de la justice internationale.  Grâce à son travail inlassable, le Mécanisme continue de montrer que l’impunité n’est pas et ne sera pas autorisée, a-t-il salué.   

Malgré ces succès, trois questions de coopération avec le Mécanisme continuent de susciter des inquiétudes, a indiqué le représentant.  Il a mentionné le renvoi, par le Mécanisme, de la Serbie au Conseil de sécurité pour n’avoir pas arrêté ni transféré Petar Jojić et Vjerica Radeta.  La coopération judiciaire régionale dans les Balkans occidentaux reste insuffisante, a-t-il relevé, arguant que cela a des implications directes pour la réalisation de la justice pour les victimes.  Il a enfin marqué sa préoccupation du fait que le Mécanisme rencontre des problèmes dans la relocalisation des personnes acquittées ou condamnées, et qui ont terminé de purger leur peine.  Il s’est également inquiété de la persistance de la glorification des criminels de guerre et de la négation du génocide, pointant notamment la présence continue à Belgrade d’une peinture murale de Ratko Mladić, un homme reconnu coupable de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide.  Glorifier les auteurs et les instigateurs de ces actes odieux nous éloigne encore plus de la réconciliation, a-t-il affirmé.

M. KENNEDY GODFREY GASTORN (République-Unie de Tanzanie) a indiqué que la Présidente de son pays a rencontré en septembre dernier la Présidente du Mécanisme et réitéré le soutien inébranlable de la Tanzanie à son travail.  La Tanzanie continuera de s’acquitter de ses obligations en vertu de la Charte des Nations Unies, du Statut du Mécanisme et de l’Accord de siège.  Rappelant l’importance de la coopération de toutes les parties prenantes pour l’administration de la justice, le délégué a exhorté les États Membres à œuvrer à l’arrestation des derniers fugitifs.  Mon pays est prêt à apporter toute l’aide nécessaire au procès de Félicien Kabuga, a-t-il assuré.  Il a rappelé que le Mécanisme est, selon son mandat, chargé de la conservation des archives des tribunaux pénaux internationaux.  Il a recommandé la création par l’ONU d’un musée de la division d’Arusha du Mécanisme à des fins éducatives et de recherche.  Enfin, le délégué a souhaité que le budget proposé pour la division d’Arusha lui permette de s’acquitter de son mandat avec efficacité. 

M. ROBERT KAYINAMURA (Rwanda) a indiqué que très peu de pays avaient répondu aux 1 145 actes d’accusation envoyés par le Rwanda.  Il a également déploré que de nombreux États Membres n’aient pas répondu non plus aux demandes du Mécanisme.  Il s’est félicité de l’action récente des États-Unis en vue de l’extradition de Beatrice Munyenyezi et a salué les nombreux pays de l’Union européenne travaillant à mette en place un groupe d’enquête international axé sur les suspects de génocide présents en Europe.  Il a appelé les États africains à imiter ces bons exemples, rappelant la décision du Conseil de paix et sécurité de l’Union africaine qui demande aux États membres qui ne l’ont pas encore fait de poursuivre ou d’extrader les fugitifs du génocide qui résident actuellement sur leur territoire.  Le refus de certains États Membres de coopérer avec le Rwanda et le Mécanisme résiduel revient à « soutenir activement » les fugitifs et constitue un manquement à leurs obligations juridiques internationales, a-t-il affirmé, appelant l’Assemblée générale à les condamner.   

Le représentant s’est inquiété des libérations anticipées de la plupart des personnes reconnues coupables du crime de génocide après avoir purgé seulement les deux tiers de leur peine, certaines se livrant alors à une négation du génocide.  Préoccupé par la montée de ce phénomène, il a appelé l’Assemblée générale à une action urgente contre la négation du génocide et à envisager sa criminalisation.   

Mme BAŞAK AYDIN-GUCCIARDO (Türkiye) a salué le travail du Mécanisme qui compte en son sein un juge issu de la Türkiye.  Elle a insisté sur la parité des sexes dans les organes internationaux, se félicitant de l’augmentation du nombre de femmes dans la liste du personnel à recruter au sein du Mécanisme.  Elle a aussi salué le fait que les femmes représentent la moitié du personnel professionnel du Mécanisme.  La déléguée a dit espérer que cette réalité poussera les États à présenter davantage de candidatures féminines, tout en encourageant ces dernières à faire acte de candidature.  Elle a terminé en souhaitant que soit préservé l’héritage des tribunaux pénaux internationaux. 

Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a soutenu l’approche adoptée par la Présidente et le Procureur, qui consacrent leurs efforts à l’achèvement des procès, à l’arrestation des fugitifs mis en accusation devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda et à l’assistance aux juridictions nationales chargées de poursuivre les auteurs de crimes internationaux commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda.  S’agissant du Rwanda, le procès de Laurent Bucyibaruta, affaire renvoyée par le Mécanisme aux juridictions françaises, s’est tenu du 9 mai au 12 juillet 2022, a précisé la déléguée qui a indiqué que M. Bucyibaruta a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour complicité de génocide par aide et assistance et complicité de crimes contre l’humanité. 

La représentante a par ailleurs estimé que l’ouverture du procès de Félicien Kabuga devant le Mécanisme démontre que la justice avance à l’égard de personnalités rwandaises soupçonnées d’avoir participé au génocide des Tutsis en 1994, en rappelant que M. Kabuga a été arrêté en France en 2020.  S’agissant de l’ex-Yougoslavie, elle a déploré que la glorification de criminels de guerre se perpétue, parfois avec le concours d’autorités nationales et locales. 

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a estimé que le Mécanisme tardait à exécuter son mandat, rappelant que le Conseil de sécurité avait décidé, par la résolution 1966 (2010), de mettre en place une structure « petite, temporaire et efficace » pour remplacer les deux Tribunaux.  Il a estimé que la création d’organes de justice internationale par le Conseil de sécurité « était loin d’être idéale ».  Notant un succès relatif du TPIR « malgré ses imperfections », il a considéré que le TPIY était un échec typique de la juridiction internationale, l’accusant de ne pas avoir poursuivi les pays occidentaux après l’attaque contre la Serbie en 1999, ni les combattants albanais du Kosovo.  Il s’est dit « extrêmement préoccupé » de l’état de santé de Ratko Mladić, rappelant les exigences de la résolution 2637 (2022) du Conseil de sécurité, qui demande au Mécanisme de garantir les droits des détenus, notamment en matière de soins médicaux.

M. ANDRIS STASTOLI (Albanie) a appelé au renforcement de la coopération entre le Mécanisme et les États, arguant qu’un déficit en la matière saperait l’administration de la justice.  Dans ce contexte, il a déploré l’absence de coopération sur le dossier Petar Jojić, comme le laisse voir la notification du 11 mai 2021 faite au Conseil de sécurité par le Mécanisme.  Il ne peut y avoir de réconciliation et de paix durable sans la reconnaissance de la souffrance des victimes, a-t-il souligné.  Le représentant a aussi dénoncé le révisionnisme et l’apologie des criminels de guerre.  Cela est inacceptable, a-t-il martelé, avant de rappeler que tous les États ont des obligations en vertu du droit international.  Une bonne collaboration entre États est importante pour l’administration de la justice, a-t-il conclu.

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