Syrie: M. Lowcock alerte le Conseil de sécurité du risque de voir la situation humanitaire passer d’« effrayante » à « catastrophique »
Alors que le dixième anniversaire du conflit en Syrie approche, le Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock, a averti ce matin le Conseil de sécurité que la situation humanitaire en Syrie pourrait passer très vite d’« effrayante » à « catastrophique », tandis que la Directrice de Save the Children a fait part du désir des enfants syriens « retourner à l’école ». Au cours de cet examen mensuel de la situation dans le pays, les membres du Conseil réunis en visioconférence sont restés divisés sur la question des sanctions unilatérales, « une corde au cou des Syriens », selon la Chine, et sur le manque d’accès pour acheminer l’aide humanitaire, un échec du Conseil, selon la Turquie.
M. Lowcock, qui est également Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, a détaillé tous les maux qui affectent les Syriens: la crise économique, la montée de l’insécurité alimentaire, le manque d’accès humanitaire et les problèmes de protection des civils. Citant les nouvelles données inquiétantes publiées la semaine dernière par le Programme alimentaire mondial (PAM), M. Lowcock a précisé que 12,4 millions de Syriens, soit 60% de la population syrienne, n’ont pas régulièrement accès à des aliments sains et nutritifs et que rien qu’en 2020, 4,5 millions sont tombés dans l’insécurité alimentaire. Il faut savoir que les prix des denrées alimentaires et autres articles essentiels ont augmenté de plus de 200% et que la livre syrienne a perdu plus des trois quarts de sa valeur en 2020. Conséquence de ces difficultés, plus de 70% des Syriens disent avoir contracté une nouvelle dette l’an dernier.
L’attention a été attirée aujourd’hui sur le sort des enfants avec les témoignages rapportés par la Directrice de Save the Children, Mme Sonia Khush. Ce sont eux qui ont le plus besoin d’aide humanitaire, a-t-elle alerté en s’inquiétant aussi des conséquences de la crise sur leur scolarité: 79% des enseignants dans le nord-est du pays ont vu leurs élèves abandonner l’école parce qu’ils doivent aider leur famille financièrement. « Nous savons d’expérience que la plupart des enfants qui arrêtent l’école n’y retournent pas », a-t-elle constaté en appelant à relever le défi de la rescolarisation.
C’est aussi leur malnutrition chronique qui est alarmante, selon les chiffres présentés par M. Lowcock: plus d’un demi-million d’enfants de moins de 5 ans souffrent de retard de croissance à cause de cette malnutrition. Les médecins sont d’ailleurs préoccupés par une éventuelle perturbation de l’aide transfrontalière dans le nord-ouest de la Syrie sans laquelle ils ne pourraient pas fournir à ces enfants les soins dont ils ont besoin pour survivre. M. Lowcock a ainsi prévenu que la situation pourrait devenir catastrophique si l’autorisation d’assistance transfrontalière n’est pas prolongée.
À ce propos, le Royaume-Uni a estimé que la justification du renouvellement à venir du mandat du mécanisme transfrontalier n’a pas perdu de sa pertinence. Même son de cloche du côté des États-Unis qui ont insisté sur la responsabilité du Conseil d’élargir l’accès humanitaire en juillet prochain, lors du renouvellement du mécanisme, et non de le restreindre davantage. La poursuite de l’acheminement d’articles de première nécessité, par tous les moyens possibles, y compris le mécanisme transfrontalier, est cruciale pour la survie des enfants, a argué la Directrice de Save the Children.
Revenant sur le passé, l’Estonie a déploré que le droit de veto ait été utilisé au Conseil de sécurité pour réduire de moitié le mécanisme transfrontalier, en faisant observer que les promesses de remplacer les livraisons transfrontalières par une aide à travers les lignes de front n’ont pas été respectées. L’ONU est toutefois prête à mener une première mission à travers les lignes dans le nord-ouest de la Syrie, a indiqué le Coordonnateur des secours d’urgence demandant un accord plus large pour la mettre en marche. Pour ce qui est du Nord-Est, il s’est inquiété de l’augmentation des tensions ces derniers mois qui ont provoqué des perturbations temporaires de l’aide d’urgence.
S’agissant de la protection des civils, M. Lowcock a cité le décès d’un travailleur humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie le 16 février. Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a enregistré une augmentation du nombre de victimes civiles dans le nord du pays en raison de l’utilisation accrue d’engins explosifs improvisés, a signalé le haut fonctionnaire exigeant que les auteurs de violations et d’abus graves des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire soient jugés et que les civils et les acteurs humanitaires soient protégés.
Dans son exposé, M. Lowcock a également donné des précisions sur le futur cadre stratégique des Nations Unies et sur les paramètres et principes régissant l’assistance des Nations Unies en Syrie. L’ONU travaille actuellement sur la troisième ébauche du cadre, en consultation avec toutes les parties prenantes en Syrie et ailleurs, a-t-il dit. La France a estimé que la conférence des donateurs coorganisée par l’Union européenne et l’ONU les 29 et 30 mars prochain sera une étape importante pour veiller à la mise en œuvre des principes et paramètres, tandis que les États-Unis ont insisté pour que toutes les agences des Nations Unies en Syrie agissent de manière cohérente avec ces paramètres et principes, car les besoins humanitaires en Syrie n’ont pas été satisfaits et la corruption du régime syrien ne peut être récompensée.
Enfin, le Niger, le Kenya, la Chine, le Mexique ou encore la Fédération de Russie ont émis des réserves sur les sanctions occidentales imposées à la Syrie, au motif qu’elles sont un obstacle à la reprise de l’économie, qu’elles privent les Syriens ordinaires d’accès aux services sociaux de base, et qu’elles empêchent la reconstruction de l’infrastructure civile détruite par la guerre. « Ces sanctions sont illégales, inhumaines et injustifiables et doivent donc prendre fin immédiatement », a réclamé la République islamique d’Iran. La France et l’Estonie ont voulu justifier les sanctions de l’Union européenne et ont prévenu que celle-ci ne financera pas la reconstruction tant qu’un processus politique crédible conforme à la résolution 2254 (2015) n’est pas fermement engagé.
En dépit des « effets négatifs des mesures coercitives unilatérales » et malgré les menaces du terrorisme, la République arabe syrienne a fait valoir ses « réalisations indéniables », se disant déçue du rapport du Secrétaire général sur la situation dans son pays et « des tentatives systématiques et délibérées d’ignorer des réalités syriennes ».
M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence des Nations Unies, a mis l’accent sur trois points: la crise économique et la montée de l’insécurité alimentaire; l’accès humanitaire; et la protection des civils. En outre, il a indiqué qu’il lui a été demandé de faire un exposé sur le cadre stratégique des Nations Unies et les paramètres et principes, après une demande de la Fédération de Russie.
Citant l’économie et de nouvelles données inquiétantes publiées la semaine dernière par le Programme alimentaire mondial (PAM), M. Lowcock a précisé que 12,4 millions de Syriens, soit 60% de la population syrienne, n’ont pas régulièrement accès à des aliments sains et nutritifs et que rien qu’en 2020, 4,5 millions sont tombés dans l’insécurité alimentaire. Le chef des affaires humanitaires a souligné la forte dépréciation de la livre syrienne, qui a perdu plus des trois quarts de sa valeur en 2020 alors que les prix des denrées alimentaires et autres articles essentiels ont augmenté de plus de 200%. « Les dépenses moyennes des ménages dépassent désormais le revenu moyen d’environ 20% », a dit M. Lowcock en précisant que des millions de Syriens recourent à des mesures désespérées pour survivre et que plus de 70% des Syriens disent avoir contracté une nouvelle dette en 2020.
« Plus d’un demi-million d’enfants de moins de 5 ans en Syrie souffrent de retard de croissance en raison d’une malnutrition chronique, selon nos dernières évaluations, et nous craignons que ce nombre augmente », a ajouté M. Lowcock. Il a indiqué que la malnutrition est devenue si normale que les parents ne peuvent pas détecter les signes chez leurs propres enfants. En outre, certains médecins sont préoccupés par une éventuelle perturbation de l’aide transfrontalière dans le nord-ouest de la Syrie.
M. Lowcock a poursuivi son exposé en indiquant que toute l’aide humanitaire qui entre dans le nord-ouest de la Syrie est acheminée par les frontières, pour répondre aux besoins de 2,4 millions de personnes en moyenne chaque mois par le biais d’opérations assurées majoritairement par l’ONU. Sans l’opération transfrontalière, les médecins du nord-ouest de la Syrie ne pourraient pas fournir à ces enfants les soins dont ils ont besoin pour survivre, a expliqué M. Lowcock qui a prévenu que la situation pourrait très vite passer de « effrayante » à « catastrophique » si l’autorisation d’assistance transfrontalière n’est pas prolongée.
L’ONU est prête à mener une première mission à travers les lignes dans le nord-ouest de la Syrie, a indiqué M. Lowcock en précisant qu’il faut maintenant un accord plus large pour la mettre en marche. Pour ce qui est du nord-est, M. Lowcock s’est inquiété d’une augmentation des tensions ces derniers mois qui ont provoqué des perturbations temporaires de l’aide d’urgence pour des centaines de milliers de personnes. Il a indiqué que l’ONU a toutefois continué de déployer tous les efforts possibles pour intensifier les livraisons transversales de fournitures médicales dans le Nord-Est, dont 344 tonnes de fournitures de santé en 2020, soit près de trois millions de traitements. Tout en notant que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) prévoit de livrer 50 tonnes supplémentaires de fournitures de santé au cours du premier trimestre de 2021, il s’est inquiété que seulement 6% des hôpitaux publics du Nord-Est soient évalués comme fonctionnant pleinement.
Pour ce qui est de la protection des civils, M. Lowcock a cité le décès d’un travailleur humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie le 16 février lors d’une série d’horribles attentats à la bombe qui ont tué des dizaines de civils et en ont blessé beaucoup plus dans le nord de la Syrie ces derniers mois. Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a enregistré une augmentation du nombre de victimes civiles dans le nord de la Syrie en raison de l’utilisation accrue d’engins explosifs improvisés, a-t-il signalé en exigeant que les auteurs de violations et d’abus graves des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire soient jugés et que les civils et les acteurs humanitaires soient protégés.
Pour ce qui est du cadre stratégique des Nations Unies et des paramètres et principes, M. Lowcock a expliqué que la rédaction de ce cadre couvrant la période 2021-2023, lancée l’année dernière, vise à refléter les activités opérationnelles convenues de l’équipe de pays des Nations Unies en réponse aux besoins et priorités en Syrie, à partir desquels les programmes et projets d’agences spécifiques des Nations Unies, des fonds et des programmes seront obtenus. « L’ONU fait avancer le processus et travaille actuellement sur la troisième ébauche du document, en consultation avec toutes les parties prenantes en Syrie et ailleurs », a-t-il précisé. M. Mark Lowcock a indiqué que le document « Principes et paramètres » sert d’outil d’orientation interne pour aider à cibler les opérations de l’équipe de pays des Nations Unies dans ce qui reste un contexte très complexe.
Il a rappelé que ces principes et paramètres ont été formulés dans le cadre de processus consultatifs, en s’inspirant des mandats existants, et partagés au sein du système des Nations Unies pour garantir que le soutien et l’assistance sont fournis à ceux qui en ont besoin dans toutes les régions de la Syrie d’une manière équitable et non discriminatoire, en suivant une approche fondée sur les besoins respectant la neutralité et impartialité. Il a assuré que toutes les opérations des Nations Unies en Syrie sont menées en totale conformité avec les résolutions et décisions pertinentes, dont les résolution 46/182 et 75/233 de l’Assemblée générale. Les activités entreprises par l’équipe de pays des Nations Unies dans le cadre du cadre stratégique sont complémentaires du Plan de réponse humanitaire, a-t-il ajouté, le but étant de sauver des vies ainsi que d’améliorer la protection et d’accroître la résilience et l’accès aux services, y compris par la réhabilitation des infrastructures civiles critiques, qui servent une fonction humanitaire cruciale.
Mme SONIA KHUSH, Directrice de la réponse en Syrie de Save The Children, a déclaré qu’après 10 ans de conflit, la situation des enfants est toujours aussi urgente. La moitié des enfants qui grandissent en Syrie n’ont connu que la guerre, a-t-elle dit. « La guerre leur a volé leur enfance. » Mme Khush a indiqué que la pandémie est une autre source de souffrance dans une situation déjà très critique. Les enfants font face aujourd’hui à la situation la plus grave depuis 10 ans, puisque ce sont eux qui ont le plus besoin d’aide humanitaire ou qui meurent en plus grand nombre de maladies qui pourraient être évitées.
Elle a tout d’abord mentionné un défi qui est constamment évoqué par les enfants eux-mêmes, qui est leur désir de retourner à l’école. En raison du conflit, des déplacements, de la pauvreté et maintenant de la pandémie, des millions d’enfants ne sont pas scolarisés. C’est le cas notamment de deux enfants sur trois dans le nord de la Syrie. Mme Khush a dénoncé les attaques contre les écoles et leur utilisation par des groupes armés. L’intervenante a également indiqué que 79% des enseignants dans le nord-est du pays ont vu leurs élèves abandonner l’école parce qu’ils doivent aider leur famille financièrement. Elle a cité ces mots de Ziad, 10 ans: « J’ai arrêté l’école. J’ai commencé à nettoyer des tuiles. Je travaille maintenant du matin au soir pour 3 dollars par semaine. Je suis très fatigué. » En raison des restrictions dues à la COVID-19, les cours se déroulent en ligne, or, la plupart des enfants ne disposent pas d’un accès à Internet. « Nous savons d’expérience que la plupart des enfants qui arrêtent l’école n’y retournent pas. »
Mme Khush a ensuite attiré l’attention sur la grave crise de protection à laquelle les enfants doivent faire face. Au moins deux millions d’enfants dans le Nord-Est ont besoin d’une aide humanitaire, la moitié d’entre eux étant des déplacés. De plus, la situation alimentaire dans le pays est de plus en plus alarmante et un enfant sur huit souffre de retards de croissance en raison d’une sous-alimentation. Les adolescents sont en outre vulnérables aux campagnes de recrutement des groupes armés, tandis que les filles sont contraintes d’arrêter l’école et d’entrer dans des mariages précoces. Elle a cité Dalia, 15 ans: « Chaque fois que mon fiancé appelle, je me sens angoissée. Je rêve de poursuivre mon éducation et de trouver un emploi pour l’avenir, pas un mariage. » Heureusement, Dalia a brisé ses fiançailles et est retournée à l’école, mais des milliers de filles n’ont pas cette chance, a redouté Mme Khush.
Elle a estimé que les réponses à ces défis sont les mêmes. La poursuite de l’acheminement d’articles de première nécessité, par tous les moyens possibles, y compris le mécanisme transfrontalier, est cruciale pour la survie des enfants. Elle a souhaité que l’accent soit mis sur les causes profondes des souffrances des enfants et appelé de ses vœux des investissements prioritaires dans l’éducation et la protection, en particulier s’agissant de la santé mentale.
Enfin, elle a souligné les risques graves auxquels font face les enfants et leurs mères dans le Nord-Est, en particulier dans les camps de Hol et de Roh, qui accueillent 64 000 personnes, dont plus de 90% de femmes et d’enfants. Parmi eux, 10 000 femmes et enfants sont étrangers. La majorité des enfants ont moins de 12 ans et la moitié ont moins de 5 ans. Déjà critiques, les conditions de vie se sont dégradées avec la récente augmentation d’incidents sécuritaires à Hol, a dit Mme Khush. « Les enfants étrangers pris au piège en Syrie sont des victimes innocentes du conflit et doivent être traités en tant que tel, non pas comme des menaces sécuritaires à contenir derrière des barbelés. » Elle a donc exhorté tous les États Membres à rapatrier ces enfants extrêmement vulnérables, ainsi que leurs familles. « Ils méritent une seconde chance de devenir un jour docteur, artiste ou ingénieur comme n’importe quel autre enfant. »
En conclusion, Mme Khush a plaidé pour une amélioration de l’accès humanitaire. Pour l’heure, il n’y a pas de possibilité d’apporter une aide pérenne à des millions de personnes dans le besoin sans une résolution sur un acheminement transfrontalier, a déclaré Mme Khush.
Porte-plume avec la Norvège sur le dossier humanitaire syrien, l’Irlande a rappelé que le mois prochain marquera le dixième anniversaire du conflit en Syrie. Bien que la situation n’ait cessé de se dégrader pendant cette longue période, les besoins humanitaires ont augmenté d’un cinquième rien que l’an dernier, a-t-elle constaté, notant qu’un nombre record de 12,4 millions de Syriens, soit 60% de la population, se voient refuser leur droit le plus élémentaire à l’alimentation. De plus, les rudes conditions hivernales ont coïncidé avec la hausse des prix du carburant, laissant le chauffage de base hors de portée de nombreux Syriens, a observé la délégation, avant d’évoquer les incendies meurtriers résultant d’efforts pour se réchauffer, les graves inondations dans le nord-ouest du pays et la misère générale, des souffrances auxquelles s’ajoute la violence sexuelle contre les enfants. Dans ce contexte, a-t-elle relevé, la menace de la COVID-19 renforce l’urgence de protéger l’accès à l’eau et à l’assainissement. Il est également essentiel que le système de santé syrien soit soutenu dans la lutte contre la pandémie. Toutes les parties doivent faciliter l’accès humanitaire et respecter les cessez-le-feu pour permettre aux équipes médicales humanitaires de s’acquitter de leurs fonctions vitales, a plaidé l’Irlande. Selon elle, il faut tout faire pour soutenir ces opérations à la fois en fournissant des fonds et en veillant à ce que les acteurs humanitaires puissent mener à bien leur travail.
Condamnant toutes les violences commises contre les civils, notamment les bombardements dans le Nord-Est qui ont contraint 3 000 personnes à quitter leur maison, l’Irlande a appelé toutes les parties à conclure un cessez-le-feu à l’échelle nationale, conformément à la résolution 2254 (2015). Elle s’est aussi alarmée de la détérioration de la situation sécuritaire dans le camp de Hol, où 23 personnes auraient été tuées depuis le 1er janvier. Cette situation est particulièrement inquiétante étant donné que plus de la moitié des résidents du camp ont moins de 12 ans, a-t-elle relevé, rappelant à toutes les parties leurs obligations en droit international. « Nous ne devons pas affronter 10 années supplémentaires de souffrances humaines causées par ce conflit », a supplié la délégation, selon laquelle le Conseil a la responsabilité d’être « solidaire de ceux qui se retrouvent sans voix ».
L’Estonie a estimé que la poursuite des violations et la détérioration de la situation humanitaire en Syrie sont le résultat de l’impasse politique au Conseil de sécurité. Elle a accusé les membres permanents d’avoir utilisé leur veto pour bloquer les actions du Conseil visant à mettre fin à cette tragédie, rappelant à cet effet que l’un de ces vetos a été utilisé l’année dernière. Ce veto a réduit de moitié le mécanisme transfrontalier qui fournit une aide vitale à des millions de personnes dans le nord de la Syrie, a-t-elle souligné en faisant observer que les promesses de remplacer les livraisons transfrontalières par une aide à travers les lignes de front n’ont pas été respectées. Pour l’Estonie, cette dernière approche reste clairement irrégulière et peu fiable, tandis que les restrictions d’accès persistantes continuent d’entraver la réponse aux besoins croissants. C’est particulièrement inquiétant, compte tenu de l’augmentation significative de l’insécurité alimentaire, s’est lamenté la délégation.
Dans le même temps, la propagation de la COVID-19 continue de mettre en danger les civils syriens, en particulier les communautés les plus vulnérables, notamment les femmes et les enfants, a constaté l’Estonie qui s’est félicitée du projet de vacciner la population syrienne par le biais du Mécanisme COVAX, tout en saluant les efforts des travailleurs humanitaires sur cette question. L’Estonie a redit qu’une solution militaire ne pourra apporter la paix en Syrie. C’est pourquoi l’Union européenne (UE) et ses membres sont déterminés à continuer de soutenir le peuple syrien. Pour sa part, l’Estonie, qui a dit attendre avec intérêt la cinquième Conférence de Bruxelles sur le soutien à la Syrie, a rappelé la position de l’UE selon laquelle il n’y aura pas de financement de la reconstruction tant qu’une transition politique authentique et inclusive n’est mise en place, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.
La France a noté que plus de la moitié de la population syrienne est en situation d’insécurité alimentaire et a appelé à une cessation immédiate des hostilités sous supervision de l’ONU à l’échelle nationale et une pause humanitaire, conformément aux résolutions 2532 (2020) et 2254 (2015) et à l’appel du Secrétaire général. Après avoir précisé que 14 personnels humanitaires ont perdu la vie dans le Nord-Ouest depuis début 2020 et plus de 900 personnels médicaux depuis le début du conflit, la France a estimé que la condamnation hier par un tribunal allemand d’un ancien agent des services de sécurité syriens pour complicité de crimes contre l’humanité est une première étape importante pour mettre fin à l’impunité des crimes du régime.
« La hausse des besoins humanitaires et médicaux, de 20% en 2021, rend plus que jamais indispensable la garantie d’un accès humanitaire sûr et sans entrave », a dit la France avant d’exhorter le régime syrien à respecter ses obligations dans le cadre du droit international humanitaire et la Russie à faire pression sur le régime en ce sens. Après avoir jugé essentiel de garantir un accès équitable au vaccin contre la COVID-19, y compris dans le Nord-Est et dans le Nord-Ouest, la France a regretté les blocages systématiques et délibérés de l’aide humanitaire par le régime qui s’est opposé à 30% des missions humanitaires. « Nous devons aussi tirer les leçons de la perte du point de passage de Yaroubiyé », a dit la France avant de noter qu’aucune opération n’a jusqu’à ce jour compensé la disparition des convois transfrontaliers. La France a estimé que la conférence des donateurs coorganisée par l’UE et l’ONU les 29-30 mars sera une étape importante pour veiller au plein respect des garanties d’impartialité et de transparence dans l’acheminement de l’aide, et pour la mise en œuvre du document « principes et paramètres ». « Les tentatives visant à accuser l’Europe et ses partenaires de conditionner l’aide ne doivent tromper personne », a ajouté la France.
La France a rappelé que l’Union européenne et ses États membres sont les principaux bailleurs de la réponse humanitaire en Syrie, y compris dans les zones tenues par le régime. « Depuis 2011, près de 20 milliards d’euros ont été mobilisés par les Européens en réponse à cette crise et le plan de réponse humanitaire était financé l’an dernier à environ 85% par l’UE, ses États membres, le Royaume-Uni et les États-Unis », a précisé la France. La France, tout comme l’UE, ne financera pas la reconstruction ou toute assistance alignée sur les priorités de développement du régime tant qu’un processus politique crédible conforme à la résolution 2254 n’est pas fermement engagé, a réitéré la délégation.
Les États-Unis ont regretté que Mme Su’ad Jarbawi de International Rescue Committee (IRC) n’ait pas pu participer à la réunion d’aujourd’hui parce que leurs « collègues russes l’ont réduit au silence en s’y opposant ». Si elle avait été là, les États-Unis pensent que son message aurait été clair: « New York doit agir. » Les États-Unis ont donc plaidé pour que l’accès humanitaire permette d’aider tous ceux qui en ont besoin, pour que l’accès transfrontalier se poursuive et pour que le Conseil honore ses obligations d’aider les plus vulnérables, ce qui est d’autant plus important avec la pandémie de COVID-19.
« Chaque Syrien mérite une assistance », ont avancé les États-Unis en signalant à cet égard avoir accordé plus de 12,2 milliards de dollars d’aide humanitaire aux Syriens depuis 2012, « en fonction uniquement de leurs besoins ». La délégation a dénoncé les conditions dans le camp de Roukban qui, depuis un an et demi, a été privé d’aide humanitaire et médicale « parce que le régime d’Assad et la Russie n’y autorisent pas l’accès des convois humanitaires de l’ONU ». « Une telle politisation et militarisation de l’aide devrait nous scandaliser », s’est indignée la délégation. Soulignant le caractère essentiel du mécanisme transfrontalier pour garantir que l’aide humanitaire continue d’atteindre les personnes dans le besoin, les États-Unis ont estimé qu’il est de la responsabilité du Conseil d’élargir l’accès humanitaire en juillet, lorsque le mandat de ce mécanisme sera renouvelé, et non de le restreindre davantage. Cela suppose la réautorisation pour l’ONU d’utiliser le point de passage de Bab el-Haoua en vue de pouvoir assurer la livraison cohérente de nourriture, d’abris et de fournitures médicales dans le nord-ouest de la Syrie.
Également préoccupés par les risques que pose la pandémie de COVID-19 en Syrie, en particulier pour les populations les plus vulnérables et les personnes déplacées, les États-Unis ont encouragé tous les acteurs à travailler ensemble pour développer un plan de vaccination équitable et efficace qui couvre tous les Syriens, soulignant au passage le rôle essentiel que jouerait un accès transfrontalier accru dans la distribution du vaccin dans le nord-ouest et le nord-est de la Syrie. En effet, la délégation a dit craindre que ceux qui se trouvent dans le Nord-Est, qui reste sans point d’entrée transfrontalier, continueront à se voir injustement refuser des vaccins par le « régime d’Assad », tout comme les dizaines de milliers de Syriens « piégés » dans les centres de détention du régime.
En guise de conclusion, les États-Unis ont insisté pour que toutes les agences des Nations Unies en Syrie agissent de manière cohérente avec les paramètres et principes d’assistance de l’ONU, car les besoins humanitaires en Syrie n’ont pas été satisfaits et la corruption du régime syrien ne peut être récompensée. « La Syrie reste, malheureusement, un pays en guerre. » Comme l’a souligné le Secrétaire d’État américain, M. Antony Blinken, au début du mois, les États-Unis réaffirment leur attachement aux efforts de longue date de la communauté internationale pour apporter une solution politique au conflit en Syrie.
La Fédération de Russie a estimé que le rapport du Coordonnateur des secours d’urgence est éloigné de la réalité du terrain, car il ne mentionne pas les sanctions occidentales comme causes de la détérioration de la situation économique en Syrie. Ces sanctions empêchent l’amélioration de l’économie, privent les Syriens ordinaires d’accès aux services sociaux de base, et empêchent la reconstruction de l’infrastructure civile détruite par la guerre, a affirmé la délégation pour qui l’aide humanitaire ne résoudra pas ces problèmes et n’aidera pas au retour à la vie normale. L’aide humanitaire ne marche pas, a tranché la Russie en citant un rapport « des agences humanitaires agissant sur le terrain ».
La Russie a ensuite mentionné une lettre écrite par 90 personnalités d’horizons divers et adressée au Président Joe Biden et au Premier Ministre Boris Johnson. Cette lettre s’appuie sur les conclusions de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur l’impact des sanctions sur les droits humains, Mme Alena Douhan, pour affirmer qu’en matière de droits de l’homme et d’aide humanitaire, il existe un consensus: cette punition collective des civils a conduit la Syrie à une catastrophe humanitaire sans précédent. À cause des sanctions, la Syrie n’est pas en mesure d’effectuer les transactions monétaires nécessaires au fonctionnement de l’économie, d’acheter des matières premières, des matériaux de construction, sans parler des médicaments et du matériel médical, qui sont nécessaires dans le contexte de la pandémie.
Abordant la question de la vaccination contre la COVID-19, la Russie s’est réjouie que l’Alliance du Vaccin (GAVI) ait répondu favorablement à la demande du Gouvernement syrien pour qu’une partie des vaccins parvienne aux territoires hors du contrôle gouvernemental dans le Nord-Est. La délégation a par ailleurs déploré que les efforts de la Syrie n’aient jamais été reconnus par certains membres du Conseil de sécurité. Ils n’ont pas non plus condamné les terroristes à Edleb qui empêchent la Croix-Rouge et des travailleurs humanitaires de travailler, selon la Russie qui a appelé à se poser les bonnes questions: où vont les aides achetées à coup de millions par les occidentaux? « On sait pourtant que les terroristes d’Edleb ne font que s’enrichir et empêchent les civils d’en bénéficier. »
Les Syriens ne font que ramasser des miettes de ces aides, a regretté la délégation avant de poser d’autres questions. Comment seront repartis les vaccins de la GAVI? Pourquoi n’y a-t-il pas d’évaluation des résultats de l’aide? Comment faire pour permettre à Damas de mener des campagnes de vaccination en dépit des sanctions? Quelles compagnies privées risqueraient des sanctions en acheminant ces vaccins? Comment acheter les matériels pour préserver la chaîne de froid pour la conservation des vaccins? Il semble qu’à Edleb, il existe un système à « double fond » pour le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontalière, a dit la Russie. Dénonçant « l’occupation américaine du nord-est de la Syrie », la Fédération de Russie a accusé les États-Unis de s’approprier des ressources pétrolières de ce pays. « Le temps manque », a prévenu la Russie à propos de la prolongation du mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire, plaidant pour « une aide permanente ». Elle a aussi déclaré être favorable à la participation de la société civile au Conseil.
Avant de terminer, la délégation a posé des questions au Coordonnateur des secours d’urgence sur les obstacles à la mise en œuvre de l’acheminement de l’aide humanitaire et sur le rôle de l’équipe interinstitutions en Syrie.
Le Niger a réitéré que la cessation des hostilités reste une condition essentielle pour réaliser des progrès tangibles dans le règlement de la crise en Syrie et soutenu les appels du Secrétaire général pour un cessez-le-feu national immédiat. La délégation a ensuite affirmé que la lutte contre le terrorisme doit se faire dans le respect du droit international humanitaire et en veillant à la protection des civils innocents et à leur accès à l’aide humanitaire. Le Niger a ensuite salué les efforts du Gouvernement syrien pour collaborer de manière continue avec l’ONU et d’autres organisations, ainsi que dans la lutte contre la propagation de la pandémie, mais aussi pour assurer l’acheminement de l’aide humanitaire dans toute la Syrie. « Nous saluons aussi, à leur juste valeur, les autorisations données par les autorités syriennes aux organisations pour leur permettre d’acheminer l’aide humanitaire; cela doit se poursuivre et même s’amplifier surtout lorsqu’il s’agit de produits alimentaires et matériels médicaux. »
La délégation s’est aussi faite l’écho de l’appel lancé par le Secrétaire général aux belligérants pour permettre et faciliter le passage rapide et sans entrave d’une aide humanitaire impartiale pour tous les civils dans le besoin, où qu’ils se trouvent. Le Niger a lancé un appel vers les forces en présence et les Nations Unies pour que soit renforcée la sécurité des résidents du camp de Hol, et pour que cette sécurité soit assurée d’une manière qui ne mette pas davantage en danger les résidents et ne limite pas la fourniture de l’aide humanitaire. Enfin, le Niger a exhorté les pays concernés à répondre activement à l’appel lancé par le Secrétaire général en mars dernier, pour la suppression ou l’allégement, pour des raisons humanitaires, des sanctions imposées aux pays en crise, afin de garantir l’acheminement de la nourriture et des fournitures médicales essentielles dans la lutte contre la pandémie.
Saint-Vincent-et-les Grenadines s’est alarmée de la forte augmentation des besoins humanitaires dans toute la Syrie après une décennie de conflit. Cette situation est aggravée par les conditions météorologiques difficiles et la récession économique continue du pays, a-t-elle souligné, estimant que la fourniture d’une aide humanitaire rapide, sûre, durable et sans entrave doit rester une priorité absolue. Alors que la pandémie de COVID-19 a encore aggravé l’urgence humanitaire, la délégation s’est félicitée que la demande de la Syrie visant à obtenir les vaccins auprès du Mécanisme COVAX ait été acceptée. Elle a souhaité que ces vaccins soient déployés sous peu et administrés efficacement. Elle a également réitéré l’appel à la levée de toutes les mesures coercitives unilatérales, qui, selon elle, font obstacle au redressement socioéconomique et entravent les efforts du pays pour lutter contre la pandémie. Pour Saint-Vincent-et-les Grenadines, la poursuite des hostilités est un autre facteur qui aggrave la crise humanitaire. Il est donc crucial que les parties au conflit mettent immédiatement fin à la violence pour protéger les civils et les infrastructures civiles, empêcher d’autres déplacements et permettre aux acteurs humanitaires de mener à bien leur travail.
La délégation s’est par ailleurs déclarée préoccupée par la détérioration de la situation sécuritaire dans les camps de déplacés, en particulier celui de Hol. Ceux qui résident et travaillent dans ces camps doivent bénéficier d’une protection et d’un accès aux produits de première nécessité, a-t-elle affirmé. Reconnaissant que les opérations antiterroristes soient nécessaires pour la protection du peuple syrien et l’intégrité territoriale du pays, elle a cependant rappelé aux parties leur obligation de se conformer au droit international. « Les objectifs militaires ne devraient jamais l’emporter sur la protection des civils et toutes les activités doivent respecter les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution », a fait valoir la délégation, jugeant en conclusion que la seule solution au conflit et à la crise humanitaire prolongée passe par la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).
Le Mexique a relevé que la situation humanitaire actuelle en Syrie est le reflet cumulé de 10 années de guerre dont les effets sont profonds et dévastateurs, comme en témoignent les chiffres alarmants sur l’insécurité alimentaire, les déplacés et les infrastructures endommagées. Ceux qui fournissent une aide humanitaire ont également subi des pertes, a fait remarquer le Mexique qui a condamné dans les termes les plus fermes ces actes de violence et réitéré son appel à toutes les parties à respecter le cessez-le-feu et à s’acquitter de leurs obligations, conformément au droit international humanitaire. Un cessez-le-feu général est une priorité et doit s’accompagner d’un effort réel pour parvenir à une solution politique globale, a plaidé la délégation.
Dans le nord-est de la Syrie, dans le camp de Hol, plus de 60 000 personnes, dont 94% de femmes et d’enfants, vivent dans des conditions extrêmement précaires, a déploré le Mexique, avant de demander le retour de ces familles chez elles, conformément au droit international. La délégation a insisté sur le caractère vital du point de passage de Bab el-Haoua dans le cadre de l’acheminement de l’aide dans le nord-ouest de la Syrie, arguant que cela ne peut pas être remplacé par des routes qui traversent les lignes de front. Les informations fournies par OCHA et les agences humanitaires sur le terrain le confirment, a-t-elle justifié. L’efficacité des deux canaux est essentielle dans le contexte pandémique actuel, car les besoins en fournitures médicales ont augmenté, a fait valoir le Mexique. Le pays a aussi plaidé pour un accès humanitaire rapide et sans entrave afin de mettre en œuvre les plans de vaccination contre la COVID-19. Le Mexique a demandé à tous les États qui ont imposé des sanctions unilatérales à la Syrie de les réexaminer en permanence et rigoureusement, afin de voir si elles n’affectent pas la population civile.
L’Inde a relevé que la Syrie est confrontée à une situation désastreuse aggravée par une multiplicité de facteurs tels que la pandémie de COVID-19, des conditions hivernales rigoureuses, l’insécurité alimentaire et la mise en péril de l’avenir de ses 17,6 millions de citoyens, dont près de 6,2 millions sont déplacés. L’Inde s’est dite fermement convaincue que toutes les livraisons d’aide humanitaire à la Syrie doivent être conformes aux principes directeurs de l’ONU en matière d’assistance humanitaire ainsi qu’aux principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance.
« L’Inde continue d’être aux côtés du peuple syrien », a assuré la délégation en précisant avoir livré ce mois 2 000 tonnes de riz, en réponse à la demande d’aide humanitaire d’urgence du Gouvernement syrien, via la ville portuaire de Lattaquié. Elle a aussi rappelé avoir distribué 10 tonnes de médicaments pour aider le peuple syrien à traverser la pandémie de COVID-19 en juillet 2020. L’Inde a la volonté de travailler avec l’ONU et ses agences pour faire en sorte que les vaccins fabriqués en Inde puissent également être apportés à la population syrienne. Depuis que le conflit a éclaté en 2011, l’Inde a fourni 12 millions de dollars d’aide humanitaire au Gouvernement syrien par les voies bilatérales et multilatérales, a aussi rappelé l’Inde. L’Inde a en outre mis en place un parc biotechnologique et un centre informatique et consacré 265 millions de dollars à des projets en Syrie dans les secteurs de l’acier et de l’électricité. L’Inde a aussi déclaré avoir organisé un événement d’ajustement de prothèses à Damas en décembre 2019 et janvier 2020, qui a bénéficié à plus de 500 Syriens. Le pays a aussi offert 1 000 bourses à des étudiants syriens pour qu’ils puissent étudier en Inde.
La Chine a pointé du doigt la détérioration alarmante de la situation économique et humanitaire en Syrie. La délégation a appelé la communauté internationale à aider le Gouvernement syrien dans l’acheminement de l’aide humanitaire, la reconstruction et le développement du pays. La Syrie a besoin de soutien dans la lutte contre la pandémie, pour la reconstruction et l’aide à la population, a réitéré la Chine. Elle a insisté sur le fait que les sanctions empêchent le développement et la reconstruction. « C’est une corde au cou des Syriens. » Elle a appelé les Nations Unies à travailler avec le Gouvernement syrien pour que celui-ci puisse tirer profit du point de passage pour l’aide humanitaire transfrontalière de Bab el-Haoua.
La Chine s’est dite ravie que l’OMS ait pu acheminer en Syrie des articles médicaux bénéficiant à des millions de personnes. La Chine a dit avoir donné à la Syrie 30 millions de dollars d’aide, 1 000 doses de vaccin et une cargaison de riz. Pour ce qui est du long terme, la délégation chinoise a plaidé pour l’élimination du terrorisme en Syrie arguant que c’est la condition du retour à la normale dans ce pays. Les enfants étant l’avenir du pays, elle a aussi appelé à préserver leur vie et à les aider à grandir pour qu’ils puissent reconstruire leur pays. Enfin, la Chine a appelé à ne pas instrumentaliser l’aide pour influencer certains acteurs.
La Tunisie a commencé par dire que le règlement politique est le seul règlement possible en Syrie conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. En attendant, il est essentiel de poursuivre l’acheminement de l’aide humanitaire à grande échelle sur tout le territoire syrien et de stopper la détérioration de la situation économique et la propagation de l’épidémie du COVID-19, a plaidé la délégation. Constatant que la réalisation de la désescalade est toujours hors de portée en raison de la flambée de la violence et du terrorisme, la Tunisie a souligné combien cela entrave le travail humanitaire. Dès lors, la Tunisie a jugé impératif de consolider le cessez-le-feu dans toutes les régions de la Syrie, et appelé toutes les parties à respecter le droit international et le droit international humanitaire et à garantir la protection des travailleurs humanitaire et médicaux.
Aux vues des conditions humanitaires sensibles en Syrie, la Tunisie a plaidé auprès de toutes les parties pour qu’elles facilitent l’accès humanitaire et a encouragé le Gouvernement syrien à poursuivre ses efforts en ce sens. Dans le cadre du Mécanisme COVAX, la Tunisie a salué l’annonce de l’arrivée prochaine de vaccins pour un cinquième de la population syrienne. Elle a souligné la complémentarité des projets de développement et humanitaires, en particulier pour ce qui est de la reconstruction et la remise à niveau des hôpitaux et écoles de la Syrie.
Le Kenya a souligné la responsabilité de ce Conseil de donner la priorité aux besoins des Syriens, dont la situation ne s’est pas améliorée, en dépit des 10 années de discussions du Conseil. La mission a plaidé pour un accès humanitaire sans entrave. Le Kenya a appuyé une distribution efficace de l’aide transfrontalière et souligné le besoin d’un acheminement renforcé de l’aide au travers des lignes de front. Le Kenya a ensuite dénoncé les sanctions et leurs conséquences négatives pour le développement social et économique de la Syrie. Il s’est dit préoccupé par le fait que les travailleurs humanitaires sont régulièrement pris pour cible par Daech et des groupes armés locaux dans le nord-est et le nord-ouest de la Syrie. Il a ensuite invité le Conseil à commencer d’élaborer une réponse humanitaire en Syrie axée sur la résilience, prévoyant notamment la reconstruction des infrastructures essentielles telles que les écoles et les hôpitaux. Enfin, le Kenya a exhorté toutes les parties au conflit à respecter le droit international et a appuyé un dialogue politique contrôlé et dirigé par les Syriens qui est la seule voie, selon lui, pour aboutir à un règlement durable du conflit syrien.
Le Viet Nam a pris note avec préoccupation de la situation humanitaire en Syrie, encore aggravée par la crise économique et l’impact de la COVID-19. Il s’est notamment inquiété de l’augmentation massive du nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire grave, qui a doublé pour atteindre 1,3 million en une seule année. Dans un tel contexte, un accès rapide, sûr et sans entrave doit être garanti pour garantir l’efficacité des opérations humanitaires, a souligné lé délégation, avant de déplorer que l’absence d’accord entre les parties entraîne un accès limité de cette aide à certaines régions du pays. Elle a par conséquent appelé toutes les parties au conflit et l’ONU à renforcer leur coopération afin d’assurer le passage sans entrave des secours humanitaires. Le Viet Nam a également encouragé les parties à établir un accès au Nord-Ouest depuis l’intérieur de la Syrie en vue d’intensifier la réponse humanitaire.
À la lumière de la deuxième vague d’infections à la COVID-19, la délégation a ensuite souligné l’importance d’aider à l’amélioration de la préparation et de la capacité de réponse de la Syrie. Appuyant l’appel du Secrétaire général à la levée des sanctions qui entravent la réponse humanitaire à la pandémie, elle s’est félicitée qu’un plan de vaccination contre la COVID-19 soit en cours d’élaboration en Syrie. La délégation s’est par ailleurs alarmée de la situation désastreuse dans divers camps de déplacés et de la pénurie d’eau causée par la perturbation de la station d’Alouk. En conclusion, elle s’est déclarée convaincue que le seul moyen de trouver un règlement durable est de faciliter une solution politique globale et inclusive, dirigée et contrôlée par les Syriens, conformément à la résolution 2254 (2015).
Pour le Royaume-Uni, il est décevant qu’à la suite d’une objection d’un membre du Conseil de sécurité, l’organisation non gouvernementale « International Rescue Committee » n’ait pu parler à la présente réunion pour exposer les réalités de la délivrance de l’aide dans le nord-ouest de la Syrie. Le Royaume-Uni a rappelé que ce sont les enfants qui sont les plus touchés par cette crise, un enfant sur huit souffrant de malnutrition. La délégation a souligné que des millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie dépendent de l’assistance transfrontalière, ajoutant que l’accès à l’aide par les lignes de front n’est pas un substitut. Elle a aussi fait valoir que la situation est plus tendue avec les pluies torrentielles et les inondations qui s’abattent sur le nord-ouest de la Syrie.
Le Royaume-Uni a noté que dans le Nord-Est, l’acheminement de l’aide à travers les lignes de front depuis Damas n’a pas réussi à combler les lacunes laissées par la fermeture du point de passage de Yaroubiyé. Cette l’assistance, selon lui, n’est pas à l’échelle ou à la fréquence nécessaires pour répondre aux besoins humanitaires. Dès lors, le Royaume-Uni estime que l’affirmation des autorités syriennes et de la Fédération de Russie selon laquelle l’aide par les lignes de front est suffisante pour répondre aux besoins humanitaires des trois quarts de la population est intenable. Tout comme l’affirmation selon laquelle l’Occident serait à blâmer. Le Royaume-Uni a demandé à l’ONU de fournir des détails complets sur les types d’assistance fournis et les lacunes les plus importantes. La justification du renouvellement du mandat du mécanisme transfrontalier en juillet n’a pas perdu de sa pertinence, a argué la délégation, avant de demander que le Conseil fasse tout ce qui est en son pouvoir pour que cette assistance vitale se poursuive.
La République arabe syrienne a exprimé sa déception, à la lecture du soixante-et-onzième rapport du Secrétaire général sur la situation dans son pays, face « aux tentatives systématiques et délibérées » d’ignorer des réalités syriennes. La Syrie a mis l’accent sur les « réalisations indéniables » de son gouvernement malgré les menaces de terrorisme et les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales. « Les Nations Unies et ses agences n’auraient pas été en mesure de monter une opération humanitaire réussie sans un soutien et une facilitation immenses de la part du Gouvernement syrien », a insisté la délégation avant de préciser que les rapports et exposés au Conseil resteront imparfaits tant qu’ils négligeront les crimes commis par des groupes terroristes tels que Daech, Hay’at Tahrir el-Cham, le Front el-Nosra et les entités affiliées. La Syrie a dénoncé le fait que ces groupes détournent l’aide transfrontalière pour financer le recrutement et utilisent des civils comme boucliers humanitaires, notant que les terroristes contrôlant Edleb ont récemment empêché les civils de quitter la zone par le passage de Hakarat.
La Syrie a dénoncé les mesures coercitives unilatérales comme une violation flagrante du droit international et une forme de punition collective qui empêche les Syriens de recevoir nourriture, médicaments, électricité et carburant, et qui limite la capacité de l’État à relever les défis présentés par la pandémie de COVID-19. « La Turquie, à travers son occupation militaire du Nord et du Nord-Ouest, applique une politique d’endoctrinement, impose la monnaie turque, confisque des terres pour construire un soi-disant mur de séparation et permet aux groupes terroristes de s’emparer des propriétés publiques et privées », a dénoncé la Syrie. Cela perturbe également l’approvisionnement en eau d’Alouk, privant les habitants de Hassaké de cette ressource de base. La Syrie a aussi dit que les États-Unis font sortir « en contrebande » de la Syrie des vestiges culturels et du pétrole, par des passages sous leur contrôle et depuis des zones qu’ils occupent. Les forces américaines à Tanf dans le Sud-Est ont refusé l’accès humanitaire au camp de Roukban, a aussi dénoncé la Syrie. Demandant que des pressions soient exercées sur les gouvernements occidentaux qui refusent de rapatrier leurs ressortissants, la Syrie a en outre dénoncé le refus de soutenir les efforts humanitaires et de développement des institutions syriennes, y compris la mise en œuvre des programmes relevant du cadre stratégique des Nations Unies, tels que la réhabilitation des écoles qui permettrait le retour volontaire des personnes déplacées.
La Turquie a rappelé que le « régime d’Assad » avait répondu de façon brutale par la guerre à la demande légitime du peuple syrien. La crise s’aggrave avec les attaques, la pandémie et le déplacement des populations, a ajouté la délégation. Elle a indiqué qu’elle se porte au secours de cinq millions de personnes sur le terrain. « Nous ne les abandonnerons jamais », a lancé la Turquie qui a appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à soutenir ses efforts y compris à Edleb. Le monde ne peut pas fermer les yeux sur la crise humanitaire qui s’y déroule, a insisté la délégation qui a dénoncé l’échec du Conseil à soutenir les mécanismes transfrontaliers existants, ce qui aggrave la situation. Le Conseil doit assumer sa responsabilité et répondre à l’appel de l’Assemblée générale à poursuivre les mécanismes transfrontaliers y compris l’acheminement des vaccins aux populations du Nord-Est, a plaidé la Turquie. La délégation a réitéré ses engagements dans le cadre du processus d’Astana. Elle a terminé en appelant à soutenir ses efforts contre le Parti des travailleurs du Kurdistan ainsi que les autres groupes terroristes comme Daech. Il n’y a pas de « bons ou mauvais terroristes », a déclaré la Turquie. Je ne considère pas le représentant de la Syrie comme mon homologue, a tenu à préciser la Turquie.
La République islamique d’Iran a rappelé que le peuple syrien subit depuis 10 ans des attaques brutales de terroristes soutenus par l’étranger et l’occupation illégale, à quoi s’ajoutent, ces dernières années, des « sanctions inhumaines ». La communauté internationale a la responsabilité d’aider le peuple et le Gouvernement syriens à surmonter cette crise, et à garantir l’unité, la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance politique de la Syrie, a plaidé la délégation en demandant le retrait immédiat de toutes les forces étrangères présentes en Syrie sans l’autorisation de son gouvernement, « en particulier les forces américaines ».
Ces questions de la crise syrienne ont été largement débattues lors de la réunion au format Astana, tenue récemment à Sotchi, en Russie, à la suite de laquelle une déclaration conjointe a été publiée par l’Iran, la Russie et la Turquie, a rappelé la délégation. Les garants d’Astana y ont condamné l’intensification des activités terroristes en Syrie et sont convenus de poursuivre leur coopération pour éliminer Daech, le Front el-Nosra et tous les autres groupes terroristes désignés par le Conseil de sécurité et leurs affiliés. Ils ont également dénoncé la présence accrue et les activités terroristes de Hay’at Tahrir el-Cham et d’autres groupes terroristes affiliés et la menace qu’ils représentent pour les civils à l’intérieur et à l’extérieur de la zone de désescalade d’Edleb. Dans ce contexte, ils ont fait part de leur inquiétude face aux tentatives de disculpation de certains groupes terroristes qui cherchent à se faire radier de la liste de groupes terroristes. Ils ont également condamné la poursuite des attaques militaires israéliennes en Syrie en violation du droit international et en atteinte flagrante à la souveraineté de la Syrie et des pays voisins, demandant que ces attaques cessent. « La communauté internationale doit empêcher l’aventurisme militaire du régime israélien avant qu’il n’atteigne un niveau incontrôlable », a exigé l’Iran.
S’agissant du processus politique, le rôle important de la Commission constitutionnelle, ainsi que son mandat et son règlement intérieur, a été mis en exergue par l’Iran pour qui les travaux de la Commission devraient être régis par un sens de compromis et d’engagement constructif, sans ingérence étrangère et sans délais imposés de l’extérieur. Les garants d’Astana ont également exprimé leur grave préoccupation face à la situation humanitaire en Syrie, rejeté toutes les sanctions unilatérales et appelé le système des Nations Unies dans son ensemble à donner la priorité à la vaccination contre la COVID-19 en Syrie, a rappelé la délégation. « Ces sanctions sont illégales, inhumaines et injustifiables et doivent donc prendre fin immédiatement. » Compte tenu du rôle important que l’amélioration de la situation humanitaire peut jouer dans l’avancement du règlement politique, les garants d’Astana ont appelé la communauté internationale à renforcer l’assistance à la Syrie, notamment pour la restauration des infrastructures de base, telles que les hôpitaux et les installations d’approvisionnement en eau et en électricité, a encore rappelé l’Iran. En guise de conclusion, il a fait valoir que l’intensification des pressions politiques et économiques sur la Syrie et/ou la création de multiples conditions préalables au règlement pacifique de la crise se sont avérées contre-productives. La reconstruction du pays et le retour des réfugiés et des personnes déplacées doivent aller de pair avec le processus politique. Ils sont interdépendants, inclusifs et se renforcent mutuellement.
Reprenant la parole pour répondre à des questions et observations de délégations, M. LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, a précisé la façon dont l’ONU assure la coordination de son action humanitaire en Syrie. D’une manière générale, a-t-il dit, le principe de base qui sous-tend le travail des agences onusiennes consiste à s’adapter au contexte spécifique du pays. C’est particulièrement le cas en Syrie, en raison du conflit qui se poursuit. Pour ce qui est de la coordination, a indiqué le Secrétaire général adjoint, nous avons, en vertu des mandats existants, un coordonnateur résident, qui est également coordonnateur humanitaire. Son action s’articule autour du Plan d’intervention humanitaire et des plans stratégiques. Ce que nous essayons de faire en Syrie, c’est d’acheminer une aide qui est sous-financée, a poursuivi le Coordonnateur des secours d’urgence, souhaitant à cet égard pouvoir compter sur des contributions plus généreuses. Quant à la différence entre l’équipe spéciale interinstitutions en Syrie et l’équipe de pays des Nations Unies, M. Lowcock a expliqué que la première entité, créée en 2012, est un groupe de travail qui opère sur le plan opérationnel. Il s’agit d’un mécanisme de coordination standard pour les Nations Unies, a-t-il dit. L’équipe de pays rassemble, pour sa part, toutes les entités de l’ONU qui travaillent en Syrie et est dirigée par le Coordonnateur résident.
Le représentant de la République arabe syrienne a répondu que c’est son gouvernement qui l’a nommé. Cela n’a pas besoin d’être reconnu ou pas par le « régime turc », a-t-il ajouté. Il a rappelé que pour son pays, l’occupation turque du nord de la Syrie est une violation du droit international. Enfin, le représentant a demandé à son homologue turc si oui ou non, les terroristes d’El-Nostra, « soutenus par le régime turc », sont de « bons terroristes ».