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Commission du développement social: des délégations voient en 2021 « l’année des possibilités »

La Commission du développement social a poursuivi, aujourd’hui, son débat général, l’occasion, une fois de plus, pour les délégations d’exprimer leurs vues sur le thème prioritaire de cette session, tout en mettant en avant leurs propres réalisations en matière de transformation numérique, dans des contextes plus ou moins favorables. 

« 2021 peut être l’année des possibilités. »  Cette déclaration de l’Afghanistan pourrait résumer la position de nombreuses délégations qui ont insisté sur les possibilités que recèle l’utilisation du numérique pour le développement social, citant en exemple les nombreuses mesures adoptées dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

À l’heure de l’économie numérique, l’importance d’offrir des chances égales aux hommes et aux femmes et de répondre aux besoins des groupes marginalisés, à commencer par les jeunes, a également été souligné à plusieurs reprises. 

Le thème prioritaire de cette cinquante-neuvième session porte sur le numérique au service du développement social et du bien-être de toutes et de tous (E/CN.5/2021/3).

L’Afghanistan a ainsi rappelé qu’il reste confronté à la menace des Taliban et d’autres groupes terroristes qui ciblent ses infrastructures de télécommunication.  Malgré ces défis, 20% de la population nationale a accès à Internet et ce taux va croissant.  Le pays compte en outre 27 millions de connexions mobiles, ce qui a fait dire à la délégation que « 2021 peut être l’année des possibilités », notamment pour l’utilisation du numérique au service du développement social, pour les citoyens comme pour les entreprises. 

Lui aussi confronté à un environnement complexe, malgré « l’ère nouvelle » occasionnée par l’accord de paix d’août dernier, le Soudan a souligné les efforts qu’il consent pour améliorer les services essentiels en s’appuyant, dans la limite de ses moyens, sur la technologie numérique.  Le Gouvernement de transition a, par exemple, mis en place un programme numérisé de transfert de fonds dont plus de 4 000 familles défavorisées ont déjà bénéficié en cette période de crise sanitaire.  Une carte électronique est par ailleurs fournie aux retraités du service public pour qu’ils retirent leurs pensions, tandis qu’un projet de réseau en ligne est en préparation pour aider les femmes entrepreneurs à nouer des contacts et à trouver des financements. 

De son côté, la Colombie a mis l’accent sur l’inclusion sociale des foyers les plus touchés par la pandémie et par la pauvreté endémique.  Pour cela, les nouvelles technologies permettent, entre autres, de fournir des prestations monétaires aux familles en difficulté, de verser des revenus solidaires aux plus démunis et de soutenir les entreprises par le biais de compensation de TVA.  Le Viet Nam a, lui, pu proposer des prêts à taux zéro pour soutenir l’activité et les salaires, la Turquie se concentrant pour sa part sur le développement de plateformes numériques destinées à l’aide sociale, au suivi des dossiers médicaux et au soutien du marché du travail. 

Avec 17% de la population mondiale, l’Inde s’est enorgueillie d’avoir mis en place un système unique d’identification biométrique, qui facilite l’accès de ses citoyens aux services de protection sociale.  Elle a par ailleurs vanté son programme d’imposition numérique, l’un des plus vaste au monde, ainsi que le portail électronique lancé par le Gouvernement pour appuyer le commerce agricole.  La délégation a également évoqué les paiements de santé en ligne et l’application mobile élaborée pour garantir un meilleur suivi de l’évolution épidémiologique au niveau national. 

Voyant dans la technologie numérique le « moteur principal de la modernisation », la Jamaïque a dit avoir concentré ses efforts sur la réduction des inégalités entre les groupes sociaux.  Saluant la migration de son administration au format électronique, elle s’est aussi réjouie d’avoir augmenté de 19%, entre mars et décembre 2020, ses paiements en ligne à destination des familles et des personnes sans emploi, largement victimes de la pandémie.  Une expérience proche de celle du Malawi, qui a développé ses transferts monétaires et ses services sociaux en ligne, lesquels concernent désormais 30% de sa population. 

Grâce au développement des technologies numériques, le Bangladesh assure avoir progressé vers une transition socialement plus juste, en particulier dans ses actions contre la pauvreté et pour l’autonomisation des femmes.  Qualifiée de « grand pas en avant » par la mission, la campagne gouvernementale « pour un Bangladesh numérique » a permis de faire passer en quelques années la pénétration d’Internet dans le pays de 1% à 60%.  Cette progression de la connectivité s’est traduite par un essor du commerce électronique mais aussi par des avancées sociales, notamment pour les femmes et les filles frappées de manière disproportionnée par la pandémie de COVID-19.  

À l’instar du Chili, à l’origine d’une initiative régionale pour l’accès des femmes au numérique, la plupart des délégations ont souligné l’importance, à l’heure de l’économie numérique, d’offrir des chances égales aux hommes et aux femmes et de répondre aux besoins des groupes marginalisés, à commencer par les jeunes.  Au nom de l’Allemagne, une déléguée de la jeunesse a estimé que le numérique représente « une chance unique » pour accroître la participation des jeunes à la société, à condition toutefois que tous puissent avoir accès aux technologies et aux facilités d’apprentissage qu’elles offrent. 

À cette fin, Sri Lanka a décidé de mettre Internet gratuitement à la disposition des étudiants et de développer les possibilités d’enseignement à distance, alors que les Émirats arabes unis misaient sur l’innovation avec la création du premier « Ministère de l’intelligence artificielle », qui comprend également des initiatives d’apprentissage en ligne. 

Dans le même ordre d’idées, Israël a fait état de technologies nationales visant à améliorer le bien-être des personnes âgées et des enfants en situation de handicap.  La mission a mentionné une application permettant aux seniors de se mettre en contact avec des jeunes localement afin de rompre leur isolement.  Une autre application israélienne, TikTalk, vient en aide aux enfants avec des difficultés d’expression et d’élocution par le biais de jeux interactifs.  Cabo Verde a lui aussi fait le choix de l’innovation, via sa plateforme Comvida financée de manière participative, qui centralise les formations sur la pandémie. 

Convaincue qu’elle a le potentiel de devenir un véritable « pôle d’innovation », la Roumanie s’est quant à elle félicitée de l’attraction qu’elle suscite pour les entreprises technologiques et de la création prochaine sur son sol d’un centre européen de cybersécurité.  Jugeant que la technologie numérique est propice au développement social et à l’épanouissement de la personne, elle a également évoqué le lancement d’une stratégie de numérisation de l’éducation. 

Tout aussi ambitieux, le Népal a mentionné son adoption, en 2019, d’un cadre numérique qui concerne huit secteurs d’activité, dont la santé, l’éducation, l’énergie et le tourisme, et vise à libérer les énergies.  La mission a cependant reconnu que beaucoup reste à faire pour réduire la fracture numérique dans le pays, un constat partagé par la plupart des missions de pays en développement. 

Enfin, rappelant les mesures prises pour endiguer la COVID-19, notamment la suspension du pèlerinage dans les lieux saints de l’islam et les limitations imposées pendant le mois de ramadan, l’Arabie saoudite a également souligné ses efforts financiers dans la lutte contre la pandémie: 8 milliards de dollars par le truchement du G20, mais aussi 150 millions consacrés à l’innovation, 150 autres millions destinés à soutenir les vaccins et 200 millions à différents programmes à vocation sociale. 

Avant de détailler leurs politiques de développement social, certaines délégations, comme celle de la République de Macédoine du Nord, ont également insisté sur l’importance du numérique dans la riposte sanitaire face au virus.  La délégation de ce pays a ainsi mentionné l’application « My Help » permettant la collecte de données médicales dans le cadre de cette réponse. 

Mais c’est bien l’importance du numérique pour un développement durable et la protection des plus vulnérables qui a dominé les interventions.  La République dominicaine a insisté sur la nécessité de disposer des infrastructures robustes dans le domaine du numérique afin d’attirer les investissements étrangers.  Elle a, dans le même temps, indiqué que l’objectif de la « révolution 4.0 » est d’éliminer les inégalités.

C’est dans le respect de cet impératif que la République dominicaine entend devenir un « modèle » s’agissant de l’innovation numérique, a déclaré la mission.  De son côté, le Qatar a indiqué que son gouvernement a consacré 75 millions de rials qataris à la protection de l’emploi dans un contexte économique dégradé par la pandémie.  La mission a ajouté que 37 projets sont en cours dans le pays pour renforcer l’accès au numérique des personnes âgées et handicapées.

Le Pakistan a lui aussi détaillé le plan national pour la « numérisation du Pakistan » dont les grands axes sont: l’accès au numérique pour tous les Pakistanais, le développement du iGovernment avec la numérisation de procédures administratives et l’aide à la création de start-ups.

Le Sénégal a indiqué avoir adopté un plan de riposte national articulé autour d’un programme de résilience économique et sociale (PRES), doté d’un budget de 1 000 milliards de francs CFA, pour renforcer le secteur de la santé, soutenir la résilience des ménages vulnérables, sauvegarder la stabilité macroéconomique et sécuriser l’approvisionnement régulier du pays en hydrocarbures, en produits médicaux et pharmaceutiques et en denrées de première nécessité.

Cette riposte holistique face à la crise a donné des résultats largement appréciés au niveau international, plaçant le Sénégal au rang de deuxième meilleur pays dans la gestion de la pandémie, s’est félicité la mission.  Le Paraguay a, lui, détaillé son plan de relance économique « Relevons le Paraguay », qui conjugue politiques de protection sociale et investissements dans les infrastructures, y compris numériques.

La Thaïlande a développé plusieurs outils afin de ne laisser personne de côté.  La mission de ce pays a mentionné un outil de lutte contre la pauvreté, appelé TMAP, décliné sur une base territoriale; le système CPIS qui donne à des jeunes et enfants accès à des services de protection via Internet et le recours accru à des robots dans le domaine médical.  De son côté, la mission du Costa Rica a indiqué que la juridiction suprême de son pays a reconnu l’accès au numérique comme constituant un droit fondamental.

« Monaco entend transformer sa taille en force grâce au numérique », a affirmé à son tour la mission monégasque.  Elle a insisté sur les efforts consentis dans le cadre du plan Extended Monaco visant notamment à fournir la 5G à tous ceux qui vivent et travaillent à Monaco.  Un fonds de 20 millions d’euros a en outre été mis en place pour appuyer les entreprises dans le domaine du numérique.  La délégation a aussi insisté sur l’importance du numérique dans la campagne actuelle de vaccination.

La Serbie a, elle, mentionné la récente tenue d’un sommet numérique des Balkans occidentaux, au cours duquel une bonne connectivité régionale a été jugée indispensable pour le développement des pays de la région.

Les délégations ont aussi profité de ce débat général pour proposer un renforcement de la coopération internationale au profit des plus vulnérables.  La Libye et le Pakistan ont ainsi demandé que les pays en développement aient accès au vaccin contre la COVID-19 qui, ont demandé l’Italie et le Nicaragua, doit devenir un véritable bien public mondial. 

Le Pakistan a aussi plaidé pour un allégement de la dette, notant que 100 millions de personnes risquent de retomber dans la pauvreté dans les pays en développement.  Cet appel a été relayé par le Sénégal et la Côte d’Ivoire, ce dernier pays prônant par ailleurs une coopération internationale renforcée, sous l’égide de l’ONU, pour combler la fracture numérique entre les pays.

Atténuer les effets négatifs du numérique tout en maximisant sa contribution pour le développement sera au cœur de la présidence italienne du G20, a promis la délégation de l’Italie.  « Utilisons le numérique dans un esprit de coopération pour promouvoir l’inclusion », a renchéri le représentant italien des jeunes.  Le Nicaragua a également demandé l’élimination des sanctions prises contre certains pays.

Enfin, une note quelque peu dissonante est venue de la délégation des États-Unis qui a reproché à la Commission le caractère trop large de son mandat, l’embouteillement de son ordre du jour et les risques de chevauchement avec d’autres entités onusiennes, « plus compétentes ».  Elle a ainsi cité les droits des personnes handicapées et des jeunes qui relèvent d’autres organes.  Elle a mis en garde la Commission contre l’adoption de résolutions redondantes et l’a invitée à s’accorder sur un document unique. 

La session annuelle pourrait être raccourcie et se tenir sur quelques jours, comme le font d’ailleurs d’autres organes onusiens, a aussi suggéré la mission qui, toujours dans un souci d’efficacité, a appuyé l’idée d’un démarrage des négociations avant le début de la session.

La couverture du débat général a été compromise par une série de problèmes d’ordre technique.

La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, mardi 16 février, à partir de 10 heures.

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