Conseil de sécurité: convergence sur la nécessité de débarrasser le monde de la « menace inhumaine » des mines terrestres et des engins explosifs improvisés
Dans le sillage de la Journée internationale pour la sensibilisation au problème des mines, le 4 avril, le Conseil de sécurité s’est penché aujourd’hui sur la « menace inhumaine » que continuent de faire peser sur les populations les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et autres engins explosifs improvisés (EEI). Le débat public de haut niveau organisé sur cette question a permis à l’ensemble des États Membres de réaffirmer leur engagement à lutter contre l’utilisation, le stockage, la production et le transfert de ces armes et pour leur destruction, y compris les États-Unis, lesquels ont assuré vouloir revenir sur la politique de leur précédente administration.
Cet engagement est reflété dans la Déclaration de la présidence vietnamienne, approuvée par les 15 États membres, par laquelle le Conseil rappelle sa résolution 2365 (2017) sur la lutte antimines et souligne l’importance de cette action, ainsi que la nécessité de renforcer les efforts internationaux dans ce domaine, en particulier dans les situations de conflit armé.
Se disant « profondément préoccupé » par le fait que ces armes continuent de faire de nombreuses victimes parmi les civils et le personnel participant aux programmes et opérations de maintien de l’ordre, de secours humanitaire, de maintien de la paix, de relèvement et de déminage, le Conseil invite les États Membres à se conformer à leurs obligations conventionnelles. Il exhorte par ailleurs les parties aux conflits de « mettre immédiatement et définitivement fin à toute utilisation sans discrimination de dispositifs explosifs en violation du droit international humanitaire ».
En écho à cet appel, le Secrétaire général de l’ONU a mis l’accent sur la sécurité des personnes qui servent les missions de paix, appelant à ce que les opérations aient la capacité d’agir dans des environnements exposés à des menaces d’explosifs puissants. Pour M. António Guterres, les soldats de la paix doivent avoir les connaissances et l’équipement adéquats pour s’acquitter de leur mandat en toute sécurité. C’est particulièrement vrai pour les troupes de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et les Casques bleus de l’ONU au Mali, confrontés à la menace constante d’engins piégés, a-t-il relevé.
Autre domaine d’attention signalé par le Secrétaire général: le rôle de l’action antimines dans la promotion de solutions durables aux conflits. À ses yeux, cette lutte est « une première étape essentielle vers la paix et la stabilité ». Elle permet en outre le retour sûr et volontaire des réfugiés et des déplacés et peut soutenir les processus politiques et de paix, comme cela a été le cas au Darfour et en Libye.
Convaincu que l’action contre les mines peut « jeter les bases du développement durable et de l’inclusion », M. Guterres a exhorté le Conseil à l’intégrer davantage dans les résolutions pertinentes, les rapports et les régimes de sanctions. Il a également appelé de ses vœux plus de coopération et de volonté politique, non sans inviter les pays qui n’ont pas encore adhéré à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel à rejoindre les 164 États parties.
Se félicitant à cet égard que l’Albanie, la Guinée-Bissau, la Jordanie, le Mozambique et l’Ouganda se conforment désormais aux obligations de la Convention d’Ottawa, l’actrice malaisienne et Ambassadrice de bonne volonté du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Michelle Yeoh, a fait observer que les mines restent bien longtemps après la fin des conflits. Au Viet Nam, a-t-elle souligné, en citant des chiffres gouvernementaux, la surface contaminée est de 6,13 millions d’hectares, soit près de 20% de la superficie totale du pays, et des dizaines de milliers de personnes ont été tuées ou mutilées depuis la fin de la guerre en 1975.
« Chaque année, des restes explosifs de guerre et des engins explosifs font près de 10 000 victimes dans des pays en conflit tels que l’Afghanistan, la Libye et le Yémen, mais aussi, de manière alarmante, dans des pays comme le Cambodge et mon propre pays, le Viet Nam, où les guerres ont cessé depuis des décennies », a renchéri le nouveau Chef de la diplomatie vietnamienne, qui présidait la séance.
Mme Yeoh a également souligné l’importance du rôle des femmes dans la lutte antimines, un avis partagé par Mme Nguyen Thi Dieu Linh, responsable de l’équipe de déminage du « Project Renew All-Women » de l’organisation « Norwegian People’s Aid Viet Nam ». « Nous avons montré que les femmes peuvent faire ce travail aussi bien que les hommes », s’est-elle enorgueillie en se prononçant pour une participation accrue de ces dernières au « programme plus large de la paix et de la sécurité ».
Compte tenu de la fragmentation des conflits et de la multiplicité des acteurs, la lutte antimines fait face à de « nouveaux défis », a pour sa part constaté M. Stefano Toscano, Directeur du Centre international de déminage humanitaire de Genève. Notant que les centres-villes et les quartiers résidentiels sont devenus des champs de bataille, « avec les conséquences que l’on sait pour les personnes et les infrastructures civiles », il a estimé que la pandémie de COVID-19, « défi supplémentaire », est l’occasion de renforcer l’appropriation et les réponses locales au problème des mines.
Face à ces défis complexes, la plupart des délégations ont exprimé leur rejet de ces armes « inhumaines » et leur soutien à la lutte antimines. La Fédération de Russie et Saint-Vincent-et-les Grenadines ont ainsi salué le rôle de premier plan joué par le Service de la lutte antimines de l’ONU dans la fourniture d’une assistance technique et financière aux pays touchés ainsi que l’appui offert aux missions de maintien de la paix pour détecter, atténuer et contrer ces menaces.
Affirmant avoir investi plus de 65 millions de dollars dans le Service de la lutte antimines de l’ONU, le Royaume-Uni a quant à lui plaidé pour le gel des réseaux servant à la fabrication des EEI, rejoint par la France, qui a souhaité une coordination des mesures visant à prévenir et lutter contre l’acquisition illicite de composants, d’explosifs et de matériaux pouvant servir à l’élaboration de ces engins.
Tandis qu’un grand nombre de pays, notamment la Chine, l’Inde, l’Estonie, le Mexique et le Niger, appelaient à l’universalisation de la Convention d’Ottawa, les États-Unis ont souligné leur appui financier aux programmes de déminage et de destruction des EEI à travers le monde. Selon eux, « le problème des mines terrestres peut être résolu ». Le Président Joe Biden est pour sa part « déterminé » à en limiter l’utilisation et prévoit d’ « abolir » la politique de l’administration précédente.
Déclaration du Président du Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité réaffirme que la Charte des Nations Unies lui a assigné la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Le Conseil rappelle sa résolution 2365 (2017) sur la lutte antimines, ainsi que ses résolutions dans lesquelles sont prescrites les activités des Nations Unies liées à la lutte antimines dans les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales, selon qu’il convient, dans le respect de leurs mandats, et invite les États Membres et les autres parties prenantes à redoubler d’efforts pour appliquer la résolution 2365, ainsi que les autres résolutions sur la lutte antimines.
Le Conseil souligne à cet égard l’importance de la lutte contre les mines et la nécessité d’intensifier les efforts internationaux dans ce domaine, particulièrement dans les situations de conflit armé.
Le Conseil reste profondément préoccupé par le fait que les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés continuent de faire de nombreuses victimes parmi les civils et parmi le personnel participant aux programmes et opérations de maintien de l’ordre, de secours humanitaire, de maintien de la paix, de relèvement et de déminage. Il reste gravement préoccupé par les menaces que font peser sur les civils les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés dans les pays touchés, ce qui a des conséquences socioéconomiques graves et durables pour les populations de ces pays. Il reste gravement préoccupé par le fait que l’insécurité exacerbée par les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés menace la paix, la sécurité et la stabilité des États Membres et entrave la liberté de circulation des opérations de maintien de la paix ainsi que l’accès humanitaire, y compris la fourniture de l’aide humanitaire, et fait obstacle au développement économique durable. Il se déclare également préoccupé par les effets délétères et multiformes de la COVID-19 sur les activités de lutte contre les mines.
Le Conseil invite également les États Membres à se conformer aux obligations qui leur incombent en vertu des traités internationaux relatifs à la lutte contre les mines, ainsi qu’à celles que leur fait le droit international humanitaire. Dans ce contexte, il demande de nouveau à toutes les parties à des conflits armés de mettre immédiatement et définitivement fin à toute utilisation sans discrimination de dispositifs explosifs en violation du droit international humanitaire.
Le Conseil réaffirme son plein attachement aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et en droit international.
Le Conseil souhaite que la question de la lutte antimines continue d’être inscrite, lorsqu’il y a lieu, dans les accords de cessez-le-feu et dans les accords de paix, souligne qu’il importe d’étudier les questions relatives à la lutte antimines dès le début de la planification et de la programmation des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, notamment qu’il est nécessaire d’établir une composante de lutte antimines, le cas échéant, et de prévoir des interventions humanitaires d’urgence qui tiennent compte des besoins particuliers des femmes et des enfants.
Le Conseil souligne l’importance qu’il accorde à la sûreté et à la sécurité des soldats de la paix sur le terrain et la nécessité pour les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police de veiller, le cas échéant, à ce que tous soient équipés, informés et formés pour atténuer la menace que représentent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés. Il souligne également la nécessité de renforcer les mesures visant à combattre l’acquisition illicite de composants, d’explosifs et de matériaux pouvant servir à fabriquer des engins explosifs improvisés. Il estime nécessaire que l’Organisation des Nations Unies et les États Membres collaborent pour faire en sorte, lorsqu’il y a lieu, que les missions disposent de ressources suffisantes.
Le Conseil réaffirme que c’est aux États Membres qu’il incombe au premier chef de lutter contre les mines, tout en continuant de se féliciter du rôle de soutien que jouent le système des Nations Unies, notamment par l’intermédiaire du Service de la lutte antimines qui coordonne l’action des entités des Nations Unies, et d’autres organisations compétentes dans les activités de lutte contre les mines, particulièrement pour ce qui est de réduire les dangers et d’atténuer les risques que représentent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux pour les civils, et il prend note avec satisfaction de ce que font les États Membres pour la réadaptation des victimes de mines terrestres et d’engins explosifs improvisés. Il encourage les États Membres, en particulier ceux qui ont la capacité de le faire, ainsi que le système des Nations Unies et les autres organisations et institutions compétentes participant à la lutte contre les mines, à renforcer, quand la demande leur en est faite et selon qu’il convient, le soutien apporté aux États Membres touchés par les mines, notamment en échangeant les meilleures pratiques et en fournissant une assistance technologique et financière aux pays touchés. Il souhaite que se poursuivent le partenariat et la coopération entre le système des Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales, afin que la menace que représentent pour les civils les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés puisse être atténuée. Il réaffirme que le partenariat et la coopération entre les autorités nationales, le système des Nations Unies et les autres acteurs internationaux concernés, y compris la société civile, sont importants pour le succès de la lutte contre les mines. Il est conscient des efforts que fait le Service de la lutte antimines de l’Organisation des Nations Unies et encourage les États Membres à continuer de le soutenir.
Le Conseil réaffirme, à l’occasion de la Journée internationale pour la sensibilisation au problème des mines et l’assistance à la lutte antimines, qu’il est attaché à la lutte contre les mines afin de contribuer à la protection des civils et de soutenir les efforts de stabilisation et de consolidation de la paix durant les conflits armés et dans les situations d’après-conflit.
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé, dès l’entame de son intervention, que les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés (EEI) « mutilent et tuent sans discrimination ». En ôtant la vie aux femmes qui marchent pour se rendre au travail, des familles qui fuient les conflits ou des enfants qui vont à l’école, « ils écrasent des vies et mettent fin aux moyens de subsistance ». Leur simple présence peut freiner le développement et briser la stabilité, a-t-il ajouté, avant de se féliciter que, depuis l’adoption de la résolution 2365 (2017) du Conseil de sécurité, les États Membres, les Nations Unies et les partenaires régionaux et de la société civile aient « libéré » d’importantes étendues de terre. En effet, a précisé le Chef de l’ONU, de 2018 à 2020, le financement de l’Organisation a permis de sécuriser plus de 560 kilomètres carrés de terre, de l’Afghanistan à l’Iraq, du Cambodge à la Colombie.
Ces terres, qui représentent « 10 fois la superficie de Manhattan », sont nécessaires pour les infrastructures, l'agriculture, les marchés, les écoles et les routes, a souligné M. Guterres. En soutien à cette action, l’ONU a participé à la sensibilisation aux risques de plus de 3,5 millions de personnes, permettant aux communautés de s’acquitter de leurs tâches quotidiennes de manière plus sûre. Aujourd’hui, a relevé le Secrétaire général, le Service de l’action antimines des Nations Unies soutient 13 opérations de paix, et la formation à l’atténuation des menaces posées par les EEI a contribué à la sécurité des soldats de la paix, en particulier au Mali. En 2014, a-t-il précisé, la MINUSMA a détecté 11% des EEI avant qu’ils n’explosent et ce taux est passé à 50% en 2020; les décès dus aux attaques d’EEI diminuant en conséquence. De plus, les trois quarts des pays et territoires dans lesquels l’ONU mène des actions contre les mines ont désormais élaboré leurs propres normes nationales pour garantir la qualité et assurer la sécurité des démineurs.
Malgré ces progrès, les défis se sont intensifiés, a alerté M. Guterres. Les conflits sont de plus en plus urbanisés, les groupes armés prolifèrent et l’utilisation d’EEI est en augmentation, autant de facteurs qui compliquent les efforts pour atténuer et répondre à la menace, laquelle a été exacerbée par les obstacles à l’accès et à la mobilité dus au COVID-19. Pour le Secrétaire général, trois « domaines d’attention » sont aujourd’hui indispensables, à commencer par la sécurité des personnes qui servent et sont protégées par les missions de l’ONU. Il a donc appelé les États Membres à veiller à ce que toutes les opérations de paix aient la capacité d’opérer dans des environnements exposés à des menaces d’explosifs puissants, et en particulier aux EEI. Selon lui, les soldats de la paix doivent avoir les connaissances et l’équipement dont ils ont besoin pour s’acquitter de leur mandat en toute sécurité. À cet égard, a-t-il noté, l’utilisation d’engins piégés continue de représenter la plus grande menace pour les troupes de l’AMISOM en Somalie et pour les soldats de la paix de l’ONU au Mali.
De même, de nouvelles menaces explosives émergent en République centrafricaine et en République démocratique du Congo (RDC), tandis que les mines terrestres et les restes explosifs de guerre entravent la mobilité des soldats de la paix au Soudan du Sud et à Abyei. Remerciant le Kenya pour avoir organisé la dernière réunion en formule Arria sur la menace posée aux soldats de la paix par les engins piégés, il a exhorté les États Membres à renforcer leur engagement à former et à équiper les pays fournisseurs de contingents et d’effectifs de police. Il a également appelé ces pays à investir dans la formation et à conserver l’expertise nécessaire dans leurs services de sécurité.
Le deuxième domaine d’attention signalé par le Secrétaire général est le rôle de l’action antimines dans la promotion et l’appui de solutions durables aux conflits. À ses yeux, la lutte antimines est « une première étape essentielle vers la paix et la stabilité », les démineurs étant souvent les premiers à pénétrer dans les villes et les villages après les cessez-le-feu. L’action antimines permet en outre le retour sûr et volontaire des réfugiés et des déplacés et peut soutenir les processus politiques et de paix, comme cela a été le cas au Darfour et en Libye. En Colombie, a-t-il indiqué, la lutte antimines a facilité la réintégration des anciens combattants, ouvrant la voie vers la vie civile.
Appelant à « maximiser les opportunités que nous offre l’action antimines », M. Guterres a cité en exemple les femmes démineuses et éducatrices aux risques qui, de l’Afghanistan à l’Iraq, de la Colombie au Soudan du Sud, ont brisé les stéréotypes pour assurer la sécurité de leurs communautés, contribuant ainsi au programme femmes, paix et sécurité. Qu’il s'agisse de déblayer les routes de desserte agricole, de trouver d’autres emplois pour les jeunes ou d’ouvrir l’accès des victimes et des personnes handicapées aux services sociaux, l’action contre les mines peut jeter les bases du développement durable et de l’inclusion, a-t-il ajouté, avant d’exhorter le Conseil à redoubler d’efforts pour intégrer davantage l’action antimines dans les résolutions pertinentes, les rapports et les régimes de sanctions.
En troisième lieu, a poursuivi le Secrétaire général, nous avons besoin d’une volonté politique et d’une coopération accrues pour prévenir et répondre à la menace des engins explosifs. Après avoir rappelé que plus de 160 États sont parties à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, il a invité ceux qui n’y ont pas encore adhéré à le faire sans tarder. L'action antimines, a-t-il insisté, veut dire travailler sur la prévention « mettre fin à la menace à partir de sa source », notamment en défrichant les terres contaminées pour sauver des vies et permettre le rétablissement, et en s’occupant des droits et des besoins des survivants mutilés par ces « horribles instruments de guerre ». Il s’agit donc d’une « responsabilité nationale », a-t-il souligné, saluant les efforts déployés par de nombreux États Membres pour intégrer cette lutte dans leurs plans et budgets de développement.
Toutefois, a-t-il dit, la volonté politique au niveau national doit être complétée par des partenariats et une coopération aux niveaux local, régional et international. Applaudissant, à cet égard, le partenariat entre l’ONU et l’Union africaine pour réduire la menace des EEI, il a jugé que les efforts pour éradiquer les mines terrestres, les engins piégés et les restes explosifs de guerre « reflètent ce que l’humanité a de mieux ». « Engageons-nous aujourd’hui à intensifier nos efforts pour débarrasser le monde de ces menaces inhumaines », a pressé le Secrétaire général.
Mme MICHELLE YEOH, actrice malaisienne et Ambassadrice de bonne volonté du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a souligné que la lutte antimines n’appartient pas au passé. C’est un danger actuel et bien réel. Il y a moins d’un mois, l’explosion d’un dépôt de munitions en Guinée équatoriale a tué près de 100 personnes et blessé plus de 600 autres. En 2020, les engins explosifs ont fait près de 19 000 morts et blessés, dont 59% de civils. Les mines et autres engins explosifs entravent le retour de millions de déplacés au Yémen et en Syrie et la pandémie de COVID-19 a compromis encore davantage les opérations de déminage. Les mines sont particulièrement redoutables parce qu’elles ne font pas de distinction entre soldats, paysans, civils ou enfants. Elles ne répandent pas seulement la mort et les mutilations. Elles sont un frein à la croissance économique.
Mme Yeoh a rappelé que le PNUD et ses partenaires ont entamé leur action antimines en 1993 au Cambodge. Aujourd’hui l’Albanie, la Guinée-Bissau, la Jordanie, le Mozambique et l’Ouganda se sont déclarés exempts de mines, se conformant ainsi aux obligations de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel. « Mais nous avons encore un long chemin à parcourir », a prévenu l’Ambassadrice.
Les mines restent bien longtemps après la fin des guerres et le Viet Nam est l’un de ces pays où les engins posent un risque quotidien pour les villageois. Selon le Gouvernement vietnamien, la surface contaminée est de 6,13 millions d’hectares, soit près de 20% de la superficie totale du pays et des dizaines de milliers de personnes ont été tuées ou mutilées depuis la fin de la guerre. Mme Yeoh a reconnu que le Viet Nam est à pied d’œuvre pour surmonter ce défi et qu’il est en train de moderniser ses procédures pour les rapprocher des meilleures pratiques internationales.
Elle a souligné l’importance du rôle des femmes dans la lutte antimines, en particulier au Viet Nam. « Lorsque j’ai commencé ma carrière d’actrice, on ne voyait pas les femmes dans des films d’actions », a-t-elle déclaré. Or, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Tous les pays doivent voir les bénéfices d’une implication des femmes dans tous les aspects de la lutte antimines.
Mme Yeoh a insisté sur la nécessité de sensibiliser le grand public autour de l’importance de la lutte antimines pour la réalisation des objectifs de développement durable. Il faut parler davantage du déminage et de son impact. Nous avons besoin de plus de ressources financières et de nouveaux partenariats, a conclu l’Ambassadrice, en prévenant que le financement de la lutte antimines est à la baisse.
La lutte antimines est plus que jamais nécessaire car chaque jour, de nouvelles mines sont posées dans différentes régions du monde et les souffrances des victimes sont similaires d’un pays à l’autre, a prévenu, à son tour, le Directeur du Centre international de déminage humanitaire de Genève, M. STEFANO TOSCANO. Ce qui a changé, a-t-il dit, c’est le type de mines utilisées, leur emplacement et ceux qui les posent. Les réponses évoluent donc en conséquence.
La lutte antimines fait face à de nouveaux défis: les conflits fragmentés et prolongés et la multiplicité des acteurs, des agendas et des risques. Les centres-villes et les quartiers résidentiels sont devenus les champs de bataille, avec les conséquences que l’on sait pour les personnes et les infrastructures civiles.
M. Toscano a souligné que la lutte antimines est une réponse humanitaire « nécessaire », une condition préalable à la reconstruction et au développement et un vecteur de paix. Les acteurs du secteur ont fait d’importants efforts pour lier leurs activités à des programmes plus larges, mais aujourd’hui la pandémie de COVID-19 représente un défi supplémentaire. Cette pandémie est aussi, a estimé le Directeur, une occasion de renforcer l’appropriation et les réponses locales. La lutte antimines doit en effet être « aussi locale que possible et aussi internationale que nécessaire ».
Le Directeur a estimé que l’élaboration des dernières normes sur la lutte contre les engins explosifs improvisés (EEI) et leur présence dans les milieux urbains témoignent de la capacité du secteur à s’adapter à un contexte en évolution et à relever de nouveaux défis. Les innovations technologiques, comme la robotique, les véhicules télécommandés ou les outils de gestion de l’information, offrent une réelle occasion d’améliorer la sécurité et de renforcer l’efficacité des opérations.
La lutte antimines étant intrinsèquement géographique, M. Toscano a expliqué que le système de gestion de l’information mis au point par son centre permet de recueillir et de visualiser les informations sur la contamination et de les lier aux données sur la reconstruction et le développement. La lutte antimines est en effet un catalyseur pour la réalisation des objectifs de développement durable, en particulier ceux liés à la réduction de la pauvreté, à la sécurité alimentaire, à l’éducation, à la santé et à l’égalité des sexes. Il est donc essentiel que les autorités nationales intègrent cette lutte dans les efforts plus larges de l’humanitaire, du développement et de la consolidation de la paix.
La lutte antimines contribue aussi directement à la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, car elle encourage une approche inclusive mettant l’accent sur l’autonomisation des femmes et l’impact transformateur de l’égalité des sexes.
La lutte antimines, a encore souligné M. Toscano, a contribué de manière significative aux efforts de paix notamment en Colombie où le Gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) ont convenu en mars 2015 de mener un projet pilote de déminage humanitaire afin de renforcer la confiance dans le processus de paix. Cette lutte antimines peut également contribuer à la démobilisation des anciens combattants, en offrant comme en Afghanistan, un emploi digne à des centaines d’anciens Taliban.
Après les deux traités sur l’interdiction des mines antipersonnel et des armes à sous-munitions, M. Toscano a constaté que les mines sont surtout utilisées aujourd’hui par les groupes armés non étatiques. C’est un défi « majeur » qui nécessite des réponses novatrices. Mais avec la coopération internationale, des efforts accrus aux niveaux local, régional et mondial et un financement adéquat et prévisible, la lutte antimines peut être gagnée au cours de cette décennie, a assuré le Directeur.
Mme NGUYEN THI DIEU LINH, gestionnaire de programme provincial et responsable de l’équipe de déminage du « Project Renew all-women » de l’organisation « Norwegian People’s Aid Viet Nam », a dit être née et élevée dans la province de Quang Tri où l’ancienne zone démilitarisée a été amenée à diviser le nord et le sud du Viet Nam, entre 1954 et 1975. En raison de son emplacement, cette zone a été soumise à certains des bombardements les plus violents de l’histoire du monde et si la guerre a pris fin il y a près de 46 ans, des engins explosifs sont toujours plantés dans les rizières, les cours d’école et les quartiers. Je me souviens, a-t-elle raconté, des objets « étranges » que mes amis et moi retrouvions quand nous jouions, l’après-midi. C’était en fait des grenades. Nous avions eu de la chance de n’être ni blessé ni tué à l’époque, mais combien ont eu cette chance?
Depuis la fin de la guerre en 1975, près de 3 500 personnes ont été tuées et plus de 5 000 blessées par des restes explosifs de guerre dans la seule province de Quang Tri. Au cours de ces trois dernières années, s’est-elle réjouie, aucun accident n’a été signalé grâce aux recherches, au déminage et à la sensibilisation aux risques. Se prévalant de ses 12 ans de travail dans l’action antimines, à la tête aujourd’hui d’environ 300 salariés, l’oratrice a fait des recommandations et d’abord la nécessité de renforcer les capacités et l’appropriation nationales pour garantir le succès à long terme et la durabilité des résultats, comme l’a fait le Viet Nam.
Deuxièmement, toutes les parties prenantes nationales et internationales doivent coordonner étroitement leurs efforts à tous les niveaux, y compris aux niveaux des opérations, de la gestion et des politiques. La gestionnaire de programme a donné pour exemple la situation à Quang Tri où le personnel militaire assure la liaison avec chaque village pour assurer la bonne mise en œuvre des opérations de recherche et de déminage de son organisation, aux côtés des ONG. Selon la responsable de la « Norwegian People Aid », le modèle de partenariat de Quang Tri est un exemple « remarquable » de ce qui peut être réalisé lorsque l’action antimines est bien coordonnée, que la communication est régulière entre toutes les parties prenantes, que les données sont partagées ouvertement et que tout le monde travaille vers un objectif commun.
Troisièmement, Mme Nguyen a estimé que la communauté internationale peut bénéficier de l’expérience et de l’expertise des pays, comme le sien, qui ont eu à gérer longtemps la question des engins explosifs. Il faut profiter des fora internationaux pour partager les enseignements tirés de l’expérience. De même, la participation des femmes à tous les aspects de la lutte antimines doit être encouragée et accrue. Lorsque j’ai travaillé pour la première fois dans cette lutte en 2009, les femmes, a souligné l’oratrice, étaient minoritaires, en particulier dans le déminage, « un travail réservé aux hommes ». Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, a-t-elle constaté, évoquant ces Vietnamiennes qui occupent de nombreux postes de direction dans toutes les organisations de la lutte antimines.
Nous avons montré, s’est-elle enorgueillie, que les femmes peuvent faire ce travail aussi bien que les hommes, et qu’elles ont un rôle « important et nécessaire » à jouer dans la lutte antimines et dans le programme plus large de la paix et de la sécurité. Elle a tout de même rappelé que de nombreuses provinces du Viet Nam n’ont pas encore récolté les bénéfices de cette lutte. Elle a donc espéré que la question restera à l’ordre du jour de la communauté internationale et que les recommandations qu’elle a formulées seront dûment prises en compte, pour que tous les peuples des pays concernés puissent vivre dans la sécurité et travailler à un développement qui ne soit pas obstrué par les engins explosifs.
« Chaque année, des restes explosifs de guerre et des engins explosifs font près de 10 000 victimes dans des pays en conflit tels que l’Afghanistan, la Libye et le Yémen, mais aussi, de manière alarmante, dans des pays comme le Cambodge et mon propre pays, le Viet Nam, où les guerres ont cessé depuis des décennies », a déclaré M. BUI THANH SON, Ministre des affaires étrangères du Viet Nam. Il a rappelé que la paix ne peut être pérenne si l’on n’élimine pas ce legs de la guerre. Il a salué les efforts internationaux en la matière, ainsi que la résolution 2365 (2017) du Conseil qui souligne l’importance pour les missions de maintien de la paix d’être équipées et formées pour répondre aux défis posés par les restes explosifs de guerre. « Cependant, beaucoup reste encore à faire. »
Le Ministre a indiqué que la volonté politique est, « comme toujours », la question la plus importante, regrettant que la lutte antimines ne recueille pas l’attention qu’elle mérite. Les zones contaminées sont immenses et le nombre de victimes qui ont besoin d’une assistance, considérable. Les ressources allouées sont sans comparaison avec la complexité et l’ampleur du problème, a souligné le Ministre. Près d’un cinquième de la superficie totale du Viet Nam est toujours contaminé par des engins explosifs. Le déminage, s’il se poursuit au rythme actuel et avec les ressources qui lui sont allouées, prendra encore 100 ans, entravant gravement le développement durable du pays, a-t-il poursuivi. Le Ministre a souhaité que le déminage s’accompagne d’une assistance aux victimes, de campagnes de sensibilisation et de la création de moyens de subsistance durables afin de donner tout son sens à la paix. La lutte antimines consiste, après tout, en la protection de nos peuples et communautés, en particulier les plus vulnérables, a-t-il rappelé.
Le Ministre a détaillé l’approche holistique suivie par son pays en la matière, le génie militaire étant le chef de file des efforts, avec un appui des partenaires internationaux. Les femmes jouent un rôle crucial, a-t-il ajouté. Il a aussi rappelé l’importance de la coopération entre anciens ennemis, tels que les États-Unis et son propre pays, pour lutter contre les mines et panser les plaies de la guerre.
Sur le plan international, le Ministre a plaidé pour une approche cohérente et à long terme, avec des partenariats renforcés et davantage de ressources pour tous les acteurs. Il a demandé un financement pérenne et adéquat, une assistance technologique renforcée et un meilleur échange de bonnes pratiques.
Le Ministre a invité le Conseil à prendre en compte la lutte antimines dans l’examen de situations spécifiques, ainsi que dans l’élaboration des mandats des opérations de maintien de la paix et l’adoption des mesures de consolidation de la paix. Il a demandé une amélioration des équipements et de la formation des Casques bleus pour atténuer les menaces posées par les mines, restes explosifs de guerre et engins explosifs. D’abord et avant tout, il faut prévenir les conflits et remédier à leurs causes profondes, a conclu le Ministre.
M. SIMON COVENEY, Ministre des affaires étrangères et de la défense de l’Irlande, a appelé la communauté internationale à honorer ses engagements, rappelant notamment l’adoption, en 2019, du Plan d’action d’Oslo qui réitère l’objectif ambitieux d’un monde exempt de mines d’ici à 2025. Nous ne pouvons pas réduire notre détermination collective à voir cette vision réalisée, a exhorté le Ministre. Il a invité à examiner l’utilisation continue de mines autres que les mines antipersonnel dans de nombreux conflits armés et à répondre à leurs graves impacts humanitaires et sur le développement. Concernant la question des armes explosives dans les zones peuplées, l’Irlande mène des consultations pour élaborer une déclaration politique visant à apporter un changement de comportement et à améliorer la protection des civils, a informé M. Coveney.
Soulignant que la « lutte antimines humanitaire » est indispensable pour le développement durable, le Ministre a déploré la réduction du financement mondial de la lutte antimines au cours des dernières années. Ce faisant, nous risquons de laisser le travail inachevé, a prévenu M. Coveney qui a dit que son gouvernement finance des programmes antimines sur quatre continents et dans 17 pays. Le pays est aussi un partenaire de longue date du Project RENEW au Viet Nam, dont le travail aide à sauver des vies et des moyens de subsistance. Le Ministre a en outre appelé à ne pas minimiser l’impact sexospécifique des mines antipersonnel. Il faut veiller à ce que les femmes participent à la lutte antimines. Les enfants ayant survécu aux mines terrestres méritent de recevoir un traitement adéquat et de pouvoir retourner à une enfance normale, y compris leur éducation, a insisté M. Coveney. Les besoins de toutes les personnes vivant dans les collectivités touchées doivent être pris en compte dans la lutte antimines. Il a terminé en soulignant la contribution des Casques bleus aux efforts de déminage qui permettent aux populations de retourner à la terre et de reconstruire en toute sécurité leur vie et leurs moyens de subsistance.
M. OTHMAN JERANDI, Ministre des affaires étrangères, des migrations et des Tunisiens de l’extérieur, a noté que ce débat coïncide avec la Journée internationale pour la sensibilisation au problème des mines terrestres. Mon pays, a-t-il dit, participe activement aux efforts internationaux et régionaux destinés à débarrasser le monde des mines antipersonnel, des restes explosifs de guerre et des engins explosifs improvisés (EEI). À cet égard, le Ministre a salué les efforts de tous les personnels qui contribuent aux actions de déminage et au retrait des engins explosifs. À ses yeux, cela va dans le sens direct de la résolution 2365 (2017). Observant que les Nations Unies, au fil de leur histoire, ont réalisé de grands progrès en matière de déminage, aux côtés des États Membres, des ONG et de la société civile, il a estimé que ces avancées ont permis d’ériger la paix dans de nombreux États touchés par les conflits. Cela a également permis de mieux protéger les populations civiles, à commencer par les femmes et les enfants, premières victimes des munitions non explosées.
Toutefois, a ajouté M. Jerandi, si le renforcement des cadres législatifs et institutionnels contribue à lutter plus efficacement contre ce fléau, l’action internationale n’est pas encore à la hauteur du défi. La multiplicité des conflits, la propagation du terrorisme et l’utilisation de mines terrestres par les parties entravent l’efficacité des Nations Unies et font obstacle à l’action humanitaire et au retour des déplacés. Il est indispensable que tous respectent le droit international humanitaire et s’abstiennent d’utiliser des mines terrestres et des EEI, a-t-il plaidé, appelant à un règlement pacifique des conflits pour parvenir à une paix pérenne dans les zones touchées. Citant le Secrétaire général, selon lequel « une terre sûre équivaut à une maison sûre », le Ministre a souhaité qu’un soutien financier et psychosocial soit accordé aux victimes de ces engins. Avant de conclure, il a appelé à plus de coopération internationale pour renforcer la capacité et la résilience des États et des communautés afin de créer des conditions propices à la mise en œuvre de la Convention d’Ottawa.
Mme RAYCHELLE OMANO, Secrétaire pour les affaires étrangères du Kenya, a indiqué que l’emploi indiscriminé d’engins explosifs, y compris par des terroristes, est une menace majeure pour les populations civiles mais aussi pour les Casques bleus et les agents humanitaires. Il incombe à chaque État Membre d’élaborer et de mettre en œuvre sa propre stratégie de lutte antimines, en prenant en compte les dimensions régionales de la menace posée, a-t-elle déclaré, en soulignant l’importance d’un échange des bonnes pratiques. Mme Omano a estimé que la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales est cruciale dans la lutte antimines et plaidé pour son renforcement, en mettant l’accent sur la fourniture d’une aide technique aux pays qui en ont le besoin. La lutte antimines devrait être incluse dans tous les mandats de mission, a-t-elle poursuivi. Les opérations de maintien de la paix doivent être équipées et formées à la lutte antimines. Mme Omano a souhaité que les membres de la société civile et du secteur privé, les femmes et les jeunes participent aux efforts de déminage. Enfin, elle a indiqué que la formation antimines dispensée au centre de formation international d’appui à la paix au Kenya a bénéficié à 2 000 personnes venant de 22 pays.
Les États-Unis ont cité le rapport que l’Observatoire des mines et des armes à sous-munitions a publié en 2020 et qui dit que 5 554 personnes ont été tuées ou blessées dans le monde par des mines terrestres, des restes d’armes à sous-munitions et d’autres restes explosifs de guerre, en 2019. La plupart des victimes étaient des civils « totalement innocentes », dont beaucoup étaient des enfants. Ces souffrances et ces morts ne sont pas inévitables. Le problème des mines terrestres peut être résolu et le Président Biden est déterminé à limiter leur utilisation, en abolissant la politique de l’administration précédente.
Les États-Unis ont dit avoir développé avec le Viet Nam un partenariat qui comprend la lutte contre les munitions non explosées. Ce travail a porté ses fruits, notamment dans la province de Quang Tri où depuis trois ans et demi, personne n’est morte d’un accident impliquant des munitions non explosées. « Pas un seul et ce n’est pas une coïncidence », ont insisté les États-Unis. Le Viet Nam est l’un des plus de 100 pays qui ont reçu une aide américaine à la lutte antimines, depuis 1993, dont les objectifs sont la protection des civils et la création d’un environnement où les gens peuvent vivre en toute sécurité. À cette fin, ont-ils indiqué, une approche à trois volets est mise en œuvre: déminage, sensibilisation et rééducation.
Les États-Unis ont affirmé avoir versé plus de 4 milliards de dollars pour appuyer les programmes de déminage et de destruction des engins explosifs improvisés (EEI) à travers le monde. Du Viet Nam à la Somalie, de l’Iraq au Liban, ces programmes ont permis d’éviter d’innombrables souffrances. Nous soutenons, a conclu les États-Unis, des programmes de rééducation des blessés, en offrant des prothèses, des formations professionnelles ainsi qu’une aide directe aux victimes. Les femmes sont dûment impliquées pour respecter notre engagement en faveur du programme « femmes, paix et sécurité », ont souligné les États-Unis.
M. JENS FROLICH HOLTE, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a souligné à son tour que l’utilisation des mines terrestres et des bombes à sous-munitions est tout simplement inacceptable. Ces engins « frappent sans discernement et tuent des victime innocentes », a-t-il déploré, notant qu’au fil des ans, les enfants sont ceux qui paient le plus lourd tribut. Les mines terrestres, les restes de guerre non explosés et les engins explosifs improvisés (EEI) entravent aussi le retour des réfugiés, rendent les terres agricoles inutilisables et terrorisent des communautés entières, a-t-il ajouté, voyant en outre dans ces engins une « grave menace pour les opérations de paix ». À cet égard, a relevé le Ministre, la résolution 2365 (2017) a reconnu qu’ils méritaient une attention particulière du Conseil de sécurité. C’est la raison pour laquelle la Norvège, en tant que membre élu du Conseil, juge prioritaire de déminer et de désactiver les restes explosifs de guerre, tout en sensibilisant les populations aux risques, a ajouté M. Frolig Holte.
À ses yeux, la lutte antimines requiert quatre éléments principaux : le respect de l’interdiction des mines terrestres, l’engagement de tous en faveur de l’action contre ces engins, le soutien de la communauté internationale, y compris les Nations Unies et les organisations régionales, et des programmes tenant compte des spécificités hommes-femmes, mais aussi de l’âge, du handicap et de l’expérience des communautés touchées. Ces programmes, a-t-il insisté, doivent être intégrés dans les efforts généraux, notamment sur le plan humanitaire. Ils peuvent aussi être l’occasion d’accroître l’autonomisation des femmes, en les incluant dans l’action antimines.
Enfin, soulignant le rôle crucial joué par la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, traité dont 164 États sont désormais parties, il a demandé à tous ceux qui n’y ont pas encore adhérer de le faire de toute urgence. C’est d’autant plus important, a-t-il dit, que de nombreux pays restent touchés par des conflits et que l’on constate la pose de nouvelles mines terrestres, en particulier par des acteurs non étatiques. « Il faut contrer cette tendance délétère », a-t-il lancé en conclusion, appelant le Conseil à agir concrètement contre l’utilisation, le stockage, la production et le transfert des mines ainsi que pour l’établissement des responsabilités.
M. VIKAS SWARUP, Vice-Ministre et Secrétaire au Ministère des affaires extérieures de l’Inde, a prévenu que les terroristes usent des mines antipersonnel comme des moyens efficaces et peu onéreux de répandre la terreur. « Cette utilisation s’étant intensifiée, nous devons la condamner fermement et prendre des mesures efficaces pour contrecarrer cette tendance. » M. Swarup a redit l’attachement de son pays à la Convention sur certaines armes classiques, en précisant que l’Inde a signé ses cinq Protocoles. Il a souligné l’importance d’une universalisation et d’une pleine application du Protocole II amendé, dont il a loué le bon équilibre entre aspects humanitaires et aspects liés à la défense nationale, notamment pour les États qui ont de longues frontières. « Nous avons mis en place un moratoire sur l’exportation et le transfert de mines et nous nous sommes engagés en faveur d’une réduction de la dépendance aux mines antipersonnel » , a affirmé le Ministre.
Il a rappelé le lancement en 2018 de l’initiative « L’Inde pour l’humanité » dans le cadre des célébrations du cent-cinquantième anniversaire du Mahatma Gandhi et la mise en place, en Inde et dans 12 autres pays, de centres pour la pose de membres artificiels. Plus de 6 500 membres artificiels ont ainsi été posés, principalement en Asie et en Afrique, afin d’aider les personnes affectées à recouvrer leur mobilité et leur dignité. L’Inde, qui est une contributrice majeure aux opérations de paix de l’ONU, a renforcé son appui au déminage, a indiqué M. Swarup, en mentionnant les partenariats de son pays avec l’Australie, le Cambodge, l’Indonésie ou encore l’Ouzbékistan. L’Inde a déployé sept équipes de déminage dans le nord du Sri Lanka en 2010, facilitant ainsi le retour des déplacés, a précisé M. Swarup, avant de redire l’attachement de son pays au partage des bonnes pratiques.
M. ERKI KODAR, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Estonie, s’est dit convaincu que la Convention d’Ottawa a donné des résultats « clairs » en matière de déminage, de destruction des stocks et d’aide aux victimes. Depuis l’adoption de la Convention, plus de 30 pays autrefois contaminés ont été déclarés exempts de mines, plus de 50 millions de stocks de mines ont été détruits et le commerce officiel des mines antipersonnel a cessé d’exister. Afin d’appuyer le Plan d’action d’Oslo pour la mise en œuvre de la Convention d’Ottawa, l’Union européenne, a rappelé le Vice-Ministre, a adoptée en février dernier, un plan d’action pour parvenir à un monde exempt de mines d’ici à 2025. M. Kodar a appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à la Convention d’Ottawa.
Le Vice-Ministre a estimé que la lutte antimines ne devrait pas se limiter à arrêter ou neutraliser un dispositif une fois qu’il est déjà en place. Elle doit servir à identifier et à geler les réseaux qui fabriquent les engins explosifs improvisés (EEI). Des mesures nationales rigoureuses et une coopération internationale étroite sont essentielles pour barrer aux terroristes et aux groupes criminels l’accès aux armes et aux EEI. M. Kodar s’est dit ravi de constater que les perspectives sensibles au genre sont de plus en plus prises en compte lors de la planification, de la mise en œuvre et du suivi des activités de lutte antimines, y compris dans la restitution des terres après leur déminage ou dans l’accès des survivants aux soins de santé. Le nombre croissant de femmes qui travaillent actuellement dans les programmes de déminage humanitaire est « une bonne chose ».
Le Vice-Ministre a souligné l’importance de la sensibilisation sur la lutte antimines et sur son impact environnemental. En Estonie, a-t-il affirmé, cette lutte est une priorité de la Stratégie de coopération au développement et d’aide humanitaire. Le Gouvernement a progressivement augmenté les fonds de la Stratégie et son soutien financier au Service de l’action antimines de l’ONU ainsi qu’au déblayage des restes explosifs de guerre, dans le cadre de projets humanitaires bilatéraux et internationaux au Mali, à Gaza, en Libye, au Liban, en Iraq, en Syrie, en Ukraine et en Afghanistan. En 2020, l’Estonie a continué de verser des contributions au Service de l’ONU pour soutenir les programmes en Iraq et en Syrie.
La Ministre d’État chargée des affaires étrangères et du commerce extérieur de Saint-Vincent-et-les Grenadines, Mme KEISAL M. PETERS, a affirmé que la lutte antimines permet de promouvoir une coopération civilo-militaire efficace sur de nombreux théâtres d’opérations. Comme cela a été le cas en Colombie, la lutte antimines peut apporter un appui essentiel aux processus de paix en éliminant la menace que font peser les munitions explosives sur la vie des individus et des communautés, et en ouvrant la voie à la consolidation de la paix et à la réconciliation post-conflit.
Mme Peters a ensuite félicité le Service de la lutte antimines de l’ONU pour son rôle de premier plan dans la fourniture d’une assistance technique et financière aux pays touchés ainsi que l’appui offert à diverses missions de maintien de la paix pour s’assurer qu’elles disposent des compétences et des ressources nécessaires pour détecter, atténuer et contrer ces menaces. Dans tous les cas, a-t-elle argué, ces capacités devraient être transférées aux pays hôtes pour renforcer l’appropriation nationale sur les questions de munitions explosives. Les pays du Sahel à la Corne de l’Afrique et à travers le Moyen-Orient bénéficieront énormément lorsque leurs institutions nationales seront en mesure d’assumer l’entière responsabilité de la lutte antimines, a-t-elle affirmé. De ce fait, les compétences de base dans des domaines tels que la gestion des stocks de munitions et l’élimination des munitions explosives devraient être intégrées dans les programmes de réforme du secteur de la sécurité. Dans le même temps, les technologies modernes qui facilitent le déminage des routes devraient être transférées aux États touchés.
Elle a également appelé les États touchés et les organisations régionales et sous-régionales à travailler ensemble, avec diligence, pour améliorer la transparence et la responsabilité des approvisionnements, afin de gérer la traçabilité des munitions explosives et de minimiser leur transfert illégal à travers les frontières poreuses. La Ministre a souligné l’importance du partage d’informations aux niveaux régional et international afin de démanteler les réseaux complexes de terrorisme et de criminalité transnationale organisée qui facilitent les flux transfrontières illicites de munitions explosives. À cet égard, elle a salué le rôle crucial d’INTERPOL, de l’ONUDC et du programme Global Shield de l’Organisation mondiale des douanes (OMD) dans l’atténuation de ces menaces.
La Chine a souligné l’importance de « revivifier » ce sujet de la lutte antimines, en rappelant l’acuité de la menace que ces engins posent. Une grande attention a été apportée aux armes classiques dans le cadre des efforts de désarmement, avec de bons résultats, a dit la Chine. Elle a déploré le fait que des milliers de personnes continuent d’être tuées ou blessées chaque année par des mines. La sécurité des civils doit être la priorité absolue de la lutte antimines, qui incombe au premier chef au pays concerné, a dit la délégation. Elle a demandé l’élimination des mines dès la fin des conflits et le resserrement de la coopération internationale dans ce domaine. Les pays qui ont laissé des mines dans d’autres pays doivent s’acquitter de leurs responsabilités et contribuer à leur élimination. La Chine a récemment formé plus de 1 000 techniciens spécialisés dans le déminage et conduit 24 projets de déminage. La Chine a également aidé le Cambodge et la République démocratique populaire lao en leur fournissant des équipes de déminage, a fait savoir la délégation. Elle a ensuite appelé l’ONU à jouer un rôle actif et à mieux former et équiper les missions de paix pour leur permettre d’aider les pays hôtes dans leurs efforts de déminage. Pointant les risques humanitaires de l’emploi de mines par des acteurs non étatiques, la Chine a souhaité, pour y remédier, des solutions simples et viables dans le cadre de la Convention d’Ottawa. Elle a aussi souligné l’importance pour la lutte antimines d’une approche équilibrée entre considérations humanitaires et préoccupations sécuritaires des pays. Enfin, la Chine s’est dite en faveur de l’interdiction des mines terrestres.
Le Royaume-Uni a dit avoir investi plus de 65 millions de dollars dans le Service de l’action antimines de l’ONU et plus de 165 millions de dollars dans le deuxième programme de lutte antimines. Pour ce qui est de l’avoir, il a proposé trois domaines d’action: la recherche de financements novateurs, le renforcement des efforts de déminage pour en maximiser les avantages pour les personnes touchées et le soutien aux objectifs de développement. Le Royaume-Uni a pressé les pays qui ne l’ont pas encore fait à adhérer sans délai à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel et à ses objectifs humanitaires.
À son tour, il a voulu que l’on gèle les réseaux qui fournissent les matières premières et le savoir-faire technique liés aux engins explosifs improvisés (EEI). En 2019, a-t-il rappelé, le Conseil de sécurité a pris des mesures pour limiter le transfert des composantes de ces engins en Somalie, après que les Chabab ont multiplié leurs attaques. Il s’agit là, s’est-il félicité, d’une approche cohérente et efficace, exploitant les différents outils à disposition. Le Royaume-Uni a aussi plaidé pour une meilleure formation des Casques bleus qui doivent être dotés des équipements adéquats. Il a d’ailleurs dit continuer de travailler sur la question avec les pays fournisseurs de contingents. Il est essentiel, a-t-il insisté, que ceux qui travaillent sur le terrain aient une image précise de la menace des EEI dans leur environnement opérationnel. Les soldats de la paix doivent être en mesure d’atténuer les risques, grâce à la collecte, l’analyse et la diffusion des informations et des contacts étroits avec les agents humanitaires et les civils.
La Fédération de Russie a tout d’abord salué les efforts de la présidence vietnamienne pour faire avancer un « sujet aussi fondamental que le déminage ». Ces efforts ont permis aux membres du Conseil de sécurité de se mettre d’accord sur la déclaration présidentielle de ce jour, ce qui, selon elle, représente un « grand succès pour la diplomatie vietnamienne » et une « contribution sérieuse au renforcement de la paix et de la sécurité internationales ».
Abordant ensuite le problème du déminage, la Fédération de Russie a souligné sa pertinence dans le contexte du règlement des crises régionales et de l’élimination de leurs conséquences, ainsi que de la lutte contre le terrorisme. De l’avis de la délégation, le Service de la lutte antimines de l’ONU joue un rôle important dans les efforts internationaux de déminage, notamment en aidant les États intéressés à améliorer qualitativement leurs capacités. Des experts russes participent aux travaux organisés par le Service de la lutte antimines de l’ONU pour préparer des normes internationales de lutte contre les engins explosifs improvisés (EEI), a-t-elle précisé. Selon elle, la Fédération de Russie s’emploie à « créer un monde sans mines » et met en œuvre « avec succès » ses approches de lutte contre la menace des mines dans le cadre de la Convention sur les armes « inhumaines » et de son Protocole II modifié sur les mines.
La Fédération de Russie est également impliquée dans le renforcement des capacités techniques et opérationnelles de ses partenaires. En effet, a souligné la délégation, « ce sont les États qui portent la responsabilité principale d’assurer la sécurité de leur population ». Présentant comme l’une de ses priorités le déminage en Syrie, elle a rappelé qu’en 2016-2017, des troupes du génie russe ont mené des opérations de déminage dans les villes d’Alep, de Deïr el-Zor et, à deux reprises, à Palmyre. Nous continuons d’aider activement les Syriens à éliminer les mines et les explosifs des zones libérées des terroristes et des extrémistes, a-t-elle ajouté, précisant que les spécialistes militaires russes ont d’ores et déjà sécurisé plus de 6 500 hectares de territoire syrien et désamorcé plus de 105 000 objets explosifs. Par ailleurs, grâce à la contribution russe, le Service de la lutte antimines de l’ONU met en œuvre un projet pilote sur le déminage humanitaire en Syrie, a fait remarquer la délégation, avant d’appeler à la participation d’autres donateurs internationaux.
Depuis octobre 2018, a-t-elle poursuivi, les troupes du génie russes effectuent des opérations de déminage en République démocratique populaire lao ainsi que dans le Haut-Karabakh à des fins humanitaires. Des échanges d’expérience se développent d’autre part avec le Viet Nam, l’Indonésie, l’Iran, les Émirats arabes Unis, le Pakistan et la Sri Lanka. À cet égard, la délégation a rappelé que, du 25 au 28 mai prochain, Moscou accueillera la quatrième Conférence internationale consacrée au déminage humanitaire et à la lutte contre les EEI. Elle a d’autre part indiqué que, depuis 2014, des spécialistes des Forces armées russes sont formés dans le domaine du déminage, de la détection et de la neutralisation des divers types de mines et d’EEI, notamment par le biais de systèmes mobiles robotisés. Ces efforts, a-t-elle conclu, sont « notre contribution pratique à la mise en œuvre de la résolution 2365 (2017) du Conseil de sécurité ».
Le Mexique a souligné, à son tour, que les mines ne sont pas un problème du passé, en rappelant que 55 États, soit un quart des membres de l’ONU, sont sous la menace de ces engins. Il a demandé un renforcement des efforts de déminage, les parties belligérantes devant notamment assumer leurs responsabilités. Il a souhaité que les missions onusiennes de paix soient mieux équipées et formées à la lutte antimines. Il a rappelé aux parties au conflit que l’utilisation des mines antipersonnel, qui frappent sans discrimination, est une violation du droit international humanitaire. Ces armes doivent être interdites, a martelé le Mexique, se réjouissant que 164 États aient adhéré à la Convention d’Ottawa et que les États qui ne l’ont pas fait aient pris l’engagement de renoncer à ces engins.
Des progrès de taille ont été accomplis, a déclaré le Mexique qui a pris pour exemple le fait que les exportations ont cessé et que 53 millions de mines antipersonnel ont été détruites. Il a demandé aux pays qui ne l’ont pas encore fait à mettre en place un moratoire sur la production, l’utilisation et le transfert de ces mines antipersonnel et à adhérer à la Convention d’Ottawa. Le Mexique a mentionné l’aide qu’il apporte à la Colombie, pays le plus touché par les mines antipersonnel dans la région. Malgré les progrès, beaucoup de chemin reste encore à faire, a-t-il reconnu.
La France a souligné qu’au quotidien, l’action des démineurs civils et militaires protège les populations les plus vulnérables. Elle participe à créer les conditions de sécurité permettant aux Casques bleus de se déployer dans de meilleures conditions et aux personnels humanitaires d’accéder aux zones de conflits. Cette action est « indispensable », non seulement au retour des déplacés et des réfugiées, mais également à la stabilisation et à la reconstruction après les conflits. Mais, a ajouté la France, nous faisons face à des défis complexes.
Comme la menace liée aux EEI s’accroît, nous devons, a-t-elle plaidé, doter les acteurs sur le terrain des moyens opérationnels nécessaires. Nous devons accroître nos efforts en termes de formation des troupes et de sensibilisation. Nous devons en outre lutter contre les réseaux, ce qui implique une coordination des actions aux niveaux national et régional, y compris des mesures visant à prévenir et lutter contre l’acquisition illicite de composants, d’explosifs et de matériaux pouvant servir à fabriquer des engins explosifs improvisés. Ces efforts constituent « un axe essentiel » de notre action et doivent s’ajouter aux programmes de dépollution et de sécurisation afin de protéger les populations civiles, a souligné la France.
Le renforcement des moyens sur le terrain doit aller de pair avec la mise en œuvre d’un cadre juridique universel. La protection des populations civiles contre les effets indiscriminés de certains moyens de guerre est une obligation fondamentale, rappelée dans la Convention d’Ottawa et renforcée par la Convention d’Oslo. Depuis plus de 20 ans, nous sommes fermement engagés, a affirmé la France, dans la mise en œuvre et dans l’universalisation de ces Conventions. Insistant sur le fait que le renforcement des moyens sur le terrain doit aller de pair avec la mise en œuvre d’un cadre juridique universel, la France a rappelé que tous les jours, des vies sont brisées à cause d’un faux pas et que le temps presse, compte tenu du nombre de plus en plus élevé des victimes de ces armes.
Le Niger a jugé indispensable d’inclure l’élimination des mines dans les cessez-le-feu et les accords de paix, en tant que « mesures essentielles pour obtenir des résultats probants ». De même, a-t-il souligné, il est urgent que les États et toutes les parties prenantes s’attèlent à assurer l’universalisation et la mise en œuvre complète de la Convention d’Ottawa.
Si le nombre de victimes des mines antipersonnel a connu une diminution notable, les récentes attaques contre les Casques bleus au Mali viennent de rappeler que la prolifération de ces engins continue de constituer un « sérieux danger », a ajouté la délégation, notant à cet égard que le Sahel central est aujourd’hui l’une des zones les plus touchées au monde. Avec l’augmentation ces dernières années des activités terroristes au Sahel et dans le bassin du lac Tchad, le Niger a intensifié ses actions de déminage, ce qui lui a permis, entre autres, de déceler la présence d’un champ de mines autour du poste militaire avancé de Madama, estimé, à 2 400 mètres carrés.
Dans ce contexte, le Niger a plaidé pour un renforcement des capacités des États et pour une action plus soutenue du Conseil, à travers une intégration systématique de l’action contre les mines, dans les mandats des opérations de maintien de la paix, ainsi que dans la planification des opérations humanitaires et de développement. Enfin, il a souhaité que les recommandations issues des rapports du Secrétaire général sur le sujet soient mises en œuvre et qu’une réponse soit apportée au sous-financement persistant de l’aide aux pays en proie à ces problèmes, en particulier pour l’indemnisation des survivants.