Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour le Mali estime que si 2020 a été l’année de tous les risques, 2021 mérite d’être placée sous le signe de l’optimisme
Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a fait part, aujourd’hui au Conseil de sécurité, d’un certain optimisme quant à l’évolution de la transition de 18 mois au Mali. M. Mahamat Saleh Annadif a tout de même prévenu que « le succès dépendra des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives », avec, à la clef, des élections inclusives et crédibles en mars 2022, et des résultats acceptés par la majorité des Maliennes et des Maliens. Avec les 15 membres du Conseil, il a insisté sur la bonne mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation, signé à Alger en 2015.
Le Chef de la MINUSMA, qui présentait le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali, a indiqué qu’après « un grand retard », le Conseil national de transition (CNT) a vu le jour le 9 novembre, avec l’élection à sa présidence du colonel Malick Diaw. Le CNT, qui est composé de 121 membres « issus de l’ensemble des forces vives de la nation » dont neuf femmes et des « mouvements signataires » de l’Accord pour la paix, ont relevé avec satisfaction le Mali et plusieurs délégations, doit jouer le rôle de parlement et approuver des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives « cruciales » pour la consolidation de la démocratie et l’organisation d’élections inclusives et crédibles en mars 2022.
Autant l’année 2020 a été celle de tous les risques, autant 2021 mérite d’être placée sous le signe de l’optimisme, s’est avancé le Représentant spécial, expliquant son sentiment par le fait que tous les organes de la transition sont opérationnels. Les parties signataires de l’Accord pour la paix ont adopté, le 18 décembre dernier, une feuille de route révisée, assortie d’actions prioritaires, qui sera présentée au Comité de suivi de l’Accord, le 19 janvier prochain. « Au-delà de l’impatience et peut-être d’une certaine frustration », le Représentant spécial a espéré que cette fenêtre d’opportunité ne sera pas une nouvelle occasion manquée, réconforté par les dernières consultations « encourageantes » entre le Gouvernement de transition et les mouvements signataires de l’Accord pour la paix.
Le Représentant spécial n’a pas pour autant fermé les yeux sur l’environnement « sécuritaire toujours préoccupant et imprévisible » au Mali et dans la région, comme en attestent les attaques récurrentes dans la zone des trois frontières qui ont coûté la vie à de nombreux civils dont plus d’une centaine de Nigériens le 2 janvier dernier, suivi, le 3 janvier, par la mort de deux soldats français. Ces dernières assauts, a dit la France, en rappelant aussi l’attaque du 9 janvier contre l’opération Barkhane qui a blessé six autres soldats français, montrent que les groupes terroristes conservent une capacité de nuisance. Elle a salué la montée en puissance de la « Task Force Takuba », réclamé un soutien international renforcé à la Force conjointe du G5 Sahel et pressé les forces armées maliennes d’accélérer leur reconstruction, tout en maintenant leur engagement opérationnel.
Toutes les actions, a préconisé la France, doivent s’accompagner du retour des administrations et des services aux populations, afin de restaurer la confiance entre l’État, les collectivités locales et leurs administrés et de combattre l’emprise exercée par les terroristes. Le Chef de la MINUSMA a d’ailleurs parlé de la visite à Kidal de hauts magistrats pour organiser l’audition solennelle d’assermentation du nouveau Gouverneur, le 31 décembre 2020. « Un tel événement n’a pas eu lieu à Kidal depuis près de 10 ans », a-t-il rappelé. À ses remarques sur les dernières ordonnances d’arrestation de plusieurs personnalités « de nature à occulter la recherche de la vérité » si elles ne sont pas conformes aux principes de l’état de droit, le Mali a répondu par des exemples de « la détermination » de son gouvernement à faire respecter les droits de l’homme et à lutter contre l’impunité.
Notre processus de stabilisation durable est à un point critique et sa réussite dépend tout d’abord de l’union sacrée des forces vives maliennes mais aussi de la qualité du soutien international à la sortie de crise, a souligné le Mali, après avoir indiqué que son gouvernement organisera en février 2021 une table ronde, avec la participation des partenaires, sur le financement de la Stratégie spécifique de développement des régions du Nord. Le Conseil de sécurité attend des résultats concrets d’ici au renouvellement du mandat de la MINUSMA, en juin, a prévenu la France. Le régime de sanctions est là pour soutenir le processus politique; ce n’est pas une simple question administrative sans objectif précis, a aussi mis en garde le Mexique, président du Comité des sanctions relatif au Mali.
Le prochain renouvellement du mandat de la MINUSMA, un mandat « énorme » sans ressources adéquates, a estimé l’Inde, doit être l’occasion, selon le Niger, de supprimer la tâche de soutien à la Force conjointe du G5 Sahel pour la laisser se focaliser sur ses priorités stratégiques. L’on pourrait, par conséquent, songer à créer un bureau d’appui des Nations Unies à la Force, a ajouté le Niger, en défendant aussi la mise sur pied d’un projet commun G5 Sahel/ONU, en vue d’endiguer les causes profondes de conflits communautaires et prévenir leur récurrence. La Fédération de Russie a dit soutenir l’idée de la Commission de paix et de sécurité de l’Union africaine de déployer une force permanente dans la région du Sahel.
M. MAHAMAT SALEH ANNADIF, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), a relevé que la période couverte par le rapport a été marquée par les tractations pour la mise en place du Conseil national de transition (CNT), dont la désignation des membres a connu un grand retard pour ne voir le jour que le 9 novembre, avec l’élection à sa présidence du colonel Malick Diaw, ancien Vice-Président du Comité national du salut public (CNSP). Le CNT doit jouer le rôle de parlement et approuver des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives « cruciales » pour la consolidation de la démocratie et l’organisation d’élections crédibles permettant un retour à l’ordre constitutionnel, comme le prévoit d’ailleurs la Charte de la transition.
La formation du CNT, a avoué le Représentant spécial, n’a pas réuni le consensus nécessaire entre les acteurs politiques, y compris les représentants de la société civile. Tous les Maliens sont pour la lutte contre la corruption et l’impunité mais les dernières ordonnances d’arrestation de plusieurs personnalités sont de nature à occulter la recherche de la vérité si elles ne sont pas conformes aux principes de l’état de droit, a-t-il averti.
Le Représentant spécial a estimé que la période de transition représente une réelle opportunité de sortir du cercle vicieux des crises politiques suivies de coups d’État. En ce moment, le Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation poursuit ses bons offices et les dernières consultations entre le Gouvernement et les mouvements signataires sont encourageantes. Il a salué la visite à Kidal de hauts responsables de la justice, notamment le Président de la Cour, le Procureur général et le Greffier en chef, pour organiser l’audition solennelle d’assermentation du nouveau gouverneur, le 31 décembre 2020. Un tel événement n’a pas eu lieu à Kidal depuis près de 10 ans, a-t-il rappelé.
À l’image de ce qui se passe dans le monde, la pandémie de COVID-19 connaît une recrudescence au Mali depuis les trois derniers mois, a déclaré le Représentant spécial. Les décès successifs parmi tant d’autres, du Président Pierre Buyoya, ancien Haut-Représentant de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel, et de Soumaïla Cissé, ancien chef de l’opposition malienne, en sont la parfaite illustration. Le personnel des Nations Unies au Mali n’est pas épargné non plus, même si la situation est encore sous contrôle, a-t-il noté. À ce sombre tableau de la COVID-19, il a ajouté la disparition d’éminentes personnalités politiques maliennes telles que les anciens Présidents Moussa Traoré et Amadou Toumani Touré, ainsi que l’ancien Premier Ministre Modibo Keïta.
Malgré les succès importants remportés par les forces internationales contre les terroristes, pour le Représentant spécial, l’environnement sécuritaire est toujours préoccupant et imprévisible au Mali et dans la région, comme en attestent les attaques récurrentes dans la zone des trois frontières qui ont coûté la vie à de nombreux civils dont plus d’une centaine de Nigériens le 2 janvier dernier dans la préfecture de Ouallam. Face à ces défis multiformes, la MINUSMA continue de s’adapter et de renforcer ses capacités pour mieux répondre aux deux priorités stratégiques conformément à son mandat. En ce qui concerne les violences intercommunautaires au centre du pays, la MINUSMA reste engagée dans son appui à la stratégie du Gouvernement pour la stabilisation du centre. Son plan d’adaptation produit des résultats significatifs avec la multiplication des bases temporaires et l’intensification des patrouilles pour la protection des civils, a expliqué M. Annadif.
Autant l’année 2020 a été celle de tous les risques, autant 2021 mérite d’être placée sous le signe de l’optimisme et ce, par les Maliens d’abord, a estimé le Représentant spécial. Malgré le manque de consensus tout le long des tractations sur la désignation des membres aussi bien du Gouvernement que du Conseil national de transition, il s’est réjoui qu’aujourd’hui, tous les organes de la transition soient opérationnels. Les parties signataires de l’Accord pour la paix ont adopté, le 18 décembre dernier, une feuille de route révisée, assortie d’actions prioritaires. Cette feuille de route consensuelle sera présentée au Comité de suivi de l’Accord à sa quarante-deuxième session, prévue pour le 19 janvier 2021.
Le Gouvernement de transition a plus d’une fois signalé l’importance qu’il accorde à la tenue des élections, dont le travail de préparation est déjà lancé. Cependant, a rappelé le Représentant spécial, le succès de la transition dépendra des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives, avec à la clef des élections inclusives et crédibles, et des résultats acceptés par la majorité des Maliennes et des Maliens. Quels que soient l’accompagnement et le soutien de la communauté internationale, il n’est viable que s’il est le produit de la volonté des acteurs politiques maliens, a souligné le Représentant spécial. À la tête de la MINUSMA depuis près de cinq ans, il a osé espérer, « au-delà de l’impatience et peut-être d’une certaine frustration », que cette fenêtre d’opportunité ne sera pas une nouvelle occasion manquée.
La France a salué un climat propice à des avancées dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix, avec la reprise des réunions du Comité de suivi de l’Accord et la participation au Gouvernement de membres des groupes armés signataires. Les parties ont convenu d’une feuille de route qui reprend les objectifs fixés en matière d’intégration des anciens rebelles dans les forces nationales, de réformes institutionnelles et de développement des régions du Nord, s’est félicitée la France, avant de préciser que le Conseil de sécurité attend des résultats concrets d’ici au renouvellement du mandat de la MINUSMA, en juin.
Concernant la stabilisation du centre du Mali, la France s’est dit encouragée par les premiers résultats en matière de lutte contre l’impunité, dont l’ouverture de procédures et la tenue d’audiences. En matière de lutte contre le terrorisme, un an après le Sommet de Pau, le bilan est globalement positif, a-t-elle estimé, en notant que de nombreux éléments terroristes, dont plusieurs cadres de haut rang, ont été neutralisés. La France a affirmé que la coordination entre Barkhane, les forces armées nationales et la Force conjointe du G5 Sahel s’est améliorée, grâce à la mise en place d’un poste de commandement conjoint à Niamey. Alors que l’année 2020 a été la plus meurtrière de la décennie au centre, la France a relevé que les dernières attaques, dont les soldats français ont malheureusement été victimes, montrent que les groupes terroristes conservent une capacité de nuisance.
Face à ce constat, elle a jugé que les actions en matière de sécurité doivent s’accompagner du retour des administrations et des services aux populations, afin de restaurer la confiance entre l’État, les collectivités locales et leurs administrés et de combattre l’emprise exercée par les terroristes. La France a salué les actions de l’Union européenne et de ses États membres dans la protection des acteurs humanitaires. En matière militaire, elle a salué l’internationalisation des efforts de ces derniers mois et la montée en puissance de la « Task Force Takuba ».
Les forces armées maliennes, a-t-elle pressé, doivent accélérer leur reconstruction tout en maintenant leur engagement opérationnel. Pour les y aider, la mission de l’Union européenne -EUTM Mali- vient d’étendre son champ d’action, a indiqué la France qui a aussi estimé que la Force conjointe du G5 Sahel mérite un soutien renforcé, notamment des Nations Unies. Tout en saluant l’appui apporté par la MINUSMA via le mécanisme tripartite, financé par l’Union européenne, elle a voulu que l’on aille plus loin. Il faut, a-t-elle conclu, un climat politique consensuel et apaisé, en gardant à l’esprit les objectifs de la transition, dont les élections de mars 2022.
L’Estonie a pris note des mesures qui ont été prises jusqu’à présent pendant la période de transition de 18 mois, notamment la formation du Gouvernement de transition et du Conseil national de transition. Il a salué le fait que les groupes armés signataires de l’Accord pour la paix y siègent pour la première fois, ce qui ouvre la voie à un processus politique plus inclusif. L’Estonie a appelé les autorités de transition à accélérer la mise en œuvre des réformes institutionnelles et a insisté sur une participation pleine, égale et significative des femmes au processus politique.
Après avoir félicité l’Union africaine et la CEDEAO pour leur soutien à la transition politique, l’Estonie a fait part de ses préoccupations face à la situation générale en matière de sécurité. Extrêmement alarmée par les attaques coordonnées des terroristes et des groupes armés contre les forces nationales et internationales, et les civils, l’Estonie a assuré qu’elle continuera de jouer son rôle dans la lutte contre le terrorisme, en contribuant à la MINUSMA, à la mission de formation de l’Union européenne, à l’opération Barkhane et à son groupement de forces Takuba.
Cependant, a-t-elle précisé, les efforts internationaux, y compris dans le cadre de la Coalition pour le Sahel, ne sont là que pour soutenir les autorités maliennes. Une présence de l’État stable, durable et adéquate dans tout le pays dépendra d’une volonté politique « claire » et d’une pleine coopération avec toutes les parties maliennes. Il incombe aux parties de s’approprier le processus politique et de prendre des mesures concrètes pour mettre en œuvre l’Accord d’Alger. Il est plus important que jamais, a conclu l’Estonie, de briser le cycle de l’impunité et de veiller à ce que tous les auteurs de violations et d’abus des droits de l’homme et du droit international humanitaire soient traduits en justice. La réconciliation et le rétablissement de la confiance dans la société sont le seul moyen de parvenir à une paix durable.
Estimant que la situation au Mali est « difficile », la Fédération de Russie a demandé aux autorités de transition de prendre les mesures nécessaires pour rétablir l’ordre constitutionnel et engager le dialogue avec toutes les parties prenantes maliennes qui doivent faire partie du Gouvernement. Il s’agit d’une étape importante vers la réconciliation nationale, a dit la délégation qui a aussi demandé aux autorités nationales de respecter les délais fixés pour la période de transition qui doit être suivie par les élections législatives et présidentielle. Réaffirmant son attachement à l’Accord pour la paix d’Alger, la Fédération de Russie a appelé à la poursuite du dialogue « constructif » avec les groupes signataires et de la réforme des secteurs de la sécurité et de l’administration publique, laquelle doit tenir compte des intérêts de tous les Maliens, en particulier ceux des territoires du Nord.
La Fédération de Russie a dit craindre que les groupes terroristes se sentent plus confiants que jamais face aux difficultés actuelles, dont la situation humanitaire « très préoccupante ». Elle a réitéré son appui à l’Union africaine et à la CEDEAO et a dit compter sur la pleine participation des forces armées maliennes aux opérations de la Force conjointe du G5 Sahel. La Fédération de Russie a aussi soutenu l’idée de la Commission de paix et de sécurité de l’Union africaine de déployer une force permanente dans la région du Sahel. La responsabilité première s’agissant de la protection des civils, du contrôle des régions du Nord, des solutions aux problèmes socioéconomiques et autres incombent aux Maliens eux-mêmes, a souligné la Fédération de Russie.
L’Inde a dit de ne pas perdre de vue le fait que les germes de la crise au Mali ont été semés par le conflit libyen en 2011. Ainsi, le retour des combattants dans le nord du Mali et la prolifération des armes hors de Libye ont contribué à la rébellion touarègue dans le nord du Mali, menant au renversement du gouvernement civil en 2012 pour cause de mauvaise gouvernance. La MINUSMA est dotée d’un mandat énorme et le manque de ressources adéquates affecte son fonctionnement, a tranché l’Inde.
Elle a estimé que les développements politiques de ces trois derniers mois suscitent « un optimisme prudent ». Des progrès rapides dans les réformes institutionnelles, politiques et électorales sont nécessaires pour atteindre l’objectif « ambitieux » de la tenue des élections à la fin de la période de transition de 18 mois. Le rétablissement de la présence de l’État dans tout le territoire est « fondamental » pour la paix et la stabilité, a poursuivi l’Inde. Elle a appelé la communauté internationale à soutenir le Mali et à fournir à la MINUSMA les ressources dont elle a besoin. L’Inde a d’ailleurs dit son intention de répondre favorablement à la proposition du Secrétaire général de déployer des moyens aériens à la MINUSMA. Elle a conclu en prévenant que la menace terroriste ne peut être combattue par le Mali seul ou un autre État de la région du Sahel. La Force conjointe du G5 Sahel a donc besoin d’un soutien « plus solide » de la part du Conseil de sécurité et de la communauté internationale.
Au nom des A3+1 (Kenya, Niger, Tunisie et Saint-Vincent-et-les Grenadines), le Niger a dit que quatre mois après l’installation des autorités de la transition, il n’est pas exagéré de dire qu’elles ont œuvré avec succès à l’amélioration du climat politique. En cette phase « cruciale » de la transition, le Mali a besoin du soutien de tous pour rendre les avancées irréversibles et garantir des élections libres, transparentes et inclusives. Le Niger a espéré que le Sommet de la CEDEAO, prévu à Abuja, au mois de février, se penchera sur l’accompagnement de la transition au Mali. Dans ce cadre, la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent doit rester la priorité, non seulement pour le Mali mais pour toute l’Afrique. Le Niger a dit compter sur le soutien du Conseil de sécurité pour que les progrès engrangés ne soient pas perdus, au profit des extrémistes. Il est donc important que la Force conjointe du G5 Sahel reçoive l’appui adéquat, y compris l’appui financier.
Le Niger a ajouté que l’armée doit devenir un acteur majeur de développement et par conséquent, les formations qu’elle et les anciens combattants intégrés reçoivent doivent aller au-delà du seul aspect sécuritaire et couvrir le génie civil, l’agriculture et l’élevage. Le Niger s’est dit profondément préoccupé par la situation humanitaire qui a été exacerbée par la pandémie de COVID-19. Il a plaidé pour une aide humanitaire sans entrave et répété qu’il faut accorder une plus grande attention au phénomène « déstabilisateur » des conflits intercommunautaires et songer à la mise sur pied d’un projet commun G5 Sahel/ONU, en vue d’endiguer les causes profondes de ces conflits et prévenir leur récurrence.
Le Niger a souligné la nature asymétrique des attaques terroristes, y compris celles qui viennent d’être menées sur son propre territoire et au Nigéria, impose une vigilance accrue et permanente et une réadaptation des stratégies d’intervention dans le Sahel. Le prochain renouvellement du mandat de la MINUSMA doit être l’occasion de supprimer la tâche de soutien à la Force conjointe du G5 Sahel pour laisser la Mission se focaliser sur ses priorités stratégiques. L’on pourrait, par conséquent, songer à créer un bureau d’appui des Nations Unies à la Force.
Le Mexique a estimé que la « seule alternative viable » pour avancer vers la réconciliation nationale est l’application de la Charte de la transition. Il est important que le Mali se dote des institutions nécessaires à l’organisation des élections dans les délais convenus et qu’il puisse compter sur le soutien du Conseil de sécurité et de la communauté internationale. Compte tenu de la fragilité de la situation actuelle, la MINUSMA doit exercer ses bons offices pour assurer un processus de transition inclusif et dénué de tensions entre les acteurs politiques. Le Mexique a qualifié d’essentielle la collaboration de la Mission avec des organisations régionales telles que l’Union africaine et la CEDEAO.
Le Mexique a regretté que les femmes n’aient toujours pas atteint le quota de 30% au Comité de suivi de l’Accord pour la paix. Il a demandé que le Secrétaire général fournisse dans ses prochains rapports des informations sur la place réelle des femmes dans le processus de paix et la vie politique. Il a aussi demandé aux autorités nationales d’enquêter et de punir le crime « inadmissible » qu’est le recrutement d’enfants par les groupes armés. L’accès à la justice est essentiel pour faciliter la réconciliation nationale, a insisté le Mexique, appelant la communauté internationale à soutenir la consolidation des institutions judiciaires et exhortant les autorités nationales à respecter l’indépendance desdites institutions.
En tant que Président du Comité des sanctions contre le Mali, le Mexique a dit vouloir maintenir une étroite collaboration avec tous les membres du Conseil et un dialogue permanent avec les organisations régionales et les pays voisins du Mali. Le régime de sanctions est là pour soutenir le processus politique. Ce n’est pas une simple question administrative sans objectif précis.
La Chine a estimé que la situation au Mali a connu des progrès, dont la mise en place du Gouvernement de transition. Pour consolider ces avancées, elle a insisté sur le consensus électoral, le déploiement des forces armées maliennes sur tout le territoire et le développement des régions du Nord. La Chine a aussi souligné l’importance de la coordination entre l’ONU et les partenaires internationaux du Mali et encouragé le Gouvernement de transition à livrer une lutte « sans merci ni complaisance » contre le terrorisme, y compris par la traduction en justice des terroristes. Notant que la pandémie de COVID-19 a empiré la situation humanitaire, la Chine a rappelé au Gouvernement sa responsabilité de promouvoir le développement, la paix et la sécurité, avec l’aide technique et financière de la communauté internationale, dont l’assistance chinoise.
Le Viet Nam a estimé que l’établissement du Gouvernement et des institutions de transition constitue une étape importante pour la suite des travaux prévus en 2021. La présence dans le Gouvernement des mouvements signataires de l’Accord pour la paix de 2015 est une chance qui doit être exploitée pour faire avancer le processus de paix. Le Viet Nam a souscrit à l’appel en faveur d’un processus de transition pacifique et inclusif pour lancer les réformes institutionnelles et électorales. Il a insisté sur une participation accrue et significative des femmes au processus politique.
Le Viet Nam a reconnu que la situation sécuritaire au Mali reste préoccupante et a appelé les parties concernées et les signataires de l’Accord pour la paix à répondre à l’appel du Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu mondial. Il a félicité la MINUSMA pour ses efforts visant à promouvoir la présence de l’autorité de l’État dans le nord et le centre du Mali, ainsi que les opérations antiterroristes de la Force conjointe du G5 Sahel. Le Viet Nam a marqué s’est aussi dit préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire et à l’aggravation de la violence sexuelle, des abus liés à l’extrémisme violent, du terrorisme, du recrutement d’enfants, de l’insécurité alimentaire et de la criminalité organisée.
Il a ajouté à ces fléaux la pandémie de COVID-19, la violence intercommunautaire et les effets néfastes des changements climatiques. Il s’est donc associé à l’appel que le Secrétaire général a lancé aux donateurs pour qu’ils fournissent un appui adéquat. Il faut, a conclu le Viet Nam, une approche cohérente et intégrée englobant les défis sécuritaires, humanitaires, sociaux et de développement.
Le Royaume-Uni a réitéré son appel aux parties maliennes pour qu’ils respectent l’Accord pour la paix sans tarder, avec le leadership du Gouvernement de transition. Il s’est dit préoccupé par les violations des droits de l’homme, dont la violence fondée sur le sexe et le recrutement d’enfants par les groupes armés. Il a appelé le Gouvernement à enquêter en toute transparence sur ces allégations, y compris celles répertoriées dans le dernier rapport de la MINUSMA. Le Royaume-Uni a encouragé la coopération entre les forces armées maliennes et régionales dans la surveillance des violations des droits de l’homme. Il a exhorté les autorités de transition à faire en sorte que ces droits et le principe du procès équitable soient respectés, dans le cadre de l’état d’urgence et les dernières arrestations d’acteurs politiques et de journalistes.
La mise en œuvre de l’Accord pour la paix dépend de toutes les parties qui doivent s’approprier le processus, a insisté le représentant. L’inclusivité est nécessaire pour dégager un consensus autour des réformes « difficiles mais nécessaires » et des solutions aux problèmes sociaux. Le Royaume-Uni a insisté sur la lutte contre l’impunité et l’organisation des élections.
Pour l’Irlande, la présence de la MINUSMA reste indispensable au Mali compte tenu du niveau de violence « extrêmement préoccupant ». Il est donc impératif que la Mission ait les capacités et les ressources dont elle a besoin pour remplir son mandat. Saluant l’application du plan d’adaptation de la MINUSMA, l’Irlande a dit soutenir l’objectif de protéger les civils « de façon proactive ». Elle a salué les progrès réalisés dans la mise en place d’un gouvernement et des institutions de transition, ainsi que le leadership démontré par la CEDEAO et l’UA. Elle a appelé tous les Maliens à œuvrer pour le succès de la transition et pour le retour à l’ordre constitutionnel. Le Gouvernement doit assurer la tenue d’élections inclusives, transparentes, libres et crédibles dans les 18 mois, a martelé l’Irlande.
Parmi les domaines dans lesquels les progrès sont à la fois nécessaires et possibles, la délégation a mentionné l’application de l’Accord pour la paix, saluant au passage la participation au Gouvernement de transition de représentants de la société civile et, pour la première fois, de quatre représentants de mouvements signataires. À cet égard, a souligné l’Irlande, le soutien continu de la MINUSMA à la médiation et à la réconciliation est « vital ». L’Irlande a plaidé pour une participation renforcée des femmes à la transition politique, en tant qu’électrices, candidates et représentantes de leurs communautés. En tant que coprésidente du groupe « femmes, paix et sécurité », avec le Mexique, l’Irlande a dit suivre de près cette question.
La solution au Mali, a-t-elle conclu, n’est pas que sécuritaire. Elle requiert une réponse aux causes profondes de l’instabilité. Travailler ensemble pour soutenir un développement inclusif doit être au cœur de tous nos efforts, tout comme la promotion de la bonne gouvernance, le respect des droits de l’homme, le renforcement des institutions démocratiques et le rétablissement de l’autorité de l’État. À cet égard, le soutien de la MINUSMA aux forces de sécurité maliennes et aux autorités judiciaires « crucial ».
La Norvège a souligné trois défis principaux et d’abord l’importance de parvenir à un processus politique inclusif garantissant la participation des femmes. Elle a salué la présence de neuf femmes au Comité de suivi de l’Accord, jugeant leur contribution « cruciale » pour les discussions sur le programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR), les réformes, l’éducation, le développement, la réconciliation et la justice. En deuxième lieu, la Norvège a cité la protection des civils, y compris les enfants. Elle a indiqué qu’elle a déployé une équipe de police spécialisée à la MINUSMA pour aider le Mali à renforcer ses capacités dans la lutte contre l’impunité. Préoccupée par les informations sur les violations graves des droits de l’enfant, dont le recrutement forcé et la violence sexuelle et sexiste, la Norvège a appelé les autorités maliennes, avec l’aide de partenaires, dont la MINUSMA, à suivre les recommandations de la Commission internationale d’enquête pour le Mali.
S’agissant du troisième défi, elle a estimé qu’au-delà de la lutte contre les groupes armés, le retour rapide de l’autorité de l’État et des services de base dans tout le pays est « essentiel ». Elle a aussi demandé à toutes les parties prenantes de faciliter l’accès humanitaire et de renforcer la coordination entre les civils et les militaires. La Norvège a également mis l’accent sur l’adaptation aux effets des changements climatiques et de favoriser le dialogue et la réconciliation entre toutes les parties prenantes, en s’attaquant aux causes profondes des tensions. Elle n’a pas manqué de présenter ses condoléances à la France, qui a récemment perdu cinq soldats au combat contre le terrorisme au Mali. Elle a en outre félicité le Représentant spécial du Secrétaire général, la CEDEAO et l’UA pour le rôle clef qu’ils continuent de jouer après le dernier coup d’État.
Les États-Unis ont commencé par condamner les attaques récentes au Mali et par présenter leurs condoléances aux familles des victimes, en parlant des attaques au Niger et contre des militaires français au Mali. Notant que le Gouvernement de transition au Mali a une fenêtre d’opportunité pour jeter les bases d’un pays plus sûr, plus prospère et plus démocratique, les États-Unis ont salué les mesures qu’il a prises pour honorer ses engagements et aller de l’avant. Ils ont dit soutenir le programme de réformes annoncé, en novembre dernier. Ils ont exhorté le Gouvernement à mettre l’accent sur les questions prioritaires, d’ici à avril 2022, dont l’organisation d’élections libres, justes, transparentes, inclusives et crédibles, selon le calendrier fixé, la lutte contre l’impunité et la corruption, la promotion des droits de l’homme et de la bonne gouvernance, notamment par la fourniture de services sociaux de base dans le nord du pays, tel que stipulé dans l’Accord d’Alger.
Les États-Unis ont encouragé le Gouvernement de transition à nommer des autorités compétentes et indépendantes pour gérer les scrutins électoraux, en veillant à la pleine participation des femmes. Ils ont salué l’engagement public du Président de transition à améliorer le bilan des droits de l’homme des forces de défense maliennes et pris note de l’interdiction stricte qui frappe désormais le recrutement des enfants de moins de 15 ans. Ils ont aussi salué le fait que les femmes ont participé, en grand nombre, à la première réunion du Comité de suivi, tout en plaidant pour une participation renforcée. En tant que plus grand donateur humanitaire de la région du Sahel, les États-Unis ont promis de rester un partenaire « indéfectible » du peuple malien et ont espéré que dans les mois à venir, le pays engrangera des progrès « tangibles » dans la réalisation des objectifs de l’Accord d’Alger.
Le Mali a déclaré que la période examinée a été marquée par le parachèvement de la mise en place des organes de la transition, avec l’installation du Conseil national de transition (CNT), composé de 121 membres issus de l’ensemble des forces vives de la nation. Il a précisé que le CNT va jouer un rôle de premier plan dans l’examen et l’adoption des réformes politiques et institutionnelles nécessaires à la refondation de l’État malien. Il a précisé que la reprise des travaux du Comité de suivi de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix, après plusieurs mois de suspension en lien avec la situation sociopolitique agitée du pays, a marqué une étape majeure de la relance du processus de paix.
Le Mali a précisé que le Premier Ministre, Moctar Ouane, a présidé, le 16 novembre 2020, la cérémonie d’ouverture de la quarante et unième session du Comité de suivi à Bamako et a saisi cette occasion pour appeler à la redynamisation du processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR); l’accélération des réformes politiques et institutionnelles; le soutien aux actions de développement; et la relance du chantier de la réconciliation nationale. À la suite de cette importante réunion, les consultations intermaliennes se sont poursuivies pour aboutir à la signature, le 18 décembre 2020, de la Feuille de route actualisée des actions prioritaires de la mise en œuvre de l’Accord d’Alger, s’est félicité le Mali, avant de préciser que cette feuille de route fixe à juin 2021 l’échéance du processus de révision de la Constitution, en conformité avec les dispositions de l’Accord et avec l’implication des mouvements signataires.
Au titre des questions de défense et de sécurité, les parties maliennes ont convenu, dans la nouvelle Feuille de route, de tenir, au courant de ce mois de janvier 2021, une rencontre de niveau décisionnel pour avoir une compréhension commune du concept des « forces de défense et de sécurité reconstituées », ainsi que les modalités de sa mise en œuvre. Cette réunion vise à régler définitivement la question des quotas civil et militaire, de la chaîne de commandement, des inaptes et des combattants anciennement membres des Forces de défense et de sécurité maliennes.
Le Mali a indiqué que le Gouvernement va organiser en février 2021 une table ronde avec la participation des partenaires pour le financement de la Stratégie spécifique de développement des régions du nord du Mali. Il a aussi indiqué que la Commission vérité, justice et réconciliation, après avoir collecté plus de 19 000 dépositions de victimes, a tenu, le 5 décembre dernier, sa deuxième audience publique au cours de laquelle 12 survivants d’atrocités ont témoigné.
Mon gouvernement, a poursuivi le Mali, est conscient de la nécessité de poursuivre et d’intensifier les efforts pour accélérer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix, de manière à permettre au peuple malien dans son ensemble de jouir pleinement des dividendes de la paix. Le Gouvernement est conscient de la complexité de la situation au centre du Mali et en plus de la solution militaire, il s’attelle à trouver des réponses politiques, avec l’implication des notabilités traditionnelles, en vue d’établir un cadre d’échange et de dialogue entre les différentes communautés et renforcer le dispositif de sécurité pour protéger les populations et leurs biens.
S’agissant de la situation des droits de l’homme, le Mali a dit la détermination de son gouvernement à faire respecter ces droits et à lutter contre l’impunité, citant l’ouverture des enquêtes sur les attaques commises dans le village de Gouari et dans le cercle de Bankass, en juillet 2020, ayant entraîné la mort de personnes civiles et militaires, ainsi que l’ouverture des audiences de la Cour d’assise de Mopti. Il a aussi cité les premières audiences du tribunal militaire de la région de Mopti qui a condamné huit soldats. Le Mali a appuyé le principe selon lequel la lutte contre le terrorisme ne peut justifier des violations graves des droits de l’homme et des crimes de guerre, y compris par les Forces de défense et de sécurité.
La dimension régionale de l’instabilité reste une source de grande préoccupation, a conclu le Mali. L’attaque « particulièrement meurtrière » de deux villages nigériens, le 2 janvier 2020, près des frontières malienne et burkinabè, a rappelé la pertinence du G5 Sahel et de sa Force conjointe. Le G5 Sahel, à travers ses deux piliers sécurité et développement, constitue une réponse « adéquate et durable » aux multiples défis de cet espace commun, a estimé le Mali. Notre processus de stabilisation durable est à un point critique et sa réussite dépend tout d’abord de l’union sacrée des forces vives maliennes mais aussi de la qualité du soutien international à la sortie de crise, a-t-il souligné.