À une semaine de la COP26, le Secrétaire général met en garde contre une action insuffisante pour enrayer la hausse des températures mondiales
« L’heure est grave. » « Le compte à rebours est enclenché. ». C’est par ces mots préoccupants que le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, et la Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), Mme Inger Andersen, ont, ce matin, dévoilé aux médias la dernière édition du rapport sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
À moins d’une semaine de la Conférence de Glasgow de 2021 sur les changements climatiques (COP26), nous sommes tous les deux venus « tirer la sonnette d’alarme », a insisté le Chef de l’Organisation en conférence de presse à New York. En effet, le rapport révèle que même avec les contributions déterminées au niveau national et d’autres engagements vigoureux pris au niveau international, « nous sommes effectivement en voie d’arriver à une augmentation catastrophique des températures mondiales d’environ 2,7 degrés Celsius », alors que « l’avenir de l’humanité » dépend du maintien de cette hausse à 1,5 degré Celsius d’ici à 2030.
« Le monde doit se réveiller face au danger imminent auquel nous faisons face en tant qu’espèce », a exhorté Mme Andersen, qui s’exprimait par visioconférence depuis Nairobi. « Pour avoir une chance de limiter le réchauffement climatique à hauteur de 1,5 degré Celsius, il nous reste huit ans pour réduire quasiment de moitié les émissions de gaz à effet de serre: huit ans pour planifier, adopter des politiques, les mettre en œuvre et, à terme, parvenir à infléchir cette courbe. »
Déplorant un leadership insuffisant, le Secrétaire général a constaté que les États parties à l’Accord de Paris ne parviennent « absolument pas » à maintenir cet objectif, qui est pourtant « à portée de main ». Le rapport montre que les pays « gâchent » une « incroyable opportunité » d’investir de manière durable, économique et écologique les ressources fiscales et de redressement mobilisées pour la période post-COVID-19. En effet, seulement 20% des investissements de la relève postpandémie vont être consacrés au soutien de l’économie verte.
Ce rapport s’inscrit dans la continuité de celui, publié récemment par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui montrait déjà qu’à moins de réduire d’ici à 2030 les émissions mondiales de carbone de 45% par rapport aux niveaux de 2010, l’objectif de 1,5 degré resterait hors d’atteinte.
« Les scientifiques sont clairs sur les faits. Désormais, les dirigeants doivent l’être tout autant dans leurs actions », a résumé M. Guterres, en leur demandant de venir à Glasgow avec des plans résolus, intégrés et assortis d’échéances pour parvenir à l’objectif de zéro émission net.
Il a lancé plusieurs appels en ce sens, le premier étant de décarboner tous les secteurs, de l’électricité aux transports, en passant par l’agriculture et la foresterie. Il a aussi appelé à éliminer progressivement le charbon —d’ici à 2030 dans les pays de l’OCDE et 2040 dans tous les autres— et à mettre fin aux subventions sur les combustibles fossiles et les industries polluantes. Instaurer un prix du carbone et le réaffecter à la création d’emplois verts, a été aussi demandé par le Secrétaire général.
Pour y parvenir, 100 milliards de dollars devront être mis sur la table chaque année pour aider le monde en développement à financer son action climatique, a rappelé le Secrétaire général, en soulignant la nécessité d’un équilibre entre mesures d’atténuation et mesures d’adaptation. À cet égard, il a réitéré son appel aux bailleurs de fonds et aux banques multilatérales de développement pour que 50% de leur soutien soit consacré à l’adaptation et à la résilience.
Ces 100 milliards ne seront pas pour autant suffisants, a-t-il reconnu. Il faut, a-t-il lancé, mobiliser davantage de ressources des banques multilatérales de développement et du secteur privé. Il est également crucial que ces engagements financiers soient basés sur des subventions, davantage que sur des prêts.
Répondant à une question, M. Guterres a reconnu qu’« à l’évidence », un tel montant ne se matérialiserait pas sans une participation significative des États-Unis. Tous les dirigeants du G20 sont importants, a-t-il aussi remarqué en soulignant que leurs pays représentent 80% des émissions. Alors qu’il se rend au G20 en fin de semaine, le Secrétaire général a promis d’appeler ces dirigeants à faire leur maximum.
Pour la Directrice exécutive du PNUE, s’il faut espérer que l’on assiste à la COP26 à un changement de paradigme dans les investissements, le véritable enjeu est de sortir des industries génératrices de C02. La pandémie de COVID-19, note le rapport, est un avertissement de la nature qui nous invite à agir pour contrer les changements climatiques, la perte de nature et la pollution. Elle offre également l’occasion d'une reprise qui placerait le monde sur la trajectoire des 2°C.
« L’ère des demi-mesures et des promesses creuses doit prendre fin », a ajouté en conclusion le Secrétaire général.